M ATHÉMATIQUES ET SCIENCES HUMAINES
S ERGE T ORNAY
H ERVÉ R AYNAUD
Test des triades et parenté. Essai méthodologique sur un exemple kalenjin et kikuyu
Mathématiques et sciences humaines, tome 24 (1968), p. 17-34
<http://www.numdam.org/item?id=MSH_1968__24__17_0>
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TEST DES TRIADES ET PARENTE Essai méthodologique
sur un
exemple kalenjin
etkikuyu
par
Serge
TORNAY et Hervé RAYNAUDINTRODUCTION,
parSerge Tornay
1.Comment tirer le meilleur
parti
del’information
contenue dans un testethno-psychologique?
Nousavons
pensé
que lastatistique jointe
àquelques applications simples
de la théorie desgraphes pouvait
nousaider à
répondre
à cettequestion.
Nous nous proposons un but essentiellementméthodologique ;
des résultatsethnologiques,
volontairementprudents
etlimités,
devraientsuggérer
au lecteur l’utilité de la méthodeprésentée.
Le
problème
est le suivant : onfait
passer à deux groupes delycéens africains (Kalenjin
etKikuyu, Kenya;
recherche de terrain en1966)
un testsémantique
sur les termes deparenté
de leur ethnied’origine,
dans leur
langue
maternelle. Sur la base d’une collectiondéfinie
de ces termes, on construit toutes les triadespossibles.
Danschaque triade,
lesujet
doit choisir uncouple,
i. e. rayer un terme, celuiqu’il
considère commeun intrus. Le but du test est de mesurer si les
sujets
seconforment
à un modèle - en d’autres termes s’ilfaut prendre
acte d’un comportement de groupe - et de rechercher si ce modèle estpertinent
au niveauethnologique.
Le travail est basé sur
l’hypothèse
d’une tellepertinence.
Des travaux récents - surtout ceux deLounsbury
et deGoodenough
- tendent à montrer quel’analyse componentielle, technique appliquée
del’extérieur par
l’ethnologue,
estcapable
dedégager
les «catégories implicites
du vocabulaireindigène».
Le test des
triades,
enoffrant
auxsujets
lapossibilité
des’exprimer
dans leurlangue, donc, jusqu’à
un certainpoint,
dans leurlogique
et leursémantique,
devrait de son côté nous permettre decritiquer,
del’intérieur, n’importe quelle analyse componentielle. L’effort
pourexploiter
un tel testapparaît
alors comme une tentativede saisir de
plus près
une réalité sociale et comme un moyen deconfronter
la théorie del’ethnologue
aufait
vécu par
l’indigène.
1. Nous présentons une version quelque peu abrégée de notre essai original : suivant l’esprit de cette revue, nous retenons de notre travail les parties qui concernent l’application de techniques d’inspiration mathématique à une recherche ethnologique. Le
débat purement épistémologique sur le test des triades a été volontairement omis.
Nous tenons à exprimer notre gratitude au Docteur V. Castelli, à la Fondation Holderbank et à la Société Suisse des Sciences Humaines pour leur aide morale et matérielle.
ÉTUDE
D’UNE RELATIONHIÉRARCHIQUE
ENTRE LES COUPLES
D’ÉLÉMENTS
D’UN ENSEMBLE ETEL
QUE,
SUR TROISÉLÉMENTS
DEE,
IL EXISTE PARFOIS IN INTRUS 1I. -
HYPOTHÈSES
DESTRUCTURE ; MODÈLE
PROBABILISTE.1)
Chercher l’intrus.Soit un ensemble fini E ... el).
Soit T l’ensemble des combinaisons de trois éléments de E ou triades.
Le nombre d’éléments de T est
C3 = 3 ! t -- 3 !.
