A NNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE T OULOUSE
É MILE D URAND
Essai sur une théorie classique de la création et de l’annihilation des charges électriques
Annales de la faculté des sciences de Toulouse 4
esérie, tome 20 (1956), p. 99-110
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Essai sur une théorie classique
de la création et de l’annihilation des charges électriques
par Emile DURAND
Professeur de Physique Théorique à la Faculté des Sciences de Toulouse
> 1. . - INTRODUCTION
La
plupart
desphénomènes
del’électromagnétisme classique s’expli- quent
par desdéplacements
decharges électriques;
ces dernières nepeuvent
ni être créées ni
disparaître,
et c’estpourquoi
nous dirons que l’électroma-gnétisme classique
est conservatif.On sait
cependant
que lescharges électriques peuvent
être créées parpaires
àpartir
d’unphoton (par exemple
création d’un électronpositif
et .d’un électron
négatif,
d’unproton positif
et d’unproton négatif)
et que,inversement,
deuxcharges (+) (-) peuvent disparaître
en donnant un ouplusieurs photons.
Il est donc assez naturel de rechercher leséquations
fondamentales d’un
électromagnétisme qui
ne serait pas conservatif.Des
équations.
de Maxwellrésulte l’équation
de conservation°
oû p
(x,
y, z,f ) , v (x,
y, z,f )
sontrespectivement
la densité et la vitessemoyenne de l’électricité. Avec les notations
d’Univers,
J - p v, J4 = ic p, x4 =icf, (1 )
s’écrit -en convenant de faire usage de la
règle
de sommation de 1 à 4 sur les indices muets.Quand
iln’y
aplus
conservation del’électricité, l’équation (2)
n’estplus valable,
et it en est de même deséquations
de Maxwell. Avant d,egénéraliser (2 ) , rappelons
brièvement leséquations
fondamentales de l’élec-tromagnétisme classique
sous la formequadridimensionnelle.
2. - L’ÉLECTROMAGNÉTISME CLASSIQUE
On peut
décrire lesphénomènes
avec unquadripotentiel
AP oùp est
un indice
qui peut prendre
les valeurs1, 2, 3, 4,
etqui
obéit auxéquations
100
L’équation (4)
dupremier
ordre est connue sous le nom de « condition deLorentz » ;
q est aussi un indicequi peut
varier de zéro àquatre; aq
est uneécriture
abrégée
de~/~xq
et l’on utilise lesystème
d’unité m.k.s.C. rationalisé.En
appliquant l’opérateur Op
aux deux membres de(3)
et en tenantcompte
de(4),
on en déduitl’équation
de conservation(2).
On voit ainsi que la condition de Lorentz pour lespotentiels
est directement reliée à la conservation de l’électricité et nous verronsqu’elle disparaîtra
dans unélectromagnétisme
non conservatif.,
Du
potentiel
Ap on tire le tenseur dechamp
par la relation de définitionDans ces
conditions,
si l’onapplique l’opérateur ~q
à(5)
et à sa duale etsi l’on tient
compte
de(3) (4),
on en déduit leséquations
de MaxwellLa densité
volumique r
de la force que lechamp
exerce sur lescharges (force
deLorentz),
a pourexpression
On sait enfin que si l’on définit le tenseur de Maxwell Tpq par
la
densité
de force a pourexpression
est la densité de
l’énergie électromagnétique
localisée dansl’espace
et Enparticulier
est le vecteur de
Poynting.
3. -
L’EQUATION
DECONTINUITÉ
ET LE DEBIT DES SOURCES D’ELECTRICITé Lacharge
totaleQ
contenue dans un volume fixe del’expace
limité par une surfaceS,
a pourexpression
Pendant le
temps
dtl’augmentation dQ
est donc telle queÉcrivons
que cetteaugmentation
estégale
à lacharge Qi
crééedans v,
moins lacharge Q2 qui s’échappe
de v à travers S dans le mêmetemps dt;
ces dernières ont pour
expression
on a donc
ce
qui
donneComme ceci doit être vrai pour tout volume v aussi
petit qu’on
le veut et même pour un élément devolume,
on en déduit quel’expression
sous lesigne
somme doit êtrenulle,
soit .D’après
sa définition(15), 3)
est le débit des sourcesvolumiques
d’élec-tricité. Sous la forme
quadridimensionnelle (16)
s’écritC’est
l’équation
de continuitéqui
relie lequadri-courant
JP au débit dessources.
