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Est-il possible de contrôler l asthme?

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Focus sur...

Un asthme bien contrôlé est un asthme qui autorise le patient à avoir une vie normale, au prix d’un traitement pris de manière régulière : travailler, faire du sport, ne pas se sentir limité dans les activités de la vie quotidienne, avoir un sommeil de bonne qualité et ne pas risquer sa vie lors d’une exacerbation.

Tous ces éléments doivent être évalués de manière systématique par l’interrogatoire des consultations de suivi. Le plus simple est probablement d’utiliser des scores de contrôle comme l’Asthma Control Test (ACT) (un score ≥ 20/25 signe l’asthme contrôlé) ou l’Asthma Control Questionnaire (ACQ), tous deux traduits en français. Ils permettent de chiffrer le retentissement des symptômes de l’asthme,

mais surtout d’évaluer de manière objective les modifi cations induites par les traitements. Pour l’ACT, une variation de 5 points est considérée comme signifi cative [1].

Maintenir une fonction respiratoire normale est un autre objectif du traitement. Celle-ci doit être évaluée de manière objective par des épreuves fonctionnelles respiratoires faites régulièrement, car il n’y a pas de bonne corrélation entre le niveau de contrôle et le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS). Les phénomènes de remodelage qui conduisent à l’obstruction bronchique fi xée chez certains asthmatiques sont globalement assez peu sensibles aux traitements actuels, ce qui explique

Résumé

L’asthme est une maladie hétérogène caractérisée par une infl ammation chronique des voies aériennes aboutissant à une obstruction bronchique réversible. Il s’agit d’une pathologie fréquente, qui touche 6 à 7 % de la population adulte, et qui peut être potentiellement grave. Elle peut être traitée effi cacement dans la plupart des cas, afi n de contrôler les symptômes et de minimiser le risque d’exacerbation. Le traitement médicamenteux repose essentiellement sur les corticoïdes inhalés en traitement de fond, dont la dose est adaptée en fonction du niveau de contrôle de l’asthme. Comme pour toute maladie chronique, une prise en charge rigoureuse, personnalisée et basée sur une approche éducative, est nécessaire afi n de favoriser l’apprentissage de l’auto-gestion par les patients et l’adhérence au traitement.

*Service de pneumologie, Centre de l’Asthme. Hôpital Bichat. Paris, France @ : camille.taille@aphp.fr

A. JUSTET, C. DUPIN, L. TABEZE, C. TAILLÉ

*

Est-il possible de contrôler l’asthme°?

Comment apprécier le contrôle de l’asthme ?

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que la stratégie d’adaptation des traitements prônée par le Global Initiative for Asthma (GINA) et la Société de Pneumologie de Langue Française [2] ne prenne pas en compte la valeur du VEMS. Néanmoins, une fonction respiratoire altérée expose le malade à davantage d’exacerbations et peut expliquer la limitation à l’effort ; elle doit donc être évaluée de manière régulière.

Comment adapter le traitement de fond en fonction du contrôle ?

Lors de l’initiation d’un traitement de fond, il est recommandé de commencer avec des doses faibles de corticoïdes inhalés (Figure 1). Lorsque le contrôle de l’asthme est jugé insuffi sant, il faut majorer le traitement de fond, soit en doublant la dose de corticoïdes inhalés, soit plutôt en ajoutant des bronchodilatateurs de longue durée d’action dans le cadre d’une association fi xe. Le plus simple est

de suivre les propositions du GINA, très pratiques et basées sur les résultats des études randomisées (Figure 1). Celles-ci nécessitent de bien connaître les équivalences cliniques des doses entre les différentes molécules (Tableau I). A chaque modifi cation de palier, interroger le patient sur sa préférence est un élément important pour faciliter l’adhésion au traitement.

La ligne supérieure correspond à la stratégie recommandée. La 2ème ligne correspond à d’autres stratégies validées et utilisables, mais considérées comme moins effi caces.