On suppose
qu’il
existe uneapplication
I deT’, partie
deT,
dans E telle que, si T ET’,
I(T)
soitégale
à un des trois éléments der. Cet élément seraappelé
l’intrus dans la triade T.Pour trouver
l’application I,
ondispose de n juges ~
xi, ... = xauxquels
onprésente
les combi-aaisons une par une. Pour
chaque triade,
ils sont censés identifier l’intrus.On
postule
chez lesjuges
lecomportement
suivant :Si 1" (J: T’,
ils tirent l’intrus de 1"qu’on
leur a demandé d’identifier au hasardéquiprobable
entreles trois éléments de T ou entre deux seulement.
Si 1" E
T’,
ils identifient I(T)
comme étant l’intrusplus
souvent que l’un et l’autre élément de la triade.Si T E T’ et si l’intrus
peut
aussi bien être unélément ei
de Tqu’un
second élément ej de T, maisjamais
letroisième,
alors ei et el sontdésignés
comme intrus au hasardéquiprobable.
2)
Détermination de T’.Soit une triade T =
(et,
ej,ek).
Soit ni
(resp.
n~,nk)
le nombre de fois que ei(resp.
el,ek)
estdésigné
comme intrus dans la triade.Supposons ni supérieur à nl
etsupérieur
à nk.On teste alors
l’hypothèse :
« Il y aplus
de x chances sur 100 pour que ni et nj soient les résultats d’unpile
ou faceéquitable de ni +
ni coups» et « il y aplus
de x chances sur 100 pour que ni et nk soient les résultats d’uupile
ou faceéquitable de ni -~-
RTe coups.»Si le test conduit au
rejet
de cettehypothèse,
on déclare que T E T’ et que I(1")
= et.On utilise à cette fiu à un
degré
de liberté :1. Note par H. Raynaud et un groupe d’étudiants en mathématiques au C.S.U. du Mans : Jean-Michel André, Philippe Brunet, Jean-Pierre Corneille, Francine Lallouhet, Michel Pelletier, Michel Rouits.
En
effet,
les variables :et
suivent une loi
de X2
à undegré
de liberté.Pour décider T E T’ et 1
(T)
= e, il suffit donc :1)
De se fixer un seuil de « x chances sur 100»(dans
toutel’application pratique suivante,
nous avons choisi un seuil de1%).
·2)
De lire dans la table à undegré
de liberté la valeurcorrespondant
à ce seuil(dans
notre
application,
on a : valeurdu X2
ayant laprobabilité 0,01
d’êtredépassée
dans le cas del’hypothèse
nulle =
6,63).
3)
De faire attention au fait que ce test n’est efficacequ’à partir
de 15juges.
4)
De voir siKil
et sont bien tous les deuxsupérieurs
à6,63.
II. - SUPPOSONS CONNUES I ET
T’ ; QUE
PEUT-ON DIRE DES RELATIONS ENTRE LESÉLÉMENTS
DE T e T ?1)
Si r e T’ oa ne peut rien dire.Si T E T’ on déclare comme
conséquence
que lescouples
formés de I(ï)
et chacun des deuxautres éléments de T sont moins étroits que « le
couple
formé de ces deux derniers éléments».On obtient ainsi une relation « moins étroit que» entre certains
couples
ayant un élément commun.2)
Si l’on construit ungraphe
dont les sommets ai sont lescouples d’éléments
appartenant à des combinaisons T de T’ et telsqu’on
trace un arc de am vers ap si et seulement si am moins fort que ap,on obtient un
renseignement qui permet
de hiérarchiser -- au sens de la relation être moins fort que - lescouples
d’éléments de Equi appartiennent
à au moins une triade contenant un intrus.III. -
JUGER
LESJUGES.
Le
problème ethnologique posé
contenait une autrequestion : l’homogénéité
de lapopulation
desjuges
dans la détermination de I et de T’ n’était pas certaine. Il sepouvait
que l’ensemble desjuges
soitcomposé
de deux ou trois sous-ensembles à identifier et dequelques juges n’ayant
pascompris
leprotocole
de
réponse
ou ayantrépondu
à tort et à travers.Pour « juger
lesjuges»:
1)
On construit unemétrique,
une distance - au sensmathématique -
entre lesjuges.
