G ERGONNE
Astronomie physique. Essai analytique sur la nature des queues des comètes
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 20 (1829-1830), p. 65-84
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ASTRONOMIE PHYSIQUE.
Essai analytique
surla nature des queues des
comètes ;
Par M. G E R G O N N E.
SI
un étudiant dequelque
universitéd’Allemagne prenait
poursujet
de thèse laquestion
dontje
vaism’occuper,
eett-il cent foisraison pour le
fond ,
il trouverait difficilementgrâce
devant ses doc-tes
juges,
s’il neprenait
soin de débuter par unedescription
dé-taillée des diverses apparences
qu’ont présente jusqu’ici
les queues descomètes ,
et par unexposé historique
deshypothèses , plus
oumoins
plausibles, qui
ont étéimaginées , depuis
Aristotejusqu’à
nous, dans la vue
d’expliquer
la cause de cessingulières
apparen-ces. Cette
partie
de sa tâche ne seraitpourtant
pas laplus
diffi-cile à
remptir ,
car ellen’exigerait
à peuprès
de lui que de trans- crire cequ’on
rencontre sur cesujet
dans le V.mechapitre
du 2.me vo-lume de la
Cométographie
de PINGRÉ.Mes lecteurs voudront
bien je
pense, trouver pouragréable
queje
leur fassegrâce
de cette éruditiond’emprunt ,
et que, me bor-nant à leur
indiquer
la source oùj’aurais
pu moi-mêmepuiser, j’entre
de suite en matière par unexposé
sommaire del’origine
etdu
progrès
de mes idées sur lephénomène auquel je
me propose de consacrer cet essai.A
l’époque
oùje m’occupais,
pour lapremière fois ,
de la re-cherche des lois
du
mouvement de lalumière
, à travers les mi- lieuxtransparus
de densitévariable ,
la comète de1807
brillaittoutes les nuits sur notre
horizon ; je
nepouvais porter
mes re-Tom. XX, n.° 3,
I.erseptembre I829.
I0gards
vers elle sansréfléchir
sur la nature de cetteapparence
sin.gulière qui,
sous le non de queue , barbe ouchevelure,
accom-pagne communément et exclusivement ces sortes d’astres. Je m’eni-
pressai
de relire avec soin tout’ cequ’on
avait écrit sur cesujet ;
mais
je
netrouvais dans
tout. cela que dessuppositions
vagues,insuffisantes et inconciliables avec les Ibis d’une saine
physique.
Dansmes recherches sur le
phénomène
dumirage j’avais
eu soin d’a-bord de tenir
compte
de la courbure des couchesatmosphériques
de densité constante, comme l’a fait
postérieurement
M. Biot.Quel-
ques résultats
d’analyse
queje
venais d’obtenir rne firent faire desinguliers rapprochemens,
etje
fusconduit,
presque involontaire-ment , à
unehypothèse
tellement hardie et tellementéloignée
desidées reçues, que
je
crus devoir mettre tous mes soins à la re-pousser ,
commej’aurais
pu le faire d’unepensée coupable.
J’étais presque parvenu, non sans
beaucoup
d’effort et depeine,
à bannir tout-à-fait cette
hypothèse
de monesprit , lorsque
la bellecomète de 181 1 s’offrit à mes
regards
et me fitretolnber, malgré nioi ,
dans mespremières
réflexions. Plusj’envisageais
monhypo-
thèse et
plus
elle meparaissait plausible,
et même la seuleque
l’on
pût
raisonnaMement admettre.Toutefois, éloigné,
pargoût,
de tout ce
qui
n’estpoint susceptible
de démonstrationrigoureuse je
ne fispart
de mes réflexions àpersonne ;
seulementayant
enl’occasion d’écrire,
dans le mêmetemps,
à M. l’astronome Flati- gergues , ausujet
d’un mémoire sur ladiffraction, qu’il
avait adressé à l’Académie deNistnes,
et nepouvant guère
lnèdispenser
de luiparler
de la comètequi
alors attirait tous lesregards,
même ceuxdes
plus indifférens ,
et dontje
venais de calculer uneéphéméride, je
luitouchai quelque
chose de mesconjectures , dont je
ne luidonnai d’ailleurs
qu’une
idéetrès-succincte , ayant
même soin d’al- ler au devantdes principales objections qui pourraient
m’êtreop- posées.
