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Rendement potentiel et tolérance aux virus chez l’ail
(Allium sativum L.)
C.M. Messiaen, M. Youcef-Benkada, A. Beyries
To cite this version:
C.M. Messiaen, M. Youcef-Benkada, A. Beyries. Rendement potentiel et tolérance aux virus chez l’ail
(Allium sativum L.). Agronomie, EDP Sciences, 1981, 1 (9), pp.759-762. �hal-02728798�
Rendement
potentiel
et
tolérance
aux
virus
chez
l’ail
(Allium
sativum
L.)
Charles Marie MESSIAEN, Mohamed YOUCEF-BENKADA André BEYRIES
LN.R.A., Laboratoire de Recherches de la Chaire de
Biologie
etPathologie végétales
F34060Montpellier.
RÉSUMÉ
Ail, Virus, Tolérance,
Rendement.
Des essais réalisés à partir de caïeux calibrés montrent que le clone d’ail « VC6
» (extrait
de la variété « Violet de Cadours ») présente à l’état virosé desperformances
comparables à celles du clone « Thermidrôme »(extrait
de « Blanc de laDrôme »)
à l’état sain. Cette situation est due à la fois à un rendement potentielplus
élevé à l’état sain, révélé par lesperformances
de « Germidour» (dérivant
de VC6 par culture deméristème),
et à une plus grande tolérance à la mosaïque de l’ail,
qui
ne provoque sur « Germidour » inoculé(ou VC6)
qu’une perte de récolte de 25 p. 100 alors qu’elle est de plus de 50 p. 100 sur « Thermidrôme ».
SUMMARY Garlic, Viruses, Tolerance,
Yield.
Potential
yield
and tolerance to virus-disease ingarlic (Allium
sativumL.)
We have compared in a field trial two garlic clones, « Germidour » and « Thermidrome », each one in 3 different virological conditions :
! chronical infection by garlic mosaic virus.
! mechanical inoculation with
garlic
mosaic 4 months after plantation.! healthy plants.
Symptoms of chronical and artificial virus infection are stronger in « Thermidr6me », in which « chronical »
and « shock » symptoms are different, with a secondary attack of Pyrenochaeta terrestris on roots in the second instance,
probably
caused by a deterioration of the source/sink ratio.Measures of
chlorophyll
content of leaves confirm the naked eye observation of symptoms.The yield of bulbs is reduced by 25 p. 100 for virus diseased plants of « Germidour x, more than 50 p. 100 for
« Thermidrome ».
Two reasons explain similar yields for « VC6
» (the original
virus-diseased clone from which « Germidour »was extracted by meristem culture) and for healthy « Thermidrome
(directly
obtained from healthy plants inthe « Blanc de la Dr6me »
variety) :
! a
higher potential
yield, related with higher chlorophyll content in wider leaves.! a better tolerance to the deleterious incidence of virus infection.
A paradoxal explanation of the persistance of healthy plants in the « Blanc de la Drôme » variety may be
looked for in its extreme virus-susceptibility, which is supposed to have made efficient the traditional massal selection of bulbs and cloves before
plantation,
by elite growers.With more tolerant varieties, like « Violet de Cadours », from which was obtained « VC6 », such a massal
selection was probably less efficient, with the consequence of a 100 p. cent virus infection on these varieties.
1. INTRODUCTION
Dans une collection de variétés d’ail réunie dans les
années 1960 au Centre de Recherches
Agronomiques
d’Avignon,
aucuneplante
d’aucune variété n’était indemnede
symptômes
demosaïque foliaire,
plus
ou moinsaccusés,
sauf chez la variété « Blanc de la Drôme », où subsistaient
encore des
plantes
aufeuillage
vertuni,
contrastant avecleurs voisines atteintes d’une
mosaïque
vertclair-jaune
vif. Une sélection clonale àpartir
de cesplantes
« saines » aabouti aux 2 variétés « Thermidrôme » et « Messidrôme »
actuellement
multipliées
sous contrôle officiel.Par inoculation
mécanique,
dessymptômes
analogues
àceux des
plantes
«mosaïquées
» de « Blanc de la Drôme »peuvent
être obtenus sur « Thermidrôme » ou «Messi-drôme », aussi bien à
partir
desplantes mosaïquées
de « Blanc de la Drôme» qu’à
partir
des variétés du mêmetype
(peu
dormantes,
à grosbulbes) présentant
à 100 p. 100 dessymptômes
demosaïque
moins accusée. D’où la notion d’une« Mosaïque
de l’ail » dont seules seraientexemptes
lesplantes
de « Blanc de la Drôme » sanssymptômes
(MESSIAEN
&MARROU,
1965).
