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LE SUICIDE, OUVRAGE D ÉMILE DURKHEIM

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Academic year: 2022

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LE SUICIDE, OUVRAGE D’ÉMILE DURKHEIM

Considéré comme l'un des fondateurs de la sociologie

moderne, Émile Durkheim s'est illustré à la fin du XIXe siècle par un travail colossal et des sortes de "bibles" de la

sociologie, alors en plein essor, dont "Le Suicide" paru en

1897. Pour quiconque n'a pas étudié la sociologie, le contexte social de la fin du XIXe siècle où l'on a célébré à la fois la

révolution industrielle, transformant en profondeur les pratiques, les façons de penser, et les élites intellectuelles portant haut les arts, les sciences et la recherche dans toutes les directions. Dans ce contexte de société en pleine mutation paraît cet ouvrage qui a établi la notoriété de Durkheim. Ce livre est le résultat d'un énorme travail sur une question qui peinait à avoir une réponse " pourquoi autant de personnes se donnent-elles la mort ? " Parce qu'il était particulièrement troublé par cette croissance exponentielle du nombre de suicides, dans une Europe pourtant prospère et à la

civilisation florissante, Émile Durkheim s'est engagé dans un travail de longue haleine en collectant des informations statistiques pour trouver la réponse au phénomène. Mais,

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l'avancée des recherches sociologiques actuelles met une nuance, voire peut-être plus, à l'idée que Durkheim aurait percé le secret du suicide. D’une part nous présenterons l’ouvrage et d’autre part ses limites par Wiktor Stoczkowski.

 PRÉSENTATION DE L’OUVRAGE

Dans cet ouvrage classique de la sociologie, Émile Durkheim entreprend de démontrer comment le suicide, phénomène qui ne saurait a priori relever que de la sphère privée, peut également être appréhendé comme un fait social. Après avoir examiné puis invalidé tour à tour les explications d’ordre

psychologique ou pathologique (folie, hérédité, climat, imitation, etc.), Durkheim se tourne vers les données statistiques qui révèlent de fortes disparités des taux de suicide selon les pays et les milieux sociaux ainsi qu’une certaine régularité du nombre de suicides annuels dans une société donnée. Le suicide est bien un fait social, qui doit s’expliquer à ce titre par d’autres faits sociaux.

Durkheim propose une typologie des suicides qu’il met en relation avec le niveau d’intégration et le niveau de

régulation des sociétés. Un excès d’intégration favorise le suicide altruiste (lorsque l’individu est attaché à la société au point d’être prêt à se sacrifier pour elle par abnégation)

tandis qu’un excès de régulation peut pousser au suicide fataliste celui qui ne peut plus supporter le poids trop lourd

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de la norme sociale. Ces deux types de suicide,

caractéristiques des sociétés traditionnelles, sont devenus rares. Dans les sociétés industrielles dominent le suicide égoïste et le suicide anomique.

Le suicide égoïste est le signe d’une intégration sociale insuffisante de l’individu. Par exemple, les protestants ont une plus forte propension au suicide que les catholiques en raison du degré élevé d’individualisme de leur religion

(pratique du libre examen) et les catholiques se suicident plus que les juifs chez qui l’intégration au groupe est

particulièrement forte. Ainsi, la religion protège l’individu du suicide en participant à son intégration sociale, tout comme le fait la cellule familiale : le taux de suicide est plus fort chez les hommes célibataires que chez les hommes mariés. Enfin, les suicides décroissent en temps de guerre, où le sentiment d’appartenance à la collectivité renforce le groupe.

Le suicide anomique est selon Durkheim la forme dominante de suicide, celle à laquelle il accorde le plus d’importance. À travers lui s’expriment les dérèglements sociaux

caractéristiques des sociétés industrielles. Il est le plus

fréquent dans les périodes de mutations profondes (que ce soit des crises économiques ou des périodes de croissance), lorsque la société n’exerce plus son influence modératrice sur les individus dont les aspirations, en augmentation brutale, ne sont jamais complètement satisfaites (situation d’anomie).

 LES LIMITES DE L’OUVRAGE SELON WIKTOR STOCZKOWSKI.

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Wiktor Stoczkowski, anthropologue, chercheur au laboratoire d'anthropologie sociale du Collège de France et directeur d'études à l'École des Hautes Etudes en Sciences Sociales, consacre son ouvrage "La Science sociale comme vision du monde". Explique:

L'usage des chiffres est considérable chez Émile Durkheim même s'il n'est pas le premier à avoir utilisé la science des statistiques pour expliquer la croissance du taux de suicides, c'est-à-dire le nombre de suicides par million d'habitants.

Mais il est le premier à synthétiser l'ensemble des données statistiques qui existaient à l'époque. Le problème est qu'il ne cherche, dans ces données statistiques, que les faits qui vont dans le sens de son hypothèse. Dans l'ouvrage du suicide, Durkheim essaye de confirmer son hypothèse.

La théorie de Durkheim doit être relativisée. Par exemple, lorsqu'il affirme que "le suicide s'est partout accru", c'est faux : il suffit de regarder les données statistiques disponibles à l'époque, pour voir qu'il y avait des pays où le suicide était même en baisse comme au Danemark, en Norvège, en

Angleterre... Cette augmentation est loin d'être démontrée.

Émile Durkheim était convaincu que la société occidentale était affectée par des maux multiples, dont le suicide était un exemple parmi d'autres. Et il essayait de trouver une cause commune de tous ces maux qui travaillaient les sociétés occidentales.

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 RÉSUMONS L’OUVRAGE.

Le Suicide est un ouvrage pionnier de la sociologie empirique et Durkheim parvient à y proposer, malgré l’absence de

méthodes quantitatives très élaborées, un modèle causal particulièrement complexe. Si certaines conclusions sont aujourd’hui contestées, comme celles qui affirment

l’influence de l’urbanisation sur les taux de suicide — la situation s’est inversée puisque le nombre de suicides est aujourd’hui plus élevé en milieu rural —, nombre de ses observations restent valables et l’on a pu ainsi confirmer l’importance du rôle de la cellule familiale comme protection contre le suicide. Les plus fortes critiques sont d’ordre

méthodologique. Elles ont surtout mis en cause la qualité et la fiabilité des données statistiques utilisées par Durkheim et les définitions institutionnelles du suicide sur lesquelles elles s’appuyaient.

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