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Voyage à travers un baril de poudre : guerre et imaginaire touristique à Sarajevo

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Academic year: 2022

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Voyage à travers un baril de poudre : guerre et imaginaire touristique à Sarajevo

NAEF, Patrick James

Abstract

Cet article propose de questionner l'influence d'un conflit récent sur la production d'un imaginaire touristique lié à un lieu, plus précisément à Sarajevo, la capitale de Bosnie-Herzégovine. Cette ville, ainsi que l'ensemble de la région des Balkans, a souvent été assimilée à un baril de poudre, notamment à travers la couverture médiatique du conflit qui a embrasé les Balkans dans les années 90. De plus, certaines productions cinématographiques tendent à créer une image romantique et orientaliste de cette région, l'assimilant en grande partie au feu et au sang. Je démontrerai que cette vision, certes simpliste et réductrice, tend à créer chez certains touristes un imaginaire, voire une fascination teintée d'aventure. Dans ce contexte, les lieux traumatisés par la guerre ou encore les sites symboles de la résistance sont exploités par des acteurs locaux et s'inscrivent peu à peu dans le paysage touristique de la ville et de la région.

NAEF, Patrick James. Voyage à travers un baril de poudre : guerre et imaginaire touristique à Sarajevo. Via Tourism Review , 2012, no. 1

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:19266

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

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n°1 – 2012 – Les imaginaires touristiques 1

V oyage à travers un baril de poudre : Guerre et imaginaire touristique à Sarajevo

Patrick Naef

L

es lignes qui suivent portent sur une recherche en cours présentée lors d’une conférence à l’Université de Californie (Berkeley)1, plus précisément dans la cadre d’une réflexion sur les agents producteurs d’imaginaire dans le secteur touristique. Cette étude s’appuie sur des sources empiriques récoltées dans le cadre d’un projet de recherche encore en cours lors de la rédaction de ce texte, réalisée à Sarajevo durant l’été 2010, ainsi qu’au Vietnam et au Cambodge en 2009. La méthodologie utilisée est basée sur des entretiens semi-directifs, de l’observation participante, ainsi que de l’analyse de contenu. Des entretiens ont été conduits avec des acteurs touristiques locaux – guides, promoteurs, employés du secteur touristique – ainsi qu’avec des touristes. De plus, près d’une dizaine de tours guidés, spécifiquement liés à la thématique de la guerre, ont été suivis. Finalement, de nombreux objets et médias, tels que des cartes postales, du matériel de promotion, des blogs de voyageurs ou encore des articles de presse ont été analysés afin rendre compte des liens existant entre tourisme et guerre.

Je mettrai en lumière des vecteurs - producteurs d’imaginaire - spécifiquement liés à l’industrie touristique (cartes postales, guides de voyage, matériel de promotion, etc.), ainsi que d’autres, pas directement liés au tourisme, comme des productions cinématographiques mettant en scène la région, ainsi que la guerre qui l’a meurtrie. La question principale qui sous-tend cette analyse est de savoir si la guerre, ou plus précisément le patrimoine hérité du conflit, peut constituer un motif de visite pour des touristes se rendant dans des lieux tels que Sarajevo. Dans cette optique, comment les objets cités plus haut peuvent-ils constituer des vecteurs participant à la création de différentes formes d’imaginaire étroitement liées à la guerre et à son héritage ? La présentation de certaines pratiques et certains objets en lien direct avec le tourisme et la guerre m’amènera à développer la notion de « tourisme de guerre » ou encore de « tourisme post-conflit », en la situant dans le cadre plus générale du « dark tourism » (Lennon & Foley 2000, Stone 2006).

Le baril de poudre balkanique

Au préalable, il convient de revenir brièvement sur cette image liée au « baril de poudre » 2, présente dans le titre de cet article, et souvent utilisée pour décrire la région des Balkans. Cette vision métaphorique et simpliste vise à décrire un territoire qui passerait d’une situation stable et calme à un éclatement de violence, dû à un évènement qui constituerait « l’étincelle » menant à cette explosion. Déjà en 1914, la ville de Sarajevo est comparée à un baril de poudre lorsque l’Archiduc François Ferdinand et sa femme y sont assassinés par Gavrilo Princip, un nationaliste serbe.

Cet incident est vu comme l’évènement – autrement dit « l’étincelle » – qui conduira au déclanchement de la Première Guerre mondiale.

Cette image sera ensuite aussi fréquemment utilisée en référence à ce qui est communément appelée la « guerre des Balkans », que ce soit à travers des médias tel que CNN ou Euronews, ou encore des productions cinématographiques. Le film intitulé « Baril de poudre »3, réalisé en 1998 par le réalisateur serbe Goran Paskaljevic, ou « Au feu »4, du Bosnien5 Pjer Zalica semblent déjà être des exemples représentatifs de l’utilisation de cette métaphore. Si ces productions ont généré un certain écho en dehors des frontières de l’ex- Yougoslavie, elles sont tout de même restées trop discrètes pour participer à la construction d’un imaginaire chez de potentiels visiteurs étrangers.

Les réalisations d’un cinéaste mondialement connu comme Emir Kusturica, en revanche, sont selon moi des agents incontournables dans la production d’un imaginaire balkanique, fortement teinté de musique gitane, d’alcool et d’armes à feu. « Underground », par exemple, revient sur l’histoire de la région, de la Seconde Guerre mondiale au conflit des années 90, à travers la perspective d’une communauté cachée sous terre. Kusturica est sujet à de nombreuses critiques dans sa terre d’origine - la Bosnie – en raison notamment des subventions qu’il aurait reçues du gouvernement nationaliste serbe de Slobodan Milosevic, ou encore dû au contenu de ces films, que certains qualifient de pro-serbe, taxant ainsi le réalisateur de « traître ». Si l’objet de cet article n’est pas de revenir sur la polémique

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n°1 – 2012 – Les imaginaires touristiques 2

autour du réalisateur, il est tout de même intéressant de noter qu’au cœur des critiques qui lui sont liées, certains mettent en avant l’image fantaisiste, et souvent vue comme dénigrante, qu’il donne de la région dans ses films. En effet, il existerait un fossé entre ce qui est vu localement comme la réalité balkanique et le « mythe » véhiculé par le cinéaste, comme le soutient le philosophe slovène Slavoj Zizek dans une interview réalisée lors du festival du film de Sarajevo en 2008 : « […] I think that cinema is today a field of ideological struggle, some struggle is going on there and we even can see this clearly with regard to post Yugoslav horrible war; we have some of the films from here which are authentic but unfortunately the biggest successes were not authentic. By this I mean for example Emir Kusturica’s “Underground.” I think that film is almost tragic – I would not say misunderstanding falsification – in the sense that:

what image do you get of ex-Yugoslavia from that film? A kind of a crazy part of the world where people have sex, fornicate, drink and fight all the time; he is staging a certain myth which is what the West likes to see here in Balkans: this mythical other which has been the mythical other for a long period.»6 Il ajoute que les Balkans sont construits comme « l’inconscient » de l’Europe, qui tend à y projeter tous « ses obscénités et ses sombres secrets ». Ainsi, les Balkans ne seraient pas pris au piège dans leurs propres rêves, mais dans ceux de l’Europe occidentale. Ceci nous renvoie maintenant à notre questionnement initial sur la construction d’un imaginaire, d’un « autre » Balkan. A savoir si ces « Balkans mythiques ou imaginés » sont présents dans le champ du tourisme et de quelle manière certains objets touristiques peuvent être vus comme participant à la construction de cet imaginaire, au même titre que les productions cinématographiques citées précédemment.