Cepatriarche
de l’astronomie en fut si peuoffusqué
que, par une lettre deViviers ,
en date du 25 novembre I8 I, il niefit 1 honneur de me
répondre
en ces termes :» J’ai
examiné, Monsieur
avec leplus grand soin , l’hypothèse
» sur la nature des queues des
comètes,
que vous m’avez fait l’hon-» neur de me
communiquer; j’en
ai été enchanté. Elle est très-.»
simple ,
et lasimplicité
est le cachet de la nature. Votre idée est»
sublime ,
mais elle vous donnera sans doute degrandes
difficul-» tés pour la réduire au calcul. Il me tarde
beaucoup
de vous voir» achever ce
travail,
et de lire le beau mémoire que vous nous» faites
espérer
sur cet intéressantsujet. »
On ne me taxera pas sans doute d’un
engouement
excessif pourmes
idées,
si l’on considère que ,malgré
uneapprobation
si flat-teuse et si
encourageante, j’ai résisté , pendant
dix-huit ans encore,à la tentation de
publier
mesconjectures
sur unsujet qui
m’avaittant
préoccupé.
Mes recherches récentes sur le mouvement de la lu- mière dansuumilieu transparent
de densitévariable (
tom.XIX,
pag.
257 )
ont rendu la tentationplus forte,
et, comme en mêmetemps les
glaces
del’âge
ont rendu la résistance moinsénergique , j’y
succombeaujourd’hui ,
ne fassent que pour m’en ôter le tour- ment et n’étreplus
tenté à l’avenir.C’est,
si l’on vent, un vieuxprocès
bien chanceux quequelle qu’en puisse
êtrel’issue, je
veuxfaire
juger définitivement
pour n’avoirplus
désormais à m’en oc-cuper en aucune sorte.
Au
surplus , quand
bien même monhypothèse
serait de nature à nepouvoir
absolument êtreadmise,
cequi
va suivrepourrait
en-core être
digne
dequelque intérêt,
comme exercice decalcul ,
etcomme
supplément
auxexemples
quej’ai
donnos dans le mémoirerappelé plus
haut. On aquelque
foisreproché
à Euler de créer deshypothèses
pour se donner teplaisir
de faire descalculs,
etje
sens fort bien que , si c’est là un travers ,
je
suis loin d’avoir les- mâmes titres que cet
illustre géomètre
à me le fairepardonner ;
maisje
n’ai pas nonplus
laprétention
de valoir mieux que lui sous au- cunrapport.
Soit ,
dansl’espace,
une masse très-étendue d’une substance ga-zeuse
transparente enveloppant
ou dumoins pouvant envelopper un
noyau
solide , qui pourra lui-même être
recouvert d’une coucheplus
ou moins
épaisse d’un liquide également transparent.
Leliquide
et legaz se
disposeront,
autour du noyausolide,
suivant les loisde l’équi-
libre ;
et la densité de la masse gazeuse , par l’effet combiné de son élasticité et del’attraction
exercée surelle, tant
par le noyau que par les couchesinférieures, décroîtra
sans cesse dudedans
au-de-hors,
ainsiqu’il
arrive à la masseatmosphérique qui enveloppe
notre terre, si ce n’est
qu’elle
pourra s’étendre à unebeaucoup plus grande distance
du centre. Telle est , dans monhypothèse,
l’idée
qu’on
doit se faire d’unecomète,
du moins decelles qui
semontrent
accompagnées
d’une queue ouchevelure.
Pour ne
pas trop compliquer dabord la question , supposons
que le noyau solide de l’astre soitrigoureusement sphérique
et quetoute la masse de cet astre soit assez distante des autres corps cé-
lestes,
et dusoleil
enparticulier ,
pour que l’attraction exercée parces corps divers sur les molécules
qui
lacomposent
soit sensible-ment la même pour chacune de cés
molécules ,
et pourqu’en
mêmetemps
ellesreçoivent
toutes de l’action échauffante du soleil une tem-pérature
sensiblement constante.Alors ,
abstraction faite de tout mou-vement, soit de rotation soit de translation dans
l’espace,
les par- tiesmobiles
de la comète ne seront soumisesqu’à
leur action mu-tuelle,
et la masse gazeuse,qui
concourt à laformer,
et quej’ap- pelerai
àl’avenir l’atmosphère cométaire , s’arrangera
de telle sorte ;autour du noyau ,
que
ses couches de densité constante seront à la foissphériques
etconcentrique ;
et, commeje
l’aidéjà
observéplus haut ,
la densité de cescouches
sera d’autant moindrequ’elles
auront un
plus grand
rayon. Il en sera donc de même de leurpouvoir réfringent , si,
dumoins,
commeje
le suppose encore pour le moment,l’atmosphère
cométaire estchimiquement homogène.
