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La liberté aristocratique de Montesquieu un auteur complexe, dont l œuvre est susceptible de lectures diverses.

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UNIA 2020 –

La liberté aristocratique de Montesquieu

Montesquieu, apparaît comme l’une des grandes figures du libéralisme et des progrès de la philosophie politique. Un auteur de tout premier plan dans l’histoire des idées politiques.

Il n’en demeure pas moins un auteur complexe, dont l’œuvre est susceptible de lectures diverses. Par exemple :

- Raymond Aron (Les étapes de la pensée sociologique, 1967) y voit un appel à la liberté, à la tolérance, au pluralisme, et fait de Montesquieu l’un des pères des démocraties modernes.

- Louis Althusser (Montesquieu, la politique et l’histoire, 1959) voit en lui davantage un aristocrate dont l’œuvre reste d’essence conservatrice et destinée à défendre les privilèges de sa classe.

Pour expliquer cette complexité, il faut rappeler le contexte du XVIIIe (celui d’un siècle de transition) : Montesquieu est aristocrate de naissance, qui vit dans un siècle bousculé par la montée en puissance en même temps de la pensée rationaliste et de l’idéal de liberté.

Charles-Louis de Secondat (baron de Montesquieu) naît à La Brède (près de Bordeaux) en 1689 dans une famille aristocratique (noblesse de robe = noblesse parlementaire).

Après des études chez les Oratoriens, il entreprend des études juridiques à Bordeaux, puis devient avocat, puis conseiller au Parlement de Bordeaux.

Il hérite de son oncle une charge de « président à mortier » du Parlement qu’il exercera à sa majorité.

Parallèlement, il est membre de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Bordeaux, il s’y intéresse à de nombreuses matières, comme les mathématiques ou la biologie.

En 1721, Montesquieu publie les Lettres persanes, sa première œuvre, où, par l’intermédiaire de deux Persans en voyage en France, il critique les mœurs parisiennes, tourne en dérision les institutions monarchiques françaises.

L’ouvrage paraît sans mention du nom de l’auteur, mais il rencontre un succès important, malgré son interdiction. C’est l’époque où il commence aussi à fréquenter les salons parisiens.

Fort de ce succès, Montesquieu abandonne sa charge de président du Parlement de Bordeaux et, pour préparer un nouvel ouvrage, plus approfondi, il entame une série de voyages en Europe (Allemagne, Autriche, Hollande, Italie), surtout en Angleterre où il va rester près de deux ans.

Et il tombe littéralement en « admiration » (le mot n’est pas trop fort) devant l’excellence et l’équilibre des institutions anglaises.

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De retour en France, il s’attelle à L’Esprit des lois, mais publie entre- temps des Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence, qui témoigne de son imprégnation antique, à l’instar de la plupart des philosophes des Lumières.

En 1748 (au bout de 20 ans de travail) paraît L’Esprit des lois. C’est ce qu’on pourrait appeler « l’œuvre d’une vie ».

Cette œuvre est le fruit d’un travail colossal, marqué par la lecture des auteurs antiques et contemporains, et par les récits de voyages en Orient (le XVIIIe siècle est celui du commencement de l’exotisme).

C’est est aussi le résultat d’une méthode de raisonnement : historique et comparative, pragmatique et relativiste (la méthode à la fois d’un historien et d’un sociologue).

Devenu aveugle, Montesquieu n’écrit plus qu’un article de l’Encyclopédie, avant de mourir en 1755.

Lorsqu’il meurt, il jouit déjà, dans toute l’Europe, d’une extraordinaire renommée (de son vivant on compte déjà 22 éditions de l’Esprit des lois), et cette renommée qui ne se ternira pas.

Comme le laisse entendre le titre de son ouvrage, au cœur de la philosophie politique de Montesquieu se trouve la question de la loi. Mais cette notion de « loi » mérite d’être précisée.

Selon lui, « les lois, dans la signification la plus étendue, sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses ; et, dans ce sens, tous les êtres ont leurs lois, la divinité a ses lois, le monde matériel a ses lois, les intelligences supérieures à l’homme ont leurs lois, les bêtes ont leurs lois, l’homme a ses lois ».

Et d’ailleurs, si tout est ordonné par des lois, c’est que le monde n’est pas incohérent mais créé par Dieu et obéissant à une logique divine.

Ce qui fait que, si l’Homme dispose de la capacité de « faire » des lois, il doit obéir, parallèlement, à un certain nombre de lois « qu’il n’a pas faites » ; des lois qui lui préexistent et s’imposent à lui : les lois divines et les lois naturelles.

Autrement dit, Montesquieu réinvente en quelque sorte les rapports entre le droit naturel (les lois naturelles) et le positivisme juridique (les lois humaines expression de la volonté).

Et il explique que les lois humaines, positives, subissent l’influence des lois naturelles, à travers les phénomènes physiques, sociaux et historiques tels

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que « le climat, la religion, les maximes du gouvernement, les exemples de choses passées, les mœurs et les manières ».

