E. BARREY
INRA Station de
Génétique quantitative
78352
Jouy-en-Josas
CedexPropriétés
contractiles des fibres musculaires
et performance physique chez le
cheval
On dit d’un cheval qu’il
a&dquo;du sang&dquo; lorsqu’il
a uneconstitution athlétique,
les veines à fleur de peau et
untempérament vif. Mais,
surle plan physiologique, que
recouvreexactement cette notion empirique
connuedes hommes de chevaux depuis des temps immémoriaux ? Quelle relation y-a-t-il entre la vivacité du tempérament, la puissance physique d’un
cheval et
sescaractéristiques physiologiques ? Les connaissances acquises
en
physiologie musculaire permettent maintenant de répondre
enpartie à
ces
questions. Les qualités contractiles et métaboliques du tissu musculaire déterminent,
eneffet, la puissance et la durée des contractions que le muscle pourra fournir
au coursd’un exercice.
La vitesse et la force de contraction déve-
loppée
par un muscledépendent
à la fois de laquantité
de fibres actives et de leursproprié-
tés contractiles et
métaboliques.
Sur leplan
de la vitesse de
contraction,
il existe chezl’homme,
etplus généralement
chez les mam-mifères,
deuxprincipales catégories
de fibresmusculaires : les unes à contractions
lentes,
les autres à contractions
rapides.
Latypologie
musculaire consiste en l’étude des caractéris-
tiques
contractiles etmétaboliques
des diffé-rents
types
de fibresqui composent
les muscles. Les fibres musculaires detype
I ontune vitesse de contraction
lente,
et sontcapables
de se contracter successivement ungrand
nombre de fois mais avec une forcemodérée,
tandis que les fibres detypes
IIA etIIB,
à contractionsrapides, développent
desforces
plus
élevées maispendant
peu detemps.
Pour assurer leurfonctionnement,
lesfibres musculaires sont dotées d’un métabolis-
me
énergétique
àprédominance
aérobie ouanaérobie en fonction de leur
type :
les lentes (I) sontaérobies, les rapides
sont soit aéro- anaérobies(IIA),
soit anaérobies (IIB). De par leurscaractéristiques
contractiles et métabo-liques,
les fibres detype
I favorisent l’exercice d’endurance (de faible intensitépendant plu-
sieurs
heures),
tandis que les fibres detype
II permettent d’effectuer un exercice depuissan-
ce (d’intensité élevée
pendant quelques
dizaines de secondes).
Ainsi,
en fonction de lacomposition
en fibres lentes etrapides
des dif-férents muscles locomoteurs d’un athlète tel que le
cheval,
celui-ciprésentera
une meilleu-re
aptitude
à soutenir un effort d’enduranceou de
puissance.
Le muscle étant le moteur detout
athlète,
de nombreux travaux dephysio- logie
de l’exercice ontporté
sur latypologie
musculaire afin d’en déterminer les
proprié- tés,
le déterminisme et lespotentialités adap-
tatives.
L’objet
de cet article est de passer enrevue les connaissances
acquises
sur latypo- logie
musculaire chez le cheval en relationavec son
aptitude
à l’exercicephysique.
Résumé
__________________________Cet article présente les connaissances acquises sur la
physiologie
des fibresmusculaires en relation avec l’exercice physique chez le cheval-athlète. La vitesse et la force de contraction développée par un muscle dépendent à la fois de la quantité
de fibres actives et de leurs propriétés contractiles. Le muscle étant le moteur de
l’athlète, de nombreuses études de
physiologie
de l’exercice ontporté
sur latypologie
musculaire afin d’en connaître le déterminisme et lespotentialités
adaptatives en réponse à un travail d’entraînement. Les méthodes d’investigation,les caractéristiques fonctionnelles, les facteurs de variation et les relations avec la
performance physique sont présentés et discutés dans le cas du cheval pour
envisager une
application
à la sélection.1 / Exploration de la typologie
musculaire chez le cheval
1.
1
/ Prélèvement
parbiopsie
Les études de
physiologie
musculaire chez l’homme et les autresespèces sportives
ontnécessité la mise au
point
d’unetechnique
deprélèvement
peutraumatique
(Lindholm etPiehl
1974, Bergstrom 1975,
Snow etGuy
1976). L’athlète ne doit bien évidemment subiraucune détérioration musculaire et doit pou- voir
reprendre
son activitéphysique rapide-
ment.
