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Les résolutions des organes des Nations Unies, et en particulier celles du Conseil de sécurité, en tant que source de droit international humanitaire

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Les résolutions des organes des Nations Unies, et en particulier celles du Conseil de sécurité, en tant que source de droit international

humanitaire

BOISSON DE CHAZOURNES, Laurence

BOISSON DE CHAZOURNES, Laurence. Les résolutions des organes des Nations Unies, et en particulier celles du Conseil de sécurité, en tant que source de droit international humanitaire. In:

Condorelli, Luigi.. et al. Les Nations Unies et le droit international humanitaire : actes du colloque international à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'ONU (Genève - 19, 20 et 21 octobre 1995) . Paris : Pedone, 1996. p. 149-173

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:15022

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Les résolutions des organes des Nations Unies, et en particulier celles du Conseil de sécurité, en tant que source de droit international humanitaire Laurence Boisson de Chazournes*

Introduction

1. La contribution des résolutions du Conseil de sécurité à la consécration et au développement du droit international humanitaire

A. Le Conseil de sécurité s'approprie le droit humanitaire B. Le Conseil de sécurité et la création d'obligations: à propos

de quelques incursions sur Je terraÎn du droit humanitaire C. Le Conseil de sécurité et la qualification des conflits II. Le développement de procédures de mise en œuvre du droit

international humanitaire

A. Les comrttissions d'enquête

B. Les juridictions pénales internationales

C. La Commission d'indemnisation des Nations Unies Conclusion

* L'auleur IÎent à remercier lfès chaJeureusement le Professeur Luigi Condorelli, Professeur à la Faculté de droit de j'Université de Genève, et M. Marco Sassoli, Chef·adjoint de la Division juridique du Comité international de la Ooix-Rouge, pour leurs observations et commentaires qui ont été très précieux lors de la rédaction de cet anicle.

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Introduction

A leurs débuls, les Nations Unies ne voulurent pas se préoccuper du droit applicable en période de conflits armés. L'Organisation ne pouvait se résoudre à Irai ter de cette question alors que la Charte énonçait le principe fondamental de l'interdiclion du recours à la force et que l'une de ses missions était d'assurer le maintien de la paix,l Cette altitude évolua après la tenue de la Conférence sur les droits de l'homme de Téhéran en 1968. Le droit international humanitaire fit son entrée dans l'arène des Nations Unies.2 Les organes onusiens allaient alors, chacun dans son champ de compétence respectif, se préoccuper du développement normatif et de l'application de ce droit.

Les années récentes ont vu les Nations Unies jouer un rôle sans cesse plus grand dans le champ humanitaire. En outre, la disparition du

«rideau de fer» a entraîné dans son sillage une revitalisation des activités du Conseil de sécurité, parmi lesquelles la gestion des crises humanitaires occupe une place importante. L'application du droit humanitaire devient ainsi une préoccupation majeure du Conseil.

Organe politique par nature, le Conseil de sécurité fait application du droit international à des fins politiques. Prenant en compte les nonnes de droit international humanitaire, il les interprète pour y puiser toutes les vertus lors de son application aux différents conflits dont il est saisi. Ce rôle ambitieux peut tou'tefois le conduire sur d'autres chemins. Au gré de ses résolutions et décisions, l'organe principal des Nations Unies, chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, participe à la reconnaissance et au développement du droit international humanitaire, Quelques-unes de ses décisions peuvent même aller jusqu'à modifier la portée de telle ou telle règle de ce droit ou peuvent mettre en lumière certaines insuffisances, De telles actions ont très certainement une incidence sur

Ainsi. la Commission du droit international avait exclu de ses travaux la

q~eslion du droit de la guerre, AnnKoire ... 1949, p: 281. Voir E, David, Principes de droit des conflits armés, Bmxelles. Bruylant, 1994, p. 281.

2 VOIr Acte final de la Conférence internationale des droits de l'homme, E.68.xIV.2, p. 18. Il faut aussi remarquer qu'en 1967, par la résolution 237 (1967) adoptée le 14 juin 1967, à l'occasion de la «Guerre des six jours», le Conseil de sécurité demandait que les parties respectent les droits des prisonniers et des populations civiles énoncés par les Conventions de Genève. C'est la première résolution du Conseil de sécurité qui fait 'éférence au droit international humanitaire.

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152 Les Nations Unies et le droit Întemational humanitaire

l'évolution de ce dernier. Cette question est importante à plus d'un titre, et notamment parce que le Conseil de sécurité dispose de larges pouvoirs décisionnels dans le cadre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, lui permettant d'adopter des résolutions dont la portée obligatoire s'impose à tous les Etats membres, belligérants et non belligérants. En même temps, se pose aussi le problème de l'intégration du droit humanitaire - dont l'application doit être inconditionnelle et se réaliser en toutes circonstancesJ - au droit des Nations Unies. ce dernier faÎsant une très large place au règlement politique des conflits.