Onconsidère T et
l’ensemble {
= X desréponses
fournies par lesjuges.
SoitXi (T)
etXj (r)
leséléments de T
désignés
comme intrus par lesjuges Xi
etXI.
Soitl’application
définiesur tout
couple (X~, XI)
etprenant
la valeur zéro siXi (T) Xi (T),
la valeur un si
Xi (T) ~ Xj (T).
J’appelle
distance sur X le nombre définie par :C’est le nombre de désaccords entre les
juges
iet j.
d est une
application
de X X X dans Rqui
vérifie bien les axiomes d’une distance :1)
dXi)
= 02)
d(Xi, XI)
= d(XI, Xi) (évident d’après
la définition de a~).
3) Enfin,
pourtout i, j, k :
et
donc,
en effectuant la somme sur T, on al’inégalité triangulaire :
Ces conditions définissent le sens
technique
dedistance ;
tous les indices deproximité
ne sont pas des distances en ce sens.On construit alors la matrice carrée de terme
général
= d(Xi, XI) .
On
déplace
leslignes
et les colonnes defaçon
à réaliserapproximativement
unedisposition
dutype suivant :
1)
Leslignes
et colonnes enreprésentent
lesjuges aberrants,
tels que les différeuces entreleurs
réponses
et celles den’importe quel
autrejuge
sont «grandes » (supérieures
au seuilqu’on,
s’estfixé).
2)
Leslignes
et colonnes appartenant à un carréreprésentent
lesréponses
d’une sous-population
dejuges
cohérents entre eux et nettement différents des autres, en ce sens que leurs distances mutuelles sont « faibles », et leurs distances aux autres «grandes ».
En
pratique,
pourperdre
le moins d’information,possible,
il ne faudraprocéder
à la détermination de T’ et de Iqu’après
avoir éliminé lesjuges
aberrants etaprès
avoir scindé lapopulation
desjuges
ensous-populations homogènes.
IV. - EN
PRATIQUE.
_ t
1)
Lesquestionnaires
comportant lesCn
triades de T où n = le nombre determes à
étudier)
étantremplis,
onjuge
lesjuges
suivant la méthodedu ’~
III.On
ne conserve donc que des ensembles dequestionnaires
relativementhomogènes.
On considère un par un chacun de cesensembles.
On commence par chercher les intrus et les triades éléments de T’. Pour
cela,
onapplique
laméthode définie en II. Par
exemple :
a)
Dans la triade moro babamaito,
moro a étérayé
56fois, baba,
2 fois et maito 10 fois.Peut-on décider que moro est « intrus » ?
- , -
On considère
donc’
1Cette
quantité
estsupérieure au
=6,63.
On peut dire que, dans le cadre de nos
hypothèses,
moro a étérayé significativement plus
souventque
maito,
au seuil de1 %
·A
fortiori,
moro a étérayé significativement plus
souvent quebaba, qui
a étérayé
encore moinssouvent que maito. Moro est donc déclaré intrus dans la triade.
b)
Aucontraire,
dans la triade mware mama coco, mware a étérayé
33fois,
mama 20 fois etcoco 14 fois.
Nous allons voir que ces scores permettent de dire que la triade n,’est pas élément de T’. Entre
(33
-14)2
33 et
14,
’ on a en effet33 --14 2 = 7 7 > 6,63.
33
-[-
14 ’ ’La différence est donc
significative
au seuil1%.
Mais entre 33 et
20,
’puisque
p q33 - 20) 2 33+20
=3,2
’6,63
’ et entre 20 et14,
’puisque f
1,06 6,63,
les différences ne sont passignificatives
auseuil 1 %.
On ne peut rien dire de cette triade.
2)
On dessine legraphe complet
associé aux termes deparenté,
et on dessine une flèche allantde l’arête XII à l’arête Xtl
quand
onpeut
dire que Xu est une relationplus
étroite que Xl1.3)
On dessine legraphe qui
résume lesobservations;
les sommets sont les arêtes dugraphe
auxiliaire
précédent.