Parenthèse = Nous n’avons pas le temps d’en parler, mais il y a dans l’Esprit des lois, toute une théorie des climats, qui fait donc du climat (température, vents, humidité) et d’autres « causes physiques », des facteurs qui modifient la nature humaine, et donc la société, et donc le pouvoir, et donc son organisation et ses lois.

Mais à côté de cela, d’autres critères entrent également en ligne de compte : la situation du pays, son relief (plaine, montagne), sa taille, le genre de vie de ses habitants, leur richesse, leur religion, leur culture, leur degré de liberté, leurs mœurs etc…

Ce qui est intéressant dans cette parenthèse, c’est que Montesquieu nous explique que vouloir rechercher l’esprit des lois consiste à établir des rapports avec cette multitude de déterminants, rechercher des relations de causalité.

En effet, à l’occasion de ses voyages, Montesquieu a découvert la diversité des lois humaines, et il attribue cela au fait que chaque peuple (sur un territoire qui est le sien, soumis à un climat qui lui est propre), chaque peuple a son histoire, des valeurs forgées par cette histoire, chaque pays a atteint une forme et un degré de civilisation qui lui est propre = le résultat de toutes ces causes morales c’est ce qu’il appelle « l’esprit général » des peuples.

L’esprit général est donc la résultante de toutes une série de facteurs qui déterminent la manière d’être des habitants d’un pays.

Et la conclusion qu’il en tire c’est que les lois suivent les mœurs IMP : à tel point que « les lois doivent tellement être propres au peuple pour lequel elles sont faites que c’est un très grand hasard si celles d’une nation peuvent convenir à une autre ».

Montesquieu entend donc démontrer la diversité des systèmes juridiques, tout en soulignant tout de même le fait qu’ils ont tous en commun une même finalité = les lois ont toutes un même but : réguler les rapports des hommes en société de la manière la plus harmonieuse possible.

Dès lors L’Esprit des lois reste avant tout une réflexion sur ces lois qui régissent les sociétés humaines et qui régulent les rapports sociaux = ces lois sont des lois civiles = ce qui fait que sa réflexion sera donc une réflexion sur la politique.

Or, se demande Montesquieu, quelle est la principale fonction de la loi civile ?

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C’est d’assurer la liberté de chacun. Et la liberté ne se construit pas contre la loi, mais au contraire avec elle : « nous sommes libres parce que nous vivons sous des lois civiles » = par conséquent, la liberté ce n’est pas faire absolument tout ce qu’on veut ; la liberté c’est plutôt « faire tout ce que les lois nous permettent ».

Mais ce qui est sûr c’est que cette obéissance à la loi, n’est pas une renonciation à la liberté = au contraire = c’est parce que la loi protège le citoyen que celui-ci peut être libre.

Alors maintenant, de quelle liberté s’agit-il ?

- Montesquieu renonce à la conception antique de la liberté, une conception positive qui se traduisant par la libre participation à la vie publique ;

- Il envisage une conception négative de la liberté qui vise à le protéger contre les abus du pouvoir.

La liberté consiste donc à « pouvoir faire de qu’on veut et n’être pas contraint à faire ce qu’on ne veut pas = c’est-à-dire, en réalité faire tout ce que les lois permettent et avoir la garantie de la « sûreté ».

Bien évidemment cela n’est pas possible dans tous les régimes politiques

= la protection de la liberté par la loi suppose un gouvernement stable et modéré

= « la liberté politique ne se trouve que dans les gouvernements modérés », là où des limites sont posées aux dirigeants pour qu’ils ne sombrent pas dans l’arbitraire.

Vous voyez donc qu’il s’agit bien ici, à travers cette évocation de la loi et de la liberté, de questions clairement politiques.

Et comme il s’intéresse à la politique, et qu’il s’inspire des penseurs de l’Antiquité gréco-latine, qu’il connaît bien, il va aborder nécessairement la question du meilleur régime politique, tout en essayant de l’approfondir et de la dépasser.

Montesquieu prend comme point de départ la réflexion d’Aristote sur la nature des gouvernements, et il propose l’examen des trois systèmes de « lois politiques » hérités du fond des âges = monarchique (un seul), aristocratique (quelques un = les meilleurs), démocratique (la multitude).

Il va cependant dépasser la trilogie aristotélicienne, fondée sur un critère exclusivement numérique. Ce qui l’intéresse c’est de faire ressortir « la nature du gouvernement » c’est-à-dire sa structure particulière et son mécanisme = sa nature c’est ce qui le fait être ce qu’il est.

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Suivant cette idée, Montesquieu se livre à deux opérations à partir de la typologie originelle d’Aristote :

- il va réunir « démocraties » et « aristocraties » sous le vocable de

« républiques », en les désignant comme États « gouvernés par plusieurs » (le peuple tout entier ou une minorité) = malgré tout le critère numérique demeure.

