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Estimation des paramètres de surface des océans et de la banquise à partir d’observations micro-ondes basses fréquences

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02950850

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Submitted on 28 Sep 2020

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banquise à partir d’observations micro-ondes basses

fréquences

Lise Kilic

To cite this version:

Lise Kilic. Estimation des paramètres de surface des océans et de la banquise à partir d’observations micro-ondes basses fréquences. Océan, Atmosphère. Sorbonne Université, 2019. Français. �NNT : 2019SORUS167�. �tel-02950850�

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THÈSE DE DOCTORAT

DE SORBONNE UNIVERSITÉ

Spécialité : Océan, Observations spatiales

École doctorale no129: Sciences de l’environnement d’Île-de-France réalisée

au LERMA, Observatoire de Paris

sous la direction de Catherine Prigent présentée par

Lise Kilic

pour obtenir le grade de :

DOCTEUR DE SORBONNE UNIVERSITÉ

Sujet de la thèse :

Estimation des paramètres de surface des océans et de la

banquise à partir d’observations micro-ondes basses

fréquences

soutenue le 30 septembre 2019

devant le jury composé de :

Mme Frédérique Rémy Rapporteuse

M. Jean Tournadre Rapporteur

Mme Catherine Prigent Directrice de thèse

M. Filipe Aires Co-directeur de thèse Mme Jacqueline Boutin Examinatrice

M. Stephen English Examinateur M. Marie-Nöelle Houssais Examinatrice M. Pierre-Yves Le Traon Examinateur

M. Georg Heygster Invité

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Les océans et la banquise jouent un rôle important dans le système climatique et mé-téorologique. Avec le réchauffement climatique, les océans se sont réchauffés et la banquise a vu son extension décroître d’année en année. Ces changements rendent la surveillance des régions polaires essentielle. Les observations satellites en micro-ondes passives permettent une observation de la surface de la Terre par tous temps, aussi bien de jour que de nuit. Elles sont particulièrement adaptées à l’observation des régions polaires où la présence de nuages est importante et où la nuit polaire dure six mois. Une future mission satellite en micro-ondes passives basses fréquences, conçue pour observer les régions polaires est actuellement à l’étude à l’Agence Spatiale Européenne pour l’expansion du programme Copernicus. Dans cette thèse, nous nous intéressons à l’estimation des paramètres de sur-face de l’océan et de la banquise à partir des observations satellites micro-ondes passives basses fréquences. L’objectif est de développer de nouvelles méthodes d’estimation de ces paramètres qui soient plus efficaces et adaptées à la future mission satellite micro-onde passive CIMR (Copernicus Imaging Microwave Radiometer). Dans une première partie, la thèse traite de l’estimation des paramètres océaniques tels que la température de la surface de la mer, la salinité et la vitesse du vent océanique. Des comparaisons entre diffé-rents modèles de transfert radiatif pour l’océan sont effectuées. Les erreurs d’inversion sur les paramètres océaniques sont évaluées pour les missions satellites micro-ondes actuelles et la future mission CIMR. Dans une deuxième partie, la thèse traite de l’estimation des paramètres de la banquise tels que la concentration en glace, l’épaisseur de neige et la température d’interface neige-glace. Une base de données de paramètres in situ colo-calisés avec des observations satellites est utilisée. Une nouvelle méthode est décrite et évaluée pour estimer la concentration en glace. Des régressions simples sont dérivées pour estimer l’épaisseur de neige sur la glace de mer et la température d’interface neige-glace. Nous avons identifié que l’amélioration des modèles de transfert radiatif de l’océan est un point clé dans l’augmentation de la précision des estimations. La méthode développée pour estimer la concentration en glace montre des résultats très proches des produits de concentration en glace actuels distribués opérationnellement, sans qu’aucun ajustement ne soit nécessaire. Grâce à l’utilisation des basses fréquences, cette nouvelle méthode est aussi plus robuste à la présence de nuages. Enfin, avec les méthodes développées dans cette thèse les performances de la mission CIMR ont pu être évaluées et comparées à celles des missions actuelles. CIMR montre des erreurs d’inversion plus faibles et une meilleure résolution spatiale sur les paramètres estimés que les missions actuelles grâce à ces performances instrumentales. Avec CIMR, la température de surface de la mer sera estimée à 15 km avec une précision de 0,2 K, la salinité de surface de la mer sera estimée à 55 km avec une précision instantanée de 0,3 psu et la concentration en glace de mer sera estimée à 5 km avec une précision de 5%.