Il est recommandé de débuter le traitement avec des doses faibles de corticostéroïdes inhalés (CSI) (palier 2), dès lors que le recours au traitement de secours est >2/semaine. Pour augmenter le palier, la stratégie d’ajout de bronchodilatateurs de longue durée d’action (LABA) est supérieure à une stratégie de doublement des doses de CSI, bien que cette dernière stratégie soit validée et utilisable notamment si le coût de l’association CSI-LABA est trop important.

Tout patient recevant un traitement de palier 4 doit être suivi par un pneumologue. Les patients devraient être pris en charge dans des centres de référence si un traitement de palier 5 est nécessaire.

CSO°: corticostéroïde oral°; LAMA°: anticholinergique de longue durée d’action

Figure 1 : Schéma d’adaptation du traitement de fond en fonction du niveau de contrôle

Tableau I : Comparaison clinique des doses des corticoïdes inhalés.

Corticoïdes inhalés Dose quotidienne totale (μg) Faible Moyenne Elevée Beclometasone (CFC) 200–500 >500–1000 >1000 Beclometasone (HFA) 100–200 >200–400 >400 Budesonide (DPI) 200–400 >400–800 >800 Ciclesonide (HFA) 80–160 >160–320 >320 Fluticasone furoate (DPI) 100 n.a. 200 Fluticasone propionate

(DPI or HFA) 100–250 >250–500 >500 Mometasone furoate 110–220 >220–440 >440 Triamcinolone acetonide 400–1000 >1000–2000 >2000

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Focus sur...

Un malade qui resterait mal contrôlé sous un traitement de palier 4, comprenant des corticoïdes inhalés à fortes doses en association à des bronchodilatateurs de longue durée d’action, nécessite de façon impérative l’avis d’un pneumologue spécialiste de l’asthme avant de discuter l’introduction de traitements dits de palier 5, comme les anticholinergiques de longue durée d’action ou les biothérapies comme l’omalizumab (Ac anti IgE) ou le mepolizumab (Ac anti IL5) [3].

A l’inverse, chez un patient considéré comme contrôlé pendant 2 à 3 mois, une désescalade thérapeutique peut être envisagée

Chez les malades consommant régulièrement des corticoïdes oraux, la surveillance des effets secondaires (métaboliques, osseux, cardiovasculaires, …) doit être incluse dans la prise en charge.

Que faire lorsque le contrôle reste insuffi sant ?

Lorsque le patient est mal contrôlé par un palier thérapeutique, il convient de faire une évaluation systématique et rigoureuse avant d’augmenter le palier de traitement.

Cette évaluation doit permettre de répondre aux questions suivantes :

Est-ce que le malade est réellement asthmatique ? Est-ce que le traitement de fond est bien pris ? Est-ce que les facteurs aggravants l’asthme sont bien contrôlés ?

Est ce que le malade est réellement asthmatique ?

Cette question peut sembler triviale, mais en réalité le diagnostic d’asthme n’est pas toujours aussi simple qu’on veut le faire croire, puisque le sous-diagnostic, comme le sur-diagnostic d’asthme sont fréquents.

Une série canadienne rapporte que près de 30 % de patients se considérant comme asthmatiques ne le sont pas en réalité [4].

Il faut savoir remettre en question le diagnostic d’asthme de façon systématique en cas de mauvais

contrôle, mais plus spécialement si les symptômes prédominants sont la toux, l’expectoration ou s’il existe une obstruction bronchique sévère ou rapidement progressif avec un VEMS <40 % [3]. Dans ce cas, l’avis d’un spécialiste est nécessaire pour la réalisation d’épreuves fonctionnelles respiratoires complexes. La réalisation d’un scanner thoracique peut aider également à redresser le diagnostic.

Les pathologies fonctionnelles (hyperventilation, dysfonction laryngée) doivent être évoquées en cas de signes extra-thoraciques (vertiges, malaises, crampes, …) ou de signes laryngés (stridor, aphonie, sensation de “voix blanche“).

