FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
année 1902-1903 N" 146
ES GRISES ABDOMINALES
DANS LA
THÈSE PODR LE DOCTORAT El MÉDECINE
préseiiléeel snuieime publiquement le
24 Juillet 1903
par
Louis-Philippe-Constant AUVINET
N'é àSaint-Philbert-du-Pont-Charrault (Vendée), le 2(5mars 187(j
Ancien internesuppléant desHôpitaux de Nantes
Chef de Clinique ophtalmologique libre du docteur Teillais
MM. ARNOZAN, professeur Président.
Ivmmrnde I» Thé*
V MOUSSOUS, professeur....
I DUBREUIL1I,agrégé
' Juges.
MONGOUR,agrégé
^
Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses
parties de l'Enseignement médical.
NANTES
IMPRIMERIE R. GUIST'HAU, A. DUGAS, Successeur
quai cassakd, 5 1903
Faculté de Médecine
etde Pharmacie de Bordeaux
M. deNABIAS, doyen.—M. PITRES, doyenhonoraire.
PROFESSEURS :
MM. MICÉ ,
DUPUY [ Professeurs honoraires.
MOUSSOUS S
Clinique interne Cliniqueexteine Pathologie et thérapeu¬
tique générales -.
Thérapeutique Médecineopératoire Clinique d'accouchements Anatoniiepathologique.
Anatomie
Anatomiegénérale£•his¬
tologie Physiologie Hygiène
Médecinelégale Physique biologique et
électricité médicale...
MM.
| PICOT,
i PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
VER GEL Y.
ARNOZAN.
MASSE.
LEFOUR.
COYNE.
CANNIE U.
VTAULT.
JOLYET.
LA VET.
MORACHE.
BERGONIÉ.
Chimie
Histoire naturelle Pharmacie Matièremédicale Médecineexpérimentale.
Clinique ophtalmologi¬
que
Clinique des maladies chirurgicales des en¬
fants
Clinique gynécologique.
Clinique médicale des
maladies desenfants..
Chimiebiologique Physique pharmaceuti¬
que
Pathologie exotique
MM.
BLAREZ.' GUILLAl'D.
FIGUIER,
deNABIAS.
EERRÉ.
BADAL
PIECHAUD.
BOURSIER.
A.MOUSSOUS.
DÉNIGÈS.
SIGALAS.
LEDANTEC.
AGRÉGÉS EN EXERCICE :
section de médecine(Pathologie interne et Médecinelégale)
MM. CASSAET. I MM. MONGOUR.
CABANNES.
SABRAZES.
HO BBS.
Pathologieexterne
section de chirurgie et accouchements MM. DENUCÉ. | . . .1 MM. FIEUX.
BRAQUEHAYE.
CHAVANNAZ.
BcGOUIN.
Accouchements ANDERODIAS.
Anatomie
section des sciences anatomiques et physiologiques ( MM. GENTES. I Physiologie MM. PACHON.
( CAVALIE. | Histoire naturelle. BEILLE.
Chimie
section des sciences physiques
■ M. BENECH. | Pharmacie M. DUPOUE
COURS COMPLÉMENTAIRES:
Clinique des maladies cutanéesetsyphilitiques MM.
DUBREUILH
I hnmirrnn I J• • 1 ixATTCC/i\
Clininique des maladiesdes voiesunnaires Maladies du larinx. des oreillesetdunez
Maladies mentales
Pathologieexterne Pathologieinterne Accouchements
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
HydrologieetMinéralogie
POUSSON.
MOURE.
REGIS..
DENUCE.
RONDOT.
ANDERODI^' PACHON.
princeteau.
LAGRANGE.
CARLES.
Le Secrétaire de laFaculté: LEMAIRE-
.
P.ar ^libération du 5 août US79, la Faculté
aarrêté que les opinions
tmisesdans les 1hèsesqui lui sont présentées doiventêtre
considérée
comme propres à leurs auteurs, et qu'elle
n'entend leur donner11
approbation ni improbation.
