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L'hydrogéologie: 10 ans de recherches dans la région d'Emosson et du Fer-à-Cheval
SESIANO, Jean
Abstract
De nombreux traçages dans la région frontalière entre le Valais (Suisse) et la Haute-Savoie (France) ont permis de mettre en évidence des transferts d'eau sous la frontière. Des bilans d'écoulement ont été dressés. Une grotte découverte à l'occasion de ces travaux, en bordure d'un glacier, permet de donner le niveau de l'isotherme 0 degrés dans cette région.
SESIANO, Jean. L'hydrogéologie: 10 ans de recherches dans la région d'Emosson et du Fer-à-Cheval. Nature et Patrimoine en Pays de Savoie , 2004, no. 12, p. 11-21
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41182
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1 / 1
7u=A,
Résuûé
:
Aptès une dizaine d'années de rcdÊrches dans le massif du Ruan, frontiàre entre le Valais (CH) et la HauteÂawie (F), les circutations hydrogéotogiques de ce e région calcairè ont pu êtrc élucidées pour la maieure padie, ll y a souvent t|ansfeft d'eau du bassindu Rh6ne veÊ cetui du Giffre, puis de I'Atve. Par la m6me occas,bn, nous awns tenté détabli des bilanE d'écoulenant bien que les hauteurc de précipitations soient lacunaires. tls conliment lei obserualions. Enfrn, à la suite de la découvede d'une cavité sur le ve6ant helvétigue de ta chaîne, nous avons pu calcutet t'attitude de I'isotherme 0'C annuelle, soit 2 580 m, dans cette région des Alpes.
ilto,s crés ,' Hydrogéologie - lrcçages - Hautes AlPes calcaires - Haute-Sar/oie - France - y€lais - Suissê
Abstract
:
The hydtogeotogy of the High Calcareous Alps tying across the border belween Haute-Sawie, France, and Valais, Switze and, has been inws|lig/aled. A satisfactory model of the underground kagtic transfer can be p@posed. The main limestone strata are mostly inwtved W these circulations. Balances, eithet lor gldcieô and their resurgences, or br an impodant sqing, the Goui e Ve e, and iE fee' ding basin, arc proposed. Simultaneousty, tempeÊture, conductivv and water f,ow rate has been measured during apprortmably 10 Wars, Keywotds: Hydmgaotogy - tÊcing expeimenti - HUh Calearcous Alps - Valais - Haute-Savoie - Switzerland - Fnncelntrod uction
ces unités.La frontière court le long des crêtes,
du
Tennevergeau
Ruan, avant de tournerà
I'ouestvers la Dent
de Barme.La longue durée de cette
étuderésulte de deux facteurs :
lamétéorologie
locale est
souvent médiocre, ce qui limite les jours de travail sur le terrain. Ce n'est du reste pas un hasard si la hauteur moyennedes
précipitationsy atteint
desvaleurs
exceptionnellespour
les Alpes. D'autrepart,
climatiquement parlant, la période pour des travaux efficaces se réduità 3
mois par an (mi-juilletà
mi-octobre), c'est-à-dire d'une fonte ayant bien progressé à laurant plusieurs années,
nous nous sommes penchés sur I'hydro-géologie
de la chaîne
frontalière entre le canton du Valais, en Suisse,et le
départementde la
Haute-Savoie, en France. Cette région, dont les altitudes vont de 1000 à 3000 m environ, comprend plusieurs vallées : à savoir celle de Barberine-Emosson,
de
Susanfe-Clusanfeet de
Salanfesur le
versant suisse,et celle
du Fer-à-Cheval-
Fond-de-la-Combe sur le versant français, cette dernière faisant partie de la Réserve Naturelle de Sixt. La carte de situation, en page centrale de la revue (fig. 1), précisenouvelle neige,
et
encore,s'il
fait beau...Les
raisons ayant motivé une telle étude sont les déficits d'écoulement constatésdans le
bassin-versant d'Emosson. En effet, dans la conti- nuationd'un travail sur les
plansd'eau
naturelsde la
Haute-Savoie (Sesiano, 1993), nous nous étions intéressés aux lacs du versant suissede la chaîne, avec les
vallonsd'Emosson
et du
Vieux-Emosson.C'est à cette
occasionque
nousavions
remarquéla
présence denombreux points d'absorption d'eaux de fonte de névés et de glaciers. Que devenaient-elles ?
NatureetPatrimoineenPaysdeSaypje.ALSN.;,W@
Le cadre géologique et tectonique
|
'étudese
dérouledans un
cadre géologique trèsl-intéressant.
Nous nous trouvons à I'interface entre lesocle cristallin, granite
et
gneiss s.1.,de
I'entité Mont- Blanc-
Aiguilles Rougeset sa
couverture autochtone(Trias, Lias et
Tithonique),la nappe de
Morcles, chevauchant cet ensemble. Cette dernière comporte des terrains s'étendantdu
Liasau
Crétacépour la
zone étudiée. Son coeurse
situe dansle
secteurqui
nous concerne, et si c'est son flanc normal qui affleure surtoutsur le
versant helvétique (Barberine-Emosson), c'est dans le coeur jurassique très plissé que se sont creusés le cirque du Fer-à-Cheval et le Fond-de-la-Combe.Le plongement du socle et de sa couverture est d'environ 300 vers le NW. Lors de la mise en place de cette nappe, quelques écailles
de
cristallinont été
entraînées, se trouvant maintenant sur le plan de glissement comme à Salanfe.Outre les déformations récentes ayant affecté la nappe, d'âge pontien (du Pliocène à I'actuel, en fait) et celles de
directions alpines typiques (NE-SW), on a des directions de fracturation hercynienne, plutÔt méridiennes, que l'on retrouve dans
le
socle, mais dont certaines ont rejoué tardivement, affectant ainsi la couverture autochtone et la nappeAvec la lithologie, dont nous allons dire quelques mots, ce sont ces directions ainsi que le pendage et la directton des couches qui seront les facteurs déterminants dans la voie que suivront les eaux souterraines.
