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Le processus d'acculturation chez les familles issues de l'immigration ayant un jeune sous la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents (LSJPA)

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Academic year: 2021

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MÉMOIRE PRÉSENTÉ À

L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À TROIS-RIVIÈRES

COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN PSYCHOÉDUCA TION

PAR

MARIANNE PLAMONDON

LE PROCESSUS D'ACCULTURATION CHEZ LES FAMILLES ISSUES DE L'IMMIGRATION AYANT UN JEUNE SOUS LA LOI SUR LE SYSTÈME DE

JUSTICE PÉNALE POUR ADOLESCENTS (LSJP A)

(2)

Université du Québec à Trois-Rivières

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réadaptation pour les jeunes en difficulté d'adaptation (CR) du Centre jeunesse de Montréal - Institut universitaire (CJM-IU), maintenant connu sous le nom de CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal. La majorité des recherches, actuelles et passées, identifient l'environnement du jeune comme l'un des facteurs influençant l'adoption de comportements délinquants par ce dernier. Les parents immigrants peuvent vivre de multiples obstacles à leur intégration qui peuvent entraîner des difficultés d'adaptation pouvant nuire à l'encadrement parental offert à leur enfant. Bien qu'ils immigrent dans un nouveau pays, les parents souhaitent transmettre les valeurs de leur pays d'origine à leur enfant et le voir s'y conformer. Or l'enfant s'intègre souvent plus rapidement que son parent à la société d'accueil, ce qui peut créer des conflits. Lorsque l'encadrement parental est déficitaire, l'enfant peut profiter d'une plus grande liberté et, dans ce contexte, il risque de s'associer avec des pairs délinquants. Cette association peut amener le jeune à commettre des délits afin d'éviter de se voir rejeté par le groupe. Le modèle de Berry (1997) permet d'expliquer comment les jeunes contrevenants et leur famille vivent leur processus d'acculturation. L'auteur propose un processus biculturel qui implique à la fois la culture d'origine et la culture d'accueil de la personne. Actuellement, plusieurs études portant sur le lien entre ce processus et la délinquance sont quantitatives et elles ne portent pas sur une clientèle en CR. Cette lacune dans les connaissances risque de nuire au travail des intervenants œuvrant auprès de cette

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culturelles. C'est la raIson pour laquelle le présent mémoire, optant pour une méthodologie qualitative, vise à comprendre le processus d'acculturation vécu par les jeunes contrevenants issus de l'immigration et leurs familles à partir d'entrevues réalisées auprès de huit jeunes et de sept parents. L'analyse thématique a permis d'examiner en profondeur les entrevues réalisées avec les participants, de relever les idées convergentes et divergentes de même que celles revenant le plus souvent. Les résultats montrent que les parents parviennent généralement à concilier leurs deux cultures ou sont fortement orientés vers leur culture d'origine. Les jeunes, quant à eux, sont ambivalents quant à la place qu'ils accordent à leurs deux cultures dans leur vie. Le modèle de Berry (1997) est partiellement supporté dans l'étude. La délinquance des jeunes contrevenants n'est pas seulement attribuable à la place accordée par les jeunes à leurs deux cultures. Il faut également tenir compte des difficultés d'adaptation des familles à la société d'accueil. Enfin, l'étude prouve la pertinence de l'utilisation du processus d'acculturation dans le domaine de la psychoéducation, autant en intervention qu'en recherche auprès de l'ensemble de la clientèle immigrante.

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Introduction ... 1

Problématique ... 5

Les adolescents délinquants au Québec et au Canada ... 6

Les adolescents délinquants en France et aux États-Unis ... 8

La génération d'immigration des jeunes délinquants ... 11

La période de l'adolescence ... 12

Le lien entre l'immigration et la délinquance ... 13

La réalité des familles immigrantes dans le pays d'accueil ... 14

L'influence de la famille sur l'adoption de comportements délinquants par le jeune ... 15

L'influence des pairs sur l'adoption de comportements délinquants par le jeune ... 16

L'influence de l'acculturation sur l'adoption de comportements délinquants par le jeune ... 17

Le manque de connaissance au sujet du lien entre l'acculturation chez les jeunes issus de l'immigration et la délinquance ... 18

Cadre théorique ... 21

L'historique de la définition du processus d'acculturation ... 23

Les phases du processus d'acculturation selon Berry ... 25

Le précontact ... 25

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Les réactions de la personne immigrante face au contact ... 28

Le choc culturel ... 29

Le stress acculturatif ... 30

Le conflit culturel ... 31

La crise ... 31

L'adaptation des familles et des jeunes issus de l'immigration ... 32

L'intégration ... 33

Les conséquences de l'utilisation de l'intégration ... 34

La séparation ... 36

Les conséquences de l'utilisation de la séparation ... 36

L'assimilation ... 37

Les conséquences de l'utilisation de l'assimilation ... 38

L'effet protecteur de l'assimilation ... 39

La marginalisation ... 39

Les conséquences de l'utilisation de la marginalisation ... .40

Les stratégies pour faire face au processus d'acculturation et l'adaptation des familles et des jeunes contrevenants issus de l'immigration ... .41

L'écart d'acculturation dans la relation parent-enfant ... .42

Les conflits culturels et intergénérationnels ... .43

Les difficultés en lien avec l'encadrement parental ... .44

La parentification ... 44

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La méthodologie qualitative ...... 48

L'échantillon du mémoire ...... 49

La méthode d'échantillonnage ... 49

Caractéristiques des répondants ... 51

Les parents issus de l'immigration ...... 51

Les jeunes contrevenants issus de l'immigration ...... 51

La méthode de collecte de données ...... 52

L'entretien semi-dirigé en profondeur ... 53

Le déroulement des entretiens auprès des parents et des jeunes .......... 54

Les thèmes et sous-thèmes relatifs à la trajectoire migratoire ... ......... 56

Les thèmes et sous-thèmes relatifs au vécu délinquant du jeune/du fils ........... 56

Le processus d'analyse des données ...... 56

Résultats ...... 58

Les perceptions des familles et des jeunes contrevenants issus de l'immigration au sujet de leurs valeurs culturelles d'origine ... 60

L'importance de la religion ....... 60

L'importance du respect de la hiérarchie .............. 63

L'importance de la famille et de la communauté ....... 65

L'importance de la réussite ...... ... 66

Les défis dans la trajectoire migratoire des familles et des jeunes contrevenants issus de l'immigration ...... ................................. 68

(8)

Le choc culturel avec les valeurs de la culture québécoise ... 70

Les problèmes d'adaptation à la société d'accueil ... 72

L'apprentissage du français par les parents ... 72

Les conditions socioéconomiques précaires vécues par les familles ... 73

La discrimination vécue par les jeunes et les parents ... : ... 74

Les stratégies afin de s'adapter au processus d'acculturation utilisées par les familles et les jeunes ... 76

L'intégration ... 76

La séparation ... 78

L'assimilation ... 79

La marginalisation ... 80

Les stratégies d'acculturation les plus utilisées par les participants ... 82

L'écart d'acculturation entre les différents membres de la famille ... 83

Les réactions des parents face à l'écart d'acculturation ... 85

La double vie des jeunes ... 86

L'adaptation à la société d'accueil des familles et des jeunes contrevenants issus de l'immigration ... 87

Discussion ... 89

Les perceptions des familles et des jeunes issus de l'immigration au sujet de leurs valeurs culturelles d'origine ... 90

L'importance de la religion ... 90

L'importance de la famille et de la communauté ... 92

(9)

La transmission des valeurs culturelles d'origine dans la relation parent-enfant .. 95

Les défis dans la trajectoire migratoire des parents et des . . dl'· . . Jeunes ISSUS e ImmIgratIon ... 97