Considérons
présentement
un despoints
lumineux de lasurface
dusoleil ;
cepoint
lance des rayons dans toutes les directions. Ceux d’entre euxqui
ne rencontrentpas l’atmosphère
cométairepoursai-
ïent leur
trajet
enligne droite,
dans lesprofondeurs
del’espace ;
et il en est de même du rayon
unique qui
sedirige
vers le cen-tre du noyau ,
puisqu’il
traverse toutes les couchesgazeuses
de den-sité
constante dans des directions normales. Dans le casparticulier
où il n’existerait
pas de
noyau opaque , ce dernier rayonpoursui-
vrait sa route au-delà du centre de
l’astre ,
sans êtreplus
déviéqu’a-
vant de l’avoir atteint.
Les rayons
intermédiaires qui s’éloigneront
peu de ces rayons ex-trêmes ne s’écarteront pas sensiblement de la direction
rectiligne ,
savoir : les uns parce
qu’ils
traverseront descouches
extrêmementrares de
l’atmosphère cométaire,
et les autres parcequ’ils
en tra-verseront les
couches,
même lesplus denses ,
dans des directionspresque normales.
Quant
aux rayonsqui
s’écarterontplus
sensible-inent de ces deux
limites ,
onconçoit
que, suivant les variétés que pourraprésenter
leur directioninitiale ,
ils serontplus
ou moinsinfléchis vers le centre de
l’astre ,
de telle sortequ’il
y aura une certaine direction initiale àlaquelle répondra
le maximum decour- bure. Il est d’ailleurs manifeste que lestrajectoires
décrites par ces rayons seront toutes des courbesplanes,
dont lesplans passeront
tous par le
point rayonnant
que nous considérons sur la surface dusoleil ,
et par le centre de la comète.Il y aura
donc ,
comme l’onvoit ,
dans l’unquelconque
de cesplans ,
une infinité detrajectoires
dout cellequi
passera par le cen-tre de l’astre sera
rectiligne,
tandis que cellesqui
s’écarteront depart
et d’autre de celle-là auront des courbures continuellement crois-santes
jusqu’à
un certain terme , au-delàduquel
leur courbure di-minuera,
aucontraire ,
continuellement de manière à devenir en-fin ,
de nouveau , tout-à-fait nulle.Il est aisé de conclure de là que
lès trajectoires, appartenant
àuu même
plan quelconque,
secouperont consécutivement,
de manièreà
être toutestangentes à
une sorte decaustique qui
en seral’enveloppe
commune , ou , en d’autres termes ,
qui
sera la solutionparticullcre
de
leuréquation différentielle.
Il est même visible que la droitequi joindra
lepoint rayonnant
au centrede la
coniète sera un dia-mètre
principal
de cettecaustique , puisque
les circonstances serontrigoureusement
les mêmes depart
et d’autre de cettedroite.