Dans la région qui nous intéresse, on peut considérer que c'est le calcaire du Tithonique, (Séquanien-Portlandien) qui est la roche karstifiable par excellence. Son aspect est compact, gris-bleu, les couches atteignant 100 à 150 m de puissance. Cependant, on observe dans les montagnes
qui
nous concernent,un
empilementde
plisqui
peutporter cette éparsseur à plus de 1 000 m, au Tenneverge par exemple, avec un bourrage de Berriasien dans les charnieres. Cette roche du Tithonique étant compétente*,
la fracturation est intense, ce qui va favoriser une per- méabilité en grand ; étant formée presqu'exclusivement de CaCO3 (>98 o/o),
I
y a très peu d'insolubles pouvant mener à un colmatage des conduits souterrains.Bien que moins favorable à la karstification, il faut encore mentionner I'Argovien. ll affleure surtout dans le vallon de Barberine-Emosson, sous
la
forme d'un calcaire noir, grumeleux et schisteux, de 50 à 60 m de puissance. ll y aplus d'insolubles
que
dansle
calcalredu
Tithonique,environ
5
%. Enfin, jouanten
principele
rôle d'imper- meable à I'enfoncement souterrain des eaux, il faut citer les roches du Lias, du Bajocien, du Callovo-Oxfordien etdu
Berriasien,aux
faciès plutôt argileuxet
schisteux (à I'exceptron du Bajocien supérieur, plus calcaire) Ces roches,sauf le Lias,
affleurent largementdans
les abrupts du Fond-de-la-Combe, formant les assises de la chaîne frontière." Se dit d'une roche ou d'un niveau rocheux dont le com- portement lors de la déformation est plus rigide que celui des terrains qui l'entourent.
Pour plus d'informations sur la géologie et la tectonique :
Centre de la Nature Montagnarde à Sallanches Consuttation ou prêt de livres, de thèses, de
cartes géologiques françaises ou suisses
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A Tôro P.lour.
2173m
r Ls Grdo Phtlàrçi 1tE0 il
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WNW
Fond de la Combe
France
+Ï
SuisseTour de ESE
Prazon (2932m)
glacier des Fonds
Vallon
de BarberineCol de Barberine
(2481m)
.+
Combe des Fonds
Berriassien Malm Argovien Oxfordien Bajocien sup.
Bajocien inf.
I
km
ffi,ure
eT Patrimaineen
PaYs de Sayoie-
ALSN - n"1 2-
03i2004L'existence
de
percées hYdrogéo-logiques
sur le
versant français de la chaîne, mises en évidence lors de l'étudedes lacs de
Haute-Savoie, nousa
montréque le
Phénomène était répandu dansce
secteur desHautes Alpes calcaires.
D'autre part, nous avions observé durant cetravail la présence de
sourcesimportantes dans les escarpements hauts
de
1000 m et Plus, enserrantla région du
Fer-à-Cheval. Ellesdonnent naissance aux
chutes d'eau qui font du reste la renommée du site.ll
semblait dès lors évident que des investigations sur le versant suisse permettraient de trouver I'o-rigine des
eaux;c'est ainsi
qu'est née I'idée de ce travail.On notera enfin que tous les vallons du versant suisse mentionnés Plus haut soit sont occupés Par des lacs
de
barrage (Emosson,Par
exem- ple), soit comportent des ouvragesde captage d'eau Pour
alimenterdes barrages
(Susanfe-Clusanfe, par exemple). Dans cette optique, ils'agit donc de la Perte vers
laFrance d'un capital (or bleu) qui était destiné à être turbiné en Suisse, ce qui va à l'encontre d'une idée large- ment répandue qui veut que le cap-
ital aille plutôt de France
enSuisse...