Certes, d'autres organes des Nations Unies. telle l'Assemblée générale, le Conseil économique et social et la Commission des droits de J'homme, font référence au droit humanitaire et le mettent en œuvre.' Qu'ils contribuent par là-même à la généralisalion et à l'universalisation de la reconnais~ance

de ce corpus de règles ne fait aucun doule.s Tout en étant préoccupés d'assurer le respect du droit humanitaire, l'interprélation qu'ils font des règles peut éventuellement aller jusqu'à' modifier leur portée. Toutefois, même si des préoccupations portant sur le caractère sélectif de l'action humanitaire de ces organes ne peuvent être écartées, leur pouvoir. à la différence des pouvoirs du Conseil de sécurité, n'est que recommandatoire.

Leurs actes ont une importance certaine dans le processus général de fom13tion et de développement du droit international humanitaire, sans pour autant, toutefois, qu'ils puissent placer les Etats devant des choix tenant à l'application prioritaire d'une obligation par rapport à une autre.

Il apparaît donc justitié que le regard se tourne vers le Conseil de sécurité. Ses activités dans le cadre du Chapitre VII sont maintenant

3 Sur la spécificité du droit international humanitaire. voir G. Abi-Saab. ~The

Specificities of Humanitarian Law>}, in C. Swinarski (éd.), Etudes et essais sur le droit imemationa/ humanitaire et sur les principe.t de la Croix-Rouge en l'honneur de Jean Pictet. Genève. La Haye, CIeR, Martinus Nijhoff Publishers, 1984. pp. 265- 280; L. Condorelli, ..:Le droit international humanit.aire en tant qu'atelier d'expérimentation juridique», il/ lm Dielut lM der Gemeinschafl - Festschrift für Dietrich Schindler zum 65 Cebu,.tsrag, Basel, Frankfurt am Main, Verlag l-Ielbing & Lichlenhahn, 1989. pp. 193-200.

4 T. Van Boven, «Reliance on Norms of Humanitarian Law by the United Nations' Organs,., Humanitarian Law of Armed Conflict - Challenges Ahead, in AJ.M. Delissen & G. 1. Tanja (éd.), The Hague, Martinus Nijhoff Publishers, 1991, pp. 495-513: The United Nations in the Field of Huma1l Rig/us, Genève et New York, Nations Unies. 1994. notamment pp. 293-295; S.G. Ramcharan, The Intenwtional Law and Praclice Qf Early- WlIrning and Preventive Diplomac)': The Emerging Global Walcll, Dordrecht. Soslon. London, 1991, pp. 89-100.

5 Voir, par ex.emple, les résolutions 2444 (XXIII) et 2675 (XXV) de l'Assemblée générale sur la protection des populations civiles en cas de conflit armé ou encore la résolution 45/100 (1990) sur les couloirs d'urgence h.~manitaire.

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suffisamment étoffées6 pour justifier que l'on s'intéresse à la contribution de cet organe au droit international humanitaire, lorsqu'il agit en application de ces dispositions. Et cela même s'il est vrai que le Conseil n'est pas toujours très explicite sur le choix de sa base de compétence, ce qui peut entraîner des incertitudes quant à l'appréciation de la portée de ses actes.? Les activités menées dans le cadre du Chapitre VI ne doivent pas pour autant être mises à l'écart car eUes sont aussÎ riches d'enseignements en matière humanitaire.

La pratique humanitaire du Conseil de sécurité est nourrie d'activités nonnatives aussi bien qu'opérationnelles qui toutes contribuent, d'une manière ou d'une autre. au développement du droit international humanitaire. On verra, dans un premier temps, que le Conseil de sécurité, en adoptant résolutions et décisions, participe à la consécrat.ion et à l'affermissement des normes de droit humanitaire (1). Dans un second temps, on analysera la contribution du Conseil de sécurité à la mise en œuvre effective du droit humanitaire. En effet, la création et le recours à certains mécanismes et procédures visant à faire respecter le droit humanitaire permettent aussi au Conseil de sécurité de participer à l'interprétation et au développement du droit humanitaire (II).

J, La contribution des résolutions du Conseil de sécurité à la consécration et au développement du droit international humanitaire

A. Le Conseil de sécurité s'approprie le droit humanitaire

Nombreuses sont les résolutions du Conseil de sécurité qui font référence au droit international humanitaire. Le regard du Conseil est aUiré par ce droil élaboré, négocié et adopté en grande partie en dehors

6 Voir par exemple les très nombreuses décisions adoptées dans le cadre du conflit de l'ex-Yougoslavie, et T. van Baarda, «The Involvement of the Securily Couneil in Maintaining International Humanitarian Law», 12 Nethulands Quarterly of Huma" Righrs (1994), n' 2. pp. 137-t52.