L’image du « baril de poudre balkanique » semble partagée à bien des égards et il serait intéressant pour une bonne compréhension des lignes qui vont suivre de revenir brièvement sur le regard porté par certains penseurs sur les idées d’imaginaire et d’imagination. Ces notions ont été traitées par certains philosophes tels que Platon, Spinoza ou Kant, ainsi que par des psychanalystes tel que Carl- Gustav Jung, lequel introduisit l’idée d’inconscient collectif, qui regrouperait l’ensemble des imaginaires personnels. Pour l’écrivain André Breton (1966), l’imaginaire est ce qui tend à devenir réel. Du point de vue des sciences sociales, des anthropologues comme Mircea Eliade, Claude Lévi- Strauss et Gilbert Durand ont développé la notion d’imaginaire à travers les représentations, les

mythes ou encore les croyances communes qui permettraient de structurer nos sociétés. Dans un entretien, Durand définit l’imaginaire comme un fond commun : « Le musée de toutes les images, qu’elles soient passées, possibles, produites, ou à se produire »7. Il ajoute que si l’imaginaire peut se présenter par exemple dans les rêves, il peut aussi prendre des formes plus abouties comme dans les mythes, les arts voire dans les productions télévisuelles ou cinématographiques. Du point de vue spatial, la notion « d’imaginaire géographique » a été mise en avant pas certains géographes français (Debarbieux, Lussault) et peut être défini comme: «[l’] ensemble d’images mentales en relation qui confèrent, pour un individu ou un groupe, une signification et une cohérence à la localisation, à la distribution, à l’interaction de phénomènes dans l’espace. » (Lévi, Lussault, 2003, p. 489). Selon le dictionnaire de Lévi et Lussault, il existerait toujours une forte réticence à inclure cette notion dans le champ académique qui serait due à l’idée « très platonicienne, que l’imaginaire se définit en contrepoint de la réalité». » (2003, p.

490).

Dans le domaine de la recherche sur le tourisme, Rachid Amirou (1999, p.22) à travers une approche psychosociale, s’intéresse aux « fondements mythiques et anthropologiques du comportement touristique. » Il met ainsi en avant la notion

« d’imaginaire touristique » et présente le tourisme comme l’expression d’une triple quête, celle du lieu, de soi et de l’autre : « Dans cette optique, l'imaginaire touristique peut être envisagé sous trois angles. Il renvoie tout d'abord à un exotisme, qui s'enracine dans une symbolique des lieux et de l'espace. A chaque lieu singulier (Paris, Rio, Calcutta...) et à chaque type d'espace (la montagne, le désert, la plage...) correspondent en effet des images, des récits, des représentations qui guident et organisent les conduites des touristes. Les deux autres dimensions renvoient au tourisme comme expérience personnelle. Dans la relation à soi, il manifeste une quête de sens. Dans la relation aux autres, il traduit la recherche de certaines formes de sociabilité, qui offrent une alternative au quotidien. » L’auteur remarque aussi que les fonctions des images-stéréotypes qui façonnent l’univers du touriste ont été négligées par les chercheurs dans le domaine et il avance ainsi l’idée du tourisme comme objet transitionnel, s’inspirant des théories du pédopsychiatre Donald Winnicot.

Ainsi, de la même manière que le jeu d’un enfant permettrait la transition « entre l’état d’union avec la mère à l’état où il est en relation avec elle, en tant que quelque chose d’extérieur et de séparé » (1994,

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p.151), l’imaginaire touristique prendrait place dans une « aire intermédiaire d’expérience », facilitant ainsi la transition entre l’ici et l’ailleurs, entre le connu et l’inconnu. Ces images- stéréotypes, même avec leur dimension déformante, auraient donc une fonction essentielle dans l’appréhension que se font les touristes de l’inconnu. Noel Salazar, quant à lui, replace le tourisme dans le cadre conceptuel défini par David Harvey comme « l’industrie de production d’images »8. Il rejoint en partie la théorie d’Amirou sur le tourisme comme objet transitionnel, en présentant la notion de culture touristique comme :

« more than physical travel, it [touristic culture] is the preparation of people to see others places as object of tourism, and the preparation of those places to be seen ». (2009, p.50) L’auteur, dans une réflexion sur l’influence d’un imaginaire touristique sur la société Masaï, affirme que la question pertinente serait de savoir comment le tourisme et les imaginaires qui lui sont associés pourraient façonner et refaçonner les cultures et les sociétés. Il présente les éléments qui participeraient avec le tourisme au (re)modelage des cultures en insistant sur l’importance du rôle des médias issus de la culture populaire: « The influence of popular culture media forms—the visual and textual content of documentaries and movies; art and museum exhibitions; trade cards, video games, and animation; photographs, slides, video, and postcards; travelogues, blogs, and other websites;

guidebooks and tourism brochures; coffee table books and magazines; literature; advertising; and quasi-scientific media like National Geographic—is much bigger. » (2009, p.51) Selon lui, l’analyse de l’imaginaire pourrait ainsi permettre une déconstruction des stéréotypes et des clichés, suivant une perspective socioculturelle, politique et idéologique (2010, p. 7)

Comme on peut le voir, que l’on parle d’imaginaire en général ou d’imaginaire touristique, plusieurs auteurs s’accordent sur l’importance de la culture populaire et des médias qui lui sont associés pour la construction d’un imaginaire. S’il semble acquis que ces éléments – médias, objets touristiques, créations artistiques...- contribuent à modeler ces imaginaires, il importe aussi d’observer comment ces imaginaires façonnent et influencent une destination touristique, mais aussi comme l’avance Salazar, les sociétés et les cultures de manière générale.