On dessinera
avantageusement
au bas de la feuille les sommetsauxquels
aucune flèche n’arriveet en haut de la feuille les sommets dont aucune flèche ne part.
On classera les sommets « intermédiaires » en les comparant entre eux.
Une fois cette méthode
systématisée,
son maniement est trèsrapide
et ne demandequ’un
minimumde travail matériel.
On voit nettement ressortir des relations
plus
étroites qued’autres,
le caractère d’ « étroitesse»entre certaines relations ne leur
permettant
pas nécessairement d’êtrecomparables
deux à deux.4)
On auraégalement
souventintérêt,
pour « y voirclair»,
à tracer dessous-graphes partiels
de ces
graphes
en isolant un terme, et en considérant tous les sommets dugraphe
dessiné en3) qui représentent
uncouple auquel
ce termeappartient.
On tracera tous les arcs
qui,
dans legraphe
dessiné en3) joignent
ces sommets.5)
Si la triade estrejetée
commen’appartenant
pas àT’,
elle peut néanmoins êtrel’objet
d’untraitement
complémentaire.
Supposons
en effetqu’un
des trois termes A de la triade(A, B, C)
soitrayé
nettement moinssouvent que les deux autres
qui,
par contre, seraientrayés
defaçon comparable.
Celasign,ifie,
enquelque
sorte, que les
couples
AB et AC se valent.On utilisera alors trois fois le
x~
à undegré
de liberté pourchaque
triade.Un dernier traitement est
possible :
les trois termes de la triade T semblentrayés
aussi souventles uns que les autres. On teste alors
l’hypothèse
nulle au moyen 2degrés
de liberté.On déclare
l’hypothèse
nulle si :3 est inférieur à la valeur donnée par la table.
(Dans
notreétude,
pour 2degrés
de liberté et 1 chance sur 100d’accepter l’hypothèse
nulle alorsqu’elle
estfausse,
on =9,2.)
Si le test donne une
réponse positive,
on pourra dire que lesjuges :
--~ soit ne peuvent comparer ces
couples
etrépondent
auhasard,
- soit ne peuvent choisir entre des
couples équivalents.
Quant
aux triadesqui
restent dans Taprès
tous cestraitements,
etqui correspondent
au casdu
IV, 1, b),
elles sont, dans les donnéeskalenjin
etkikuyu,
relativement rares(cf.
tableau 1. 2ci-dessous).
COMMENTAIRE
1VIÉTHODOLOGIQUE
ETETHNOLOGIQUE
11.
PRÉSENTATION
DES TESTS.1. 1 Nous rendons compte de trois tests.
Les deux
premiers
sontkalenjin,
le troisièmekikuyu.
Noussimplifions
laprésentation
des termesretenus : nous les identifions par une
simple glose, qui
n’est pas unetraduction,
maisqui indique
la« relation focale»
(Lounsbury)
de la classe des denotata(ou
types de relationdénotés)
dechaque
terme2.Test KALENJIN I : 10 termes,
désignant
essentiellement des parentsconsanguins
Test
KALENJIN
II : 8 termes, parents par alliance~
(Les
termes sont cités dansl’orthographe
standard dukalenjin.)
Test KIKUYU 1 : 8 termes, parents
consanguins
(Orthographe
de J.Kenyatta, 1967.)
1. Par Serge Tornay.
2.Pour une présentation détaillée du vocabulaire
kalenjin,
on peut se reporter à notre « Essai sur le vocabulaire de la parenté des Keyo du Kenya »(cf.
Références bibl.).1. 2 Données
numériques
sur les tests.2. LA
PROCÉDURE
DEDÉPOUILLEMENT.
Rappelons
lesprincipales étapes
dudépouillement
des tests.La
première
démarche a consisté à déceler lesprotocoles
desujets
ayantrépondu
en marge du groupe, soitqu’ils
n’aient pascompris
la nature du test, soitqu’ils
l’aientpris
pour unjeu
dehasard,
soit
qu’ils
aient délibérément «répondu
de travers ». Ce travail s’effectue suivant laprocédure indiquée
au
§
III de la note de notre collaborateur(désormais N.).