7 Ainsi en est-il de la résolution 598 (1987) adoptée le 20 juillet 1987 sur les conditions d'un cessez-le-feu entre l'Iran et J'Irak (voir E. Decaux. ~(La résolution 598 (1987) du Conseil de sécurité el les effons de paix des Nations Unies enlre t'Irak el l'Iran., AFDI (19&&), pp. 74-76) ainsi que de ta résolulion 6&& (l99t) du 5 avril 1991 condamnant la répression de la population civile irakienne (voÎr P. Malanczuk,

«The Kurdish Crisis and Allied Intervention in the Aftermath of the Second Gulf War», EJ/L (1991), pp. 127-(29). Sur cet aspect, voir R. Zacklin, «Le droit applicable aux forces d'intervention des Nations Unies)~, Le Chapitre VI/"de la Charte des Nations Unies, Colloque de la Société française pour le droit international,

1994, pp. 194·195.

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154 Les Nations Unies et le droit international humanitaire

du sein des Nations unies et il se montre de plus en plus soucieux d'en assurer le respect. Qu'il mène son action dans le cadre du Chapitre VI ou du Chapitre VII de la Charte, s'il fait face à un conflit armé, il a de plus en plus tendance à rappeler aux parties la nécessité de respecter le droit humanitaire.

La situation dans les Territoires arabes occupés, la guerre IranlIrak8 et la guerre du Golfe sont autant d'exemples qui ont donné l'occasion au Conseil de sécurité d'exiger le respect des normes de droit humanitaire.

II en va ainsi du traitement des prisonniers de guerre ou de la protection des populations civiles et le Conseil de sécurité s'appuie sur le droit coutumier existant pour dénoncer les violations des obligations de droit humanitaire auxquelles sont assujetties les parties à un conflit.

En cenaines circonstances, tout en s'appuyant sur le d~oit exislant, le Conseil fait une interprétation large de celui-ci. Il ne rappelle alors pas seulement l'existence de certains principes et obligations. Il participe aussi au développement de leur contenu. La résolution 681 (1990), adoptée le 20 décembre 1990, révèle bien ces aspects. S'appuyant sur l'article 1 de la quatrième Convention de Genève sur la protection de la population civile en période de conflit armé, le Conseil de sécurité demanda que toutes les parties contractantes fassent respecter les dispositions de cette convention par l'Etat israélien. Si le principe de la responsabilité collective était admis en droit conventionnel et coutumier9 • encore fallait-il explorer son contenu et le Conseil révéla à cette occasion certaines virtualités de l'application de ce principe. Il rendit ainsi plus concrètes les relations qui doivent régir l'action collective conduite sur la base des instruments de Genève et l'action des Nations Unies en cas de «violations graves du droit international humanitaire».1o

8 Ainsi dans la résolution 530 (1983), adoptée le 31 octobre 1983, le Conseil condamne «toutes les violations du droit intemational humanitaire inœmalÎonal, en particulier des dispositions des Conventions de Genève de 1949 sous tous leurs aspects, et demande la cessation immédiate de toutes les opérations militaires contre des objectifs civils. notamment les villes et les zones résidentielles».

9 Activirés militaires el paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etals-Unis d'Amérique), fond. arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 14, par. 220. L.

Condorelli el l. Boisson de Chazoumes, «Quelques remarques à propos de l'obligation de 'respecter et faire respecler' le droit international humanitaire <en toutes circonstances'», in Etudes et essais sur le droit international humanitaire et sur les principes de la Croix-Rouge en l'honneur de J. Pictet. op. cÎl. note 4, pp. 17-35.

10 Le Protocole additionnel 1 en son article 89 précise que: «Dans les cas de .,'iolations graves des Conventions ou du présent Protocole. les Hautes Parties contractantes s'engagent à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l'Organisation des Nations Unies et conformément à la Charte des Nations Unies)~.

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_.::

Les Nations Unies et J'élaboration du droit international humanitaire 155

D'autre pari, le Conseil de sécurilé peut aussi contribuer à affirmer l'apparlenance des règles de droit humanilaire au droit international général. Dès qu'il rut saisi du conflit de l'ex-Yougoslavie, le Conseil appela au respect des Conventions de Genève. La situation juridique qui prévalait à l'époque n'était pourtant pas très claire, s'agissant de la question de la succession en matière de traités. La Croatie déposa, en effet, sa déclaration de succession à ces Conventions le Il mai 1992 et la Sosnie-Herzégovine, le 31 décembre 1992.11 Dans cette situation d'incenitude sur la portée des liens conventionnels de droit humanitaire, le Conseil considéra pourtant que l'ensemble des règles énoncées par ces conventions trouvaient application, indiquant par ce fait leur apparlenance au droit international général.12

Telle rut aussi son attitude lorsqu'il adopra le rapport du Secrétaire

général sur le Statut du Tribunal international chargé de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit intemational humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depelis 1991 (ci-après, le Tribunal sur l'ex-Yougoslavie)." Il fit sienne l'opinion selon laquelle les dispositions peninentes des quatre Conventions de Genève relèvent du droit international général." Le Secrétaire général, animé par le souci de voir instituer un organe pénal qui soit universellement accepté, avait clairement exprimé son souci selon lequel le droit applicable par le tribunal devait être le droit coutumier universellement considéré comme tel.15

Il Pour le texte de la Déclaration de succession de la République de BosnÎe- Herzégovine aux Convenlions de Genève et à leurs Protocoles additionnels, voir Revue intemarionale de la Croix-Rouge (1993), nO 800. p. 1 %. Sur la question de l'absence de succession automatique de ces Etats aux obligations conventionnelles de la Yougoslavi,ei voir E. David, op. cil. note 1, p. 163.