Après un bref exposé de la géologie
du
secteur étudié, nous Passeronsen
revueles
diverses exPériences conduites,et ceci dans un
ordre chronologique,de
1993à
2002. On trouvera les résultats regroupés à la figure 1.Présentation des expériences
/î'est en août 1993 que
nous\-ravons effectué un
premiertraçage, à I'altitude de 2 500 m, sur le
front du glacier des Fonds, dans le
haut
du
vallonde
Barberine. Nousavions en effet repéré une
faille inverse affectantles
calcaires du Tithonique,à
quelques mètres enaval de la glace, dans
laquelles'engouffraient les eaux de fonte. La structure géologique locale plaidait pour une direction d'écoulement des eaux vers I'ouest - sud-ouest, c'est-à- dire vers le cirque du Fer-à-Cheval et le Fond de la Combe, sur le Plancher duquel s'écoule
le
Giffre, quelque 1 400 m plus bas.Le traceur, de I'uranine
(fluo-rescéine), sortit de nuit, bien plus vite que prévu. C'est pourquoi I'opération
fut
répétée une semaine Plus tard.Cela nous permit de localiser
la résurgence :à
l'anglede
la vire de Prazon,sous le glacier du
Ruan(français),
à
l'altitudede 2 000
m, près de la limite entre le Tithonique et le Berriasien. Le transit s'était effec-tué en 3 h
15,soit à
une vitesseproche de 1 km/h. Valeur très élevée
pour les
karsts alpins,mais
sem-blable à celle trouvée lors
d'un traçage sur le Désert de Platé voisin, dénotant un réseau bien développé.Ce traçage est noté T1 à la fig. 1. On
peut
releverque les
fluocaPteurs placésà
d'autres émergences ont montré une absence de traceur.En 1994, ce fut au tour du glacier des
Rosses
de
nous accueillir,2
km au sud du glacier des Fonds. La languedu
glacierest ici
décollée, sur unedalle rocheuse lapiazée,
à la
limite Argovien-Tithonique. Aidé d'un garde de la Réserve Naturelle de Sixt, nousavons injecté
le
traceurdans
uneperte
sous-glaciaire.Moins de
6heures plus tard, le Giflre était teinté.
Seuls les fluocapteurs placés sur un affluent de la cascade du Violon ont été positifs. En fait, la résurgence est
située à
nouveausur la vire
dePrazon, à I'interface entre les argilites gris-noir imperméables de l'Oxfordien
et les calcaires gris-bleu
duTithonique, I'eau sortant d'une petite
grotte
impénétrable,à
quelquesmètres
du
piedde la
Paroi. Sur lafig. 1, il s'agit du traçageT2.
Ce même mois, nous avons effectué un autre traçage (T3) au glacier des Traverses, 1 km au sud du glacier des Rosses, dans
un
ruisseau de fonte disparaissantsous le glacier.
Cet appareil moribond est situé au fondd'une vaste
dépression, d'ori-gine glacio-karstiquesans doute,
auplancher
oxfordien, entourée des calcaires sombresde
I'Argovien. Le traceur est sorti également dans une des branches du torrent du Violon, au fond de la Combe.A
noter que Pour ces deux glaciers, spatialement bien délimités, nous avonsfait un
bilanentre I'apport, diminué de l'évapotran- spiration,
et ce qui est
délivré aux émergences.Les
chiffres obtenus sont tout à fait compatibles avec les observations.En octobre, un dernier traçage (T4) était tenté sur la partie sud du glacier
Le Pic du Tenneverge (2 985 m) dans le massif du Tenneverge.
Les vires de Prazon avec le front du glacier du Prazon (à gauche)
*Errr*
Le Fond de la Combe (à Sixt) avet Tour Saint Hubert à gauche et le différentes cascades et émergent
Les parois calcaires (Tithonique), hautes de près de 700 m, entre
des Fonds, dans un
ruisseaus'échappant du front pour cascader quelques mètres plus loin dans une fissure orientée NE-SW ouverte dans
le
plancher karstifiéde
I'Argovien.Une vingtaine d'heures plus tard, le Giffre était coloré ainsi que son affluent du Ruan, le Foulon, mais ni le Violon,
ni aucune autre source.
L'eau emprunte sans doute le même canal quepourTl.
Après ces quatre opérations, on peut déjà relever que tous les transits se font sous la chaîne frontière franco- suisse et que des eaux censées ali- menter le lac de barrage d'Emosson lui font défaut, embellissant du même coup le cirque du Fer-à-Cheval et les cascades qui font son charme.
L'année 1995 n'a vu aucun traçage, la couverture neigeuse ayant été très importante
;
seulesdes
reconnais-sances de terrain se sont continuées.
Les travaux commencés en 1994 à la
grotte RU-1, se sont poursuivis (voir le paragraphe la concernant).
En septembre 1996, nous
avons répété le traçage effectué deux ans plustôt au
glacier des Rosses afin de préciser le point d'émergence (T2, fig. 1). L'opération a été couronnée de succès : I'affluent nord du Violon estbien alimenté par la perte
duglacier des Rosses.
Nous avons alors changé totalement de site puisque le reste de I'automne nous a vu débuter nos investigations dans le vallon de Susanfe-Clusanfe, derrière le col du Sageroux, au pied
des Dents du Midi, et donc
enHelvétie.
Un ruisseau prenant naissance sur le flanc oriental de la Dent de Barme est capté au bas du vallon de Clusanfe pour alimenter
le
lac de barrage de Salanfe. Nous avons à notre tour fait un barrage surce
ruisseau Pour le diriger (durant quelques jours !) vers une perte qu'il alimentait sans doute il y a des milliers d'années, avant qu'il scie le verrou à l'entrée du vallon. Le trajet de I'eau a été helvético-suisse :I'eau est
réapparuesous le
Pas d'Encel, à Fontaine Verte, au fond dela
gorge d'Encel. Elle s'est écoulée dans ces roches très tectonisées du Crétacé (Valanginien), au front de la nappe de Morcles, la résurgence sesituant au contact avec
leNummulitique
de la nappe.