Les«
marginaux»
ainsi décelés sont enpetit
nombre : trois ou quatresujets
par groupe. En même temps,l’équipe
dedépouillement
a testé si l’on, devait faire état d’undécoupage
en sous-groupes;l’homogénéité
desréponses
a pu être mise en évidencemathématiquement.
Le pas suivant a été
l’application
d’un testde x2
au score dechaque
triade. Par score, nous entendons l’effectif desrejets
dechaque
terme à l’intérieur d’une triade. Le testde x2
permet dedécider,
en l’occurence au seuil de
1 % si,
dans telletriade,
les choix ont été faits au hasard -.auquel
cas la triadeest
qualifiée
d’ «inexploitable »
et exclue del’analyse statistique
-, ou si au contraire le résultat obtenuest non aléatoire par rapport au seuil choisi
(cf. N., § I,~).
Dans cette dernièresituation,
deux cas peuventse
présenter :
a)
Le score fait état d’unintrus,
mettant ainsi en évidencequ’une relation, parmi
les troispossibles
dans latriade,
estpréférée
aux deux autres defaçon significative
par rapport au seuil retenu ;b)
Le score fait état de deuxrejets
telsqu’on
peutconclure,
par le testde x2 appliqué
à troisreprises,
àl’équivalence
de deux relations dans le cadre des mêmeshypothèses (cf. N., § IV, 5).
Ces deux
types
de matériaux ne sont paspassibles
du même traitement. L’essentiel de notretravail porte sur les triades
répondant
à la conditiona).
Le deuxième type de triades ne seral’objet
que d’un bref commentaire(cf.
4.1).
La dernière
étape
dudépouillement
a consisté à construire lesgraphes complets
associés aux termesde
parenté.
3. L’ANALYSE DE L’INFORMATION.
3. 1 Présentation des
graphes.
Les mathématiciens nous ont transmis les résultats du
dépouillement
des tests sous la forme degraphes.
Cesgraphes
contiennent l’informationqui
émane des seules triades manifestant un appa- riementsignificatif.
Dans chacune de cestriades,
uncouple
de termes estpréféré,
defaçon significative,
à deux autres
couples.
Lesgraphes
contiennent donc un seul typed’information,
dont le modèle est lesuivant :
Chaque graphe
nous a étéprésenté
sous deux formes : selon lapremière technique,
les flèches relient les arêtesqui joignent
les sommetsreprésentés
parchaque
terme(cf.
lafig. 2) 1;
selon laseconde,
les flèches relient des sommets
qui
sont lesdyades engagées
dans la combinatoire(cf. fig.
3 et4).
Grâceà
l’ingéniosité
de l’un desgraphistes,
on a considérablement amélioré laqualité
visuelle de ce type degraphes
en prenant pourprincipe
derangement
desdyades :
« toutes les flèches montent ». Nous lisons ainsi au bas desgraphes
la série descouples
dont onpeut
direqu’ils
n’ontjamais
étépréférés
à d’autrescouples.
Dans lapartie
médiane sont situés lescouples qui
sontpréférés
auxpremiers,
mais nonpréférés
par
rapport
à d’autres.Enfin,
au sommet desgraphes,
on trouve lescouples
tels que,parmi
tous ceuxqui
leur sont
comparables,
il n’existe que descouples auxquels
on lespréfère.
Avant de passer au commentaire et à
l’analyse
de cesgraphes,
nous voudrions insister sur lepoint
suivant : la
technique statistique
que nous avonsemployée
nous interdit d’attribuer unesignification quelconque
aux fluctuations des scores à l’intérieur de l’échantillon des triadespertinentes.