12 Dans sa résolution 764 (1992) adoptée le 13 juillet 1992, le Conseil de sécurité réaffinne «que toutes les parties, som tenues de se confonner aux obligations découlant du droit international humanitaire et en particulier des Conventions de Genève du 12 août 1949 et que les personnes qui commeuenl ou ordonnent de commeUre de graves violations des Conventions sont individuellemenl responsables à l'égard de telles violations»; voir aussi les résolutions 771 (1992) du 13 aoül 1992 et 780 (1992) du 7 oceobre t992.

13 Rapport du Secrélaire général établi conformément au paragraphe 2 de la résolution 808 (t993) du Conseil de sécurité, doc. N.U. 5/25704. 3 mai t993.

t4 Résotution 827 (1993) du 25 mai 1993.

15 Doc. N_U. S/25704, op. cil. nOle 13, pp. 10-11. Ce qui irait à l'encontre de l'interprétation selon laquelle la mention des Conventions de 1949 dans le Statut du tribunal entraînerait une « conventionalisation » de J'incrimination, voir A. Pellet,

<.Le Tribunal criminel international pour l'ex-Yougoslavie - Poudre aux yeux ou avancée décisive?», RGDIP (1994), p. 35.

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Cependant, en reconnaissant l'appartenance de certaines normes au droit coutumier et non d'autres, le Conseil de sécurité risque de fragiliser l'édifice du droit international général. Ainsi en est-il lorsqu'il n'accorde ses faveurs qu'aux quatre Conventions de Genève et non au Protocole additionnel 1 pour ce qui est du droit applicable par le Tribunal sur l'ex-Yougoslavie. On peut pourtant considérer qu'un grand nombre de dispositions du Protocole additionnel 1 relèvent aussi du droit coutumier. A l'époque de la guerre du Golfe, le Comité international de la Croix-Rouge avait publié un mémorandum sur le droit humanitaire applicable en cas de conflit anné, qui allait en ce sens,l6 Cette opinion est aussi partagée par une partie de la docttine.17

Une telle attitude restrictive risque d'ailleurs de faire des émules.

Ainsi le Rapporteur spécial de la Commission du droit international sur la question des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité a-t-il repris dans son dernier rapport les dispositions du statut du Tribunal sur l'ex-Yougoslaviel ", écartant de ce fait les dispositions du premier Protocole.

Il aurait été préférable qu'aux côtés des Conventions de Genève, il soit fait mention dans le Statut du Tribunal sur l'ex-Yougoslavie de l'existence d'autres principes de droit international humanitaire relevant du droit international générall9, laissant ainsi place à une interprétation évolutive et progressiste du droit international humanitaire.2o

16 Texte du mémorandum du 14 décembre 1990 in Revue internationale de la Croix- Rouge (1991), n' 787, pp. 25-27.

17 En ce sens, L.R. Penna, «Customary International Law and Protocole 1: An Analysis of sorne Provisions», Etudes et essais sur le droit international humanitaire et sur les principes de la Croix-Rouge en l'honneur de Jean Pictet, op. cit. note 3, pp. 201-225. Voir aussi C. Emmanuelli, Les actions militaires de l'ONU et le droit intemalional humanitaire, Montréal, Wilson & Latleur, 1995, pp. 46-48.

18 Tout en n'ayant pas repris les dispositions concernant le Tribunal du Rwanda;

voir le Treizième rapport sur le projet de code de crimes contre la paix el la sécurité de l'humanité (1995), doc. N.U. AlCN.4/466, article 22, pp. 27-28.

19 Il aurait aussi été possible d'utiliser l'expression «principes génémux de base du droit humanitaire» utilisée par la Cour internationale de Justice en l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, op. cit. note 9, par. 218.

20 Comme par exemple, en matière d'objectifs militaires, le Protocole additionnel 1 ayant apporté certaines restrictions à cette notion. La pratique d'autres organes des Nations Unies semble d'ailleurs aller dans le sens d'une interprétation évolutive lorsqu'ils précisent que «les principes et l'esprit des règles du droit international humanitaire», tels qu'ils sont contenus entre autres, dans les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977, s'appliquent aux forces des Nations Unies quand, dans l'exercice de leur mandat, celles-ci doivent faire usage de la force armée.

Telle est aussi la position que l'on retrouve dans les accords conclus entre l'Organisation des Nations Unies et les Etats membres fournissant des contingents pour ses forces, ainsi que dans les accords avec les Etats hôtes; voir C. Emmanuelli, op. cit. note 17, p. 45.