Le pré contact ... 97

Le contact ... 98

Le choc culturel avec les valeurs de la culture québécoise ... 99

Les problèmes d'adaptation à la société d'accueil ... 100

L'apprentissage du français ... : ... 100

La discrimination vécue par les parents et les jeunes ... 102

Les conditions socioéconorniques précaires vécues par les familles ... 103

Les stratégies utilisées par les familles et les jeunes issus de l'immigration afin de s'adapter au processus d'acculturation ... 104

L'intégration ... 104

La séparation ... 107

L'assimilation ... 109

La margina1isation ... 110

L'application du modèle de Berry pour comprendre la situation des familles et des jeunes de l'échantillon ... 112

L'écart d'acculturation entre les différents membres de la famille ... 114

La parentification ... 115

Les méthodes disciplinaires rigides ... 116

La double vie des jeunes ... 117

(10)

Les implications scientifiques ... 125

Les recommandations pour les recherches futures ...... 127

Les limites de l'étude ... 127

Conclusion ..... 129

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d'immigrante. Nos années de collaboration m'ont fait grandir personnellement et professionnellement. Je te remercie de m'avoir permis de travailler sur un projet portant sur les familles immigrantes, ce que je désirais faire depuis le début de mes études universitaires.

Un merci particulier à Marc Alain pour ton soutien, tes encouragements, ton écoute et ton accompagnement depuis le début de mes études universitaires. Merci aussi de m'avoir permis de travailler en tant qu'assistante de recherche durant ma maîtrise.

Merci à mes proches qui ont toujours cru en moi et épaulée durant ma maîtrise. Plus particulièrement, merci à mes parents, Linda et Marc, pour votre soutien depuis le début de mes études postsecondaires. Merci pour votre appui financier et affectif. Merci de m'avoir toujours poussée à réaliser mes rêves, de m'avoir corrigée d'innombrables fois et d'avoir été là quand j'avais besoin de parler. Merci à ma belle-famille pour votre écoute, votre présence et votre soutien. Un merci tout particulier à mon conjoint, Nicolas, pour ta présence, ta compréhension et ta disponibilité. Merci à mes amies, en particulier Johanie, Marie-Michèle et Sonia, pour votre soutien moral, vos encouragements et les moments de détente.

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bourses offertes. Vous m'avez permis de me consacrer à temps plein à mon mémoire et de diffuser les résultats de ma recherche.

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(CJM-IU). En 2014, les jeunes issus de l'immigration sous la responsabilité de la LSJPA représentaient 82,16 % de la clientèle des unités de garde ouverte et fermée. Ce taux constitue une hausse comparativement à 2012, où il était de 74 % (Jimenez, 2015). La littérature actuelle fournit certaines pistes d'explication à la surreprésentation des jeunes issus de l'immigration au sein des jeunes contrevenants (Jimenez, 2013, 2015; Mucchielli, 2006), notamment par l'étude du lien entre la délinquance et l'immigration. Certains auteurs affirment à ce sujet que les conditions de vie difficiles des personnes immigrantes peuvent expliquer partiellement l'adoption de comportements délinquants par les jeunes (Ouimet, 2009). Cependant, la présente étude s'intéresse plutôt au lien entre l'immigration et la délinquance par le processus d'acculturation à travers lequel les adolescents peuvent vivre un conflit culturel. En effet, ce travail a pour objectif d'analyser le postulat selon lequel la difficulté pour les jeunes de trouver leur place entre la culture d'origine de leurs parents et celle du pays d'accueil peut les amener à vivre des problèmes d'adaptation, dont la délinquance (Legault & Fronteau, 2008; Organisation mondiale de la santé [OMS], 2016).

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s'intéressant au lien entre l'immigration et la délinquance par le biais du processus d'acculturation utilisent une approche quantitative. Ces recherches, bien qu'utiles, ne permettent généralement pas de comprendre le processus d'acculturation à partir de l'expérience subjective des personnes qui le vivent. En outre, elles se déroulent principalement dans un contexte hors Québec et peu d'entre elles portent sur l'intervention auprès d'une clientèle adolescente contrevenante en CR. Or le contexte social dans lequel prend place le processus d'acculturation constitue une variable importante à considérer pour comprendre l'adaptation de la personne (Cohen-Émerique, 1993).

L'étude de Jimenez (2015) conclut que les intervenants ressentent le besoin d'être mieux outillés afin de pouvoir bien accompagner les jeunes contrevenants issus de l'immigration et leurs familles. De plus, la littérature repérée n'a pas permis à l'étudiante de connaître la façon adéquate de réaliser une intervention auprès des jeunes contrevenants en CR en tenant compte de leur processus d'acculturation. Le mémoire permettra, à la suite de la compréhension de leur processus d'acculturation, de sensibiliser les intervenants à celui-ci et de leur fournir des pistes d'intervention.

Le premier chapitre décrit l'ampleur du phénomène de la délinquance chez les adolescents immigrants au Québec et ailleurs. Le deuxième chapitre est constitué du cadre théorique qui présente entre autres le concept de l'acculturation et le modèle

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stratégies d'acculturation utilisées par le jeune contrevenant sont présentées. L'écart d'acculturation et ses conséquences potentielles sur la relation parent-enfant terminent ce chapitre. Le troisième chapitre expose la méthodologie utilisée pour analyser les données. Ainsi, les objectifs de recherche, la méthodologie qualitative choisie, l'échantillon, la méthode de collecte de données, le déroulement des entretiens et le processus d'analyse des données sont exposés. Le quatrième chapitre fait état des résultats du travail d'analyse. Cette dernière met en lumière les idées convergentes, divergentes et celles les plus fréquemment rapportées. Le cinquième chapitre, la discussion, permet de comparer les résultats de l'étude avec la littérature existante. Le sixième et dernier chapitre, la conclusion, présente un retour sur l'ensemble du projet et expose les implications cliniques et pratiques de la présente recherche.

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12 à 17 ans ont été présumés d'infractions au Code criminel, selon les déclarations effectuées par la police (Allen & Superle, 2016). Le taux de jeunes présumés d'infractions comprend les jeunes ayant été inculpés ou contre lesquels les policiers ont suggéré de porter des accusations et les jeunes ayant été détournés du système de justice pénale au moyen de mesures extrajudiciaires. Les mesures extrajudiciaires utilisées par un policier ne requièrent pas l'intervention d'un tribunal (Gouvernement du Québec, 2015). Elles comprennent, entre autres, l'avertissement, la mise en garde, le renvoi à un programme communautaire, etc. Ces mesures visent à responsabiliser l'adolescent sans recourir à une procédure judiciaire officielle (Ministère de la Justice, 2015). Le chiffre noir de la criminalité biaise également les statistiques sur la délinquance des jeunes. Il correspond aux crimes qui ne sont pas connus du système de justice pénale. Cela fait en sorte qu'il est impossible de connaître le taux réel de jeunes qui commettent un délit (Wallace, Turner, Matarazzo, & Babyak, 2009).