De la guerre au tourisme

A Sarajevo, le quartier de Bascarsija, qui constitue le bazar et le centre historique de la capitale bosnienne, est aussi redevenu le principal centre touristique du pays, depuis le retour en 2005 et en plus ou moins grand nombre, des touristes étrangers. Au milieu des constructions de style ottoman se côtoient mosquées, églises, échoppes et magasins de souvenirs. Parmi le matériel traditionnellement vendus aux touristes, certains objets semblent sortir de l’ordinaire. Entre les cartes postales représentant les principaux sites d’intérêt de la ville, d’autres cartes postales, directement liées à la guerre des années 90, sont proposées aux badauds. Une première carte (figure 1) représente une réunion de l’état-major bosniaque pendant le siège, une autre illustre la mise en terre de plusieurs cercueils (figure 2), une troisième présente quatre moments clés de l’Histoire de la ville (Figure 3) : l’assassinat de l’Archiduc Franz François Ferdinand, l’âge d’or de la capitale bosnienne avec l’organisation des jeux Olympiques de Sarajevo en 1984, les cinq ans de siège de 1991 à 1995 et la période actuelle ironiquement décrite sous l’égide : « No problems ».

Figure 1 (Z. Filipovic)

Figure 2 (Z. Filipovic)

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Figure 3 (Z. Jusufovic)

Les guides touristiques vendus dans les échoppes de souvenirs offrent aussi une analyse intéressante.

Au milieu des quelques guides de voyage ou de randonnée classiques proposés aux touristes, un ouvrage semble se démarquer : The Sarajevo Survival Guide. Derrière l’accroche « Greetings from Sunny Sarajevo! », ce livre est structuré comme un guide de voyage classique avec différents chapitres tels que : « Getting around », « Sarajevo by night », ou « Where to dine ». Toujours est-il que le chapitre

« Sarajevo by night » ne propose en aucun cas les discothèques à la mode de la ville, mais les différentes techniques utilisés à l’époque du siège pour produire de l’électricité. De la même manière, le chapitre « Transportation », revient sur les moyens utilisés par les habitants pour se déplacer en évitant les snipers et n’offre pas un inventaire des transports publics de la ville. Cette parodie de guide touristique a été produite durant le siège par une association nommée FAMA, regroupant des journalistes, des écrivains et des artistes, très engagés et critiques du pouvoir en place déjà avant la guerre. C’est donc face à un objet de mémoire que l’on se trouve, à travers le détournement d’un objet touristique, comme l’atteste la préface de l’ouvrage : « The guide book to Sarajevo intends to be a version of Michelin, taking visitors through the city and instructing them on how to survive without transportations, hotels, taxis, telephones, food, shops, heating, water, information, electricity. It is a chronicle, a guide for survival, a part of the future archive which show the city of Sarajevo not as a victim, but as a place of experiment where wit can still achieve victory over terror, the (sur)real “The Day After”. Contemporary SF, the scene of factual

“Mad Max 5”. » (FAMA, 1993, p.1) Toujours-est-il que cet ouvrage est vendu dans les boutiques de souvenirs au milieu des guides touristiques classiques et des cartes postales. Ce processus de détournement peut aussi être observé au sujet des cartes touristiques représentant la ville de Sarajevo ou l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine.

L’association FAMA a ainsi réalisé une carte de la ville, sur le même mode d’une carte touristique représentant tous les lieux d’intérêt, sauf que les sites mis en évidence sont directement liés au siège, comme par exemple: le bâtiment de la poste, le Holiday Inn – refuge des journalistes pendant le conflit – ou encore l’usine de tabac qui n’a jamais cessé de fonctionner durant le siège, et qui est décrite ainsi sur le verso de la carte : « The

“Marlboro” cigarettes produced in the factory under the Philip Morris license was one of the most prized cigarettes brands in former Yugoslavia. There is the cult of the cigarette in Sarajevo. Although a large quantity of the stored tobacco was destroyed, the factory managed to produce small amounts of cigarettes throughout the siege. In spite of their inferior quality they were eagerly bought sometimes at 100 DM (70$) per carton. Cigarettes were the most valued barter commodity. For a pack of cigarettes one could get several tins of humanitarian food. Due to the lack of paper cigarettes were rolled into various textbooks, books and official documents. You couldn’t read on them warning about health hazards but you could learn for instance, about the process of producing copper.

The citizens were often telling the story about how Sarajevo would have surrendered had the cigarettes disappeared»9. Dans le même contexte, FAMA a produit une carte géopolitique de l’ensemble des républiques d’ex-Yougoslavie, représentant les haut-lieux de la guerre (Sarajevo, Vukovar, Mostar, Srebrenica,…), les différentes armées, les camps de réfugiés, ou les mouvements de population. De la même manière que la parodie de guide touristique décrite plus haut, ces « cartes de guerre » sont vendues parmi des cartes routières et des cartes de randonnée dans des commerces spécialement désignés pour les touristes. Après avoir mis en lumière ces différents objets situés entre guerre et tourisme, une attention particulière va maintenant être portée sur différentes pratiques mettant en jeu ces dimensions guerrières et touristiques.

Guerre et tours organisés

Dans la ville de Sarajevo, différents tours sont offerts aux visiteurs souhaitant se rendre sur les lieux du conflit. Le Times of misfortune Tour (figure 4), organisé par l’Office du tourisme du canton de Sarajevo, propose tout d’abord une brève visite de la ville en minibus suivant les traces de la guerre. L’itinéraire se termine dans le tunnel, transformé depuis une quinzaine d’années en musée, qui constituait à l’époque le seul lien entre la cité assiégée et le monde extérieur. Ces tours comprennent une demi-douzaine de participants et

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sont en général conduits par des étudiants, qui, s’ils n’étaient en général pas présents durant la guerre, ont l’avantage d’avoir passé leurs années d’exil à l’étranger et donc de maîtriser une ou plusieurs langues, leur permettant ainsi d’interagir avec des touristes.

Figure 4 (Sarajevo Tourism Office)

D’autre part, le Mission Impossible Tour, organisé de manière indépendante par Zijad Jusufovic, propose, lui, un panorama plus large des sites en relation avec le conflit. « You see smiling people, nice dresses, happy foreigners. It’s good… But now you are going to see the bad side of Sarajevo. Places that are not in the map. Places that are not recommended. Places that are covered. » (Juillet 2010) C’est sur ces mots que ce guide indépendant introduit le tour qui va emmener les visiteurs à travers les ruines de la dernière guerre. Le Mission Impossible Tour, en plus du tunnel cité précédemment, propose dans son programme de visite des lieux tels que les ruines du monument antifasciste, ce qu’il nomme lui-même « le marché des moudjahidin » au bas de la Mosquée du roi Fahd10, ou encore les vestiges de la piste de bobsleigh datant des Jeux olympiques de 1984. Ce guide, qui se présente comme étant le premier légitimé de manière officielle dans la période post- conflit, insiste sur l’impartialité de son discours, sur la véracité de ses propos - issus de nombreuses enquêtes réalisées par ses soins dans les années d’après-guerre - ainsi que sur la nature unique de ce qu’il va présenter. Il n’hésite pas à remettre en question des informations fournies par les guides de

l’Office du tourisme, se prévalant d’une certaine liberté de parole, à la différence d’acteurs moins indépendants, comme ici où il parle du tunnel de Sarajevo: « My presentation is a little bit different…They [les guides de l’Office du tourisme]

speak too much…There is too much information without big possibility to memorize... to rememorize. And nobody will mention black market for instance… and the other tunnel they started to build very close to this tunnel… for cars… nobody will mention it. » (Juillet 2010). L’objectif ici n’est pas de définir qui détient la vérité parmi les acteurs du secteur touristique, mais plutôt d’observer la manière dont la guerre entre dans le champ du tourisme et comment cette mise en tourisme participe à la création d’un certain imaginaire lié à cette région meurtrie et son histoire guerrière. Il serait maintenant intéressant d’observer ce processus de mise en tourisme en se penchant plus en profondeur sur un site précis.