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The ocean and sea ice play an important role in the climate and weather system. With global warming, the oceans have warmed and the sea ice has seen its extent decrease from year to year. These changes make the monitoring of the polar regions essential. Passive microwave satellite observations provide all-weather observation of the Earth surface, both day and night. They are particularly suitable for observing polar regions where the presence of clouds is significant and where the polar night lasts six months. A future low-frequency passive microwave satellite mission designed to observe the polar regions is currently under study at the European Space Agency for the expansion of the Copernicus programme. In this thesis, we are interested in estimating ocean and ice surface parameters from low-frequency passive microwave satellite observations. The objective is to develop new methods for estimating these parameters that are more efficient and adapted to the future passive microwave satellite mission CIMR (Copernicus Imaging Microwave Radiometer). In the first part, the thesis deals with the estimation of ocean parameters such as sea surface temperature, salinity and ocean wind speed. Comparisons between different radiative transfer models for the ocean are made. Retrieval errors on ocean parameters are assessed for current microwave satellite missions and the future CIMR mission. In a second part, the thesis deals with the estimation of sea ice parameters such as sea ice concentration, snow depth and snow-ice interface temperature. A database of parameters in situ collocated with satellite observations is used. A new method is described and evaluated to estimate the sea ice concentration. Simple regressions are derived to estimate snow depth on sea ice and snow-ice interface temperature. We have identified that improving ocean radiative transfer models is a key point in increasing the accuracy of the estimations. The method developed to estimate ice concentration shows results very close to the current operationally distributed ice concentration products, without any adjustment being necessary. Thanks to the use of low frequencies, this new method is also more robust to the presence of clouds. Finally, with the methods developed in this thesis, the performance of the CIMR mission could be evaluated and compared with those of the current missions. CIMR shows lower retrieval errors and better spatial resolution on the estimated parameters than current missions due to these instrumental performances. With CIMR, the sea surface temperature will be estimated at 15 km with an accuracy of 0.2 K, the sea surface salinity will be estimated at 55 km with an instantaneous accuracy of 0.3 psu and the sea ice concentration will be estimated at 5 km with an accuracy of 5%.

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Je remercie tout d’abord ma directrice de thèse Catherine Prigent avec qui c’était un immense plaisir de préparer cette thèse. Merci pour ta bienveillance et merci de m’avoir tant appris. Je remercie également Filipe Aires qui a co-dirigé cette thèse toujours dans la bonne humeur.

Ensuite, j’aimerais remercier l’école doctorale de sciences de l’environnement d’Ile-de-France et Sorbonne Université pour avoir financé cette thèse, ainsi que le LERMA pour m’avoir accueilli. Je remercie aussi les membres de mon comité de thèse Jacqueline Boutin et Rasmus Tonboe pour leurs conseils et suivi, mes rapporteurs de thèse Frédérique Rémy et Jean Tournadre pour avoir relu cette thèse, et les examinateurs et invités Stephen English, Marie-Noëlle Houssais, Pierre-Yves Le Traon, Georg Heygster et Anne Lifermann qui sont venus assister à la soutenance.

Merci à mes collègues, avec lesquels c’est un plaisir de travailler et qui ont rendu ces 3 années de thèse au LERMA très agréable. Je pense en particulier à mes collègues de bureau Samuel, Carlos et Clément ainsi qu’à l’équipe administrative Murielle, Woihiba, Marie-Clarisse et aux anciens thésards Victor, Jordane et Dié.

Enfin un grand merci à ma famille qui m’a toujours soutenu. Merci à ma mère pour tous les efforts qu’elle a fourni pour ma soeur et moi. Merci à Julien pour ces relectures de la thèse, son soutien lors de la soutenance et simplement d’être à mes côtés.

Je n’aurais jamais les mots pour exprimer toute ma gratitude mais il y en a déjà beaucoup dans cette thèse... Alors bonne lecture !