Les triadescontiennent formellement la même
information,
à savoir :- dans la
première triade,
lapaire kukojkoko
estpréférée,
defaçon significative,
par supportau seuil
choisi,
auxpaires kukolapo
et- dans la
deuxième,
c’est lapaire senge/mama qui
a les mêmespropriétés
parrapport
auxpaires sengelkuko
etkuko/mama.
Sur ce
point,
notre travail sedistingue
radicalement de celui de J. Cuisenier(1965,
pp.47-59),
où il est fait un compte minutieux de tous les scores en vue du calcul d’une certaines distance
sémantique
entre termes ». Nous avons pour notre part admis
qu’il pouvait
y avoir unedistance,
calculable mathé-matiquement,
entreprotocoles,
mais nous ne voyons pas lapossibilité
de calculer une telle distance entre termes.3. 2 Les
graphes
commereprésentations globales.
Au
premier
coupd’oeil,
le lecteuréprouvera peut-être quelque surprise (cf. fig. 3). L’impression
d’entrelacement
anarchique
des flèches est due aux faiblesses de lareprésentation, plane :
dansl’espace,
les mêmes
graphes,
construits au moyen desphères
et de filsmulticolores,
seraientbeaucoup plus
«
lisibles », plus esthétiques
aussi. Eneffet,
le but de cesgraphes
est dedonner,
tout encapitalisant
unecertaine somme
d’information,
unereprésentation
sensible et saisissableglobalement
d’un, univers derelations abstraites. Aussi bien n’est-il pas nécessaire de « déchiffrer» les
graphes
dans tous les détailspour se faire une
première
idée de la situationqu’ils
illustrent. Lescouples préférés
sedégagent
nettementde l’ensemble.
Toutefois,
il faut segarder
de tomber dans lepiège
d’uneinterprétation
hâtive : à l’inté- rieur desgraphes,
« tout n’est pascomparé
à tout ». Dans le testKikuyu I,
parexemple, chaque couple (x, x’)
estreprésenté
dans(n
-2) triades,
en l’occurence six triades. A l’intérieur d’unetriade,
cecouple
est
comparé
à deux autres.1. Nous ne publions qu’une partie des 24 figures que cette étude nous a amené à construire. Nous maintenons, pour les
figures publiées ici, leur numéro de présentation original. La réalisation graphique est due à Michel Drevet.
Les
couples
non reliés par une flèche ne sont pascomparables,
tout au moins au sens mathéma-tique
d’ « être liés par une relation depréférence».
Mais il va de soiqu’ils
demeurentcomparables
sousd’autres aspects, par
exemple,
leur« statut» dans legraphe.
Toutes lespaires qui
ne sontl’objet
d’aucunepréférence possèdent
un trait commun; il seraitprobablement
intéressant de les étudier en tant que collectionspécifique.
En soumettant cette collection à uneanalyse componentielle,
parexemple,
onpourrait peut-être
découvrirpourquoi
cesdyades
ne fontjamais l’objet
d’unepréférence. Quant
auxproblèmes
que soulèveraitl’analyse
desgraphes
commeconfigurations globales,
ils nousparaissent
tropcomplexes
et trop difficiles au stade où nous sommes. Nouspréférons
nous limiter àl’analyse
des réseauxpartiels
derelations,
réseaux dont laconjonction
dans un univers donné -consanguinité,
alliance ---constitue les
représentations
touffues desgraphes complets.
3. 3 Les
graphes partiels.
On
pourrait procéder
à undécoupage
desgraphes complets
en isolantchaque dyade « préférée»
avec le réseau des relations
qui
l’entourent. Nous avonsjugé qu’il
étaitplus
intéressant deprendre
pourpoint
de référence non pas unedyade,
mais un terme de base. Prenons unexemple
tiré deKalenjin
I.Le
graphe global
contient toutes lesdyades qui
résultent de la combinaison des dix éléments. On doit donc trouverchaque
élément ou terme de base dans(n - 1),
en l’occurrence9, dyades.
Dessinons legraphe
de apo(cf. fig. 4).