Voilà donc une courbe surlaquelle
viendront converger, tour à tour) les rayons émanés dupoint lumineux ;
de sorte que les moléculesde
l’atmosphère
cométairequi
se trouveront situées sur cettecourbe,
devront être
plus
éclairées que cellesqui
se trouverontsituées
end’autres
points
de sonplan ;
or, comme il en ira de même pourtous les
plans
conduits par lepoint rayonnant
et par le centre del’astre,
il s’ensuit que, si l’on fait tourner cettecaustique
autourde la droite
qui joint
ces deuxpoints,
elleengendrera
une surfacede révolution
qui
sera le lieu despoints
lesplus
éclairés de l’at-mosphère
cométaire.Voilà de
quelle
manière les choses sepasseraient
si le soleil setrouvait réduit à un
simple point lumineux ,
et il estprobable qu’a-
lors la
portion
fortement éclairée del’atmosphère
cométaire forme-rait une
couche trop
mince pourpouvoir aflecter,
d’une manièresensihle,
l’0153il d’unspectateur placé
sur la surface de notre terre;mais chacun des
points
de laportion
de la surface solairequi
re-garde
lacomète
donnera naissance à unepareille
surfacecaustique ;
et l’ensemble des surfaces
caustiques qui répondront
à tous cespoints, lesquelles
se succéderont les unes aux autres, sansinterruption ,
pro-duira ,
dansl’atmosphère cométaire ,
nonplus
unesimple surface
mais un volume de molécules fortement éclairées. Il arrive un
phé-
nomène assez
analogue , lorsque,
denuit,
on tient un verreplein d’eau ,
àquelque
distance de la flamme d’unechandelle ;
en regar-dant
par-dessus
le verre , onaperçoit distinctement ,
dans son in-térieur ,
un volume deliquide plus
ou moinsconsidérable,
sensi-blement
plus
éclairé que le reste de la masse.Ajoutons
que les sur- facescaustiques, dont-
l’ensemble formera laportion
laplus
éclairéede
l’atmosphère
cométaire, se succédant les unes aux autres sansinterruption pourront
avoir elles-mêmes leur surfacecaustique,
leursurface
enveloppe ,
solutionparticulière
de leuréquation
différen-tielle commune,
laquelle
pou-rra avoirplusieurs
nappes , telles qugles molécules de
l’atmosphère
cométairequi s’y
trouveront situéesseront éclairées d’une lumière
plus
intense encore.Telle est , dans mon
hypothèse ,
la causepurement optique
decette apparence
qui,
sous le nom de queue, de barbe ou de che-velure
, accompagne laplupart
des comètes observéesjusqu’ici ;
etl’on voit que cette
hypothèse
ne tend à rien moinsqu’à
attribuer àl’atmosphère
descomètes,
un rayon au moinségal
à lalongueur
de leur queue,
c’est-à-dire,
pourbeaucoup
d’entreelles,
un rayon deplusieurs
dixaines de millions de lieues. Voilà cequi m’avait ,
en
quelque
sorte,effrayé
aupremier abord; je craignais
sérieuse-ment
qu’à
notretrès-grand préjudice,
lesatmosphères
cométairesne vinssent
quelquefois
se mêler avec lanôtre ; niais ,
peu à peu ,je
me suis familiarisé avec cetteidée ,
etje
suisprésentement
tout-à-fait
aguerri.
Cette
hypothèse explique
tout naturellementpourquoi
la queue d’une comète est constammentopposée
ausoleil ;
et l’on voit même,qu’abstraction
faite des causesperturbatrices
dontje m’occuperai
tout-à-l’heure ,
cette apparence devrait constamment affecter la fi- gure d’un solide derévolution ,
ayant son axe dans leprolonge-
ment de la droite
qui joint
les centres des deux astres. Cettehy- pothèse explique également
la transparence de cette traînée lumi-neuse , les courbes
plus
lumineusesqu’elle
dont elle estquelquefois sillonnée,
et enfinl’espèce
de vague indéfinissable que ses bords of- fieat à la vue, etqui
faitqu’au
même instant deuxspectateurs
ontsouvent
beaucoup
depeine
à tomber d’accord sur son étendue etses limites.
Si une comète
s’approche
dusoleil,
les rayons solairesqui
tra-verseront son
atmosphère
ypénétreront
dans des directions deplus
en
plus divergentes;
les diversestrajectoires qn’ils
ydécriront iront
douc se couper de
plus
enplus
loin derrièrel’astre ,
à peuprès
comme le
foyer
d’unelentille
convexeséioigne
deplus
enplus
derrière
elle ,
à mesureque
lepoint rayonnant
en devientplus
voisin. En outre,
l’action
échauffante dusoleil , devenue plus éner- gique,
par l’effet d’uneplus grande proximité,
dilatera deplus
ehplus l’atmosphère cométaire ; cette atmosphère acquerra
donc uneplus grande étendue,
et, parsuite
, laqueue
de la comète uneplus grande longueur.