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Table des matières

I Introduction . . . 1

1 Contexte général . . . 1

2 Les observations par satellites . . . 4

3 Les observations micro-ondes passives pour l’observation des océans et de la banquise . . . 5

4 La future mission satellite en micro-ondes passives CIMR . . . 10

5 Plan de la thèse . . . 12

II Estimation des paramètres océaniques . . . 15

1 Introduction . . . 15

2 Modèles directs de transfert radiatif micro-onde pour les variables océaniques 16 2.1 Théorie du transfert radiatif pour l’océan. . . 16

2.1.a Constantes diélectriques . . . 17

2.1.b Contribution du vent. . . 19

2.1.c Spectres de vagues . . . 21

2.1.d Modèles d’écume . . . 24

2.1.e Transfert radiatif dans l’atmosphère . . . 27

2.2 Comparaisons des modèles océaniques de transfert radiatif avec les obser-vations satellites. . . 29

2.2.a Présentation des modèles comparés. . . 29

2.2.b Base de données développée pour la comparaison entre les modèles et les observations . . . 30

2.2.c Comparaisons des modèles de transfert radiatif en fonction des va-riables océaniques . . . 33

2.2.d Discussion. . . 39

3 Restitution et erreurs d’inversion. . . 40

3.1 Méthode . . . 41

3.2 Sensibilité aux paramètres océaniques. . . 42

3.3 Erreurs d’inversion . . . 45

3.3.a Cas général . . . 45

3.3.b Exemples sur des situations réelles . . . 47

4 Conclusion . . . 50

III Estimation des paramètres de la banquise . . . 55

1 Introduction . . . 55

2 Estimation de la concentration en glace . . . 57

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2.2 Jeu de données d’observations satellites colocalisées sur des zones avec

0% et 100% de concentration en glace . . . 60

2.3 Sensibilité de l’estimation de la concentration de glace de mer aux hypo-thèses de la méthode d’inversion . . . 62

2.3.a Sélection des combinaisons de canaux . . . 62

2.3.b Impact des points de rattachement sur l’estimation de la concen-tration en glace de mer . . . 65

2.4 Prise en compte des différentes résolutions spatiales . . . 68

2.4.a La méthode de fusion de données . . . 69

2.4.b Exemple sur une scène théorique . . . 69

2.5 Evaluation de la méthode d’inversion de la concentration en glace . . . . 71

2.5.a Présentation des produits de concentration en glace . . . 71

2.5.b Analyse de la nouvelle méthode pour différentes combinaisons de fréquences . . . 74

2.5.c Distributions des concentrations en glace et points de rattachements 75 2.5.d Evaluation des méthodes de prise en compte des différences de ré-solutions spatiales . . . 77

2.5.e Résultats à grande échelle pour les pôles Nord et Sud en conditions nuageuses . . . 79

3 Estimation de l’épaisseur de neige, de la température de l’interface neige-glace et de la température effective de la banquise . . . 82

3.1 Jeux de données et méthodologie . . . 83

3.1.a Jeu de données d’observations par satellites colocalisées avec des mesures in situ . . . 83

3.1.b Jeu de données de température effective et température de brillance simulée à partir des propriétés de la glace de mer . . . 84

3.1.c Une méthodologie basée sur une suite de régressions multi-linéaires 85 3.2 Estimation de l’épaisseur de neige . . . 86

3.2.a Régression multi-linéaire pour l’estimation de l’épaisseur de neige . 86 3.2.b Résultats de l’estimation de l’épaisseur de neige. . . 87

3.3 Estimation de la température d’interface neige-glace . . . 88

3.3.a Détection automatique de la position de l’interface sur les profils de température mesurés par des bouées . . . 88

3.3.b Corrélation entre la température de brillance et la température de l’interface neige-glace . . . 89

3.3.c Régressions linéaires pour estimer la température de l’interface neige-glace . . . 90

3.3.d Résultats de l’estimation de la température de l’interface neige-glace 91 3.4 Estimation de la température effective de la glace de mer. . . 92

3.4.a Estimations des biais entre le modèle et les observations . . . 92

3.4.b Régression linéaire entre la température effective et la température de l’interface neige-glace . . . 94

3.5 Exemples d’estimation de l’épaisseur de neige et de la température d’in-terface neige-glace durant l’hiver 2015-2016 . . . 95

(10)

IV Conclusion et perspectives. . . 101

1 L’estimation des paramètres de surface de l’océan . . . 101

2 L’estimation des paramètres de surface de la banquise . . . 102

3 L’évaluation des performances de la future mission CIMR . . . 104

4 Perspectives . . . 105

4.1 Le développement d’un nouveau modèle de transfert radiatif physique pour l’océan . . . 105

4.2 L’étude de la banquise . . . 106

4.3 Les futures missions micro-ondes passives européennes . . . 107

A Article : Expected Performances of the Copernicus Imaging Microwave Radio-meter (CIMR) for an All-Weather and High Spatial Resolution Estimation of Ocean and Sea Ice Parameters . . . 109