Un tunnel source de mystères

Le tunnel de Sarajevo cité précédemment - aussi nommé « Tunnel of Hope » - même situé en périphérie de la ville, constitue maintenant une des attractions les plus visitées de Sarajevo, avec quelques centaines de visiteurs par jour. Ce site est un des symboles marquants de la guerre, mais aussi de la résistance livrée par l’armée bosniaque. Les discours des guides ne manquent pas en effet de décrire les moyens archaïques qui ont conduit à la construction de cet ouvrage et par la même occasion la résistance héroïque menée par l’armée bosniaque, clairement inférieure en nombre et en armes. Le combat des forces bosniaques est d’ailleurs souvent apparenté à celui de David contre Goliath. Si les aspects peu reluisants de l’histoire du tunnel – marché noir, profiteurs de guerre,…- sont en effet moins présents dans les propos des guides engagés par l’office du tourisme que dans ceux d’un guide plus indépendant comme Zijad Jusufovic, il serait cependant faux d’affirmer que ces éléments sont totalement éludés. Un guide, membre de la famille qui gère ce nouveau musée, a explicitement décrit les pratiques liées au marché noir qui avaient lieu dans ce tunnel durant la guerre, et ce lors d’une visite organisée par l’office du tourisme. D’ailleurs un touriste français participant au Times of Missfortune Tour, note que : « La France a attendu quarante ans avant de parler de l’existence d’un marché noir durant la deuxième Guerre Mondiale ».

(Juillet 2010) Il est en tous les cas intéressant de noter que dans une ville comme Sarajevo, dont le patrimoine culturel attirait de nombreux touristes déjà avant le siège, l’histoire guerrière constitue

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maintenant un des motifs principaux de visite, comme le souligne ce guide travaillant pour l’Office du tourisme du canton de Sarajevo: «The Times of Misfortune tour is the most demanded of our tours with the Historical tour11 » (Juillet 2010). Cette constatation peut d’ailleurs être étayée par certaines remarques récoltées auprès de touristes visitant les stigmates de la guerre, à l’image de cette Française qui explique: « On était parti en Croatie, on a poussé jusqu'à Mostar et on s’est finalement dit… Sarajevo... On trouve les gens en Bosnie plus spontanés, moins portés sur le

“commercial”. Et en plus c'est chargé d'histoire et c'est très intéressant de voir un pays qui se remet de ses stigmates ». (Juillet 2010) Les deux citations suivantes sont tirées du livre d’or d’une exposition traitant spécifiquement du siège et se déroulant au Musée d’Histoire de la ville. Une touriste américaine écrit ainsi : « My time here in the museum and in the city has opened my eyes in a thing I only saw on TV as a young 20 years old girl ».

Un autre touriste allemand note: « I was almost a teenager when I saw pictures of this terrifying war on TV and radio, It was impressive enough to make me want to come […] » La volonté de comprendre et de voir de ses yeux un lieu dont le traumatisme à fait la une des médias internationaux durant les années nonante, est un motif non négligeable pour ces visiteurs internationaux se rendant dans la capitale bosnienne. Ainsi de la même manière que certaines productions cinématographiques citées plus haut, des médias tels que CNN ou encore Euronews pourraient être considérés comme des agents participant, si ce n’est à la construction d’un (ou des) imaginaire(s), en tous les cas à des représentations d’un lieu marqué par une telle sauvagerie, que des individus du monde entier s’y rendent pour tenter de comprendre. Si bien sûr cette constatation demande à être étayée par un travail empirique plus développé, ces quelques éléments permettent tout de même de situer la guerre, ou du moins certains éléments patrimoniaux qui lui sont liés, comme un objet incontournable lié à l’image internationale de Sarajevo. Après cette première partie présentant quelques éléments empiriques, il convient maintenant de porter un regard sur la littérature existante, ainsi que sur d’autres cas à travers le monde, afin d’alimenter cette réflexion mettant en perspective guerre, tourisme et imaginaire.

Tourisme de guerre, entre imaginaire, fantasme et aura

Nous l’avons vu, près de 15 ans plus tard, la guerre des Balkans est encore pleinement ancrée dans les

images que renvoie cette région. Suivant une perspective de distance chronologique, un regard sur l’influence que des conflits armés plus anciens suscitent sur des représentations au niveau international pourrait enrichir cette analyse. Victor Alneng s’est penché sur les liens entre le secteur touristique et le patrimoine hérité de la Guerre du Vietnam à travers les discours des routards (backpackers) voyageant dans le pays. Il ne se réfère pas directement à la notion « d’imaginaire », mais introduit celle de « fantasme » et « d’aura », qui seraient selon lui en grande partie les produits de l’industrie cinématographique hollywoodienne.

Ainsi, les fantasmes des touristes voyageant dans le Sud-Est asiatique seraient surtout façonnés par des films tels que « Platoon » ou « Apocalypse Now ». Il soutient que ces fantasmes seraient les facteurs d’attraction principaux pour ces routards visitant le Vietnam, donnant ainsi une aura particulière à un pays qui a vu une grande partie de son patrimoine disparaître durant la guerre : «Ironically, while the war left most heritage sites otherwise destined for great tourism in ruins, War blessed Vietnam with others sites – the Cu Chi tunnels, The DMZ, My lai, China Beach, Hamburger Hill, Ke Sanh, The Rex, - with their own seductive and unique aura. » (Alneng, 2002, p. 462). Il ajoute que la dimension fantasmée des représentations de ces touristes dépend de leur imagination qu’il voit comme une

« pratique sociale élaborée », et que l’industrie touristique tendra à se structurer en accordance avec ces fantasmes. L’auteur prend en exemple les tunnels de de Cu Chi, un des sites les plus réputés pour son horreur à l’époque du conflit et qui est maintenant une des attractions touristiques les plus courues du pays. Les visiteurs de ce lieu, majoritairement occidentaux, sont conduits par un guide à travers les forêts d’eucalyptus qui renferment les vestiges de ces tunnels, en grande partie reconstitués. Ce site se présente comme un parc à thème sur la guerre où les employés sont revêtus des uniformes nord-vietnamiens ou Viêt- Cong. La possibilité est aussi donné aux touristes de participer en essayant les armes de l’époque (une balle tiré à l’aide d’un M-16 ou d’une AK-47 coûte un dollar), en parcourant les tunnels, voire même en revêtant les uniformes militaires de l’époque.