Cette dernière considération
explique
fort bienaussi
comment cen’est pas d’ordinaire à
l’époque
dupérihélie ,
mais un peuaprès ,
que la queue d’une comète
parvient
à saplus grande
extension.On
conçoit,
eneffet,
que l’action dilatente de la chaleur solaire continuant à s’exerceraprès
lepérihélie,
ce nedoit
êtreégalement qu’après
cetteépoque
que l’astreàura acquis
son maximum de terri-pérature
et par suite son maximum de dilatation et de volume, C’est ainsi que lejour
leplus
chaud de l’année est d’ordinairepostérieur
à
l’époque du- solstice,
et l’heure laplus
chaudedu jour, posté-
rieure à celle de midi.
Si la comète n’est pas aussi distante des autres corps
célestes,
etdu soleil en
particulier ,
queje
l’ai d’abordsupposé ,
ni l’actionattractive exercée sur elle par ces différens corps , ni l’action dila-
tente de ce dernier ne seront les mêmes pour tous les
points
deson
atmosphère ;
les couches de densité uniforme de cette atmos-phère pourront
donc cesserd’être ,
à lafois , sphériques
et concen-triques ;
et il en sera demême,
àplus
forteraison ,
si un mou-veroent de rotation de la
comète,
sur son axe ,développe
dans sonatmosphère
une forcecentrifuge ;
de là les variétés infinies que pourraprésenter
la queue descomètes, qui
cessera dès lorsd’être
un solidede
révolution ;
de là aussi les variétés queprésentera
la queue d’une même comète aux diversesépoques
de sonapparition;
delà
enfinle peu de
régularité
et de.symétrie
que ces sortesd’apparences
of-friront
quelquefois à
la vue duspectateur.
Onpeut conjecturer
que,
parmi
ces diverses causesd’anomalie ,
il s’en trouvera d’à peuprès
communes à toutes lescomètes,
en vertudesquelles
l’extrémité de la queue de laplupart d’entre
elles se courbera dans un sensopposé à celui du mouvement.
J’ai tacitement
supposé ,
dans tout cequi précède,
que les dif-férentes
couches del’atmosphère
cométaire avaient exactement, la même constitutionchimique ,
et ne différaientuniquement
les unesdes autres que par leur
densité ;
mais ilpourrait
fort bien n’en .être pastoujours
ainsi. Il sepourrait quelquefois que
cette atnios-phère
fût unmélange
de gazdivers ,
dont l’action sur la lumièrene suivit pas exactement le
rapport
desdensités ,
c’est-à-direqu’il
se
pourrait
que la loi de décroissement de ce quej’ai appelé
ré-cemment densité
optique .(*) ,
fût différente de la loi de décrois-sèment de la densité
physique;
il sepourrait
même que lapremière
de ces densités fût croissante de l’intérieur à
l’extérieur,
tandisqu’au contraire ,
l’autre irait en décroissant dans cette mêmedirection ;
c’est en
particulier
cequi
arriveraitsi ,
parexemple,
les couches lesplus
voisines du noyau étant formées d’ungaz à
peuprès
pa- reil à notre airatmosphérique ,
les couchessupérieures
étaient for-mées de
quelque
gaz de la nature du gazhydrogène,
ou mêmede
quelque
autre gaz , tout-à-fait inconnu sur notreplanète,
réfrac-tant
plus
encore lalumière ,
à densitéégale ,
que ne le fait celui-là ;
et de là encore une autre source de variété dans lafigure
dela queue. Le calcul prouve, en
effet,
que lechangement
leplus léger,
dans la loi de variation de la densitéoptique
des différen-tes
couches,
suffit pouropérer
unchangement
notable dans la fi-gure des
trajectoires,
et par suite dans celle de lacaustique. Ajou-
tons encore que la queue d’une comète n’est
point
vue sous sa fi-gure
efrective, puisqu’elle
est vue à traversl’atmosphère
de cet as-tre, dont
l’interposition
doit nécessairement enchanger l’apparence.