B Article : Estimating the snow depth, the snow–ice interface temperature, and the effective temperature of Arctic sea ice using Advanced Microwave Scanning Radiometer 2 and ice mass balance buoy data . . . 127

C Article à soumettre : Comparisons of Ocean Radiative Transfer Models with SMAP and AMSR2 Observations . . . 143

D Glossaire . . . 165

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(12)

Chapitre I

Introduction

1

Contexte général

Les océans représentent 70% de la surface de la Terre. Ils contrôlent les flux de chaleur et les flux atmosphériques qui impactent au quotidien la météorologie et le climat. Ce sont des réservoirs de carbone et de chaleur. Depuis les cinquante dernières années, les océans ont absorbé plus de 90% du réchauffement terrestre dû aux activités humaines et environ 30% du dioxyde de carbone émis depuis l’âge préindustriel (rapport du GIEC 2013 : Stocker et al. [2013]). Les surfaces des océans Indien, Atlantique et Pacifique se sont réchauffées respectivement au cours de la période 1950-2016 de 0,11◦C, 0,07C et

0,05◦C par décennie [Hoegh-Guldberg et al.,2014], les changements les plus importants se

produisant aux latitudes les plus élevées. Le réchauffement des océans augmente le niveau global de la mer à cause de la dilatation de l’eau. Il favorise l’apparition de vagues de chaleurs et d’événements extrêmes (Oliver et al.[2018], rapport du GIEC 2018 : Masson-Delmotte et al. [2018]).

La banquise (ou glace de mer) interagit continuellement avec l’océan et l’atmosphère. Elle sert notamment d’isolant entre l’océan et l’atmosphère en limitant les échanges de chaleur, de quantité de mouvement et de composants chimiques. Elle impacte la circulation océanique et joue un rôle primordial dans l’équilibre thermique des régions polaires. La glace de mer joue aussi un rôle important dans le système climatique, en affectant l’albédo de surface. Sa surface blanche et brillante augmente l’albédo et diminue ainsi la quantité de rayonnement solaire absorbée par la Terre. Les régions polaires sont très vulnérables aux changements climatiques. L’Arctique se réchauffe 2 fois plus vite que le reste du globe : ce phénomène est connu sous le nom d’amplification arctique [Serreze and Barry,2011]. En Arctique l’extension moyenne annuelle de la banquise a diminué d’environ 4% par décennie depuis 1979 (jusqu’à 2012), et le minimum d’extension en été a diminué d’environ 10% par décennie [Stocker et al., 2013]. L’épaisseur de la glace de mer a également diminué considérablement, avec une diminution estimée de plus de 50% dans le centre de l’Arctique [Lindsay and Schweiger,2015]. Les glaces les plus fines sont touchées en premier. La Figure

I.1provenant du rapport du GIEC 2013, montre les anomalies de température de la mer, du niveau de la mer et de l’extension de la banquise en été. On note l’augmentation de la température et du niveau de la mer et la diminution de l’extension de la banquise sur ces dernières années.

(13)

Fig. I.1 Figure provenant du rapport du GIEC 2013 illustrant l’anomalie de température de surface de la mer (en haut), l’anomalie de niveau de la mer (au milieu), l’anomalie de l’extension de la banquise en été (en bas) en fonction du temps.

Ces changements posent des questions pour l’avenir des populations locales, des éco-systèmes marins, la navigation et l’exploitation des ressources naturelles. La résolution de ces questions d’une grande importance sociétale nécessite une meilleure compréhension du fonctionnement des océans et de la banquise et l’amélioration des modèles de prévisions météorologiques et climatiques. Pour cela, les observations des variables géophysiques de l’océan et de la banquise sont nécessaires.

Les variables telles que la température des océans, la salinité ou encore les variables concernant la glace de mer sont devenues des variables climatiques essentielles collectées par le système mondial d’observation du climat (Global Climate Observing System). Dans cette thèse les variables étudiées avec le plus d’intérêt sont la température de surface de la mer et la concentration en glace de mer. La surveillance de la température est cru-ciale pour une vaste gamme d’applications côtières et marines, notamment les prévisions météorologiques et climatiques [Bell et al., 2000, Martin et al., 2007]. Elle aide à la

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ca-Fig. I.2 Concentration en glace pour le minimum d’extension de la banquise arctique en 2015, avec les minimums d’extension tracés en couleurs pour 2012, 2007 et la moyenne sur la période 1981-2010. Figure provenant de l’Université de Brêmehttps: // seaice. uni-bremen. de/ sea-ice-concentration/.

ractérisation des interactions entre l’atmosphère et l’océan en aidant à comprendre les processus physiques et biochimiques. Elle permet d’étudier les variabilités méso-échelles de l’océan et la variabilité des écosystèmes marins. La concentration en glace décrit la fraction de surface de glace de mer présente sur une surface donnée. La concentration en glace est un paramètre très important pour la navigation opérationnelle dans les eaux avec présence de glace de mer. Elle est aussi une variable climatique très importante afin de surveiller les variations de l’extension de la banquise (voir Figure I.2).

