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Le développement des capacités de catégorisation des expressions faciales émotionnelles chez les enfants de 4 à 10 ans

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Le développement des capacités de catégorisation des expressions faciales émotionnelles chez les enfants de 4 à 10 ans

CHANSON, Magali

Abstract

La présente étude évalue le développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles, en faisant varier le degré d'intensité des stimuli et la valence des distracteurs. Notre tâche informatisée comprend deux conditions : un appariement label-visage et un appariement visage-visage. Notre échantillon se compose de 62 enfants de trois groupes d'âge : 15 enfants de 4-5 ans (5 filles, 10 garçons ; M = 58.7 mois, ET = 3.97) ; 28 enfants de 7 ans (13 filles, 15 garçons ; M = 83.9 mois, ET = 6.75) et 19 enfants de 9-10 ans (10 filles, 9 garçons ; M = 116.7 mois, ET = 3.81). Il ressort des résultats principaux que les compétences de catégorisation s'améliorent avec l'âge et qu'elles sont plus élevées quand la valence des distracteurs est différente. Aussi, un effet de supériorité du label a été trouvé chez les enfants de 4-5 ans, ce qui est conforme aux données existantes, alors qu'un effet de supériorité du visage a été trouvé chez les 9-10 ans, ce qui est un fait nouveau dans la littérature.

CHANSON, Magali. Le développement des capacités de catégorisation des

expressions faciales émotionnelles chez les enfants de 4 à 10 ans. Master : Univ.

Genève, 2014

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41339

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MEMOIRE REALISE EN VUE DE L’OBTENTION DE LA MAITRISE UNIVERSITAIRE EN PSYCHOLOGIE

ORIENTATIONS PSYCHOLOGIE CLINIQUE PSYCHOLOGIE DEVELOPPEMENTALE

PAR Magali Chanson

DIRECTEUR DU MEMOIRE Edouard Gentaz

JURY

David Sander Fleur Lejeune

Anne Theurel GENEVE, AOUT 2014

UNIVERSITE DE GENEVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'EDUCATION SECTION PSYCHOLOGIE

LE DEVELOPPEMENT DES CAPACITES DE CATEGORISATION DES EXPRESSIONS FACIALES EMOTIONNELLES CHEZ LES ENFANTS DE 4 à 10 ANS

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La présente étude évalue le développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles, en faisant varier le degré d’intensité des stimuli et la valence des distracteurs. Notre tâche informatisée comprend deux conditions : un appariement label-visage et un appariement visage-visage. Notre échantillon se compose de 62 enfants de trois groupes d’âge : 15 enfants de 4-5 ans (5 filles, 10 garçons ; M = 58.7 mois, ET = 3.97) ; 28 enfants de 7 ans (13 filles, 15 garçons ; M = 83.9 mois, ET = 6.75) et 19 enfants de 9-10 ans (10 filles, 9 garçons ; M = 116.7 mois, ET = 3.81). Il ressort des résultats principaux que les compétences de catégorisation s’améliorent avec l’âge et qu’elles sont plus élevées quand la valence des distracteurs est différente. Aussi, un effet de supériorité du label a été trouvé chez les enfants de 4-5 ans, ce qui est conforme aux données existantes, alors qu’un effet de supériorité du visage a été trouvé chez les 9-10 ans, ce qui est un fait nouveau dans la littérature.

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Je tiens à remercier le directeur de la présente recherche, le Professeur Edouard Gentaz, et tout particulièrement son assistante Anne Theurel, pour leur accompagnement et leur disponibilité durant ces deux années de travail. Je remercie également la directrice de l’école en Sauvy, Madame Wanda Caron, de nous avoir accueillis dans leurs locaux, ainsi que les enseignants qui ont accepté que leurs élèves participent à notre recherche, Madame Deborah Moesching, Madame Dominique Chabbey-Ligier, Madame Francine Deriaz et Monsieur Loic Vagneux. Un grand merci aussi à tous les enfants pour avoir participé de manière appliquée et enthousiaste à cette recherche. Enfin, je remercie ma collègue Carole Salzard avec qui la collaboration a été très agréable et enrichissante.

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1. Introduction théorique ... 1

1.1. Théories sur le développement de la reconnaissance des émotions ...1

1.1.1. Théorie des émotions discrètes ...1

1.1.2. Approche dimensionnelle ...2

1.1.3. Modèle hiérarchique des émotions ...3

1.1.4. Concept du script...4

1.2. Développement des performances de reconnaissance des émotions de base avec l’âge ...4

1.2.1. De la naissance à 2 ans ...4

1.2.2. A l’âge préscolaire ...5

1.2.3. A l’âge scolaire ...6

1.2.4. Chez les adultes ...8

1.3. Facteurs impliqués dans la reconnaissance des émotions ...9

1.3.1. Facteurs personnels ...9

1.3.2. Rôle de l’intensité ...9

1.3.3. Nature de la tâche ... 10

1.4. Effet de supériorité du label ... 11

1.5. Présente étude : objectifs et hypothèses ... 13

2. Méthode ... 14

2.1. Participants ... 14

2.2. Matériel et procédure ... 14

3. Résultats ... 18

3.1. Analyses générales ... 18

3.2. Analyses en fonction des émotions ... 19

3.3. Analyses descriptives des erreurs ... 20

4. Discussion et conclusion ... 25

5. Références bibliographiques ... 33

6. Annexes ... 40

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1. Introduction théorique

La manière dont les enfants comprennent les émotions et les expressions faciales, et comment cette compréhension évolue au cours du développement, sont des questions qui ne sont pas encore totalement élucidées. Pourtant, elles requièrent l’attention de nombreux chercheurs, tant la reconnaissance des expressions faciales émotionnelles d’autrui a une importance particulière dans la vie quotidienne. D’ailleurs, les expressions faciales sont l’un des outils non verbaux ayant un rôle majeur dans la communication émotionnelle (Vieillard &

Guidetti, 2009), et elles constituent une source importante d’information sociale (Gao &

Maurer, 2009). À titre d’exemple, la régulation du comportement social des enfants repose notamment sur leur aptitude à interpréter les signaux émotionnels émis par leurs proches.

Ainsi, le visage joue un rôle prépondérant dans la communication émotionnelle (Gosselin, 2005).

La présente étude s’intéresse à ces questions fondamentales. Plus spécifiquement, il s’agit de préciser le développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles chez les enfants de 4 à 10 ans. Nous commencerons par aborder les principales théories sur le développement de la reconnaissance des émotions. Ensuite, nous présenterons l’état actuel de la littérature sur le développement des performances de reconnaissance des émotions de base, de la naissance à l’âge adulte, en mentionnant les différents facteurs impliqués dans la reconnaissance. Après, nous aborderons les diverses études sur l’effet de supériorité du label, que nous définirons également ultérieurement. Puis, nous exposerons les objectifs de la présente étude ainsi que nos hypothèses. Par la suite, nous expliquerons notre méthode et les résultats obtenus, que nous discuterons à la lumière de la littérature scientifique existante sur le sujet.

1.1. Théories sur le développement de la reconnaissance des émotions

Il existe actuellement deux approches dominantes concernant le développement de la reconnaissance des émotions chez les enfants : la théorie des émotions discrètes (Ekman, 1992b; Izard, 1971, 1994) et l’approche dimensionnelle (Russell, 1980, 1997).