A MESSIEURS LES PROFESSEURS
de l'école de médecine de nantes
A MESSIEURS LES MÉDECINS ET CHIRURGIENS
des hopitaux de nantes
A MON MAITRE
MONSIEUR LE DOCTEUR URBAIN
MONNIER
Professeurà l'Ecole de Médecine
Médecin des Hôpitaux
A MON CHER MAITRE
MONSIEUR LE DOCTEUR TEILLAIS
Chevalier de la Légion d'honneur
Membre du Conseil central d'Hygiène et de Salubrité
Professeurlibred'Ophtalmologie
m ' ■ ■ ' ■ ■ ' ■ * ■
!
.
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s
L
A MON PRÉSIDENT DE THÈSE
MONSIEUR LE DOCTEUR ARNOZAN
ProfesseurdeThérapeutiqueàla Faculté de Médecine de Bordeaux
Officier de l'Instruction publique
AVANT-PROPOS
A la fin de nos éludes médicales, il nous a été donné depasser deux semestres comme interne aux pavillons d isolement de l'Hospice Général Saint-Jacques.
Là, sous la direction aussi bienveillante qu'autorisée de notre
excellent maître M. le docteur Urbain Monnier, nous avons eu souvent l'occasion d'étudier, entreautresmaladiescontagieuses,
cellequi fut jadis la plus terrible, la diphtérie.
Nous avons pu maintes fois, chez l'enfant, suivre les diffé¬
rentesphases et manifestations du terrible mal, etalors, malgré
lesimmenses bienfaits de la sérumthérapie, l'expérience nous a appris qu'il était parfois prudent, quantau pronostic, de faire
desréserves, alors même que la maladie semblait vaincue et le
maladeen bonne voie de guérison.
Uncasde mort très rapide chez une enfant en pleine conva¬
lescence, et (jui survintalors que rien dans les antécédents de la
petitemalade ne pouvait la laisser prévoir, vint nous en donner
unepreuve.
Comme cette mort fut précédée de symptômes abdominaux rapidesetintenses, il nous parut intéressant de faire quelques
recherches à ce sujet, et c'est alors que nous eûmes l'idée de
f'ire de cette brève étude le sujet de notre thèse inaugurale,
nousrappelant alors celle que notre camarade le docteur Bou¬
linsoutint l'an dernierdevant la Faculté de Paris, surdes laits analogues.
Nous devons ici remercier notre ami Jossu qui était alors
internedu service età qui nous devons l'observation détaillée
(llu' nous analyserons plus loin.
10
Nous profiterons également de ce travail pour rendre un
public hommage à tous ceux qui ont contribué par leur science
et leurs conseils à notre instruction et à notre éducation médi¬
cales.
Nous sommes heureux de pouvoir remercier ici tout particu¬
lièrement M. le professeur UrbainMonnier de la bienveillance
avec laquelle il nous accueillit dans son service. Grâce à lui, aidé de sa science, desonéruditionetdesesconseils,nous avons pu mener ce travail à bonne fin ; nous lui en exprimons toute
notre gratitude.
Que M. Je docteur Teillais dont nouseûmes le grand honneur
d'êtrependant deux ans le Chef de Clinique, reçoive ici l'expres¬
sion de notre profonde reconnaissance. Nous avons toujours
trouvé en lui le Maître savant et affable. Nous n'oublierons ni
ses bellesleçonsd'ophtalmologie, nisonextrême bontéenversles
malheureuxqui souffrent. Aux nobles exemplesqu'il nousdonna
noustâcherons de nousconformer toujours.
M. le professeur Vignard fut notre premier maître, il
guida
nos premiers pas dans l'étude de lamédecine etc'est lui
qui lit
notre éducationchirurgicale. Nous ne l'oublieronsjamais.
Nous tenons àassurer de notre profonde gratitude
MM. 1rs
docteurs Heurtaux, Poisson, A. Malherbe, E. Bureau,
Rivet,qui
furent nos maîtres en chirurgie. Nous n'aurons garde
d'oublier
ni les nombreux conseils que sut nous donner le
prolesseui
Pérochaud, ni lesagréables leçons d'obstétrique deM.
le profes¬
seur Guillemet.
MM. Ollive, Hervouet, M. Bureau, A. Monnier,
Mirallié,
Aubry, Le Meignen, Pàtoureau, nous firent toujours
excellent
accueil. Nous les en remercions très sincèrement.
M. le professeur Arnozan nous a fait l'honneur
daccepte'
laprésidence de notre thèse. Qu'il daigne agréer l'expression
u
nos plus respectueux hommages.
