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Surveillance des marchés financiers : rétrospective pour des perspectives II

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Surveillance des marchés financiers : rétrospective pour des perspectives II

BOVET, Christian, GUGGENHEIM, Anath

Abstract

Chronique de droit bancaire et financier, sous l'angle de la surveillance des marchés et intermédiaires financiers

BOVET, Christian, GUGGENHEIM, Anath. Surveillance des marchés financiers : rétrospective pour des perspectives II. In: Thévenoz, Luc et Bovet, Christian. Journée 2009 de droit bancaire et financier . Genève : Schulthess, 2010. p. 101-128

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:9652

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Journée 2009

de droit bancaire et financier

Rashid bahar Yaël benmenni alessandro bizzozero christian bovet anath Guggenheim anne Héritier lachat isabelle lebbe Xavier oberson alexandre Richa luc thévenoz

sous la direction de

Luc Thévenoz et Christian Bovet

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surveillAnce Des mArchés finAnciers : rétrospective pour Des perspectives ii

Christian Bovet* & Anath Guggenheim**

Integrity is not a 90 percent thing, not a 95 percent thing ; either you have it or you don’t.

Peter Scotese, ancien CEO de Springs Industries

La phrase de Peter Scotese, que nous mettons en exergue, reflète malheureuse- ment un objectif que l’avidité humaine empêche d’atteindre dans les marchés financiers. Au fil des années et des analyses de la pratique des autorités de sur- veillance, force est de constater que les interventions de ces dernières ont porté sur des cas où même un niveau de 90 voire de 95% d’intégrité n’était pas atteint par les acteurs économiques ayant fait l’objet de mesures. En réalité, on en a tou- jours été bien loin. En fin de compte, c’est surtout la seconde partie de cette cita- tion qu’il faut retenir : “either you have it or you don’t”.

La contribution de la Professeure Anne Héritier Lachat aborde dans cet ou- vrage les développements législatifs et réglementaires qui tendent à prévenir ou à corriger en partie les effets de ce manque d’intégrité. Notre article lui fait écho sous l’angle tant de la pratique de la nouvelle Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) – qui a remplacé depuis le 1er janvier 2009 la Commission fédérale des banques (CFB)1 –, que de la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral (TAF) et du Tribunal fédéral (TF).

Cette première année d’application de la loi sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA)2 est déjà riche en enseignements, ce d’autant que les juri- dictions de recours ont, d’une part, souvent intégré des références à la FINMA dans leurs arrêts portant sur des décisions de la CFB et, d’autre part, pour- suivi leurs efforts relatifs à la mise en œuvre des principes généraux du droit administratif.

* Professeur ordinaire et doyen de la Faculté de droit de l’Université de Genève.

** Avocate, LL.M New York University, assistante auprès du Département de droit administratif et fiscal de l’Université de Genève.

1 A ce sujet, Bovet C. / Gomez Richa L., “FINMA, extension du périmètre de la surveillance, trans- parence et autres développements récents de la réglementation et de la jurisprudence adminis- trative”, in Thévenoz L. / Bovet C., Journée 2008 de droit bancaire et financier, Zurich (Schulthess) 2009, p. 189 ss.

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I. Rôle des autorités

Les interventions de l’autorité de première instance ne concernent pas seulement les assujettis, mais peuvent s’étendre à d’autres intermédiaires financiers (A).

Cette vision large de la surveillance contraste quelque peu avec la retenue dont font traditionnellement preuve les juridictions de recours (B).

a. compétences de la FinMa

Le Tribunal administratif fédéral a confirmé en juillet 2008 que la CFB (désor- mais la FINMA) surveillait l’ensemble du commerce de valeurs mobilières et pou- vait donc exiger des renseignements d’un gérant de fortune non assujetti3. L’en- trée en vigueur le 1er janvier 2009 de l’art. 29 LFINMA, qui oblige notamment les assujettis à informer sans tarder l’autorité de “tout fait important susceptible de l’intéresser”, pourrait aussi conduire à certains développements de la pratique en matière de surveillance4. Enfin, la Circulaire FINMA 09/1, fixant les règles-cadres pour la gestion de fortune, apporte aussi bien une harmonisation au sein du cercle des assujettis qu’une extension de certains standards professionnels au-delà du périmètre de surveillance stricto sensu5.

Pour sa part, le Tribunal fédéral a confirmé sans ambiguïté les compétences de la FINMA sur les activités des intermédiaires financiers non assujettis, en l’espèce un groupe d’entreprises exerçant des activités illicites – i.e. sans autorisation6. Ces pouvoirs s’étendent jusqu’à la dissolution et à la liquidation des sociétés en question :

“Da die Finanzmarktaufsicht allgemein über die Einhaltung der gesetzlichen Vor- schriften zu wachen hat, ist die ihr übertragene Aufsicht nicht auf die unterstell- ten Betriebe beschränkt. Zu ihrem Aufgabenbereich gehört auch die Abklärung der finanzmarktrechtlichen Bewilligungspflicht und die Ermittlung von Finan- zintermediären, die in Verletzung der gesetzlichen Bestimmungen tätig sind […].

Sie ist berechtigt, die im Gesetz vorgesehenen Mittel auch gegenüber Instituten (oder Personen) einzusetzen, deren Unterstellungs- bzw. Bewilligungspflicht um- stritten ist […]. Ihre Befugnisse reichen bis zur Auflösung und Liquidation eines

2 Titre long : loi sur l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, du 22 juin 2007 (RS 956.1).

3 Arrêt TAF B-1645/2007 A, B, C, D et E c. CFB, du 17 janvier 2008. A ce propos, Bovet / Gomez Richa (note 1), p. 209 s.

4 Bovet / Gomez Richa (note 1), p. 210.

5 Idem, p. 211 s.

6 Cf. en particulier art. 37 al. 3 LFINMA.

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Unternehmens, das unerlaubt einer von vornherein nicht bewilligungsfähigen Tätigkeit nachgeht.”7

b. Pouvoir de cognition des juridictions fédérales

Selon l’art. 49 de la loi fédérale sur la procédure administrative8, le Tribunal ad- ministratif fédéral jouit d’un plein pouvoir de cognition pour revoir les décisions rendues par des autorités telles que la FINMA (“mit uneingeschränkter Kogni- tion”). Ainsi, il peut et doit revoir aussi bien (a) la violation du droit fédéral (y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation), (b) la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, que (c) l’inopportunité.

Dans un arrêt relatif à une décision rendue par une autre autorité fédérale de première instance, la juridiction administrative fédérale souligne dans un premier temps que la Commission fédérale de la communication (ComCom) bé- néficie indépendamment de ce qui précède d’un certain pouvoir d’appréciation, en particulier lorsqu’il s’agit d’appliquer des notions juridiques indéterminées.

S’il appartient aux tribunaux d’interpréter et de concrétiser ces notions dans les cas d’espèce, ils doivent aussi reconnaître un pouvoir de décision à ces autorités spécialisées – et l’instance de recours devrait en conséquence spontanément res- treindre son pouvoir d’examen – lorsque le législateur a opté pour des normes formulées de manière ouverte, afin de réserver une telle faculté au régulateur et/

ou surveillant du secteur concerné. Ces limites auto-imposées ne doivent cepen- dant pas empêcher le Tribunal administratif fédéral d’examiner si l’interpréta- tion et l’application de ces concepts par l’autorité inférieure sont conformes au droit fédéral :

“Wenn aber die Gesetzesauslegung ergibt, dass der Gesetzgeber mit der offenen Normierung der Entscheidbehörde eine zu respektierende Entscheidungsbefug- nis einräumen wollte, darf und muss das Gericht seine Kognition entsprechend einschränken. Die Vorinstanz ist keine gewöhnliche Vollzugsbehörde, sondern eine verwaltungsunabhängige Kollegialbehörde mit besonderen Kompetenzen.