Est-ce que le patient prend bien son traitement ?

Cette question dresse la problématique de l’adhérence au traitement de fond, majeure comme dans toute maladie chronique. Le défaut d’observance est la 1ère cause d’échec du traitement. L’observance recouvre en réalité différentes problématiques :

La manipulation des dispositifs d’inhalation

Elle est complexe, souvent mal maîtrisée par les patients comme par les soignants. Elle doit être vérifiée à chaque consultation. En cas de difficulté à maîtriser un dispositif, on doit en proposer un autre, après avoir testé, lors de la consultation, la capacité du patient à en maîtriser l’utilisation correcte. Des outils libres d’accès sont disponibles pour l’éducation thérapeutique (https://splf.fr/videos-zephir/).

La compréhension de l’utilisation des traitements

Il est fondamental que le patient comprenne les différences entre le traitement de fond et le traitement de secours, mais aussi la gestion du plan d’action en cas de crise ou la nécessité d’un traitement au long cours.

L’adhérence au traitement

Elle est classiquement faible dans l’asthme, comme

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dans toutes les maladies chroniques, mais peut être améliorée lorsque les freins à l’adhérence sont mis en évidence : mauvaise compréhension du traitement, déni de la maladie, espoir secret de guérison, crainte des effets secondaires notamment liés aux corticoïdes inhalés, croyances diverses, … Cette question doit être abordée de manière directe avec le patient (“vous arrive-t-il d’oublier votre traitement, de l’arrêter lorsque vous vous sentez-bien ?“, “avez- vous du mal à le prendre tous les jours ?“, ...), sans porter de jugement, afi n de lui permettre d’exprimer ses craintes et doutes vis-à-vis du traitement.

Compte tenu de la faible prévalence de la rémission de l’asthme chez l’adulte, il est indispensable que le patient soit convaincu du bénéfi ce du traitement qui lui est prescrit pour pouvoir le prendre sur une longue durée. Contrairement aux idées reçues, une telle attitude d’écoute n’est pas forcément consommatrice de temps pour le praticien. Il est montré que dédier 3 fois 10 minutes à un patient asthmatique et à ses questions éducatives permettent d’améliorer le contrôle de la maladie, d’une manière similaire à un programme classique d’éducation thérapeutique [5].

Est-ce que les facteurs favorisants sont contrôlés ?

L’asthme est une maladie complexe à prendre en charge, par l’importance des facteurs pouvant infl uencer le contrôle. Ils doivent être régulièrement évalués, notamment dans une situation de mauvais contrôle.

Allergies respiratoires

Chez le patient atopique, l’exposition allergénique favorise le mauvais contrôle. Le bilan allergologique (interrogatoire et tests cutanés) peut être refait à intervalles réguliers si de nouveaux signes apparaissent, afin de ne pas méconnaître de nouvelles sensibilisations. L’intérêt du diagnostic allergologique est de pouvoir proposer des mesures d’éviction adaptées, un renforcement du traitement dans les situations prévisibles d’exposition, une

désensibilisation, voire un traitement par anti IgE pour les patients les plus sévères.

Environnement

L’environnement domestique et professionnel est source d’irritants divers (produits ménagers, moisissures, fumée de cigarettes, ...), qu’il faut rechercher pour en favoriser l’éviction. L’aide d’un conseiller en environnement d’intérieur ou de la médecine du travail peut être utile dans cette situation.

Tabagisme

L’arrêt du tabac est indispensable chez l’asthmatique, mais peut être plus diffi cile à obtenir, notamment chez les patients les plus anxieux. Une prise en charge par un tabacologue peut être utile en cas de blocage.

Rhinosinusite chronique

L’effet du traitement sur le contrôle de l’asthme est débattu. Néanmoins, compte tenu de la gêne engendrée par l’obstruction nasale chronique, le traitement local (lavage des fosses nasales, corticoïdes locaux) est considéré comme partie intégrante du traitement de fond. La polypose nasale est souvent rebelle au traitement et nécessite une prise en charge par un spécialiste.

