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Les fièvres récurrentes auto-inflammatoires de l'enfant

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Academic year: 2022

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M A L A D IE S IN F L A M M A T O IR E S

L a plupart des fièvres récurrentes héréditaires résultent d’une acti- vation anormale de la sécrétion d’interleukine 1 (IL1) (inflammasomo- pathie) [1] . D’autres cytokines sont plus rarement impliquées. Les principales manifestations cliniques des fièvres ré- currentes héréditaires figurent dans le tableau page suivante. Certaines MAI sont associées à un déficit immunitaire.

La cause du syndrome de Marshall n’est pas connue.

DIAGNOSTIC

Le diagnostic de MAI repose sur l’éva- luation clinique, la recherche d’un syn- drome inflammatoire biologique pen- dant les épisodes fébriles et les inter- valles libres de toute symptomatologie, et l’exclusion de toute autre cause de fièvre, notamment infectieuse. Il doit être évoqué classiquement devant :

la présence d’au moins 3 épisodes fé- briles inexpliqués d’une durée supérieu- re à 1 jour avec syndrome inflammatoire de persistance spontanément limitée ;

la présence d’un intervalle libre cli- nique et biologique entre les épisodes : normalité de l’examen clinique en de-

Une maladie auto-inflammatoire (MAI) se manifeste classiquement par des épisodes fébriles récurrents avec syndrome inflammatoire, plus rarement par une fièvre prolongée avec syndrome inflammatoire et une inflammation biologique récurrente ou persistante. Les MAI résultent d’une activation non contrôlée de cellules de l’immunité innée. Le syndrome de Marshall, ou PFAPA (periodic fever, aphthous stomatitis, pharyngitis and adenitis), est la plus fré- quente d’entre elles chez l’enfant et n’est pas exceptionnelle. Des maladies génétiques sont parfois en cause, mais, dans la majorité des cas, aucune cau- se génétique n’est identifiée. L’analyse de l’anamnèse familiale, l’examen cli- nique et la recherche d’un syndrome inflammatoire pendant et en dehors des épisodes fébriles sont les points clés pour évoquer le diagnostic de MAI et orienter les recherches génétiques. Nous exposons dans cet article les points d’appel cliniques qui doivent conduire à envisager une MAI de l’enfant devant une fièvre récurrente inexpliquée.

hors des épisodes fébriles, normalité de la croissance staturo-pondérale.

Cependant, une MAI peut également se manifester par un syndrome inflamma- toire biologique sans fièvre ou une fièvre prolongée avec syndrome inflammatoire.

Certains syndromes auto-inflammatoires particulièrement sévères peuvent retentir sur la croissance. La complication majeu- re de la plupart des MAI est la survenue d’amylose, parfois révélatrice dans les formes non diagnostiquées.

Le recueil des données suivantes est in-

dispensable pour orienter le diagnostic

et les recherches génétiques : histoire fa-

miliale, ethnie, âge au premier épisode

fébrile, durée des épisodes fébriles, exis-

tence d’une périodicité, recherche de fac-

teurs déclenchants (froid, vaccination,

infection, stress…), description des ma-

nifestations cliniques, efficacité des trai-

tements testés (anti-inflammatoires non

stéroïdiens, corticoïdes…). Dans la plu-

part des cas, aucune mutation n’est mise

en évidence. La transmission des MAI

peut être autosomique récessive ou do-

minante, mais un grand nombre d’entre

elles sont sporadiques. Récemment, des

mutations somatiques des gènes NLRP3

et NOD2 ont été rapportées dans les

mars 2017

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cryopyrinopathies. La base de données Infever répertorie l’ensemble des muta- tions décrites au cours des MAI [2] .

PRINCIPALES MALADIES AUTO-INFLAMMATOIRES

LE SYNDROME DE MARSHALL OU SYNDROME PFAPA [3]

Cas clinique [ Paul, quatre ans, est adres- sé pour l’évaluation d’épisodes fébriles

récurrents survenus un an auparavant.

Ces épisodes se manifestent par une fièvre à 40 °C pendant 3 à 4 jours, sur- venant avec des intervalles très régu- liers de 4 semaines et précédée de pro- dromes à type de modification du com- portement (enfant plus grognon). Ces épisodes sont fréquemment associés à des adénopathies cervicales, des aphtes et une odynophagie. Un diagnostic d’angine a été évoqué à plusieurs re- prises, mais le streptotest était négatif.

