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Syndrome de Gougerot Sjögren.

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Syndrome de Gougerot Sjögren.

Sjögren’s Syndrome.

Fatima Zahra Haddani, Tarik Youssoufi, Abderrahim Majjad, Abdelhafid Guich, Hasna Hassikou

Service de Rhumatologie, Hôpital Militaire Moulay Ismail, Meknès - Maroc.

Résumé

Le syndrome de gougerot Sjögren (SGS) apparait comme la plus fréquente des connectivite après la PR. Sa définition est celle d’une épithélite auto-immune associée à la production d’auto-Ac anti-Ro (SSA) et anti-La (SSB) rendant compte du rôle prédominant des lymphocytes B auto-immunes. Sa description clinique est bien connue du rhumatologue avec la mise au point de nouveaux critères ACR-EULAR. L’apport de l’imagerie sous la forme de l’échographie des glandes parotide est utile aussi bien pour le diagnostic que pour le suivi avec une bonne spécificité. Malgré la complexicité étiologique et symptomatique du SGS, un certain nombre d’avancées thérapeutiques ont été enregistrées durant ces dernières années permettant d’améliorer sensiblement la prise en charge des patients.

Mots clés :

Syndrome sec; Lymphome

; Traitement.

Abstract

Sjögren’s syndrome appears to be the most common connective tissue disease after RA. Its definition is that of an autoimmune epithelitis associated with the production of auto-Ac anti-Ro (SSA) and anti-La (SSB) accounting for the predominant role of autoimmune B cells. His clinical description is well known to the rheumatologist with the development of new ACR-EULAR criteria. The contribution of imaging in the form of parotid gland ultrasound is useful for both diagnosis and follow-up with good specificity. Despite the etiological and symptomatic complexity of this disease, a number of therapeutic advances have been recorded in recent years to significantly improve the management of patients.

Key words :

Dry syndrome; Lymphoma;

Treatment.

Correspondance à adresser à : Dr. FZ. Haddani

Rev Mar Rhum 2018; 45:3-13 DOI: 10.24398/A.305.2018

Le syndrome de Gougerot-Sjögren (SGS), souvent appelé en bref « syndrome Sjögren » est une épithélite auto- immune (AI) associée à la production d’auto-anticorps

anti SSA (Ro) et anti SSB (La). Cette maladie AI systémique est caractérisée par une infiltration lymphoïde des glandes salivaires et lacrymales ; toutefois l’extension de l’infiltrat

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lymphoïde autour des épithéliums fait comprendre le concept d’épithélite AI qui va atteindre divers organes ou tissus.

La triade syndrome sec, asthénie et poly arthralgies est bien connu du rhumatologue et fait évoquer le diagnostic de SGS primitif.

A coté du SGS primitif, il faut rappeler son association comme SGS secondaire à de nombreuses maladie AI (PR, lupus, sclérodermie..) ou à des maladies AI, spécifiques d’organe (cirrhose biliaire primitive, diabète type 1, thyroïdite Hashimoto...).

EPIDÉMIOLOGIE

La prévalence de SGS est évaluée entre 0,01 à 3% selon les études [1). Il est caractérisé par une forte prédominance

féminine (9/1), la maladie peut survenir à tout âge, mais le plus souvent c’est vers 45 à 50 ans qu’apparaissent les premiers symptômes.

Le syndrome débute de manière générale, de façon très insidieuse, souvent de façon monosymptomatique.

Il est peu connu du grand public et même parfois des professionnels de santé, d’où un retard de diagnostic estimé à au moins 8 années (2).

PHYSIOPATHOLOGIE : (FIGURE 1)

Le SGSp constitue un excellent modèle d’étude des maladies auto-immunes car les organes intéressés par le processus (les glandes salivaires accessoires) et les cellules impliquées sont aisément accessibles et se prêtent assez facilement à l’analyse. L’origine de cette affection, comme la plupart des maladies auto-immunes, est inconnue.

FMC

Figure 1 : Physiopathologie du SGS

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Une interaction entre facteurs génétiques et facteurs d’environnement est nécessaire.