1.1.1. Théorie des émotions discrètes

Rappelons que cette théorie postule l’existence de six émotions nommées « basiques » ou « discrètes » par Ekman (1982). Il s’agit de la joie, de la tristesse, de la colère, de la peur, de la surprise et du dégoût. Selon cette théorie, elles correspondent à un nombre limité de catégories d’émotions innées et universelles à partir desquelles toutes les autres émotions

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peuvent être dérivées (Ekman, 1982; Izard, 1997). En outre, concernant le nombre d’émotions de base, il n’existe pas de consensus dans la littérature scientifique (Ekman, 1992a; Izard, 1977; Plutchik, 1980). En ce qui concerne le développement de la reconnaissance des émotions, la théorie des émotions discrètes postule que ce développement repose chez l’enfant, comme chez l’adulte, sur la capacité à catégoriser les émotions de base par l’expression faciale. Ainsi, les enfants reconnaîtraient et réagiraient déjà à différentes émotions discrètes et spécifiques véhiculées par les expressions faciales (Ekman, 1992b; Izard, 1971, 1994). A titre d’exemple, le sourire signifierait la joie ou un visage renfrogné serait interprété comme de la colère (Widen, 2013).

1.1.2. Approche dimensionnelle

Russell (1997) rejette l’idée que les expressions faciales correspondent à des émotions spécifiques et il renoue avec l’approche dimensionnelle des expressions faciales, proposée pour la première fois par Wundt (1874). Selon cet auteur, toutes les émotions peuvent être décrites à partir de plusieurs dimensions. Concernant le développement de la reconnaissance des émotions, selon l’approche dimensionnelle de Russell (1980), les enfants ne classeraient pas les expressions faciales directement dans des catégories d’émotions spécifiques, ils commenceraient au contraire par un traitement dimensionnel. En effet, ils catégoriseraient les expressions faciales selon une dimension de plaisir/déplaisir (si l’émetteur montre une émotion agréable ou désagréable), puis prendraient en compte le niveau d’activation (si l’émetteur est agité ou détendu). Les enfants parviendraient alors seulement plus tard à une catégorisation en émotion plus spécifique comme les adultes. Cette catégorisation selon ces deux dimensions relève du modèle circulaire de Russell (Figure 1). Selon ce modèle, l’espace affectif peut être représenté par un cercle dans un espace bidimensionnel, composé d’une dimension de valence, qui va du déplaisir au plaisir, et du niveau d’activation (arousal), qui va d’un niveau bas à élevé, soit de l’endormissement à l’éveil (Sander & Scherer, 2009).

Figure 1. Modèle circulaire de Russell (1980)

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Ainsi, ces deux approches dominantes ont un avis divergent concernant l’information véhiculée par les expressions faciales. Pour la théorie des émotions discrètes, il s’agit des émotions spécifiques, alors que pour l’approche dimensionnelle, il s’agit des dimensions affectives. Toutefois, ces approches s’accordent sur le fait que l’information affective est directement lue par la personne à travers un processus relativement indépendant du contexte (Aviezer et al., 2008). Précisons à ce sujet que, selon Russell, suite à l’évaluation automatique du taux de plaisir et du niveau d’activation, la catégorisation émotionnelle qui est subséquente est influencée par les informations contextuelles (Sander & Scherer, 2009).

1.1.3. Modèle hiérarchique des émotions

Récemment, Widen et Russell (2008a) ont élaboré un nouveau modèle qui complète la compréhension du développement de la reconnaissance des émotions chez les enfants : le modèle hiérarchique des émotions (Figure 2). Selon ce modèle, il existe trois niveaux d’émotions : un rang supérieur comprenant les catégories larges, soit « plaisir », « neutre » et

« déplaisir », un rang de base avec les six émotions basiques ; un rang inférieur comprenant d’autres émotions, subdivisées à partir des précédentes.

Figure 2. Modèle hiérarchique des émotions de Widen et Russell (2008a)

Ce modèle est interprété différemment selon les deux approches dominantes précitées.

Selon la théorie des émotions discrètes, les enfants commenceraient au milieu par la compréhension des six émotions de base. Puis, plus tard, ils comprendraient que ces émotions peuvent être regroupées ensemble selon leur valence et leur niveau d’activation et également qu’elles peuvent être subdivisées pour donner naissance à de nouvelles émotions. Selon l’approche dimensionnelle, la compréhension des émotions chez les enfants commencerait au niveau supérieur, ce qui est conforme avec le modèle circulaire de Russell, et s’affinerait par la suite. Conformément à cette approche, il apparaît que les enfants de 2 ans comprendraient les émotions en termes des dimensions de plaisir et du niveau d’activation, et parviendraient

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ensuite à différencier parmi les catégories larges et à acquérir les concepts des émotions.

Toutefois, les catégories mentales des émotions ne seraient pas achevées, pour cela la construction d’un script est nécessaire (Widen & Russell, 2008a).

1.1.4. Concept du script

Selon Widen et Russell (2010a), chaque émotion comporte un script, lequel inclut l’événement déclencheur, le sentiment conscient, l’expression faciale, la vocalisation, l’action et la manifestation physiologique qui sont propres à l’émotion, le tout dans un ordre temporel et causal particulier. Toutes ces informations disponibles dans le contexte seraient utilisées par les enfants pour attribuer une émotion à une expression faciale (Widen, 2013).

L’évolution développementale de la formation des scripts est également soumise au débat entre les deux théories dominantes. D’une part, selon la théorie des émotions discrètes, la compréhension du lien entre l’émotion et l’expression faciale correspondante permettrait de construire le script en y ajoutant les informations nécessaires, telles que les causes ou les conséquences de l’émotion. D’autre part, en accord avec l’approche dimensionnelle, le script serait construit à travers la différenciation des émotions. En effet, l’enfant pourrait notamment remarquer les différentes manifestations physiologiques ou expressions faciales découlant d’un état de colère ou de peur et parviendrait alors à différencier ces émotions négatives en deux catégories distinctes et à utiliser un label différent pour les décrire (Widen & Russell, 2010a). Un label constitue le terme qui correspond à l’émotion, « triste » par exemple.

1.2. Développement des performances de reconnaissance des émotions de base avec l’âge 1.2.1. De la naissance à 2 ans

Si certaines expressions sont universelles et ne sont pas le produit d’un apprentissage culturel par imitation comme le suggère Ekman, elles pourraient être perçues et interprétées dès le début de la vie (Bayet, Pascalis, & Gentaz, 2014). Par exemple, chez les nouveau-nés déjà, entre le premier et le quatrième jour, les nourrissons regardent plus longtemps un visage joyeux qu’un visage qui a peur, indiquant ainsi leur préférence et le fait qu’ils arrivent à distinguer ces deux émotions (Farroni, Menon, Rigato, & Johnson, 2007). Cette préférence pour les visages souriants persiste dans les premiers mois (Rochat, Striano, & Blatt, 2002) même si celle-ci n’est pas systématiquement rapportée (Field, Pickens, Fox, Gonzalez, &

Nawrocki, 1998). Par ailleurs, les nourrissons ont, dès les premiers mois, la capacité de discriminer les sourires de plusieurs autres expressions comme la surprise (Young-Browne, Rosenfeld, & Horowitz, 1977), le froncement de sourcils (Barrera & Maurer, 1981), la

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tristesse autour de 3 mois (Montague & Walker-Andrews, 2002), puis la peur autour de 5 mois (Bornstein & Arterberry, 2003).) Une étude rapporte également la discrimination d’expressions de colère, de peur et de surprise par des nourrissons d’environ 5 mois (Serrano, Iglesias, & Loeches, 1992). Entre 6 et 8 mois, la discrimination entre la joie et les autres émotions devient plus claire et catégorielle. Puis, à partir de la première année, l’enfant parvient à décoder l’expression émotionnelle d’autrui et à agir en fonction, ce qui se nomme le référencement social (Bayet et al., 2014). Ainsi, comme cela a été montré avec le paradigme de la falaise visuelle, le nouveau-né parvient à moduler son action selon l’expression de sa mère, si elle montre de la peur ou de la joie (Sorce, Emde, Campos, &

Kinnert, 1985). De ce fait, il serait capable de donner une signification positive à l’expression de joie et une négative à l’expression de peur, mais cela ne permet pas de conclure que le nourrisson donne une signification spécifique à chacune des expressions faciales (Gosselin, 2005). En effet, la nature précise du sens que l’enfant donne aux expressions faciales entre 10 et 24 mois reste une question ouverte (Widen & Russell, 2008a).