L’emploi d’aiguille
àbiopsie
depetit
dia-mètre (2 à 5 mm)
permet
deprélever
en toutesécurité des échantillons de muscle de 10 à 100 mg à une
profondeur
de 5 à 8 cm(figure
1).Sur le
cheval,
on effectue d’abord unnettoyage antiseptique
sur la zonepréalablement tondue ; puis,
10 minutesaprès
une anesthésie locale sous-cutanée, onpratique
unepetite
incisioncutanée
jusqu’à l’aponévrose
musculaire. Ceci permet de passerl’aiguille
àbiopsie
directe-ment dans le muscle sans avoir à transpercer la peau
qui
est très sensible chez le cheval. Labiopsie
ainsi réalisée n’est pasdouloureuse,
lacicatrisation est nette et
rapide
et le chevalpeut
retravailler sansrisque
une heureaprès.
Plusieurs
aiguilles
sontdisponibles
maistoutes fonctionnent sur le même
principe.
L’aiguille
deBergstrom
(1975) de 5 mm de dia-mètre est utilisée chez l’athlète humain et le cheval pour
prélever
des échantillons de taille suffisante pourl’histologie
(environ 100 mg).Dans nos travaux sur des chevaux de sport ou de course, nous
préférons
utiliser desaiguilles
de
plus
faible diamètre (2 mm)guère plus
traumatisantes
qu’une simple aiguille
àinjec-
tion intramusculaire
(Barrey
et al1994,
Valette et al 1994). Cette méthode debiopsie requiert cependant
d’autrestechniques
dedosage
quel’histologie
car la masse de tissuprélevée
n’est que de10 à 30 mg.
Le muscle
prélevé
est immédiatementplacé
dans un tube pour être
congelé
dans l’azoteliquide
et conservéjusqu’au
moment de l’ana-lyse.
Pour effectuer des coupeshistologiques,
ilfaut
talquer
ou humecterd’isopenthane
l’échantillon afin de faciliter la réalisation des coupes
histologiques.
1.
2 / Méthodes d’analyse
Les
analyses
du tissu musculaire caractéri- sent le typemétabolique (aérobie,
anaérobie ou mixte) ou letype
contractile (lent ourapide)
des fibres musculaires par différentes tech-
niques.
On endistingue
troiscatégories :
l’his-tologie, l’électrophorèse
etl’immunoenzymolo- gie.
Lesplupart
des travaux chez le cheval etl’athlète humain ont eu recours à une tech-
nique histologique : l’histoenzymologie.
Elle al’avantage
de donner de nombreuses caracté-ristiques
sur les fibres musculaires mais sa mise en oeuvre est trèslongue
(Lindholm etPiehl
1974,
Snow etGuy
1980). C’est cette méthodequi
a été àl’origine
de la classifica- tion des fibres selon les typesI,
IIA et IIB àlaquelle
nous nous référerons dans cet article.a / Méthodes de
typage histoenzymatique Après
dissection de labiopsie musculaire,
des coupes transversales à l’axe des fibres musculaires sont
préparées
au microtome pour être ensuite coloréesspécifiquement.
Les diffé-rences d’activité
enzymatique
des ATPases de lamyosine
sont révélées par une double incu- bation des coupes dans des solutionstampon
acide
(pH 4,3 puis 4,6), puis
alcaline(10,3).
Aumicroscope,
les fibres lentes (I)apparaissent
alors en
foncé,
les fibresrapides
IIA en clair etles fibres
rapides
IIB engris (figure
2). Ledénombrement de 200 à 500 fibres sur chacune
des coupes
histologiques
conduit au calcul desproportions numériques
des troistypes
de fibre. La surface relative des fibres muscu-laires
peut
être mesurée par desprocédés
informatisés
d’analyse d’images.
D’autres colo- rationspeuvent
être utilisées pour mesurer la densité descapillaires
et des mitochondries.b / Méthodes de typage par
électrophorèse
Les différences de
poids
moléculaire et decharges électriques
des chaînes lourdes de lamyosine
lente etrapide permettent
de lesséparer
par latechnique d’électrophorèse
surgel
depolyacrylamide.
Si l’on désire unesimple
mise en évidence ou undosage
semi-quantitatif
dechaque type
demyosine,
laméthode de
séparation
parélectrophorèse
estutilisable (Billeter et al
1987,
Hermanson et al 1991). La lecture des bandes par un densito- mètre fournit une mesurequantitative
de lacomposition
en fibres des troistypes.