Un traitement par Clamoxyl

®

a néan- moins été donné à trois reprises. La croissance staturo-pondérale est parfai- te. L’examen clinique est normal en de- hors des épisodes fébriles. Les examens complémentaires réalisés lors d’un épi- sode fébrile montrent un syndrome in- flammatoire important, avec une CRP à 120 mg/l, ainsi qu’une hyperleuco - cytose à polynucléaires neutrophiles (globules blancs : 12 000/mm 3 , 80 % de polynucléaires neutrophiles).

mars 2017 Principales manifestations des fièvres récurrentes héréditaires

Pathologie Transmission Gène muté

FMF AR MEFV

MKD AR MVK

FCAS AD NLRP3

MWS AD surtout NLRP3

CINCA/NOMID De novo surtout NLRP3

PAPA AD PSTPTIP1

TRAPS AD TNFRSF1A

Manifestations auto-inflammatoires

– Populations touchées : Turcs, Arabes, Juifs séfarades, Arméniens – Age de début : surtout avant 10 ans

– Durée des épisodes : 12-72 heures

– Principaux signes : douleurs abdominales, arthrite, sérite

– Autres signes : atteinte cutanée (purpura, pseudo-érysipèle, œdème), myalgies – Syndrome inflammatoire pendant les crises

– Age de début : surtout avant 5 ans (première année) – Durée des épisodes : 4-7 jours

– Facteurs déclenchants : vaccinations, infections, stress, traumatisme cutané

– Fièvre récurrente, adénopathies, diarrhée, vomissements, arthrite, céphalées, irritabilité, érythème ou pseudo-urticaire, rashs cutanés, hépatomégalie, splénomégalie, péricardite, aphtes – Syndrome inflammatoire pendant les crises

– Durée des épisodes : < 24 heures

– Fièvre récurrente et urticaire neutrophilique provoquées par l’exposition au froid, conjonctivite, myalgies, arthralgies

– Syndrome inflammatoire pendant les crises

– Fièvre récurrente, urticaire neutrophilique sans facteur déclenchant, parfois plus chronique, arthralgies ou arthrite, conjonctivite, épisclérite, œdème papillaire

– Syndrome inflammatoire pendant les crises ou permanent

– Fièvre continue, urticaire neutrophilique, arthralgies, arthrite, conjonctivite, uvéite, œdème papillaire

– Syndrome inflammatoire permanent

– Fièvre récurrente purulente, arthrite stérile, pyoderma gangrenosum, acné kystique sévère, abcès au point d’injection

– Syndrome inflammatoire pendant les crises – Age de début : avant 20 ans

– Durée des épisodes : 1 à 20 jours

– Fièvre récurrente, myalgies migratrices, fasciite, arthralgies, œdème péri-orbitaire, pseudo- érysipèle, panniculite, douleurs abdominales, épanchement pleural

Autres manifestations

Amylose

– Polyarthrite chronique, maladie inflammatoire intestinale (IBD), maladie pulmonaire interstitielle (ILD), glomérulonéphrite – Amylose (rare)

– Surdité de perception – Amylose

– Surdité de perception – Amylose

– Arthropathie

– Retard de développement psychomoteur

– Méningite aseptique – Œdème papillaire – Amaurose

Amylose

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La répétition d’épisodes fébriles avec syndrome inflammatoire sans infection trouvée, l’existence d’un intervalle libre de toute symptomatologie clinique et la croissance parfaite sont très évocatrices d’un syndrome auto-inflammatoire. La périodicité toutes les 4 semaines des épisodes fébriles, l’association à une aphtose, à une odynophagie et à des adénopathies chez un enfant âgé de moins de six ans orientent le diagnostic vers un syndrome de Marshall. Pour confirmer ce diagnostic, il convient d’effectuer une recherche de syndrome inflammatoire entre les épisodes fé-

briles, afin de s’assurer de la normalisa- tion des examens biologiques lors des intervalles. Aucun autre examen n’est nécessaire dans cette forme typique.