Rôle du terrain génétique

De nombreux fait plaident en faveur d’un terrain génétique particulier au SGS, il existe un lien entre l’haplotype A1 B8 DR3 DQ2 et SGS primitif.

Les populations cellulaires

- Les lymphocytes du sang périphérique : la lymphopénie est fréquente dans le SGS mais la répartition lymphocytaire périphérique n’est que peu perturbée. Certaines équipes ont mis en évidence une augmentation des lymphocytes B CD5 sanguins. (3)

- Les cellules épithéliales : dans le SGS, il s’agit essentiellement d’une altération morphologique et fonctionnelle des acini responsables des fonctions exocrines. Ces anomalies peuvent être retrouvées sur divers types de cellules épithéliales (canaux biliaires, tubules rénaux…), ce qui a fait proposer le terme d’épithélite auto-immune pour décrire la maladie. (4)

- Les lymphocytes infiltrant les glandes salivaires : ce sont pour la plus grande part des lymphocytes T CD4 (70- 80%); les autres sous-groupes : cellules T CD8 (10%), lymphocytes B (10-20%) sont moins abondants.

L’activité des cellules infiltrant les glandes est attestée par la présence de marqueurs de surface, notamment HLA-DR et récepteurs de l’IL-2 (CD25) (3).

L’origine des auto-anticorps

L’activation des lymphocytes B auto-réactifs pourrait être liée au « Système BAFF », plusieurs équipes ont retrouvé une augmentation du taux de BAFF dans le sérum des patients atteints de SGSp avec présence d’une corrélation entre le taux de BAFF et la présence d’auto-anticorps anti-SSA et de facteurs rhumatoïdes (5). Par ailleurs la cytokine BAFF est présente en excès dans les glandes salivaires accessoires de patients atteints de SGS, dans les lymphocytes T et les cellules épithéliales salivaires et même dans certains lymphocytes B.

Rôle des virus

Une étiologie virale a été suspectée dans le SGS comme dans beaucoup de maladies auto-immunes mais cette piste a été particulièrement explorée du fait de la fréquence du portage viral dans la cavité buccale. Pendant la dernière décennie, l’attention s’est focalisée sur trois types de virus,

le virus d’Epstein-Barr (EBV), les rétrovirus et le virus de l’hépatite C (HCV).

Rôle des autres facteurs

Parmi les autres facteurs, il existe certainement une part dévolue aux facteurs hormonaux. Différents arguments sont décrits, à savoir :

- Les œstrogènes et les androgènes participent à la régulation du film lacrymal.

- La sécheresse s’aggrave souvent en période post- ménopausique.

CLINIQUE

Les manifestations du SGS sont très diverses, mais trois types de signes sont retrouvés chez la plupart des patients.

La triade classique

Syndrome sec

- Oculaire : Sensation de corps étranger et de sable intra- oculaire, puis de photophobie et de brûlures ophtalmiques, parfois il est décrit une baisse de l’acuité visuelle avec une sensation de voile devant les yeux. Les signes physiques s’observent dans les syndromes secs sévères : les conjonctives sont rouges et enflammées, augmentation de la fréquence du clignement. Le matin, les culs de sacs palpébraux sont le siège de secrétions collantes, épaisses parfois purulentes.

- Buccale : La xérostomie se manifeste par une sensation de bouche sèche, pâteuse, gênant parfois l’élocution et la déglutition des aliments secs. Elle oblige le patient à la prise répétée de gorgées de liquide lors des repas, et même parfois la nuit. Cette xérostomie est parfois douloureuse, responsable de brûlures buccales et de glossodynies. A l’examen, les muqueuses jugales sont ternes, vernissées, la langue dépapillée, lisse. (6,7)

- Autres symptômes sont possibles : sécheresse cutanée, bronchique et vaginale.