1.2.2. A l’âge préscolaire

Comme précédemment cité, les enfants de 2 ans comprennent les émotions d’autrui en termes des dimensions larges de plaisir et du niveau d’activation. Cet âge est particulièrement important pour saisir la séquence développementale de la compréhension des émotions, étant donné que les enfants commencent à parler (Widen & Russell, 2008a). En effet, entre 24 et 36 mois, l’enfant ajoute les labels émotionnels « content », « triste », « fâché » et « effrayé » à son vocabulaire (Ridgeway, Waters, & Kuczaj, 1985). Ainsi, il apparaît qu’à cet âge les enfants sont capables de faire référence à leurs propres émotions et également de parler de celles d’autrui (Wellman, Harris, Banerjee, & Sinclair, 1995). En outre, la compréhension des émotions est en lien avec le développement de la théorie de l’esprit (Lagattuta & Wellman, 2001; Rieffe, Meerum Terwogt, & Cowan, 2005).

Pour les enfants de 3 à 5 ans, cinq hypothèses sont avancées par Widen et Russell (2008a). Celles-ci constituent le « modèle de la différenciation » de la compréhension des émotions, lequel tente d’expliquer l’acquisition des concepts des émotions (Widen & Russell, 2003). La première hypothèse stipule que les dimensions de valence et d’arousal continuent à être importantes durant cette tranche d’âge (Widen & Russell, 2008a). En effet, il apparaît que les erreurs sont fortement influencées par la valence (Bullock & Russell, 1984, 1985; Russell

& Widen, 2002a; Widen & Russell, 2003, 2008b). La seconde hypothèse postule que l’enfant utilise les labels émotionnels à des fréquences différentes, notamment pour juger des visages,

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même quand le nombre de stimuli présentés est équitable (Widen & Russell, 2008a). L’ordre le plus typique est le suivant : la joie, la tristesse, la colère, la peur, la surprise et enfin le dégoût (Gosselin & Simard, 1999; Izard, 1994; Widen & Russell, 2003). Cela peut être interprété de deux manières : d’une part, certaines expressions faciales émotionnelles (par exemple de joie, de tristesse ou de colère) seraient plus faciles à reconnaître que d’autres expressions ; d’autre part, les enfants pourraient manquer de certains mots dans leur vocabulaire. Selon la troisième hypothèse, les catégories d’émotions apparaissent dans un ordre systématique, comme c’est le cas pour les labels (Widen & Russell, 2008a). Ainsi, selon Widen et Russell (2003), les labels émergent dans cet ordre dans plus de 81% des cas : la joie, suivie de la tristesse ou de la colère. Ensuite, survient la surprise ou la peur, puis en dernière position le dégoût. La quatrième hypothèse de Widen et Russell (2008a) stipule que les catégories d’émotions sont larges au départ, et qu’elles deviennent plus étroites par la suite.

En effet, à l’âge de 2 ans, la catégorie de la colère englobe toutes les émotions négatives. Plus tard, les enfants continuent à utiliser le label de la colère pour la colère mais commencent à utiliser celui de la tristesse et de la peur pour les expressions faciales correspondantes. De ce fait, selon Widen et Russell (2003), le développement du vocabulaire traduirait une augmentation du nombre de catégories émotionnelles construites par l’enfant ainsi qu’une diminution du domaine d’application de chacune. D’après ces auteurs (2008a), le resserrement des catégories d’émotions serait en lien avec l’usage de la dimension de l’arousalpour différencier les émotions négatives entre elles. La cinquième hypothèse postule que les enfants forment un script pour chaque catégorie d’émotion, ce qui implique la connaissance de la séquence des événements, comme les causes et les conséquences notamment. Cependant, le fait que l’enfant associe un label à une expression faciale n’implique pas que l’enfant ait cette connaissance de la séquence des événements relative à l’émotion.

1.2.3. A l’âge scolaire

Le mode d’évaluation des émotions le plus utilisé chez les enfants se fait à travers la reconnaissance des expressions faciales, et les enfants y sont sensibles dès le plus jeune âge (Brun, 2001). Dans l’ensemble, l’amélioration dans le développement de la reconnaissance des émotions peut être caractérisée par une augmentation entre 3 et 7 ans (Camras & Allison, 1985; Durand, Gallay, Seigneuric, Robichon, & Baudoin, 2007; Vicari, Reilly, Pasqualetti, Vizzotto, & Caltagirone, 2000), suivie par une amélioration plus forte entre 7 et 10 ans. Ainsi,

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la précision dans le traitement des visages augmenterait fortement durant cette période d’âge (De Sonneville et al., 2002).

Le pattern de développement diffère selon les émotions. Il apparaît que la joie et la tristesse sont correctement classifiées de manière plus précoce que la peur et le dégoût (Boyatzis, Chazan, & Ting, 1993; Camras & Allison, 1985; Gosselin, 1995, 2005; Gosselin &

Larocque, 2000). Quant à la colère, le pattern développemental est moins clair (Durand et al., 2007). En effet, des résultats indiquent un pattern similaire que la joie et la tristesse (Gosselin, 1995) et d’autres montrent qu’elle est moins correctement classifiée que ces deux dernières, mais également moins que la peur et le dégoût (Boyatzis et al., 1993). Malgré ces divergences, il apparait que la première émotion reconnue et de manière plus précise est la joie, suivie de la tristesse, tandis que le pattern est moins clair pour la colère, la peur, la surprise et le dégoût (Boyatzis & al., 1993; Camras & Allison, 1985; Durand et al., 2007; Gosselin, 1995, 2005;

Vicari et al., 2000).

Le fait que la joie se démarque des autres émotions peut être expliqué de diverses façons. Selon Vicari et al. (2000), la partie inférieure du visage, soit le sourire, est suffisante pour identifier la joie alors que les autres émotions, telles que la peur, la colère et la tristesse, requièrent une combinaison des parties inférieures et supérieures du visage. Pour De Sonneville et al. (2002), dans la reconnaissance des émotions, il n’y a pas d’autres émotions positives avec lesquelles la joie pourrait être en compétition. Enfin, Batty et Taylor (2006) relèvent que le visage joyeux est le plus fréquemment vu par les enfants, et par conséquent c’est le visage le plus familier et le plus facile à traiter pour eux.

Concernant l’âge où les enfants reconnaissent les différentes émotions, les résultats obtenus par Gao et Maurer (2009) montrent que les enfants sont capables dès l’âge de 5 ans de reconnaître une expression faciale joyeuse. Pour la tristesse, les enfants arrivent à juger que c’est un visage expressif et non neutre, mais ils la confondent avec la peur jusqu’à l’âge de 10 ans. Dans l’étude de Durand et al. (2007), les enfants reconnaissent les expressions de joie et de tristesse dès l’âge de 5-6 ans, avec des performances proches de celles des adultes. Pour les autres émotions, elles sont reconnues plus tard : la peur dès l’âge de 7 ans, la colère dès 9 ans et le dégoût dès 11 ans. En outre, Vieillard et Guidetti (2009) rappellent que les études utilisent une méthodologie différente, ce qui a une influence sur les résultats qui en découlent.

Cependant, il y a un consensus concernant le fait que la reconnaissance des expressions émotionnelles n’émerge pas comme un lot complet et que le pattern développemental n’est pas uniforme pour toutes les émotions. Ainsi, chez les enfants, la capacité à percevoir les différentes expressions faciales se développerait effectivement tôt, tandis que la capacité à

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reconnaître l’émotion en tant que telle suivrait un chemin développemental long, de 3 à 10 ans selon l’émotion, comme nous l’avons illustré à travers diverses études (Camras & Allison, 1985; De Sonnerville et al., 2002; Durand et al., 2007; Gosselin, 1995, 2005; Vicari et al., 2000).