Il faut expliquer le diagnostic aux pa- rents et les rassurer en indiquant la très probable disparition de la symptomato- logie avec le temps. ]

Le PFAPA est la MAI la plus fréquente en pédiatrie et comporte vraisemblablement plusieurs entités. Son origine reste incon- nue, mais une étude suggère la présence d’une production excessive d’IL1. Son pronostic est bon, avec une rémission avant l’âge adulte dans la quasi-totalité

des cas, sans séquelle à long terme. La maladie débute généralement avant l’âge de cinq ans (âge médian du début : 1,9 à 4,2 ans selon les cohortes), avec une pré- dominance masculine. Il existe typique- ment une fièvre, souvent supérieure à 39 °C, durant 3 à 6 jours et survenant avec une périodicité de 2 à 8 semaines.

La plupart des patients présentent une pharyngite, soit érythémateuse, soit exsu dative (65 à 100 %). Des adénopa- thies cervicales sont retrouvées dans 61 à 100 % cas, des aphtes buccaux dans 38 à 69 % des cas. D’autres symptômes sont associés aux PFAPA, notamment des mars 2017

AD : autosomique dominante. AR : autosomique récessive.

CANDLE : chronic atypical neutrophilic dermatosis with lipodystrophy and elevated temperature. CINCA : chronic infantile neurological, cutaneous and articular syndrome. DADA2 : deficiency in adenosine deaminase 2. DITRA : deficiency of interleukin-36 receptor antagonist. FCAS : urticaire familiale au froid. FMF : fièvre méditerranéenne familiale. MKD : déficit en mévalonate kinase. MWS : syndrome de Muckle-Wells. NAPS : NALP12-associated periodic syndrome. PAPA : pyogenic arthritis, pyoderma gangrenosum, and acne. SIFD : congenital sideroblastic anemia with immunodeficiency, fevers and developmental delay. TRAPS : tumor necrosis factor receptor-associated periodic syndrome.

NAPS AD NLRP12

Mutation NLRC4 AD

NLRC4

DITRA AR IL36RN

CANDLE AR

PSMB8, PSMBB2, PSMB4, PSMB9

Déficit en HOIL 1 AR

HOIL1

SIFD AR TNRT1 DADA2

– Durée des épisodes : 5 jours à plusieurs mois

– Fièvre récurrente, lésions de pseudo-urticaire au froid, arthralgies

– Fièvre récurrente, arthralgies, syndrome d’activation macrophagique, hépatosplénomégalie, maladie inflammatoire digestive

– Syndrome inflammatoire pendant les crises – Début précoce

– Fièvre récurrente

– Psoriasis purulent généralisé

– Syndrome inflammatoire pendant les crises – Début avant 6 mois (2-4 semaines) – Fièvre

– Nodules violacés récidivants : panniculite neutrophilique (neutrophiles immatures)

– Œdème érythémateux périorbitaire, œdème doigts et orteils, ADN, arthrite, anémie normo- ou microcytaire

– Syndrome inflammatoire pendant les crises ou permanent

– Autres manifestations : parotidite, conjonctivite/épisclérite, acanthosis nigricans, hypertrichose, chondrite nez et oreille, méningite aseptique, épididymite

– Infections multiples

– Fièvre récurrente, diarrhée, adénopathie – Syndrome inflammatoire

– Fièvre récurrente

– Fièvre récurrente, livedo racemosa, accident vasculaire cérébral à début précoce, polyarthrite chronique évolutive (atteinte cutanée, rénale, neurologique, musculaire et ophtalmologique)

– Lipodystrophie – Rétractions articulaires – Hépatosplénomégalie – Calcifications cérébrales – Anémie hémolytique auto-

immune

– Retard de croissance

Déficit immunitaire B

Déficit immunitaire B,

retard mental, anémie

sidéroblastique

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douleurs abdominales (18-65 %), des cé- phalées (18-65 %), des myalgies (22 %), des nausées ou vomissements (19- 27 %), des éruptions cutanées (4-15 %) et des arthralgies (11 %). Le diagnostic se fonde actuellement sur les critères de Marshall :

épisodes fébriles périodiques et âge de début précoce (avant cinq ans) ;

symptômes en l’absence d’infection des voies respiratoires avec au moins l’un des signes cliniques suivants : aphtes buccaux, lymphadénite cervica- le, pharyngite ;

exclusion d’une neutropénie cyclique ;

intervalles complètement asympto- matiques entre les poussées ;

croissance et développement nor- maux.