Poly arthralgies

Les douleurs sont un signe fréquent de la maladie. Souvent, les douleurs siègent dans les articulations et les muscles sans gonflement articulaire. Elles peuvent être dues à une polyarthrite qui est non destructrice ou plus souvent à des poly arthralgies inflammatoires périphériques (mains, pieds..).

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FMC

L’asthénie

Une grande fatigue est un signe fréquemment retrouvé mais normalement sans autre signe général (pas de fièvre ou d’amaigrissement). Un de ces signes généraux doit faire rechercher une complication, notamment un lymphome.

Cette triade : syndrome sec, poly arthralgies, asthénie est responsable d’une importance altération de la qualité de vie chez beaucoup de malades.

les complications

Les complications du syndrome sec

- L’hyposécrétion lacrymale est à l’origine de complications ophtalmologiques : blépharites, ou plus graves, heureusement rares, ulcération de la cornée ou perforation cornéenne.

- Les complications du syndrome sec buccal : caries, déchaussement des dents, mycose de bouche.

- L’hypertrophie parotidienne (souvent indolore) qui peut parfois poser le problème du diagnostic différentiel avec un

lymphome salivaire de bas grade. Dans ce cas l’imagerie (surtout l’IRM) permet de faire la part des choses.

Les complications viscérales du SGS - L’atteinte rénale

- L’atteinte glomérulaire est la plus simple à reconnaître : protéinurie glomérulaire, hématurie microscopique dans un contexte simple de glomérulonéphrite par complexes immuns et atteinte rénale de cryoglobulinémie, sa fréquence est de l’ordre de 4%.

- L’atteinte épithéliale comporte une néphropathie tubulo- interstitielle qui va se traduire par une atteinte tubulaire proximale ou distale plus ou moins complexe, sa fréquence est de l’ordre de 10%.

- Atteintes des voies respiratoires et du parenchyme pulmonaire : elles n’ont pas de spécificité et ressemblent à celles de la polyarthrite rhumatoïde (PR) avec toutefois une prédominance des atteintes bronchiolaires ou bronchiques et plus rarement pneumopathie infiltratives diffuses (PID) exprimant divers aspects (8,9).

Clinique

- Parotidomégalie persistante

- Adénopathies périphériques (> 1cm, sauf > 2 cm pour les aires inguinales) - Purpura

- Activité ESSDAI élevée au diagnostic

Biologique - Lymphopénie

- Cryoglobulinémie de type I ou II

- Fraction C4 du complément abaissé au diagnostic

- Présence d’un composant monoclonal (de type IgM principalement) - Présence de facteurs rhumatoïdes IgM

Histologique : (examen histologique de la BGSA) - Focus score > 3

- Centres germinatifs

Tableau 1 : Facteurs prédictifs de lymphome non hodgkinien au cours du SGSp (les éléments en gras sont les facteurs les plus récents)

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Lymphome et SGS

Le SGS primitif est la maladie auto-immune associée au plus grand risque de lymphome. La survenue d’un lymphome B constitue la complication systémique la plus sévère. On estime qu’entre 5% et 10% des patients souffrant de SGSp développent un lymphome au cours de leur vie. (10,11 ,12)

Le tableau clinico-histologique est assez homogène(13).

La majorité des lymphomes compliquant le SGSp est représenté par les lymphomes de la zone marginale(ZM) et notamment le lymphome du tissu lymphoïde associé aux muqueuses (MALT) (14). La première localisation en fréquence est l’atteinte des glandes salivaires, organes cibles de la maladie auto-immune. Au plan histologique, le lymphome du MALT se caractérise par la présence d’un épithélium.

Le 2eme type histologique est représenté par le lymphome B diffus à grande cellules (diffuse large B-cell lymphoma ou DLBCL).

Certains facteurs sont prédictifs de survenue de lymphome chez les patients atteints de SGSp et cela a un double intérêt l’identification précoce des patients effectivement exposés à cette complication afin de personnaliser la prise en charge ; - poser le diagnostic précocement avant la transformation en lymphome de haut grade dont le pronostic est réservé. (15,16)

Ces facteurs de risque sont résumés dans le tableau 1.