1.2.4. Chez les adultes

Comme nous l’avons vu, malgré les capacités des enfants à reconnaître les expressions faciales de différentes émotions, leur jugement reste moins précis que pour les adultes (Durand et al., 2007). En outre, à travers l’âge, la joie reste l’émotion qui est la plus facilement reconnue (Ekman & Friesen, 1971, 1986). Parmi les émotions négatives, il apparaît que la tristesse est la plus identifiée, suivie de la peur et enfin du dégoût et de la colère dans les mêmes proportions (Ekman & Friesen, 1986). Par ailleurs, ces auteurs (1971) ont montré que des adultes appartenant à des cultures différentes, même des peuples n’utilisant pas l’écriture et n’ayant pas été influencés par la télévision ou le cinéma, étaient capables de reconnaître sur des visages photographiés les expressions faciales des six émotions de base. Ces résultats tendraient à prouver l’universalité des émotions, universalité qui avait été auparavant remarquée par Darwin (1877). Dans la lignée de ces résultats et conformément à la théorie des émotions discrètes (Ekman, 1992b; Izard, 1971, 1994), il apparaîtrait que les adultes classent directement les expressions faciales émotionnelles dans des catégories d’émotions spécifiques. Pourtant, certaines données indiquent que les adultes traitent les émotions en termes de valence plaisir/déplaisir (Bullock & Russell, 1984, 1985).

De plus, il apparait que pour attribuer une émotion à une expression faciale, les adultes se servent de l’information disponible dans le contexte (Aviezer et al., 2008; Hassin, Aviezer, &

Bentin, 2013). De ce fait, un même visage peut être interprété comme exprimant une variété d’émotions dans des contextes différents (Aviezer & al., 2008; Carroll & Russell, 1996).

Malgré le fait qu’il existe des résultats contradictoires dans la littérature (Nakamura, Buck, &

Kenny, 1990), il y a raison de penser que l’interaction entre les expressions faciales et leur contexte serait un facteur déterminant dans la perception des émotions (Trope, 1986). En outre, des études montrent que les différentes expressions d’une même émotion ne sont pas toutes reconnues avec la même exactitude par les adultes (Gosselin & Kirouac, 1995; Wiggers, 1982). De ce fait, le profil évolutif de la reconnaissance des expressions faciales n’est pas homogène (Gosselin, Roberge, & Lavallée, 1995).

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1.3. Facteurs impliqués dans la reconnaissance des émotions 1.3.1. Facteurs personnels

Comme nous l’avons mentionné, les études portant sur le développement de la reconnaissance des émotions chez les enfants utilisent des tâches et des stimuli différents, ce qui peut avoir un impact sur les résultats. Par ailleurs, il faut noter qu’il existe des facteurs propres à l’enfant qui peuvent influencer sa compréhension des émotions. Par exemple, les caractéristiques individuelles et familiales, dont notamment les habiletés langagières et la qualité des relations sociales avec les pairs et les adultes, jouent un rôle important (Pons &

Harris, 2005). Ainsi, le langage exerce une influence sur la compréhension des émotions (Lindquist, Barrett, Bliss-Moreau, & Russell, 2006). Dans l’étude de Pons, Lawson, Harris et de Rosnay (2003), l’âge et les habiletés langagières expliquent ensemble 72% de la variance de la compréhension des émotions, dont 27% est expliqué par les habiletés langagières uniquement. D’autres études se sont également intéressées au lien entre le développement cognitif et langagier des enfants et la compréhension des émotions (Blair, 2002; Spackman, 2006). Il apparaît que les enfants présentant un trouble du langage ont davantage de difficulté à comprendre les émotions (Spackman, 2006). En outre, il existe des différences parmi les enfants dans la reconnaissance et la compréhension des émotions (Pons & Harris, 2005).

Selon de récentes études, les différences interindividuelles s’observent déjà à l’âge de 3 ans où il y a une grande variance dans le nombre de paroles produites contenant des références aux émotions (Dunn, Brown, & Beardsall, 1991). Des différences peuvent rester marquées à la fin de l’enfance : des enfants de 4-5 ans ont une meilleure compréhension des émotions que des enfants de 10-11 ans (Pons et al., 2003).

1.3.2. Rôle de l’intensité

En ce qui concerne les stimuli, les études précédemment citées ont utilisé des expressions émotionnelles d’une intensité unique, soit une intensité forte. Ces études montrent que les enfants sont précis dans le jugement des expressions intenses dès l’âge de 7 ans approximativement, la joie étant la première à être reconnue à l’âge de 5 ans. Cependant, dans la vie quotidienne, nous voyons davantage d’expressions émotionnelles de faible intensité que de forte intensité (Gao & Maurer, 2009). Ainsi, ces auteurs soulignent l’importance d’étudier la capacité des enfants à reconnaître celles de plus faible intensité. Par ailleurs, Montirosso, Peverelli, Frigerio, Crespi et Borgatti (2010) rappellent que l’intérêt a été porté sur l’identification catégorique des expressions faciales des émotions, et de ce fait on en sait peu sur le rôle que joue l’intensité lors de la reconnaissance des émotions ni comment ses effets

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changent avec le développement. Les auteurs ajoutent que les expressions faciales sont affichées de façon dynamique sur le visage, et qu’elles peuvent varier en intensité et en vitesse. Ainsi, dans la vie réelle, le fait qu’elles soient affichées selon différentes intensités suggère que le décodage des expressions émotionnelles ne peut pas suivre la règle du tout ou rien et que les individus sont sensibles à ces variations (Calder et al., 2000). De plus, l’intensité sert d’indice pour évaluer l’état émotionnel des personnes (Ekman, Friesen, &

Ancoli, 1980). Par conséquent, la bonne interprétation de l'intensité des expressions faciales permet un meilleur ajustement de son propre comportement en fonction de celui d’autrui (Gosselin & Pelissier, 1996). En outre, la capacité à reconnaitre les expressions faciales moins intenses joue également un rôle dans les interactions sociales (Gao & Maurer, 2009). En 2006, Herba, Landau, Russell, Ecker et Phillips (2006) ont étudié la catégorisation des expressions faciales via l’appariement de visages, chez des enfants de 4 à 15 ans, en faisant varier l’intensité des expressions faciales sur quatre niveaux, de 25% à 100%. Les résultats montrent un effet d’âge et un effet de l’intensité, soit que l’appariement est d’autant plus correct que les émotions ont un haut niveau d’intensité, et ce particulièrement pour les émotions de joie et de peur. Les résultats obtenus par Gao et Maurer (2009, 2010) relèvent également un effet de l’intensité ainsi que différentes trajectoires développementales concernant la sensibilité aux expressions faciales émotionnelles.

1.3.3. Nature de la tâche

Différentes tâches sont utilisées afin d’évaluer la reconnaissance des émotions. Il peut s’agir de tâches de labellisation (Widen & Russell, 2003), de catégorisation (Russell & Widen, 2002a; Widen & Russell, 2008b) ou d’appariement avec une expression faciale (Bullock &

Russell, 1984, 1985; Camras & Allison, 1985). D’ailleurs, il est possible que les variations de résultats entre les études soient partiellement dues aux demandes de la tâche et/ou au type de réponse requise par les participants (Bruce et al., 2000). Par exemple, une procédure d’appariement demande plus de capacités visuelles et spatiales (Herba et al., 2006) et nécessite peu de vocabulaire spécifique ; la production spontanée de mots correspondants aux expressions émotionnelles requiert un vocabulaire adapté et une mémoire suffisante ; la reconnaissance des labels demande une compréhension de ceux-ci, sans dépendre de capacités de rappel. Aussi, la méthode du choix forcé, au contraire de la production spontanée de labels, minimise les demandes verbales tout en fournissant la preuve de la reconnaissance des émotions sur la base de catégories (Camras & Allison, 1985).