Ce traçage est T5 à la fig. 1.le Tenneverge et le Ruan, les vires de Prazon et le F
de la Combe
En 1997, nous
revenonssur
leversant français avec un traçage au mois d'août sous la Tête des Ottans
(2
548 m), sommet sur la frontière.On a là une cuvette glacio-karstique, au fond encombré de débris de calc- schistes
du
Berriasien,et
parsemé de dolines (soutirages dans le Malm sous-jacent). L'injectiona eu
lieudans des
ruisseauxde fonte
de névés.Les
fluocapteurs placés àplusieurs cascades
du
Fondde
laCombe et
à
la grosse source de la Gouille Verte ont été positifs (T6 à lafig. 1). On
a
donc eu diffluence des eaux, peut-être due à la crue provo- quée par les pluies le lendemain de I'opération (28 août).En
septembre,un
traçage effectué dans une venue d'eau au fond de la grotte RU-1 nousa
montré que les eaux réapparaissaient dans une des cascadesdu Fond de la
Combe (le Violon ou le Foulon).Dès 1998, nous avons commencé à
utiliser un fluorimètre :
I'appareilmesure par intervalle de 4 secondes ou de
4
minutes la fluorescence de I'eau que l'on désire surveiller. Les données sont enregistréessur
une carte-mémoire. L'autonomie de I'ap- pareil est de 10 jours (ou 20) grâce àune (ou deux) batterie(s)
de
12 V.C'est
le
groupe de Géomagnétismede
I'Universitéde
Neuchâtel, en Suisse, quia
conçu cet instrument,dont le seuil de
détectionest
de5x10"
g/ml. A noter que pour pallier une panne électronique toujours pos- sible (une fois en 5 ans, une batterie plate, et par notre faute !), des fluo- capteursont
toujoursété
placés àcôté du
fluorimètre,et aux
autres points dont la surveillance nous sem- blait secondaire.Avec l'acquisition de cet instrument, le temps d'arrivée du colorant
et
lacourbe
de
restitution pourront être définis pour chaque traçage.{.
,l*:
==:==
j=.
€
=
@re#*imoineenPaysdeSavoie-ALSN-n"12-03l2004
La première opération
a
été menée dans le vallon de Susanfe. L'eau est ressortie au fond de la gorge d'Encel(cf. T5). Ce trajet est noté T7 à la fig. 1.
On est loin ici de nos vitesses records
de transit au glacier des
Fonds,puisque l'on atteint
Péniblement 25 mlh: cela témoigne d'une circula-tion en régime noYé, dans
unsystème karstique encore
Peu développé,au sein des
roches du Néocomien.Toujours en juillet, ce sont les WC de
la
cabane de Susanfe qui nous ont accueillis, ou plutôt leurs effluents qui ont reçu 1 kg d'uranine. Le traceur est apparu au même endroit que le mois précédent, avec une vitesse similaire (T8 à la fig. 1). Mentionnons que les fluocapteurs placéssur le
versant françaisde la chaîne durant
ces expériences n'ont rien détecté.A la fin du même mois, un traçage a
eu lieu sous les échelles du col des Ottans, versant suisse, dans un ruis- seau issu du glacier homonYme et se perdant dans les fissures du lapiaz- Le fluorimètre, placé aux sources de la Gouille Verte, montra un début de passage
du
colorant 22h30 aPrès I'injection, avec un pic 11 h plus tard ;s'en suivit une lente décroissance sur
une dizaine de jours avec,
Pour chacun d'eux, une Pulsation diurnede fonte,
chaquefois
Plus faible, I'onde de crue survenant chaque jourvers 18 h. Tous les
fluocaPteursplacés
ailleurs, versant suisse ou français, furent négatifs. L'eau suit lescouches
du
Tithoniquejusqu'à
larésurgence, au contact entre
leBajocien supérieur et
I'Argovien- Tithonique (T9, fig. 1).En septembre 1999, c'est le front du glacier de la Grande Pente, à I'ouest
de
I'Egliseet du
Dôme, qui nous a vus sévir. Le biseau terminal disparaîtsous les
moraines,en
amont d'un verrou (Tithonique) qui n'est franchipar aucun
émissaire.Le
traçage (T10)a eu lieu
dans une bédière.Le premier signal est
apparu 42h30 après l'injection, aux sources de la Gouille Verte (vitesse modale : 130 m/h). Le trajet suivi par I'eau est sans doute le même que Pour T9.En
septembretoujours, c'est
untraçage franco-français
qui a
lieu.Aucun émissaire de surface ne quitte
la
langue nord du glacierdu
Ruan, alors que plusieurs torrents s'échap- pent de la langue sud pour rejoindrele Giffre, en plus du karst
sous- glaciairequi
donne naissanceà
lasource du Foulon. Le colorant
a
étéinjecté dans un ruisseau
suPra-glaciaire
disparaissantdans
une crevasse. ll est ressorti à l'émergence enY
sur un plan de chevauchement, ce torrent passant un Peu Plus bas àcôté
de
I'ancienne minede
fer. La vitesse a été proche d'un km/h, attes- tantà
nouveau d'un régime vadose (les galeries ne sont pas entièrement inondées)dans un
sYstème bien développé. L'eau s'écouleau
sein des calcaires du Tithonique (T11 à la fis. 1).Durant I'année 2000, c'est une fois de plus la grotte RU-1 qui reçoit notre visite afin de préciser le lieu de sortie de l'émissaire. Le traceur est apparu dans
le
torrentissu du
glacier duRuan,
le
Foulon, probablementà
lamême
émergenceque celle
destraçages au glacier des
Fonds(T1 et T4). Cette opération est notée T12 à la fig. 1.