D’autres variables telles que la salinité de surface de la mer, la vitesse du vent océa-nique ou des paramètres liés à la banquise comme l’épaisseur de neige seront aussi étudiées. La salinité est importante pour l’étude de la dynamique des océans, de la biogéochimie ma-rine et du cycle hydrologique global [Reul et al.,2014]. Les variations de salinité impactent la circulation océanique thermohaline globale. De petites variations peuvent modifier la stratification verticale de la densité de l’océan et donc influencer fortement les échanges océan-atmosphère. De plus, la salinité est considérée comme un traceur passif des débits d’eau douce provenant des fleuves, de la fonte des glaces et des échanges océan-atmosphère (évaporation-précipitation) [Boutin et al.,2016]. La vitesse du vent détermine les interac-tions océan-atmosphère, telles que le stress de surface, la chaleur sensible, l’évaporation et

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l’échange de gaz [Atlas et al.,2011]. Les mesures d’épaisseurs de neige sur la glace de mer sont nécessaires pour une estimation précise de l’épaisseur de glace avec les altimètres (par exemple, Kern et al. [2015], Kurtz et al. [2013]). L’isolation de la neige réduit le transfert de chaleur entre l’océan et l’atmosphère et influence la croissance de la glace de mer située en dessous et par conséquent son bilan massique.

L’observation de ces variables nécessite des instruments de mesures performants, si on veut avoir une information précise, étendue et continue dans le temps. Les satellites sont pour cela l’outil idéal. L’utilisation des satellites pour l’observation de la Terre nécessite la mise au point d’algorithmes d’interprétation des données mesurées par le satellite, en plus du travail technique et instrumental pour concevoir et envoyer ces satellites dans l’espace.

2

Les observations par satellites

Les satellites sont des outils puissants pour observer la Terre globalement et de manière répétée dans le temps. Leurs données sont utilisées tous les jours pour prévoir le temps, prévenir des risques et étudier la Terre.

Il existe une grande variété de types d’observations satellites. Certaines peuvent être actives c’est-à-dire qu’un signal est envoyé vers la Terre, réfléchi puis mesuré par le satel-lite ; d’autres peuvent être passives, c’est-à-dire qu’aucun signal n’est émis par l’instrument satellite, seul le signal naturellement émis, réfléchi ou diffusé par la Terre et son atmo-sphère est mesuré. Les instruments à bord des satellites mesurent des signaux qui peuvent aller des fréquences radios aux fréquences visibles. La FigureI.3illustre les fréquences des ondes électromagnétiques avec leurs longueurs d’onde respectives et leur absorption par l’atmosphère terrestre. On observe que l’absorption par l’atmosphère varie en fonction de la fréquence. A certaines fréquences, l’atmosphère est complètement opaque (elle ab-sorbe tout le signal) et empêche l’observation de la surface de la Terre. En fonction des fréquences, les informations que l’on peut déduire du signal mesuré sont différentes (la sensibilité à une variable ou la résolution spatiale des observations va dépendre de la fréquence, de la polarisation et de l’angle d’observation). Pour chaque variable que l’on veut observer, le choix du type de technique d’observation utilisé est donc primordiale, chacune montrant des avantages et inconvénients.

Les mesures à l’échelle globale des variables océaniques et de glace de mer, telles que la température de surface de la mer et la concentration en glace, peuvent être dérivées des observations satellites visibles et infrarouges. Cependant, l’échantillonnage temporel des observations en visible et en infrarouge est problématique surtout dans les régions polaires ou tropicales caractérisées par une couverture nuageuse très persistante. En effet, à ces longueurs d’onde, les nuages empêchent une mesure de la surface de l’océan. Plus de 70% de la surface de la Terre est obscurcie par les nuages à tout moment en moyenne sur le globe [Chelton and Wentz,2005] avec un défi particulier dans les régions tropicales et polaires. La Figure I.4illustre la Terre le 1er janvier 2019 vue par le satellite MODIS (Moderate Resolution Imaging Spectroradiometer) observant dans le domaine visible. On remarque la présence importante de nuages à l’échelle globale et l’absence d’observations sur le pôle Nord due à la nuit polaire complète en hiver. Les observations micro-ondes basses fréquences offrent un avantage considérable car elles ne sont que très peu sensibles

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Fig. I.3 Illustrations des différentes ondes électromagnétiques avec leurs fré-quences et longueurs d’onde ainsi que l’absorption de celles-ci par l’atmosphère. Figure provenant de NASA Science website :c http: // science. nasa. gov/ ems/ 01_ intro.