Il
pourrait ,
enparticulier,
arriver souvent que lestrajectoires
dé-crites par les rayous de la lumière
solaire,
infléchis par l’action del’atmosphère cométaire,
fissent uneportion
de révolution ou mêmeune ou
plusieurs
révolutions autour de son noyau , de telle sorte(*)
Voy.
la pag. 268 duprécédent
voluine.Tom,
XX. Ilque le centre de l’astre se trouvât dans
l’intérieur des
noeuds deces diverses
trajectoires (*) ;
et il est aisé decomprendre qu’alors
les
caustiques passeraient
entre la comète et le soleil. Il arriverait donc ainsi quela
queue de la comète ne serait pas entièrement si- tuée derrière cet astre ; cette queuepourrait ? par exemple, figurer
une sorte de
’parabole
fortallongée ,
dont lefoyer
serait à peuprès
au centre de la
comète ;
etc’est ,
eneffet ,
sous cette formeque
ces traînées lumineuses s’offrent le
plus
souvent à nosregards.
Quant
aux comètesqui
ont paru totalementdépourvues
dequeues,
il est presquesuperflu
de direqu’il
faut admettre que celles-là doi-vent être
dépourvues d’atmosphère sensible,
ou du moins que leuratmosphère
doit être extrêmementcirconscrite ;
ces comètes seront, pour biendire,
de véritablesplanètes
ne différentuniquement
desautres que par une
plus grande
excentricité de leur orbite et parune
plus grande
inclinaison de sonplan
sur leplan
del’éclipti- que. Au surplus ,
il sepourrait
fort bienqu’une comète
environ-née d’une
atmosphère très-étendue ,
se montrâtdépourvue
de quieute ; il slitfirait pour cela que lestrajectoires,
décrites dans cetteatmosphère
par les rayons de la lumière
solaire,
fussent de nature à n’avoir pasd’enveloppe
commune ; et le calcul prouvequ’il peut quelquefois
en être
ainsi.
Il sepourrait
aussi que lescaustiques
fussent desspi-
rales dont les circonvolutions les
plus lumineuses
s’écarteraientpeu
du noyau
qui alors paraîtrait simplement enveloppé
d’unenébu-
losité,
ainsiqu’il
arrivequelquefois.
La
plus
graveobjection qu’on puisse opposer à
cettehypothèse,
est la suivante
que je
n’avais pas dissimulée à M,Flangergues qui
en fut si peu.offusqué, qu’il
n’en fit absolument aucune men-tion dans la lettre dont
j’ai rapporté plus
haut unfragment.
Si l’at-(*)
Ces circonvolutions de latrajectoire
autour du noyau étaient ce que M.Flaugergues répugnait le plus
à admettre , sans doute, à cause de l’insuf- fisance de mesdéveloppemens ;
le calcul en met lapossibilité
tout-à-fait horsde doute.
mosphère cométaire , dira-t-on ,
acommunément
l’immense éten- due que vous lui supposez, et si elle a lapropriété
de dévierplus
ou moins fortement les rayons de la lumière solaire
qui
la traver-sent , elle doit
agir d’une
manièreanalogue
sur la lumière des étoi-les, lesquelles conséquemment ,
vues à travers cetteatmosphère
nedoivent
point paraître à
leur véritableplace. Ur,
on détermine leplus
souvent le lieu des comètes par leurcomparaison
aux étoilesvoisines ; donc,
dans cettehypothèse , ajoutera-t-on ,
de telles dé-terminations ,
et par suite les élémensauxquels
ellesconduisent
devraient être tout-à-fait
erronés ;
cequi pourtant
n’estpoint
con-firmé par le fait.
Pour atténuer la force de cette
objection , je rappelerai
d’abordque ,
malgré
les nombreuxperfecdonnemens qu’ont acquis
de nosjours
lesinstrumens ,
l’art d’en faire usage et les méthodes de cal-.cul ,
il est fort rare que desélémens ,
conclus de lacomparaison
d’une comète aux étoiles
voisines, aient,
dupremier jet,
toute l’exac-titude qu’on
se croirait fondé à enattendre ;
de sorte que des élé-mens déterminés par deux observateurs offrent
quelquefois
des dis-parates
assezchoquantes ,
et que même des élémens conclus parun même
observateur ,
decomparaisons
d’une même comète auxétoiles,
faites à deuxépoques
un peu distantes l’une del’autre,
nesont souvent pas mieux d’accord entre eux. Pour
expliquer
ce dé-faut de
coucordance ,
on s’est retranchéjusqu’Ici
sur lesperturba*
tions causées par les
planètes ,
sur la résistance de l’éther et surtout surl’espèce
de vague queprésentent
les limites du noyau) à rai-son de la nébulosité
qui
l’environnecommunément ;
maispourquoi
ne
pourrait-on
pas , tout aussibien , l’attriblier ,
du moins engrande partie, à
la déviation à traversl’atmosphère
cométaire des rayons de lumière émanés des étoiles ? Etpourquoi
neviendrai-je
pas designaler
ici une nouvelle caused’erreur,
contrelaquelle
on n’auraitpas
songé jusqu’à
cejour
à se mettre engarde ?