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1.4. Effet de supériorité du label

Nous avons vu que les résultats des différentes études précitées sont variables selon l’intensité des expressions faciales, la nature de la tâche et les modalités de réponse, ce qui remet en question la théorie des émotions discrètes. En effet, nous voyons à travers ces études que les compétences dans la reconnaissance des émotions se développent graduellement, et que ces dernières sont d’abord traitées selon la dimension plaisir/déplaisir, ce qui soutient le modèle circulaire de Russell (1980). L’expression faciale ne serait ainsi pas l’indice le plus puissant. Plusieurs études (Camras & Allison, 1985; Russell, 1990; Russell & Widen 2002a, 2002b; Widen & Russell, 2003, 2004, 2008b) vont dans ce sens.

Dans l’étude de Camras et Allison (1985), les enfants avaient pour tâche d’apparier un label ou une expression faciale à un scénario émotionnel des six émotions de base. Les résultats montrent un effet significatif de la condition : de meilleures performances sont observées dans l’appariement avec un label plutôt qu’avec un visage. Tout âge confondu, l’effet de supériorité du label par rapport au visage ressort pour la joie (94% contre 98%), la surprise (89% contre 88%), la colère (91% contre 87%), la tristesse (97% contre 95%), la peur (91% contre 80%) ainsi que pour le dégoût (78% contre 69%), mais il n’est que significatif pour ces deux dernières émotions.

Dans l’étude de Russell et Widen (2002a), la tâche était de mettre des expressions faciales émotionnelles dans une boîte représentant physiquement la catégorie de l’émotion, laquelle était dénommée par un label ou par un visage. Des résultats similaires à ceux de Camras et Allison s’observent pour les enfants âgés de 2 à 7 ans et dans les trois catégories d’émotions examinées, qui sont la joie, la colère et la tristesse. Ainsi, le taux d’appariement correct pour les émotions de joie et de colère était significativement plus élevé lorsqu’elles étaient dénommées par un label (97%) que par un visage (86%). Cet avantage du label est nommé Label superiority effect, en opposition au Face superiority effect. L’analyse des erreurs indiqueque les enfants font davantage d’erreurs lorsque les émotions sont de même valence. A titre d’exemple, l’erreur la plus fréquente était d’inclure les émotions de dégoût (79%), de peur (48%) et de tristesse (26%) dans la boîte de la colère, alors que la joie n’y était que rarement intégrée (2%). Cette analyse confirme le modèle circulaire des émotions de Russell (1980), soit que les émotions sont d’abord traitées selon la dimension plaisir/déplaisir.

En 2004, l’étude de Widen et Russell a montré que ce sont la conséquence comportementale (pour les enfants de 3 ans) et le label (pour les enfants de 4 ans) qui sont les indices les plus forts, et non pas l’expression faciale. L’effet de supériorité du label était élevé pour les émotions de peur et de dégoût, faible pour la tristesse et absent pour la colère. La

(17)

supériorité du label pour la peur et le dégoût a été observé dans d’autres études (Camras &

Allison, 1985; Russell, 1990; Russell & Widen, 2002b).

Plus récemment, dans l’étude de Widen et Russell (2008b), les enfants devaient nommer des émotions représentées sur des visages puis effectuer une tâche de classification consistant à mettre dans une boîte tous les visages correspondant à un label. Les résultats mettent en évidence que, de manière significative, les enfants confondent principalement les émotions de même valence, et notamment l’émotion de dégoût avec la colère. Conformément au modèle de la différenciation de la compréhension des émotions, les résultats obtenus montrent que les enfants de 2 à 5 ans catégorisent d’abord les émotions selon leur valence et différencient les émotions déplaisantes ou plaisantes entre elles ultérieurement, ce qui va dans le même sens que les études précitées (Bullock & Russell, 1984, 1985; Russell & Widen, 2002a; Widen & Russell, 2003, 2008b). De plus, les résultats indiquent que les labels apparaissent dans l’ordre particulier qui a été énoncé antérieurement, que les enfants utilisent davantage certains labels, soit dans cette étude la colère, la joie et après la tristesse, et que les catégories d’émotions sont larges au départ et qu’elles deviennent plus étroites par la suite (Widen & Russell, 2008b). En outre, ces auteurs précisent que les premières catégories, soit la joie, la colère et la tristesse, sont initialement plus larges que celles qui émergent plus tard, soit la peur, la surprise et le dégoût. Dans cette étude, Widen et Russell ont effectué une analyse intra-sujet qui compare le niveau du lexique et celui de la classification, et ont trouvé un lien significatif entre les deux. Par exemple, les enfants qui parvenaient à utiliser le terme

« content » ne mélangeaient pas les visages de joie et de colère.

Ainsi, ces études (Camras & Allison, 1985; Russell & Widen, 2002a, 2002b; Widen &

Russell, 2003, 2004, 2008b) contestent l’hypothèse selon laquelle ce sont les expressions faciales qui constituent l’indice le plus fort. Alors que les résultats précités appuient l’idée que le label est le plus puissant, étant donné qu’il apparait à travers différents contextes, Widen et Russell (2010a) rappellent qu’il n’y a pas d’indice privilégié. En effet, suivant l’âge ou l’émotion, un aspect du script, comme la cause, la conséquence ou le label de l’émotion, peut être l’indice le plus puissant. De plus, Russell et Widen (2004) n’abandonnent pas l’idée que les expressions faciales ont un rôle à jouer dans le développement de la compréhension des émotions chez les enfants, bien qu’il soit peut-être plus limité que ce qui avait pu autrefois être envisagé.

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1.5. Présente étude : objectifs et hypothèses

L’objectif général de notre recherche est de préciser le développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles chez les enfants âgés de 4 à 10 ans, à travers une tâche comprenant deux conditions (appariement label-visage et visage-visage), en faisant varier le degré d’intensité des stimuli (50% et 100%) et la valence des distracteurs (de même valence et de valence différente). Notre premier objectif est de vérifier l’existence de l’effet de supériorité du label à différents âges. Dans les études de Russell et Widen (2002a, 2002b; Widen & Russell, 2004, 2008b) portant sur ce sujet, les enfants étaient âgés de 2 ans jusqu’à 5 ou 7 ans. Il nous paraît ainsi essentiel de nous demander si cet effet perdure dans l’âge, étant donné qu’à notre connaissance cela n’a pas été étudié jusqu’à présent. Notre second objectif consiste à évaluer l’effet de la valence des distracteurs. Proposer des distracteurs de valence différente mais également de même valence nous permettra de nous informer sur les capacités des enfants à catégoriser les émotions discrètes au sein d’une même valence ou selon la dimension plaisir/déplaisir.

Nous émettons tout d’abord l’hypothèse que le taux d’appariement correct augmente avec l’âge, soit que les enfants plus âgés auront de meilleures performances que les plus jeunes. De plus, nous nous attendons à une interaction entre l’âge et la condition (label ou visage). Ainsi, l’effet de supériorité du label devrait être présent chez les enfants jusqu’à 7 ans, comme cela a été observé dans les études de Russell et Widen (2002a, 2002b; Widen &

Russell, 2004, 2008b). Concernant la valence des distracteurs, nous formulons l’hypothèse que le taux d’appariement correct est plus élevé lorsque les distracteurs sont de valence différente plutôt que de même valence, ce qui va dans le sens du modèle circulaire de Russell (1980) et d’études précédemment citées (Bullock & Russell, 1984, 1985; Russell & Widen, 2002a; Widen & Russell, 2003, 2008b).

Nous allons donc étudier conjointement plusieurs facteurs qui contribueraient au développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles.

Ainsi, nous pensons améliorer la compréhension de l’effet de supériorité du label, ce qui nous permettra d’évaluer si l’expression faciale devient l’indice le plus important à un âge supérieur à 7 ans ou lorsque la tâche est perceptivement plus compliquée, par exemple quand les distracteurs sont de même valence.