à l’atmosphère et ne dépendent pas de la lumière du soleil. Cela permet une observation de la surface en tout temps c’est-à-dire même en présence de nuages. Les mesures micro-ondes passives à basses fréquences entre 1,4 et 37 GHz fournissent des variables océaniques et de glace de mer telles que la température, la vitesse du vent, la salinité et la concentration en glace, même par temps nuageux et la nuit.

3

Les observations micro-ondes passives pour l’observation des

océans et de la banquise

En observations micro-ondes passives, le rayonnement mesuré par le satellite est une température de brillance (TB). Pour un objet qui a une température physique donnée on peut définir une émissivité e qui correspond à la température de brillance divisée par la température physique :

e= T B T

L’émissivité e varie de 0 (pour une matière qui n’émet pas) à 1 (pour un émetteur parfait connu sous le nom de corps noir). A l’équilibre thermodynamique, elle peut être reliée à

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Fig. I.4 La Terre vue par l’imageur en fréquences visibles MODIS-TERRA le 1erjanvier 2019. Image provenant de NASA worldviewc https: // worldview. earthdata. nasa. gov/ .

la réflexion de la matière R de la façon suivante :

e= 1 − R

Les températures de brillance micro-ondes reçues par le satellite se composent des contri-butions de la Terre, de l’atmosphère et de l’espace (voir FigureI.5). Le rayonnement reçu par le satellite est fonction de la fréquence, de la polarisation, de l’angle d’observation et de l’intensité du rayonnement. On peut écrire l’équation qui relie la température de brillance mesurée par le satellite (TBsat) au rayonnement de la surface, de l’atmosphère et de l’espace de la manière suivante :

T Bsat= T Bsurf · e−τ+ T Batm,↑+ R · e−τ· (T Batm,↓+ T Bextra−terrestre)

avec TBsurf la température de brillance de la surface, TBatm,↑ et TBatm,↓ les tempéra-tures de brillance montante et descendante de l’atmosphère respectivement, τ l’épaisseur optique de l’atmosphère qui dépend des conditions atmosphériques avec e−τ représentant

la transmittance de l’atmosphère, et TBextra−terrestre la température de brillance prove-nant de sources de rayonnement extra-terrestres qui inclut notamment le rayonnement de fond cosmique et peut aussi inclure le rayonnement de la galaxie. Les termes composant cette équation appelée équation de transfert radiatif sont illustrés en Figure I.5.

L’équation de transfert radiatif est à la base du développement d’algorithmes qui convertissent les données de température de brillance du satellite en paramètres géophy-siques. Pour l’estimation des paramètres de surface, le but est alors dans un premier temps de savoir simuler en fonction des paramètres géophysiques la température de brillance me-surée par le satellite. Dans un second temps, d’être capable à partir de la température de brillance observée par le satellite de restituer les variables géophysiques.

(18)

Fig. I.5 Les principales composantes de la température de brillance observées par un radiomètre micro-onde passif sur un satellite et exprimées par quatre termes dans l’équation de transfert radiatif : (1) le signal émis par la surface et transmis à travers l’atmosphère, (2) le rayonnement montant de l’atmosphère, (3) le rayonnement descendant de l’atmosphère réfléchi par la surface et retransmis à travers l’atmosphère et (4) le rayonnement extra-terrestre arrivant à la sur-face terrestre réfléchi par la sursur-face et retransmis à travers l’atmosphère. Figure provenant deSwift and Cavalieri [1985] repris par Sandven et al.[2006].

La FigureI.6illustre l’absorption de l’atmosphère en fonction de la fréquence dans le domaine micro-onde basse fréquence. Les fréquences inférieures à 10 GHz sont très peu sensibles à l’atmosphère. A 22 GHz, il y a une raie d’absorption par la vapeur d’eau ce qui limite l’utilisation des fréquences proches de 22 GHz pour l’observation de la surface. Au delà de 90 GHz, l’absorption par l’atmosphère devient importante et l’observation de la surface n’est plus possible. Les fréquences dans les raies d’absorption sont utilisées pour observer et sonder l’atmosphère.