PARACLINIQUE

Biologie

- Syndrome inflammatoire : Le plus souvent il n’ya pas de syndrome inflammatoire : les protéines de l’inflammation et en particulier la protéine-c réactive sont à des taux normaux, sauf en cas de vascularite ou de polyarthrite, la vitesse de sédimentation est souvent élevée en raison d’une hypergammaglobulinémie polyclonale qu’on observe dans près de 60% des cas.

- Des cytopénies, lymphopénies surtout mais aussi neutropénie et thrombopénie peuvent être observées dans 20-30%, elles sont rarement majeures.

- Une immunoglobuline monoclonale, signe prédictif de lymphome est observée dans 10 à 15%. De même une cryoglobulinémie mixte de type II ou III.

- Les auto-anticorps

* Les facteurs rhumatoïdes sont détectés dans 50 à 80%

des cas de SGSp, c’est-à-dire presque souvent que dans la polyarthrite rhumatoïde (13).

* La prévalence des anticorps antinucléaires (AAN) varie de 50 à 80% selon les auteurs.

*Les deux anticorps les plus utiles pour établir le diagnostic sont les anticorps anti-SSA/Ro et anti SSB/La, à noter qu’ils ne sont pas spécifiques du SGS puisqu’on les retrouve également dans 30 à 50% environ des cas de lupus.

* Les anticorps anti-SSA pourraient avoir un rôle pathogène direct sur le tissu conducteur cardiaque du fœtus entrainant un bloc auriculo-ventriculaire néonatal et dans les lésions cutanées kératinocytaires du lupus.

Ils deviennent immunogènes sans doute en raison d’une expression cytoplasmique et membranaire anormale ou en raison de leur présence à l’intérieur des vésicules d’apoptose présentes en nombre augmenté dans les cellules épithéliales.

Ainsi, schématiquement, les malades atteints de SGSp se répartissent en 3 groupes d’importance à peu prés égale : 1/3 sans anti-SSA ou anti-SSB, 1/3 avec anti-SSA seuls, 1/3 avec anti-SSA + anti-SSB.

* Autres anticorps : les Ac anti-fodrine, Ac anti-récepteurs muscariniques M3.

Explorations du syndrome sec

* Explorations de la fonction lacrymale

- Le test de Schirmer qui est le test de référence jusqu’à présent (17) consiste à insérer une bandelette de papier filtre gradué dans le cul de sac conjonctival pendant 5 minutes, on considère qu’il y a une hyposécrétion lacrymale si moins de 5mm de papier ont été humectés par les larmes.

- Examen au Vert de Lissamine : ce test, qui évalue aussi l’existence d’une kértoconjonctivite sèche, a remplacé le test au Rose de Bengale qui n’est plus utilisé car il est souvent douloureux. Un colorant vert est appliqué sur la cornée, en cas de kératite, certaines zones de a cornée ne sont pas colorées de façon régulière.

* Explorations de la xérostomie : la mesure de flux salivaire qui consiste au recueil de la salive en demandant au malade

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de cracher dans une éprouvette pendant idéalement 15 min, au minimum 5 min. Elle est pathologique si elle est inférieure à 0,10ml/min. ce débit peut être quantifié en pesant la quantité de la salive produite.

Biopsie des glandes salivaires

L’examen anatomopathologique des glandes salivaires accessoires est indispensable pour le diagnostic s’il n’existe pas d’anticorps anti-SSA/SSB. Elle permet d’apporter un critère de poids avec la présence d’un ou plusieurs focus score (FS) de plus de 50 lymphocytes/4mm2.

La classification de Chisholm et Mason sera utilisée pour l’interprétation, ne seront considérés comme pathologique que les grades 3 et 4 définis par une sialadénite avec un

focus score (FS) > 1 par 4 mm2 de tissu glandulaire.

Néanmoins, un résultat positif ne signe pas à lui seul la maladie : de faux positifs s’observent au cours du vieillissement des glandes, et, à l’inverse, un véritable SGS peut présenter des glandes salivaires d’aspect normal.

