A NNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE T OULOUSE
P. G ARBE
Recherches expérimentales sur le rayonnement
Annales de la faculté des sciences de Toulouse 1resérie, tome 1, no2 (1887), p. F1-F64
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F.I RECHERCHES
EXPÉRIMENTALES
SUR
LE RAYONNEMENT,
PAR M. P.
GARBE,
Chargé de cours à la Faculté des Sciences de Poitiers.
INTRODUCTION.
Lorsqu’un
corpssolide, placé
dans levide,
estporté
à destempératures graduellement croissantes, l’énergie rayonnée
par ce corps va enaugmen-
tant, et en même
temps
la nature duflux rayonné
se modifie.Draper 1 ’ )
et,après lui,
d’autresphysiciens
ontmontré,
eneffet, qu’à
mesure que le corps s’échauffe etpendant
que les radiationsqui composent
sonrayonnement augmentent
deplus
enplus d’intensité,
de nouvelles radiationsapparaissent
en suivant l’ordre des
réfrangibilités
croissantes. Leproblème
du rayonne-ment contient
donc,
commefacteurs,
troisquantités qu’il
y a lieu de consi- dérer comme intimement liées les unes aux autres : latempérature
du corps,l’énergie
totalerayonnée
et l’intensité dechaque
radiation dans ce flux total.Dep’uis
Newton et surtoutaprès
lesremarquables
travaux deDulong
etPetit,
on aspécialement
donné le nom de loi durayonnement
à la relationqui
existe entre les deuxpremières
de cesquantités,
et les efforts de presquetous les
physiciens qui
se sontoccupés
de cettequestion
se sontportés
surl’établissement de cette loi. La formule donnée par
Newton,
R =mat,
n’apas tardé à être reconnue inexacte pour des excès de
température
un peunotables ;
elle a étéremplacée
par celle deDulong
etPetit,
R =r),
( 1 ) Philosophical Magazine, t. XXX; i 8~7.
qui,
enintroduisant
comme facteur latempérature
0 del’enceinte, s’accordé
avec
l’expérience
tant que l’excès t nedépasse
pas 300°environ.
Au delà decette
limite,
cette loi elle-même a été reconnue inexacte parplusieurs expé-
rimentateurs et récemment par M. Rivière
(’ ),
dont lesrésultats,
obtenuspour des excès de
température qui vont j usqu’à 1000°,
n’ont pas été tra- duits en formule.D’autres relations ont été substituées à celle de
Dulong
et Petit.D’après
lI. Stefan( 2 ),
si l’ondésigne
par T latempérature
absolue ducorps,
par t
celle de l’enceinte danslaquelle
il serefroidit,
lerayonnement
dans le vide est donné par la formule .
c’est-à-dire que le
rayonnement
absolu d’un corps estproportionnel
à laquatrième puissance
de satempérature
absolue. Cette loirend parfaitement
compte
des résultats deDulong
et Petit et s’accorde surtout avec ceux obte-nus par de La
Provostaye
etDesains ;
mais lesexpériences
de Rivière etcelles
plus
récentes de lI. Schleiermacher(3)
montrentqu’aux températures
élevées elle s’écarte de l’observation en sens inverse de la loi de
Dulong
etPetit, c’cst-à-dire
que le coefficientA,
au lieu de demeurer constant, devrait"
aller en
augmentant
avec latempérature.
Faut-ilrejeter,
de cechef,
la loide
Stefan,
ou bien devons-nous admettre que Avarie,
eneffet,
avec latem-
pérature ? D’après
la loi deKirchhoff,
A est unequantité proportionnelle
au
pouvoir
absorbant du corps à latempérature considérée;
or, si la con-stance de cette
quantité
caractérise un corpsparfaitement noir,
il faut re-connaître que la
plupart
des substances sont loin de satisfaire à cette condi- tion et que, pour leplatine,
enparticulier,
cettequantité augmente
deplus
du double de sa valeur de I00° à I000°
( 1 ).
D’ailleurs il est à remarquer que cette loi de Stefan vient de trouver un
appui
considérable dans les recherchesthéoriques
de M. Boltzmann( ~ ).
Cesavant, en
appliquant, après
àI.Bartholi,
aurayonnement calorifique
lesecond
principe
de laThermodynamique
et en combinant les résultats ainsi( 1 ) Annales de l’École Normale; I884.