Dès les années 1960 se
posait
donc naturellement laquestion
suivante : lesplantes
des variétés atteintes à 100 p.100,
mais neprésentant
que dessymptômes
faibles,
sont elles
plus
tolérantes à lamosaïque
de l’ail que celles de « Blanc de la Drôme » ?C’est pour
répondre
à cettequestion
que des cultures de méristèmes furententreprises
en 1968 parL
ER
OUX,
à la station dePathologie végétale
deMontfavet,
enparticulier
sur le clone « VC6 », extrait de la variété « Violet deCadours
» (originaire
de laHaute-Garonne), qui présentait
à 100 p. 100 dessymptômes
demosaïque
de faible intensité(QutoT et
al.,
1972).
Desplantes
sanssymptômes
furentobtenues,
l’une d’entre elles fut lepoint
dedépart
de la variété « Germidour »,rapidement adoptée
par lesproduc-teurs d’ail et actuellement
multipliée
sous contrôle officiel. Mais nous nediposions
pas d’essaisprécis
chiffrant lebénéfice de l’état « sain » par
rapport
à l’état « virosé » chezces 2 variétés. En
effet,
les essais de rendement ne sont valables sur ail que si les caïeux de semence sontsoigneuse-ment calibrés avant
plantation.
Nous avons doncentrepris,
en1979-80,
cetype
d’essai afin d’estimer defaçon
plus
précise
lesperformances
des variétés « Thermidrôme » et« Germidour » à l’état « sain » et « virosé ».
Notons au passage que ces deux « états » recouvrent une
réalité
plus
complexe,
d’après
les derniers résultats obtenus parimmuno-électromicroscopie
par DELECOLLE & LOT(1981) :
« Thermidrôme » et « Germidour » à l’état « sain »contiennent 2 virus latents
(un potyvirus
et uncarlavirus).
A l’état « virosé » ils contiennent de
plus
un 2cpotyvirus
provoquant
la «mosaïque
de l’ail »,apparenté
sérologique-ment à la
bigarrure
del’oignon.
Pour ne rien passer soussilence,
il fautsignaler
deplus,
que « VC6» peut
parfois,
dans certaines collections
(où
il est cultivé à côté de divers Alliumvirosés), présenter
unemosaïque
intense sur certainsindividus :
s’agit-il
d’un 41virus,
ou d’unemutation,
soit del’hôte,
soit de l’un des virus ? Ce dernierpoint
reste à éclaircir.II.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
A. Matériel
végétal
Nous
disposions,
pour les 2variétés,
de semences saineset de semences virosées. Pour « Germidour » il
s’agissait
dela variété elle-même et du clone
d’origine
« VC6 ». Pour« Thermidrôme », les semences « virosées » étaient
consti-tuées de caïeux provenant des bulbes de
plantes
inoculées l’annéeprécédente
àpartir
de « VC6 ». Nousdésignerons
par « Thermivir » les
plantes
de « Thermidrôme » issues deces
caïeux,
présentant
une infection devenuechronique.
A ces 2 traitements nous en avonsajouté
un3!,
consistantà inoculer en cours de
végétation,
au mois de mars, desplantes
des 2variétés,
issues de semencessaines,
toujours
avec un extrait infectieux obtenu àpartir
de « VC6 », parbroyage
enprésence
d’untampon
phosphate
M/100 àpH7,
puis centrifugation.