C’est à ce moment que le guide encourage les visiteurs « à vivre la guerre comme s’ils étaient des soldats de la guérilla »12.

Selon Alneng, « The tunnel tour – dubbed

“Vietnam’s answer to Disneyland and Disney and Fellini to Nam’s by visitors” – is organized to have tourists make-believe they are heroic Vietcongs;

they crawl into the tunnels, eat Vietcong food and join the Vietcong dolls for photos.[…] Some confess

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to be true GI-wannabes with a hedonistic repertoire of boozing, drugging and whoring. Adding to this their proclivity for war memorabilia, they present themselves as not too far stereotypes of wartime GIs. » (Alneng, 2002, p.474) Pour l’auteur, ce lieu est toujours un site de guerre, le site d’une nouvelle guerre: «A war of ideological napalm and propaganda booby-traps. This new war is a meta- war. A metamorphosis – the death of Vietnam as a country and the resurrection of Vietnam as a war.

» (Alneng, 2002, p.479) Finalement, il ajoute que le secteur touristique en promouvant ces sites de guerre tend à créer le portrait d’un pays « bombed back into the Stone Age […] ». (Alneng, 2002, p.485) Cette remarque rappelle en partie les propos du philosophe Zizek, cité plus haut au sujet des Balkans, lorsqu’il présente les productions cinématographiques d’Emir Kusturica comme la source d’une vision stéréotypée d’une région, prise au piège d’un imaginaire international assimilant le lieu aux armes et au sang.

De la guerre à la boîte de nuit

Cette présence du patrimoine de guerre est aussi observable dans un secteur qui, s’il est toujours lié de près à la notion de loisir, n’est a priori pas directement lié à l’industrie touristique. A Phnom Penh, la capitale du Cambodge, une boîte de nuit bien connue des voyageurs étrangers se nomme

« Heart of Darkness »13, alors que dans certaines grandes villes du Vietnam comme Ho Chi Minh Ville, Hué ou encore Hanoï, il existe une chaîne de discothèques nommée « Apocalypse Now ». Avant tout, il est sans doute important de préciser que si ces lieux de sortie sont a priori ouverts à tous, les prix et les videurs postés à l’entrée font que la plupart des locaux présents en soirée sont surtout des professionnels (prostituées, serveurs,…).

Suivant cette idée, on peut supposer qu’une grande majorité du public de ces endroits est composée de touristes. De plus, je soutiens que les noms de ces lieux ou encore leurs décors, rappelant une ambiance de guerre, ajoutent un élément d’aventure à l’imaginaire des visiteurs, comme le suggère ces deux commentaires de routards récoltés sur des blogs de voyageurs14 à propos du club « Heart of Darkness » à Phnom Penh :

« The place itself is nothing special, but the crowd it attracts is amazing. We had an adventure every time we went to that bar. » (Août 2009)

« Music was good and beer reasonable. You must visit! Ignore all the rumors about shootings!-the only shots are behind the bar! » (Octobre 2005)

Le commentaire suivant, beaucoup plus critique, renvoie quant à lui à l’analyse d’Anleng sur l’influence de l’industrie Hollywoodienne sur ces routards en voyage dans le Sud asiatique: «Heart of Darkness is ok if you think that clubbing with a bunch of Hollywood Wannabees pretending to be 'Gangstas' is cool. Total pretentious crap. » (Décembre 2009) D’ailleurs, Anleng mentionne les boîtes de nuit « Apocalypse Now » dans son article, en remarquant les affiches de « Platoon » et de

« Apocalypse Now » sur les murs, ainsi que les ventilateurs au plafond, rappelant les palmes des hélicoptères en temps de guerre : « In movies and phantasms, the war is, among other things, about Vietnamese girls who will ‘boom-boom’ Western males for a few dollars. Back then the foreigners were American GIs but nowadays the FNGs15 are tourists sipping B-52 cocktails at Apocalypse Now.

Sometimes those two categories merge – an ex-GI with his dogtag gold-mounted, a Vietnamese

‘girlfriend-for-rent’ in his lap, wearing a fatigue hat sporting the slogan ‘My business is death, and business has been good’, once honored Pham Ngu Lao Street with his presence. » (Alneng, 2002, p.471). Nous le voyons donc, les stigmates de la guerre qui a marqué le Vietnam sont bien présents dans des domaines liés directement ou de près au secteur touristique. Après ces remarques liées au contexte vietnamien, et dans une moindre mesure cambodgien, il est maintenant temps de revenir dans le cadre balkanique, afin d’observer plus précisément certains sites et surtout la manière dont ces derniers sont mis en tourisme et promus.

La Bosnie-Herzégovine entre guerre et fantasme La guerre des Balkans est encore très présente dans les mémoires et ce conflit n’est certes pas encore passé par le processus de patrimonialisation qu’aurait vécu un autre conflit comme «la Guerre du Vietnam ». Des sites liés à la guerre d’ex- Yougoslavie n’ont pas (encore ?) vécu des mécanismes de mise en tourisme comparables à certains exemples vietnamiens. Le tunnel de Sarajevo constitue une des attractions touristiques les plus courues de Sarajevo et de Bosnie- Herzégovine. Ce site a été reconverti lorsque l’armée Bosniaque a abandonné les lieux à la fin du siège, rendant ainsi la maison qui abritait l’entrée du tunnel à son propriétaire, Bajro Kollar. Ce dernier, plutôt que de réinvestir son lieu d’habitation, a décidé de le transformer en musée.

Toute cette opération s’est effectuée sans le moindre soutien du gouvernement et constitue donc une entreprise totalement privée, voir même

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familiale, le site étant maintenant géré par son propriétaire et sa famille. Le peu de recul existant entre la période actuelle et celle du conflit implique qu’il n’existe à ce jour qu’une réflexion académique très limitée sur les liens entre tourisme et guerre en Bosnie-Herzégovine, et dans la région des Balkans en général. Senija Causevic a étudié dans son travail de thèse le redéveloppement du tourisme en Bosnie et en Irlande du Nord dans un contexte post- conflit. Elle s’intéresse tout d’abord à la reconstruction de l’image et à la promotion de l’Irlande du Nord comme destination touristique pour le marché international, démontrant qu’il était finalement plus aisé de promouvoir cette île comme une « terre inconnue » après un conflit de longue haleine. Suivant cette idée de découverte et d’aventure, elle présente le tunnel de Sarajevo comme un « symbole d’inconnu » : « Speaking more generically, the tunnel is perceived as secret and mystical, a symbol of the unknown. What is on the other side of the tunnel? The reason for the Sarajevo Tunnel being the most visited site is that the story of the conflict is explained through the ordinary people of Sarajevo, people in every sense similar to the tourists themselves and whose lives were saved thanks to that tunnel. The result is a cathartic moment. People come to those sites because they themselves want to find the meaning of life. » (Causevic, 2008, p.246). Cependant, selon cet auteur, la visite d’un lieu tel que le tunnel de Sarajevo ne se limite pas uniquement à une dimension cathartique: «Backpackers visit Bosnia and Herzegovina to show off to their peers back home they were in a "war torn" area, and to show off their perceived western superiority over Bosnia, a post-conflict country. Regarding the first, this illustrates superficiality. People want to think that Bosnia and Herzegovina is a war torn country and being there provides an ego boost. » Encore une fois, cette constatation rejoint les propos de Zizek cités plus haut, qui remet en cause cette vision obscure et simpliste, assimilant en quelque sorte la Bosnie au trou noir de l’Europe. Si la notion de