La température de la surface de la mer, la vitesse du vent océanique et la concentra-tion en glace issues des radiomètres micro-ondes passifs sont disponibles depuis 1978, avec les canaux entre 6 et 37 GHz en double polarisation de l’instrument SMMR (Scanning

Multi-channel Microwave Radiometer). Il a été suivi par la mission SSM/I ( Special

Sen-sor Microwave/Imager), la mission TMI (Tropical Rainfall Measuring Mission Microwave

Imager), la mission GMI (Global Precipitation Measurement Microwave Imager), le

radio-mètre polarimétrique WindSat, le radioradio-mètre AMSR-E (Advanced Microwave Scanning

Radiometer for Earth Observing System) et maintenant le radiomètre AMSR2 (Advanced Microwave Scanning Radiometer 2 ). Les estimations de la salinité n’ont été possibles que

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Fig. I.6 Figure illustrant l’absorption par l’atmosphère dans le domaine micro-onde basse fréquence provenant deUlaby et al.[2014]. Les coefficients d’absorp-tion de la vapeur d’eau (en vert), de l’oxygène (en bleu) et du total des deux (en rouge) sont tracés en fonction de la fréquence.

depuis l’avènement des mesures satellites en bande L (1,4 GHz) avec la mission SMOS (Soil Moisture and Ocean Salinity lancée en 2009), la mission Aquarius et maintenant la mission SMAP (Soil Moisture Active and Passive) [Lagerloef et al.,2008, Reul et al.,

2014, Le Vine et al., 2015, Fore et al., 2016, Boutin et al., 2016, Meissner et al., 2018,

Kao et al.,2018]. Un résumé de ces missions et de leurs principales caractéristiques est donné dans le TableauI.1.

Entre 4 et 8 GHz, les observations micro-ondes passives de l’océan sont proportion-nelles à la température de surface de la mer dans les premiers millimètres de la surface. Le signal est également sensible à la vitesse du vent, la rugosité de la mer étant induite par le stress du vent et la présence d’écume à la surface de la mer. Au-dessus de 3 GHz, la sensibilité à la salinité est très limitée. Jusqu’à 12 GHz, le signal est également peu affecté par l’atmosphère (gaz, nuages, aérosols), sauf en cas de pluie. Les températures de surface de la mer estimées avec les observations micro-ondes passives actuelles ont une précision de l’ordre de 0,4 K [Wentz et al., 2000, Gentemann et al., 2010, Nielsen-Englyst et al.,

2018], par rapport aux mesures infrarouges (0,16 K) ou in situ (0,23 K) [O’Carroll et al.,

2008]. Les températures de surface de la mer des radiomètres micro-ondes sont réguliè-rement et opérationnellement fusionnées avec les observations infrarouges (par exemple,

(20)

Table I.1 – Historique des missions micro-ondes passives basses fréquences utilisées pour l’observation des paramètres de surface de l’océan ou de la banquise.

Instrument Années Canaux Résolution spatiale

de début et fin pour la plus basse

fréquence de l’instrument SMMR 1978-1987 6, 10, 18, 21, 37 GHz 148×95 km (6 GHz) SSM/I 1987-1995 19, 22, 37, 85 GHz 45×68 km (19 GHz) TMI 1997-2015 10, 19, 21, 37, 85 GHz 63×37 km (10 GHz) SSMIS 2000 - 24 canaux de 19 à 183 GHz 42×70 km (19 GHz) AMSR-E 2002-2011 6, 10, 18, 23, 36, 89 GHz 74×43 km (6 GHz) WindSat 2003 - 6, 10, 18, 23, 37 GHz 39×71 km (6 GHz) SMOS 2009 - 1,4 GHz ∼43 km (1,4 GHz) Aquarius 2011-2015 1,4 GHz ∼100 km (1,4 GHz) AMSR2 2012 - 6, 7, 10, 18, 23, 36, 89 GHz 62×35 km (6 GHz) GMI 2014 - 10, 18 23, 36, 89, 165, 183 GHz 32×19 km (10 GHz) SMAP 2015 - 1,4 GHz 40 km (1,4 GHz)

les produits OSTIA [Donlon et al.,2012] du Met Office au Royaume-Uni, les produits du centre météorologique du Canada [Meissner et al.,2016] et les produits du Jet Propulsion

Laboratory [Chin et al.,2017]).