- il va séparer, de façon radicale, « monarchies » et « despotismes », comme deux formes très différentes d’États « gouvernés par un seul ».

Nous verrons quelle est la différence qualitative entre ces deux types de régimes.

A l’issu de cette opération, il obtient donc trois types de régimes : républiques, monarchies et despotismes.

Il s’intéresse ensuite à leur principe directeur (notion antique : Marc- Aurèle, Saint Thomas) ou principe de gouvernement qui dérive évidement de leur nature : le principe directeur c’est ce ressort qui anime les régimes, c’est leur moteur ; c’est ce qui les fait agir, mais aussi ce vers quoi ils tendent de manière prioritaire.

Evidemment chaque forme de gouvernement a un principe qui lui est propre. Quel est le principe de chacun de ces régimes ?

- Le principe des républiques est « la vertu » (et la prévalence de l’intérêt général sur les intérêts particuliers) = la vertu il l’entend non au sens chrétien mais au sens civique = se rapproche du civisme. On va y revenir.

- celui des monarchies est « l’honneur » (non au sen moral, mais plutôt au sens de la reconnaissance par les gouvernés de la supériorité du monarque). On va y revenir aussi.

- celui des despotismes est « la crainte », car le pouvoir est exercé sans recourir à la loi, ou bien au mépris de la loi. Le gouvernant s’impose par la crainte qu’il inspire à ses sujets.

Qu’en est-il de la loi et de son respect dans ces différents régimes ?

- En République la loi est globalement respectée, mais elle peut être soumise à des transgressions.

- Dans une monarchie, elle est respectée et elle détermine la manière dont le monarque gouverne.

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- Dans une régime despotique la loi n’existe pas (le despote gouverne selon sa volonté) ou bien elle est bafouée, à commencer par le despote lui- même.

Il y a évidemment un lien entre le principe du régime et le rapport à la loi = lorsque le principe du gouvernement est sain, les lois sont bonnes et inversement.

Enfin quelles sont les caractéristiques de chaque type de régime au regard de sa manière de gouverner et de sa stabilité ?

- En République, il y a toujours des risques de débordement populaires.

- La monarchie est un régime stable où des corps intermédiaires jouent un rôle modérateur et où les équilibres traditionnels de la société sont assurés.

- Le despotisme écrase tout le monde, notamment les pouvoirs intermédiaires.

Nature du gouvernement

République Monarchie Despotisme

Principe directeur

vertu honneur crainte

Sort de la loi Globalement respectée

respectée Inexistante ou

bafouée Manière de

gouverner

Risques de débordements

Rôle modérateur des corps intermédiaires

Corps intermédiaires écrasés

Voilà pour la première étape de son raisonnement.

On va voir quelle est la richesse des critères utilisés pour construire cette typologie. Quant à la typologie elle-même, on pourrait y voir aussi d’autres leçons : 2 idées :

- On peut y voir un rapport entre la taille du pays et la nature du gouvernement = la république conviendrait mieux aux petits pays, le despotisme aux grands empires et la monarchie aux États moyens.

- On peut y voir un avertissement de la part de Montesquieu (en intégrant une dimension temporelle) : la république ce serait le passé ; la monarchie le présent, et le despotisme pourrait être l’avenir si on manque de prudence et de modération.

Mais bien évidemment, au-delà de ces hypothèses, cette manipulation que fait Montesquieu de la typologie d’Aristote, n’est pas neutre = elle n’a évidemment rien d’anodin : Cela permet à Montesquieu de faire deux choses :

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- Réunir, comme il le fait, démocratie et aristocratie, sous la forme des républiques antiques, lui permet de montrer leur impraticabilité moderne, leur obsolescence fonctionnelle (c’est le passé) (A).

- Distinguer la monarchie du despotisme, lui permet de faire la critique de l’absolutisme à la française et l’apologie, a contrario, du système libéral anglais = une monarchie limitée (B).

Reprenons ces deux idées et commençons par voir avec lui pourquoi les Républiques de la vertu constituent un modèle dépassé

Montesquieu définit les « républiques » comme des régimes politiques dans lesquels, « le peuple en corps, ou seulement une partie du peuple, a la puissance souveraine ».

Il puise ses modèles dans l’histoire antique et médiévale : Athènes et Sparte ; Rome évidemment ; des cités-État comme Venise ou Genève, pour le Moyen Age. Toutes les cités évoquées ont connu les deux types de régimes qu’il qualifie de républicains, la démocratie et l’aristocratie.

Les deux types de régimes républicains sont liés par la manière dont on désigne les représentants du peuple souverain. Dans chaque système, des « lois du suffrage » fixent tous les principes inhérents à l’élection = les électeurs et les éligibles, le système d’élection (qui peut varier depuis le tirage au sort jusqu’au suffrage censitaire), et les modes de scrutins, publics ou secrets.

Quoi qu’il en soit, le principe premier (principe directeur) qui guide le gouvernement des républiques, la « vertu », est « l’aptitude de chaque citoyen à se soumettre à la loi ». La vertu est une nécessité, car tous concourant à l’élaboration la loi, tous doivent donc être « respectueux » de la loi.