Au Canada, lorsqu'un jeune se fait prendre à commettre un délit, il est soumis à la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents (LSJP A). En vertu de cette loi, les adolescents sont considérés comme délinquants lorsqu'ils commettent au moins une

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règle, un ordre, un décret, un arrêté, un règlement administratif ou une ordonnance. La LSJPA sanctionne les jeunes âgés de 12 à 17 ans en tenant compte de la différence entre le développement moral des adolescents contrevenants et celui des adultes. La Loi se fonde d'ailleurs sur le principe de culpabilité morale moins élevée des adolescents par rapport à celle des adultes. Elle vise la réadaptation des jeunes, leur réinsertion dans la société, l'imposition de peines proportionnelles à la gravité du délit et la prévention du crime. En ce qui a trait aux peines imposées par le tribunal, le jeune peut faire l'objet d'une réprimande, profiter d'une absolution inconditionnelle, verser une somme au profit d'un individu, restituer des biens, réaliser un travail bénévole, etc. La peine la plus grave constitue l'ordonnance de placement et de surveillance. Elle s'applique aux jeunes ayant commis une infraction avec violence, à ceux n'ayant pas respecté les peines imposées antérieurement qui ne comprennent pas de placement sous garde, à ceux ayant commis un crime pour lequel un adulte pourrait être emprisonné et, finalement, aux jeunes ayant fait l'objet de plusieurs impositions de peines extrajudiciaires ou déclarations de culpabilité. Lors d'une ordonnance de placement et de surveillance, les jeunes se retrouvent en mise sous garde en CR selon deux types de garde, ouverte ou fermée. Celles-ci se distinguent par le degré d'encadrement du milieu (Ministère de la Justice, 2002a).

En 2014, l'ensemble de la clientèle immigrante du CJM-IU hébergée en CR, que ce soit en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse (LP J) ou de la LSJPA, était

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d'adolescents issus de l'immigration et hébergés en vertu de la LSJPA ont été nettement

plus élevés. En 2014, selon l'unité, ils ont varié de 71 % à 89 % pour les unités de garde

fermée et de 71 % à 100 % pour les unités de garde ouverte (Jimenez, 2015). Ces

données incluent les jeunes nés hors du pays, soit ceux de première génération (Mc

Andrew, Bakhshaei, & Ledent, 2013; Statistique Canada, 2006, 2010, 2013a), les jeunes

de deuxième génération nés au Canada ayant au moins un de leurs parents né à

l'extérieur du Canada (Hamilton, Noh, & Adlaf, 2009; Statistique Canada, 2013b) et les

jeunes de troisième génération, dont au moins un de leurs grands-parents est né à

l'étranger (Statistique Canada, 2013a). La proportion de ces jeunes issus de

l'immigration en CR semble en hausse constante, puisqu'en 2012, elle était de 74 %,

comparativement à 82,16 % en 2014 (Jimenez, 2015). Cependant, ces données ne

permettent pas de tenir compte de l'origine ethnique des jeunes. Les données illustrent

que les jeunes issus de l'immigration correspondent à une très grande majorité des

jeunes en mise sous garde dans les CR à Montréal alors que les jeunes Québécois représentent une forte minorité.

Les adolescents délinquants en France et aux États-Unis

Sur le territoire montréalais, la surreprésentation des jeunes ISSUS de

l'immigration mis sous garde en vertu de la LSJP A et hébergés en CR montre une

tendance différente de celle qui est observée ailleurs dans le monde. En France, par

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parents sont nés en France a commis l'ensemble des délits, 20 % l'ont été par des jeunes d'origine mixte, c'est-à-dire des jeunes dont l'un des parents est originaire de France et

l'autre est d'origine étrangère et, enfm, 32 % ont été perpétrés par des jeunes dont les deux parents sont nés hors de France. Les types de délits commis permettent toutefois de constater que les résultats diffèrent. En effet, les jeunes d'origine nord-africaine sont surreprésentés seulement parmi les jeunes arrêtés pour des délits majeurs. Les crimes

majeurs comprennent, entre autres, le vol de voiture, le cambriolage, l'incendie

volontaire et l'agression physique causant des lésions. Les jeunes de cette origine commettent également des délits de manière plus fréquente. Les données ne montrent pas de surreprésentation des jeunes issus de l'immigration pour ce qui est des crimes

chez les adolescents de manière générale, mais plutôt une dominance des jeunes

d'origine nord-africaine (Roché, 2001).

Aux États-Unis, ce sont plutôt les jeunes de race noire qui sont surreprésentés parmi les jeunes âgés de 12 à 17 ans, arrêtés pour avoir commis des crimes violents (p. ex. meurtres et viols) et contre la propriété (vol de véhicule et autres vols) (Bureau of Justice Statistics, 2012). Les données américaines tiennent compte de la délinquance

selon la race et non de la génération d'immigration comme les données françaises ou

montréalaises. Les jeunes de race noire représentent 52 % des jeunes arrêtés pour des délits alors qu'ils correspondent à 17 % de la population des jeunes âgés de 10 à 17 ans. En ce qui a trait aux autres origines, 46 % des jeunes délinquants sont de race blanche,

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Jeunes âgés de 10 à 17 ans, 76 % sont de race blanche, 5 % sont Asiatiques ou proviennent des Îles du Pacifique et 2 % sont d'origine américano-indienne (Puzzanchera, 2014). Les jeunes issus de l'immigration, à l'exception des jeunes de race noire, ne sont donc pas fortement représentés parmi les jeunes délinquants américains.

Selon les statistiques, certains jeunes, dont ceux de race noire aux États-Unis,

semblent plus à risque d'adopter des comportements délinquants. Il se peut que ces jeunes soient confrontés à une discrimination par la police en raison de leurs origines culturelles (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse [CDPDJ], 2016). Cette discrimination les amène à être davantage surveillés et arrêtés que les autres jeunes. Bien que le lien entre l'ethnie et le risque de délinquance ne soit pas l'objet du présent mémoire, ces données illustrent la discrimination pouvant être vécue par les jeunes issus de l'immigration, et ce, malgré les différences entre les échantillons. Entre autres, l'étude de Roché (2001) porte sur des jeunes à partir de 10 ans alors que les données montréalaises et américaines impliquent des jeunes à partir de 12 ans. Ainsi, il

semble exister un lien entre l'immigration et la délinquance non seulement pour les jeunes montréalais, mais aussi pour les jeunes américains et français. Les données de Roché (2001) et de Jimenez (2015) mesurent la génération d'immigration, une variable qui permet d'apporter des nuances par rapport aux données présentées précédemment.

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Malgré une apparente surreprésentation des jeunes issus de l'immigration parmi les adolescents contrevenants, que ce soit à Montréal ou ailleurs dans le monde, la délinquance de ces derniers varie selon leur génération. Plusieurs études affirment que les jeunes de première génération sont moins délinquants que les jeunes de deuxième génération (Berry, Phinney, Sam, & Vedder, 2006; Hamilton et al., 2009; Morenoff & Astor, 2006; Slonim-Nevo & Sharaga, 2000). Entre autres, les jeunes de deuxième génération sont plus à risque d'adopter des comportements délinquants contre la propriété (p. ex. faire un graffiti, commettre un vol) (Hamilton et al., 2009; Powell, Perreira, & Mullan Harris, 2010) et contre la personne (p. ex. injurier gravement, menacer avec un couteau ou un fusil) que les jeunes de première génération (Bui, 2009). La délinquance chez les jeunes de deuxième génération est semblable à celle des jeunes d'origine québécoise (Centre national de prévention du crime [CNPC] , 2012). Contrairement à ces statistiques, des auteurs d'une étude suisse affirment que les jeunes immigrants sont plus délinquants, en moyenne, que les jeunes non immigrants (Svensson, Burk, Stattin, & Kerr, 2012), une perception qui domine la littérature des dernières décennies (Morenoff & Astor, 2006; Sellin, 1938).

Les statistiques semblent illustrer que ce n'est pas tant le fait d'avoir vécu l'immigration qui explique le lien entre celle-ci et la délinquance. Si la délinquance était seulement attribuable à l'expérience migratoire, les jeunes de première génération seraient plus délinquants qne ceux nés au pays, que ce soit au Québec ou ailleurs. Les

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lesquelles les jeunes de race noire sont surreprésentés parmi les jeunes contrevenants aux États-Unis ni pour quels motifs les jeunes d'origine nord-africaine le sont en France.