Als Fachorgan ist sie sowohl autonome Konzessionsbehörde als auch Regulie- rungsinstanz mit besonderer Verantwortung. Dies rechtfertigt eine gewisse Zu- rückhaltung des Bundesverwaltungsgerichts wenigstens insoweit, als die Vor- instanz unbestimmte Gesetzesbegriffe auszulegen und anzuwenden hat. Es befreit das Bundesverwaltungsgericht aber nicht davon, die Rechtsanwendung unter

7 Arrêt TF 2C_749/2008 X et Y c. CFB (désormais FINMA), du 16 juin 2009 (références omises), consid. 3.1 (publication aux ATF prévue). Eg. arrêt TAF B-4935/2009 X SA c. FINMA, du 31 août 2009, consid. 2.4.

8 PA (RS 172.021).

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Beachtung dieser Zurückhaltung auf ihre Vereinbarkeit mit Bundesrecht zu überprüfen. Sodann amtet die Vorinstanz in einem höchst technischen Bereich, in dem Fachfragen sowohl übermittlungstechnischer als auch ökonomischer Ausrichtung zu beantworten sind. Ihr steht dabei – wie anderen Behördenkom- missionen auch – ein eigentliches ‘technisches Ermessen’ zu. Im Rahmen dieses

‘technischen Ermessens’ darf der verfügenden Behörde bei der Beurteilung von ausgesprochenen Fachfragen ein gewisser Ermessens- und Beurteilungsspielraum belassen werden, soweit sie die für den Entscheid wesentlichen Gesichtspunkte geprüft und die erforderlichen Abklärungen sorgfältig und umfassend durch - geführt hat.”9

La FINMA entre naturellement dans cette catégorie d’autorités spécialisées, aux- quelles le Tribunal administratif fédéral attribue des compétences techniques particulières ; ce qui implique une certaine liberté d’appréciation, pour autant que l’autorité ait examiné avec l’attention nécessaire les principaux éléments de l’affaire. Cette conception s’inscrit dans les objectifs du législateur, qui a souhaité renforcer l’indépendance de l’autorité de surveillance des marchés financiers en lui donnant le statut d’“établissement de droit public doté d’une personnalité ju- ridique propre” (art. 4 LFINMA).

L’attitude du Tribunal administratif fédéral est reprise par notre Haute Cour :

“Bei der Wahl des geeigneten Mittels haben die EBK bzw. die FINMA im Rahmen der allgemeinen Verwaltungsgrundsätze (Willkürverbot, Rechtsgleichheits- und Verhältnismässigkeitsgebot, Treu und Glauben) in erster Linie den Hauptzwe- cken der finanzmarktrechtlichen Gesetzgebung, dem Schutz der Gläubiger bzw.

Anleger einerseits und der Lauterkeit des Kapitalmarkts anderseits, Rechnung zu tragen (Anleger- und Funktionsschutz). Die Frage, wie die EBK ihre Aufsichts- funktion im Einzelnen erfüllt, ist weitgehend ihrem ‘technischen Ermessen’ an- heimgestellt. Das Bundesgericht kann nur bei Rechtsverletzungen in die Beurtei- lung von dessen Handhabung durch das Bundesverwaltungsgericht korrigierend eingreifen.”10

En termes imagés, on peut dire qu’il en résulte un “effet d’entonnoir” dans l’exa- men successif des décisions de la FINMA, les juridictions de recours faisant preuve d’une retenue de plus en plus grande au fil des étapes de la procédure. Les conseils des parties devraient être attentifs à cette situation et s’assurer qu’ils pré- sentent de manière aussi complète et convaincante que possible leurs arguments devant l’autorité de première instance.

9 Arrêt TAF A-109/2008 Swisscom (Schweiz) AG c. Sunrise Communications AG, du 12 février 2009, consid. 4. Pour une vision en partie critique de cet arrêt, Feller R. / Müller M., “Die Prü- fungszuständigkeit des Bundesverwaltungsgerichts – Probleme in der praktischen Umsetzung, Dargestellt am Urteil BVGer A-109/2008 vom 12. Februar 2009”, ZBl 8/2009, p. 442.

10 Arrêt TF 2C_749/2008 (note 7), consid. 3.1.

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II. Chargé d’enquête

L’art. 36 LFINMA, qui définit les mécanismes de nomination d’un chargé d’en- quête, reprend en substance les anciens art. 23quater LB11 et 137 LPCC12, désormais abrogés13. Cette mesure peut être complétée immédiatement ou dans les semaines qui suivent par différentes démarches, comme des mesures protectrices (art. 26 LB), la nomination d’un délégué à l’assainissement (art. 28 LB) ou, dans le cas de placements collectifs, d’un gérant (art. 138 LPCC), ou encore la mise en liqui- dation de l’intermédiaire financier insolvable (art. 33 ss LB, le cas échéant cum art. 37 al. 3 LFINMA).

Un arrêt du Tribunal administratif fédéral du 30 mars 200914 précise plusieurs points importants liés à la nature et aux modalités de cette fonction15 :

– Cette juridiction qualifie de mandat de droit public la relation qui lie le chargé d’enquête à l’autorité de surveillance. Les art. 394 ss CO16 s’appliquent donc par analogie.

– En particulier, il appartient en principe au mandataire d’exécuter personnel- lement les tâches qui lui sont confiées par la FINMA. Il est toutefois autorisé à transférer l’exécution de sa mission à un tiers (substitution), lorsque l’au- torité le lui permet, qu’il y est contraint par les circonstances ou que cela est conforme à l’usage (art. 398 al. 3 CO).

– La substitution doit être distinguée de la situation où le chargé d’enquête fait appel à des auxiliaires : alors que dans le premier cas, tout ou partie du mandat est effectivement transféré à un tiers – le mandataire initial ne se chargeant plus du tout de l’exécution des tâches transférées –, dans le second, les auxi- liaires ne se voient confier en règle générale que des travaux spécifiques, sous la direction et la supervision du chargé d’enquête.

– En cas de substitution légitime, le chargé d’enquête ne “répond que du soin avec lequel il a choisi le sous-mandataire et donné ses instructions” (art. 399

11 Loi fédérale sur les banques et les caisses d’épargne, du 8 novembre 1934 (RS 952.0). La no- mination d’un chargé d’enquête pour un négociant en valeurs mobilières était aussi régie par l’art. 23quater LB, applicable par analogie conformément au renvoi de l’art. 36a LBVM. Pour une présentation des fonctions d’observateur et de liquidateur, sous l’empire du droit avant la modi- fication de la loi sur les banques du 3 octobre 2003 (RO 2004 2767), Bovet C., “Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier”, in Foëx B. / Thévenoz L. (édit.), Insolvence, désendet- tement, et redressement – Etudes réunies en l’honneur de Louis Dallèves, Bâle/Genève/Munich (Helbing

& Lichtenhahn) 2000, p. 65. Pour l’essentiel, ces développements sont encore d’actualité.

12 Loi fédérale sur les placements collectifs de capitaux, du 23 juin 2006 (RS 951.31).

13 De même, l’art. 36a LBVM (voir note 11) a été révisé, afin de supprimer la référence à l’art. 23quater LB (RO 2008 5207, Annexe, ch. 16).

14 Arrêt TAF B-7734/2008 K AG, L AG, M AG, N AG, X et Z c. FINMA, du 30 mars 2009.

15 Idem, consid. 5.5.

16 Code des obligations, du 30 mars 1911 (RS 220).

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al. 2 CO) ; “il n’est en revanche pas tenu de le surveiller”17. Par contre, lorsque le chargé d’enquête fait appel à des auxiliaires, celui-là répond, selon l’art. 101 CO, “du manque de diligence de son auxiliaire, que le mandant aurait été en droit d’attendre du mandataire lui-même si celui-ci avait exécuté son obliga- tion personnellement”18.