NB / Il s’agit là de la vertu au sens antique du terme, c’est-à-dire le

« civisme », le sens de l’intérêt commun, le dévouement à la chose commune.

D’ailleurs, Montesquieu la définit lui-même ainsi : « ce n’est point une vertu morale, ni une vertu chrétienne, c’est une vertu politique ».

La vertu républicaine se résume en « trois amours » : l’amour de la cité, l’amour de l’égalité, l’amour de la frugalité. Et elle suppose que « l’intérêt général » passe avant les intérêts particuliers de tous les citoyens qui concourent à la vie de la cité. Enfin, une chose est sûre = sans la vertu, sans l’esprit civique, la République s’effondre.

Toutefois, au sein de cette République, Montesquieu établit clairement une distinction entre démocratie et aristocratie : (à telle enseigne qu’on a

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presque l’impression qu’il remet en cause sa tripartition des régimes, la République étant à nouveau scindée en deux).

En quoi tient la différence ? C’est d’abord une différence politique.

- la « démocratie », c’est la République dans laquelle la « souveraineté » est entre les mains du peuple tout entier, « le peuple en corps », qui est en même temps le souverain et le sujet.

Montesquieu y est franchement hostile = le peuple étant ignorant, il est nécessairement incompétent dans la conduite des affaires publiques : « il y avait un grand vice dans la plupart des anciennes Républiques : c’est que le peuple avait droit d’y prendre des résolutions actives… chose dont il est entièrement incapable ».

- « l’aristocratie » est une république dans laquelle la souveraineté n’est pas entre les mains du peuple, mais de « quelques-uns », élus ou désignés par leur richesse ou pour leur compétence.

De cette différence politique, découle une différence, une variabilité de la

« vertu ».

- En démocratie, la « vertu » est le principe même du gouvernement, parce que celui-ci est « direct », ce qui sous-entend que, dans la pensée de Montesquieu, il n’y a de vraie démocratie que dans l’Antiquité et que celle-ci ne peut exister que dans des cités ou les tous petits États, où l’on peut effectivement réunir tous les citoyens.

Au sein des démocraties, Montesquieu opère tout de même une distinction entre :

o la « démocratie vraiment directe » dans laquelle tout le peuple participe régulièrement au gouvernement de la Cité par l’intermédiaire du tirage au sort (Athènes = le tirage au sort donne à tous une chance égale d’être désigné et c’est donc un principe démocratique) ;

Evidemment, cela n’est possible que le lorsque le territoire est de dimension réduite et faiblement peuplé = ce qui fait que tous peuvent effectivement participer à la vie collective.

Par ailleurs, comme dans une démocratie, le gouvernement est confié à chaque citoyen, il fut donc que chaque citoyen soit dressé à l’aimer (et à aimer l’égalité, le sens de l’intérêt général…) = d’où l’importance de l’éducation (civique) dans ce type de système.

o la « démocratie représentative », dans laquelle le peuple se dote de représentants (distingués par la naissance, par leurs compétences, et préparés au gouvernement par l’éducation) ; leur

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nombre et leur qualité peuvent différer selon les modes d’élection, de suffrages et de scrutins.

Des deux, c’est évidemment la démocratie représentative que Montesquieu préfère, car elle permet en même temps d’écarter le peuple et de réserver le pouvoir aux plus compétents. Car le peuple est « incapable de conduire une affaire », mais il est « admirable pour choisir ceux à qui il doit confier une partie de son autorité ».

En d’autres termes, ce que le peuple ne sait pas faire lui-même, il doit le déléguer à ceux qui savent par le biais de l’élection.

- En aristocratie, le pouvoir est aux mains d’une élite (souvent riche), à l’égard de laquelle le reste du peuple est dans une situation d’obéissance.

Un nombre limité de personnes gouverne et la grande majorité est exclue du pouvoir.

Sauf qu’ici, le principe qui dirige ce gouvernement n’est plus vraiment la vertu (on s’en éloigne) parce qu’il est difficile d’être en même temps riche et vertueux, mais plutôt une certaine forme de « modération » (c’est-à- dire un exercice tempéré du pouvoir, une modération dans les relations de pouvoir qui vient estomper l’inégalité inhérente à la constitution aristocratique).

De fait, les républiques aristocratiques n’ont pas besoin d’autant de vertu que les démocraties.

Toutefois, elles n’en sont pas moins vouées à disparaître, car la modération n’est pas suffisante = elle n’empêche pas la « rupture d’équilibre » entre les sujets et les gouvernants, des risques de débordements à long terme, donc les conséquences vont être fatales.

Conclusion = Les Républiques sont dépassées, inopérantes ;

Les régimes monarchiques, au contraire, sont plus actuels (surtout pour les États de grandes dimensions), mais Montesquieu prend soin de bien marquer la différence entre la vraie monarchie et le despotisme.