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2. Méthode 2.1. Participants

68 enfants scolarisés dans une école à Genève ont participé à notre étude. Six enfants ont été exclus de l’échantillon : cinq présentaient des performances d’appariement déviantes à plus de deux écarts-types de la moyenne ; un présentait un score à deux écarts-types de la moyenne au test de vocabulaire. L’échantillon final se compose de 62 enfants de trois groupes d’âge différents : 15 enfants de 4-5 ans (5 filles, 10 garçons ; M = 58.7 mois, ET = 3.97) ; 28 enfants de 7 ans (13 filles, 15 garçons ; M = 83.9 mois, ET = 6.75) et 19 enfants de 9-10 ans (10 filles, 9 garçons ; M = 116.7 mois, ET = 3.81). Certains enfants ne sont pas de langue maternelle française, mais tous ont de bonnes compétences en français. Ils ont tous été testés individuellement par une des deux expérimentatrices dans une salle calme de leur école. La présente étude a été conduite en accord avec le comité d’éthique de l’Université de Genève et avec le Département de l’Instruction Publique.

Afin de contrôler les aptitudes verbales des enfants, le sous-test vocabulaire de la batterie WPPSI-III (Wechsler, 2002) pour les enfants âgés de 4-5 ans et de la batterie WISC- IV (Wechsler, 2003) pour les enfants dès 7 ans leur a été administré individuellement avant la phase de test. Le score se situait dans la norme standard pour les enfants de 4-5 ans (M = 8.53, ET = 5.04), de 7 ans (M = 9.5, ET = 2.17) et de 9-10 ans (M = 9.74, ET = 2.49). Cette tâche de contrôle a pour but de s’assurer que les performances dans la reconnaissance des émotions ne sont pas dépendantes du niveau langagier des enfants.

2.2. Matériel et procédure

Avant la phase de test, les enfants ont réalisé un entraînement d’appariement avec des images d’animaux. L’enfant avait pour consigne de retrouver parmi un choix de trois animaux celui qui avait été présenté précédemment soit sous la modalité visuelle d’une image figurative (« Tu vas voir une image, puis tu vas voir 3 images, choisis celle qui ressemble le plus à la première image ») ; soit sous la modalité visuelle et auditive du mot correspondant à l’animal (« Tu vas voir et entendre un mot, puis tu vas voir 3 images, choisis celle qui ressemble le plus au mot que tu as entendu »). Chaque image a été choisie dans un panel trouvé sur Internet (Annexe I). L’expérimentateur s’assurait de la compréhension des enfants quant à la consigne et au déroulement avant de passer à la tâche principale.

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Lors de la phase de test, l’enfant devait réaliser un appariement d’images d’expressions faciales émotionnelles selon deux conditions. La première consiste en un appariement visage-visage ; la deuxième en un appariement label-visage.

Dans la première condition (Figure 3), une expression faciale émotionnelle apparaît à l’écran d’ordinateur pendant une durée de 3000 ms, suivie d’un écran réponse composé de trois expressions faciales émotionnelles. Dans cette condition, la tâche de l’enfant est d’apparier le visage qui ressent la même chose que le visage cible : « Tu vas voir 1 visage, puis tu vas voir 3 visages. Choisis celui qui se sent pareil, qui ressent la même chose que le premier visage ». Les expressions faciales émotionnelles ont été construites via le logiciel FACSGen (Roesch et al., 2010), lequel a été inspiré du « Facial Action Coding System » (FACS), technique de codification des expressions faciales mise au point par Ekman et Friesen (1978). Nous avons choisi dans le FACSGen l’image d’un visage masculin statique, prédéfini dans la base de données et qui correspond au visage 149. Quatre expressions émotionnelles, choisies parmi les expressions statiques du logiciel ont été présentées en visage cible : la peur (« fear 04 »), la colère (« anger 04 »), la tristesse (« sadness 01 ») et le dégoût (« disgust 01 »), à une intensité prédéfinie de 75% sur le logiciel (Annexe II). Le tableau 1 présente les unités d’action activées ainsi que leur intensité d’activation pour chaque émotion cible. Les émotions cibles sont toutes de valence négative.

L’écran réponse est composé de trois expressions faciales émotionnelles. Pour la moitié des items, le sujet a le choix entre l’expression faciale émotionnelle (EFE) cible, une EFE de valence positive (joie « SmileClosed », choisie parmi les expressions statiques du FACSGen à construire) et une EFE de valence négative (choix inter-valence). Pour l’autre moitié des items, le sujet a le choix entre l’EFE cible et deux EFE de valence négative (choix intra-valence). La position des EFE réponses et des EFE à choix a été randomisée au sein des sujets. Nous avons construit des images composées de trois visages selon une répartition alternée des EFE autour de la cible, de façon à ce qu’elles ne soient pas deux fois dans la même position. Ainsi, pour chaque cible, nous avons obtenu six positions d’EFE différentes.

Chaque EFE étant proposée une fois à une intensité de 50% et une fois à 100%, nous avons obtenu 12 conditions différentes par cible. De ce fait, pour la totalité des cibles, nous avons 48 possibilités de choix. Les images ont été construites sur Powerpoint. Chaque image mesure 650x302 pixels. Pour faire son choix, l’enfant devait appuyer sur la touche réponse correspondant à l’item choisi à l’aide des touches 1, 2 et 3 du clavier. L’écran réponse disparaissait automatiquement après la réponse du sujet.

(21)

Tableau 1

Unités d’action pour chaque émotion en fonction de l’intensité choisie.

UA Peur

50%

Peur 75%

Peur 100%

Tristesse 50%

Tristesse 75%

Tristesse 100%

(1+4)* 34.54 51.81 69.08

(1+2+4)* 50 75 100

(5) Upper lid raiser 35 52.5 70

(6) Cheek raiser 41.19 61.79 82.39

(11) Nasolabial deepener

18.07 27.11 36.15

(15) Lip corner depressor

15 22.5 30 27.48 41.22 54.97

(17) Chin raiser 24.86 37.29 49.73

(20) Lip stretcher 15 22.5 30

(26) Jaw drop 50 75 100 7.05 10.58 14.11

(27) Mouth stretcher 5 7.5 10

(53) Head up 2 3 4

*(1) Inner brow raiser (2) Outer brow raiser (4) Brow lowerer

Colère 50%

Colère 75%

Colère 100%

Dégoût 50%

Dégoût 75%

Dégoût 100%

(4)Brow lowerer 45.49 68.24 90.99

(7) Lids tightener 0.1 0.15 0.21

(9) Nose wrinkle 8.92 13.32 17.72 45.9 68.85 91.8

(15) Lip corner depressor

12.41 18.59 24.78 19.68 29.53 39.37

(16) Lower lip depressor

4.43 6.65 8.87

(25) Lips part 0.05 0.05 0.05 20.63 30.94 41.26

(38) Nostrils dilator 14.78 22.17 29.57

(PHNM)ee 26.07 39.11 52.15

Dans la deuxième condition expérimentale (Figure 3), l’enfant a pour consigne de choisir le visage parmi les trois qui correspond à l’émotion donnée par un label : « Tu vas voir et entendre un mot, puis tu vas voir 3 visages. Choisis celui qui se sent pareil, qui ressent la

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même chose que le mot que tu as entendu ». Dans cette condition, le mot écrit en Calibri, taille 96, correspond à l’une des quatre émotions cibles (peur, colère, tristesse et dégoût) et apparaît sur l’écran d’ordinateur à une dimension de 650x205 pixels, durant 3000 ms. Puis, un écran réponse composé de trois expressions faciales émotionnelles apparaît. La configuration de cet écran est identique à celle de la condition précédente.

Figure 3. Modalité de présentation pour la condition visage (à gauche) et pour la condition label (à droite).