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Dans le cadre de ses activités, le Conseil de sécurité peut aussi être conduit il participer à l'émergence d'une norme en droit international général. Lors de l'adoption du Statut du Tribunal sur le Rwanda, le Conseil de sécurité étendit l'application du principe de l'universalité de juridiction en cas de violations graves de droit humanitaire, aux crimes perpétrés dans un conflit interne. Cette situation n'est pas prévue par les instruments de Genève21 , même si l'on a pu considérer qu'à tout le moins les violations de l' article 3 commun aux Conventions de Genève sont implicitement couvertes par ce principe, Faisant le pas, sans s'appuyer sur la notion d'infractions graves ou de «crimes de guerre»

- élément-pivot du système de répression prévu par les instruments de Genève -, le Conseil de sécurité reconnut compétence au Tribunal pour juger des violations de droit humanitaire commises au Rwanda,22 En effet, les violations de J'article 3 commun aux quatre Conventions ainsi que les violations au Protocole additionnel Il entrent dans le champ de compétence de cette juridiction. En cela, le Conseil de sécurité a fait œuvre innovatrice en donnant une dimension internationale à la répression des violations graves de droit humanitaire commises lors de conflits internes.

Cette décision impnnante s'inscrit dans le prolongement du statut du Tribunal sur l'ex-Yougoslavie, celui-ci prévoyant l'application des Conventions de Genève et donc de l'article 3 commun à ces quatre conventions. Le Tribunal sur l'ex-Yougoslavie a d'ailleurs, dans son premier rapport annuel, confimlé qu'il était compétent pour juger des crimes commis lors de conflits internationaux ainsi que lors d'un conflit interne)]

Cenains peuvent considérer que les décisions du Conseil consacrent la reconnaissance d'un principe déjà existant, d'autres préfèrent saluer la parhcipation du Conseil de sécurité au développement progressif du droit humanitaire. L'action du Conseil de sécurité est significative. Elle rompt avec la frilosité généralement de mise lorsqu'il s'agit de s'inléresser aux guerres civiles pourtant génératriceOà l'heure actuelle, d'un très grand nombre de violations de droit humanitaire.

C'est une contribution importante au développement du droit humanitaire24 , une sorte d'acte précurseur dans le domaine de la

21 Y. Sandol. Les dimensions in/erna/;ouales du droit humanitaire, Paris, Pedane, Institut Henry Dunant, UNESCO. 1986, p. 325~ T. Meron, «International Criminalizalion of lnlemal Atrocities», AJIL (1995), n- 3. p. 559.

22 Résolution 955 (t994) du 8 novembre 1994.

23 Doc. N.U. S/l994/1007, par. 19 (29 août 1994).

24 Il peUL être considér~ qu'il en est de même pour ce qui est de la définition du crime de génocide. L'élaboration des statuts des tribunaux sur rex-Yougoslavie et sur le Rwanda a en effet pennis de dégager le principe selon lequel les crimes

contre l'humanité peuvent aU.~si être commis en temps de paix, T, Meron, «International Criminalization of Internai Atrocities», op. cit. noie 21, p. 557.

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158 Les Nations Unies et le droit international humanitaire

répression pénale. Cette décision servira de référence pOUT d'autres organes et instances internationales ainsi que pour les juges et législateurs nationaux lorsqu' ils auront à se prononcer sur les crimes commis lors d'un conflit interne.2S

La contribution du Conseil de sécurité

li

l'application et au développement du droit international humanitaire est tout à fait significative. Il y a toutefois le risque de fragiliser cet apport si la politique du Conseil n'est pas conforme aux grands principes du droit international humanitaire. L'une des premières exigences est celle d'imposer le respect de J'ensemble de ce droit en toutes circonstances.

Cette exigence ne peut donc se satisfaire d'une sélectivité pusillanime qui conduit le Conseil de sécurité à ne porter son attention que sur certains conflits et non d'autres. Tout conflit susceptible d'être constitutif d'«une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression» devrait retenir l'attention du Consei1.26

De même, lorsque le Conseil est saisi d'un conflit, il devrait condamner toutes les violations de droit humanitaire et non pas seulement certaines d'entre elles.27 Lorsqu'utilisant la formule consacrée en matière de recours à la force, il autorise les Etats membres des Nations unies à employer

«tous les moyens nécessaires», sans que ses résolutions ne fassent une quelconque mention des règles de droit humanitaire qui doivent alors être respectées", il y a là encore une sélectivité très critiquable. /1 en

25 Voir sur ce point les remarques très stimulantes de T. Meron, «Inlernational Criminalization of InternaJ Arrocities»), op. cit. note 21, p. 577. Dans ce contexte, il faut noter le caractère novateur de la loi belge du 16 juin 1993 relative à la répression des infractions graves aux Conventions de Genève et aux Protocoles additionnels.

Cette dernière incrimine les crimes de guerre commis lors d'un conflit interne quels que sOÎent la nationalité de leur a,uteur, celle de leur victime et le lieu ils ont été commis, voir E. David, op. cil. note l, p. 556.