°
Dans le cas
particulier
d’une sourceponctuelle q fixe,
mais variable dans letemps,
on asimplement
Nous allons maintenant donner les
équations
d’unélectromagnétisme
nonconservatif
qui s’appuiera
surl’équation (17)
etqui
redonnera l’électro-magnétisme
de Maxwell-Lorentzquand
on yfera 3
= 0.4. - LES ÉQUATIONS FONDAMENTALES
DE
L’ÉLECTROMAGNÉTISME
NON CONSERVATIF _On
peut
décrire lesphénomènes
enpartant
d’unquadripotentiel
APqui
obéit aux mêmes
équations
que dans la théorieclassique,
soitAvec ce
potentiel AP,
on définittoujours
un tenseur dechamp
Bpqantisymé- trique
parmais nous définirons aussi un autre tenseur de
champ n qui
sera un inva-riant pour une transformation de
Lorentz,
parl’expression
Il est facile de voir que ce nouveau
champ
est lié au débit des sources etqu’il peut
êtrepris
à zéro s’il y a conservation de l’électricité. Eneffet,
enappliquant l’opérateur 3p
à(19)
et en tenantcompte
de(21),
on en déduiton a donc la solution
particulière
les crochets
indiquent
lesgrandeurs
retardéesprises
autemps
retardé1-(r/c) ;
; à cette solution onpeut toujours ajouter
une solution deDalem- ’bertien nul. ,
.
Appliquons l’opérateur aq
à(20)
ou a sa duale et tenonscompte
de(19
t et(21 )
il vient .’
qui généralisent
leséquations (6 ) (7)
de Maxwell.Le nouveau
champ
nagit
sur lescharges
et la nouvelleexpression
de ladensité de force
qui généralise (8) (et qui
reste une forme bilinéaire mixtedensité-champ)
s’écritEnfin le tenseur de Maxwell
généralisé peut
s’écrireC’est
toujours
une forme bilinéaire descomposantes
du nouveauchamp Bpq,
0, a 7composantes.
On montre facilement à l’aide de(18)
que l’on ’1En dehors
descharges
cetteéquation exprime
la conservation de laquantité
de mouvement et de
l’énergie électromagnétique.
Pourl’équation
de conser-vation
del’énergie
on aComme cas
particulier,
si leschamps
sontfixes,
mais variables dans letemps,
on a A~ = 0 d’où BIV = 0 et
(29)
sesimplifie
suivant5. - POTENTIELS ET CHAMPS
D’UNE CHARGE PONCTUELLE VARIABLE ET EN MOUVEMENT
Le
quadripotentiel
a pourexpression
’La seule différence de
(33)
avecla
formuleclassique
de Liénard-Wiechert c’est que qqui
varie en fonction dutemps
doit êtreprise
autemps
retardé,
t-(_r/c )
.Calculons le nouveau
champ
Q; on trouve, avec la formule(21 )
de défini-tion
Cela
peut
s’écrireDans le cas
particulier
d’unecharge ponctuelle
au repos,(35)
donne()n a
aussi,
dans ce cascar le
potentiel
A est nul.6. - CRÉATION D’UNE CHARGE PONCTUELLE FIXE .
Donnons nous par
exemple,
la loi de variationde q
en fonction dutemps qui
estreprésentée
sur lafigurè
1 a : : lacharge qui
n’existe pas avant t = t) est créée linéairement dans l’intervalle de temps o t 9.On a donc
Le
potentiel
V est donné par(37),
soitLa
figure
1 breprésente
la variation dé V en fonction de r pour une certaine valeur dutemps t
8.Quand t j 8
la brancheV3
constante dupotentiel
FiG. 1.
fait son
apparition,
comme le montre lafigure
1 c. Lespoints
ab distants de c0 sedéplacent
à la vitesse de la lumière vers r -~ oo.Quand
ta o0 ontend
donc,
commeil
sedoit,
vers lepotentiel
coulombien de lacharge ponctuelle.
Pendant la création de la
charge,
lechamp
0qui
n’existe que dans la couchesphérique
abemporte
uneénergie
constanteégale, d’après (30 )
àet en tenant
compte
del’expression (39) de V2
et de(37 ) qui
donneOn trouve en
portant
dans(40),
que l’on aCette
énergie s’échappe
définitivement dupoint
oùl’on
crée lacharge
et sedilue dans une couche
sphérique d’épaisseur
constante mais de rayon crois-sant indéfiniment. On notera que si 9 -
0,
c’est-à-dire sila charge
est crééebrusquement,
Ceci est àrapprocher
du’ fait quel’énergie
électrosta-tique
d’unecharge ponctuelle
est aussiinfinie.
7. - ANNULATION D’UNE CHARGE PONCTUELLE FIXE
Examinons maintenant dans des conditions
analogues,
le cas de la dis-parition
d’unecharge ponctuelle
q. Siq(t)
estreprésenté
en fonction dutemps
par la courbe de lafigure
2 a, c’est-à-dire si l’on ale
potentiel
donné par(37 )
s’écritLa. courbe du
potentiel V2
en sedéplaçant
faitdisparaître
derrière elle lepotentiel
coulombien de lacharge ponctuelle. Quand t
e cepotentiel V,
Fio.2.
est une courbe descendante comme le montre ta
figure
2 b.Quand t
> 8c’est une courbe ascendante et le
potentiel V3
nul commence à faire son,
apparition (Fig. 2c).