Lasépa-
ration des fibres lentes et
rapides
est facile àréaliser,
les fibres I étant cellesqui migrent
leplus
lentement. Par contre, laséparation
desfibres
rapides
IIA et IIB estplus
délicate.L’identification des bandes
peut
se faire à l’aide de deux références enmyosine
lente etrapide :
le muscle de lajoue
(masséter)qui
necontient que de la
myosine
lente et un musclecutané (cutaneus tronci)
qui
ne contient quedes fibres
rapides
(Picard et al 1994). Onpeut également
utiliser desanticorps
monoclonauxanti-myosine
lente etrapide
pour identifier les bandes sur legel,
ils’agit
alors de latechnique
dite
&dquo;d’immunoblotting&dquo;.
c / Méthodes de typage
immunologique
Les chaînes lourdes de la
myosine
lente etrapide
ont despropriétés antigéniques
dis-tinctes
qui
ontpermis
depréparer
des anti-corps monoclonaux
anti-myosine
lente et anti-myosine rapide
(Winkelman et al1983, Léger
et al
1985,
Danieli Betto et al 1986) ou encoreanti-alphatubuline
(Horak et al 1991).L’emploi
de cesanticorps
en association avecdifférents
procédés
de marquagepermet
d’effectuer soit desdosages quantitatifs (Immunoblotting
etEnzyme
LinkedImmunoabsorbent
Assay
ouELISA),
soit des colorationsimmunohistologiques. L’emploi d’anticorps
monoclonauxdirigés
contre la myo- sine lente ourapide présente
l’intérêt d’unegrande
sélectivité dedosage
ou de marquagehistologique.
La
technique
ELISA dedosage
de lamyosi-
ne lente utilisée chez les
bovins,
est aussiapplicable depuis
peu chez le cheval(Barrey
etal
1994,
Picard et al1994,
Valette et al 1994).Elle
permet
d’effectuer uneanalyse quantitati-
ve de la
proportion
demyosine
lente (MHC 1)contenue dans une
biopsie
musculaire. Par rapport aux méthodeshistologiques,
cettetechnique
estplus rapide
etpermet
de traiterpar série un
grand
nombre d’échantillons.Cette méthode de
dosage permet l’emploi
depetites aiguilles
àbiopsie
peu traumatisantes.En
effet, l’intégralité
de l’échantillon musculai-re
prélevé peut
être doséepuisque,
contraire-ment à
l’histologie,
l’orientation des fibresn’intervient pas.
L’analyse
partechnique immunoenzymatique porte
ainsi sur une quan- titépondérale
de muscle biensupérieure
àcelle d’une coupe
histologique
(400 à 600 foisplus
dans le cas d’unprélèvement
avec uneaiguille
àbiopsie
de 2 mm). C’est semble-t-ilune méthode d’avenir pour les
analyses
mus-culaires de routine en
physiologie
de l’exercice.Les
techniques d’immunohistologie permet-
tent d’identifier sur des coupes sériées les fibres lentes et les fibres
rapides (Sinha
et Rose 1992). La distinction entretypes
IIA etIIB est
cependant
encoreimpossible
chez lecheval car il n’existe pas
d’anticorps
anti IIAou anti IIB comme chez le rat (Danieli Betto et al 1986).
Quelques
rares fibres ont une teinteintermédiaire entre lentes et
rapides,
corres-pondant
au faitqu’elles
contiennent les deux types demyosine
MHC 1 et MHC 2A. On lesappelle
les fibres IIC.1.
3
/ Classification des fibres musculaires
Plusieurs nomenclatures de
typologie
mus-culaire ont été
proposées
selon lesespèces
etles méthodes
d’analyse
mises en oeuvre. La notion de muscle à fibres rouges ou blanches n’est pasapplicable
chez le cheval car toutes les fibres contiennent de lamyoglobine qui
donne une teinte rouge
plus
ou moins foncée.La classification des fibres basée sur la révéla- tion de l’activité
enzymatique
de lamyosine
ATPase a été
largement adoptée
enphysiologie
de l’exercice
depuis
lespremier
travaux deBrooke et Kaiser (1970)
qui
mettaient en évi-dence les différents
types
de fibres muscu- laires. Enhistoenzymologie,
ondistingue
doncchez le cheval 3
principaux types
de fibres : untype à contractions lentes (I) et deux
types
àcontractions
rapides
(IIA et IIB). Selon le moded’incubation des coupes
histologiques,
onpeut également
trouver des fibres intermédiaires IIC (entre I et IIA) en faibleproportion
(moinsde 1% en
général)
chez l’adulte comme chez lepoulain
(Roneus et Lindholm1991,
Roneus 1993). Le tableau 1récapitule
lesprincipales caractéristiques
dechaque type
de fibre. Letype
contractile de la fibre selon la colorationATPasique
est étroitement lié à sespropriétés métaboliques :
aérobie(I),
anaérobie (IIB) ouaéro-anaérobie
(IIA,
IIC).Les
analyses électrophorétiques
et immuno-logiques
étantplus spécifiques
des caractéris-tiques
moléculaires de lamyosine,
elles amè-nent maintenant à
compléter
cette classifica- tion. L’étude de lacomposition
enmyosine
àl’intérieur de
chaque
fibre des muscles chez le rat a montréqu’il pouvait
exister des chaînes lourdes de lamyosine
différentes dans unemême fibre (Pette et al 1977, Danieli Betto et al 1986).