En 2001, plusieurs traçages ont été menés dans le bassin-versant du lac de barrage de Salanfe : au Petit lac des Ottans,
à ta
pertedu
ruisseau d'Emaneyet au lac de
Salanfelui-même.
C'est ainsi que nous avons
Pumon-trer
le lien avec les
sources thermalesde Val d'llliez,
Près de Champéry, en Valais, aPrès un Pas- sage sous les Dents du Midi.Finalement,
en 2002, nous
avons injectéde
I'uranine dansle
torrent sous-glaciaire d'un petit appareil des pentes nordde
I'Eglise(3
077 m), dans le massif de la Tour Sallière. Un signal n'est apparu qu'aux sources de la Gouille Verte, 47 h après I'injec-tion.
L'eaua
suivi les calcaires du Tithonique, avec une vitesse modale de 130 m/h. Le trajet (T13 à la fig. 1)est certainement le même que Pour T9 et T1 0.
Ce point extrême de
traçagereprésente en fait la source du Giffre.
ll est quand même Piquant de cons- tater que plus de la moitié des eaux
de
cette rivière, éminemment haut- savoyarde s'il en est, proviennent de la Confédération Helvétique.*
*
La source de
laGouille Verte
ô ette importante
émergence\z(coord.
554.800/1 06.000/1 060), forméede
plusieurs griffons, sourd (Suite page 20)La centrale électrique de la Bâtiaz à Martigny (Suisse) turbine des eaux colorées au bassin de Vallorcine.
La vitesse dans la conduite forcée avoisine les 10 km/h
Lors du traçage au glacier des Traverses (T3), le colorant disparaît
sous la neige et la
glace
Nature EiF+J -' -r**
et Patrimoine en Pays de Sa ê::==;-
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La grotte RU-1
parcourant
notre zone d'étude deI
long en large, véritable crible pour les eaux de fonte nivales et glaciaires,nous y
avons découvert quelques cavités.Parmi celles-ci, explorée dès 1993, la
grotte RU-1 (fig, 2). Ses coordonnées
CNS sont :
558.3501107,02512500.Sa découverte tardive s'explique par le fait que chaque année, une impor- tante accumulation de neige se pro-
duit devant
I'entrée, masquant et interdisant I'accès, en général jusqu'à mi-août,et
parfois plus tard. Mais ilarrive aussi que par faible enneige-
ment,
l'entréesoit
accessible dès août.Elle s'ouvre au pied de I'arête sud du
Ruan, dans le
bassin-versant de Barberine, par un porche haut d'envi- ron 1 m 50 axé sur une fracture sub-verticale, au pied d'une
barrerocheuse d'une dizaine
de
mètres.Plusieurs échantillons de
rocheprélevés tant à l'entrée qu'à I'intérleur nous montrent qu'elle
se
développedans les
calcaires jurassiques duTithonique supérieur (déterm.
R.Wernli),
Cette entité présente
du
reste une très forte karstification dans la région, et c'est en son sein que se dévelop- pent les circulations souterraines que nous avons mises en évidence.Avant de présenter les investigations
scientifiques menées dans
cette cavité, disons quelques mots de son aspect.Une importante gélifraction affecte la
galerie d'entrée, et ceci
jusqu'àquelques dizaines
de
mètresà
I'in-térieur. Des blocs
anguleux hétérogènes I'attestent.Mais il
estaussi possible que des phénomènes de décompression affectent ces con-
duits
encore prochesdes
falaisesextérieures.
Des concrétions de glace s'y obser-
vent
souvent, pérennes parfois. Le trace se présente en bal'onnette, avec des changements brusques de direc- tion, de près de 90" chaque fois, au gré des fractures rencontrées.Le
développement subhorizontaltraduit I'allure de la
stratification locale.Des
recoupementsà
I'em-porte-pièce interrompent souvent le
réseau originel, qui se distingue par
la
formede ses
galeries,de
type phréatique,et le
concrétionnement recouvrant ses parois.A
I'occasion,on
rencontre des dépôts calcitiquesplus massifs,
stalagmitiques généralement,souvent
corrodés.Des creusements vadoses affectent parfois le plancher. De faibles venues
d'eau
apparaissentici et là.
Elles proviennent de la surface, lapiazée et chaotique, 30 à 50 m plus haut.Des
soutiragesont
provoqué des effondrementset la création
de petites sallesau
plafond desquelles on retrouve la galerie originelle.Plus loin dans le réseau, la présence de dépôts fins argilo-sableux devient plus fréquente. Ce sont du resle eux
qui mettent
fin à
la continuité de lacavité par comblage jusqu'à la voùte.
Un certain nombre de travaux scien- tifiques ont été menés dans RU-1.
Tout d'abord des traçages à I'uranine, dans un ruissellement plus important que les autres, afin de déterminer le
devenir des eaux infiltrées dans ce secteur
de la
montagne.ll
apparaît qu'elles résurgent au fond du cirquedu
Fer-à-Cheval, après avoir passé sous la frontière franco-suisse (T12,fig.
1). Avecde
nombreuses autres pertes sur le versant helvétique, c'est un déficit d'écoulement pourle
bar- rage d'Emosson.Ensuite, nous avons tenté une esti- mation d'âge sur une concrétion mas- sive par paléomagnétisme
et
radio- datation.La première technique, menée con- jointement avec
le
Dr.L
Hedley duGroupe de Géophysique
deI'Université de Genève, ne nous a pas donné
de
résultats convaincants, lafaible quantité d'oxydes
de fer
en étant la raison.Nous
nous sommesalors
tournés vers une radiodatationU/Th.