( z ) Wien. Ber., 79 ( II ), p. 3g i ; ; I8zg.
(3) Wiedemann’s Annalen, Bd. 26, S. 237.
. (4) NICHOLS, Ref. in Beibl., 3, p. 864; I879.
, (5) Wiedemann’s .Annalen, Bd. 22, S. 29I.
obtenus avec d’autres fournis par la théorie
électromagnétique
de la lu-mière,
est arrivéprécisément
à la relation de Stefan. Il y a làplus qu’un
hasard
heureux,
et il estpermis
de penser que cette loipourra
être vérifiéeexpérimentalement
si l’onopère
avec un corps serapprochant plus
que leplatine
du corps noir absolu et à destempératures
assez élevées pour que lescorrections, toujours incertaines,
relatives àl’enceinte, puissent
être né-gligées
sans erreurappréciable.
Une seconde relation doit exister entre la
température
du corps et l’in- tensité d’une radiationsimple
constitutive durayonnement,
et il est clairque là connaissance de cette loi
entraînerait,
par uneintégration
relative àla
longueur d’onde,
la connaissance de lapremière.
Aussi a-t-elle étél’objet
d’un certain nombre de recherches
qui
ont surtoutporté
sur les radiationslumineuses, lesquelles
sontplus
facilement accessibles àl’expérience.
hI. E.Becquerel,
dans un travail considérable surl’irradiation
des corps incandes-cents
(’ ~,
a trouvé que l’intensité des radiations rouge, verte etbleue,
trans-mises par des verres
colorés,
varie avec latempérature
suivant une loiexponentielle analogue
à celle deDulong
et Petit .dans
laquelle
6désigne
latempérature
àlaquelle prennent
naissance les ra-diations
considérées,
e la base deslogarithmes adoptés,
breprésentant
ainsile
logarithme
de la base desexponentielles, lequel, d’après
lesexpériences,
semble varier en raison inverse des
longueurs
d’onde.Dans une série
d’expériences
effectuées dans ces dernièresannées,
M. Violle( 2 )
arepris
laquestion
à ce mêmepoint
de vue, et il a trouvé que la radiation duplatine
incandescent dans l’airpouvait s’exprimer
par la formuledans
laquelle
T est latempérature
absolue du corps, b une constante, a une fonction dupremier degré
de lalongueur
d’onde etqui
s’annule pourÀt
===orom,
i environ et m un coefficient fonction de lalongueur
d’ondequi,
dans un flux
total, peut
servir à caractériser l’intensitécalorifique
relativede
chaque
radiation. Parconséquent,
à unetempérature T,
le flux total(i) Annales de Chimie et de Physique, 3c série, t. LXVIII; ; i863.
f v ) Comptes rendus des séances de l’Académie des Sciences, t. XCII, p. i 206.
’
peut
êtrereprésenté
parl’intégrale
dans
laquelle
m est unequantité qui
reste ° à déterminer pourchaque
valeur.
-
Est-il
permis d’admettre,
avec M. Christiansen1 ’ ),
que la loi deStefan, supposée
vraie pour le fluxtotal, s’applique
àchaque
radiationsimple, c’est-
à-dire que l’intensité de ce flux
puisse
être mise sous la formeCe serait admettre que l’intensité relative des diverses radiations se
main-
tient dans toute l’échelle des
températures ;
en d’autres termes, que la com-position
du fluxréprouve
aucunemodification lorsque
latempérature change.
Or lesexpériences
deDraper,
celles de M. E.Becquerel,
les résul-tats
précédemment
cités de M. Violle et enfin ceux duprésent
travailmontrent
qu’une
tellesupposition
est inadmissible.Il existe
donc,
dans le fluxtotal,
une loi de variation propre àchaque espèce
de radiations : c’est le troisièmepoint
de vueauquel
onpeut
sepla-
cer pour
envisager
leproblème
durayonnement.
En
s’affranchissant ainsi de laconsidération
detempérature,
on élimineune
grandeur qui,
par son évaluationtoujours
très délicate aux termesélevés de l’incandescence du corps,
impossible
même au delà de latempéra-
ture où la
porcelaine
seramollit, augmente,
dans lepremier
cas, la difficultédes
observations ets’oppose,
dans lesecond,
à cequ’elles
soientpoussées jusqu’à
ces limites où il est si intéressant depouvoir
suivre lephénomène.