INTRODUCTION
Nous savons, depuisWernèr, de Linz, à qui nous en
devons
lapremière observation en 1842, qu'il peut survenir
pendant la
périodedeconvalescencede ladiphtérie,unensemblede troubles
trèsvariables et entraînant fréquemment une mort
très rapide.
Depuislors, des laits cliniques analogues furent
observés
par différents auteurs, et comme la symptomatologie en est lort complexe, il s'ensuivit qu'on ne fut pas toujoursd'accord
pouren interpréter la pathogénie.
Aces phénomènes pathologiques si graves, les uns
attribuè¬
rent une origine cardiaque et les caillots qu'ils
rencontrèrent
danslesoreilletteset les ventricules leur firent conclure à une thrombose cardiaque. Telle est l'opinion des
Autrichiens
Werner (1842) et Winkler (1852) ; des Anglais
Richardson,
Barry (1858) et en France de Beau (1858), Gerlier (1866) etBeverley
Robinson(1872).D autres y virent des manifestations de myocardite ou d
endo¬
carditeinfectieuses.
6etle opinion fut soutenue par Bridger John
(1863), Bouchut
et
Labadie-Lagrave
(1872-1874).Enfin, plus tard, ce syndrome fut interprété comme
étant le
lésultat d'altérations nerveuses, entraînant soit la
paralysie du
cœur, opinion de Pératé (1858), de Bailly(1872),
soit la paralysie eardiopulmonaire,
Cadet de Gassicourt (1884) ; soit enfinla
Paralysie du nerf vague, Gubler (1861), Gulal(1881), Letulle (1883),
Suss (1887) soutinrent cette opinion.Duchêne de Boulogne (1872), Hallopeau (1875),
Rocaz (1902)
• N'lentdes phénomènes bulbaires.
12
Actuellement la discussion n'est pas tranchée,et nousverrons bientôt qu'il est parfois difficile, d'après certaines formescli¬
niques, de ne pas tenircompte de l'une ou l'autre opinion.
La symptomatologie de ces accidents posl-diphtéritiquess'est toujours montré fort variable et c'est en effet cè qui ressortdes observations qui ont été publiées.
Ainsi, après une diphtérie plus ou moins grave, 011 voit parfois apparaître un ensemble de symptômes qui peuventse résumer de la façon suivante : Vomissements alimentaires répétés, bientôt suivis d'accélérationdu pouls etd'affolement du
cœur, n'entrainant pas toujours la mort; parfois ce sont des
troubles cardio-pulmonaires avec une dyspnée intense sans
signes d'auscultation bien marqués. 11 peut arriver également
que des douleurs abdominales subites et terribles ouvrent la
scène et soient suivies rapidement d'une issue fatale,enraccom¬
pagnant à la fin de troubles cardiaques comme dans lescas précédents.
Celte dernière forme d'accidents a fait l'objet d'un
nombre
assezrestreint de recherches. Ces douleurs ont été signaléespar Gulat dans sa thèse (1881), puis par Suss, qui en donneune description fort précise dans la « Revue cles
maladies de
l'Enfance » (1887).
Bien que ces auteurs n'en fassent qu'un épisode
dans les
troubles qui font l'objet de leursrecherches, il nous
semble
que,par la place qu'ils occupent dans quelques-unes de leurs
obsei-
vations, ondoit en conclure qu'il existe une forme
spéciale de
paralysie post-diphtéritique du nerf pneumogastrique
à type
abdominal très net et dont le pronostic peut être
consideie
jusqu'ici comme funeste.
Nous eûmesnous-mêmes, l'an dernier, l'occasion
d'assistei a
un fait analogue et dont on lira l'observation plus
loin: Des
coliquesatroces éclatèrent brusquement la nuit chez une
petite
fdle en voie de guérison d'une angine diphtéritique eten
trois a
quatre heures, nous vîmes notre petite malade
succomber a sa
crise abdominale.
Ainsi, le syndrome gastro-intestinal qui peut
apparaît*e a
13
décours de la diphtérie se
subdivise
endeux formes cliniques:
l'une,plusfréquente,
caractérisée
pardes vomissements intenses,
futl'an dernier magistralement
étudiée
parnotre camarade et
ami le DrBoutin, de Paris.