La nature des monarchies, selon Montesquieu, est plus complexe qu’il n’y paraît : Bien sûr il n’y a qu’un seul « souverain », le roi, mais il faut ajouter immédiatement deux remarques : dans une monarchie véritable :

1ère remarque = le roi gouverne « par des lois fixes et établies » qui sont le fondement même du royaume (= les « lois fondamentales ») = et leur fixité fait obstacle à une éventuelle « volonté momentanée et capricieuse » du monarque.

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2e remarque = Le roi ne « gouverne » pas tout seul. Il « n’absorbe pas toute la puissance ».

Il s’appuie sur « des pouvoirs [ou corps] intermédiaires, subordonnés et dépendants » (il semble que l’adjectif « dépendants » ait été ajouté par la censure, Montesquieu s’était contenté de dire « subordonnés »). Ces corps intermédiaires ne sont pas un défaut du gouvernement, mais plutôt une partie constitutive de celui-ci, et, peut-être, sa principale qualité.

Que sont-ils exactement ? Au rang des différents « pouvoirs intermédiaires », il en cite successivement 4 :

- « la noblesse », historiquement le premier et plus naturel d’entre tous les corps intermédiaires. Et la noblesse, dit Montesquieu « entre en quelque sorte dans l’essence de la monarchie ». On retrouve cette idée dans la maxime fondamentale de la monarchie : « point de monarque, point de noblesse ; point de noblesse, point de monarque mais le despotisme ».

- « le clergé » (clergé et noblesse sont 2 des 3 ordres de la société d’AR).

- « les villes » (y incluant ce qui les compose = les pouvoirs municipaux, mais aussi les corporations professionnelles).

- Mais aussi la magistrature (les parlements) qui prend en charge « le dépôt des lois » et qui assure la fixité de la « constitution coutumière » du royaume (les lois fondamentales) = n’oublions pas que Montesquieu a été lui-même parlementaire (la fonction judiciaire l’ennuyait mais il était très attaché aux prérogatives parlementaires).

Et Montesquieu conclut : « Abolissez dans une monarchie les prérogatives des seigneurs, du clergé, de la noblesse et des villes, vous aurez bientôt un État populaire ou bien un État despotique ».

L’idée de Montesquieu est donc que les pouvoirs intermédiaires (par leur sagesse, leur expérience, leur modération) arrêtent et cassent l’élan du pouvoir monarchique, évitant ainsi qu’il ne pèse tout entier sur les sujets.

Le résultat, c’est donc une forme de souveraineté partagée = puisque ces pouvoirs agissent comme des « digues » qui canalisent la puissance royale et lui permettent de s’écouler vers les sujets de façon moins brutale.

Tout est question d’équilibre, d’oppositions et de résistances, de poids et de contre-poids, de forces et de contre-forces.

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Plus concrètement, cela veut dire que pour bien gouverner, le monarque doit donc s’appuyer sur ses sujets en fonction de leurs compétences respectives.

Et il est impératif que ces sujets aient tous l’ambition d’y accéder, qu’ils aient à cœur de se « distinguer », et d’accéder aux hautes charges publiques, des charges honorables.

Il faut rappeler ici que le principe directeur des monarchies, ce qui les anime, c’est justement « l’honneur » ou plutôt devrait-on dire, « les honneurs ».

Les honneurs c’est cette « passion des distinctions » des rangs, des hiérarchies, de la reconnaissance des talents et des mérites de chacun, qui est le vrai ressort des monarchies.

Et le monarque doit, à tout prix, éviter que ne meure, chez ses sujets, l’appétence pour les honneurs, ce goût de s’élever dans la société, que seul le respect des corps intermédiaire entretient.

Ici, le modèle par excellence, c’est évidemment l’Angleterre qui naît de la Glorieuse Révolution de 1688.

Tout cela trahit évidemment la conception anti-absolutiste de Montesquieu :

Pour lui, la seule véritable monarchie est celle anglaise, une monarchie constitutionnelle, un « chef-d’œuvre de législation » = la seule monarchie où l’on rencontre une véritable liberté politique, parce que l’expression des corps intermédiaires y est garantie.

Le résultat est celui d’une monarchie, mais tempérée = une sorte de

« gouvernement mixte » (sans que Montesquieu emploie le terme) où le peuple a sa place (par le biais d’un système représentatif et d’un Chambre des communes) ; où la noblesse héréditaire a aussi sa place dans une chambre (la chambre des Lords) qui la représente.

En revanche l’absolutisme à la française ne peut que favoriser l’écrasement des corps intermédiaires.

Et ça c’est grave pour Montesquieu = Et c’est la faute du prince lui-même, qui « se perd lorsqu’il croit qu’il montre plus sa puissance en changeant l’ordre des choses qu’en le suivant… » : en croyant grandir son pouvoir, il le diminue.

En France, ces corps intermédiaires sont remplacés par une « Cour du Roi » = et la cour est le théâtre de toutes les corruptions, alors qu’elle devrait être plutôt le creuset de tous les talents. « L’art de gouverner n’est plus que celui de corrompre ».