Pendant les poussées, l’administration d’une dose de corticostéroïdes (1 à 2 mg/kg de prednisone) au début de l’état fébrile permet, dans la plupart des cas, la disparition des symptômes dans les 12 heures suivant la prise, mais ce traitement raccourcit parfois l’intervalle libre entre les épisodes fébriles. La col- chicine pourrait permettre une diminu- tion de la fréquence des poussées.

L’amygdalectomie ou l’adéno-amygda- lectomie pourraient avoir un effet béné- fique, qui n’a cependant pas été formel- lement démontré.

MAI MONOGÉNIQUES CONNUES EN 2017

Cas clinique [ Claire, âgée de un an et de- mi, est adressée en raison d’épisodes fé- briles récurrents apparus à l’âge de six mois, survenant environ une fois tous les 2 mois. Il n’y a pas d’antécédent fa- milial particulier. Ces épisodes sont as- sociés à un rash érythémateux et à une diarrhée qui régresse au bout de 5 jours.

Ils ont été déclenchés à plusieurs re- prises par une infection virale et, une fois, par une vaccination. Au cours de cette vaccination, une réaction cutanée très importante a été notée. La croissan- ce staturo-pondérale est normale. Pen- dant les épisodes fébriles, on observe un syndrome inflammatoire très important (CRP à 150 mg/l) et une hyperleucocy- tose à polynucléose. Une allergie aux

protéines du lait de vache a été évoquée, mais l’éviction n’a pas entraîné d’amélio- ration. Le dosage pondéral des immuno- globulines (IgG, A, M, E) est normal.

La survenue, en l’absence de cause in- fectieuse, d’épisodes itératifs de fièvre accompagnée d’un syndrome inflamma- toire est évocatrice d’une maladie auto- inflammatoire. La précocité du diagnos- tic, l’association d’une atteinte cutanée et digestive, le déclenchement d’un épi- sode par une infection et une vaccina- tion font évoquer un déficit en mévalo- nate kinase, anciennement appelé « syn- drome hyper-IgD ». Ce diagnostic est confirmé par une élévation de l’acide mévalonique urinaire lors des épisodes de fièvre et par la mise en évidence d’une mutation à l’état homozygote du gène de la mévalonate kinase. ]

Maladies liées à une activation anormale de la sécrétion d’IL1 b (inflammasomopathies)

L’interleukine 1 est une cytokine clé de nombreuses maladies auto-inflamma- toires monogéniques : fièvre méditerra- néenne familiale (FMF), cryopyrinopa- thies ou cryopyrin-associated periodic syndrome (CAPS), déficit en mévalona- te kinase (MKD, anciennement syndro- me d’hyper IgD ou HIDS), arthrite puru- lente aseptique avec pyoderma gangre- nosum et acné (PAPA), arthrite pyogé- nique stérile avec pyoderma gangreno- sum, acné et hidradénite (PAPASH), dé- ficit de l’antagoniste du récepteur de l’IL1 (DIRA), mutation de NLRC4.

De nombreuses manifestations cliniques sont communes à la plupart des inflam- masomopathies : fièvre le plus souvent récurrente, inflammation des séreuses, atteinte articulaire (arthralgies, ar- thrites), atteinte abdominale (douleurs, vomissements, péritonite aseptique).

Les manifestations cutanéo-muqueuses sont très variables. Elles sont souvent non spécifiques, mais certaines d’entre elles peuvent être évocatrices d’une pa- thologie particulière : urticaire neutro- philique dans les cryo py rino pathies, éruption maculo-papuleuse dans le MKD, purpura dans la FMF et le MKD, pseudo-érysipèle dans la FMF, pustulose

dans le DIRA, pathergie, aphtes buccaux ou génitaux dans le MKD.

Fièvre méditerranéenne familiale (FMF) [4]

La FMF est la plus fréquente des MAI monogéniques. Elle touche les popula- tions originaires du bassin méditerra- néen, avec une prévalence particulière- ment élevée chez les Turcs, les Arabes, les Juifs séfarades et les Arméniens. Cet- te MAI est associée à des mutations du gène MEFV qui codent pour la protéine pyrine, impliquée dans la régulation de l’inflammation et de l’apoptose. Bien qu’elle soit classiquement considérée comme une maladie autosomique réces- sive, des patients avec un tableau cli- nique classique ne sont porteurs que d’un seul allèle.