L'aulre, celle que nous venons
d'exposer brièvement, type à
crisesabdominales, fera lesujet de notre
travail.
Nous distribuerons notre thèse de la façon suivante :
Dans unpremierchapitre, nous exposerons
le type ordinaire
à vomissements et passerons
rapidement
en revueles travaux
antérieurs ayant trait à cette étude, la
thèse du Dr Boutin
en particulier.Dans un second chapitre, nous essayerons
d'établir
que,à côté
decetteforme gastrique, il en existe une
à manifestations abdo¬
minalesdominantes, et nousdonnerons à l'appui
les observa¬
tions deSuss, de Gulat etla nôtre.
Dans les pages suivantes, nous verrons en
détail l'aspect cli¬
nique deces faits pathologiques et nous nous
arrêterons quel¬
quesinstants pour en discuter lediagnostic.
Enabordant notrequatrième chapitre, nousnous occuperons
delàpathogénie de cestroubles. A ce propos, nous
émettrons,
après avoir tracé les travaux de nos devanciers à ce sujet,
1hypothèse d'une lésion du nerf
pneumogastrique due
auxtoxinesdubacille de Lœffler; ce qui nous conduira à nos con¬
clusionsoù nous nous efforceronsde démontrer combien il est important de recourirà la sérothérapie précoce pour
prévenir
cesterriblesaccidents post-diphtéritiques.
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CHAPITRE 1
Paralysie diphtéritique cardio-gastrique. Type
ordinaire à vomissements
Un certain nombre de troubles, avons-nous dit, peuvent apparaîtredans le cours d'une paralysie diphtéritique
banale,
quecelle-ci soit limitéeauvoile du palais,ou bien, plus
étendue;
rarement ils la précèdent. Cette série d'accidents
qui
peuventtoucher le cœur, le poumon, ou le tube digestif
simultanément
ou bien l'un de ces organes en particulier, est en
général dun
fort mauvaispronostic.
S'il est vrai que quelquefois on se trouve
simplement
en présencede légères irrégularités du pouls ou de vagues symp¬tômes pulmonaires ou cardiaques, la plupart
du
tempsla
marche de cette complication est terrible et dans la forme
la
plusordinaireon voit les symptômes gastriques se montrer
dès
ledébut.
Voici d'après les auteurs ce qui se passe le plus
ordinai¬
rement :
Quelques
jours après la période aiguëd'une anginediphtéri-
tique par exemple, on s'aperçoit que l'enfant
refuse de salimenter,
alors que la fièvre disparue, il devrait recouvrer ses loues en même temps que l'appétit. Cetteanorexie, qui
en généralestlepremier symptôme en date, peut devancer nota¬blement lesautres manifestations. Le docteur Boutin a particu¬
lièrement attiré l'attention sur cette anorexie du début quil considère comme constante : les malades alors qu'ils
devraient
rapidementse'rétablir, restent pâles, prostrés et refusent
toute
— 16
alimentation. Ils arrivent bientôtà un état d'anxiété croissante et l'on voit alors quelquefois apparaîtreunedyspnéeinexplicable
par l'auscultation.
Bientôt, le pouls qui aura pu être ralenti tout d'abord, varie,
s'accélère, devient incomptable, il s'affaiblit de plus enplus, présente même de fort longues intermittences, et le malade succombe après s'être agité quelques instants sur son lit.
Cependant, dans les cas qui semblent les plus fréquents, d'après les observations recueillies, les vomissements occupent
une plus large part.
Ceux-ci, qui ontfait l'objet de la thèse dont nousparlons plus haut, ont été regardés comme le fait prédominant du syndrome gastro-cardiaque. Suss,Samuel Gée, Rocaz, Marfan et en dernier
lieu Boulin, les ont particulièrement bien mis en lumière.
Voici comment ils se présentent en général. Pour Marfan,ils apparaissent deux ou trois jours après les premiers troubles cardiaques. Pour Boutin ils sont plus précoces et peuvent
débuterfortlongtempsavant les accidents terminaux : celui-ci
enciteun cas où ils s'étaient manifestés vingt-sept jours avant
la terminaison fatale.