L’inoculationmécanique
a été réaliséeavec le
surnageant
additionné de 50mg/ml
de célite. Nous souhaitions ainsi comparer les effets d’un état virosé «chro-nique
» ou d’un «symptôme
de choc ».La densité de
plantation,
surplanches
surélevées,
équi-valait à 200 000
plantes/ha ;
lesparcelles
élémentairescomptaient
10plantes.
Les caïeux ont été calibrés avantplantation
en classes distantes de 1 g. Les bulbes dont nousdiposions
ne nous ont pas fourni le même nombre decaïeux,
ni parconséquent
deparcelles,
danschaque
calibre. Lafumure,
appliquée
en 2fois,
équivalait
à 160-160-160 enN,P,
K. Les caïeux avantplantation,
lesplantes
envégéta-tion,
ont reçu les traitementspesticides
habituels sur cette culture.B. Observations réalisées
En
végétation,
des feuilles ont étéprélevées
à 4reprises
sur les
plantes
de bordure pourprocéder
à undosage
dechlorophylle
suivant la méthodepréconisée
par KURTZ& MELLOR
(1967).
Une mesure delargeur
de feuilles a été réalisée au 6c mois devégétation
sur la 3’ feuille àpartir
du sommet.A
l’arrachage,
on a sectionné les racines et la faussetige,
à 7 cm de sa base. Unepesée
a été faite aussitôt.Après
unesemaine de
séchage
dans une serre peu ventilée où latempérature
diurneatteignait
35°,
lemoignon
de faussetige
a été sectionné et une nouvelle
pesée
faite. Par lasuite,
dans certainescatégories
debulbes,
on aprocédé
à unépluchage
et étudié la
répartition
des caïeux par classes depoids.
III.
RÉSULTATS
A.
Symptômes
observésNous avons bien entendu
retrouvé,
à l’état virosé «chro-nique
», dessymptômes
beaucoup
moins accusés sur« VC6 » que sur « Thermivir
» (versions
virosées de «Ger-midour » et de
« Thermidrôme »).
L’inoculation en cours de
végétation
aprovoqué
sur« Thermidrôme » des
symptômes
dechoc,
différents dessymptômes chroniques :
dessèchement des feuilles debase,
mosaïque
très intense sur les feuilles du sommet. Al’arra-chage,
on observait sur les racines une forte attaque dePyrenochaeta
terrestris(Hansen)
Gorenz alorsqu’elle
étaitnégligeable
chez « Thermidrôme » sain et « Thermivir ».Sur « Germidour » inoculé en cours de
végétation,
ledessèchement des feuilles de base était
beaucoup
moins accusé et lamosaïque
apparue sur les feuilles du sommet n’a pasdépassé
en intensité celle de VC6.B. Teneur des feuilles en
chlorophylle
On observe
qu’à
l’étatsain,
la teneur enchlorophylle
desfeuilles de « Germidour » est
supérieure
à celle des feuillesde « Thermidrôme », et que « VC6
» (virosé) présente
desconcentrations
équivalentes
à celles de « Thermidrôme »sain. Si l’on fait le
rapport sain/malade,
la réduction de concentration enchlorophylle
due au virus estplus
impor-tante chez « Thermidrôme » que chez « Germidour ». Lesdosages
vérifient donc lesimpressions
retirées de l’observa-tion visuelle.C.
Largeur
des feuillesLe tableau 2 nous la
donne,
pour lescatégories
2,5, 3,5
et4,5
g de caïeuxplantés.
On constate que, même à l’état virosé
(VC6),
«Germi-dour » est
supérieur
à « Thermidrôme » pour lalargeur
desfeuilles.
D. Pesées de récolte
Le tableau 3 donne les résultats
généraux
del’essai,
en ailfrais à la récolte.
Du
point
de vuestatistique,
ces résultats ont pu êtreanalysés
par la méthode des blocs(appliquée
aux tailles decaïeux 2,5
et3,5 g),
pour les différents traitements de« Thermidrôme », le rendement des
plantes
saines serévé-lant très
significativement supérieur
à celui des 2catégories
deplantes
virosées.Dans le cas de « Germidour », l’échelonnement
plus large
des tailles de caïeux nous a
permis
d’obtenir desrégressions
hautement
significatives poids
du caïeuplanté/poids
du bulbe récolté(coefficients
r >0,90).