«mystère et d’inconnu» est mise en avant et présentée comme un facteur d’attraction, les medias sont aussi vus comme un agent incontournable participant aux représentations internationales du lieu, et Causevic introduit même la notion de « CNN factor » : « Generally speaking, media has both positive and negative implications in the process of destination re-imaging. […]. The interviewees called those negative media reports, a CNN factor. Whenever there are negative media reports and broadcasting, it has an implication towards the perception of the destination. » (Causevic, 2008, p.139) Dans leur ouvrage

fondateur sur le « dark tourism », Lennon et Foley insistent sur la composante post-moderne de ce phénomène en démontrant eux aussi l’importance des médias dans le transformation d’un site de guerre en attraction touristique. C’est selon eux après le développement des technologies d’information et de communication (radio, télévision, Internet) que l’écho international lié à un évènement tel qu’une guerre est en mesure de susciter un intérêt du public et ainsi donner lieu à un site touristique lié au conflit. Selon Causevic, Sarajevo n’a été que rarement présentée dans l’industrie cinématographique hollywoodienne et c’est surtout des médias d’information tels que CNN qui ont propulsé la capitale bosnienne sur les devants de la scène internationale. S’il est vrai que le conflit en ex-Yougoslavie n’a pas suscité la même couverture cinématographique que la guerre du Vietnam, il faut tout de même mentionner un certain nombre de productions locales qui ont connu un certain succès, tels que « No man’s land » de Danis Tanovic ou encore « Le cercle parfait » d’Ademir Kenovic. D’ailleurs, certains n’hésitent pas à parler d’un nouveau genre : « le nouveau film de guerre post-yougoslave », recensant plus de trois cents films documentaires et de fiction traitant de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie16. De plus, L’industrie hollywoodienne a aussi amené sa pierre à l’édifice, avec des productions telles que

« Harrison’s Flowers » ou « Welcome to Sarejevo » qui dépeignent de manière très simpliste et stéréotypée le conflit à Vukovar et Sarajevo, suivant la perspective de journalistes occidentaux. On peut aussi noter la montée aux barricades d’une association de femmes victimes de la guerre – « The Women Victims of War » - contre le dernier projet de réalisation de l’actrice américaine Angelina Jolie, menant à la révocation de son permis de tourner en Bosnie-Herzégovine par le Ministre de la Culture.

L’association remet en cause la vision erronée de l’Histoire que renvoie le scénario, relatant l’histoire d’amour entre un violeur serbe et sa victime musulmane17. Ceci illustre bien la dimension politique qui touche le contenu d’un film lié à un conflit récent. De plus, il semble que ces productions, qu’elles soient internationales ou locales, peuvent être vues comme des facteurs participant à la construction d’un imaginaire pour une audience internationale. Lorsque l’on parle de

« CNN factor » ou de « Hollywood Factor », la question est plutôt de savoir si l’on a affaire à des facteurs répulsifs ou attractifs. Il semble très réducteur de limiter ces facteurs à leur seule dimension répulsive et il convient de mettre en évidence les enjeux socio-politiques qui sont liés à ces agents – constructeurs d’imaginaire - qu’ils

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soient liés au tourisme, au cinéma ou aux médias en général.

Causevic et Anleng démontrent tous deux comment l’industrie hollywoodienne tend à amener à la guerre une dimension triviale en la présentant, « as a battle between good guys and the evil ones, where good guys always win ». (Causevic, 2008, p.355) Le film américain « Harison’s Flowers », décrivant la descente aux enfers d’une journaliste (interprétée par Andie MacDowell) à la recherche de son mari, photographe disparu à Vukovar, est très représentatif de cette vision simpliste et stéréotypée de l’Histoire guerrière. Les soldats serbes sont présentés comme des barbares sanguinaires, la population locale comme des victimes dénuées de toute capacité d’action et les photojournalistes occidentaux, comme les véritables héros. De plus, comme le Vietnam dans

« Apocalypse Now » ou le Congo dans « Heart of Darkness », Vukovar et sa région sont dépeints comme l’enfer sur terre où les protagonistes de l’histoire s’enfoncent peu à peu, le tout se concluant par une fin heureuse. Elles introduisent ainsi les notions de « trivialization » et de

« disneyfication »18 de la guerre à travers le cinéma ou le tourisme. (Causevic, 2008, Anleng, 2002) Nous l’avons vu plus haut, Anleng considère les Tunnels de Cu Chi au Vietnam comme la réponse vietnamienne à Disneyland. (Alneng, 2002).

Christina Schwenkel, quant à elle, s’est intéressée aux représentations de la guerre du Vietnam selon une perspective transnationale entre les Etats-Unis et le Vietnam. Elle pose la question de la banalisation et du détachement historique de sites liés au conflit: « Despite government efforts to retain its historical and commemorative significance, Vietnamese youth, in particular, have transformed the Cu Chi Tunnels into a site of entertainment that is largely detached from the war. » (Schwenkel, 2009, p.97) Selon elle, la façon dont le site des tunnels de Cu Chi est vécu, principalement par la jeunesse vietnamienne, génère des fonctions anti-mémorielles qui suggèrent un détachement et une distance de l’histoire traumatique de la nation. Causevic quant à elle compare le tunnel de Sarajevo aux tunnels de Cu Chi, qu’elle présente comme deux attractions touristiques majeures, en mentionnant ces processus de « disneyfication », insistant sur le fait que de tels sites doivent être compris et interprétés dans toute leur profondeur historique: « Denial is forbidden because it leads to Disneyfication ».

(Causevic, 2008, p. 355). Finalement, si ce processus de « disneyfication » est très critiqué selon une perspective d’interprétation de l’Histoire,

il peut nuire au secteur touristique lui-même, en tous les cas si l’on croit les propos de ce touriste qui compare la ville de Mostar à celle de Sarajevo: « Je me sens mieux ici à Sarajevo. A Mostar, c'était très touristique et ce côté touristique gâchait un peu l'Histoire. » (juillet 2010). Avant de conclure, il convient de porter un bref regard sur le cadre théorique en lien avec ce domaine de recherche mettant en perspective guerre et tourisme, et de manière plus générale trauma et tourisme.