Il est
clair, d’ailleurs,
que, cette relation une foistrouvée,
il serapossible
d’en déduire la loi de variation d’une radiation avec la
température,
si l’onadmet connue la
première
loi. Eneffet, des
relationson déduira
(1) Wieclemann’s Annalen, Bd. 19, S. 268.
En
particulier,
si l’onconsidère,
pour unetempérature T,
deuxradia-
tions de
longueurs
d’ondeÀ., À2’
on aura ,et cette dernière relation pourra servir à définir la
température T, d’après
la loi
supposée
exacte à toutetempérature
R =/,(T) et jusqu’aux tempéra-
tures les
plus
élevéesqui
auront été atteintes dans lesexpériences
de déter-mination de la fonction
’-P-
Les résultats obtenus sur ce
point
sont peu nombreux : lesexpériences
de
Draper (’ )
sur un fil deplatine
renduincandescent,
dansl’air,
par le passage d’un courant; celles de Zôllner(~),
danslesquelles
on compare l’effetcalorifique
à l’action lumineusetotale,
n’ont trait que d’une manièreindirecte
ausujet
actuel. M. E.Becquerel,
dans le travaildéjà mentionné,
s’est
occupé
incidemment de cettequestion,
et il arrive à la conclusion sui-vante : « Si l’on compare la
quantité
àI de chaleur émise dans l’unité detemps
à l’intensité de la lumière émise par un rayon de couleurhomogène,
on reconnaît
qu’à partir
de la limite de/;8o~
àlaquelle
les rayons lumineux commencent à êtreémis,
l’intensité lumineuse des rayonsrouges
croît
beaucoup plus rapidement
que laquantité
dechaleur,
sansqu’il
y aitaucune loi
simple qui
lie ces deuxquantités
l’une à l’autre. Entre les limites desexpériences,
et si l’on nomme m laquantité
de chaleurrayonnée
aumoment où le corps devient
lumineux,
on aura sensiblementB étant un coefficient constant. »
’
La
longueur
d’onde moyenne du verre rougeemployé
par M. E. Bec-querel
était d’environ et lerayonnement
total était donné par unepile thermo-électridue placée
dans le vide en mêmetemps
que la source in- candescente.Nous aurons l’occasion de revenir sur ces déterminations
qui,
bienqu’in- complètes, puisqu’elles
neportent
que sur une radiation ouplutôt
sur unensemble de radiations transmises par le verre rouge, ont
cependant
conduitleur auteur à un
type
de formulequi,
sauf les modifications que nous indi-( i ) Loc. cit. ’ ’
(2) Photometrische Untersuchungen ( Basel ; 1859).
querons dans la
suite, paraît représenter
lephénomène
à tous lesdegrés
d’incandesccncc du corps. -
-
Dans ces dérniers
temps, l’apparition
deslampes
à incandescence a forcé-ment ramené l’attention et les recherches sur le
rapport qui pouvait
existerentre
Fénergic électrique dépensée
dans ceslampes
et leurpouvoir
lumi-neux; toutefois les
expériences qui
ont été faites dans cette voies’éloignent,
par leur caractère
particulièrement pratique,
de l’ordre d’idées suivi dansce travail. C’est ainsi que M. le Dr Voit
représente
par la formule L = aA3 la relation entrel’énergie
A et l’intensité lumineuse totale L. M. Goëtz~’ ),
dans une étude sur les
lampes Crutto, remplace
cette formule par la sui-vante : L = aA + bA2. Cette dernière formule est
appliquée
par M. Shu-mann
( 2 )
aux radiationssimples ;
maissi,
aupoint
de vuepratique,
ellepeut
être considérée comme suffisamment exacte, du moins pour les
degrés
élevés
d’incandescence,
il est clairqu’elle
est peu propre à mettre en évi- dence lespropriétés particulières
àchaque
radiation dans lephénomène
durayonnement.
Ce travail a été fait au laboratoire de
Physique
de la Faculté des Sciences deàlontpellier,
M. Crova a mis avecempressement
à madisposition
lesressources de son laboratoire et
jusqu’à
sesappareils particuliers
de re-cherche :
je
suis heureux depouvoir
l’en remercier ici.’