Cela nous apermis
uneestimation du rendement dans les 2 cas, pour des caïeux de
3 g
plantés
à raison de 200 000 à l’ha. Le rendement définitifpeut être estimé en
défalquant
laperte
depoids
auséchage.
On remarquera que celle
qui
concerne « Thermivir » estplus importante
que celle observée sur « Thermidrôme » et « Thermidrôme » inoculé : il estprobable
que l’infection viralechronique
retarde lavégétation
et la maturation(tabl. 4).
E.
Répartition
en nombre et en classes depoids
des caïeuxcomposant
les bulbes récoltésCette
répartition
a été étudiée pour les bulbescorrespon-dant aux
catégories
de caïeuxplantés
les mieuxreprésentées
(3,5
et4,5
pour « Germidour», 2,5
pour « Thermidrôme»).
Le tableau 5 résume les résultats obtenus.On peut en conclure que les distributions de
poids
de caïeux sont très chevauchantes pour les différentes versions de « Germidour ». Aucontraire,
pour « Thermidrôme », lespoids
moyens de caïeux de la version saine différent presque de 2écarts-types
despoids
moyens des caïeux des bulbes issus deplantes
virosées.IV. DISCUSSION-CONCLUSION
Nous comprenons donc
pourquoi
la variété « Violet de Cadours» (plus particulièrement
le cloneVC6)
peut
pro-duire,
à l’étatvirosé,
des récoltes presqueégales
à celles de la variété « Blanc de la Drôme» (plus précisément
«Ther-midrôme
»)
à l’état sain. Deux facteurs y contribuent :-
un rendement
potentiel
à l’état sainplus
élevé,
sansdoute en relation avec une
plus
forte teneur enchlorophylle
des feuilles et une surface foliaire
plus importante ;
- uneplus grande
tolérance à lamosaïque
del’ail,
qui
ne provoque à l’état
chronique
qu’une
perte
de 25 p. 100 surla
récolte,
alorsqu’elle
est de 56 p. 100 sur «Thermi-drôme ».
Deux autres remarques intéressantes
peuvent
être faitessur les résultats de cet essai :
e
L’attaque
touteparticulière
des racines parPyrenochaeta
terrestris dans le cas de « Thermidrôme inoculé » doit sansdoute être rattachée au cas
général
«aggravation
desdégâts
sur racines de
parasites
de faiblesse à la suite d’une détérioration durapport
source/puits
» (DODD,
1977).
Dans ce cas eneffet,
l’activitéphotosynthétique (la
« source»)
a subi unebrusque
diminution d’efficacité en cours devégétation
alors que les ébauches de caïeux(le
«
puits »)
étaientdéjà
différenciées. Aucontraire,
lesplan-tes virosées de
façon
chronique
sontplus équilibrées
dans leurchétivité,
car elles différencient un nombre d’ébauches de caïeux moins élevé.e On
peut
également
trouver dans ces résultats un essaid’explication
de lapersistance,
au cours dessiècles,
deplantes
saines dans la variété « Blanc de la Drôme ». La cause en estpeut
être,
paradoxalement,
son extrêmesensibilité à la
mosaïque
de l’ail. Eneffet,
les distributions despoids
de bulbes et despoids
de caïeux dans les bulbes récoltés sont assez distinctes entre « sains » et « virosés »pour que la sélection massale des
bulbes,
puis
des caïeux conservés pour la semence, traditionnellementpratiquée
dans la Drôme par les cultivateurs
soigneux,
ait eu un effetsélectif. Au
contraire,
dans le cas d’une variété telle que« Violet de
Cadours »,
les distributions sonttrop
chevau-chantes pour que cette sélection ait été efficace.Reçu le 15 janvier 1981.
Accepté le 16 juin 1981.
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