Elle aété confiée à Y. Quinif, du CERAK, à
Mons en Belgique. Un
premieréchantillon, prélevé
en
1994, s'estrévélé
avoir été
géochimiquementouvert,
c'est-à-dire contaminé pardes éléments détritiques ou des col- loïdes externes. Cela n'est pas très surprenant vu l'état des concrétions, souvent corrodées. Y. Quinif pencherait cependant pour un âge supérieur au million d'années
Un second échantillon a été prélevé
en
1995au
cæur d'une stalagmitepour eviter cet écueil. Le
même problèmes'est
pourtant présenté.Enfin un troisième prélèvement a eu lieu I'année suivante, plus avant dans le réseau. Celui-ci, enfin non-ouvert,
a
donné un âge excédant 400 000 ans, limite de la méthode.Nous nous sommes
ensuiteintéressés au remplissage détritique
pour en
déterminerla
répartition granulométriqueet
les constituants.Dans la partie plane et rectiligne de la
cavité, là où les dépÔts n'ont pas été (encore) lessivés, nous avons fait un
@æPatrimaineenPaysdeSayoie-ALS|,l-n=12-t3l2004
L'entrée de la grotte RU-1.
Le piolet est planté dans un petit vallum morainique
I
prélèvement que nous avons tamisé.On n'observe que des
marnes broyées,des
farines glaciaires, de l'Argovien : I'origine glaciaire est donc indubitable (dét. J. Martini).Finalement, nous avons déposé dès 1995
en
trois endroitsde la
cavité, des thermomètresà
minimum_maxi_mum. Deux emplacements
ont
été choisis dans des zones exemptes de ventilation apparente, c'est_à-dire aufond de galeries colmatées,
le troisième dansla
galerie principale, au milieu du réseau.Chaque année, la lecture a été faite en août, septembre ou octobre, suivie d'une remise à zéro, pour autant que la cavité ait été accessible.
Les valeurs vont de -0.S" C à +2" C,
selon les endroits et les années, avec cependant
une
tendancevers
lesvaleurs positives ces
dernières années. On se situe donc, actuelle_ment, dans cette région des Alpes,
très près de I'isotherme 0"
Cannuelle, en fait 60 à g0 m plus bas.
C'est sensiblement sous la valeur de 2 800 m avancée par Vivian dans son ouvrage (19T5), mais en bon accord
avec le chiffre de Z Sg0 m
de Gauthier (1973). par contre, avec laformule proposée par Maire (1gg0), on trouve une altitude de
2
050 m,bien trop basse.
Lors de chacune des visites,
lecourant d'air, sensible, soufflait de
Sols polygonaux
I'extérieur
vers
I'intérieur,à
cettepériode de l'année (août à octobre).
Et ceci en accord avec
"l'effet cheminée".En
ce
qui concernele
cadrede
lagrotte RU-1,
il est
marquépar
les glaciers.En
effet,le front actif
duglacier
des
Fondsse
trouveà
lamême altitude
que la grotte,
soit2
5AA m. La langue suddu
glacier (glace morte?) s'écouleà
une cen_taine de mètres de la cavité, un peu en contrebas. Cette situation ressem_
ble donc à celle de la
grotte du Milchloch, au glacier de Grindelwatd, mais avec RU-1, on est près de 1 000 m plus haut.D'après des documents
pho_tographiques du début et du milieu du
XX'
siècle,le
glacierdes
Fonds àcette époque masquait I'entrée de la grotte. On constate du reste à I'entrée un petit vallum transversal d'un demi_
mètre de hauteur. ll date sans doute du Petit Age glaciaire.
La grotte
a
dû fonctionner en perte pour des eaux sous-glaciaires. Au gré des avanceset
des reculs du front, de la moraine de fond a été injectée dans la cavité.Celle-ci
a
certainement même été totalement colmatée, alors que I'onétait
en
régime phréatique,par
undépôt
fin. On est
présentement envoie d'un
décomblement,qui
aprobablement débuté
à la fin
des dernières périodes froides du Dryas.La circulation de I'eau s'est faite de I'extérieur vers l'intérieur,
si
I'on se réfère aux cupules d,érosion sur les parois.On peut
essayerde
remonter plusavant dans
le temps.En
admet-tant une
abrasion glaciairede
150 à200 mètres
parmillion
d'années,on arrive à la con-
clusion que
c'esttoute la
partieamont de la grotte
qui a
disparu,décapitée
par I'enfoncement duDans la partie rectiligne de RU-1, une galerie en ,,trou de serrure" montrant 2 phases de creusement (en photo M.L. Sesiano)
glacier des Fonds.
De plus, la présence d'un concrétion_
nement massif
à
cette altitude peut s'expliquer par un réseau qui se trou_vait au début du
euaternaire, ou avant, plus bas. En effet, avec un tauxde
surrection des Alpes d'environ 1mm/an (actuellement), dont la moitié est la proie de l'érosion sous toutes ses formes,
on
trouve une altitude d'environ 1 S00 mètres. Ce chiffre estdavantage compatible avec
laprésence
d'un couvert végétal
àmême d'assurer une agressivité des eaux capables d'abandonner, quand les conditions de pression partielle de COe
et de
température sont favor_ables, les dépôts de calcite observés
-
ALst/
-ry.7{.æEEIEgW @
Nature et Patrimoine en pays
de
Savoiedes
éboulis masquantle
pied des parois, au Fond-de-la-Combe, en rivedroite.