L’utilisation d’auxiliaires implique aussi naturellement le droit pour le chargé d’enquête d’en facturer le travail ; le Tribunal administratif fédéral pose comme exigence que les tâches accomplies par les auxiliaires auraient autrement été ac- complies par le mandataire. En l’espèce, la juridiction de recours a entièrement confirmé l’analyse méticuleuse des frais et honoraires effectuée par l’autorité de surveillance.

Quant aux émoluments de cette dernière, ils obéissent aux principes de cou- verture des coûts et d’équivalence :

“Das Kostendeckungsprinzip besagt, dass der Gesamtertrag der Gebühren die ge- samten Kosten des betreffenden Verwaltungszweiges nicht übersteigen darf. Das Äquivalenzprinzip verlangt in Konkretisierung des Verhältnismässigkeitsgrund- satzes insbesondere, dass eine Gebühr nicht in einem offensichtlichen Missver- hältnis zum objektiven Wert der bezogenen Leistung stehen darf und sich in ver- nünftigen Grenzen bewegen muss.”19

III. Procédures en cas d’insolvabilité

La crise financière a au moins eu le mérite de permettre à la jurisprudence en ma- tière d’insolvabilité de se développer, faisant notamment ressortir les dérogations au régime ordinaire que le législateur a souhaité intégrer dans ce domaine (A).

L’application du principe de proportionnalité à la liquidation de certains intermé- diaires financiers appartient en revanche, évidemment, aux règles générales du droit administratif (B).

a. dérogations au régime ordinaire 1. Qualité pour recourir

Selon le texte clair de l’art. 24 al. 2 phr. 1 LB, dans les procédures visées aux cha- pitres XI (mesures en cas de risque d’insolvabilité) et XII (faillite bancaire) de la loi

17 Tercier P. / Favre P., Les contrats spéciaux, 4e édition, Genève/Zurich/Bâle (Schulthess) 2009, p. 782 N 5210, avec d’autres références.

18 Idem, p. 782 N 5208.

19 Arrêt TAF du 30 mars 2009 (note 14), consid. 6.1, avec d’autres références. A propos de l’ordon- nance sur les émoluments et les taxes de la FINMA (Oém-FINMA ; RS 956.122), Bovet / Gomez Richa (note 1), p. 197 ss.

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sur les banques, les créanciers et les propriétaires d’un établissement ne peuvent recourir que contre l’homologation du plan d’assainissement et les opérations de réalisation. Ces deux cas de recours sont exhaustifs ; la loi ne laisse aucune place à une interprétation qui permettrait, notamment, par analogie d’étendre son champ d’application à d’autres décisions de la FINMA agissant en tant qu’autorité de poursuite pour dettes et de faillite20.

Ce choix du législateur se justifie par la nécessité de mener la procédure d’as- sainissement de manière efficiente et efficace ou, si celle-ci est exclue en raison de la situation financière de l’établissement, de produire à meilleur compte un résul- tat de liquidation pour les créanciers et propriétaires de la banque21. C’est donc dans l’intérêt de l’ensemble des personnes concernées que les droits de recours de ces deux catégories d’acteurs ont été limités strictement aux décisions les plus importantes22.

Dans les autres cas, le recours doit être déclaré irrecevable.

2. Effet suspensif

En principe, les recours devant le Tribunal administratif fédéral ont un effet sus- pensif (art. 55 al. 1 PA, par renvoi de l’art. 37 LTAF23). Toutefois, l’art. 24 al. 3 LB retire cet effet aux “cas visés à l’al. 2”, le juge instructeur pouvant restituer l’effet suspensif sur requête d’une partie. Amené à se prononcer sur la portée de cette disposition, celui-là a conclu que l’art. 24 al. 3 LB ne concernait pas seulement les recours formés par des créanciers ou propriétaires de la banque, mais l’ensemble des recours liés aux règles des chapitres XI et XII de la loi sur les banques24. Les motifs sont les mêmes que ceux qui ont présidé à l’adoption de l’art. 24 al. 2 LB.

Le fait que le retrait de l’effet suspensif intervienne de par la loi implique que sa restitution n’est accordée qu’exceptionnellement, soit seulement dans des cir- constances particulières (“an qualifizierte Voraussetzungen geknüpft”) et lorsque des raisons importantes le justifient. Les exigences sont plus élevées que celles fondant la restitution de l’effet suspensif par le juge instructeur (art. 55 al. 3 PA), suite à un retrait par l’autorité inférieure en vertu de l’art. 55 al. 2 PA25. En l’espèce, ces conditions n’étaient pas remplies ; la requête du recourant fut par conséquent rejetée.

20 Arrêt TAF B-1374/2009 A et B c. FINMA, du 19 mars 2009, consid. 1.3.2. Eg. Arrêt TF 2C_237/2009 X c. Banque Havilland SA [Kaupthing] et FINMA, du 28 septembre 2009, consid. 3.2.2.

21 Arrêt TAF du 19 mars 2009 (note 20), consid. 1.3.1. Eg. Arrêt TF du 28 septembre 2009 (note 20), consid. 3.2.1.

22 Arrêt TAF du 19 mars 2009 (note 20), consid. 1.3.1.

23 Loi sur le Tribunal administratif fédéral, du 17 juin 2005 (RS 173.32).

24 Décision incidente TAF B-1523/2009 A c. FINMA, du 26 mars 2009, consid. 1.3 et 1.4.

25 Idem, consid. 2.1.

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3. Procédure et effets de la faillite bancaire

En matière de faillite bancaire, l’art. 34 al. 1 et 2 LB prévoit que les règles de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite régissent en principe les effets de l’ouverture de la faillite (art. 197 à 220 LP) et la procédure de liquidation (art. 221 à 270 LP). Le troisième alinéa de l’art. 34 LB autorise cependant la FINMA à

“prendre des décisions et des mesures dérogeant à ces règles”.

Sur les plans littéral et systématique, il faut d’abord relever que cette exception ne porte que sur le second groupe de prescriptions, i.e. celles gouvernant la pro- cédure. Le Tribunal fédéral a d’ailleurs souligné récemment que ces dérogations concernaient avant tout des dispositions de nature formelle, comme des délais ou l’organisation de la procédure26. Qui plus est, celui-ci a – au moins partielle- ment – pris en compte les critiques de la doctrine à l’égard de cette règle spéciale, en indiquant qu’un accès “adéquat” au juge devait être garanti, conformément aux normes constitutionnelle (art. 29a Cst27) et conventionnelle (art. 6 par.  1 CEDH28)29. Dans ces limites et au vu des expériences récentes, il apparaît que ces exceptions au régime commun sont acceptables ; cette flexibilité et cette rapidité dans la mise en œuvre permettent en particulier de réduire le risque systémique lié à l’insolvabilité bancaire.

b. appartenance à un groupe et proportionnalité

L’appartenance à un groupe de sociétés, dont l’une ou plusieurs d’entre elles exerce(nt) de manière illicite une activité soumise à autorisation, peut aussi conduire, dans certaines circonstances, à la mise en liquidation d’entreprises qui ne reçoivent pas directement des dépôts du public (art. 2a OB) ou n’effectuent pas en soi des opérations réglementées sur des valeurs mobilières (art. 3 OBVM).