Ils sontaccompagnés de l'anorexieabsolue dontnous parlions plushaut et ils se manifestent soit spontanément, soit dès que
l'on essayede faire ingérer au malade la moindre parcelle
de
liquide ou de nourriture. Si l'enfant absorbe quelquealiment,
ilspeuvent se montrer dans les instantsqui suivent,
quelquefois
cependant ils débuteront brusquement, quelques heures
après
cette ingestion, souventle matin seulement, et alors, faitremai- quanle, la nourriture absorbée la veille est vomie à peu
près
intacte. On se trouve enprésencede vomissements
alimentaires,
ils se tout sans efforts, fait décrit par Rabot et Philippe,
sont
d'ordinaire répétés, et cette répétition jointe à la
facilité a\ei
laquelle ilss'accomplissent les rend semblables auxvomisse¬
ments cérébraux.
De plus, il semble que l'on doive interpréter leur
Iréqucnn
comme défavorable et d'un mauvais pronostic. Nous
venons
cependant que dans la forme d'intoxication que nous
allons
17
décrire,cepronostic peutetre
fatal, alors
c[ue cexomissement
estinsignifiant et non
répété.
Donc, dans ces formes
d'accidents, les douleurs abdominales
sontrares ; l'auteur n'en aobservéaucun casetil n'en
détermine
paslescaractères.
Ces troubles gastriques s'associent en
général
auxtroubles
cardiaques etcontribuent à former
le syndrome cardio-gastrique
décrit par Sevestre.
Celui-cipeut évoluer de façon rapide et
entraîner la mort
en quelquesinstantspar syncope cardiaque.Cadet de Gassicourt
mentionneun fait semblable. Dans la plupart descas
cependant
cesaccidents sont moinsprécipités. Aubertin
qui
en aobservé
plusieursa vu le plus souvent survenir des
crises
oule pouls
se précipitait rapidement pour devenir très lent etirrégulier
pen¬dant quele cœur s'accélérait et s'affaiblissait
progressivement
pourredevenir meilleurjusqu'à ce qu'une crise plus
forte enleva
le malade.
Rocaz, qui rattache ces faits à une paralysie bulbaire,
décrit
également les vomissements, la pâleur de la face et
le teint
terreuxqui accompagnent ces troubles cardiaques.
Enfin dans d'autres formes, l'appareil pulmonaire est
touché,
et,Ion voitune dyspnée parfois intense accompagner
les désor¬
dresducœur.
Au point de vue pronostic sur lequel Boutin
s'étend
assez longuement, ces accidents sont considérés comme un signe de profonde intoxication de l'organisme pouvantaboutir à la mort.
Cependant,danssesobservations, ainsi queGnlat, il rapporte
des
casoù lemaladesurvécut.
En résumé ; les auteurs se sont appliqués à
décrire les trou¬
vesgastriques, pulmonairesoucardiaquesrésultantd'une
impré¬
gnation profonde de l'organisme et du système nerveuxen
parti¬
culier par la toxine diphtérique. Ils ont surtout
montré qu'il
existe: 1° uneforme cardio-pulmonaire avec
troubles du
cœuret
dxspnée;2°un syndrome cardio-gastriqueavecanorexie, vomis-
Sunents, dun pronostic très sombre mais non toujours
fatal.
Il est
cependant une forme spéciale, plus rare il est
vrai, qui,
18
elle, apparaît absolument funeste et offrant des symptômes remarquables portant principalement sur l'abdomen et carac¬
térisée surtout pardes coliquestérébrantes. Cetteforme quiaété
entrevuepar Gulat et par Suss, qui l'ont sommairement décrite, il nous a été donné de l'observer dans notre service d'interne, C'est d'elle que nous allons nous occuper, et nous nous efforce¬
rons, en nous appuyant sur les quelques observations quiontété publiées, de démontrerqu'à côté de la formegastro-cardiaque de paralysie diphtéritique, il en èst bien réellement une à crises abdominales avec sa symptomatologie particulière.
CHAPITRE II
OBSERVATIONS
OBSERVATION I (Personnelle)
Crises abdominales dans la convalescence d'une angine diphtéritique
aveccroup;coliques gastro-intestinales atroces au quatorzièmejour
de lamaladie,et morten quelquesheures.