La FMF commence généralement dans l’enfance. Elle est caractérisée par des épisodes récurrents d’une durée de 12 à 72 heures, qui associent de la fièvre (92 %), une péritonite (94 %), une ar- thrite (47 %), un épanchement pleural (31 %), une atteinte cutanée, des glomé- rulonéphrites non amyloïdes (0,8 %) et, en l’absence de traitement adéquat, une amylose (13 %). Un syndrome inflamma- toire est présent pendant les épisodes fé- briles. Les patients peuvent aussi présen- ter des symptômes en dehors des épi- sodes fébriles : myalgies prolongées, dou- leurs des membres inférieurs induites par l’exercice, lésions de pseudo-érysipèle, douleurs de sacro-iléite. Une réponse à un traitement par colchicine (1 à 2 mg/j) est un élément important en faveur du diagnostic. La principale complication est l’apparition d’une amylose AA, qui sur- vient essentiellement chez les patients non compliants ou non traités, atteints d’une forme particulièrement sévère de- puis l’enfance et/ou porteurs d’une mu- tation prédisposante (M694V homozy- gote). Des facteurs environnementaux peuvent aussi avoir un rôle important dans la survenue d’une amylose.

Des recommandations pour le diagnos- tic de la FMF ont été publiées en 2015 [4] : la FMF est un diagnostic cli- nique qui peut être confirmé mais non exclu par les études génétiques.

Il existe une corrélation entre le géno-

type et le phénotype pour certaines

mars 2017

(5)

mutations : les patients homozygotes pour M694V ont un risque élevé de dé- velopper une FMF sévère avec un dé- but précoce ; les patients porteurs de deux des allèles les plus communs (ho- mozygote ou hétérozygote composite, spécialement pour la mutation M694V ou pour des mutations en position 680 à 694 de l’exon 10) doivent être consi- dérés à risque d’avoir une maladie sé- vère ; en revanche, la mutation E148Q est considérée comme un polymorphis- me dont la signification pathologique est incertaine.

Le traitement de la FMF repose sur la colchicine, qui permet de prévenir les épisodes fébriles mais aussi la survenue de l’amylose (0,5 mg/j pour les enfants de moins de cinq ans, 1 mg/j de cinq à dix ans et 1,5 mg/j après dix ans). Cette dose nécessite d’être ajustée selon la symptomatologie clinique et les taux de CRP et de sérum amyloïde protéine (SAA) entre les épisodes. Un traitement par anti-IL1 peut être proposé chez les rares patients réfractaires à un traite- ment par colchicine bien conduit.

Cryopyrinopathies (CAPS) [5]

Les CAPS (cryopyrin-associated perio- dic syndrome) comportent trois patho- logies présentant de nombreux chevau- chements : l’urticaire familiale au froid (FCAS), le syndrome de Muckle-Wells (MWS) et le syndrome avec atteinte chronique infantile neurologique, cuta- née et articulaire (CINCA), également connu sous le nom de pathologie multi- systémique inflammatoire de début néonatal (NOMID). Ces trois patholo- gies ont été rapportées historiquement comme des entités cliniques différentes, mais elles représentent un spectre continu de gravité variable d’une même pathologie. Les CAPS sont causées par des mutations du gène NLRP3, trans- mises sur un mode dominant ou surve- nant de novo. Récemment, des muta- tions somatiques ont été rapportées chez des patients ayant un CINCA sans mutation germinale. Les manifestations cliniques principales de ces trois patho- logies sont détaillées dans le tableau pa- ge 58. Le rash est le symptôme prédo- minant dans les trois pathologies ; il

survient précocement et est générale- ment la première manifestation de la maladie. Il a les mêmes caractéristiques cliniques et histologiques dans les trois pathologies : rash pseudo-urticarien, maculo-papulaire migratoire, non pru- rigineux. L’examen histologique montre un infiltrat dermique périvasculaire neutrophilique.

L’urticaire familiale au froid est une MAI de transmission autosomique dominan- te, caractérisée par des épisodes récur- rents et brefs de fièvre peu intense, de rash et d’arthralgies déclenchés par le froid. Une conjonctivite et des douleurs musculaires sont fréquemment obser- vées. La durée de ces épisodes est géné- ralement de moins de 24 heures. Il existe un syndrome inflammatoire durant les épisodes fébriles.