Le courtisan français, rusé et arriviste, est l’antithèse du noble anglais conscient de ses devoirs envers le peuple.

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Pour autant, l’absolutisme (à la française) n’est pas une forme de despotisme à part entière. Il est sur la pente du despotisme mais n’y est pas encore.

Pourquoi ?

Commençons par définir le despotisme = C’est le régime où « un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et par ses caprices ». Et Montesquieu pense ici notamment aux régimes orientaux (pour ce qu’il en connaît à travers des récits de voyage).

Ce despote oriental est décrit comme le Sultan « naturellement paresseux, ignorant et voluptueux », se livrant dans son harem à « ses passions les plus brutales », tandis que son vizir gouverne pour lui.

Le principe directeur du despotisme est « la crainte » qui procède du pouvoir personnel d’un seul homme. Cet homme ne se maintient au pouvoir que par la contrainte, par la force, ce qui exclut en même temps la vertu et l’honneur.

Dans un régime despotique, tout fonctionne sur la base de l’obéissance et du châtiment : dans ce type de régime, « l’homme est une créature qui obéit à une créature qui veut » (qui impose sa volonté par la contrainte). Le gouverné est réduit à l’état d’une bête obéissante et soumise.

Bien évidemment, c’est aussi un système où l’éducation n’a pas sa place = le savoir est trop dangereux : « l’extrême obéissance suppose de l’ignorance dans celui qui obéit ».

Quel est le résultat de tout cela ? Le résultat c’est la tranquillité, c’est la paix, Mais à quel prix ! C’est la paix parce que personne n’ose s’opposer au despote, aucune loi ne permet d’ailleurs de le faire.

Conclusion = le gouvernement despotique est une véritable calamité, une insulte à la nature humaine, c’est un gouvernement fait pour les bêtes plus que pour les hommes.

Par conséquent l’absolutisme (à la française) n’est donc pas une forme de despotisme à part entière = mais ils contient de multiples défauts = il faut donc le rejeter ou alors profondément le modifier (en s’inspirant évidemment du modèle anglais).

Et là on comprend pourquoi Montesquieu, dans sa typologie des régimes, a voulu faire du despotisme un régime à part entière = c’est pour lui servir de repoussoir à l’authentique monarchie = c’est pour monter ce qu’il faut absolument éviter.

En tous cas, la démonstration est faite : la seule solution c’est (et je résume ce qui précède) :

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- la réaffirmation de la souveraineté monarchique,

- mais aussi l’existence des corps intermédiaires justifiée par leur rôle essentiel,

- quant aux autres régimes, il sont soit odieux (le despotisme), soit impraticables au présent (les républiques).

A présent que le choix de la monarchie est fait, il ne reste plus, à l’intérieur de ce régime, qu’à donner naissance à une authentique liberté politique, et à la préserver par des institutions conçues dans cet objectif.

Après la recherche du meilleur régime politique, c’est le deuxième point que je voudrais évoquer.

S’inspirant des penseurs antiques (Platon), Montesquieu considère que tout régime politique est victime de dégénérescence ou de corruption : Et cette corruption apparaît presque toujours par la corruption de son principe = « lorsque les "principes" directeurs sont corrompus, écrit-il, la

"nature" du gouvernement est altérée et, dès lors, il perd sa cohérence et finit par disparaître ».

- Les démocraties se corrompent lorsque l’égalité atteint des proportions extrêmes ; Platon disait la même chose à propos de l’excès d’égalité.

- les aristocraties se corrompent « quand le pouvoir des nobles devient arbitraire » ;

- et les monarchies se corrompent quand les prérogatives des corps intermédiaires, notamment celles de la noblesse et des villes, sont attaquées et réduites à néant.

- Quant au despotisme, il ne se corrompt pas… parce qu’il est déjà corrompu dans son principe et sa nature.

Il existe à chaque fois des risques de corruption = il faut donc imaginer à l’avance des solutions, des « garde-fou » contre cette corruption des régimes politiques.

Montesquieu comprend que la solution se trouve dans la possibilité d’interrompre une dérive, un « abus » de pouvoir avant qu’il ne devienne irréversible.

Quelle est la solution ? Il faut pour cela que les différentes composantes du pouvoir restent « libres » les unes par rapport aux autres. Pour ce faire, elles doivent s’équilibrer entre elles, afin d’éviter que l’une ne prenne le pas sur les autres. En somme, il faut les séparer, pour mieux les pousser à « aller de concert » = c’est le célèbre principe de la séparation des pouvoir (A).

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La théorie de la séparation des pouvoirs est le véritable chef-d’œuvre de la pensée de Montesquieu.

Il atteint sur ce point, une clarté et une cohérence intellectuelle exceptionnelles.

Le point de départ de sa pensée est que la liberté politique existe seulement là où l’abus de pouvoir est impossible.