La malade qui fait le sujet de cette observation esl une entant de
Sans, Louise El..., souffrante, au dire de ses parents, depuisle 8 jan¬
vier;elleprésenta, vers le 25 du même mois, uneaggravation deson
état. Acemoment, il existait de l'angineavec fièvre etcéphalalgie.
Le 28, dans l'après-midi, elle fut amenée aux Baraquements.
Elle
était evanosée eten proie à un tirage sus et sous-sternalmanifeste.
Luprésencedeces accidents, le tubage futpratiqué sans retard, et
en outre l'enfant reçut en inoculation 20 centicubes de sérum anti- diphtéritique. Un ensemencementfut fait sur sérum.
Lethermomètre marquait 37°4.
Le lendemain, 29, l'enfant présentait un faciès pâle, blafard :
le
faciès des intoxications diphtéritiques. La température était à 38°;
le
pouls à 120.
Tout le pharynx, les amygdales, la luette étaient tapissés dun exsudâtépais, adhérent, grisâtre.
Lengorgement ganglionnaire était modéré.
La nuit avait été bonne, et d'ailleurs la petite malade respirait
facilement.
Malgré cette détente dans les symptômes, le résultat de 1ensemen¬
cementétaitpositif (bacilles diphtéritiques moyens).
Nouvelle injectionde 20 c. c. de sérum, fasdalbuminedans les urines.
Soir, température moyenne, 39° 1. ' Janvier30. - Matin, T., 37°4.
f-e \isage est moins pâle; le pouls à 108.
Les exsudats pharyngés sont en voie dedissolution.
20
L'engorgement ganglionnaire commence à rétrocéder.
Pas d'albuminedans les urines.
Soir, T. M.; 39°.
Janvier31. — Matin, T. M., 39°8.
Malgré cette fièvre élevée qui, en général, est regardée commeun obstacle au détubage, le tube est retiré ; ce dernier était,en effet, obstruépar une fausse membrane de 5 centimètres de longenviron, entraînant de l'apnée et de l'asphyxie blanche.
11 persista ensuite un certain degré de dyspnée, attribuable aux râles cpie l'on entendait, de ci, de là, versles deux basespulmonaires.
L'usage du Champagne, du lait, qui avaient été prescrits dès le début, fut continué, et en outre des applications sinapisées furent
faites surles régions postérieures du thorax, en même temps quel'on
faisait chambre humide autour de la malade.
Soir, T. M., 3S»2 ; pouls 130.
Février l°r. _Matin, T. M., 37°4.
Etatgénéral excellent.
Plus de faussesmembranes.
Soir, T. M., 39°.
Février2. — T. M., 37°2.
L'engorgement ganglionnaire a disparu.
L'enfant a de l'appétit.
Le pouls est à 104.
Soir, T. M., 38°4.
Février 3. —T. M., 37°2.
Etat généraltrès bon, cependant le teint reste très pâle.
Soir,T. M., 37°4.
Février4. — T. M., 37°.
L'enfant a passé une excellente nuit.
Elle demande à manger.
Pouls normal.
Soir, T. M., 37°.
A partir de ce moment, la fièvre n'est plus revenue.
Le 8février, on constateune légère parésie du voile du
palais.
Le 10, la petite malade paraît réellement en excellente
santé. UK'
mange bien ; le pouls est parfait.
Ellese lève pendant 4 heures.
Lesoir, elle vomit sa soupe, s'endort et passe une nuitcalme
Le 11, à 3 heures du matin, après cette nuit calme,la
maladi
21
réveilla tout d'un coup, en proie à des coliques atroces etvoici ce
qui
estobservé àce moment.
L'enfantsouffre énormémentdu ventre; disséminées d'abord dans
toutl'abdomen, les douleurs se localisentbientôt à l'épigastre.
Il existeun état d'agitation extrême; la petite malade cherche à
quitterson lit etchange à chaque instant de
position, s'agenouille
ens'asseyantsur lestalons, se roule dans son lit et se pelotonne par
moment.L'abdomen est souple et de sonorité normale.
Il ne se produit ni diarrhée ni vomissements. Le foie est gros,
descend à quatretravers de doigt au-dessous des fausses côtes. Pouls
difficile à compter et très fréquent. — Injection de caféine, suivie
d'uneinjection d'éther.