Par ailleurs, les données d'Hamilton et al. (2009) suggèrent que les jeunes issus de l'immigration devraient être moins présents ou dans une proportion semblable aux jeunes québécois dans les CR. En effet, plus le jeune est attaché à sa culture d'origine et engagé au sein de cette dernière, moins il est à risque d'adopter des comportements délinquants. Ainsi, les jeunes de première génération sont généralement moins délinquants en raison de leur attachement envers leur culture d'origine et les jeunes de deuxième génération ont tendance à être plus délinquants en raison de la nécessité de trouver leur place entre leur culture d'origine et la culture d'accueil (Le & Stockdale, 2008). Or les jeunes issus de l'immigration sont surreprésentés au sein des CR à Montréal, même ceux de première génération. La littérature permet de comprendre certains facteurs qui expliquent la délinquance des adolescents issus de l'immigration, tels que ceux présentés ci-dessous.

La période de l'adolescence

L'âge constitue le meilleur prédicteur du comportement délinquant (Ouimet, 2009). Selon la courbe âge-crime, les jeunes préadolescents commencent à explorer la petite délinquance; certains poursuivent avec des méfaits alors que d'autres commettent

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voie de la délinquance (Ouimet, 2009).

L'adolescence constitue une période de bouleversements en raIson des

changements multiples qui s'opèrent chez le jeune, que ce soit sur le plan physique ou sur le plan mental (OMS, 2016). Le développement de l'identité constitue un élément crucial durant cette période. Pour ce faire, l'adolescent souhaite se distancer de ses parents et s'affirmer auprès d'eux. Cela passe par la confrontation, ce qui peut parfois mener à des conflits (Tourrette & Guidetti, 2008). Chez les adolescents immigrants, l'enjeu est non seulement inhérent à l'adolescence, mais la source de conflits peut également être culturelle lorsque le parent souhaite inculquer les valeurs de son héritage culturel alors que l'adolescent souhaite adhérer aux valeurs du pays d'accueil (Aumont, Guindon, & Legault, 2000).

Le lien entre l'immigration et la délinquance

Plusieurs criminologues ont tenté de mieux comprendre la nature du lien entre l'immigration et la délinquance (Ouimet, 2009). Durant la première moitié du 20e siècle, aux États-Unis, certains chercheurs observent que les immigrants d'Europe et leurs descendants sont surreprésentés parmi les criminels. Cette surreprésentation est causée par les conditions de vie sociales et économiques dans lesquelles vivent les immigrants européens (Bui, 2009). Les conditions de vie précaires des familles, comme des problèmes de logement et de pauvreté et le fait d'habiter au sein de quartiers défavorisés

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Sung, 2013; Mucchielli, 2006; Tarn & Freisthler, 2015). Cette restriction peut pousser les jeunes à croire qu'il leur est impossible d'avoir accès aux mêmes moyens que les autres pour atteindre leurs buts. Ils peuvent, par la suite, ressentir une tension intérieure qui les oriente vers la délinquance (Merton, 1968; Mucchielli, 2006).

Ces auteurs notent tous l'influence de l'environnement dans lequel les jeunes issus de l'immigration évoluent sur l'adoption de comportements délinquants par ces derniers. Toutefois, leurs théories ne permettent pas d'intégrer à la fois l'influence respective des parents et des amis sur le processus de conciliation des deux cultures du jeune contrevenant.

La réalité des familles immigrantes dans le pays d'accueil

Les données actuelles sur les conditions socioéconomiques des personnes immigrantes illustrent la précarité de leur situation. Notamment, en 2011, le taux d'emploi des personnes immigrantes était moins élevé (55,6 %) que celui de la population québécoise (60,1 %). Les personnes d'origine étrangère vivent aussi plus de chômage (12,4 %) que leurs homologues québécois (7,8 %) (Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles [MICC], 2012)1. Ceci signifie que le taux de chômage des personnes immigrantes est presque le double de celui des personnes nées au Québec

1 Depuis 2014, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC) se nomme ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (MIDI). Le nom du ministère inscrit dans la référence a été respecté afin de faciliter le repérage de celle-ci.

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catégorie du faible revenu (Centre d'études ethniques des universités montréalaises [CEETUM],2012).

La discrimination constitue le principal facteur empêchant l'intégration professionnelle des personnes immigrantes appartenant à une minorité raciale dans la ville de Montréal (Eid, 2012). À compétences équivalentes, une personne ayant un nom de famille québécois a 50 % plus de chances d'être conviée à une entrevue d'embauche qu'un individu au nom à consonance africaine, arabe ou latino-américaine (CDPDJ,

2013). En plus d'engendrer un stress important, cette discrimination vécue peut obliger le parent à suivre des cours de francisation en plus de cumuler plusieurs emplois précaires pour subvenir aux besoins de sa famille. Ces difficultés peuvent faire en sorte que le parent fournira un encadrement déficitaire à son enfant. Dans ce contexte, le jeune peut s'associer à des pairs déviants et commettre des actes délinquants (Juang & Nguyen, 2009; Samaniego & Gonzales, 1999; Warr, 2005).

L'influence de la famille sur l'adoption de comportements délinquants par

le jeune. La pauvreté et les faibles conditions socioéconomiques ne sont pas

l'exclusivité des parents immigrants, mais ces derniers doivent, de plus, s'assurer de transmettre les valeurs de leur pays d'origine dans un contexte culturel totalement nouveau, ce qui complexifie leur tâche parentale (Bérubé, 2004; Zhou, 1997). La transmission des valeurs des parents à l'enfant en conjuguant deux systèmes de valeurs

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Dans un contexte où l'enfant s'intègre souvent plus rapidement à la culture

d'accueil que son parent, cette transmission des valeurs peut être complexe. Cet écart

peut produire des conflits culturels et intergénérationnels pouvant amener le jeune à se distancer de la famille et à fréquenter des pairs déviants et, par la suite, à commettre des

actes délinquants (Samaniego & Gonzales, 1999).

L'influence des pairs sur l'adoption de comportements délinquants par le jeune. À l'adolescence, les pairs remplacent souvent les parents comme personnes de

référence. Ce changement peut amener le jeune à vouloir plaire, non pas à ses parents,

mais à ses amis. Afin de se conformer à ces derniers, le jeune peut adopter des

comportements déviants ou délinquants (Dipietro & McGloin, 2012; Ouimet, 2009). La

déviance est semblable à la délinquance, puisqu'elle s'entend de tout comportement qui

est non conforme aux attentes, aux normes ou aux valeurs d'une société donnée. Cette

non-conformité est susceptible de susciter une réprobation ou une sanction (Cusson,

1992). Par exemple, la consommation de drogues peut être considérée comme un

comportement déviant. La déviance se distingue de la délinquance par le fait que la sanction qu'elle provoque n'est pas forcément légale.

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par le jeune. Chez les adolescents immigrants, la nécessité de transiger entre les exigences de leurs parents et la volonté de leur groupe de pairs est associée avec deux cultures qui entrent en contact. Cela constitue le processus d'acculturation qui correspond au phénomène provoqué par le contact continu entre deux groupes provenant de cultures différentes. Celui-ci peut entraîner des changements subséquents dans les

patrons culturels chez la personne immigrante ou chez le membre de la société d'accueil

(Redfield, Linton, & Herskovits, 1936).