( 1 ) Centralblatt fiir Electrotechnik, n° 33.
(2) Electrotechnische Zeitschrift; mai i88 j.
PREMIÈRE PARTIE.
MÉTHODE EXPÉRIMENTALE. 2014 MESURES
ÉLECTRIQUES. -
PHOTOMÉTRIQUES. 2014
DISPOSITION GÉNÉRALE DES APPAREILS.. I. - MÉTHODE EXPÉRIMENTALE.
Draper,
M. E.Becquerel
et Zôllner ontemployé,
comme corps incan-descent,
un fil deplatine porté
à destempératures
deplus
enplus
élevées .par le passage d’un courant. On a
préféré,
dans les recherchesqui
vontsuivre, prendre
le filament de charbon telqu’il
se trouvedisposé
dans leslampes
à incandescence. Le charbon étant un corps noir et mat à l’état ordi-naire,
onpeut espérer
que lespropriétés
de sa surface resteront les mêmesà tous les
degrés
d’incandescence etqu’ainsi
lephénomène
du rayonnementne se
compliquera ’
pas d’une variation dans lepouvoir
émissif aux diffé-rentes
températures.
En outre, lephénomène
pourra être suivijusqu’à
destempératures
biensupérieures
à celle de la fusion duplatine. Enfin,
lecharbon étant moins bon conducteur de la chaleur que les
métaux,
l’in-fluence
refroidissante despoints
d’attache du filament estbeaucoup
moinsconsidérable qu’avec
leplatine
et devientnégligeable
pour des filaments dequelques
centimètres delongueur
seulement. Ceslampes,
ou du moinscertains
types
d’entreelles,
sont d’ailleurs immédiatementdisposées pour
l’expérience, puisque
le vide y a étéfait, préalablement,
avec leplus grand soin,
au moment de leur construction.,
La
méthodeemployée
consiste à évaluer lerayonnement
total par le tra- vailélectrique dépensé
dans la .lampe
et à déterminer auspectrophoto-
mètre l’intensité lumineuse d’une radiation par
rapport
à l’intensité de cettemême radiation dans une source auxiliaire
supposée
constante. M. E. Bec-querel,
dans le travail citéprécédemment,
apréféré
mesurer le rayonne-ment par l’intensité du courant
développé
dans unepile thermo-électrique
soumise à ce
rayonnement.
Il a eusoin, d’ailleurs,
de vérifierpréalable-
ment la
proportionnalité entre
cette intensité et le travailélectrique
évaluédirectement.
Aujourd’hui,
y que lesappareils
de mesuresélectriques permettent
d’ob-tenir avec une
grande approximation
les élémentsde
cetravail,
il m’aparu plus
exact, sinonplus rapide,
de mesurer, pourchaque
état de lalampe,
l’intensité du courant
qui
la traverse et la différence despotentiels
à sesbornes. Du
produit
de ces deuxquantités
ondéduit,
par la loi deJoule,
laquantité
de chaleurdégagée
dans le filamentpendant
l’unité detemps.
Il faut remarquer,toutefois,
que cette relation fondamentale n’a été établieexpérimentalement
par Joule et vérifiée ensuite par Lenz que dans le cas où le fil traversé par le courant, étantplacé
au contact duliquide
du calori-mètre,
dont latempérature
s’élevait peu, ne devenaitjamais
incandescent.Il était donc utile de
faire,
aupréalable,
cette vérification sur un fil libre-ment incandescent comme il doit l’être dans les
expériences
derayonnement
et en se servant des
appareils calorimétriques auxquels
onpeut
accorder leplus
de confiance.Vérification de
la loi de Jo ule dans le cas desfils
incandescents.‘
Le calorimètre
employé
est celui de M. Berthelot : il est enplatine,
d’unecontenance de Goocc
environ, protégé
contre le refroidissement par un pre- micr vasemétallique
et une enceinte extérieureremplie
d’eau. Deux ther- momètresBaudin,
donnant lc5.0
dedegré
par division de0m, 00I environ,
-’
plongent,
l’un dans l’enceintc extérieure dont latempérature
ne doit varierque très peu dans l’intervalle de
temps d’une expérience,
l’autre dans lecalorimètre par l’ouverture
rectangulaire
du couvercle.~
.