Vers 7 heures1/2, l'agitation précédente fait place à un abattement
profond. A cemoment le malade vomit le Champagne qu'on lui fait
prendre à l'instant.
Plus de douleurs du ventre. Le pouls, incomptable, devient lili-
lorme;les extrémités secyanosent.
Lecœura des battements désordonnés.
Larespiration, d'abord très fréquente, devientplus lente, puiscesse tout à coup.
A 9heuresla malade avaitsuccombé.
Lautopsie n'a pu être pratiquée.
OBSERVATION II (Thèse de Gulàt. —Paris, 1881)
Angine diphtéritique de moyenne intensité; paralysie légère du voile
du palais; paralysie du pneumogastrique; mort
Le 3décembre 1880, le nommé Félix I)..., âgé de 9 ans, est entré
danslepavillon Bretonneau, réservé auxmalades atteints de diphté-
lle ettaisant partie à ce momentdu service de M.Bergeron.L'étaitun entantscrofuleux, ayant eu la gourme, d'après le dire de ses parents.
Quoiquil ait toujours été malingre, il n'a jamais eu aucune fièvre eiuptiveniaucune autre maladie sérieuse.
Depuis plusieursjours son appétit était presque complètement sup- P1mie;ilavait de la Fièvre, de l'agitation,mais cen'estqu'aujourd'hui 'décembre, qu'il se plaignit de mal de gorge. Un médecin appelé
22
constata la diphtérie et le fit conduire à l'hôpital Trousseau, oùonle trouvedans l'état suivant : dès l'abord on remarque de l'empâtement
dès deux régions sous-maxillaires, et par la pression, on perçoit des ganglionstuméfiéset très douloureux. La bouche entrouverte laisse écouler la salive en abondance. En examinant le fond de la gorge,on
peut voir les deuxamygdales tapisséesde faussesmembranesgrisâtres, irrégulièreset assez adhérentes; la luette est intacte, ainsi quelevoile du palais.
Pas d'albumine dans les urines; lièvre modérée, pas d'appétit.On prescrit des lavages d'eau phéniquéè au 1/500 à pratiquer plusieurs
lois par jour, dans le pharynx, et une potion avec 30 grammes de rhum.
6 décembre, lessymptômes locaux se sont fort amendés; il n'y a
plus de fausses membranes, les ganglions sont presque indolents,et l'empâtement est en grande partie dissipé. Mais déjà le malade
commence à nasonner et une partie des liquides ingérés revient par le nez.
Le malade n'a plus aucune force pour souffleret l'examenduvoile
du palais, permet de constater nettement la paralysie de cet
organe. <
Les urines, examinées pour une seconde fois ne renferment pas d'albumine.
10 décembre. La paralysie paraît stationnaire, cependant il s'est ajouté un signe de peu d'intensité;c'estun certain défaut d'accommo¬
dation avecdilatation des pupilles et un léger degré de strabisme
convergent.
Dans la nuit du 12au 13décembre, vers minuit, il est pris brusque¬
ment de coliquestrès vives, sans diarrhée. L'interne de garde appelé
en toute hâte put alorsexaminer avec soin lesaccidents qui se pro¬
duisirent.
Les douleurs abdominales ne présentaient pas de siège bienprécis,
cependant ellesexistaient dans la partie de l'abdomen située au-des¬
sus de l'ombilic, dans la région occupéeparl'estomacetlesdeux
lobes
du foie elles étaient profondes, et la pression sur les paroisduventre,
ne les augmentait pas sensiblement. Au bout d'une demie heuie,
il futpris de vomissementset rendit ses aliments, ingérés à 4 heures
du soir.
A ce moment le malade était très agité, refusant absolument
de
rester couvert, etcherchant à se lever de son lit. La figure duni
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excessivepâleur, exprime une
grande anxiété; les ailes du nez sont
dilatées et l'enfant est en proie à une dyspnée
très intense. Les
battements (lu cœur sont précipités, et le pouls bat 152
lois à la
minute.
13décembre. Ala visite, l'état du malade n'a pas varié; la dyspnée
esttoujoursla même, etl'examen minutieux
de la poitrine permet de
constater que,dans tous les pointsdes deux poumons,
le
murmurevésiculaire est pur et ample. Les battements du cœur sont
tumul¬
tueux,lepoulspetit, filiformeà 164, temp. R. 37^9.