Il s’agit notamment d’éviter que ces entreprises ou les personnes les contrôlant contournent leurs obligations légales en accomplissant séparément des tâches qui, individuellement, ne sont pas problématiques au regard de la réglementation bancaire et financière, mais, en revanche, constituent une ou plusieurs activités soumises à autorisation lorsqu’elles sont assemblées. Il se justifie alors de dépasser la dimension purement juridique de cette structure et d’opter pour une approche économique prenant en compte les liens personnels, financiers, commerciaux ou

26 Arrêt TF du 28 septembre 2009 (note 20), consid. 3.2.1.

27 Constitution fédérale, du 18 avril 1999 (RS 101).

28 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950 (RS 0.101).

29 Arrêt TF du 28 septembre 2009 (note 20), consid. 3.2.2.

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organisationnels ; ceux-ci peuvent en effet conduire à la création d’une unité sur le plan factuel :

“Ein gruppenweises Handeln kann insbesondere dann vorliegen, wenn die Be- teiligten gegen aussen als Einheit auftreten bzw. aufgrund der Umstände (Verwi- schen der rechtlichen und buchhalterischen Grenzen zwischen den Beteiligten ; faktisch gleicher Geschäftssitz ; wirtschaftlich unbegründete, verschachtelte Be- teiligungsverhältnisse ; zwischengeschaltete Treuhandstrukturen) davon auszu- gehen ist, dass koordiniert – ausdrücklich oder stillschweigend arbeitsteilig und zielgerichtet – eine gemeinsame Aktivität im aufsichtsrechtlichen Sinn ausgeübt wird.”30

Naturellement, cet examen et les mesures qui en découlent le cas échéant doivent répondre aux exigences du principe de proportionnalité. En particulier, lorsqu’il est possible de séparer – y compris comptablement – les activités soumises à au- torisation et les autres, il convient de liquider seule la partie concernant les pre- mières, pour autant que (a) cela soit possible techniquement, (b) la partie relative aux activités licites soit suffisamment distincte pour constituer une unité sépa- rée et (c) des mesures soient prises pour éviter le renouvellement de cet état de fait illicite (e.g. un changement radical au niveau de la direction ou du conseil d’administration)31.

En l’espèce, l’application de ces principes a conduit à exclure l’une des recou- rantes de la liquidation globale du groupe initialement ordonnée par la FINMA ; les doutes émis par l’autorité à propos des augmentations de capital ne sau- raient remettre en cause ce choix, dans la mesure où ces aspects, gouvernés par le droit des sociétés, n’entrent pas dans le champ de la surveillance bancaire et financière32. En revanche, l’implication de l’autre recourante dans les activités illicites du groupe était telle que sa mise en liquidation avec les autres sociétés constituant celui-ci s’imposait33.

30 Arrêt TF 2C_276/2009 Steinhalden AG et Realcapital Invest AG c. FINMA, du 22 septembre 2009, consid. 4.3.1 (ég. consid. 6.3.3). Cet arrêt, qui est prévu pour la publication aux ATF, se réfère en outre, au premier considérant précité, à deux autres décisions antérieures du Tribunal fédéral : l’Arrêt TF 2C_749/2008 (note 7) et l’arrêt TF 2C_74/2009 Filmart AG (in Konkurs) et EJK Ostschweiz Immobilien AG (in Liquidation) c. FINMA, du 22 juin 2009.

31 Arrêt TF du 22 septembre 2009 (note 30), consid. 3.3 (ég. consid. 7.3.4).

32 Idem, consid. 7.3.3.

33 En particulier idem, consid. 6.3.3 : “Ein aufsichtsrechtlich begründetes Schutzbedürfnis von An- legern und Finanzplatz besteht nicht nur gegenüber nach aussen illegal in einem bewilligungs- pflichtigen Bereich auftretenden Finanzintermediären, sondern auch gegen Mitbeteiligte, die trotz ihrer Aktivität im Hintergrund als Teil des Systems gelten müssen, weil koordiniert und arbeitsteilig vorgegangen wird.”.

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IV. Archives

Les archives ne déchaînent généralement pas les passions ! Pourtant, les prati- ciens de la banque savent à quel point ce domaine est délicat – parfois très utile ou inversement très dangereux. La décision rendue par la CFB en janvier 2008 rappelle chacune de ces caractéristiques34, en soulignant que la tenue et la conser- vation adéquate d’archives35, d’une part, et la possibilité de produire dans un délai raisonnable les documents requis par une autorité administrative ou judiciaire36, d’autre part, font partie des exigences relatives à l’obligation de se doter d’une organisation interne idoine (art. 3 al. 2 let. a LB et 9 al. 2 OB)37. Des irrégularités à ces exigences – qui découlent également de la réglementation sur la lutte contre le blanchiment d’argent (art. 7 al. 3 LBA)38 – sont en outre incompatibles avec la garantie d’une activité irréprochable (art. 3 al. 2 let. c)39.

Outre ces aspects réglementaires, l’intérêt de la décision de l’autorité de sur- veillance réside dans le fait qu’elle se fonde sur une interprétation à la lumière de la Circulaire ASB 7226 des dispositions du Code des obligations relatives à l’obli- gation de conserver la documentation pour les personnes astreintes à tenir une comptabilité (art. 957 et 962 CO)40. En particulier :

– Le support sur lequel les documents doivent être conservés peut être élec- tronique, à l’exclusion des comptes d’exploitation et du bilan, qui doivent être conservés par écrit41. Les documents dont la forme est imposée par une dispo- sition légale doivent être conservés sous cette forme42.

– En ce qui concerne l’obligation de production des documents dans un délai raisonnable, elle implique que la banque ou l’intermédiaire financier dispose des outils de recherche nécessaires pour localiser de manière efficace lesdits documents. Son système informatique doit donc être en état de fonctionner correctement43.

34 Décision CFB du 23 janvier 2008, in Bulletin CFB 51, p. 70.

35 Idem, ch. 38.

36 Idem, ch. 39.

37 Idem, ch. 36.

38 Idem, ch. 39.

39 Idem, ch. 49.

40 Idem, ch. 28 à 32.

41 Art. 957 CO al. 2 à 5.

42 Circulaire ASB 7226 du 23.12 2002 disponible sur le site extranet de l’ASB.

43 Art. 963 CO et art. 6 de l’Ordonnance concernant la tenue et la conservation des livres de comptes du 24 avril 2002 (Olico), RS 221.431. A titre d’exemple, la banque qui a fait l’objet de la décision citée sous note 34 n’avait pas remédié en temps utile à une panne de son système informatique qui lui permettait d’effectuer des recherches dans ses archives ; en ce qui concerne la notion de délai raisonnable, voir les Circulaires ASB no 7424 du 16 juillet 2003 et no 7477 du 19 juillet 2006.

(13)

– En principe, la durée de conservation des documents est de 10 ans44. Mais ce délai ne commence pas à courir au même moment pour tous les documents45. Les documents à conserver peuvent ainsi être divisés en deux catégories : les documents de base (documents contractuels et d’identification, notamment le formulaire A) et les documents périodiques et justificatifs concernant les transactions effectuées (typiquement les relevés de compte)46. Pour cette der- nière catégorie, le délai de conservation des documents commence à courir dès la fin de l’exercice annuel au cours duquel les dernières inscriptions ont été faites, les pièces comptables établies et la correspondance reçue ou expédiée47. En revanche, pour les documents de base, le délai de conservation commence à courir dès la fin des rapports contractuels avec le client. Or, la détermina- tion de la fin des rapports contractuels peut être problématique, en particulier lorsque la banque est sans nouvelles du client depuis un certain temps. Dans ce cas, l’Association suisse des banquiers recommande de conserver les docu- ments jusqu’à la remise des avoirs à une instance désignée par le législateur ou au rétablissement du contact avec le client48.