La
lampe
à incandescence surlaquelle
onopère
estsuspendue
au sein ducalorimètre par deux gros fils de cuivre recouverts de
gutta, qui
traversentensemble les ouvertures centrales des couvercles et viennent
plonger,
à leursortie,
dans deuxgodets A,
Bremplis
de mercure où aboutissentégalement
les fils de l’électromètre. Deux autresgodets,
situés en face des :vpremiers, reçoivent
les fils conducteurs du courant, assez gros pour nepas
.s’échauffer
pendant l’expérience.
Les mesuresélectriques
d’intensité etde
différence de
potentiel
sont faites avec lesappareils
dont ladescription
trou- yvera sa
place plus
loin. Le calorimètre avait été d’abordrempli
d’eaudis- , tillée,
en vue de mesuresabsolues ; mais
on s’est aperçu que, pour defortes
intensités du courant, des tracesd’électrolvse
se manifestaient entre lesfils
voisins de la
lampe
àincandescence
et l’on a dûemployer
unliquide plus /,/
isolant. L’alcool à
95°
isoleparfaitement
dans ces conditions et n’estpas ?
assez
hygrométrique
pour troubler lesexpériences.
Sa chaleurspécifique
n’est
pas
connue exactement, il estvrai ;
mais cette donnée estinutile,
du’ Fig. 1.. .
moment
qu’il
n’est besoin d’obtenir que lesquantités
relatives de chaleurdégagées. L’appareil calorimétrique
étaitplacé
dans une chambre presqueobscure,
sans fenêtres et ne recevant le soleil d’aucun côté.Les
expériences
étaient faites le matin : de cettefaçon l’équilibre
de tem-pérature
avait eu letemps
de s’établirpendant
la nuit entre les différentesparties
del’appareil. D’après
la nature duphénomène calorifique
à mesurer,il semblait naturel
d’appliquer
la méthode decompensation
deRumford,
en
portant
d’abord l’eau de l’enceinte extérieure à unetempérature supé-
rieure de 1° environ à celle du
calorimètre, puis
enfaisant passer
le courant. dans la
lampe jusqu’à
ce que latempérature
du calorimètre fût de 1° au-dessus de celle de
l’enceinte ;
maisici,
comme dans laplupart
des cas, ainsique l’a montré M.
Berthelot,
ce mode de correction est illusoire.D’abord,
en
disposant
ainsi de latempérature initiale,
on trouble l’étatd’équilibre
dont il vient d’être
parlé
et quel’expérience
montre être sipropice
à l’exac-titude des déterminations. En outre,
malgré l’agitation
duliquide
du calo-rimètre,
latempérature
ne cesse pasbrusquement
de monter aussitôtaprès
la
rupture
du courant, et, parsuite,
la marche ascendante destempératures
dans le calorimètre ne
peut
être arrêtée à volonté à une valeur fixée d’avance.Enfin il a
semblé qu’une
méthode de correction basée sur la loi du rayon-nement ne
pouvait s’appliquer
en touterigueur
ausystème complexe
formépar le calorimètre et l’enceinte extérieure
séparés
par deux couches d’air et une cloisonmétallique.
En seplaçant,
aucontraire,
dans les conditions in-diquées
par NI. Berthelot et enayant
soin que l’élévation detempérature
du calorimètre ne
dépasse
pas2°,
la correction derayonnement est insigni-
fiantc et le seul refroidissement
qu’éprouve
leliquide
est dû à la faible éva-poration
de l’alcool par suite de réchauffement et del’agitation.
Pour tenircompte
de ce refroidissementqui,
bien quefaible,
n’estcependant
pas né-gligeablc,
on a divisé la durée d’uneexpérience
en deuxpériodes : l’une
d’échauffement
rapide correspondant
au passage du courant dans lalampe,
l’autre d’échauffement lent suivi de refroidissement. ’ On a
appliqué
à lapremière
la moyenne des corrections initiale et finaleet à la seconde la correction finale. Le Tableau suivant donne la marche et
les résultats d’une
expérience :
^
. -
,
On voit par ce Tableau que la
température
de l’enceinte extérieure n’a varié que d’unefaçon insignifiante pendant
la durée assezlongue
d’une ex-périence complète,
et que cette variation nepeut
avoir aucune influence sur.la
température
ducalorimètre, puisque,
àl’origine,
cette dernière restaitfixe alors
qu’il
existait une différence de entre elle et latempérature
de l’enceinte.. - - :
L’électromètre
employé
était celui de M.Lippmann
et son indicationcorrespond
à une force électromotrice deodll,228
; il était relié aux bornes de lalampe
à travers5dll,
de sorte que la différence depotentiel
auxbornes
est de
5d11,22g.