On peut y lire les informations suivantes :a)
apo estapparié
defaçon significative
à six termes, mais il ne l’est pas à trois autres;b)
le nombre desappariements
de chacun des six termes à apo estvariable;
c)
dupoint
de vue de leurappariement
à apo, il existe une hiérarchie entre certains termes.L’information
a)
nousrenseigne
sur l’ «expansivité»
dechaque
terme de base.L’information
b)
nouspermettra
d’introduire l’idée d’une « valence » de ces termes.La notion de
hiérarchie, indiquée
sous la lettrec),
sera examinée lapremière.
Cette hiérarchie estbasée sur la
propriété mathématique
de la transitivité. Plusieurs cas de transitïvité peuvent être observés dans lafigure
4. Les relationsqui joignent apo/mama
àapolakwi
et ce derniercouple
àapoliyo
sonttransitives,
parcequ’elles
sont doublées dune relationqui
unit directementapo/mama
àapoliyo.
D’où le schéma que voici :
Soit A le terme
présent
danschaque dyade,
x un terme non
choisi,
.a et b deux termes choisis pour être
appariés
à A.Nous disons que a et b constituent une série
hiérarchique
parce quesi,
enprésence
de ax ou debx,
on choisit soit a soit b pour être
apparié
àA,
enprésence
de ab on choisit b et non pas a.On ne peut en dire autant de x et de a, étant donné que x n’est
jamais l’objet
d’unappariement significatif
àA ; toutefois,
la référence à un x à la base d’une série estindispensable :
c’est ellequi
rend leséléments de la série
comparables
en leur conférant une identité. Cette identité s’énonce en ces termes :« chacun des éléments de la série
hiérarchique
estpréféré
à x pour êtreapparié
à A ».Une série
hiérarchique
peut évidemmentcomprendre plus
de deux termes. Dans lafigure 4,
werit kuko
iyo
constituent une sériehiérarchique,
mais akwi sengeiyo
ne le font pas, faute d’une relationentre les
dyades apo/mama
et3. 4 Les valences relatives des termes 1.
Comme nous l’avons
remarqué ci-dessus,
le nombre desappariements significatifs
entre termes estvariable :
iyo,
parexemple,
estapparié
à apo huitfois,
werit une seule fois(fig. 4). Qu’est-ce
à dire ?Simplement
ceci :iyo
estapparié
à apoquel
que soit le troisième terme de latriade,
i.e. dans tous les« contextes »
possibles;
àl’opposé,
werit estapparié
à apo dans un seul contexte,quand
le troisième terme est mama. C’est le fondement de notre concept devalence;
nousappelons
cette valence « relative»parce
qu’elle
ne peut caractériser un terme que par rapport à un autre terme. La valence relative de deuxtermes est « forte » si ces termes tendent à s’associer dans les circonstances les
plus diverses;
elle est«
faible»,
aucontraire,
sil’appariement
ne seproduit
que dans unpetit
nombres decirconstances ;
elleest nulle dans le cas des
appariements
nonsignificatifs (cf.
tous lescouples
situés au bas desgraphes).
Cette
notion,
que d’aucunscritiqueront
commeinadéquate
dans la matière que nousétudions,
nous
paraît
utilecependant,
dans la mesure où ellecomplète
celle de hiérarchie. Au sommet d’une sériehiérarchique,
on pourra trouver des termes ayant, vis-à-vis du terme de baseconsidéré,
une valence forteou moyenne, et cette indication n’est pas à
négliger (cf.
parexemple,
la distinctionqu’on
peut établir à cetégard
entreiyo
et mama face à apo dans le testKal.I).
3. 5 Les matrices
analysant l’expansivité
et la densité.Si nous considérons pour
chaque
terme de base le nombre de termesauxquels
il estapparié
defaçon significative
d’une part, et le nombred’appariements significatifs
de chacun de ces termes au termeconsidéré d’autre part, nous pouvons résumer nos observations au moyen d’une matrice carrée :
Kalenjin
I :expansivité
et densitéEn suivant les
lignes,
nouscomptons
le nombre de données différentes de zéro : ce nombre est une mesurede
l’expansivité
dechaque
terme(exemple :
apo T. A.6/9,
i.e. « termesappariés
defaçon significative :
6 sur
9»).