A ce propos, on notera que, le 26 août 2009, le Conseil fédéral a mis en consul- tation des propositions tendant à modifier de manière ponctuelle le Code civil, le Code des obligations et le Code de procédure civile, en vue de réglementer le traitement des fonds en déshérence49. La procédure de consultation a pris fin le 30 novembre 200950. Selon l’art. 96a al. 2 APCO, si la banque ou l’intermédiaire financier est sans contact avec le client ou son représentant depuis 30 ans, il doit en aviser le juge du lieu du dernier domicile du client afin que ce dernier ouvre une procédure de déclaration d’absence par une sommation publique. Si cette sommation reste infructueuse, le juge prononce la déclaration d’absence et répar- tit les fonds en déshérence conformément au droit des successions.Le délai court depuis le dernier contact avec le client51.

44 Art. 962 CO ; art. 7 al. 3 LBA.

45 Circulaire ASB 7226 (note 42), ch. 2.

46 Décision CFB du 23 janvier 2008 (note 34), ch. 32 ; Circulaire ASB 7226 (note 42), ch. 2.

47 Art. 962 al.1 CO.

48 Circulaire ASB 6957 du 3 février 2000, chiffre marginal 26.

49 A ce propos, voir Zemp S. : “Le Conseil fédéral présente son avant-projet de loi fédérale en matière de fonds en deshérence”, du 29 octobre 2009, disponible sur le site internet du CDBF à l’adresse http://cms.unige.ch/droit/cdbf/spip.php?article651.

50 Avant-projet de loi fédérale portant révision partielle du Code civil, du Code des obligations et du Code de procédure civile (fonds en déshérence), disponible à l’adresse internet www.ejpd.

admin.ch.

51 Art. 35 et 36 al. 2 CC et 38a APCC.

(14)

V. Leçons de l’affaire UBS

En 2008, UBS a enregistré une perte record de CHF 19,7 milliards, très largement imputable à ses investissements massifs dans le marché des subprimes52. Selon les déclarations qui ont été faites lors de la dernière assemblée générale des action- naires, le 15 avril 2009, UBS devrait supprimer environ 8700 postes en 2010, dont 2500 en Suisse53.

Toujours au cours de l’année 2008, UBS a été impliquée dans un scandale à grande échelle, un certain nombre de ses collaborateurs ayant été soupçonnés par les autorités américaines d’avoir activement aidé des clients américains à sous- traire au fisc des revenus imposables54.

Dans ce cadre, la banque a également été visée par des procédures civiles (John Doe Summons) et pénales initiées aux Etats-Unis par le fisc américain (Internal Revenue Service, IRS), le Département de Justice américain (Department of Jus- tice : DOJ) et l’autorité américaine de surveillance en matière boursière (Securities and Exchange Commission : SEC)55.

C’est dans ce contexte que, le 18 février 2009, suite à une décision de la FINMA, UBS a transmis à cette autorité les noms de 285 de ses clients, afin qu’ils soient communiqués aux autorités américaines56.

a. subprimes 1. Notions

On qualifie de subprime les crédits hypothécaires à risque aux Etats-Unis. Dans la transaction de base, le créancier du prêt hypothécaire est une banque ou un or- ganisme de crédit spécialisé et le débiteur (subprime borrower) est un particulier.

La garantie du prêt consiste essentiellement dans le logement qu’il acquiert grâce au crédit. Pour compenser le caractère risqué de l’opération, le taux d’intérêt ap-

52 Article du New York Times du 20 septembre 2009 : “UBS A.G.” disponible à l’adresse http://topics.

nytimes.com/top/news/business/companies/ubs_ag/index.html?offset=15&s=newest, voir infra section V.A.

53 Voir notamment l’article paru sur le site Swissinfo le 16 avril 2009 : “Encore bien des incertitudes autour d’UBS”, disponible à l’adresse internet www.swissinfo.ch/fre/dossiers/crise_financiere/

Encore_bien_des_incertitudes_autour_d_UBS.html?siteSect=23451&sid=10578953&cKey=

1239980290000&ty=st.

54 Article du New York Times du 20 septembre 2009 (note 52).

55 Selon le communiqué UBS du 18 février 2009 disponible sur le site internet d’UBS à l’adresse www.ubs.com/1/f/media_overview/media_switzerland/search ; voir infra B.2.a.

56 Voir infra B.2.b.

(15)

pliqué est variable : il peut dépendre du taux directeur de la Réserve fédérale amé- ricaine (Federal Reserve) ou d’autres taux (par exemple le taux LIBOR)57. La vente du logement acquis grâce au prêt doit permettre de désintéresser le prêteur en cas de défaillance de l’emprunteur. Ce type de crédit implique donc que les taux d’intérêts n’augmentent pas de manière inopinée et que les prix de l’immobilier ne baissent pas de manière conséquente58.

Pour assurer le refinancement des prêts, les banques et organismes de cré- dit spécialisés recourent à la titrisation, qui consiste à regrouper des créances dans des portefeuilles (ou pools), et à les transférer à une entité ad hoc (Special purpose vehicle, SPV) qui émet des titres représentant des parts desdits porte- feuilles. Ces titres sont qualifiés de valeurs immobilières adossées à des actifs, soit en anglais Asset-Backed Securities (ABS). Les ABS peuvent être mélangés à des obligations moins risquées, par exemple des obligations émises par un gou- vernement, et incorporées notamment dans des Collateralized Debt Obligations (CDO), une sous-catégorie d’ABS. La titrisation a l’avantage de sortir les créances du bilan de la banque ou de l’organisme de crédit et d’éviter ainsi de devoir assu- rer une couverture supplémentaire en fonds propres. Les ABS sont ensuite distri- bués à des investisseurs professionnels, notamment des banques ou des fonds de placement59.

La notation financière est l’appréciation, par un organisme privé, du risque de solvabilité financière d’une entreprise, d’un Etat ou d’une opération financière.

La notation la plus haute est AAA (sécurité maximale) et la moins bonne est DDD (défaut de paiement)60.

Entre 2004 et 2007, le taux directeur de la Réserve Fédérale américaine est passé de 1% à 5%, ce qui a provoqué un grand nombre de défaillances parmi les emprunteurs subprime. Leurs logements ont été saisis et massivement mis en vente, entraînant une baisse des prix de l’immobilier, et par conséquent des pertes importantes pour les prêteurs, qui n’ont pu être que très partiellement désintéressés.

57 London Interbank Offered rate, taux interbancaire publié par la British Bankers Association.

58 Doise D., “Subprime : Le prix des transgressions”, in Revue de Droit des Affaires / International Busi- ness LawJournal, no 4 (Londres) 2008, p. 558.

59 Doise D. (note 58), p. 560.

60 Les trois principales agences de notations aux Etats-Unis sont : Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch ratings.

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2. Conséquences et leçons

Dans un rapport à ses actionnaires du 18 avril 2008, publié le 21 avril 2008, UBS a identifié les trois secteurs de la banque où se sont principalement produites les pertes liées aux subprimes et leur importance respective61.

Le rapport d’UBS du 18 avril 2008 identifie un certain nombre de causes qui ont conduit aux pertes enregistrées par UBS au cours des deux dernières années.

Il s’agit en partie de causes intrinsèques à UBS et à la stratégie globale qu’elle a mise en place entre 2001 et 2007. Parmi ces causes figurent au premier plan des déficiences importantes en matière de gestion des risques (risk management)62. Mais le rapport met également en avant des causes structurelles et systé- miques qui dépassent le cadre d’UBS. Il met en lumière les pratiques d’un certain nombre d’institutions financières qui ont eu la même approche et qui ont perdu de vue qu’au-delà du seul produit financier, le sous-jacent consistait en réalité en une créance hypothécaire dont le débiteur présentait un risque important d’insolvabilité63.