Mais, Montesquieu qui a voyagé et qui a lu les œuvres de l’Antiquité, sait très bien que « tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ».

Or, je le répète, « la liberté politique n’existe que là où on ne peut pas abuser du pouvoir ».

Comment éviter les abus de pouvoir ? Comment assurer la liberté politique ? Une chose est sûre, certaines mesures sont insuffisantes

- C’est le cas de l’éducation politique,

- C’est le cas du principe directeur d’un régime politique (qui est trop abstrait et idéal),

- C’est le cas aussi du rôle pondérateur que peuvent jouer les corps intermédiaires (c’est important mais ce n’est pas suffisant = l’histoire montre qu’en France on est passé d’une « monarchie tempérée » (qui était justement tempérée par des contre-pouvoirs) à une « monarchie absolue » où on a tendance à en tenir moins compte.

La clé de la liberté politique réside pour Montesquieu dans l’organisation institutionnelle des pouvoirs : « pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ».

Autrement dit, les hommes ou les institutions ont toujours tendance à abuser de leur pouvoir, tant qu’ils ne rencontrent pas un obstacle, constitué par un autre pouvoir.

Par conséquent la séparation des pouvoirs n’est pas une fin en soi ; c’est un moyen mis au service de la liberté politique.

Sur la base de cette affirmation, les institutions idéales que Montesquieu décrit dans le célèbre chapitre VI du Livre XI de L’Esprit des lois (le texte le plus connu) s’inspirent de la monarchie parlementaire de l’Angleterre de son temps :

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il existe dans le régime anglais, (et dans une constitution idéale), trois pouvoirs distincts : (on retrouve ici le rythme ternaire cher à Montesquieu) = la puissance législative, la puissance exécutive, la puissance judiciaire.

Et la liberté du citoyen ne peut vraiment exister que si ces trois puissances sont séparées, c’est-à-dire, détenues par des hommes (et des organes institutionnels) différents : « lorsque la puissance législative est réunie à la puissance exécutrice, il n’y a point de liberté ; parce que l’on peut craindre que le même monarque ne fasse des lois tyranniques. Il n’y a point encore de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice ».

En d’autre termes il faut 4 choses :

- séparer les pouvoirs pour éviter les conflits et les risques de mainmise de l’un sur l’autre,

- éviter toute concentration excessive du pouvoir dans les mains d’une personnes, d’un groupe de personne ou d’une institution (concentration des pouvoirs qui risque d’ouvrir la voie à la tyrannie),

- faire en sorte que ces pouvoir puissent se freiner mutuellement.

- La conséquence de tout cela est que ces pouvoir, distincts mais non pas indépendants les uns des autres ; il y a entre eux des « liens » et ils sont obligés de s’entendre. C’est une sorte de collaboration dynamique à laquelle ils sont contraints.

Voilà pour les principes. Comment faire concrètement ?

Montesquieu va envisager les moyens réciproques qui permettent de limiter la marge de manœuvre des différents pouvoirs = les moyens dont dispose un pouvoir pour résister à l’autre et limiter la puissance de l’autre : Quels sont les moyens :

- Ex = l’exécutif n’est pas en mesure d’empêcher le législatif d’agir, mais il peut toutefois examiner la manière dont les lois sont faites et contrôler aussi l’exécution des lois.

- Ex = le législatif ne se réunit pas tout seul = il attend d’être convoqué par l’exécutif. Et à la fin de la session il se sépare = il n’a pas le droit de se proroger lui-même.

(16)

- Ex = aucune assemblée ne peut remettre en cause la souveraineté du monarque lui-même (il est inviolable et sacré), mais elle peut engager la responsabilité de son gouvernement.

- Ex = En retour, le pouvoir exécutif, c’est-à-dire le roi, dispose d’un

« droit de veto » sur toutes les lois votées par le législatif, puisqu’il n’en a pas l’initiative. Ainsi, il peut s’opposer « aux propositions qu’il aurait voulu qu’on n’eût pas faites ».

- Ex = le législatif est divisé, bicaméral, de telle manière que les deux chambres (Lords et Communes, en Angleterre) peuvent mutuellement se contraindre. Le législatif « étant composé de deux parties l’une enchaînera l’autre par sa faculté mutuelle d’empêcher ».

- Enfin, dernier ex = le pouvoir judiciaire doit garder une indépendance absolue = les juges n’ont la faculté ni de créer la loi ni de l’exécuter = ils doivent simplement en garantir l’application (« le juge est la bouche qui prononce les paroles de la loi » = mais les juges sont des « êtres inanimés » et c’est la raison pour laquelle ils doivent être protégés de tout empiètement.

Alors, cette horlogerie aussi perfectionnée a de quoi séduire. Mais une question se pose = cet équilibre entre les pouvoirs, ces forces contraires qui leur permettent d’agir les uns sur les autres pourraient entraîner une forme

« d’inertie », mais, comme l’écrit Montesquieu : « par le mouvement nécessaire des choses, ces trois puissances sont forcées d’aller de concert ».