Le MWS, de transmission autosomique dominante ou sporadique, est caractéri- sé par des épisodes de fièvre récurrente et un rash associé à des manifestations articulaires et ophtalmologiques. Il n’y a généralement pas de facteur déclen- chant. L’évolution de la maladie varie d’épisodes récurrents à des symptômes plus permanents. La fièvre n’est pas tou- jours présente. Les manifestations arti- culaires vont de simples arthralgies à des épisodes récurrents d’arthrites. Une conjonctivite est fréquemment présen- te, ainsi qu’une surdité de perception (environ 70 % des cas), commençant en général dans l’enfance ou chez l’adulte jeune. L’apparition d’une amylose AA est la principale complication et sur- vient chez environ 25 % des adultes. Il existe un syndrome inflammatoire bio- logique lors des poussées.

Le syndrome CINCA/NOMID a le phé- notype le plus sévère dans ce groupe des cryopyrinopathies. La pathologie est généralement sporadique. Les pre- miers signes apparaissent à la naissance ou dans les premiers mois de vie. Une prématurité et une dysmaturité sont ob- servées chez un tiers des patients. Le rash est habituellement présent à la naissance ou très tôt dans la vie. La fièvre est intermittente et peut être ab- sente ou modérée. L’atteinte ostéo-arti- culaire comporte des arthralgies, des ar-

thrites, associées dans un tiers des cas à une arthropathie sévère liée à une hy- pertrophie de la rotule et des épiphyses des os longs. Une atteinte du système nerveux central est présente chez presque tous les patients ; elle est due à une méningite chronique aseptique à polynucléaires, qui est responsable de céphalées et d’œdème papillaire. Une uvéite antérieure, une atrophie optique et une surdité de perception peuvent également se développer. Il existe un syndrome inflammatoire biologique permanent dans la majorité des cas.

Le traitement des patients atteints de CAPS repose sur les anti-IL1.

Déficit en mévalonate kinase (MKD) [6]

Le MKD est une pathologie autosomique récessive due à une mutation du gène MVK codant pour la mévalonate kinase, enzyme impliquée dans la synthèse du cholestérol. La maladie commence presque toujours avant l’âge de cinq ans, souvent au cours de la première année de vie. Les accès inflammatoires durent typiquement 7 jours et reviennent toutes les 4 à 8 semaines ; la fièvre est majeure, atteignant au moins 39 °C. Les atteintes digestives (douleurs abdominales, diar- rhée, vomissements), articulaires et cu- tanées (rash maculo-papuleux, morbilli- forme, nodules, purpura) et les adénopa- thies sont les manifestations les plus fré- quentes au cours des épisodes fébriles.

Des céphalées, des aphtes buccaux et gé- nitaux, une hépatosplénomégalie et une péricardite peuvent également survenir.

Le déclenchement des accès par une in- fection virale ou une vaccination est as- sez caractéristique du syndrome. Une élévation de l’acide mévalonique urinai- re au cours d’un épisode fébrile est très en faveur du diagnostic (le déficit en MK s’accentue au cours de l’hyperthermie).

En revanche, l’élévation du taux d’IgD sérique n’a pas d’intérêt, car elle n’est ni sensible, ni spécifique. La recherche de mutations génétiques dans le gène de la mévalonate kinase confirmera le dia- gnostic dans un deuxième temps.

L’administration d’anti-inflammatoires

non stéroïdiens et d’une corticothérapie

dès le début de la crise peut réduire la

symptomatologie clinique dans les

mars 2017

(6)

formes peu sévères. Lorsque les pous- sées fébriles sont fréquentes et invali- dantes, les inhibiteurs de l’IL1 en traite- ment de fond ou en traitement ponctuel de la crise doivent être proposés en pre- mière intention. L’efficacité des anti- TNF a également été rapportée chez quelques patients.