Ainsi,
les fibres lentes I sont consti- tuées de 57 à 100% de MHC 1 et lecomplé-
ment de MHC 2A. Les fibres
rapides
IIAcontiennent 69 à 100% de MHC 2A et le com-
plément
en MHC 1 et MHC 2B. Les fibresrapides
IIB contiennent unmélange
de MHC2B et MHC 2A.
Les
fibres
musculaires se
distinguent
essentiellement par leur vitesse de
contraction et leur métabolisme.
2 / Caractéristiques
fonctionnelles des fibres
musculaires
2.1 / Propriétés structurales,
contractiles
etmétaboliques
La
figure
3 schématise la structure molécu- laire de lamyosine qui
est constituée de 2 chaînes lourdes et de 4 chaîneslégères.
Lesdifférences de
qualités
contractiles résultent de la combinaison des éléments de base de lamyosine :
lente ourapide.
Les chaîneslégères interagissent
avec les filaments d’actine pour former lespoints d’ancrage
nécessaires au rac-courcissement de la fibre. Les têtes de la myo- sine constituées de l’association des chaînes lourdes et
légères
sont lesiège
de l’activitéATPasique qui permet
la contraction. Pour caractériser letype
lent ourapide,
ce sont leschaînes lourdes
qui
sont doséesspécifiquement
par un
anticorps (Léger
et al1985,
Danieli Betto et al1986,
Picard et al 1994).Les
quatre
types de fibres sedistinguent
par leurs
propriétés
contractiles et métabo-liques. Chaque
musclecomporte
unmélange
de ces différents
types
de fibres dans des pro-portions
variables selon sa fonction.Les fibres lentes (I) ont une vitesse de contraction 3 fois
plus
faible que celle des fibresrapides
et untemps
de relaxation 5 foisplus long
(Gollnick 1982). Ces fibres Idévelop- pent
une force maximale inférieure à celle desrapides
mais larépétition
des contractionspeut
durerplus longtemps
sansapparition
dephénomène
defatigue
(baisse de la force de contraction). Le métabolismeénergétique
estexclusivement aérobie et il consomme
plus particulièrement
des acides gras par l’intermé- diaire de laBéta-oxydation.
Ces caractéris-tiques métaboliques s’accompagnent
d’uneforte concentration de
myoglobine,
d’une densi- té élevée de mitochondries et de laprésence
denombreux
capillaires
enpériphérie
de la fibre.Tous ces éléments contribuent à
l’apport
et àl’utilisation de
l’oxygène
nécessaire au métabo- lisme aérobie de cette fibrespécialisée
pour les contractions successives delongue
durée. Ilexiste des muscles très riches en fibres lentes
comme le muscle de la
joue
des mammifères herbivores (masséter)qui
sert à la mastica- tion. Cetteproportion
élevée en fibres lentes est directement enrapport
avec sa fonctionpuisqu’il
doit se contracterpendant plusieurs
heures pour
permettre
au cheval de mécher lefourrage.
C’est le type même de travail muscu-laire d’endurance.
Les fibres
rapides
(II) sontcapables
de déli-vrer des contractions
puissantes pendant
unedurée
plus
limitée. Le cheval est uneespèce
dont les muscles locomoteurs sont très riches
en fibres
rapides :
environ 80%(IIA+IIB)
contre 40% chez l’homme pour le muscle fes-
sier moyen.
Les fibres II A sont à la fois
rapides
etdotées d’un métabolisme
énergétique
aérobieutilisant
principalement
leglycogène
commesource
d’énergie
par l’intermédiaire de lagly- colyse
aérobie et ducycle
de Krebs. Elles pos- sèdentpratiquement
autant demitochondries,
de
myoglobine
et decapillaires
que les fibres lentes. Ce sont donc des fibresrapides adap-
tées à soutenir un exercice musculaire de résistance : des contractions de forte
puissan-
ce,
développées pendant quelques
minutes.Les fibres IIB sont encore
plus puissantes
que les IIA. La
puissance
élevée des contrac- tions est associée à une fourniturerapide
d’ATP mais limitée dans le
temps.