Mais le génie de Montesquieu c’est de parvenir à s’emparer du modèle britannique est d’essayer de le rendre applicable à la France.

Je m’explique : Il a constaté que l’Angleterre pratiquait ce système de

« checks and balance », de poids et de contre-poids, un système selon lequel aucun pouvoir ne peut franchir certaines limites sans subir immédiatement une sanction par les autres, ce qui induit un brusque retour de balancier vers l’équilibre.

Et bien Montesquieu en fait en quelque sorte une traduction française centrée sur l’aspect institutionnel : au-delà de la « modération » prêchée par les Anglais (et Locke en premier), c’est bien la « séparation organique » des trois pouvoirs (l’absence de concentration) qui garantit l’exercice de la liberté politique,

Il nous reste à voir pour finir quelles sont les orientations qu’elle va prendre.

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Plus on s’intéresse au système de Montesquieu, plus on se convainc qu’il finit, peu à peu, par donner la part belle aux nobles, en tant que corps héréditaire et privilégié.

C’est l’image d’un Montesquieu réactionnaire qu’a voulu tracer notamment Louis Althusser = il est vrai que Montesquieu semble très attaché à une société d’ordres et de privilèges, mettant en avant la noblesse (d’épée, et de robe aussi, dont lui-même fait partie). Et cette noblesse doit jouer un rôle politique.

Et effectivement, même s’il le fait au nom de la liberté politique du peuple tout entier, ses affirmations sont parfois troublantes tant elles ont une coloration aristocratique :

« Il y a toujours dans un État, des gens distingués par la naissance, les richesses et les honneurs ; s’ils étaient confondus parmi le peuple et s’ils n’avaient qu’une voix comme les autres, la liberté commune serait leur esclave et ils n’auraient aucun intérêt à la défendre, parce ce que la plupart des résolutions seraient contre eux. La part qu’ils ont à la législation doit donc être proportionnée aux autres avantages qu’ils ont dans l’État ».

Autrement dit = ils bénéficient de privilèges = ils doivent donc participer au pouvoir = et cette participation est d’autant plus nécessaire que de cette manière ils défendent leur liberté (et donc leurs privilèges ; et c’est nécessaire parce que ces privilèges sont menacés par le roi) ; mais ce faisant, ils défendent aussi la liberté de tous. Et les deux vont de pair :

« Et il se trouve que chacun va au bien commun, croyant aller à ses intérêts particuliers ».

En défendant ses propres intérêts un noble défend ceux de tout le monde et, ce faisant, il défend aussi ceux de l’État. La noblesse ne s’oppose pas aux intérêts de l’État = au contraire, elle est à leur service.

Voilà une raison supplémentaire pour que Montesquieu défende les privilèges de la noblesse = par exemple, lorsqu’il étudie la constitution anglaise, Montesquieu approuve, une fois encore, le maintien des privilèges de la noblesse ;

Mais il le fait sous l’angle constitutionnel = lorsqu’il il vante les bienfaits du « bicamérisme », il le fait non seulement parce que le bicamérisme opère une division à l’intérieur du pouvoir législatif, mais aussi parce qu’il est bon que le peuple s’exprime plutôt dans la Chambre des communes et la noblesse dans celle des Lords. (il réserve donc à la noblesse une chambre qui soit le lieu de l’expression de leur intérêts).

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On en vient à se demander si Montesquieu n’est pas tenté de faire un lien entre séparation des pouvoirs et séparation des classes sociales, dans le but de favoriser la noblesse sous couvert de liberté.

Montesquieu ne serait-il finalement qu’un nostalgique de la « société féodale » qui donnait la part belle à la noblesse. Ne serait-il pas l’un des derniers représentants du traditionalisme aristocratique ? C’est la thèse que défendent certains auteurs. En tous cas, la question doit rester posée.

Sans répondre à cette question, je voudrais pour conclure souligner pour conclure l’extraordinaire postérité de Montesquieu = grâce à son pragmatisme qui influence désormais les institutions, son œuvre est clairement une préfiguration des choix constitutionnels qui seront faits à la révolution :

- en 1789 = article 16 de la DDHC = « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ».

- et surtout en 1791 = une monarchie constitutionnelle aux pouvoirs limités, fondée sur la représentation et soucieuse de garantir les droits des citoyens. En revanche la constitution de 1791 introduit le concept de souveraineté nationale étranger à Montesquieu.

En revanche, il influencera plus tard les institutions du gouvernement libéral de 1830, et bien d’autres, encore, depuis. Par certains aspects, son œuvre est donc aussi intemporelle. La pensée de Montesquieu reste encore aujourd’hui l’une des principales sources d’inspiration du droit constitutionnel et des démocraties libérales.

Quatorze ans après l’Esprit des lois, en 1762, paraît une autre œuvre politique fondamentale = qui va peut-être mois grandir mais davantage remuer l’esprit humain = le Contrat social de Rousseau.

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