Echographie des glandes salivaires

C’est la grande nouveauté, elle peut être utile au diagnostic et au suivi thérapeutique. (18)

Les trois glandes principales sont explorées. Néanmoins, les techniques doivent être standardisées.

Les glandes parotides ont une échogénicité supérieure à celle de la thyroïde mais une homogénéité identique.

FMC

* Sécheresse buccale subjective.

* Sécheresse oculaire subjective, kératoconjonctivite sèche.

* Schirmer <5 mm en 5 min.

* Flux salivaire< 0,10 ml/min.

* Biopsie des glandes salivaires accessoires (BGSA) : au moins 1 focus /4mm2 (Chisholm grade 3 ou 4).

* Auto anticorps sériques de spécificité anti-SSA(Ro) ou anti-SSB (La).

Tableau 2 : Facteurs prédictifs de lymphome non hodgkinien au cours du SGSp (les éléments en gras sont les facteurs les plus récents)

Pour retenir le diagnostic de SGSp, il faut deux des quatre critères mineurs et au moins l’un des deux critères durs, ou trois critères parmi les quatre critères objectifs.

Item score

Focus score > 1 3

Anti-SSA/Ro + 3

Ocular staining score >5 1

Test de schirmer < 5mm/5mn 1

Débit salivaire < 0,1ml/min 1

Total

Un SGSp est défini par un score > 4/9 9

Tableau 3 : Critères préliminaires ACR-EULAR pour le SGSp (2015).

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Domaines Poids Pas

d’activité (0) Activité

faible (1) Activité

modérée (2) Activité élevée (3)

Signes généraux 3

lymphadénopa-thie 4

glandulaire 2

articulaire 2

cutané 3

pulmonaire 5

rénal 5

musculaire 6

Système nerveux périphérique 5 Système nerveux central 5

hématologique 2

Biologique 1

Figure 2 : Critères préliminaires ACR-EULAR pour le SGSp (2015).

Activité faible : 0 – 5 points ; Activité modérée : 5 -13 ; Activité élevée : Au delà de 13.

Figure 3 : EULAR Sjogren’s syndrome patient reported index (ESSPRI)

1) Quelle est la gravité de votre sechresse au cours des 2 dernières semaines ?

2) Quelle est la gravité de votre fatigue au cours des 2 dernières semaines ?

3) Quelle est la gravité de votre douleur (douleur articulaire ou musculairedans les bras ou les jambes) au cours des 2 dernières semaines ?

Un score ESSPRI inférieur à 5 est le seuil perçu par le patient comme acceptable selon le concept du patient acceptable symptom state ou PASS.

Pas de sechresse

1 1 1

2 2 2

3 3 3

4 4 4

5 5 5

6 6 6

7 7 7

8 8 8

9 9 9

10 10 10

Sechresse maximale

Pas de fatigue Fatigue

maximale

Pas de douleur douleur

maximale

(8)

FMC

L’analyse porte sur l’homogénéité du tissu glandulaire avec comme principal résultat une hétérogénéité du parenchyme glandulaire sur au moins 2 glandes selon le score de De Vita. (18)

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

Il est indispensable de faire le diagnostic le plus précocement possible car cette maladie nécessite un suivi particulier et peut justifier l’utilisation de traitements immunosuppresseurs lors des complications systémiques graves.

Il faut donc que le patient réponde aux critères diagnostiques consensuels internationaux de syndrome de Sjögren.

En 2002, la communauté médicale internationale a adopté les critères établis par l’American European Consensus Group (AECG) [19) (Tableau 2). En sus des critères subjectifs et objectifs du syndrome sec, figurent deux critères « durs » : la présence d’au moins un focus score à l’examen d’une biopsie des glandes salivaires accessoires et / ou la présence d’Ac anti-SSA+/- SSB.

En 2015 de nouveaux critères ont été proposés par l’American College of Rheumatology (ACR), par un groupe d’experts pluridisciplinaire, le groupe Sjögren’s International Collaborative Clinical Alliance (SICCA) (Tableau 3). En pratique quotidienne, et dans l’attente des études de validation des critères ACR, les critères AECG doivent être utilisés.