Traitement. — On prescrit l'électrisation du
pneumogastrique.
L'état du malade ne s'améliore pas, et il meurt on syncope à six
heures du soir.
L'autopsie, pratiquée vingt-quatre heures après la mort,
révèle des
caillots noirs sans adhérences, dans les deux oreillettes; le muscle
cardiaque est absolument normal et on ne peutvoir aucune altéra¬
tion de l'endocarde. L'encéphale est simplement congestionné à la
base,maison ne remarquerien de particulier du côté des méninges.
Lesreins, le poumon, le foie et tousles autres organes sont abso¬
lument sains.
OBSERVATION III (Thèse de Gulat, Paris, 1881)
Angine dlphtéritique, très légère, paralysie peu intense du voile du
palais: paralysie du pneumogastrique au bout de 9 heures. Mort.
Léontine L...,âgéede sixans, estentrée au pavillon Bretonneau, le
-juin 1880. Cette petite fille robuste, de bonne constitution, a
été
vaccinée une seule fois et avec succès. D'après les renseignements
tournisparsamère, elle n'auraiteu aucune maladie antérieure.
Il y adeuxjours, elle fut prise de mal de gorge, defièvre,
d'inappé¬
tence, Le médecinqui futappelé déclaraqu'elle étaitatteinte
d'angine
oouenneuse etlui prescrivit un vomitif.
Lelendemain ne voyant pas d'amélioration, il l'envoya à
l'hôpital
trousseau.
juin. On la trouve assise sur son lit, maissans gaieté; en exami¬
nantsa
gorge, onaperçoit àiafaceinterne des amydales, deux petites
P uquesgrisâtres, peu épaisses, se détachant assez facilement.
Le
«
24 —
voile du palais et le pharynx sont rouges. Il n'y a pas d'empâtement
dans la région sous-maxillaire* mais de chaque côté, on trouve des ganglions moyennement tuméfiés et sensibles au toucher. Tempé¬
raturerectale 39».
On prescrit une potion avec3 gr. de chlorate de potasse etdes badigeonnages aujus de citron.
Le 5. A la suite de l'application de ce traitement, lesfausses mem¬
branes ont complètement disparu. La température est revenueâ la normale; l'enfant demande à manger; les ganglions sous-maxillaires
sont encoretuméfiés, mais absolument indolents.
Le 10. Depuis hier, les liquidesreviennent en grande partieparle
nez; la voix est nasonnée; l'enfant ne peutsouffler. Quandonexamine le voile du palais, on le trouve flasque et vertical. On prescrit l'élec- trisation de la partie paralysée, pendant dix minutes, chaque matin,
en mettant un des pôles sur la région parotidienne et l'autre surle
voile.
Le 12 la situation n'a pas changé, on continue la faradisation.
Le 15. La paralysie est en pleine voie d'amélioration ;l'enfantavale
trèsbien, seule la voix est encore nasillarde.
Le 16. Ce matin, à 9 heures, pendant la visite, l'enfant seplaintde coliques violentes siégeant dans toute la partie sus-ombilicale de
l'abdomen; elles neprésentent aucuneirradiationniversle bas-ventre ni vers le thorax. Elles semblent être légèrement soulagées par la
pression sur les parois abdominales et ne sont nullement accompa¬
gnées de diarrhée.
L'enfant est en proie à unevive agitationet,à de certainsmoments,
elle est prise de véritables convulsions. Elle vomit, telqu'elle l'apris,
du chocolat qu'on lui a donné à sept heures du matin.
Au boutd'une demi-heure elle estun peu plus calme,assisesurson
lit, en proie à une dyspnée des plus violentes. L'auscultationdémontie
que le murmure vésiculaire est pur et sans mélange d'aucun
bruit
anormal.
Les battements du cœur sont tumultueux et irréguliers;le
poub
petit, filiforme, marque 160 pulsations par minute. La température
rectale estde 37» 6.
L'urine, qu'on s'est procurée en sondant l'enfant, traitée pai chaleur et l'acide nitrique,reste parfaitement limpide.
On prescrit Télectrisation du pneumogastrique,unpôle surleccen ■