Ellesconsomment de la créatine
phosphate
et duglycogène
par la voie de laglycolyse
anaérobiequi
aboutit à laproduction
d’acidelactique.
Leurs
caractéristiques
en font des fibresspé-
cialisées pour fournir des contractions très
puissantes
durantquelques
dizaines desecondes. Peu riches en
myoglobine,
ellesapparaissent
rouge clair etprésentent
unegrande
surface (sur les coupes transversales)qui
est enrapport
avec leurgrande puissance
de contraction.
Les fibres II C ont des
propriétés
intermé-diaires entre les fibres lentes I et les fibres
rapides
IIA. Elles sontprésentes
en très faibleproportion
chez l’adulte comme chez le pou- lain. Dans le cas de nécrose musculaire faisant suite à unemyosite,
leur nombreaugmente
comme si elles étaient un stade de maturation
obligatoire
entre la cellule indifférenciée (cel- lule satellite) et la fibre musculairespécialisée
lente (I) ou
rapide
(IIA et IIB). Ils’agirait
doncd’une forme transitoire de fibre
possédant
à lafois des chaînes de
myosine rapide
et lente.2.
2 / Relation
entrela fonction
etla
typologie d’un muscle
La
typologie
d’un muscledépend
avant toutde sa fonction
principale : posturale, propulsi-
ve,
respiratoire
ou autre. Lafigure
4présente
une
synthèse
des résultatsd’analyse
de diffé-rents muscles du cheval (Gunn
1978,
Snow etGuy 1980, Barrey
et al1994,
Valette et al 1994). Le muscle de lajoue
(masséter) est constitué à 100% de fibres lentes tandis que lemuscle cutané du
grasset
(cutaneus tronci) est constitué à98,5%
de fibresrapides.
Lepremier
actionne la méchoire inférieure pour la masti- cation des aliments et le second
agite
vivementle
pli
dugrasset
pour chasser les insectes. Lediaphragme
est riche en fibres lentes(près
de 70%)qui
permettent d’assurer la fonction ven-tilatoire en
principe
sansfatigue.
Les muscles locomoteurs ont descompositions
intermé-diaires
qui
sont liées à leurs fonctions motricesprédominantes : posturale (antigravitaire)
oupropulsive.
Parmiceux-ci,
les musclespropul-
seurs de l’arrière-main comme le semi-tendi-
neux
(semitendinosus),
le vaste latéral de la cuisse (uastus lateralis) et le fessier moyen(gluteus
medius) sont lesplus
riches en fibresrapides.
Chez d’autres mammifères(chien, wallabie),
les muscles situés enprofondeur
àproximité
des rayons osseux des membres sontplus
riches en fibres lentes que les autres musclesplacés plus superficiellement (Amstrong
1981).2.
3
/ Hétérogénéité de la typologie
intra-musculaire
Plusieurs études ont montré
qu’il
existaitune
répartition
nonhomogène
destypes
defibres à l’intérieur de
chaque
muscle. A titred’exemple,
le fessier moyen(gluteus
medius) comportedavantage
de fibres lentes enprofon-
deur
qu’en
surface (Kai 1984, Bruce et Turek 1985). Al’inverse,
les fibresrapides
IIB sontprésentes
enplus grande proportion
en surfacetandis que les fibres IIA ont une
répartition plus homogène.
Les muscles semi-tendineux (semitendinosus) etpectoral
transverse(pecto-
ralis transversus)présentent davantage
defibres lentes en
profondeur
(Gunn 1978). Cesgradients
de fibres à l’intérieur d’un mêmeChaque
musclecontient en
général plusieurs
types defibres,
enproportions
variables selon
sa
fonction.
Lors d’une contraction
musculaire,
lesfibres
lentes etrapides sont sollicitées,
dansdes
proportions
variant selon la
puissance
decontraction et
sa durée.