26 Il est pour le moins surprenant que la situation qui prévaut au Soudan depuis plusieurs années ne soit pas encore sur l'agenda du Conseil de sécurité.

27 Voir les propos critiques fonnulés par L. Condorelli à propos de l'approche sélective et au {( coup-par-coup » qui fut celle des autorités onusiennes lors de la Guerre du Golfe. Ainsi, par exemple, la résolution 666 du 13 septembre 1990 se soucie tout particulièrement du sort de la sécurité et du bien-être des ressortissants d'Etats tiers au regard de la quatrième Convention de Genève, mais ne dit rien ni à ce stade, ni plus tard sur la protection qui doit être accordée à la population civile en Irak, « Le droit humanitaire dans la crise et la ~guerre» du Golfe », Les aspects juridiques de la crise el de la guerre du Golfe, CEDIN, Paris, Molltchrestien, 1991. p. 192. Sur l'action humanitaire du Conseil de sécurité pendant la guerre du Golfe, voir E. Suy, «International HumaniLarian Law and the Security Council Resolutions on the 1990-1991 Gulf Conflict», Humanitarian Law of Armed ConflicI, op. cil.

note 4, pp. 515-526.

28 Résolution 678 (1990) du 29 novembre 1990; formule reprise dans la résolution 794 (1992) du 3 décembre 1992 à propos de la Somalie.

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Les Nations Unies et J'élaboration du droit intemational humanitaire 159

va de la cohérence de l'action du Conseil de sécurité dans le domaine humanitaire. Celle-ci est déterminante dans la formation et le développement du droit humanitaire. Elle l'est aussi au regard des principes fondamentaux d'impartialité et de neutralité.

La gestion des conflits ne peut pas se limiter à des appels nombreux et réitérés (au risque d'ailleurs de devenir incantatoires) au respect du droit international humanitaire. Cette arme ne doit pas être utiljsée en lieu et place de toute recherche véritable et durable d'une solution à un conflit. L'exigence du respect du droit humanitaire devient sinon un alibi à l'inaction politique. JI en va de même sur le plan juridique.

Le respect du jus in bello ne peut pallier le non respect du jus con/ra bellunl. Le risque est grand que le droit humanitaire devienne l'otage de tractations politiques, au mépris de ses valeurs et caractères intrinsèques.

B. Le Conseil de séC/lrité et la création d 'obligations:

à

propos de quelques incursions sur le terrain du droit humanitaire

La gestion des conflits internationaux n'est pas exempte de sélectivité et certaines préoccupations, au demeurant légitimes, peuvent retenir toute l'attention des membres du Conseil de sécurité, aux dépens du nécessaire respect d'autres garanties. Voulant assurer le respect de certaines obligations de droit humanilaire, ses décisions peuvent-elles alors modifier la portée d'autres règles?

Dans le conflit de l'ex-Yougoslavie, la distribution de l'aide humanitaire aux populations civiles est très certainement l'une des priorités du Conseil de sécurité. Le Conseil précise même «que l'aide humanitaire à la Bosnie-Herzégovine représente un élément important de l'effort qu'il déploie en vue de rétablir la paix et la sécurité internationales dans la région».29 Nombreuses sont ses décisions demandant aux parties de lever les obstacles qui empêchent la fourniture de l'assistance humanitaire.30 Devant la récalcitrance des belligérants à se plier à ses injonctions, le Conseil de sécurité a envisagé divers moyens tels l'élargissement du mandat de la FORPRONU31, l'interdiction de survol du territoire bosniaque aux vols militaires étrangers autres que ceux de la FORPRONU et des organisations humanitaires travaillant avec les Nations UniesJ2 , le recours

29 Résolulion 770 (1992) du 13 aoûl 1992. paragraphe 5 du préambule.

30 Voir, par exemple, la résolution 757 (1992) du 18 juin 1992 ainsi que la résolution 770 (1992) du 13 aoOI 1992.

31 Résolulion 776 (1992) du 14 seplembre 1992.

32 Résolulion 781 (1992) du 9 octobre 1992.

,

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I~O Les Nations Unies et le droit international humanitaire

à la force aérienne pour soutenir l'action de la FORPRONUJJ ainsi que la création de zones de sécurité.

Prenant en comple les spécificités de la situation, le Comité international de la Croix-Rouge avait lui-même proposé la création de zones de sécurité qui n'étaient pas entièrement conformes à tous les critères du droit international humanitaire. Le Comité international de la Croix·

Rouge avait insisté cependant sur la nécessité d'obtenir l'accord de toutes les parties concernées pour la mise en place de ces zones.34 Elles devaient être protégées par des forces des Nations Unies.

Cependant, les zones de sécurité mises en place par le Conseil ne ré(x:mdirent pas à ces conditions.35 Au lieu de la recherche d'un assentiment des parties, le Conseil imposa la création de telles zones et enjoignit aux parties de cesser d'utiliser leurs armes. Il fallait alors, pour assurer la sécurité dans ces lieux, que les forces des Nations Unies soient en nombre suffisant et que leur mandat soit modifié pour leur permettre de défendre véritablement ces localités. ce qui en grande partie ne se produisit pas.