Durant l'adolescence, la recherche d'équilibre, par les jeunes iSSUS de

l'immigration, entre le maintien de leur culture d'origine et l'adoption de la culture

d'accueil peut être entravée par des pressions exercées par la famille ou les amis

(Boutakidis, Guerra, & Soriano, 2006). Par exemple, les parents provenant de certaines

cultures peuvent inciter leur jeune à maintenir des principes religieux ou culturels

comme l'imposition de la chasteté (p. ex. interdiction d'avoir des relations amoureuses

avant le mariage) alors que ses amis l'encouragent à vouloir bénéficier d'une plus

grande liberté et à avoir des relations amoureuses. Afin de s'adapter à son exposition à

ces deux systèmes de valeurs, l'adolescent peut se comporter d'une manière différente à

la maison et avec ses amis. Il peut même devoir mentir à son entourage afm d'éviter de

blesser ses amis ou ses parents ou de ou de manquer de respect à leur égard (Pelletier,

2010). Ces efforts peuvent amener le jeune à vivre un conflit culturel (Benet-Martinez &

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par la suite, des sentiments dépressifs (Berry, Portinga, Segall, & Dasen, 1992; Cohen-Émerique, 2011; Legault & Fronteau, 2008; Paquet, 2011). Le conflit culturel vécu peut amener le jeune à avoir des problèmes d'adaptation comme la consommation de drogues, des relations sexuelles à un âge précoce (OMS, 2016), des troubles de comportement, des problèmes de santé mentale et des comportements délinquants (OMS, 2016; Legault & Fronteau, 2008).

Le manque de connaissances au sujet du lien entre l'acculturation chez les jeunes issus de l'immigration et la délinquance

D'un point de vue scientifique, plusieurs des recherches ayant étudié le lien entre l'acculturation et la délinquance utilisent une méthode d'analyse quantitative des données, que ce soit au Canada ou ailleurs. Elles sont d'origines diverses : canadienne (Crane, Ngai, Larson, & Hafen, 2005; Wong, 1997, 1999; Wong & Brandon, 2001), américaine (Le & Stockdale, 2005, 2008; Lustig & Sung, 2013; Samaniego & Gonzales, 1999) suédoise (Svensson et al., 2012) et suisse (Vazsonyi & Killias, 2001). Peu d'études utilisent une méthode qualitative d'analyse des données parmi celles recensées. Récemment, une recherche montréalaise conduite par Jimenez (2015) a permis d'explorer le lien entre le processus d'acculturation des membres de la famille, l'écart d'acculturation et l'adoption de comportements délinquants par le jeune. Cette étude se base sur les représentations et les expériences de jeunes, de parents et d'informateurs

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permet généralement pas de comprendre comment se vit le processus d'acculturation des jeunes contrevenants issus de l'immigration et de leur famille selon leur propre

expérience.

D'un point de vue clinique, certains intervenants du CJM-IU estiment entretenir des préjugés envers les jeunes contrevenants et leurs parents, méconnaître leur réalité et

manquer de formation afin de bien intervenir auprès d'eux (Jimenez, 2015). La plupart

ne mettent pas en application l'article 3 c) (iv) de la LSJPA qui vise la prise en compte,

par l'intervenant, « des différences ethniques, culturelles et linguistiques»

(Jimenez, 2015). Les études actuelles sur l'intervention multiculturelle s'intéressent peu

à l'intervention en CR au Canada ou ailleurs. Les études portent, entre autres, sur

l'évaluation des besoins des jeunes issus de l'immigration en santé mentale (Cauffinan & Grisso, 2005; Colins et al., 2015) et les interventions offertes aux jeunes à la suite de

leur réintégration dans leur communauté après un séjour dans un CR (Spencer &

Jones-Walker, 2004). Le manque de connaissances au sujet d'un processus d'intervention

tenant compte du processus d'acculturation des jeunes et de leur famille peut nuire à la

sensibilité des intervenants et à l'adaptation de leur intervention auprès d'une clientèle immigrante. En vue de pallier ce manque, le présent mémoire vise à comprendre le

processus d'acculturation vécu par les jeunes contrevenants issus de l'immigration et

leurs familles. Ultimement, des pistes seront fournies aux intervenants afin qu'ils 2 Les informateurs clés ayant participé au projet sont des éducateurs spécialisés, des procureurs, des avocats, des délégués à la jeunesse et une accompagnatrice.

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selon la manière dont il se déroule (Portes & Rumbaut, 2001; Sommers, Fagan, & Baskin, 1993). Dans le cadre de ce mémoire, la théorie de l'acculturation de Berry est

privilégiée comme cadre de référence. Elle se base sur la définition de l'acculturation de

Redfield et al. (1936), des pionniers en matière d'acculturation (Grenon, 1992). Le

processus d'acculturation constitue le phénomène qui se produit lorsque des personnes

provenant de cultures différentes entrent en contact de manière continue. Ce contact peut entraîner des changements subséquents dans les patrons culturels chez la personne

immigrante ou le membre de la société d'accueil (Redfield et al., 1936).

Le choix de la définition du processus d'acculturation de Berry (1997) est justifié en raison de son utilisation comme fondement théorique à la plupart des études recensées dans le cadre de ce mémoire. En outre, il se fonde sur les principes des

paradigmes bien connus de l'adaptation (Lazarus & Folkman, 1984), un concept

important en psycho éducation (Ordre des psycho éducateurs et psychoéducatrices du

Québec [OPPQ], 2014). Dans cette théorie, l'adaptation est considérée comme un

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interactions est d'ailleurs centrale pour Gendreau (2001), l'un des fondateurs de la psychoéducation. La théorie de Berry (1997) est donc pertinente à la recherche dans le domaine, pmsque l'acculturation possède les mêmes fondements que la psychoéducation.

Dans la présente revue de littérature, l'historique du processus d'acculturation et sa définition actuelle sont présentés, de même que les stratégies utilisées par les familles et les jeunes issus de l'immigration afm de s'adapter au processus d'acculturation. La présentation de l'écart d'acculturation entre les différents membres de la famille et ses conséquences terminent ce chapitre.

L'historique de la définition du processus d'acculturation

Durant la seconde moitié du 1ge siècle, l'acculturation fait son apparition dans les études en anthropologie (Grenon, 1992). La première utilisation du terme est attribuée à Powell en 1882 dans ses études sur les Amérindiens aux États-Unis (Powell, 1882). Selon lui, l'acculturation a amélioré leur culture par le remplacement de vieilles coutumes par de nouvelles, à la suite de leur contact avec les Américains. Il définit l'acculturation comme l'imitation de comportements d'une autre culture qui permet à la personne de se réinventer (Powell, 1883). L'acculturation constitue alors un processus linéaire d'assimilation du groupe minoritaire par la culture dominante (Gordon, 1964; Grenon, 1992; Schwartz, Unger, Zamboanga, & Szapocznik, 2010). La notion d'acculturation se répand en anthropologie, durant les années 1950-1960, lors du

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développement de l'école culturaliste. Cette école de pensée considère qu'un ensemble de traits contribuent à la construction de la personnalité d'une personne durant son enfance selon la culture dans laquelle elle grandit (Courbot, 2000).

Durant les années 1960, des psychologues constatent que les études s'intéressant aux cultures portent sur des régions du monde bien précises. Cela fait en sorte que les connaissances sur plusieurs populations sont inexistantes. Les psychologues manquent donc de données afin de comprendre le vécu de différents peuples culturels selon leurs propres points de vue. Les psychologues, afin de faire face à ce problème, créent la psychologie interculturelle dans le but de saisir l'influence des facteurs culturels sur le développement et les comportements de la personne. Ils souhaitent examiner comment les personnes nées et élevées dans une certaine société parviennent à vivre dans une culture différente de celle à laquelle elles sont habituées. Ils découvrent que les personnes immigrantes parviennent à adopter des comportements adaptés à leur nouveau contexte socioculturel (Sam & Berry, 2006). Ce constat mène à la reconnaissance,

depuis le début des années 1980, du fait que l'acquisition de croyances, de valeurs et de pratiques culturelles de la société d'accueil n'implique pas nécessairement la perte de la culture d'origine de la personne (Schwartz et al., 2010). À partir de ces constats, Berry (1997) développe son modèle de l'acculturation, dans lequel il affirme l'existence d'un processus biculturel impliquant à la fois la culture d'origine et celle du pays d'accueil. Selon Berry (1985), l'acculturation se déroule en quatre phases: 1. Le précontact, 2. Le contact, 3. Le conflit et 4. L'adaptation. Ces différentes phases sont décrites ci -dessous.