ACTIVITÉ CLINIQUE DE LA MALADIE

Comme pour les critères d’activité de la maladie lupique SLEDAI, un nouveau set de critères d’activité, l’ESSDAI (EULAR/ Sjogren’s syndrome disease activity index), a été récemment développé par un consortium européen. Il permet de prendre en compte non seulement le syndrome sec mais aussi les atteintes viscérales fréquentes et les anomalies biologiques. (Figure 2)

En parallèle, la perception de la maladie par le patient est prise en compte avec l’EULAR sjogren’s syndrome patient reported index ou ESSPRI, ce dernier est apparu sensible au changement et pourra aussi être exploité dans les essais thérapeutiques. (Figure 3).

TRAITEMENT

Le traitement comporte 2 volets :

- Traitement symptomatique de la triade des symptômes à savoir, la sécheresse, les douleurs diffuses et l’asthénie qui compromettent la qualité de vie des patients.

- Traitement de fond, au jour d’aujourd’hui aucun traitement de fond n’a fait la preuve de son efficacité.

Selon les groupes de consensus européens, les traitements doivent être ajustés à l’atteinte viscérale alors que les signes fonctionnels du syndrome sec ne justifient pas d’intensification thérapeutique.

Traitements symptomatiques

- Traitement symptomatique du syndrome sec : de nombreux petits moyens sont à connaître :

* Xérophtalmie : les larmes artificielles font privilégier les formes uni doses, sans conservateur (type Larmabak*). Des formes « retard » type Gelarmes* sont à proposer le soir, au coucher, chez certains patients. Les ophtalmologistes proposent les clous méatiques ou les collyres à base de ciclosporine A.

* Xérostomie :

- Salive artificielle tels les sprays d’Artisial*.

- La pilocarpine par voie orale dont la posologie doit être progressive pour limiter le risque de syndrome paradoxal et les troubles digestifs.

- Brossage dentaire avec une brosse douce, 2 à 3 fois/jour, en incluant le brossage du palais et la langue, bonbons ou chewing-gums sans sucre sont à rappeler régulièrement.

Ni le Sulfarlem* ni le Bisolvan* n’ont fait leur preuve ; certains les proposent à défaut.

* Xérose cutanée et muqueuse (génitale) : - Crèmes hydratantes (Dexeryl*)

- Crèmes lubrifiantes,

- Traitement symptomatique de la douleur :

* Les antalgiques simples doivent être utilisés en privilégiant le paracétamol qui n’a pas d’effet asséchant.

* Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont quelquefois efficaces.

* La corticothérapie à petites doses : 10 à 15 mg peut avoir une efficacité. Cependant, celle-ci est souvent modérée et chez ces malades, il sera quelquefois difficile de l’arrêter.

* Les benzodiazépines comme le clonazepam (RIVOTRIL*), ou les antidépresseurs tricycliques comme l’amitriptyline (LAROXYL*) à petites dose : 15 à 20mg par jour pour ne

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pas aggraver le syndrome sec, peuvent être utiles sur les douleurs neurologiques et sur les troubles psychologiques associés.

- Le traitement de l’asthénie : L’asthénie forte marquée au cours du SGSp, est un symptôme à part, de traitement difficile

Traitements systémiques

Dans les formes systémiques avec expression articulaire, musculaire ou viscérale, les immunomodulateurs connus du rhumatologue sont à discuter. Plusieurs études de faibles effectifs (< 25 patients) ont évalué la place de la ciclosporine A, de l’azathioprine, du méthotrexate (MTX), du léflunomide et de l’acide mycophénolique. Les messages en sont clairs : bénéfices limités sur le syndrome sec, manque d’analyse spécifique sur les atteintes viscérales, et effet indésirables certains.