On ne peut pas pour autant considérer que les règles du droit humanitaire sont affectées par les décisions du Conseil. Le Conseil de sécurité n'a pas suivi les prescriptions de ce droit et a établi des zones répondant à un autre régime juridique. La pratique du Conseil souligne toutefois qu'une réflexion devrait être menée sur un concept nouveau de zones de sécurité, dans les situations où d'une part, l'accord des parties est difficile à obtenir et d'autre part, il y a de grands risques à ce que l'accord ne soit pas respecté.

Le régime de gestion des sanctions économiques édictées contre l'Irak a aussi pu faire craindre qu'unç modification ne soit apportée à certaines règles du droit humanitaire.36 L'acheminement des secours était au cœur des débats. Le principe du libre passage de médicaments et de vivres pour les enfants de moins de 15 ans, notamment prévu à l'article 23

33 Résolution 836 (1993) du 4 juin 1993.

34 Y. Sandoz, ... The Establishment of Safety Zones for Persons Displaced wilhin their Country of Origin», i1l N. AJ-Nauimi/R. Meese (éd.), International Legal Issues Arisi"g Under the United Nations Decade of Inremational lLlw, Kluwer. 1995.

35 Résolution 819 (1993) du 16 avril 1993 pour la ville de Srebrenica et ses alemour~

et résolution 824 (1994) du 6 mai 1994 pour la ville de Sarajevo et d'aurres localités menacées, en particulier Tuzla, Zepa, Goradze et Bihac.

36 T. Meron, «Prisoners of War, Civilians and Diplomats in the Gulf Crisis)'.

AlI/., (1991), 1. p. 108.

(14)

Les Nations Unies et l'élaboration du droit international humanitaire 161

de J3 IVe Convention37 , paraissait être remis en cause du fait de J'étendue des sanctions et de la mise en place d'un système de contrôle très strict.

La résolution 661 (1990) exemptait du champ d'application des sanctions «les fournitures à usage strictement médical et, dans les cas où des considérations humanitaires le justifient, les produits alimentaires».

Faisant suite à des controverses sur la portée des exemptions humanitaires, le Conseil décida qu'il revenait au Comité des sanctions de détenniner au cas par cas et sur la base de toutes les infonnations dont celui-ci disposait, s'il y avait ou non un besoin humanitaire urgent à fournir des denrées alimentaires à l'Irak ou au Koweit. Selon les circonstances, le Comité des sanctions pouvait autoriser ou refuser un acheminement de vivres.38 La question était alors celle de savoir si le Comité international de la Croix-Rouge était soumis à une telle obligation, notamment lorsqu'il conduisait des opérations en application de l'article 23. A cette occasion, le Comité international de la Croix-Rouge, considérant que ,<les membres du Conseil n'avaient aucune intention de violer leurs obligations au titre du droit humanitaire»39, suivit une pratique qui marquait son attachement à J'esprit des instruments de Genève et qui témoignait de son indépendance.

li se limita à infonner le Comité des sanctions de ses initÎatives, sans pour autant laisser entendre qu'il briguait. une quelconque autorisation de s'acquitter de ses tâches.

En la matière, le droit humanitaire ne pouvait se plier aux contraintes du régime des sanctions, et le Comité des sanctions accepta cet état de fait, restant néanmoins informé des opérations du Comité international de la Croix-Rouge. La déclaration récente des cinq membres permanents du Conseil de sécurité sur les conséquences humanitaires des sanctions rejoint d'ailleurs les préoccupations du droit humanitaire.

Les cinq Etats se sont en efret prom,"cés en faveur d'un acheminement sans condition des médicaments et produits alimentaires de première nécessité.40

37 Sur j'application a fortion" de J'article 23, et cela même s'il ne s'appliquait pas de plein droit puisqu'il n'y avait pas de relation de belligérance enue l'Irak eL les Etats qui appliquaient les sanclions. Voir F. Bugnion, Le Comité inrernational de la Croix·Rouge et la protection des victimes de la guerre, Genève, ClCR, 1995, p. 962.

38 Résolution 666 (1990) du 13 septembre 1990. Voir M. Koskenniemi, «Le Comité des Sanctions (créé par la résolution 661 (1990) du Conseil de sécurité)>>, AFDI (t99I), pp. 119-137.

39 F. Bugnion. op. cil. note 37, p. 963.

40 Leltre datée du 13 avril 1995 (doc. N.U. S/1995/300) portant sur les incidences des sanctions sur le plan humanitaire.

(15)

162 Les Nations Unies et le droit international humanitaire

Ainsi qu'on le verra ultérieurement. le Conseil de sécurité se montre soucieux de la mise en œuvre du droit international humanitaire.