Le
qualificatif "Verte"a
été donnépour
évitertoute
confusionavec
l'émergencede la
Gouille,au-dessus
de
Nantbride, trop-plein de sortie des eaux du Fontanil. Cesdeux
dernières sourcesétant
lesendroits
où les
eauxdu lac de
laVogealle revoient le jour.
Comme nous I'avons dit plus haut, on
se
trouveici au
contactentre
les calcaires perméablesde
I'Argovien-Tithonique et ceux du
Bajocien supérieur.Dès 1995, nous avons surveillé cette
émergence avec un
limnigraphe (autonomie: 3
semaines). Après avoir subi plusieurs mètres de neige tassée durant I'hiver 1998-99, nous I'avons récupéré écrasé,et
donc enlevéen juin
1999. Nous avionsaussi travaillé avec une
échelle graduée, au même endroit, du reste toujoursen
place. Lorsde
chaque visite,nous en
avons profité pour mesurerla
températureT, la
con-A gauche, l'émergence du Foulon (eau du glacier du Ruan). En bas, résurgence colorée lors du traçage T1 (la personne entourée donne l'échelle).Au centre, une cascade issue du glacier de Prazon
ductibilité
k et le
pHde
I'eau, ainsi que celle de la cascade de la Gouille Verte,à
une centaine de mètres en aval, issue elle de la région du lac de la Vogealle.Relevons que l'accès à ce secteur en
hiver peut être dangereux,
car avalancheux. L'auteur de ce travail adu reste été surpris par
une avalanchede
poudreuse alors qu'ilfaisait les
mesures,le
12112197,avalanche tombée
de la
crête fron- tière, près de 2 000 mètres plus haut.Au
printemps, nous dûmes même une fois localiser le limnigraphe avecun
magnétomètre, enfoui qu'il était sous deux mètres de neige !Les enregistrements
du
limnigraphe montrent que le régime de la Gouille Verte est nivoglaciaire, avec un débit minimum en janvier et février, et maxi- mumen
mai et juin, puis diminuant lentement. Cependant, si I'augmenta- tion du débit est rapide au printemps, la décroissance automnale vers l'étia-ge
d'hiver est bien plus lente. Celatémoigne d'un aquifère à
fortes réserves et tend à justifier la vitessede
transitdu
traceur, assez faible dansle
type d'environnement alpin que nous étudions.En hiver, de brusques redoux dus à
une éphémère remontée
de I'isotherme OoC, peuvent amener une crue brutale. Les oscillations diurnesde
fonte s'étendenten
général de10
h à
18h
chaque jour, avec une montée plus rapide quela
décrue.Leur amplitude est
la
plus marquée d'avril à juin. Dès novembre, elles ne sont pratiquement plus perceptibles.Nous n'avons pas de données pour janvier, février et début mars, le limni- graphe étant
à
cette période enfoui sous la neige.En ce qui concerne les températures,
on
note une amplitude annuelle de2'C pour la
sourcede la
Gouille Verte,soit
entre4,5 et
6,5"C, surI
ans de mesures. La différence est évidente avec le torrent de surface, lacascade de la Gouille, où I'on a près de 20"C. On a pour la source un fort amortissement saisonnier, dû
à
unecirculation profonde
et
lente, proba- blement en régime phréatique.ll est intéressant de comparer la tem- pérature moyenne de la source de la Gouille Verte, 5,5oC, avec celle d'une autre source dont nous avions mis en
évidence le parcours profond, celle du Vivier. Elle draine une partie du Désert de Platé, bassin-versant d'alti-
tude,
prochedu
Haut-Giffre;
ellesourd
à
Magland dans la vallée de I'Arve, à I'altitude de 500 m. Sa tem- pérature moyenne est de 8,7"C, avecune faible amplitude
thermique annuelle, moinsde
1"C.En
appli- quant une décroissancede la
tem- pérature avec I'altitude de 6,5"C/km,on
constateque la
sourcede
laGouille Verte
et la
source du Vivierreflètent bien la
température moyenne annuelledu lieu
d'émer- gence.On peut étudier
la
relation entre latempérature et la conductibilité, cette dernière étant liée à la minéralisation.
Sans surprise,
on
constate qu'aux périodes d'étiage (ianvier et février),on a
expulsion d'eau "chaude" et minéralisée,qui a
"traîné" dans leréseau (effet
"piston-flow"). C'estsurtout visible au début de
nosmesures, où le pas est
plusrapproché qu'à la fin.
Avec
l'amorcedes
cruesde
prin- temps surviennentdes
eaux ayant transité assez rapidementdans
leréseau, ce qui provoque un abaisse-
ment de la
températureet de
laminéralisation,
avec des
accidents liés à de brefs épisodes froids, ou àdes pluies jusqu'à haute altitude. On remarque que les températures les plus basses sont atteintes en juillet- août, en parfaite opposition de phase avec ce qui est observé dans I'envi- ronnement extérieur local.
ll est à nouveau intéressant de noter
qu'à la
sourcedu
Vivier,la
con- ductibilitéest
bien plus élevée, soit prèsde 500
pS/cm (microsiemens par centimètre : unité de mesure de laconductivité électrique d'une eau), contre 125 pS/cm à la Gouille Verte.
