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Place des thérapies complémentaires dans l'organisation médicale : le rôle des soins de support

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La Lettre du Neurologue • Vol. XX - n° 1-2 - janvier-février 2016 | 31

VIE PROFESSIONNELLE

Place des thérapies

complémentaires dans l’organisation médicale :

le rôle des soins de support

S. Träger*

* Oncologue médical, clinique de l’Estrée, Stains, et membre de l’AFSOS, groupe d’experts sur les PNCAVT.

Contexte

Les thérapies complémentaires et alternatives regroupent, à un endroit et à une période donnés, des approches, des pratiques ainsi que des produits de santé et médicaux qui ne sont pas habituellement considérés comme faisant partie de la médecine conventionnelle (définition du National Center for Complementary and Alternative Medicine) [1]. Ces thérapies peuvent être utilisées en complément de la médecine conventionnelle (thérapies dites

“complémentaires”) ou à sa place (thérapies dites

“alternatives”). Que les patients atteints de maladies graves aient de plus en plus souvent recours aux thérapies complémentaires est un fait connu de tous (2, 3). Nier cette réalité serait nier la recherche de bien-être et d’autonomie de nos patients. Ce serait également refuser de considérer la satisfac- tion qu’ils peuvent en retirer. Atténuer les effets indésirables des traitements spécifiques et stimuler le système immunitaire afin de mieux supporter les traitements sont les principales raisons invo- quées par les patients dans leur recours à ces théra- peutiques (4).

De nombreux praticiens de thérapies complé- mentaires exercent actuellement en France − et parfois depuis de nombreuses années − dans des établissements de santé publique ou privée, qu’ils appartiennent ou non à une profession médicale ou paramédicale. L’exercice de ces thérapies complé- mentaires est réalisé dans un cadre hospitalier ou parfois associatif (5). Dans une situation actuel- lement non réglementée des thérapies complé- mentaires, on peut s’interroger sur le choix des thérapeutes, leur formation et leur encadrement.

L’intégration du praticien de thérapies complémen- taires dans une institution doit être pensée de façon à éviter son isolement.

Dès lors, des questions essentielles restent posées : quelle est la place des thérapies complémentaires dans l’organisation médicale actuelle ? Comment intégrer ces thérapies en minimisant les risques de dérives sectaires, sans prendre le patient en otage entre 2 “médecines”, sans proposer une énuméra- tion de thérapies complémentaires non intégrées au système de soins ? C’est peut-être à ces questions que le nouveau terme de “médecine intégrative”

peut répondre, la pratique des soins oncologiques de support pouvant apporter son expertise.

Comment intégrer les thérapies complémentaires au système de soins actuel ?

La médecine intégrative

La médecine intégrative désigne le recours simultané à la médecine conventionnelle et aux thérapies complé- mentaires. Elle est apparue aux États-Unis dans les années 1990. La combinaison de la recherche du bien- être des patients et de l’amélioration de leur qualité de vie est probablement à l’origine du développement de ce concept. Il existe actuellement en Amérique du Nord des services de médecine intégrative et des universités qui proposent un enseignement de méde- cine intégrant les thérapies complémentaires (6). Il est important de comprendre que la notion d’inté- gration n’est pas ici entendue comme l’absorption d’un système par un autre, mais bien comme la mise en place d’une coordination et d’une synergie. Ce distinguo est fondamental pour penser une méde- cine intégrative qui puisse s’inscrire dans une réelle avancée thérapeutique. En cancérologie, en France, c’est souvent dans le cadre des soins oncologiques de

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VIE PROFESSIONNELLE

support que les thérapies complémentaires ont trouvé leur place. Cela est d’autant plus vrai que la réussite des soins de support n’est pas la résultante d’une juxtaposition de professionnels de santé mais bien de l’interaction complémentaire de ces professionnels entre eux. Cette approche pluriprofessionnelle néces- site une organisation coordonnée (7). La coordination de soins de support est le pilier de la complémentarité et de la transversalité nécessaires à la prise en compte du malade dans sa globalité. C’est cette vision globale qui constitue la passerelle la plus solide entre soins de support et thérapies complémentaires.

Faire entrer les praticiens de thérapies complé- mentaires dans une institution ne peut pas être considéré comme une avancée s’il ne s’agit que d’ajouter des professionnels dans l’annuaire des soins de support d’un établissement. L’objectif premier est bien de dialoguer dans la diversité et de réunir des thérapeutes issus de milieux différents afin de dessiner et de partager une nouvelle vision de la réalité du patient. On voit bien ici l’importance de la coordination dans la dynamique d’intégration, sans laquelle celle-ci deviendrait inefficace, voire contre-productive.