Le calcul del’expérience
se fait de lafaçon suivante,
en rap-portant
réchauffement du calorimètre à cequ’il
serait si le courant avait.traversé
lalampe pendant
dix minutes : -En faisant varier l’intensité du courant et en même
temps
la durée du passage, on a obtenu les résultats suivants : ~ ~ .8e
8. e.
_
6, T’ ° Aspect du filament.
39 ’)49 o, 323 . , ~~g,g Complètement obscur.
~ 40, 5 4, 083 3,189 ~ ~g, 8 Rouge sombre.
’
1 87 , 8 5,228 5,433 180,7 )) vif.
~3r, ~ 6,25 8,02 180, 3 Blanc éblouissant.
On
voit,
par cesnombres,
que lerapport de l’énergie électrique dépensée
à la
quantité
de chaleurdégagée
au sein du calorimètre est constant. Cette chaleurreprésente l’énergie
totalerayonnée, puisque
lalampe
est à l’intérieurd’un vase
clos et opaque et que, parsuite,
toutes les radiations émises par. ’le charbon sont retenues et absorbées dans
l’appareil calorimétrique.
Lalampe qui
a servi à cesexpériences
fonctionnaitrégulièrement
avec dedifférence de
potentiel
auxbornes ; elle a
donc été surmenée dans les dé- terminationsprécédentes,
et la vérification se trouve ainsipoussée jusqu’au
terme le
plus ,élevé
del’incandescence
du filament decharbon,
c’est-à-dire à unpoint où,
comme on s’en est assuré auspectrophotomètre,
latempérature
optique
de lalampe
àincandescence
est biensupérieure
à celle du carcel.II. - MESURES ÉLECTRIQUES.
Mesure de la
différence
depotentiel.
,10
Électromètre
de M.Lippmann.
- Lapremière partie
des détermina-tions a été faite au moyen de l’électromètre de M.
Lippmann, auquel
on apu substituer dans la suite l’électromètre
Thomson,
modifié par M. Mascart..T’indiquerai
ici la manière dont ces deuxappareils
ont étéemployés.
L’élec-tromètre
capillaire,
fixé sur unsupport
enbois,
était solidement installécontre un des murs de la
salle ;
l’extrémitésupérieure
du tube était mas-tiquée
à l’une des branches d’un robinet en verre à trois voies dont la seconde branche étaitmastiquée
au manomètre àmercure
y tandis que la troisièmecorrespondait
à lapoire
encaoutchouc qui
donnait lapression
compensa- trice.L’emploi
de ce robinetpermettait
deséparer
à un moment donné le,tube
de l’électromètre de lapoire,
pour le laisser seulement en communica-tion avec le
manomètre,
et de conserver ainsi unepression
invariable dansl’appareil.
Les deuxfils
de l’électromètre venaient aboutir aux bornes d’uneclef
à troisprises A, B,
C( fig.
.2 ).
Dans l’état de repos, les filsa, ~3
sont enFig. 2.
contact et l’électromètre fermé sur
lui-même ;
enappuyant
sur la manetteM,
on relie les fils
x~ ~
aux bornesL,
L’ de lalampe.
Sur letrajet
des fils BL ouCL’ se trouvaient
placés
enopposition
depetits
éléments Daniell ennombre
suffisant pour que la différence de
potentiel
à l’électromètre fût inférieure à Un commutateurplacé
sur letrajet
des filsAoe, B~ permettait
mêmede rendre cette différence inférieure à
Odll,5
tout en conservant lapolarisa-
tion par
l’hydrogène
dans le tubecapillaire.