muscle
suggèrent
que les différentesparties
du muscle ne
jouent
pas exactement le même rôle. Pour lesemitendineux,
lapartie
laplus profonde
(riche en fibres lentes) assure letonus musculaire nécessaire à la fonction pos-
turale,
tandis que lapartie
laplus superficielle
(riche en fibresrapides)
intervient dans la fonction depropulsion
pour pousser le membrepostérieur
vers l’arrière (extension fémorale et flexion fémoro-tibiale).Chez le rat, les muscles extenseurs
profonds
sont riches en fibres lentes et
homogènes (soleus),
tandis que les extenseurs
placés plus superfi-
ciellement
présentent
ungradient
croissant defibres lentes de l’extérieur vers l’intérieur
(plantaris, gastrocnemius) (Amstrong
1981).Certains muscles
présentent
de véritablescompartiments ayant
desproportions
en fibresassez distinctes. Le fessier moyen, par
exemple,
est constitué de deuxcompartiments séparés
par une membrane decollagène :
l’undorsal est
plus
riche en fibres lentes (25 contre 11% dans leventral),
l’autre ventral estplus
riche en fibres
rapides
(89% contre 75% dansle dorsal) (Bruce et al 1993).
Cette variation de
composition
en fibres àl’intérieur de
chaque
muscle doit êtreprise
encompte
pourinterpréter
les résultatsd’analyse provenant
d’échantillons musculaires. Elle pose des difficultés dereproductibilité
desbiopsies
etplus particulièrement
desmicropré-
lèvements. En standardisant
l’emplacement
etla
profondeur
de labiopsie
afin de minimiserla source de variation
intra-musculaire,
lesrésultats de deux
biopsies
successives varient tout de même de 6 à 12% selon letype
de fibre(Lopez-Rivero
et al 1991).2.
4 / Influence de l’innervation
etnotion d’unité motrice
Les fibres musculaires sont commandées par des motoneurones dont le corps cellulaire est situé dans la moelle
épinière.
Un nerfmoteur
comprend
de nombreux motoneuronesqui
innervent chacunplusieurs
fibres muscu-laires.
Chaque
fibrereçoit
une seule terminai-son nerveuse
appelée
synapse. Cette interfaceavec le muscle ou
plaque
motrice est le lieu depassage et de traduction de l’influx nerveux
qui
contrôle le déclenchement des contractions de la fibre. Sous laplaque motrice,
on observeà l’intérieur de la fibre musculaire un regrou-
pement
deplusieurs
noyaux cellulaires fonda- mentaux et une concentrationmarquée
d’ARNmessagers à
partir desquels
lesprotéines
sont traduites(Klarsfeld
1991).Une unité motrice est donc constituée d’un motoneurone, de ses axones
qui
innervent les différentes fibres dans un même muscle. Cetteorganisation
arborescenteimplique
que toutes les fibres musculaires innervées par le même motoneurone ont les mêmespropriétés
contractiles et se contractent simultanémentlorsque
l’influx nerveux se propagejusqu’aux
synapses.
Les
expériences
d’innervation croisée ont montré que lescaractéristiques
d’activité élec-trique
du motoneurone déterminaient latypo- logie
de la fibre musculaire innervée (Buller et al1960,
Monod et Flandrois 1985). Les moto-neurones à conduction lente et seuil d’activa- tion bas innervent les fibres lentes. Ces der- nières sont donc les
premières
à être activéeslorsqu’un
mouvement est initié. Les unités motrices sont peufatigables
etpeuvent
ainsise contracter un
grand
nombre de fois sans que la force de contraction diminue. Al’opposé
lesfibres
rapides
sont innervées par des motoneu-rones à conduction
rapide
et au seuil d’activa- tionplus
haut. Les unités motricesrapides
sont stimulées
après
les fibres lenteslorsque
l’effort demandé s’intensifie. Les unités motrices
rapides
sont constituées d’unplus grand
nombre de fibres que les unités motrices lentes. Cetteorganisation
est doncparticuliè-
rement
adaptée
aux contractions brèves de fortepuissance.
Les unités motrices des fibres IIA sont moinsfatigables
que celles des IIB mais elles sont aussi moinspuissantes.
En fonction de la
puissance
de la contrac-tion
musculaire,
on assiste au recrutement d’un nombre croissant d’unités motrices pourdévelopper
les forces nécessaires à la réalisa- tion du mouvement. Deplus,
il existe une hié-rarchie de recrutement
parmi
les unitésmotrices en fonction de la
puissance
de lacontraction : les unités motrices lentes entrent
en action les
premières, puis
interviennent les unitésrapides.
Selon la durée et lapuissance
de
l’exercice,
laproportion
dechaque type
des fibreschange.
Plus on demande de lapuissan-
ce sur une durée brève (1
minute), plus
lesfibres anaérobies
rapides
(IIB) interviennenten
grande proportion.
Al’inverse,
si l’effort estprolongé plusieurs minutes,
voireplusieurs heures,
les contractions depuissance plus
modérée ne
peuvent
être assurées que par les fibres aérobies (I etIIA).