Les deux conditions expérimentales étaient présentées par bloc via le logiciel E-Prime 2 (Schneider, Eschman, & Zuccolotto, 2002). Les deux conditions ont été contrebalancées afin de contrôler un éventuel effet de l’ordre des conditions. Pour chacun des trois groupes d’âge, la moitié des sujets débute par l’appariement label-visage et la seconde moitié commence par l’appariement visage-visage. Pour chaque condition, les 48 items apparaissent de façon aléatoire. La totalité de la tâche (les deux conditions) comprend 96 items pour chaque enfant. Nous avons également limité le temps d’exposition de la cible (label et visage) à 3000 ms. Toutefois, le temps de réponse n’a pas été limité ; ainsi l’item suivant apparaissait suite à la réponse de l’enfant.

A la fin de la phase test, nous avons posé quatre questions afin de contrôler le niveau de compréhension des émotions cibles de notre recherche, soit la peur, la tristesse, la colère et le dégoût. La question utilisée pour chaque émotion était : « Peux-tu me dire ce que c’est (la peur, la tristesse, la colère, le dégoût) ? Peux-tu me donner un exemple, une situation ? ».

Nous avons retranscrit les dires des enfants mot pour mot et nous avons procédé à un accord inter-juges en cotant les dires comme « compris » vs « non compris » (1-0). L’accord inter- juges a montré une fiabilité de 100% (Annexe III). La durée moyenne totale de l’expérience pour un enfant était d’environ 30 minutes.

3000 ms 3000 ms

(23)

3. Résultats

3.1. Analyses générales

Nous avons effectué une ANOVA à mesures répétées sur le taux d’appariement correct en considérant les facteurs condition (label, visage), intensité (faible, forte) et valence (intra, inter) comme des facteurs intra-sujet et le facteur âge (4-5, 7, 9-10 ans) comme un facteur inter-sujets.

Les résultats montrent un effet significatif de l’âge, F(2, 59) = 16.635, p < .001, η2

= .361. Le groupe des 4-5 ans (M = 69.8, ET = 5.3) obtient de moins bonnes performances que le groupe des 7 ans (M = 80.4, ET = 2.67), lequel en obtient de moins bonnes que le groupe des 9-10 ans (M = 87.6, ET = 3.89). De plus, cette variable explique 36% de la variance de notre variable dépendante.

Concernant l’intensité, l’effet est également significatif, F(1, 59) = 11.867, p < .001, η2

= .167. En effet, le taux d’appariement correct est plus élevé quand l’intensité est forte (100%) (M = 81.5, ET = 14.8) que lorsqu’elle est faible (50%) (M = 78.6, ET = 15.3).

Pour la valence, l’effet est aussi significatif, F(1, 59) = 6.749, p < .05, η2 = .103. Ainsi, le taux d’appariement est davantage correct quand les distracteurs sont de valence différente (M = 81.3, ET = 14.2) plutôt que de même valence (M = 78.8, ET = 15.9).

L’effet de la condition n’est pas significatif (F < 1).

Les résultats révèlent un effet d’interaction significatif entre la condition et l’âge sur le taux d’appariement correct, F(2, 59) = 4.134, p < .05, η2 = .123 (Annexe IV). En effet, on observe un effet de supériorité du label chez les enfants de 4-5 ans, et un effet de supériorité du visage chez les 9-10 ans. Toutefois, l’analyse post-hoc ne s’est pas révélée significative ; respectivement p =.165 et p = .815.

Les résultats révèlent également un effet d’interaction significatif entre l’âge, la condition et la valence, F(2, 59) = 4.673, p = < .05, η2 = .137 (Figure 4). Ainsi, l’analyse post- hoc montre que l’effet de la condition est d’autant plus marqué en intra-valence, chez les 4-5 ans dans le sens d’une supériorité du label (p < .01), et chez les 9-10 ans dans le sens d’une supériorité du visage (p < .05).

Nous avons également effectué une ANOVA à mesures répétées sur le taux d’appariement correct en reconsidérant les mêmes facteurs intra-sujet et comme facteur inter- sujets la note standard obtenue au test de vocabulaire. Les résultats ne montrent pas d’effet significatif du vocabulaire F(14, 47) = 1.4345, p = .175, η2 = .299. De plus, aucun effet

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d’interaction n’est significatif entre cette variable et les facteurs de la condition (F < 1), de l’intensité (F(14, 47) = 1.557, p = .128, η2 = .317) et de la valence (F < 1).

Figure 4. Taux d’appariement correct en fonction de l’âge selon la condition et la valence des distracteurs.

3.2. Analyses en fonction des émotions

Afin de préciser les compétences d’appariement pour chaque émotion, nous avons effectué une ANOVA à mesures répétées sur le taux d’appariement correct en considérant les facteurs émotion (peur, tristesse, colère, dégoût), condition (label, visage), intensité (faible, forte) et valence (intra, inter) comme des facteurs intra-sujet et le facteur âge (4-5, 7, 9-10 ans) comme un facteur inter-sujets.

Les résultats montrent un effet principal de l’émotion sur les capacités de catégorisation, F(3, 177) = 66.507, p < .001, η2 = .53. Ainsi, la variable émotion explique 53%

de la variance de nos données. En effet, tout âge confondu, on retrouve ce pattern de reconnaissance des émotions : la peur est la mieux reconnue (M = 88.8, ET = 4.81), suivie par la tristesse (M = 86.3, ET = 8.41), la colère (M = 79.1, ET = 2.08) et finalement le dégoût (M

= 62.9, ET = 13.3).

Les résultats révèlent également un effet d’interaction significatif entre l’émotion et l’âge, F(6, 177) = 2.578, p < .05, η2 = .08 (Annexe V). Ainsi, l’effet de l’émotion est modulé

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Valence intra

Valence inter

Valence intra

Valence inter

Valence intra

Valence inter

4-5 ans 7 ans 9-10 ans

Taux d'appariement correct (%)

Label Visage

(25)

par l’âge. Il apparaît que le taux d’appariement correct est plus élevé chez les enfants de 9-10 ans (M = 87.6, ET = 8.62) par rapport à ceux de 7 ans (M = 80.4, ET = 14.2) puis par rapport à ceux de 4-5 ans (M = 69.8, ET = 17.1), et ce d’autant plus pour l’émotion du dégoût qui est la plus difficile à reconnaître. L’analyse post-hoc a montré une progression plus marquée à travers l’âge pour l’émotion du dégoût (p < .001).

Puis, les analyses montrent un effet d’interaction significatif entre l’émotion et la condition, F(3, 177) = 30.301, p < .001, η2 = .339 (Annexe VI). Les analyses post-hoc ont montré un effet de supériorité du label pour l’émotion de tristesse (p < .001) et un effet de supériorité du visage pour le dégoût (p < .001).

Enfin, les analyses révèlent un effet d’interaction significatif entre l’émotion, la condition et l’âge, F(6, 177) = 3.845, p < .01, η2 = .115 (Figure 5). En effet, dans l’analyse post-hoc, la condition label montre un effet facilitateur pour la reconnaissance des émotions de peur (p < .05) et de tristesse (p < .01) chez les 4-5 ans, alors que la condition visage montre un effet facilitateur chez les enfants de 7 ans (p < .001), pour l’émotion la plus difficile qui est le dégoût.

Figure 5. Taux d’appariement correct en fonction de l’âge selon la condition et l’émotion.

3.3. Analyses descriptives des erreurs

Nous avons effectué une analyse descriptive des erreurs selon la condition label ou visage (Tableau 2).

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Peur Tristesse Colère Dégoût Peur Tristesse Colère Dégoût Peur Tristesse Colère Dégoût

4-5 ans 7 ans 9-10 ans

Taux d'appariement correct (%)

Label Visage

(26)

Tableau 2

Nombre d’erreur par groupe d’âge selon la condition.