Panni les moyens de contrôle du respect de ce droit, l'intervention du Comité international de la Croix-Rouge est certainement privilégiée et le Conseil de sécurité tient à s'assurer que cette organisation puisse agir. Les velléités du Conseil peuvent toutefois aller au-delà de ce que le Comité international de la Croix-Rouge pourrait souhaiter ou, en tout cas, placer cette institution dans une situation d'inconfort par rapport à ses propres principes et lignes d'action_

Le Conseil de sécurité a ainsi adopté à diverses reprises des décisions exigeant des belligéranlS qu'ils donnent accès au Comité international de la Croix-Rouge pour visiter des personnes en détention.4! Ces décisions contribuent sans nul doute à reconnaître l'importance du rôle du Comité international de la Croix-Rouge en période de conflits armés.

Elles peuvent aussi porter ombrage à l'indépendance du Comité international de la Croix-Rouge. Les actions et initiatives de celte organisation reposent en effet sur des bases conventionnelles - générales ou spécifiques - ainsi que coutumières, qui sont pour lui garantes de son impartialité. En intégrant trop largement l'action du Comité international de la Croix-Rouge dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, les décisions du Conseil de sécurité risquent alors d'affaiblir la capacité d'intervention du Comité international de la Croix-Rouge.

li en va de même lorsque le Conseil de sécurité demande au Comité international de la Croix-Rouge de réaliser une mission et de lui en faire rapport.42 Le Comité international de la Croix-Rouge doit de nouveau faire face à un paradoxe: l'utilité de son intervention est reconnue mais le principe du caractère confidentiel de ses actions n'est pas respecté. En outre, la notoriété est tout à la fois flatteuse et aliénante.

Le pas qui conduit à considérer que le Comité international de la Croix-Rouge agit pour le compte du Conseil de sécurité risque d'être facilement franchi. Les faits sont pourtant autres. Le Conseil de sécurité tient à s'assurer de la coopération d'une organisation dont la légitimité d'intervention et le caractère indépendant sont pleinement reconnus. A trop vouloir voir agir le Comité international de la Croix-Rouge. le Conseil tend à fragiliser la capacité d'action d'une institution très spécifique, qui au demeurant n'appartient pas au système des Nations Unies.

41 (1992)

42

Résolution 687 (1991) du 3 avril 1991, paragraphe 30 du 13 août 1992.

Résolution 687 (1991) du 3 avril 1991, paragraphe 31.

et résolution 770

(16)

Les Nations Unies et l'élaboration du droit international humanitaire 163

C.

Le

Conseil de sécurité et la qualification des conflits

Lorsqu'il rappelle aux parties le droit applicable en période de conflits armés, le Conseil de sécurité doit tout d'abord qualifier la situation dont il est saisi. Il lui faut décider s'il s'agit d'un conflit international, auquel cas les Conventions de Genève et le Protocole additionnel 1 pourront trouver application, ou s'il s'agit d'un conflit non international qui pourra conduire à l'application de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel Il.

Cette appréciation est importante au titre du choix du droit qui va réguler la conduite des hostilités. Elle peut d'ailleurs, en certaines circonstances, témoigner de l'embarras du Conseil de sécurité à décider de ceUe question. Elle permet au Conseil de sécurité de manier le sceau de la légalité pour qualifier une situation conflictuelle. Il en est ainsi lorsque le Conseil établit de manière répétée que le conflit en cause ne ressort pas des affaires intérieures d'un Etat du fait de son caractère international au sens des instruments de Genève.

Ainsi, la question de la situation des Territoires arabes occupés a donné tieu à d'âpres discussions portant sur le droit appticable pour condamner la pratique des colonies de peuplement dans les Territoires occupés.

Dans ce contexte, l'insistance du Conseil de sécurité à voir appliquer la [Ve Convention43 a certainement contribué à objectiver la situation d'occupation des Territoires occupés comme conflit international au sens des Conventions de Genève, et plus particulièrement la IV- Convention relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.44

Le Conseil de sécurité ne s'est jamais appuyé sur la distinction entre conflits internationaux et conflits non internationaux pour qualifier expressément le conflit en Bosnie-Herzégovine.45 Cette attitude, sans

43 Parmi les nombreuses résolutions qui ont été adoptées, ,",ou, par exemple, la résolution 681 (1990) du 20 décembre 1990 qui demandait au gouvernement israélien

cc. de reconmûtre l'applicabilité de jure de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, à tous les territoires occupés par Israël depuis 1967 et à se conformer scrupuleusement aux dispositions de la Convemion », ou encore la résolution 799 (1992) du 18 décembre 1992 condamnant l'expulsion des civils au mépris des obligations relatives à la protection des personnes imposées à Israël. Voir F.L. Kirgis, «The Security Council's First Fifty Years», MIL (t995), n' 3, p. 528.

44 Sur le caractère controversé de cette question, tenant notamment à l'aspect territorial de l'occupation, voir par exemple la décision judiciaire H.C. 302f12. Sheikh Suleiman Abu Hilu et al. v, State of Israel et al,. S Israel Yearbook of Human Righrs (1975), pp. 384-388.

4S Voir D. Petrovic et L. Condorelli. «L'ONU et la crise yougoslave», AFDJ (1992). pp. 32-60.

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