Les totaux des colonnesreprésentent
le nombre dedyades significatives
où entrechaque
terme.Ces totaux ne peuvent être
qualifiés
de « valencesglobales, puisque
nous avons défini la valence commecaractéristique
d’uncouple
et non d’un terme isolé. Toutefois cesnombres, comparés
à l’effectif total1. M. Kutukdj an nous a suggéré récemment de remplacer notre concept de « valence » par celui de « stabilité ».
des
couples qui
contiennent un termedonné, expriment
correctement la densité du réseau des relationssignificatives
d’un~ terme avec les autres termes de la collection(exemple :
apo A. S.23/36,
i.e. « appa- riementssignificatifs :
23 sur36»).
Dans lamatrice,
où les termes sontrangés
par ordred’expansivité décroissante,
nous notons une décroissanceparallèle
de ladensité,
à uneexception près :
mama,qui
estmoins
expansif
que senge, sedistingue
par un réseauplus
dense de relations.3. 6 Les cibles
terminologiques.
Dans le but de rendre visuellement
plus
sensible Finformation contenue dans lesgraphes partiels,
nous avons
imaginé
de les transformer en cibles(ces développements n’engagent
pas laresponsabilité
de notre
collaborateur).
Nouspréférons
unereprésentation
circulaire comme étantplus
apte, noussemble-t-il,
à mettre en évidence cequ’on pourrait appeler
la «configuration sémantique
relative » dechaque
item étudié.Voici les
principes
de construction de ces cibles :Au centre : on
place
le terme de base A dont on étudie les relations aux autres termes;A l’intérieur de
chaque
cercle : onplace
les termes dont la valence relative à A est de même valeur.La valence décroît des cercles intérieurs aux cercles
extérieurs;
aux deux extrêmes nous trouvons : la valencemaximum, proche
du centre, et la valencenulle,
affectée au cercleextrême, lequel
estséparé
desautres par un double
trait;
Suivant les rayons : on lit les
appariements
dechaque
terme au terme central. Tous ces appa- riements sontsignificatifs, excepté
ceux des termes du cercle extrême au terme central. Les séries determes lisibles suivant un même rayon, entre le terme central et le terme extrême non
choisi,
sont desséries
hiérarchiques.
On peut lireégalement,
selon un des rayons,l’expression numérique
de la valence.Quel
rapport y a-t-il entre hiérarchie et valence ? Etant donné que les termesplacés
« haut»hiérarchiquement
ontplus
de chances que les autres d’êtreappariés
defaçon significative
à un termedonné,
il est naturelqu’on,
découvre un certainparallélisme
entre valence et hiérarchie.Toutefois,
il fautse
garder d’ériger
ceparallélisme
enrègle générale :
en construisantvingt-six
ciblesterminologiques,
nous avons rencontré trois cas de « conflit » entre hiérarchie et valence. Il ne saurait y avoir une congruence
parfaite
entre ces deux types deréférence,
étant donné que lapremière,
lahiérarchie,
estqualitative
- elle ordonne des termes en fonction de leur contenu et relativement à deux autres termes -alors que la
seconde,
lavalence,
est purementquantitative.
Cependant
lalégitimité
de notre instrument est fondée comme suit : il existe unecorrespondance biunivoque
entre legraphe partiel
et lacible,
comme le montrel’application
desrègles
de transformation que voici :Ces
règles
sontapplicables
dans les deux sens : nous passons desgraphes
à lacible,
mais le chemininverse est
possible,
comme onpeut
s’en, rendre compte en travaillant sur lesfigures
4 et 6.Fig.
2Kalenjin
II: allianceFig.
3Fig.
4Kalenjin
I : «père »
Fig.
6Kalenjin
I : «père »
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