«Dark tourism» ou «Hot tourism» ?

Comme il a été dit, cette étude s’inscrit dans un champ de recherche encore émergeant et les concepts et définitions qui lui sont associés demandent encore à être largement précisés. Au niveau de la littérature existante, la mise en tourisme de sites marqués par une guerre est souvent problématisée à travers la notion de « dark tourism » (Lennon & Foley, 2000, Stone, 2006), voire celle de « thanatourism » (Seaton, 1996), de la même manière que des sites liés à une catastrophe naturelle ou à un acte de terrorisme. La définition du « dark tourism » selon Lennon et Foley, est lié au fait de visiter des lieux : « associated with death, disaster, and atrocity, such as battlefields, graves, accident sites, murder sites, places of assassination and death camps » (Lennon & Foley, 2000, p.4).

Ceci est de plus mis en lien avec une volonté qui existerait de la part des touristes de satisfaire une forme de curiosité morbide. Ces auteurs sont souvent des représentants d’un champ, certes original, mais principalement issu du milieu académique anglo-saxon et provenant d’abord des secteurs de l’hôtellerie, de la gestion ou du marketing. La plupart d’entre eux s’en tiennent à des définitions limitées et des typologies rigides, souvent déconnectées de la réalité, issues d’analyses principalement quantitatives. Stone (1996, p.151) par exemple tente de mettre en évidence les différentes nuances que peut prendre le « dark » sur un spectre allant de « darkest » à « lightest ». Selon lui, le site d’Auschwitz serait ainsi bien plus sombre que le musée de l’Holocauste à Washington DC, plus déconnecté du génocide.

Stone définit ainsi différentes catégories qu’il place sur un spectre allant du plus obscur au plus clair.

Les différentes nuances de ce continuum sont déterminées par des dimensions telles que le loisir et l’éducation, l’authenticité, la location, la distance chronologique, ou encore le degré de mise en tourisme. Pour une compréhension des dynamiques qui guident la mise en tourisme de ces sites traumatisés, qui va selon moi bien au-delà du simple attrait et de l’exploitation du macabre

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comme l’implique la définition de « dark tourism », il convient de mener des études plus qualitatives et surtout d’adopter une approche plus holistique et interdisciplinaire, afin de suivre une réflexion qui dépasse le seul secteur de l’industrie touristique et les propos sensationnalistes de certains médias.

Comme il a été démontré, les implications politiques et sociales en lien avec la mise en tourisme de ces sites sont déterminantes pour une bonne compréhension de cette problématique.

C’est ce qui fait dire à Causevic que : « […] war tours and general city tours in Sarajevo are very similar.

Therefore dark tourism, which deals genuinely with war memorabilia sites, appears to be without meaning. War is a part of every city tour and history is a part of every war tour. dark tourism as a category does not make any sense » (Causevic, 2008, 355) D’un autre côté, mais toujours de manière critique Mark Piekarz déconstruit le concept de « battlefield tourism » en démontrant que les implications d’une telle forme de tourisme diffèrent largement suivant le degré de résolution de conflit. Ce type de « tourisme de guerre » ou de

« tourisme des champs de bataille » est ainsi situé sur un continuum allant du chaud au froid suivant la nature du conflit et en se basant sur des critères tels que la « crudité du visuel » (rawness of the visual aesthetic) et le « degré d’ordre » (degree of tidying up). Le premier critère étant lié au déplacement des « restes » du conflit (carcasses de voiture, bâtiments détruits, corps,…) et le deuxième est plus lié à la reconstruction (construction de cimetières et de mémoriaux, sécurisation des sites,…). L’auteur insiste sur le fait que suivant le contexte un site peut rester « chaud » bien après la fin officielle de la guerre : « For soldiers from the developed world, conflicts can be waged with almost clinical precision, with casualties generally removed from the conflict zone very quickly. For other parts of the world, wars and conflicts can still be fought with a ferocity and rawness familiar to past conflicts, where the sites of conflict can remain hot for years, owing to lack of resources, desire or time to remove the detritus or mess of war, […] » (Piekarz, 2007, p.156) Pour prendre l’exemple de la Bosnie, certaines zones sont encore infestées de mines antipersonnelles et comme il a été dit tout au long de ce texte de nombreux sites sont encore en ruine. Sur la base de la réflexion de Piekarz, il ne paraît donc pas si évident de positionner un lieu tel que Sarajevo comme un site de guerre déjà totalement froid. Piekarz démontre ainsi que le concept de « battlefield tourism », compris comme un élément du « dark tourism », ne rend pas compte de la diversité des pratiques qu’il inclut.

Entre touristes avides de sensations fortes, routards

en quête d’un « ego boost » (Causevic) et visiteurs à la recherche de connaissances et d’enrichissement, de nombreux différents types de touristes cohabitent dans une ville comme Sarajevo. De plus, on le voit, il est difficile de postuler une démarcation claire en une période de conflit et une période de post-conflit, et indirectement une différence entre du « tourisme de guerre », qui mettrait en jeu des éléments telles que l’aventure, le danger ou encore l’adrénaline, et du « tourisme post-conflit », qui serait plus basé plus sur la connaissance et plus proche d’une forme de tourisme culturel, historique ou patrimonial. Sur la base de ces derniers commentaires, s’il paraît déjà fort peu aisé de délimiter des pratique telles que « tourisme post-conflit » ou « tourisme de guerre », il semble que l’on peut d’autant plus sérieusement questionner la volonté de placer des sites comme le tunnel de Sarajevo, les tunnels de Cu chi, ou d’autres sites comme par exemple Auschwitz ou le musée de l’Holocauste, suivant des typologies telles que celles proposées par certains représentants du

« dark tourism ».

Conclusion

Les traces réelles de la guerre, ainsi que l’exploitation cinématographique de celle-ci, sont bien présentes et utilisées dans des secteurs en lien direct ou indirect avec le tourisme. Que l’on se réfère aux notions d’imaginaire, de fantasmes ou encore d’aura, il semble que ces constantes références à l’histoire guerrière d’un pays ou d’une région ont un impact certain sur les représentations d’un public international. Inversement, les représentations des visiteurs tendent à influencer la manière dont un conflit peut être exploité dans l’industrie touristique comme le suggère Anleng au sujet du Vietnam. Pour revenir plus spécifiquement à la notion d’imaginaire touristique développée plus haut par Amirou et Salazar, il semble assez clair qu’un imaginaire lié à la guerre est présent chez des touristes visitant une ville telle que Sarajevo. Ceci peut être confirmé d’une part par les nombreuses références au conflit apportées par les touristes interrogés, mais aussi par le grand nombre de visiteurs sur certains sites de conflit, comme le tunnel de Sarajevo. De plus, la place conséquente accordée à l’histoire de la guerre dans le panorama touristique de la ville (cartes postales, guides, tours thématiques…) démontre que cet imaginaire influence et façonne la destination touristique qu’est redevenue (ou que redevient) Sarajevo. Mais si l’imaginaire touristique lié à la guerre a certes une influence sur le panorama touristique bosnien, on peut tout de même se poser la question de sa