Lepoint
« a » sedéplace
à la vitesse de la lumière lelong
d’unrayon
issu del’origine
et au bout d’untemps
infini lepotentiel
coulombien initial acomplètement disparu. Quand t
= 0 lepotentiel V2
se réduit à la droite MN. ,-La couche
sphérique d’épaisseur
c0 à l’intérieur delaquelle
lechamp Q
est différent de
zéro, emporte
encore uneénergie qui
donnée par(41 ) ,
8. - CRÉATION D’UNE COUCHE SPHÉRIQUE ET UNIFORME D’ËLECTRICITE STATIQUE
D’après (19)
si l’on a une couchesphérique
uniforme de densité variable~
(t),
lepotentiel
scalaire est donné par lafigure
3 a. ,FIG. 3.a
La somme sur r va de
(R-a)
à(R+a)
si lepoint
P est à l’extérieur(R
>a).
Elle va de
(a-R)
à(a+R)
si lepoint
P est à l’intérieur. PosonsT = f -
(r/c) /
on a alors ’en introduisant la
primitive
de cr(r),
soitOn voit
qu’à l’intérieur,
il y a une ondeconvergente
et une ondedivergente;
il
s’agit
d’ailleurs de la même ondequi
estpassée
par le centre 0 en chan-’
geant
designe.
Al’extérieur,
il y a deux ondesdivergentes
décalées de2
a/c
dans letemps.
Il y a l’onde directe et l’onde d’abordconvergente qui
est devenue
divergente
à l’intérieur dela- sphère
de rayon a; elle sort à travers cette dernière et sepropage
alors à l’extérieur.Quand
r = ,a on a Vint ==Vext,
mais les dérivées normales sont discontinues etcorrespondent
bien à une densité eT(t) .
Considérons le cas où l’on crée
brusquement
a; on a alors la ,variation de or(f )
commel’indique
lafigure
3b. Analytiquement
cela s’écritet l’on en déduit
3 b
Nous distinguerons
trois cas, suivant que ct estcompris
dans l’un des trois intervalles0,
a; a,2a; 2a,
m.(
PREMIER CAS.
Figure
4.(0
çta) .
L’onde F t -c, J
est nulle par-FIG. 4.
tout à l’extérieur et à l’intérieur. On a donc
La
figure
4représente
V en fonction de r pour une valeur donnée dutemps;
ies deux flèches
indiquent
le sens dudéplacement
des courbesquant t
croît.DEUXIÈME CAS.
Figure
5.(a
ct2a).
A l’intérieur on atoujours (51 ) qui
est valable car la deuxième onde n’a pas encore eu letemps
d’arriver.FIG. 5.
A l’intérieur le front de la deuxième onde est au
point
r =(ct
.--a)
et sedéplace
vers la droite avec la vitesse c.Quand
r(ct
-a)
on a donc super-position
des deuxondes,
cequi
donne.
Quand
r >(ct
-a)
ettoujours
à l’intérieur de lasphère
on atoujours (50) qui
estvalable,
mais c’est devenu une courbedescendante,
alorsqu’elle
étaitmontante vers la droite dans la
figure précédente.
TROISIÈME CAS.
Figure
6.(2
a ctoo ) .
Le front de l’ondequi
estpas-
sée par le centre est
toujours
aupoint
r =ct - a;
on a donc pourCt r
(ct
-a),
unesuperposition
des deux-ondes,
cequi
donneOn tend donc vers le
potentiel
coulombien : constant pour r .a et décrois- sant comme1/R
à l’extérieur de lasphère.
La seule
partie
variable dupotentiel
se trouve donc dansl’espace
com-pris
entre les deuxsphères
de rayon(ct
-a)
et(ct
+a)
; sonexpression
estdonnée par
(51).
Il est intéressant de calculerl’énergie qui
se trouve danscette couche et
qui s’échappe
définitivement de la surface r = a. Lechamp
électrique
décroît comme1/R2
etl’énergie électrostatique correspondante
tend vers zéro. Il reste le nouveau
champ
nqui
décroît comme1/R
etqui
,FUi. 6.
emporte
uneénergie constante,
soitoù
Q
= 4 7ra2uo
est lacharge
totale de la couche.Rappelons
quel’énergie
duchamp électrostatique
de cette couchesphé-
rique finale 03C30
a paur valeur .L’énergie
de création W, est donc du même ordre degrandeur
quel’énergie
électrostatique.
- ,. 9. - CONCLUSION
On a mis en évidence le fait que
lorsque
lescharges
ne se conservent .plus,
il y a un nouveauchamp
Qqui
est uninvariant;
il contribue à l’éner-gie
et à laquantité
de mouvementélectromagnétique
et modifie la force de Lorentz.110
Toutefois,
il est certain que dans le cadre de la théorieclassique,
on nepeut
rendrecompte
des faitsexpérimentaux
que l’on observe dans la création despaires (+ ) (-)
ou dans leurdisparition.
C’est seulement dans le cadre de la théoriequantique
deschamps
que les nouvelles formulespredrons
toute leur
valeur.
La théoriequantique
actuelle doit êtreincomplète
car ellene tient pas