Le cas d’UBS illustre les faiblesses du modèle de la banque universelle, qui implique une interactivité entre ses différents secteurs, et par là même une inter- connexion des risques liés à chacun de ces secteurs. Plus spécifiquement, dans le cadre d’UBS, il était difficile d’avoir une vision claire des engagements et des risques encourus par la banque, car certaines unités (en particulier le groupe des hedge funds) étaient seulement partiellement intégrées à la structure globale d’UBS, et la politique de gestion des risques qui leur était appliquée était diffé- rente de celle des autres subdivisions du secteur de la banque d’investissement64.

61 Shareholder Report on UBS’s Write-Downs du 18 avril 2008 (ci-après Shareholder report), disponible sur le site internet UBS à l’adresse www.ubs.com/1/e/media_overview/media_switzerland/

archive_search/archive?newsId=140329. Il s’agit du résumé d’un rapport de 400 pages adressé le 7 avril 2008 à la Commission Fédérale des Banques qui n’a pas été publié ; voir également le com- muniqué UBS du 21 avril 2008, disponible sur le site internet UBS à l’adresse www.ubs.com/1/f/

about/news/archive/archive10?newsId=140337.

Les pertes sont réparties comme suit :

CDO’s desk 66%

Hedge funds 16%

FX/CCT 10%

Autres départements 8%

Les acquisitions de subprimes n’étaient pas plafonnées selon la politique de gestion des risques de la banque, car les ABS étaient notées AAA par les principales agences de notation financière aux Etats-Unis.

62 Shareholder report (note 61), p. 28-42.

63 Idem, p. 4-5 ; Wellink N., “Au-delà de la crise : la réponse stratégique du Comité de Bâle”, in Revue de la stabilité financière, n. 13-Quel avenir pour la régulation financière ? Banque de France, sep- tembre 2009, p. 132.

64 Shareholder report (note 61), p. 10.

(17)

Au vu de ces dérives, certains spécialistes prônent un retour à une division stricte entre les secteurs d’investment banking, de wealth management et d’asset management65.

A l’échelle réglementaire, l’orientation actuelle consiste à privilégier l’aspect prudentiel et à assurer une régulation la plus large possible, incluant non seule- ment les marchés, mais également les produits et les acteurs financiers66.

Dans cet esprit, le Comité de Bâle67 a élaboré une série de cinq propositions pour promouvoir un cadre prudentiel et réglementaire plus adéquat pour le sec- teur bancaire, dans le but de réduire le risque systémique68 :

– Renforcement du dispositif réglementaire d’adéquation des fonds propres ; – Accroissement des réserves de liquidité des banques ;

– Optimisation de la gouvernance, de la gestion du risque et de la supervision des banques ;

– Amélioration de la transparence du marché ;

– Approfondissement de la coopération transfrontière en matière de supervi- sion des banques internationales.

b. activités transfrontalières

1. Qualified Intermediary Agreement et restrictions de la SEC

Le Qualified Intermediary Agreement (QIA) est un contrat standardisé par lequel une banque ou un autre intermédiaire financier s’engage à obtenir des informa- tions concernant tout client revêtant la qualité de US person69 et éventuellement

65 Voir à ce propos l’intervention du 17 novembre 2009 du Professeur Ingo Walters, vice-doyen de la Leonard N. Stern School of Business, New York University, dans le cadre de la Conférence “De la fragilité à la stabilité” organisée par l’Université de Genève, disponible à l’adresse www.unige.

ch/450/conferences/FinanceSociete.html#video-walter.

66 Noyer C., “Quelle régulation financière pour l’après-crise ?”, in Revue de la stabilité financière, n. 13- Quel avenir pour la régulation financière ? Banque de France, septembre 2009, p. 4 et 6.

67 Le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire a été fondé en 1974 par les gouverneurs des banques centrales du groupe des Dix (G10) au sein de la Banque des Règlements Internationaux (BRI) à Bâle et se compose de représentants des banques centrales et des autorités de surveillance ban- caire des 13 pays, dont la Suisse.

68 Wellink N. (note 63), p. 136.

69 Circulaire ASB 6971 “Amerikanische Quellensteuervorschriften / Qualified Intermediary” du 7 avril 2000, disponible sur le site extranet de l’ASB. Les US persons sont des personnes qui sont citoyens américains ou qui résident aux Etats-Unis. Elles doivent remplir auprès de la banque un formu- laire W-9 mentionnant leur nom, adresse et numéro de contribuable américain. Ces informations sont transmises à l’IRS.

(18)

à assurer le prélèvement d’un impôt à la source sur les versements effectués au profit de clients qui doivent être considérés comme des Non-US persons70. Pour obtenir le statut de QI (Qualified Intermediary), l’intermédiaire financier doit accepter d’engager des réviseurs externes agréés par l’IRS pour vérifier le res- pect de ses obligations en tant que QI, notamment celles relatives au KYC (Know Your Customer).

Grâce à sa position de QI, la banque ou l’intermédiaire financier a ainsi la possibilité de garder confidentielle l’identité de ses clients Non-US et de les faire bénéficier des dégrèvements d’impôts à la source en fonction des différentes conventions de double imposition conclues par les Etats-Unis avec la Suisse et des Etats tiers71.

Ce système implique par conséquent une relation de confiance entre l’IRS et le QI, le premier déléguant au second la responsabilité d’identifier qui, parmi ses clients, est soumis à l’obligation de déclarer ses revenus aux Etats-Unis, ainsi que l’éventuel prélèvement d’impôts à la source72.

Par ailleurs, conformément à la réglementation américaine (SEC Restrictions), une entité étrangère qui fournit des services financiers à des contribuables améri- cains aux Etats-Unis, en utilisant des moyens de communication tels que le télé- phone, l’e-mail, la télécopie ou la poste (Jurisdictional Means)73 doit être autorisée par la SEC à exercer son activité.

En mai 2008, la CFB décidait d’ouvrir une enquête concernant les activités transfrontalières d’UBS, visant à déterminer si “UBS SA avait correctement iden- tifié, limité et surveillé de manière appropriée les risques juridiques et de réputa- tion liés à l’implémentation du Qualified Intermediary Agreement (QIA) et aux restrictions prudentielles américaines concernant les relations d’affaires trans- frontalières avec des clients américains (restrictions de la SEC)”74. Ses conclusions figurent dans une décision du 21 décembre 2008, publiée sous forme de rapport succinct le 18 février 200975.

La CFB y constate en substance que des comportements fautifs ont bien eu lieu au sein d’UBS dans le cadre de ses activités transfrontalières, mais qu’ils ont été

70 Circulaire ASB 6971 (note 69). Les Non-US persons ou NRAs (Non-Resident Alien Beneficial Owners) doivent remplir un formulaire W-8BEN, qui atteste seulement de leur domicile et de leur nationalité.

71 Circulaire ASB 6971 (note 69).

72 Arrêt TAF A-7342/2008 et A-7426/2008, X et A c. ESTV du 5 mars 2009, consid. 5.5.2.3, lequel qualifie le QIA de “ein auf Vertrauen beruhendes System”.

73 Rapport succinct sur l’enquête de la CFB concernant l’activité transfrontalière de l’UBS SA avec des clients privés aux USA, version allemande, p. 9, disponible sur le site internet de la FINMA à l’adresse www.finma.ch/f/aktuell/Pages/mm-ubs-xborder-20090218.aspx.