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propension à influer sur l’ensemble de la société comme l’avance Salazar au sujet de la société Masaï. Toujours est-il que si comme l’affirme Amirou, à chaque lieu correspond des images, la guerre pourrait ainsi représenter Sarajevo de la même manière que la tour Effel représente Paris ou qu’Auschwitz représente la Pologne. Il importe tout de même de ne pas tomber dans des schémas rigides qui assimileraient l’ensemble du panorama touristique d’un pays à la guerre qui l’a meurtri. Si en effet, bon nombre d’attractions majeures d’un pays comme le Vietnam ou la Bosnie sont directement liées à la guerre, elles n’en constituent certainement pas l’intégralité. Ceci m’amène à questionner en partie la remarque d’Anleng qui affirme que: « if Vietnam is a war, then all visitors are war tourists, like it or not. » (2002, p.485) Il semble en effet quelque peu réducteur de limiter le patrimoine vietnamien, et indirectement son potentiel touristique, aux seuls stigmates de la guerre. Si les traces du conflit, que ce soit au Vietnam, au Cambodge ou en Bosnie, représentent indéniablement un motif de visite pour les touristes, le patrimoine de guerre ne constitue pas toujours le seul facteur d’attraction pour ces visiteurs. Salazar ajoute aussi que les agents qui produisent un imaginaire ne sont pas les sociétées, mais les individus: «A given group of tourists, for exemple, can participate in shared practices an can be exposed to discourses and symbols that evoke conflicting meanings, but tourists’ subjectivites are not completely expressed by collective imginaries and have to be understood in their particularity. » (2010, p.7) Toujours est-il que, si l’on se réfère à la conceptualisation d’Amirou, il est intéressant de noter que si l’imaginaire touristique lié à la guerre s’insèrere dans cette aire transitionnelle, c’est paradoxalement le patrimoine de guerre qui

faciliterait l’accommodation du touriste à l’inconnu bosnien.

Finalement, il semble très simpliste de limiter cette forme de tourisme au voyeurisme et à l’attrait du macabre, comme le suggère certains partisans du « dark tourism » ou encore certains médias généralistes. Nous l’avons vu, une volonté de connaissance et d’enrichissement personnel est très souvent perceptible dans les propos des touristes qui visitent de tels lieux. De la même manière, il paraît aussi très réducteur de présenter l’exploitation du macabre et de la souffrance des victimes à des fins purement économiques, comme principal élément conducteur des ces acteurs qui mettent d’une manière ou d’un autre la guerre en tourisme. Des exemples liés à l’association FAMA ou à certains guides, démontrent clairement une volonté d’exprimer sa voix sur un sujet brûlant et dans un contexte nationaliste où il n’est pas aisé de se faire entendre, et qui va bien au-delà du seul processus de « disneyfication du passé » postulé par le « dark tourism ». Causevic insiste d’ailleurs sur le fait que le tunnel de Sarajevo ne peut être expliqué suivant le monde imaginaire du « dark tourism », comme une « disneyfication du passé » : « It still to early and to disrespectfull to do that.» (2008, p.355) Entre la volonté d’exploiter ce conflit récent comme un moteur du tourisme et celle de tourner la page pour se concentrer sur une forme plus traditionnelle de tourisme, différentes forces entrent en compétition dans une ville et un Etat en voie de stabilisation. Dans un pays qui cherche à retrouver une place sur le circuit touristique européen, certains observateurs, qu’ils soient liés ou non à l’industrie touristique, mettent déjà en garde contre la tendance qui verrait la Bosnie prise au piège de son passé obscur.

NOTES

1 Je tiens à remercier la fondation Ernst et Lucie Schmidheiny et l’Académie Suisse des Sciences Humaines et Sociales (ASSH) pour leur soutien.

2 « Powder keg » en anglais

3 Bure Baruta en serbe, croate ou bosniaque

4 Gori vatra en serbe, croate ou bosniaque.

5 Le terme « bosnien » est utilisé en référence au concept de citoyenneté. Ainsi tous les habitants de Bosnie – Bosniaques, Croates, Serbes – sont inclus dans cette dénomination. D’autre part, le terme « Bosniaque » est utilisé en référence à l’appartenance nationale et religieuse. Il désigne les habitants de Bosnie-Herzégovine de la communauté bosniaque, affiliés à la religion musulmane.

6 http://www.euronews.net/2008/09/12/euronews-talks-films-and-balkans-with-slavoj-zizek/

7 Une cartographie de l’imaginaire, entretien avec Gilbert Durand, Sciences Humaines, 90, 1999

8 Image production industry en anglais dans le texte.

9 FAMA, 1992-1995 Sarajevo, 2009.

10 Kralj Fahd Džamija en serbe, croate ou bosniaque

11 Le Historical Tour de Sarajevo emmène les touristes parmi les haut-lieux culturels et historiques de la ville.

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12 « Now it’s time to live the war as a guerrilla soldier » selon la formule du guide que j’ai eu l’occasion de suivre en 2009

13 « Heart of Darknes » est le roman écrit en 1902 par Joseph Conrad qui a inspiré le film « Apocalypse Now », réalisé en 1979 par Francis Ford Coppola.

14 « Virtual tourist » et « Trip Advisor ».

15 FNG (Fucking New Guy) était un terme utilisé pour les GIs nouveaux venus en temps de guerre.

16 Nevena Dakovic, La guerre sur grand écran : filmographie de l’éclatement yougoslave, Vreme, 31 mars 2004, Traduit par Jasna Andjelic.

17 Angelina Jolie prevented from filming in Bosnia, BBC News, 14 Octobre 2010.

18 Des termes qui ne connaissent pas à ma connaissance de traduction française.

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Une cartographie de l’imaginaire: entretien avec Gilbert Durand, Sciences Humaines, Janvier 1999.

POUR CITER CET ARTICLE Référence électronique :

Patrick Naef, Voyage à travers un baril de poudre : Guerre et imaginaire touristique à Sarajevo, Via@, Les imaginaires touristiques, n°1, 2012, mis en ligne le 16 mars 2012.

URL : http://www.viatourismreview.net/Article5.php AUTEUR

Patrick Naef

Patrick Naef est doctorant et assistant de recherche et d’enseignement dans le groupe d’écologie humaine de l’institut des Sciences de l’environnement (Université de Genève). Il travaille sur une thèse pour le département de géographie. Cette recherche vise à mettre en évidence les processus de patrimonialisation de sites marqués par un conflit armé récent dans les villes de Sarajevo (Bosnie-Herzégovine) et Vukovar (Croatie).

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