A NNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE T OULOUSE
Prix Fermat 1991
Annales de la faculté des sciences de Toulouse 6 e série, tome 1, n
o3 (1992), p. 293-294
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293
Prix Fermat 1991
Annales de la Faculté des Sciences de Toulouse Vol.
I, n° 3,
1992Organisé par l’Université Paul Sabatier de Toulouse et MATRA MARCONI
SPACE, le prix Fermat de recherches
enmathématiques 1991
aété décerné à JEAN-LOUIS COLLIOT-THÉLÈNE pour
sestravaux
surl’arithmétique
des variétés rationnelles, recherche dont
unegrande partie
aété menée conjointement
avecJEAN-JACQUES SANSUC.
La citation du jury ainsi qu’un article de J.-L. COLLIOT-THÉLÈNE basé
sur son
exposé à l’occasion de la remise du prix à Toulouse paraissent dans
ce
numéro des Annales de la Faculté des Sciences de Toulouse.
"
La recherche de critères
permettant
de décider si uneéquation diophantienne
ades solutions rationnelles ou non est un
problème
difficile. Si on ne se limite pas à des classesparticulières d’équations,
on sait maintenantqu’il n’y
a pasd’algorithme (solution négative
au dixièmeproblème
deHilbert).
Pour
qu’une équation
donnée à coefficients rationnels admette des solutions ration-nelles,
il est évidemment nécessairequ’elle
en admette dans le corps des nombresréels ; plus précisément
il faut aussiqu’elle
en admette dans tous lescomplétés
du corps des rationnels. Ces conditions sont faciles à tester. Pour une formequadratique (polynôme homogène
dedegré 2),
cette condition nécessaire est aussisuffisante;
on dit alors que leprincipe
de Hasse est valable. Dès ledegré 3,
leprincipe
de Hasse n’estplus
valable.Un
exemple
deChatelet, repris
parManin,
a fourni lepoint
dedépart
des travaux de Colliot- Thélène etSansuc, qui
ont mis en évidence une obstruction à ceprincipe
deHasse,
et
qui
montrent que c’est la seule obstruction pour certaines familles de variétés. Cela fournit desalgorithmes
pour déterminer si certaineséquations
ont ou non des solutions rationnelles.Les résultats obtenus par Sansuc et Colliot- Thélène sont dans la
ligne
directe de certains travaux de Fermat. Ainsi ils ont établi une condition nécessaire et suffisante pourqu’un
entierpositif
soit somme de deux carrés et d’unepuissance quatrième
dansle corps des rationnels
(Colliot-Thélène
etSansuc,
Crelle 374 p.93) :
:écrivons n sous la
forme 24’’+$rrz,
avec mimpair
r et spositifs
et s entre 0 et 3.Alors n est somme de deux carrés et d’une
puissance quatrième, sauf
si :- soit s = 0 et m congru ci 7 modulo 8 ;
- soit s = 2 et m congru ci 3 modulo 4.
La
première exception
estclaire,
c’est la condition de Gauss : dans ce cas, n n’est pas somme de trois carrés. Leplus frappant
dans cet énoncé est que la condition2-adique
soit une condition suffisante. On ne sait rien dire sur la
représentation
de n sous la forme~a
+y2 -~ z4
avec ac, y, z entiers.Les obstructions de nature réelle sont essentiellement les seules pour l’existence d’une solution rationnelle simultanée pour un
système
de deux formesquadratiques
en au moins294
9 variables. C’est
l’analogue
du résultat deMeyer
pour une formequadratique
a au moins5 variables. La méthode du cercle
(Heath-Brown)
n’a donnéjusqu’à présent
que le casd’au moins 10
variables,
ensupposant
de surcroît lesystème
de deux formes nonsingulier.
Dans un article en commum avec
Kanevsky
etSansuc,
article référencéci-après
parCT/K/S,
Colliot-Thélène étudie les surfacescubiques diagonales
À
l’heureactuelle,
on n’a pasd’algorithme
pour décider si une telleéquation
a des solutionsrationnelles;
les conditions de congruence ne sont pas suffisantes(Cassels/Guy 1966). A l’époque
ducontre-exemple
deCassels-Guy,
l’ordinateur avaitproduit quelques
200
équations
apetits
coefficientsentiers,
avec des solutions modulo tous lesentiers,
et sans
petite
solution rationnelle. Cassels réussit a montrerqu’une
de ceséquations
n’avait pas de solution rationnelle.
A l’époque,
personne n’avait idée comment traiterune seule des autres
équations.
Dix ansplus tard,
Bremner(1978)
réussit a traiter uneautre
équation
dans la liste(voir l’exposé
de Colliot-Thélène au Séminaire de Théorie des nombres de Paris en 1984-1985 pour l’histoire et laphéhistoire
duproblème). CT/K/S
ont donné un
algorithme systématique
pour calculer l’obstruction de Brauer-Manin auprincipe
de Hasse pour de telles surfaces sur lesrationnels ;
ils utilisent lacohomologie
desgroupes
bicycliques,
les théorèmes de dualité de Lichtenbaum pour les courbeselliptiques
sur les corps
p-adiques,
ainsi que les formesexplicites
pour le corps de classes.Voici un
exemple
de résultatqu’ils
obtiennent : :s’il existe un nombre
premier qui
divise uncoefficient
et unseul,
alors iln’y
a pas d’obstruction de Brauer-Manin.De
fait,
les coefficients deCassels-Guy
étaient(5, 9, 10, 12)
et ceux de Bremner(1, 4,
10, 25).
L’ordinateur étudia ensuite toutes les
équations
avec a,b,
c, d entiersplus petits
que 100. Dans ce
domaine,
pour toutes leséquations
survivant a l’élimination par les congruencespuis
a l’élimination par l’obstruction de Brauer-Manin calculée parl’algorithme
deCT/K/S,
il trouva des solutions entières(de
hauteurplus petite
que8000).
Au passage, celarégla
la situation pour la"petite"
listed’équations
de Cassels-Guy.
Cela donne
quelque poids
à laconjecture
que l’obstruction de Brauer-Manin est ici laseule,
et quel’algorithme
citépermet
effectivement de décider si une surfacecubique diagonale
a unpoint
rationnel...Une autre contribution
importante
de Sansuc etColliot-Thélène,
en collaboration avecBeauville et
Swinnerton-Dyer,
est laréponse négative
à un vieuxproblème
de Zariski : ils donnent unexemple
d’une extension K du corps ~ des nombrescomplexes, qui
n’est pas de la formeC(X1, ...
avec desXi algébriquement indépendants,
maisqui
est telleque le corps des fractions rationnelles
K(T)
soit de cette forme. En termesgéométriques,
cela
signifie qu’ils
construisent une variétéalgébrique
sur ~qui
n’est pasrationnelle,
maisqui
l’est stablement(c’est-à-dire après multiplication
par unedroite).
Colliot- Thélène et Sansuc sont devenus les chefs de file d’une véritable école consacrée à
l’arithmétique
des variétésrationnelles, qui
met en oeuvre unegrande
variété de moyens :géométrie algébrique, K-théorie,
formesquadratiques,
méthode ducercle,
etc.L’idée
qui
est au coeur de leurs travaux est cellequi
étaitdéjà
au coeur des travauxde Fermât. "