Remarquons présentement
que ,lorsqu’on
détermine les lieux d’unecomète,
par sacomparaison
auxétoiles,
on choisit constamment t depréférence
les étoiles lesplus voisines, des
étoilesqui puissent
êtrecomprises
avec l’astre dans lechamp
souvent peu étendu de la lu- nette, sans mêmeapprocher trop
de sesbords ;
les rayons ,par
les-quels
ces étoiles sont rendues visibles àl’observateur, passent donc.
dans leur
trajet,
à traversl’atmosphère cométaire ,
assezprès
du cen..tre de
l’autre;
etj’ai déjà
fait observerplus
’hautque
ces rayons doivent être fort peu déviés. On sait d’ailleursque,
toutes les foisque
la chose estpossible ,
les astronomespréfèrent à
lacomparai-
son aux étoiles voisines l’observation de la hauteur méridienne et
celle de l’heure du passage au
méridien ,
observationsqui , dans
mon
hypothèse ,
nesauraient
êtrepassibles de
l’erreur dont il s’a-git
ici.Des
physiciens,
comme on en rencontre tant encoreaujou rd’hui ,
même’
quelquefois
dans les chaires des hautesécoles , pourraient
croire la
question suffisamment
débattue et monhypothèse complè-
tement
justifiée ;
et il est , eneffet ,
dans laphilosophie naturelle,
un
grand
nombred’hypothèses
universellementadmises ,
bienqu’el-
les ne soient pas
appuyées
sur des fondemensplus solides ;
maisje
sais quej’écris
pour desphysiciens géomètres ,
etje
sensque
je
ne sauraisespérer
d’entraîner leurcollviction ,
sije
ne soumet-tais mon
hypothèse
àl’épreuve délicate mais,
décisive du calcul.S’il
fallait ici
attaquer
laquestion
dans toute sagénéralité ,
leproblème
serait assez
difficile
àmanier ; mais,
en écartant toutes les causesd’aberration y
onparvient
a des résultats assezsimples
et suffisanspour faire
pressentir
cequ’on pourrait
seprornettre
d’uneanalyse plus
savante etplus rigoureuse.
Je
supposerai
donc constamment , dans tout cequi
vasuivre,
que la
comète ,
sans noyau solide niliquide,
estuniquement
for-mée d’une substance
gazeuse -
danslaquelle
les couches de densitéconstante sont à la fois
sphériques
etconcentriques ;
ladensité ,
va"riant d’une couche à celle
qui
la suit immédiatement suivant uneloi
mathématique quelconque,
queje supposerai uniforme
pour toute, l’étendue de la massecométaire. Alors,
commeje
l’ai observéplus
haut,
lestrajectoires
décrites par lalumière ,
à travers une tellemasse, seront des courbes
planes
dont lesplans
contiendront à la fois le centre de cette masse et lepoint rayonnant auquel je
sup-poserai
le soleil réduit.Soit
pris
leplan
de l’unequelconque
de cestrajectoires
pour celui des coordonnéessupposées rectangulaires
et le centre de lacomète
pour origine.
Faisons passer l’axe des xpositives
par lepoint
rayonnant
que noussupposerons
à une distance a del’origine.