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Les phases du processus d'acculturation selon Berry Le précontact

Le précontact inclut le contexte avant le départ de la personne qui comprend,

entre autres, ses motifs d'immigration (Berry, 1985). La Loi sur l'immigration et la

protection des réfugiés (L/PR) permet de connaître les motifs d'immigration des

personnes immigrantes selon leur catégorie d'immigration: les réfugiés, les immigrants

économiques et le regroupement familial (Ministère de la Justice, 2015b). Les réfugiés quittent souvent leur pays en raison d'une crainte d'être persécutés en raison, notamment, de leur race, de leur religion, de leur nationalité ou de leurs opinions politiques (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, 1951). Ces personnes peuvent devoir être protégées du fait de risques de subir de la torture ou d'une

crainte pour leur vie. Les immigrants économiques, quant à eux, quittent généralement

leur pays dans une perspective d'ascension sociale (Berry, 2006a). Le gouvernement les

accueille en vue de l'atteinte d'objectifs économiques. Enfin, le regroupement familial

permet à une personne, un époux, un conjoint de fait, un enfant, un père ou une mère de venir rejoindre un proche au Canada. C'est le cas, notamment, d'un enfant qui rejoint ses

parents au Québec. La personne qui habite déjà au Canada s'engage, en vertu du

parrainage, à soutenir son proche pendant une durée déterminée (MICC, 2007).

La motivation à quitter de la personne avant son départ est importante, puisqu'un

immigrant économique dispose d'une meilleure préparation psychologique à l'immigration qu'un réfugié qui quitte son pays de manière précipitée et même forcée en

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raison d'une guerre ou d'une persécution. Ces motivations à quitter le pays d'origine doivent donc être prises en compte afin de comprendre la façon dont les familles et les jeunes issus de l'immigration vivent leur processus d'acculturation (Berry, 1985).

Outre les motifs d'immigration, les caractéristiques des individus qUI s'acculturent avant le départ sont importantes, puisqu'elles influencent les ressources dont ils disposent afin de s'adapter à leur nouveau pays. Ces caractéristiques incluent, entre autres, le niveau d'éducation et de connaissance du français (Berry, 2006b; Masgoret & Ward, 2006).

Avant le départ du pays d'origine, lorsque la personne souhaite immigrer avec sa famille, le projet migratoire naît d'une volonté d'avoir un meilleur avenir pour soi et ses enfants. Cela constitue le Nous familial qui caractérise la plupart des familles immigrantes. La famille est porteuse d'espoir et elle constitue le référent quasi unique de continuité dans l'intégration à la nouvelle société. Elle permet aux personnes immigrantes d'être résilientes (Vatz-Laaroussi, 2008).

Le contact entre les deux groupes culturels

À la suite de l'immigration de la famille, il y a un contact entre au moins deux individus porteurs de cultures différentes: la personne immigrante et le membre de la société d'accueil. Le contact est continu, ce qui fait en sorte que les personnes immigrantes et les membres de la société d'accueil doivent s'adapter les uns aux autres

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même plusieurs années après l'arrivée de la personne immigrante (Sam, 2006). Cela peut s'expliquer par le contexte social qui se modifie continuellement sur les plans historique, économique et politique (Cohen-Émeri que, 1993). Par exemple, si peu d'emplois sont disponibles au Québec en raison d'une crise économique, il est possible qu'une personne née à l'étranger qui habite au Canada depuis plusieurs années soit perçue comme une « voleuse de job », simplement parce qu'elle vient d'un autre pays. Elle sera considérée comme menaçante alors que le membre de la société d'accueil se sentira menacé.

L'influence réciproque. Lors du contact entre les deux groupes culturels, il y a une influence réciproque qui est tributaire de leur rapport social. Ce rapport dépend des attitudes des membres de la société d'accueil face aux personnes immigrantes. Ces attitudes varient selon le groupe ethnique (Berry, 1985; Portes & Rumbaut, 2001; Schwartz et al., 2010) de la personne immigrante, son statut socioéconomique (Portes & Rumbaut, 2001; Schwartz et al., 2010) ou ses motifs d'immigration (Schwartz et al., 2010). Il est important de retenir que, plus la personne immigrante est semblable aux membres de la culture d'accueil, plus son intégration est facilitée. Inversement, plus elle est différente, plus la personne immigrante est à risque de rencontrer des obstacles dans les domaines de l'éducation et de l'emploi (Portes & Rumbaut, 2001).

Le rapport social entre le membre de la société d'accueil et la personne immigrante implique généralement une culture valorisée face à une autre qui l'est moins,

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du type dominant - non dominant, blanc/noir ou ex-colonisateur/ex-colonisé, menaçant/menacé (Cohen-Émerique, 1993). Le rapport entre les deux groupes est généralement considéré de l'ordre du dominant - non-dominant. Le groupe dominant constitue la société d'accueil tandis que le groupe non dominant correspond aux personnes appartenant à une minorité ethnique (Sam, 2006). Dans une rencontre interculturelle réussie, le groupe dominant et le groupe non dominant s'adaptent aux valeurs de l'autre (Sam & Berry, 2006). En revanche, bien souvent, c'est le groupe non dominant qui s'adapte pour mieux se conformer au groupe dominant (Berry, 1985).

Dans toute rencontre interculturelle, ce rapport de pouvOIr dominant - non dominant existe. TI faut donc en tenir compte afin de saisir le rapport de pouvoir existant entre la famille, le jeune et l'intervenant.

Les réactions de la personne immigrante face au contact. Lorsque le changement s'effectue seulement par la personne appartenant au groupe minoritaire, son stress augmente, ce qui peut nuire à son adaptation au pays d'accueil (Berry, 1985). Dans la littérature, le terme choc culturel est souvent utilisé. Il possède souvent une connotation négative en psychologie. Pour cette raison, selon Berry (1997), la notion de stress acculturatif est préférable, car elle tient compte du choc culturel et de la réaction de la personne, positive ou négative, face à celui-ci. Les deux termes sont défmis en raison de leurs similitudes.

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Le choc culturel. Le choc culturel peut se définir comme « une situation émotionnelle et intellectuelle apparaissant chez les personnes qUI, placées occasionnellement ou professionnellement hors de leur contexte socioculturel, se trouvent engagées dans l'approche de l'étranger » (Cohen-Émeri que, 2011, p. 65). Il est vécu rapidement à la suite de l'arrivée dans le pays d'accueil (Cohen-Émeri que, 2011) et il est plus ou moins grand selon la distance existant entre les deux cultures en contact (Aumont, 1998; Bérubé, 2004; Drachman & Ryan-Shen, 1991; Drachman, 1992; Mvilongo,2001).