Ceci est dû à l'altitude du bassin-ver- sant, plus élevé dans le cas qui nous concerne.
Enfin, pour notre émergence, I'ampli- tude assez faible des fluctuations de
la
conductibilité, environ80
pS/cm, atteste d'une karstification assez peu développée, ce que nous a montré du reste la lenteur des transits.En I'absence de station de jaugeage et d'un seuil, nous avons essayé de faire des estimations du débit de la Gouille Verte, là où son lit est large, à
fond plat, avec un écoulement à peu près laminaire,
soit
près d'un petitpont en aval de
notre station de mesures. Nous avons essayé de les corréler avecles
hauteurs lues sur l'échelle graduée.On peut dire que
le
débit minimumest
atteintaux
moisde
janvier etc!n* *n
Pays de Savoie-
ALSN-
n"12-
0312004février, jusqu'au début mars, soit environ
100 l/s. Puis on observe une rapide augmentation avec 200
l/s en
avril, 300en
mai, 400 enjuin et
500 en juillet et août. Puis une lente décrue s'amorce avec 400 l/s en septembre,environ 300 en octobre,
2OO en novembre,puis 150 en
décembre.Ce ne sont que des valeurs approxi- matives et sujettes à des fluctuations
rapides selon les
conditions météorologiques:
brusque redoux hivernal, pluieen
altitude surde
laneige fraîche, gros orages
d'été,épaisseur
plus ou
moinsforte
dumanteau neigeux, etc. Avec
ces valeurs, on obtient un module annuel de 270 l/s. Fort de cette estimation, on peut tenter un bilan.La
Gouille Verte drainela
surface englacéese
trouvantà
I'ouest del'arête reliant la Tour Sallière
au Dôme, puisà
I'Eglise (traçage T10), mais également la surface au-nord de ce dernier sommet (traçage T13) ;de plus, elle est alimentée aussi par le glacier des Ottans s.l. (traçageig;,
et partiellementpar le
petit liarst desOttans sur le versant
français (traçage T6). Celafait
une surlace totale d'environ4
kmz. Même si une faible quantité d'eau quitte le glacier du Ruan suisse pour être caplée etalimenter le lac de Salanfe
(un module annuel de 35 l/s correspond àun drainage d'une surface
de 0,5 km2),il
nous reste 3,5 km, pour alimenter les sourcesde la
Gouille Verte. Le module spécifique est donc de 80llslkm,.
Cette valeur est plus élevée que celle avancée par Audra(1994) pour des réseaux
alpins (Autriche, Vercors), mais nos bassins d'alimentation sont plus hautset
lapluviométrie plus forte.
Si I'on prend une hauteur de précipi- tations annuelles de 2,7 m, en accord avec les totalisateurs pluviométriques de la région, et une évapotranspira_
tion
de
15 o/o,il
nous reste 2,3 m àévacuer souterrainement. Cela cor- respond
à un
moduleannuel
de 250l/s,
valeurdu
même ordre de grandeurque ce que nous
avons relevé aux sources de la Gouille Verte durant nos années d'observations.Conclusions
1^r"tt"
étudea
permis d'expliquerUrl'origine
helvétique des eàux de la plupart des émergences du Fer-à-Cheval et du
Fond-de-la-Combe.D'autres cascades proviennent de
torrents de surface,
eux-mêmes alimentés par la fonte des glaciers de Prazon et du Ruan, en rive gauche dela vallée principalemenl.
parmicelles-ci, il faut mentionner
laMéridienne et la Fontaine de I'Or (ou Pierrette). La première semble avoir pour origine les eaux de fonte de la
branche sud
du
glacierde
prazon.Une reconnaissance sur celui-ci ne nous a pas permis d'en avoir la certi_
tude, mais elle a été rapide.
En revanche, concernant la pierrette, nous avons I'impression que les deux
émergences qui lui
donnent naissance, situéessur la vire
qui courtà
mi-hauteurdu
Tenneverge,proviennent d'eaux
disparaissantdans les lapiés du calcaire
duTithonique, sur le flanc sud
du Tenneverge, vers 2TS0 m d'altitude. lly a là un
névé-glacier permanent dans un petit cirque, dont nous avons pu localiser les pertes. Si les condi_tions sont favorables,
ce
sera notre objectif que d'en faire un traçage.En conclusion, malgré des conditions
de terrain et
météorologiques souvent difficiles, ce travail a permis de soulever un large pan du voile qui recouvrait jusqu'alors I'origine deseaux de cette belle et
sauvage région des Alpes(à
I'exception àu fond de la vallée en été !) .Jean SESIANO, Département de Minéralogie de
I'Université de Genève
N. Coppo effectue un traçage dans une fissure du ca!caire, au front du glacier des Fonds (opération T4)
Remerciements
Ce travail a été soutenu entre 1gg3
et
1998 par un subsidedu
Fonds National suisse pourla
Recherche Scientifique, par une contribution dela
Sociétépour la
Connaissance des Alpes, à Genève, et d'électricité d'Emosson S.A.,et enfin par
un subside du Comité scientifique desRéserves Naturelles de
Haute- Savoie et de I'association ASTERS(convention No T-2001),
cette dernière m'ayant également facilité I'accès au site du Fer-à-Cheval.L'émergence de la pierrette, au Tenneverge à l'étiage, et G. Gauthier
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Nature et Patrimoine