4-5 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Label

Dégoût 0 18 29 29 33 109

Colère 35 0 1 3 2 41

Tristesse 5 3 0 10 1 19

Peur 5 5 8 0 1 19

Visage

Dégoût 0 32 20 10 18 80

Colère 22 0 15 16 7 60

Tristesse 17 17 0 14 8 56

Peur 10 16 15 0 10 51

7 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Label

Dégoût 0 47 53 36 36 172

Colère 63 0 2 4 0 69

Tristesse 5 1 0 18 0 24

Peur 3 2 7 0 2 14

Visage

Dégoût 0 36 21 6 8 71

Colère 27 0 10 27 8 72

Tristesse 16 14 0 19 14 63

Peur 13 16 10 0 3 42

(27)

9-10 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Label

Dégoût 0 18 28 12 5 63

Colère 24 0 2 6 2 34

Tristesse 5 1 0 7 0 13

Peur 3 6 10 0 1 20

Visage

Dégoût 0 17 8 8 7 40

Colère 13 0 3 9 3 28

Tristesse 5 4 0 8 4 21

Peur 0 3 3 0 1 7

Chez les enfants de 4-5 ans, lorsque la colère est présentée en label, les enfants la confondent majoritairement avec le dégoût, ce qui équivaut à 35 erreurs pour une totalité de 41 erreurs (85.4%). Il en est de même pour la condition visage, où 22 erreurs ont été effectuées sur une totalité de 60 (36.7%). Inversement, lorsque le dégoût est présenté dans la condition visage, le nombre d’erreurs de confusion avec la colère s’élève à 32 sur une totalité de 80 (40%). En condition label, le seuil de confusion est plus bas, les erreurs s’élevant au nombre de 18 sur 109 (16.5%). Lorsque la tristesse est présentée en label, les enfants la confondent avec la peur, ce qui correspond à 10 erreurs sur 19 (52.6%) et à l’inverse la peur est confondue avec la tristesse, avec un nombre d’erreurs de 8 sur 19 (42.1%). La confusion de la peur avec la tristesse dans la condition visage ne dépasse pas le seuil du hasard.

Chez le groupe des 7 ans, dans la condition label, la colère est confondue avec le dégoût, avec un nombre d’erreurs de 63 sur 69 (91.3%). Il en est de même pour la condition visage où 27 erreurs ont été effectuées sur 72 (37.5%). Inversement, lorsque le dégoût est présenté sous forme de visage, les enfants commettent 36 erreurs sur une totalité de 71 (50.7%). Lorsque la tristesse est présentée en label, 18 erreurs de confusion avec la peur sont commises sur 24 (75%). A l’inverse, 7 erreurs de confusion avec la tristesse sur 14 sont

(28)

commises (50%). Comme c’est le cas pour les 4-5 ans, la confusion de la peur avec la tristesse ne dépasse pas le seuil du hasard dans la condition visage.

Chez les enfants de 9-10 ans, lorsque la colère est présentée en label, elle est confondue avec le dégoût, le nombre d’erreurs s’élevant à 24 sur 34 (70.6%). Il en est de même pour la condition visage, où 13 erreurs ont été effectuées sur une totalité de 28 (46.4%).

Inversement, quand le dégoût est présenté dans la condition visage, le nombre d’erreurs de confusion avec la colère s’élève à 17 sur une totalité de 40 (42.5%). Lorsque la tristesse est présentée en label, les enfants la confondent avec la peur, ce qui correspond à 7 erreurs sur 13 (53.8%). Inversement, la peur est confondue avec la tristesse avec un nombre d’erreurs de 10 sur 20 (50%). La confusion de la tristesse avec la peur est également présente dans la condition visage, où 8 erreurs sont commises sur 21 (38.1%), et à l’inverse 3 erreurs sont commises sur 7 (42.9%). De plus, dans la condition visage uniquement, la peur est confondue avec la colère, ce qui équivaut à 3 erreurs sur 7 (42.9%).

Nous avons également effectué une analyse des erreurs par groupe d’âge selon la valence des distracteurs (Tableau 3).

Tableau 3

Nombre d’erreur par groupe d’âge selon la valence des distracteurs.

4-5 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Inter

Dégoût 0 22 18 10 51 101

Colère 26 0 6 4 9 45

Tristesse 11 7 0 8 9 35

Peur 4 5 10 0 11 30

Intra

Dégoût 0 28 31 29 88

Colère 31 0 10 15 56

Tristesse 11 13 0 16 40

Peur 11 16 13 0 40

(29)

7 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Inter

Dégoût 0 34 30 14 44 122

Colère 36 0 3 8 8 55

Tristesse 9 8 0 12 14 43

Peur 7 3 8 0 5 23

Intra

Dégoût 0 49 44 28 121

Colère 54 0 9 23 86

Tristesse 12 7 0 25 44

Peur 9 15 9 0 33

9-10 ans

Cible Réponse

dégoût

Réponse colère

Réponse tristesse

Réponse peur

Réponse joie

N total Inter

Dégoût 0 16 16 10 12 54

Colère 15 0 2 4 5 26

Tristesse 2 1 0 5 4 12

Peur 1 4 4 0 2 11

Intra

Dégoût 0 19 20 10 49

Colère 22 0 3 11 36

Tristesse 8 4 0 10 22

Peur 2 5 9 0 16

(30)

Quand les distracteurs sont de valence différente, l’émotion du dégoût est confondue à 50.5% avec la joie chez les 4-5 ans, ce qui correspond à 51 erreurs sur 101. Cette confusion tend à diminuer avec l’âge : les enfants de 7 ans ne commettent que 44 erreurs sur 122 (36.1%) et ceux de 9-10 ans 12 sur 54 (22.2%). L’émotion de peur est également confondue avec la joie : 11 erreurs sur une totalité de 30 (36.7%) sont commises par les enfants de 4-5 ans. Cette confusion diminue aussi avec l’âge : il n’y a que 5 erreurs sur 23 chez les enfants de 7 ans (21.7%) et 2 erreurs sur 11 chez ceux de 9-10 ans (18.2%).

Lorsque les distracteurs sont de même valence, le dégoût est confondu dans les mêmes proportions avec les trois émotions négatives chez les 4-5 ans. En effet, le nombre d’erreurs sur un total de 88 s’élève à 28 pour la colère (31.8%), 31 pour la tristesse (35.2%) et 29 pour la peur (33%). Pourtant, chez les enfants de 7 ans, le dégoût est confondu majoritairement avec la colère et la tristesse, respectivement pour un total de 49 erreurs (40.5%) et 44 erreurs (36.4%) sur 121. Chez les 9-10 ans, on retrouve cette confusion : les enfants commettent 19 erreurs pour la colère (38.8%) et 20 pour la tristesse (40.8%) sur une totalité de 49. Par ailleurs, la tristesse est confondue avec la peur à tous les âges. En effet, le nombre d’erreurs s’élève à 16 sur 40 chez les 4-5 ans (40%), à 25 sur 44 chez les 7 ans (56.8%) et à 10 sur 22 chez les 9-10 ans (45.5%). Enfin, la confusion de la colère avec le dégoût se retrouve dans les deux modalités de la valence chez les 4-5 ans, respectivement 26 erreurs sur 45 en inter (57.8%) et 31 erreurs sur 56 en intra (55.4%), chez les enfants de 7 ans, pour un total de 36 erreurs sur 55 en inter (65.5%) et 54 erreurs sur 86 en intra (62.8%), ainsi que chez les 9-10 ans, avec un taux d’erreurs correspondant à 15 sur 26 en inter (57.7%) et à 22 sur 36 en intra (61.1%).

4. Discussion et conclusion

La présente étude a pour but de préciser le développement des compétences de catégorisation des expressions faciales émotionnelles chez les enfants âgés entre 4 et 10 ans.

Pour ce faire, nous avons comparé le taux d’appariement correct de trois groupes d’âge différents à travers une tâche comprenant deux conditions : un appariement label-visage et un appariement visage-visage. Nous avons considéré les quatre émotions négatives de base, soit la colère, la tristesse, la peur et le dégoût, ainsi que l’émotion de joie pour varier la valence de nos distracteurs une fois sur deux. Nous avons fait varier le degré d’intensité sur deux niveaux, soit 50 et 100%. Nous avons également pris en compte des enfants à un âge plus avancé que 7

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