Le choc culturel peut notamment être vécu par une personne qui immigre d'une culture collectiviste vers une culture individualiste. Les cultures collectivistes (p. ex. la Chine, le Vietnam, le Cambodge) prônent les relations sociales et le bien-être de la communauté, contrairement aux cultures individualistes (p. ex. les États-Unis, le Canada) qui privilégient l'affirmation des personnes, de manière distincte des autres et autonome (Le & Stockdale, 2005). Au sein des cultures collectivistes, la communauté participe généralement à l'éducation des enfants, tandis qu'au sein des cultures individualistes, les familles la gèrent de manière autonome. Les messages reçus de la part des deux cultures du parent peuvent donc être contradictoires, ce qui peut lui occasionner des difficultés dans la gestion de l'autonomie de son adolescent (Ashboume, Baobaid, & Azizova, 2012). Chez un parent, plus les codes culturels de ses deux cultures sont incompatibles, plus l'acquisition de nouveaux contenus est difficile (Bérubé,2004).

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Ainsi, le choc culturel peut être vécu à travers les différences de conception des relations humaines entre la culture d'origine du parent et celle de la société d'accueil. La personne peut également être confrontée au choc culturel à travers les différences entre sa culture d'origine et la culture d'accueil en lien avec le mode de vie3, les valeurs, la langue (Aumont et al., 2000; Legault & Fronteau, 2008; Pontel & Demczuk, 2007) et la religion (Berry, 2006b). Il entraîne différents sentiments tels une désorientation, des inquiétudes (Cohen-Émerique, 2011; Legault & Fronteau, 2008; Mvilongo, 2001), des symptômes dépressifs et un sentiment de perte (Legault & Fronteau, 2008; Paquet, 2011).

Le stress acculturatif. Lorsque la personne ressent une pression pour changer qui elle est, la perspective du stress acculturatif est à considérer plutôt que celle du choc culturel (Berry, 1997). C'est le cas, par exemple, d'une personne qui vit de la discrimination lors de ses démarches d'insertion à l'emploi. Bien que le gouvernement du Québec choisisse les immigrants économiques les plus susceptibles de réussir leur intégration, plusieurs d'entre eux connaissent des difficultés d'insertion à l'emploi. Par exemple, les personnes possédant un nom à consonance étrangère sont injustement rejetées du processus d'entrevue une fois sur trois (CDPDJ, 2013). Elles peuvent alors ressentir l'obligation de changer leur nom, une part de leur identité, afin de se trouver un emploi.

3 L'habitation, le passage de la ville à la campagne (Aumont, 1998) et l'alimentation (Aumont, 1998; Legault & Fronteau, 2008; Pontel & Demczuk, 2007).

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Le conflit culturel

Le stress acculturatifpeut amener l'individu à ressentir un conflit culturel (Berry, 1997), soit le sentiment d'être déchiré, pris ou piégé entre ses deux appartenances culturelles (Benet-Martinez & Haritatos, 2005). Lors d'un conflit culturel, les difficultés liées à l'acculturation peuvent être surmontées facilement lorsqu'elles sont perçues comme étant contrôlables et surmontables. Le stress sera faible et les effets immédiats, positifs. Au contraire, lorsque les problèmes sont perçus comme insurmontables par les personnes immigrantes, les effets immédiats sont négatifs. Le stress peut provoquer des crises sur le plan personnel, de l'anxiété et des sentiments dépressifs (Berry, 1997). L'anxiété est causée par l'incertitude quant à la manière de vivre dans la nouvelle société et les sentiments dépressifs sont dus à la perte culturelle (Berry, 1992; Cohen-Émerique, 2011; Legault & Fronteau, 2008; Paquet, 2011). Le stress acculturatif peut donc aggraver les sentiments déjà présents liés au choc culturel (Berry, 1997).

La crise. Une crise peut également apparaître lors du conflit culturel lorsque le stress acculturatif est à son paroxysme. Des comportements d'adaptation négatifs peuvent alors être observés, tels que des homicides, des suicides et un abus de substances par les parents. Les personnes immigrantes ne vivent pas toutes une crise à la suite d'un conflit culturel; cela dépend de leurs attitudes. Par ailleurs, la façon dont elles réagissent au stress détermine si elles le perçoivent comme une opportunité ou comme une difficulté insurmontable. En intervention, il peut être pertinent de considérer cette perspective du stress acculturatif, car la délinquance est possiblement la manifestation

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d'une crise culturelle chez le jeune (Berry, 1985).

À la suite du conflit culturel ou de la crise ressentie, la personne doit choisir une stratégie d'acculturation afin de s'adapter (Berry, 1997). Dans le cas des personnes utilisant l'assimilation, le conflit culturel est résolu alors que la personne adopte le comportement souhaité de la part de la société d'accueil (Berry, 2005).

L'adaptation des familles et des jeunes issus de l'immigration

La dernière phase du processus d'acculturation de Berry (1997) constitue l'adaptation. Selon Ward et Kennedy (1999), cette dernière se définit à partir de deux dimensions: l'adaptation psychologique (émotionnelle et affective) et l'adaptation socioculturelle (comportements). L'adaptation psychologique renvoie au bien-être psychologique et à la satisfaction. L'adaptation socioculturelle correspond à la capacité à fonctionner dans la société et à naviguer à travers les aspects culturels de la société d'accueil (Ward & Kennedy, 1999). Le degré d'adaptation de la personne relativement à ces deux dimensions dépend de la stratégie d'acculturation utilisée.

Selon Berry (2005; 2006a), sur le plan théorique, les stratégies d'acculturation se divisent en deux dimensions reliées: les attitudes et les comportements. Les attitudes correspondent aux préférences de la personne quant à la façon de s'adapter et les comportements constituent ce que la personne fait réellement dans ses rencontres interculturelles au quotidien. Ces attitudes et comportements s'articulent autour de

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deux axes, soit le maintien de la culture d'origine et de l'identité culturelle et la préférence en lien avec les interactions et la participation à la société dominante de même qu'avec d'autres groupes culturels (Berry, 2006a). Les dimensions positives et négatives servent à déterminer les quatre stratégies d'acculturation. Les noms des stratégies sont définis en fonction du groupe culturel considéré (dominant: gauche ou non dominant: droite) (Figure 1).

Axe 1. Maintien de la culture et de l'identité d'origine

+ ( ) - + ( )

+ +

Axe 2. Relations

recherchées 1. Intégration 2. Assimilation 1. Multicultura1isme

avec les autres 3. Séparation 4. Margina1isation 3. Ségrégation 4. E.'<Clusion groupes

Figure 1. Les stratégies d'acculturation du groupe ethnoculturel et de la société

dominante [traduction libre] (Berry, 2006a, p. 35).

L'intégration. L'une des stratégies pouvant être utilisées est l'intégration. Du point de vue du groupe non dominant, elle constitue le maintien d'une certaine appartenance à la culture d'origine et la recherche d'interactions avec les membres de la société d'accueil (Berry, 2006a). La personne vit peu fréquemment de conflits culturels en raison de l'acceptation de la nouvelle société (Berry, 1992). Afin qu'une personne puisse utiliser l'intégration, il doit y avoir une accommodation mutuelle. Celle-ci requiert des membres du groupe non dominant qu'ils acceptent les valeurs de base de la société dominante alors que cette dernière doit être prête à adapter les institutions

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nationales, comme les services de santé et les services sociaux, afin de mieux satisfaire les besoins des personnes d'une autre origine. Cet arrangement est appelé

multiculturalisme (Berry, 2006a).

Le multiculturalisme permet aux personnes de maintenir leur appartenance et leur identité culturelles tout en participant activement à la vie de la société d'accueil, ce qui favorise la diversité (Berry, 2006a). Selon la Loi sur le multiculturalisme canadien, le gouvernement fédéral prône la liberté pour chaque personne de maintenir, de valoriser et de partager son patrimoine culturel (Ministère de la Justice, 2014). Berry (1985)

rapporte que, même dans les sociétés multiculturalistes, certains groupes non dominants

sont plus facilement acceptés que d'autres en raison de leur ethnie, de leur race ou de leur religion. Les personnes moins acceptables sont à risque de vivre des préjudices, de la discrimination et de l'exclusion, ce qui peut les amener à vivre de la marginalisation.