Refl ux gastro-oesophagien

Fréquent chez l’asthmatique, il doit être traité s’il est symptomatique [6].

Obésité

Elle favorise la survenue de l’asthme et contribue au mauvais contrôle. On sait qu’une perte de 10 % du poids chez les obèses améliore signifi cativement le contrôle. La prise en charge diététique et l’encouragement à une activité physique régulière font partie de la prise en charge de l’asthmatique [7]. Chez les asthmatiques sévères consommant des corticoïdes oraux à fortes doses, la surveillance pondérale doit être renforcée.

Syndrome d’apnées du sommeil (SAOS)

Il est favorisé par l’asthme, dont il infl uence le contrôle

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Focus sur...

par des mécanismes complexes. A l’inverse, l’asthme et ses traitements favorisent également le SAOS.

Son traitement chez l’enfant par amygdalectomie est effi cace sur le contrôle de l’asthme. L’effet de la ventilation en pression positive continue chez les asthmatiques apnéiques est moins bien démontré [8].

Infl uence hormonale

Les variations des symptômes d’asthme au cours du cycle menstruel sont bien décrites. Si elles sont cliniquement signifi catives, elles peuvent justifi er d’un traitement hormonal bloquant l’ovulation.

Anxiété et dépression

Elles sont fréquentes comme dans toute maladie chronique et peuvent constituer un obstacle à une prise en charge optimale (déni de la maladie…). Elles peuvent nécessiter l’avis d’un spécialiste.

Conclusion

L’asthme peut être contrôlé chez la grande majorité des patients grâce à la corticothérapie inhalée à doses variables selon les symptômes et une approche éducative facilitant l’observance régulière du traitement. La prise en charge non médicamenteuse de l’environnement, du mode de vie (sport, tabac, alimentation, …) est un élément à ne pas négliger, notamment dans la situation d’un asthme diffi cile à contrôler. Une évaluation rigoureuse et systématique du diagnostic, des comorbidités, de l’observance doit être faite avant d’augmenter le traitement de fond.

Confl it d’intérêt

L’auteur correspondant déclare avoir reçu des honoraires pour des activités d’expertise et de présentations orales des laboratoires GSK, Astrazeneca, Teva, Novartis, ALK.

Références

1. Alzahrani YA, Becker EA. Asthma Control Assessment Tools.

Respir Care. 2016;61:106–16.

2. Raherison C et al. Updated guidelines (2015) for management and monitoring of adult and adolescent asthmatic patients (from 12 years and older) of the Société de Pneumologie de Langue Française (SPLF) (Full length text). Rev Mal Respir. 2016;33:279–325.

3. Chung KF et al. International ERS/ATS guidelines on definition, evaluation and treatment of severe asthma. Eur Respir J. 2014;43:343–73.

4. Aaron SD et al. Reevaluation of Diagnosis in Adults With Physician-Diagnosed Asthma. JAMA. 2017;317:269–79.

5. Plaza V et al. A repeated short educational intervention improves asthma control and quality of life. Eur Respir J.

2015;46:1298–307.

6. Porsbjerg C, Menzies-Gow A. Co-morbidities in severe asthma: Clinical impact and management. Respirol Carlton Vic. 2017;22:651–61.

7. Freitas PD, Ferreira PG, Silva AG, Stelmach R, Carvalho- Pinto RM, Fernandes FLA, et al. The Role of Exercise in a Weight-Loss Program on Clinical Control in Obese Adults with Asthma. A Randomized Controlled Trial. Am J Respir Crit Care Med. 2017;195:32–42.

8. Prasad B, Nyenhuis SM, Weaver TE. Obstructive sleep apnea and asthma: associations and treatment implications. Sleep Med Rev. 2014;18:165–71.

Références

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