* Hydroxychloroquine (HCQ) :

L’HCQ ou plaquenil * est souvent utilisé car il a montré une efficacité dans deux études ouvertes comprenant respectivement 10 et 50 malades. La seule étude randomisée contre placebo a été effectuée en « cross-over

» sur seulement 19 malades. (20)

Cette étude a mis en évidence une diminution de l’hyper- gammaglobulinémie polyclonale mais n’a pas démontré d’effets cliniques du plaquenil*. Une grande étude randomisée multicentrique est donc souhaitable. En pratique quotidienne, en attendant les résultats d’une telle étude, le plaquenil* (à la dose max de 6,5 mg/kg/jour) doit être proposé en cas de purpura vasculaire associé à une hypergammaglobulinémie et il peut être donné en cas de polyarthrite ou de poly arthralgies invalidantes. Par contre, ce médicament n’a pas d’effet sur le syndrome sec.

* Rituximab (RTX) :

Une avancée apparente dans le traitement du SGSp a été les rapports de séries ouvertes regroupant de petits effectifs de patients. (21-22)

Il faut cependant conserver l’indication du RTX dans les formes actives avec atteinte systémique comme une vascularite neurologique ou musculaire dans le cadre du SGSp.

* Biothérapies anti-TNF-alpha :

Ni l’étanercept (23), ni l’infliximab (24) n’ont montré d’effet significatif sur les symptômes de sécheresse.

* Autres biothérapies :

Divers anticorps monoclonaux dirigés contre le lymphocyte B ou ses régulateurs sont en cours d’étude. On peut citer, sans détailler, le bélimumab, BAFF inhibiteur déjà proposé dans le lupus systémique, et l’épratuzumab, Ac anti-CD22, et bien d’autres sont encore en développement.

EVOLUTION

Activité de la maladie et mortalité

Les nouveaux critères de classification ont permis à des groupes internationaux d’apporter des informations importantes sur de larges populations de patients (25, 26,27). Les services espagnols de médecine interne ont ainsi pu collecter plus de 1000 patients avec SGSp et analysés la survie en fonction des critères ESSADAI au diagnostic (28). Après un suivi moyen de 117 mois, 115 des 1045 (11%) patients ont décédés. Les taux de survie étaient de 96%,92%,81% et 60% à respectivement 5, 10, 20,30 ans. Les principaux facteurs prédictifs au diagnostic en termes de mortalité globale après analyse multi variée étaient le sexe masculin, la présence d’une cryoglobulinémie et d’un taux de complément C4 bas.

Les domaines ESSDAI concernant les signes généraux, pulmonaires et biologiques étaient associés à un risque de mortalité augmenté.

Ainsi un score ESSDAI élevé >1, une activité élevée dans au moins un des domaines ESSDAI, et des anomalies biologiques particulières (lymphopénie, Ac anti-SSB, gammapathie monoclonale, C4 bas et/ ou cryoglobulinémie) s’accompagnaient d’une mortalité élevée avec des hazard ratio (HR) entre 3 et 10.

Mortalité et thérapeutique

A partir de cette base de données espagnole (28), les auteurs ont pu décrire l’emploi de l’hydroxychloroquine(HCQ) chez 25% des patients, des corticoïdes(GC) chez 42% dont 23% avec des GC<20mg/j, des immunosuppresseurs (IS) dans 13%, et du rituximab (RTX) chez 3% seulement.

Fait intéressant, la prise d’HCQ était associée à une réduction de la mortalité mais aussi de moindre risque de lymphome (28). Ni la prescription de GC ou ni celle d’IS ne modifiait les courbes de survie en termes de mortalité ou de survenue de lymphome non hodgkinien.

CONCLUSION

Le SGS est le plus souvent une maladie non mortelle mais s’accompagnant de signes cliniques très pénibles dans la

(10)

FMC

vie quotidienne et amputant la qualité de vie des malades.

Il est indispensable de recourir à des essais cliniques correctement effectués afin de savoir enfin si un traitement de fond peut modifier le potentiel évolutif de cette maladie auto-immune.

DÉCLARATION D’INTÉRÊT

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt en lien avec cet article.

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