Pourconstruire
la courbede
graduation
de cetappareil,
on aurait pu s’adresser à la courbe donnée par QI.Lippmann
et déterminer lapression compensatrice correspondant
audaniell ;
maisl’emploi
de cette courbetype
suppose que l’on a satisfait à deux conditions :d’abord,
l’identité du daniellemployé
avec celuiqui
aservi aux
expériences
de M.Lippmann,
et l’on sait que cette identité n’est pas facile à obtenir en touterigueur ;
et en outrel’emploi,
dans l’électro-mètre,
d’un acide de même concentration. Les électromètres à mercure ne sont, eneffet, comparables
que pour une même concentration del’acide,
~
ainsi
qu’on peut
le voir de lafaçon
suivante. Soit xo la différenceélectrique
au contact entre le mercure et l’eau
acidulée,
c’est-à-dire cellequi
existe auménisque lorsque l’appareil
est fermé surlui-même ;
soit e la force électro- motrice variableinterposée
sur letrajet
des fils de l’électromètre : la diffé-rence
électrique
auménisque
est alorsPour une valeur e,n
de e,
lapression compensatrice
passe par un maximumcorrespondant
à une différenceélectrique
.
Cette différence
électrique,
ainsi que l’a montré M.Lippmann,
est con-stante
quel
que soit leliquide employé ; donc,
pour un autreliquide
dont ladifférence au contact du mercure est
x’o’
le maximum depression
compen- satrice s’obtiendra pour une valeurem
de e différente de lapremière
et sa-tisfaisant à la relation - .
Puisque, vraisemblablement,
les valeurs de xodépendent
de la concen-tration,
il faut s’attendre à ce quel’expérience
donnera pour em des valeurs différenteset,
parsuite,
les deux électromètres ainsi formés avec deuxliquides
distincts ne seront pascomparables.
C’est d’ailleurs ce que montre leTableau suivant,
où Ddésigne
la valeur en volts du daniellemployé :
On
peut
mêmeobserver,
ainsi que l’a montré M.Helmholtz,
etcomme j’ai
eul’occasion de le remarquer à propos de ces
recherches,
que la valeurde A
n’est autre que zéro et que, parsuite,
les nombresprécédents représentent
les différences au contact avec le mercure des
liquides employés. Ces
consi-dérations suffisent à montrer que les conditions de
comparabilité peuvent
être difficiles à réaliser
rigoureusement.
Aussi M.Lippmann conseille-t-il,
comme « aussi court et
plus direct »,
de faire àchaque appareil
sagraduation.
Cette
opération
neprésente
aucune difficultélorsque
l’onpossède
des boîtesde résistances bien construites. Il
suffit,
eneffet,
deplacer
dans le circuit deun ou deux éléments constants et de force électromotrice connue une résis-
tance fixe et connue R et une boîte à résistance variable p aux extrémités de
laquelle
on attache les fils de l’électromètre. Soient r la résistance de lapile,
E sa force
électromotrice ;
la différence depotentiel
aux deux fils est, àchaque instant,
en
supposant
la résistance totale assezgrande
pour que ses variations n’in- fluent pas sur la valeur de E. Onpeut encore
se servir de ladisposition
élé-gante
de M.Bouty, qui
consiste dansremploi
de deux boîtes de résistancesidentiques
dont l’une est débouchée et l’autre bouchéecomplètement.
Acette dernière aboutissent les fils de l’électromètre et le courant
supposé
constant traverse les deux boites. On enlève successivement des fiches de la seconde boîte pour les
placer
dans laposition correspondante
sur la pre-mière,
defaçon
à conserver au circuit la même résistance. On apréféré
em-ployer
la méthodesuivante, qui supprime l’usage
des boîtes de résistances etpar suite leur vérification. Soit P une
pile ( fig. 3 ~
munie d’un shunt S et Fig. 3.dont le courant traverse un
galvanomètre
G et une résistance constante AB devaleur
arbitraire d’ailleurs. En A et B aboutissent les fils del’électro-
mètre,
et sur l’un d’eux onplace
enopposition
l’élément E en fonctionduquel
on veut
graduer l’appareil.