Enreprésentant
par a la densité de lacomète,
en l’unquelconque (x,y)
de sespoints ,
nous auronsd’où nous conclurons
en
conséquence (
tom.XIX ,
pag.282 )
leséquations
du mouve-ment d’une molécule
lumineuse , à
travers la masse gazeuse , serontéquations
danslesquelles,
comme on l’a vu à l’endroitcité,
k2 estun coefficient constant, relatif au mode d’action des milieux sur
la
lumière ,
etauxquelles
on pourrajoindre ,
commes’y
trouvantimplichement conmprise , l’équation (pag. 273)
dans
laquelle w exprime
la vîtesse de la lumière dans le vide.Si l’on
représente
par ? la forceaccélératrice,
on aura , commel’on sait ,
78
d’où on conclura
(3),
ensubstituant ,
ainsi, généralement, la force
accélératrice estproportionnelle à la
dérivée de la
fonction
du rayon des couchessphériques
concentri-ques
qui exprime
la densitéoptique de
ces couches.Les
équations (3) donnent ,
pardivision ,
d’où
, enintégrant,
équation qui
estl’expression
duprincipe
desaires,
et danslaquelle
C est la constante arbitraire. En
portant
la valeur dedt,
dounéepar cette
équation,
dansl’équation (4),
onobtiendra ,
pourl’équa-
tion
générale
de latrajectoire décrite ,
Ici,
comme dans lathéorie
dumirage,
il nous serapermis
sans
tien changer
à la nature destrajectoires ,
niconséquemment
des
caustiques, d’augmenter
ou de diminuer la densité de la masse ga-leuse que nous supposons composer la comète d’une même
quantité quelconque
en tous sespoints,
et nousprofiterons
de cette liberté pourla
rendre constamment nulle à la distance a du centre de l’astre àlaquelle
lepoint rayonnant
se trouvesitué,
cequi
donnera03C8(a)=o.
Ensupposant
donc quele rayon fait,
à sonpoint
de dé-part,
avec 1’axedes x,
unangle
dont latangente tabulaire
estégale à m,
on devraavoir,
en mêmetemps ,
ce
qui donnera ,
ensubstituant
dans(7),
tirant de cette
équation
la valeur deC2 ,
pour la substituer dansl’équation (7) ,
celle-ci deviendraposant enfin ,
pourabréger ,
comme dans la théorie dumirage,
on aura, pour
l’équation différentielle
de latrajectoire
décrite par le rayonqui fait,
à sonpoint
dedépart,
avec la droitequi joint
ce
point
an centre del’astre,
unangle
dont latangente
tabulaire est m,L’intégrale
de cetteéquation,
danschaque hypothèse
sur la formede la
fonction 03C8,
fera connaître latrajectoire
décrite.Il conviendra pour
séparer
lesvariables,
et ramener ainsi le pro- blème auxquadratures,
de passer aux coordonnéespolaires,
enposant
il en résultera successivement
ce
qui donnera ,
en. substituantdans l’équation (9),
équation
d’où on tireraéquation séparée,
danslaquelle
on pourrafaire ,
sur la formede
la fonction
03C8, quelle hypothèse
on voudra. La constantequ’intro-
duira
l’intégration
devra d’ailleurs être déterminée de 1 elle sortequ’à
03B8=oréponde
r=a.Mais ce
qui
nous intéresseparticulièrement ici,
c’estbeaucoup
moins la
figure
destrajectoires qui peuvent répondre
aux diversesformes de la
fonction 03C8
et aux différentes valeurs de m, que lafigure
de lacaustique
ou courbeenveloppe
de cestrajectoires qui) pour
une même formequelconque
de cettefonction 03C8, répond
auxdiverses valeurs de m.
Or,
rien n’estplus
facile que d’obtenir l’é-quation
différentiellegénérale
de cettecaustique, puisqu’il
nes’agit
pour cela que d’éliminer m entre
l’équation (10)
et sa différen-tielle
prise uniquement
parrapport à
ceparamètre. Or ,
par la forme de cetteéquation
, mdisparaît
de lui-même de sa différen-tielle ;
de sorte quel’équation
différentiellegénérale
de la causti- que estsimplement
Si l’on connaît
l’équation polaire
de lacaustique
on entirera,
par
différentiation
la valeur de d03B8 en r etdr ;
ensubstituant
cettevaleur dans
l’équation (12),
drdisparaîtra
delui-même;
de sorteque
l’équation
résultante fera connaître laforme
de lafonction 03C8,
d’où l’on conclura
ensuite ,
’si on lejuge convenabl,
au moyen del’équation (II),
la nature de latrajectoire.
On doit seulement
observer ,
1.° que ,d’après l’hypothèse
que nousavons