74 Rapport succinct (note 73), version française, p. 1.

75 Ibidem.

(19)

le fait de collaborateurs isolés. La banque n’a pas pris les mesures nécessaires pour prévenir et faire cesser ces comportements, qui enfreignaient gravement la légis- lation américaine. Bien que le contrôle du respect d’un droit étranger n’incombe en principe pas à l’autorité de surveillance, il reste néanmoins que, compte tenu de son exposition sur le marché américain, la banque a pris des risques juridiques et de réputation inconsidérés, et par là même violé les exigences d’organisation et d’activité irréprochable posées par la LB :

“Insgesamt liess die UBS AG den unbedingten Willen vermissen, sich jederzeit den U.S. regulatorischen Vorgaben umfassend anzupassen. Die Pflicht zur Beach- tung ausländischer Rechtsvorschriften folgt zwar nicht direct aus dem Schweizer Aufsichtsrecht. Auch ist zu anerkennen, dass die anwendbaren Bestimmungen des U.S. rechts zum Teil Unschärfen aufweisen und dem Schweizer (Aufsichts-) Recht fremd sind. Angesichts der sehr grossen Exposition der UBS AG in den USA ist doch das konsequente Beachten des U.S. Rechts aus Sicht des Risikomanage- ments ein absolutes Erfordernis. Diese Ansicht wurde zwar auch vom obersten Management klar vertreten, jedoch mit Bezug auf das NAM-Business von den Kadern nicht pflichtgemäss und lückenlos durchgesetzt.

Dass sich die UBS AG heute einem existenzbedrohenden, vom Private Banking herrührenden Rechts-und Reputationsrisiko ausgesetzt sieht, is im Urteil der EBK letztlich auch auf ein Kulturproblem zurückzuführen.”76

A titre de sanction, la CFB a interdit à UBS d’offrir désormais des services trans- frontaliers de Private Banking à des clients domiciliés ou résidant aux Etats-Unis et l’a enjoint d’identifier, limiter et surveiller de manière appropriée les risques juridiques et de réputation propres à la fourniture transfrontalière de prestations de services.

En revanche, la CFB n’a pas constaté de négligence d’UBS dans la mise en œuvre du QIA et n’a pas non plus prononcé de sanction à l’égard des personnes qui occupaient des postes dirigeants au moment des faits.

2. Transfert de données aux autorités américaines a) Procédures aux Etats-Unis

i) Procédures SEC et DOJ

Dans le courant de l’année 2007, la SEC et le DOJ ont ouvert des enquêtes admi- nistratives et pénales contre UBS en relation avec ses activités transfrontalières77. Ces autorités étaient arrivées à la conclusion que, d’une part, des collaborateurs

76 Rapport succinct (note 73), version allemande, p. 18.

77 Rapport succinct, version allemande (note 73), p. 4.

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de la banque avaient systématiquement aidé des clients américains à échapper au fisc américain en exploitant la qualité de QI d’UBS. Et que, d’autre part, certains collaborateurs du département Amérique du Nord (NAM) avaient communiqué avec des clients américains, en contradiction avec les directives internes de la banque (Country Paper) et les restrictions de la SEC78.

Le 18 février 2009, UBS annonçait la signature d’un Deferred Prosecution Agreement (DPA) avec le DOJ et d’un Consent Order avec la SEC afin de résoudre la question des investigations menées par ces deux autorités sur ses activités transfrontalières aux Etats-Unis79.

Selon cette déclaration, UBS acceptait de payer USD 780 millions aux Etats- Unis, dont USD 380 millions à titre de restitution des profits liés à ses activités transfrontalières et USD 400 millions au titre de l’impôt anticipé fédéral (backup withholding tax), ainsi que des pénalités et intérêts, et la restitution des impôts non payés sur certaines relations de compte impliquant des structures fraudu- leuses, fictives, écrans ou autres80.

UBS renonçait également à offrir des activités transfrontalières aux Etats-Unis par le biais d’entités non-enregistrées auprès de la SEC. Elle s’engageait en outre à mettre en place un système de contrôles internes relatifs au respect des obliga- tions prévues par le QIA ainsi qu’une nouvelle structure de Governance and Legal Compliance81.

En contrepartie des engagements pris par UBS, le DOJ acceptait de différer de dix-huit mois, soit jusqu’au mois d’août 2010, la poursuite pénale engagée contre UBS. Si, à l’issue de cette période, UBS satisfaisait à ses obligations, le DOJ de- vait renoncer à poursuivre les charges contre UBS concernant ses activités trans- frontalières aux Etats-Unis82.

ii) Procédure IRS

Parallèlement aux procédures initiées par la SEC et le DOJ, une cour fédérale américaine a autorisé l’IRS, en juillet 2008, à notifier à UBS des John Doe Sum- mons, procédure unilatérale qui tendait à obtenir la production de documents de comptes ouverts en ses livres entre 2000 et 2007 par des clients américains.

Le nombre de contribuables américains ayant procédé de la sorte était estimé à 52,00083.

78 Idem, p. 15-16.

79 Selon le communiqué UBS du 18 février 2009 (note 55).

80 Ibidem.

81 Ibidem.

82 Ibidem.

83 Arrêt TAF A-7342/2008 et A-7426/2008 (note 72), let. A.

(21)

Le 16 juillet 2008, l’IRS entamait également une procédure d’entraide fiscale avec la Suisse, basée sur l’art. 26 de la convention de double imposition en matière d’impôts sur le revenu conclue avec les Etats-Unis en 1996 (CDI USA 1996)84, et demandait à l’Administration fiscale de la Confédération (AFC) de lui trans- mettre des informations sur les noms de sociétés offshore et de leurs ayants droit économiques américains ainsi que toutes informations relevantes sur les comptes détenus par ces entités dans les livres d’UBS85.

Le 19 août 2009, UBS et l’IRS signaient un accord relatif à la procédure dite des John Doe Summons86.

A teneur de cet accord, l’IRS renonçait à recourir à cette procédure unilatérale au profit d’une nouvelle demande d’entraide administrative basée sur la conven- tion de double imposition conclue entre la Suisse et les Etats-Unis. Cette requête a été adressée à l’AFC le 31 août 2009 et porte sur 4,450 comptes non déclarés87. Cet accord n’est pas soumis au référendum et est applicable dès sa signature, soit dès le 19 août 2009. Dans la mesure où il fait partie d’un arrangement extra- judiciaire, il deviendra sans objet une fois que la procédure des John Doe Summons sera définitivement clôturée. Les décisions qui auront été prises dans le cadre de cet accord ne devraient pas avoir d’effet préjudiciel sur de futures procédures d’entraide, mais elles pourraient servir de base à de futurs traités d’entraide88. Les critères sur lesquels repose la décision d’accorder l’entraide administrative à l’IRS ont été publiés 90 jours après la signature de l’accord relatif aux John Doe Summons89.

L’annexe à l’accord se réfère explicitement à l’arrêt du Tribunal administra- tif fédéral du 5 mars 2009 par l’emploi des termes “fraudes et délits semblables”

84 CDI-USA 1996 (RS 0.672.933.61).

85 Arrêt TAF du 5 mars 2009 (note 72), let. A.

86 Accord entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d’Amérique concernant la demande de ren- seignements de l’Internal Revenue Service des Etats-Unis d’Amérique relative à la société de droit suisse UBS SA du 19 août 2009 (RS 0.672.933.612 ; Accord UBS).Le texte de cet accord est annexé au présent article et est disponible sur le site internet de la Confédération à l’adresse www.

admin.ch/ch/f/rs/c0_672_933_612.html. Voir ég. le communiqué UBS du 19 août 2009, dispo- nible sur le site internet d’UBS à l’adresse www.ubs.com/1/f/about/news.html?newsId=170333.