3 / Facteurs de variation de la
!
typologie musculaire
Comme toutes les
protéines,
lamyosine
estsynthétisée d’après
l’informationgénétique apportée
par les ARN messagers, eux-mêmesprovenant
de latranscription
de l’ADNnucléaire. La
séquence
des acides aminés de lamyosine
est doncparfaitement
déterminée par le codegénétique
et lesgènes
codant pour les chaînes de lamyosine
et l’actine sont identifiéschez la souris et l’homme
(Buckingham 1989,
1992). Il semble d’ailleurs que la variabilitéinter-spécifique
des chaînes lourdes de la myo- sine soitfaible,
tout du moins chez les mammi-fères,
dans la mesure où les mêmesanticorps anti-myosine
lente croisent sur le rat,l’homme,
les bovins et leséquins (Léger
et al1985,
Robelin et al1993,
Valette et al 1994).Le déterminisme de la
typologie
musculairecomporte
donc inévitablement une composantegénétique
maisl’expression
desgènes
est sou-mise à une
régulation complexe qui intègre
demultiples
facteursendogènes
etexogènes
telsque
l’innervation,
le sexe,l’âge
et l’étatd’entraînement
(Periasamy
et al 1989).A l’intérieur d’une fibre
(longue
deplusieurs
dizaines de cm)
qui comprend
des centaines denoyaux
cellulaires,
il semble quel’expression
des
gènes
soitdépendante
de larépartition spatiale
des noyaux dans la fibre (Klarsfeld 1991).Ainsi,
les noyaux siués sous laplaque
motrice auraient un rôle
régulateur prépondé-
rant par rapport aux noyaux secondaires
pla-
cés le
long
de la fibre.3.1 / Facteurs génétiques
Chez
l’homme, plusieurs
études ont montréune
plus grande
ressemblance de latypologie
musculaire entre des vrais
jumeaux (homozy- gotes) qu’entre
des fauxjumeaux (hétérozy- gotes)
ou frères et soeurs (Komi et al1973, 1977,
Prudhomme et al1984,
Simoneau et al 1986). Les facteursgénétiques
ont surtout uneinfluence sur la
proportion
de fibreslentes/rapides
alors que laproportion
de fibresrapides
IIA/IIB estdavantage
soumise à des facteursextra-génétiques
tels quel’âge,
le sexeet l’entraînement. Chez le
cheval,
aucuneétude n’a mis en évidence la composante
géné- tique
de cescaractéristiques
musculaires du fait de la lourdeur desanalyses histologiques
àmettre en oeuvre pour aborder une telle étude de
génétique quantitative.
Par contre, l’influence de la race sur latypologie
moyennede certains muscles locomoteurs a été
présen-
tée à
plusieurs reprises (figure
5) (Snow etGuy
1980). Pour un muscle locomoteurmajeur
comme le fessier moyen, les races de course
telles que le Pur sang
(Thoroughbred)
sontmieux dotées en fibres
rapides.
Al’inverse,
lesraces
plus rustiques (Hunter,
Andalou)possè-
dentplus
de fibreslentes,
moinspuissantes
mais aussi moins
fatigables.
Une étude por- tant sur latypologie
des muscles semitendi-neux,
pectoral
transverse etdiaphragme
dechevaux
appartenant
à trois groupesgéné- tiques
(Pur sang, croisés de Pur sang et racesde selle
rustiques)
montre des différencessignificatives
entre groupes pour ces deux muscles. Laproportion
de fibresrapides
décroît des chevaux Pur sang au groupe des
races
rustiques,
les croisés de Pur sang sesituant entre les deux (Gunn 1978). Par
ailleurs,
l’étude du nombre total de fibres d’une section transversale du semitendineux dans ces mêmes groupes montre que les Pur sang ont un nombre total de fibresplus
élevé (Gunn 1979).Pour
l’instant,
il n’existe pas d’estimation de l’héritabilité des caractères musculaires chez le cheval maisquelques
valeurs sontproposées
dans d’autresespèces
de mammi-fères dont les processus de
myogenèse
et deLes muscles locomoteurs contiennent
plus
de
fibres rapides
chez les chevaux de
course par
rapport
aux races
plus
rustiques.
régulation
sont trèsproches (Barrey
1994).Chez l’athlète
humain,
laproportion
en fibreslentes du muscle vaste latéral a une héritabi- lité de 30 à 55% (Lortie et al 1984). Chez le mouton, l’héritabilité de la
proportion
enfibres lentes du muscle scuto-auriculaire serait de 27 à 46%
(Vigneron
et al1986),
tan-dis que, chez les
bovins,
elle serait de 24%pour le muscle
long
dorsal (Andersen et al 1977).3.