Ouvrir le dialogue

Le premier interlocuteur à bénéficier de ce dialogue est le patient. Le soignant doit être en mesure de l’informer des risques qu’il encoure en cas d’utili- sation “sauvage” des thérapies complémentaires.

Il doit aussi être capable de lui confirmer les effets bénéfiques qu’il peut en retirer. Pour cela, le soignant doit être sensibilisé au sujet, formé et informé, et c’est à lui d’aborder la question avec son patient (4).

Aujourd’hui, la plupart des patients − qui se disent globalement peu informés − n’ont pas conscience des risques et ignorent le mode d’action des thérapies complémentaires. Bon nombre d’entre eux pensent que les effets indésirables sont l’exclusivité des trai- tements conventionnels et qu’il ne peut pas y avoir d’interaction entre une thérapie complémentaire et le traitement prescrit par leur oncologue (8). “Ce sont des médecines douces, les techniques et les substances sont naturelles, cela ne peut pas faire de mal…”

Les patients ont besoin de ces informations pour être accompagnés dans leur choix d’utilisation de thérapies complémentaires, d’autant que le médecin reste pour le patient la source d’informa- tion la plus fiable (4). Fermer la porte au dialogue, c’est prendre le risque de voir un jour le patient

quitter le système de soins conventionnels à la recherche d’une écoute et d’une prise en charge plus globales. C’est souvent dans cette situation extrême qu’il se met alors le plus en danger. Il est tout aussi fondamental que les praticiens de théra- pies complémentaires et les médecins s’ouvrent au dialogue mutuel afin de briser les préjugés réci- proques, d’accompagner au mieux le patient dans ses choix et de minimiser les risques. Une méde- cine intégrative efficace passe par le dialogue, mais elle repose aussi sur la bonne connaissance de la pratique non conventionnelle, du praticien et de sa formation. C’est ainsi que l’équipe de soins peut conserver et améliorer la cohérence de la prise en charge multidisciplinaire du patient.

L’autre gain potentiel, “bénéfice secondaire” impor- tant de cette collaboration entre soignants conven- tionnels et praticiens complémentaires, se trouve dans le développement de la recherche clinique.

Dans leur propre intérêt, dans celui des patients et de la médecine, les thérapies complémentaires ont grandement besoin de cette recherche pour démontrer leur fonctionnement, révéler leur effi- cacité, leur innocuité ou leur incompatibilité avec les soins conventionnels. Dans cet esprit, une coor- dination des soins de support pourrait, dans chaque établissement, réaliser au minimum une évaluation des thérapies complémentaires auprès de patients atteints d'un cancer.

Conclusion

Quelle que soit l’option logistique de cette intégra- tion, elle ne peut réussir sans dialogue, coordination, médiation et bienveillance mutuelle. Aller dans le sens du patient qui recherche bien-être et prise en charge globale avec les thérapies complémentaires, c’est également aller dans le sens de soins de support de qualité. C’est dans cet état d’esprit que l’AFSOS (Association francophone pour les soins oncolo- giques de support), en tant que société savante, a missionné un groupe d’experts “PNCAVT” (pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique) afin de faire le point sur les pratiques existantes. Un premier référentiel socle a consisté à proposer une informa- tion générale aux soignants au sujet des thérapies complémentaires (4). Une déclinaison de référentiels complémentaires est en cours, consistant en une analyse scientifique des thérapies selon l’approche méthodologique appliquée pour des recommanda- tions de bonnes pratiques (exemple du référentiel sur l’acupuncture en onco-hématologie) [9]. ■ Références

bibliographiques

1. http://nccam.nih.gov/

2. Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Guide santé et dérives sectaires. La Documenta- tion Française.

3. Brugirard M et al. Support Care Cancer 2011.

4. Place des thérapies complé- mentaires dans les soins onco- logiques de support. Référentiel inter-régional en soins oncolo- giques de support. 2012. www.

afsos.org

5. Rapport “Médecines complé- mentaires à l’assistance publi- que-hôpitaux de paris”. 2012.

Pr Jean-Yves Fargon, Dr Catherine Viens-Bitker.

6. Consortium of Academic Health Centers for integrative medicine. www.imconsortium.

org

7. Krakowski I, Boureau F, Bugat R et al. For a coordination of the supportive care for people affected by severe illnesses:

proposition of organization in the public and private health care centres. Bull Cancer 2004;91(5):449-56.

8. Träger-Maury S, Tournigand C, Maindrault-Goebel F et al. Use of complementary medicine by cancer patients in a French onco- logy department. Bull Cancer 2007;94(11):1017-25.

9. L’acupuncture en onco-hé- matologie. Référentiel inter-ré- gional en soins oncologiques de support. 2012. www.afsos.org

S. Träger déclare ne pas avoir de liens d'intérêts.

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Références

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