87 Selon le communiqué ASB du 17 novembre 2009, disponible sur le site extranet de l’ASB.

88 Cottier T. / Matteoti R., “Die UBS-Amtshilfeabkommen zwischen der Schweiz und den vereini- gten Staaten : direkt anwendbare Kriterien zur Beurteilung von Steuerbetrug und Steuerhinter- ziehung”, in Jusletter 23 novembre 2009, p. 4, disponible à l’adresse www.jusletter.ch.

89 Annexe à la demande de renseignements de l’Internal Revenue Service des Etats-Unis d’Amérique relative à la société de droit suisse UBS SA : Critères permettant d’accorder l’entraide administrative dans le cadre de la demande de renseignements de l’IRS (RS 0.672.933.612). Un tableau synoptique est annexé au présent article et est disponible sur le site internet de la Confédération à l’adresse www.ejpd.admin.ch/etc/medialib/data/wirtschaft/fallubs.Par.0025.File.tmp/ueberblick- anhang-f.pdf. Voir ég. le communiqué DFJP/DFF du 17 novembre 2009, disponible sur le site in- ternet de la Confédération à l’adresse www.news.admin.ch/message/?lang=fr&msg-id=30132.

(22)

(Betrugsdelikte und dergleiche)90. Elle va par ailleurs au-delà de la pratique mise en œuvre jusqu’ici par les autorités fiscales et les tribunaux puisqu’elle étend l’en- traide à des “comportements délictueux graves et durables” (fortgesetzte, schwere Hinterziehungen)91. L’AFC devra rendre les décisions relatives aux comptes faisant l’objet de la demande d’entraide dans les 360 jours suivant la date de réception de la demande, soit d’ici au 24 août 201092.

Le 21 janvier 2010, le Tribunal administratif fédéral a rendu un arrêt de prin- cipe sur recours contre une décision de l’AFC accordant l’entraide. Cet arrêt qua- lifie l’accord du 19 août 2009 d’accord amiable (Verständigunsvereinbarung), qui ne peut, en tant que tel, ni modifier ni compléter la CDI 199693. L’art. 26 de cette convention, qui traite de l’échange d’informations doit être interprété comme vi- sant des comportements frauduleux qui vont au-delà de la soustraction continue de montants imposables, fussent-ils conséquents94. Une simple omission d’en- voyer un formulaire W-9 ne saurait par ailleurs constituer une “fraude ou un dé- lit semblable” susceptible de justifier l’octroi de l’entraide administrative95. Cette juridictionprécise ainsi les critères qui doivent être examinés pour dé- terminer l’existence d’une fraude fiscale (Betrug), qui doit encore être distinguée de la simple soustraction fiscale (Hinterziehung)96, ce qui nuance les conclusions que l’on pouvait, un peu hâtivement, tirer de l’arrêt du 5 mars 2009. Ce dévelop- pement jurisprudentiel est susceptible de rendre la procédure d’entraide moins rapide et surtout moins intéressante pour les Etats-Unis, ce qui pourrait conduire à la reprise des procédures contre UBS97. Une solution, suggérée par le Tribunal administratif fédéral dans son arrêt, serait de soumettre l’accord du 19 août 2009 à l’approbation du Parlement, ce qui lui conférerait le même rang constitutionnel que la CDI 1996 et permettrait d’y déroger, en tant que lex specialis et posterior98.

90 Arrêt TAF du 5 mars 2009 (note 72), consid. 5.4.

91 Cottier T. / Matteoti R. (note 88), p. 2.

92 Accord UBS (note 86), art. 1 ch. 2 ; Circulaire ASB 6971 (note 69).

93 Arrêt TAF A-7789/2009, A c. ESTV, du 21 janvier 2010, consid. 5.5.2 ; voir ég. communiqué du TAF du 22 janvier 2010, disponible sur le site internet du TAF à l’adresse www.bvger.ch/

fr/20100122mmamtshilfeurteil.pdf.

94 Idem, consid. 6.5.4.

95 Idem, consid. 6.7.1.

96 Idem, consid. 6.6.3.

97 Voir à ce propos le communiqué OFJ du 27 janvier 2010, disponible sur le site internet de la Confédération à l’adresse www.news.admin.ch/message/?lang=fr&msg-id=31329, selon lequel l’échange d’informations ne serait plus possible que dans 250 cas environ, alors que l’accord du 19 août 2009 porte sur 4450 dossiers.

98 Arrêt TAF du 21 janvier 2010 (note 93), consid.5.7 ; voir ég. le communiqué OFJ (note 97) ; afin de poursuivre la procédure d’entraide administrative initiée en août 2009, la Confédération et les Etats-Unis ont signé le 31 mars 2010 – soit après le dépôt du manuscrit de cette contribution – un protocole modifiant l’Accord UBS du 19 août 2009. L’accord modifié sera appliqué à titre

(23)

En tout état, il est probable qu’un grand nombre de clients américains d’UBS se sont d’ores et déjà déclarés auprès de l’IRS, dans le cadre du programme de déclaration volontaire (voluntary disclosure)99.

Ce programme s’adresse à des personnes physiques. Elles ont eu la possibilité, en principe jusqu’au 15 octobre 2009, de déclarer leurs revenus sur les six dernières années et de payer les impôts, intérêts et pénalités sur chacune de ces années ainsi qu’une pénalité équivalant à 20% de la somme détenue sur l’ensemble des comptes non déclarés pour l’année où ce montant global est le plus élevé (highest aggregate account/asset value). Cela en lieu et place d’autres sanctions, civiles et pénales.

Bien que l’IRS indique qu’il ne s’agit pas d’une amnistie fiscale, c’est bien ainsi que ce programme est qualifié par l’ASB100.

b) Décision de la FINMA

Le 18 février 2009, la FINMA émettait une décision à l’intention d’UBS ordon- nant de lui remettre des données concernant 300 de ses clients, afin qu’elle puisse les transmettre au DOJ et aux autorités américaines de poursuite en matière de délits fiscaux101.

La FINMA a basé sa décision sur les art. 25 et 26 de la loi sur les banques (mesures en cas d’insolvabilité)102, au motif que les autorités américaines avaient menacé la banque de poursuites pénales si les 300 dossiers ne leur étaient pas livrés au 18 février 2009. Selon la FINMA, une procédure pénale pouvait mena- cer les liquidités de la banque, ce qui l’aurait conduit presque inéluctablement à l’insolvabilité et à la faillite. L’intérêt public de la Suisse dans le cas concret était prépondérant par rapport à l’intérêt privé des intéressés au maintien de la confi- dentialité des données et le principe de proportionnalité était également respecté, de sorte qu’il se justifiait d’ordonner à UBS de transmettre ces informations103.

provisoire jusqu’à ce qu’il soit soumis à l’approbation de l’Assemblée fédérale, lors de la session parlementaire de juin 2010. Voir le communiqué DFJP du 31 mars 2010, disponible sur le site de la Confédération à l’adresse www.news.admin.ch/message/?lang=fr&msg-id=32493. Le texte du protocole est disponible à l’adresse www.ejpd.admin.ch/ejpd/fr/home/dokumentation/mi/

2010/2010-03-311.html.

99 Voir notamment l’article du New York Times du 17 novembre 2009 “14,700 Disclosed Offshore Ac- counts”, disponible à l’adresse www.nytimes.com/2009/11/18/business/global/18irs.html?_r=

1&scp=6&sq=UBS&st=cse.

100 Circulaire ASB 7599 “USA New Voluntary Disclosure Program for Offshore Assets” du 27 mars 2009, disponible sur le site extranet de l’ASB.

101 Arrêt TAF B-1092/2009 W, H, J, S, K, B, D, C c. UBS AG et FINMA du 30 avril 2009, let. B ; le texte de la décision de la FINMA n’est pas disponible.

102 LB (note 11).

103 Arrêt TAF du 30 avril 2009 (note 101), let. B.

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