Les conséquences de l'utilisation de l'intégration. De nombreux auteurs

affirment qu'elle constitue la stratégie favorisant le plus l'adaptation de la personne (Berry, 2006a; Berry et al., 2006; Berry et al., 1992; Boutakidis et al., 2006; Combalbert, Lemghairbat, & Andronikof, 2007; Schwartz et al., 2010; Trickett & Jones, 2007), autant sur le plan psychologique que sur le plan socioculturel (Berry et al., 2006). Lors des conflits parent-enfant, les parents intégrés4 priorisent le respect de leurs valeurs culturelles, comme le respect, la famille (Ochocka & Janzen, 2008; Vatz-Laaroussi &

4 Les termes intégrés, assimilés, séparés et marginalisés sont utilisés tout au long du mémoire, pour alléger le texte et non pour étiqueter les jeunes ou les parents.

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Messé A Bessong, 2008), la religion, la langue (Ochocka & Janzen, 2008), les obligations familiales, le respect des aînés et les rencontres amoureuses (Nesteruk & Marks, 2011; Patel, Power, & Peshotan Bhavnagri, 1996). Ils sont toutefois souples relativement à l'adhésion de leur enfant aux valeurs de la société d'accueil. Par exemple, ils font des compromis sur les changements culturels superficiels comme la nourriture, les vêtements, la musique et les films (Nesteruk & Marks, 2011; Ochocka & Janzen, 2008; Patel et al., 1996). Ils enseignent leurs valeurs par le biais de la pratique religieuse et de la communication à la maison dans la langue d'origine (Helly, Vatz-Laaroussi, & Rachédi, 2001).

L'intégration des jeunes augmente leur capacité à gérer différents contextes et relations, ce qui peut agir comme un facteur de protection contre les problèmes de comportement et la violence. Ils développent un sentiment d'identité positif envers leur culture d'origine et celle du pays d'accueil (Boutakidis et al., 2006). Les jeunes non-délinquants privilégient cette stratégie (Combalbert et al., 2007).

Contrairement aux études précédentes, selon une recherche de Stevens, Veen et Vollebergh (2014) réalisée à partir des données de Veen, Stevens, Doreleijers et Vollebergh (2011), les jeunes en détention avant procès en Allemagne sont surreprésentés dans la catégorie de l'intégration. Ils sont également sous-représentés dans la catégorie de la séparation en comparaison avec la population générale. Les résultats sont semblables chez leurs parents. Ces jeunes sont suspectés d'un délit,

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attendent leur audition à la cour ou sont détenus en vue de protéger la population en attendant leur procès. Ils ont commis des crimes contre la propriété (avec ou sans violence) (83 %), de la délinquance avec violence (11 %), de la délinquance sexuelle (5 %) ou allumé un incendie (2 %). Le pourcentage total est supérieur à 100 %, car un jeune a pu commettre plus d'un délit. La délinquance des jeunes intégrés peut s'expliquer par leur implication dans la culture d'accueil qui les oriente fortement vers cette dernière. Cette orientation peut les mener, par la suite, à se lier d'amitié avec des pairs délinquants (Stevens et al., 2014).

La séparation. Une autre stratégie pouvant être utilisée par les jeunes est la séparation. Du point de vue du groupe non dominant, les personnes séparées maintiennent leur culture d'origine tout en évitant les interactions avec d'autres cultures (Berry, 2006a). Les conflits culturels liés à l'utilisation de cette stratégie peuvent être nombreux en raison du rejet de la culture d'accueil ou de la résistance envers cette dernière (Berry, 1992). Lorsque la séparation est demandée et renforcée par le groupe dominant, elle correspond à la ségrégation. Ces pays favorisent le maintien des valeurs ethniques des personnes immigrantes en ne leur permettant pas de participer à la vie collective de la société d'accueil (Sam, 2006).

Les conséquences de l'utilisation de la séparation. Les jeunes qui utilisent la séparation présentent une bonne adaptation psychologique et une faible adaptation socioculturelle (Berry et al., 2006), ce qui leur procure une adaptation moyenne (Berry,

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1997; Berry et aL, 1992). Plusieurs motifs peuvent pousser les jeunes à utiliser la séparation: la discrimination (Berry et aL, 2006; Phinney & Devich-Navarro, 1997), les stéréotypes négatifs et l'isolement social (Powell et aL, 2010). La discrimination peut constituer autant un facteur incitant les jeunes à utiliser la séparation qu'une conséquence de son utilisation (Phinney & Devich-Navarro, 1997).

Les jeunes issus de l'immigration qui maintiennent la langue d'origine de leurs parents au détriment de l'anglais sont davantage à risque de s'impliquer dans un gang de rue, ce qui s'explique par une marginalisation secondaire à une difficulté de s'intégrer à la société dominante (Tarn et Freisthler, 2015). En ce qui a trait aux comportements déviants, les jeunes utilisant la séparation sont à risque de consommer de l'alcool. À cela, Sommers et al. (1993) ajoutent la consommation de drogues. Par la consommation de drogues, les jeunes échappent aux pressions, aux conflits et aux difficultés vécues dans leur adaptation à la culture d'accueil.

L'assimilation. À l'inverse de la séparation, du point de vue du groupe non dominant, l'assimilation correspond aux comportements de personnes qui délaissent leur identité culturelle d'origine et qui cherchent les interactions quotidiennes avec des membres d'autres cultures (Berry, 2006a). Les conflits culturels vécus sont habituellement peu fréquents compte tenu de l'acceptation de la culture d'accueil (Berry, 1992). Lorsqu'elle est recherchée par le groupe dominant, l'assimilation correspond au

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(Encyclopédie canadienne, 2016). Ce terme est utilisé régulièrement dans la littérature en français. Il n'est donc pas traduit. De plus, l'expression melting pot est privilégiée pour respecter les termes utilisés par Berry (1997) dans sa théorie. L'assimilation et le melting pot visent l'uniformité (Sam, 2006).

Les conséquences de l'utilisation de l'assimilation. Les jeunes qui utilisent cette

stratégie présentent une faible adaptation psychologique (Berry et al., 2006) et une adaptation socioculturelle ambiguë (Berry et al., 1992; Ward & Kennedy, 1999). Cette stratégie est plus utilisée par les jeunes délinquants que les non-délinquants (Bankston & Zhou, 1997; Combalbert et al., 2007; Samaniego & Gonzales, 1999; Sommers et al., 1993). Les délits commis par les jeunes assimilés peuvent être de nature mineure (p. ex. manquer des cours, consommer de la marijuana, fuguer) ou sérieuse (p. ex. voie de fait grave, fraude par chèque, vol qualifié, vente de drogue ou vandalisme) (Juang & Nguyen, 2009; Le & Stockdale, 2005; Sommers et al., 1993). Selon Sommers et al. (1993), la délinquance des jeunes assimilés peut s'expliquer par la perte des liens avec leur famille qui prône les valeurs de la culture d'origine. Cette distanciation de la famille favorise une haute implication auprès de pairs dont certains peuvent être délinquants (Combalbert et al., 2007; Sommers et al., 1993).

Les jeunes assimilés adoptent plus de comportements délinquants que les jeunes séparés (consommation de drogues, notamment) et ils subissent davantage d'arrestations par la police (Bankston & Zhou, 1997). Une étude mesurant les problèmes de

Figure

Figure 1.  Les  stratégies  d' acculturation  du  groupe  ethnoculturel  et  de  la  société  dominante [traduction libre]  (Berry, 2006a, p

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