Si l’ondésigne
par E la différence despotentiels
en A et
B,
la force électromotrice ecommuniquée
à l’électromètre sera;
Soient r la résistance de AB et i l’intensité du courant
qui
traverse legalva-
nomètre ;
on a ..et, par
suite,
Augmentons
cetteintensité,
en modifiant leshunt, jusqu’à
ce que l’élec-tromètre
revienne auzéro,
et soit 1 l’intensité à cetinstant ;
nous aurons, ensupposant
que r n’ait pasvarié,
-Des
équations (i)
et(2)
on déduitAinsi,
la valeur de e s’obtiendra àchaque
instant par une lecture augal-
vanomètre et en fonction de E. La valeur de i était donnée par un
galvano-
mètre à réflexion de Weber. La
pile
P n’a besoin d’être constante quependant
l’intervalle d’une lecture aux deuxappareils;
en outre, l’élémentd’opposition auquel
onrapporte
lagraduation,
ne travaillant que pourcharger l’électromètre, peut
être formé d’un étalon àgrande
résistance et à différence depotentiel
bien définie.Quant
à la variationpossible
de r par suite de l’échauffement du filAB,
il est facile de voirqu’elle
est absolumentnégligeable, puisque
cette résistance doit êtreprise
assez.grande
pourqu’un galvanomètre
sensible ne dévie que dequelques degrés,
sousl’action
du courant
qui
la traverse.Ce mode de
graduation
par variation continue de la force électromotricea
permis
de mettre en évidence unepropriété remarquable
de la courbe despressions compensatrices, qui
est d’êtresymétrique
parrapport
à l’ordonnéemaximum. Toutefois cette
symétrie disparaît
et la courbe se déformelorsque
cette force électromotrices’approche
de cellequi
détermine l’élec-’trolyse persistante
de l’eau acidulée. Mais on a vuprécédemment
que, en diminuant la concentration del’acide,
le maximum serapprochait
de l’ori-gine
et, parsuite,
il était àprévoir
que lasymétrie,
dans cecas,
se manifes-terait
plus
loin au delà de ce maximum.L’expérience
est en effet très nette avec l’eau acidulée au~,’~. Après
avoir établi dansl’appareil
unepression
dé-terminée,
on tourne le robinet à troisvoies,
defaçon
à mettre en communi-cation seulement le tube
capillaire
et lemanomètre,
et, au moyen d’unrhéostat à mercure et à vis
micrométrique
de M.Crova,
faisant fonction de shunt sur lapile P,
on détermine les deuxvaleurs e, e’,
endaniells,
de laforce
électromotrice, qui
amènent leménisque
au fil du réticule. Le Tableau suivant donne ces mesuresconjuguées
et leurs moyennes :Ce caractère de
symétrie
de la courbe estintéressant, puisque, joint
à larelation A
--. o, il entraîne cette.conséquence
que la valeur de la constantecapillaire
estindépendante
dusigne
de la différenceélectrique
auménisque.
Au
point
de vuepratique,
il aservi,
par une mesureconjuguée,
à détermi-ner, de
temps
entemps,
laposition
du maximum.Lorsque,
par suite del’évaporation,
la concentration de l’acide était modifiée et le maximumdéplacé,
on enlevaitcomplètement
leliquide et
on leremplaçait
par de l’eau acidulée conservée pourl’usage
dans un flacon bien bouché et, parsuite,
decomposition
bien déterminée. Mais on nepeut
songer à utiliser cettesymé-
trie pour la construction de la
courbe,
d’abord parce que laportion
de cettecourbe
qu’il
estimportant
de tracer avec soin est cellequi correspond
auxforces électromotrices inférieures à
o~",
5 etqu’elle
se trouve ainsi en dehors .de la
partie symétrique,
et, en outre, parcequ’il
y aintérêt,
aupoint
de vuede la
sensibilité
del’appareil,
à faire usage d’un acideplus
concentré que l’acideau :0’
afind’éloigner
autant quepossible
le maximum del’origine.
2°
Électromètre
Thomson-Mascart. -Malgré
la facilité de sacon- ’
struction et la sûreté de ses
indications,
l’électromètreprécédent
a été rem-placé,
dans lesmesures,
par l’électromètreThomson-Mascart lorsqu’on
apu
l’avoir à sa
disposition.
Ce dernieroffre,
eneffet,
pour cesexpériences,
oùla différence de
potentiel
n’a pas besoin d’être déterminée avec uneextrême
"précision, l’avantage
de donner cettequantité
par unesimple lecture,
au "lieu d’une
opération toujours
un peulongue, puisqu’elle
nécessitel’emploi Y:
de daniells
d’opposition. L’appareil
était installé sur une consolesolidement ;
fixée dans un des
angles
d’une salle voisine de la salled’expériences photo- y métriques.
Cette console était recouverted’une
cage vitrée surdeux
faces:.
et dont l’un des panneaux, en forme de