2
/ Effet de l’âge
etdu
sexeDu stade foetal de
180 j jusqu’au
stade depoulain
de 18mois,
lacomposition
du muscle semitendineux en fibres lentes augmente pro-gressivement
dequelques pourcents
àplu-
sieurs dizaines de
pourcents
(Gunn 1991). Parailleurs,
entre la naissance etl’âge
de 2 ans lenombre total de fibres du muscle semitendi-
neux
augmente
et cettehyperplasie
estplus marquée
chez les chevaux de race Pur sang (Gunn 1979).Deux
études,
réaliséesrespectivement
surdes chevaux de race Trotteurs américains et Pur sang, ont montré que la
proportion
enfibres lentes du muscle fessier moyen augmen- tait
légèrement
del’âge
de 1 an à 4 ans (Roneus et Lindholm1991,
Roneus 1993).Chez le Trotteur
américain,
laproportion
enfibres
rapides
IIA tend àaugmenter
de 8 à 10points
entre 1 et 6 ansd’âge
tandis que la pro-portion
en fibres IIB décroît de 13 à 14points pendant
le mêmetemps (figure
6). On observeles mêmes tendances chez le Pur sang. Le pro- tocole
expérimental
de ces études ne permet- tait malheureusement pas dedistinguer
l’influence de
l’âge
et celle de l’accumulationdu travail d’entraînement
qui
commence vers18 mois chez les chevaux de course. Chez les
bovins,
l’évolution desproportions
en fibresrapides
évolue avecl’âge
en sens inverse de la tendance observée chez le cheval : la propor- tion des fibres IIA diminue alors que celle des IIBaugmente
(Robelin1990,
Micol et al 1993).Ce
phénomène pourrait
être lié au manque ou à l’absence d’exercicephysique
réalisé par ces animaux deproducteurs
de viande. Chez les chevaux mis au reposforcé,
on observe aussiune
augmentation
relative de laproportion
desfibres IIB.
Seules les
proportions
en fibresrapides
sontdépendantes
du sexe (Roneus et Lindholm1991,
Roneus 1993). Lesjuments
ont un rap-port
en fibres IIA/IIBplus faible,
des surfaces de fibres IIA moins étendues et des surfaces de fibres IIBplus
étendues que les étalons(pour
le muscle fessier
moyen).
3.
3 / Effet de l’entraînement
De nombreux travaux ont mis en évidence l’influence du travail d’entraînement sur l’évo- lution de la
typologie
musculaire et des activi- tésenzymatiques
du métabolismeénergé- tique.
Il est en effetprimordial
pour l’athlète et l’entraîneur de savoir si un travailphysique particulier peut
modifier favorablement latypologie
musculaire. En d’autres termes,peut-on développer
lesadaptations
muscu-laires pour
spécialiser
un cheval pour lescourses de
plat
de courtedistance,
ou encorepour les courses d’endurance de 150 km ? Plusieurs études ont
rapporté
des effetssigni-
ficatifs du travail d’entraînement sur la com-
position
en fibres musculaires de certains muscles. Laplupart
des travaux ontporté
surles chevaux de courses au trot et au
galop.
Quelques
données sontégalement disponibles
sur le cheval d’endurance. D’une manière
générale,
leschangements
de laproportion
des fibres musculaires
dépendent
de la natu-re, de
l’intensité,
de la durée cumulée du tra- vail d’entraînement et del’âge
dusujet
entraîné.
Chez les chevaux de courses trotteurs
adultes,
on observe des modifications de la pro-portion
et des surfaces de fibres du muscle fes- sier moyenaprès
unepériode
d’entraînement intense de deux semaines (Gottlieb-Vedi 1988).La
proportion
en fibres IIAaugmente
tandisque celle en fibres IIB diminue et que celle en
fibre I reste
inchangée. Après
12 semainesd’entraînement,
lacomposition
en fibres restesemblable à celle observée
après
les deux pre- mières semaines. La surface relative des fibres IIA s’accroîtégalement pendant
les deux pre- mières semainespuis
se stabilise. Chez legalopeur
les mêmes tendances sont observéesaprès
unepériode
d’entraînement intense. Le travail en résistance(puissance
maximale pen- dantplus
de 5 minutes)augmente
donc le rap-port des fibres IIA/IIB et la surface relative des fibres IIA.
Chez les chevaux Pur sang,
âgés
de 2 à9 ans, une