Accumulation intracellulaire de protéines intervenant dans l’immunité innée

TNF Receptor Associated Periodic Syndrome (TRAPS) [7]

Le TRAPS est une pathologie autoso- mique dominante due à des mutations du gène TNFRSF1A codant pour le ré- cepteur 1 au TNF-alpha. La maladie ré- sulte d’une rétention du récepteur muté dans l’appareil de Golgi, ce qui entraîne l’activation anormale et prolongée de la voie NF k B, par persistance anormale du récepteur muté à la membrane cellulai- re, et l’activation des voies pro-inflam- matoires en raison d’un stress oxydatif accru en intracellulaire induit directe- ment par la protéine mutée.

Les premiers accès du TRAPS survien-

nent durant l’enfance ou l’adolescence.

Les poussées inflammatoires associent habituellement fièvre, altération de l’état général, atteinte cutanée et mus- culo-articulaire. L’accès se caractérise classiquement par sa durée prolongée d’une à plusieurs semaines. La majorité des malades souffrent de manifestations cutanées variées lors des poussées : ma- cules migrantes, plaques érythéma- teuses confluentes, œdème péri-orbitai- re légèrement érythémateux. Les plus spécifiques sont des lésions de pseudo- cellulite touchant les membres infé- rieurs et/ou supérieurs ou le tronc. Sur les membres, ces lésions débutent à la racine et migrent en quelques heures ou jours vers l’extrémité du membre atteint avant de disparaître. Les manifestations musculo-articulaires sont souvent le signe clinique prédominant de l’accès in- flammatoire. L’atteinte musculaire se caractérise par une douleur localisée à un groupe musculaire. Cette douleur ac- compagne habituellement les lésions dermatologiques de type pseudo- cellulite. L’atteinte articulaire est moins spécifique : arthralgies diffuses, plus ra-

rement arthrites aiguës. D’autres signes cliniques moins fréquents peuvent être observés : adénopathies satellites des lé- sions cutanées, conjonctivite aseptique accompagnant ou non l’œdème péri-or- bitaire, douleurs thoraciques. Les accès de TRAPS peuvent être moins spectacu- laires, et il arrive, dans de rares cas, que la fièvre manque.

Chez la majorité des patients, les corti- coïdes permettent d’atténuer les symp- tômes, sans pour autant prévenir les poussées. Néanmoins, l’effet du traite- ment semble s’amoindrir avec le temps, avec apparition d’une corticodépendan- ce. Les inhibiteurs de l’IL1 sont efficaces dans les formes sévères.

POUR CONCLURE

Le diagnostic de syndrome auto-inflam- matoire doit être évoqué devant des épi- sodes fébriles récurrents associés à un syndrome inflammatoire, en l’absence d’infection, avec des intervalles libres de tout signe clinique et biologique. 첸

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en rapport avec la rédaction de cet article.

mars 2017 Références

[1] AKSENTIJEVICH I., KASTNER D.L. : « Genetics of monogenic autoinflammatory diseases : past successes, future challenges », Nat. Rev. Rheumatol.,2011 ; 7 :469-78.

[2] INTERNATIONAL SOCIETY OF SYSTEMIC AUTO-INFLAM- MATORY DISEASES : Infevers Registry, http://fmf.igh.cnrs.fr/

infevers.

[3] HOFER M., PILLET P., COCHARD M.M. et al. : « International

periodic fever, aphthous stomatitis, pharyngitis, cervical adenitis syndrome cohort : description of distinct phenotypes in 301 pa- tients », Rheumatology (Oxford),2014 ; 53 :1125-9.

[4] OZEN S., DEMIRKAYA E., ERER B. et al. : « EULAR recommen- dations for the management of familial Mediterranean fever », Ann. Rheum. Dis.,2016 ; 75 :644-51.

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« Phenotypic and genotypic characteristics of cryopyrin-associa- ted periodic syndrome : a series of 136 patients from the Euro -

fever Registry », Arthritis Rheum.,2012 ; 64 :895-907

[6] BADER-MEUNIER B., FLORKIN B., SIBILIA J. et al. : « Mevalo- nate kinase deficiency : a survey of 50 patients », Pediatrics, 2011 ; 128 :e152-9.

[7] LACHMANN H.J., PAPA R., GERHOLD K. et al. : « The pheno- type of TNF receptor associated autoinflammatory syndrome (TRAPS) at presentation : a series of 158 cases form the Eurofe- ver/EUROTRAPS international registry », Ann. Rheum. Dis.,2013 ; 73 :2160-7.

Références

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