Les vitesses du vent océanique mesurées par satellites sont principalement dérivées d’observations par diffusiométrie ondes, mais les mesures par radiométrie micro-onde passif fournissent également des estimations de la vitesse du vent, en particulier à haute vitesse (supérieure à ∼15 m/s) [Reul et al.,2017] où les mesures par diffusiomètre ont tendance à saturer [Quilfen et al.,2007].

Actuellement, seuls les radiomètres en bande L sont capables de fournir la salinité avec une précision d’au moins 1 psu (practical salinity unit). La Figure I.7 illustre sché-matiquement la sensibilité aux paramètres décrit ici en fonction de la fréquence entre 0 et 40 GHz. On remarque la meilleure sensibilité à la température de surface de la mer aux fréquences proches de 6 GHz, la meilleure sensibilité à la salinité aux fréquences proches de 1 GHz et la meilleure sensibilité à la vitesse du vent océanique pour les fréquences à partir de 10 GHz. On observe également l’augmentation de la sensibilité à l’eau liquide nuageuse et à la vapeur d’eau avec la fréquence, avec un pic de sensibilité à la vapeur d’eau autour de 22 GHz (comme observé sur la Figure I.6).

Le pôle Nord est sombre pendant 6 mois de l’année et la couverture nuageuse est importante (60-90%) dans la région arctique [Schweiger, 2004]. Les radiomètres micro-ondes passifs ont été particulièrement efficaces pour la cartographie de la concentration en glace car les fréquences micro-ondes sont indépendantes de la lumière du jour, pénètrent à travers les nuages et bénéficient d’un grand contraste de température de brillance entre la glace de mer et l’océan (jusqu’à 150 K à 6 GHz en polarisation horizontale, Ivanova et al. [2015]). La concentration en glace est estimée à l’aide de données de radiomètres satellites micro-ondes passifs depuis les années 70, et les estimations quotidiennes de la superficie et de l’étendue de la glace de mer à partir de ces données sont l’un des plus longs relevés climatiques continus [Stocker et al.,2013,Tonboe et al.,2016]. Des canaux

(21)

micro-Fig. I.7 Sensibilité aux paramètres géophysiques en fonction de la fréquence entre 1 et 40 GHz pour le cas d’une atmosphère standard. Les fréquences utilisées par la mission CIMR sont indiquées en haut.

ondes allant de 1 à près de 90 GHz sont utilisés pour la restitution de la concentration en glace [Ivanova et al., 2015, Gabarro et al., 2017]. Récemment, lors d’une évaluation de plus de 20 algorithmes différents de concentration de la glace de mer (sans compter la bande L), on a constaté que l’algorithme utilisant des données de 6 GHz avait le niveau de bruit le plus bas de tous les algorithmes [Ivanova et al.,2015]. En effet, les données à 6 GHz sont moins affectées que les hautes fréquences par l’absorption atmosphérique, par la couverture de neige et par la diffusion dans la glace. Les basses fréquences montrent une plus grande sensibilité à la concentration en glace de mer comme indiqué sur la Figure

I.7. Cependant, la résolution spatiale à 6 GHz, avec les missions actuelles et passées, est mauvaise par rapport aux fréquences plus élevées. Lors de l’estimation de la concentration en glace à partir de radiomètres micro-onde actuels et passés, il faut faire un compromis entre haute résolution spatiale et faible erreur.

4

La future mission satellite en micro-ondes passives CIMR

Les observations satellites actuelles des radiomètres micro-ondes passifs sont limitées dans leur application en raison de leur faible résolution spatiale aux basses fréquences (∼32 x 64 km à 6,9 GHz avec l’instrument AMSR2). Les variabilités méso- et sous-méso-échelles des produits ne sont pas saisies et, dans un rayon de plusieurs dizaines de km de la côte ou des marges de glace de mer, les observations sont contaminées par la terre ou la glace. De plus, il n’y a aujourd’hui aucune garantie de la poursuite des mesures des radiomètres micro-ondes à basses fréquences, ni à 6,9 et 10,65 GHz après AMSR2 [Imaoka et al.,2010], ni à 1,4 GHz après SMOS et SMAP.

(22)

Fig. I.8 Les six thématiques des services d’information du programme Coper-nicus.

Copernicus (http://www.copernicus.eu/) est un système européen de surveillance de la Terre. Il comprend des satellites d’observation de la Terre, des mesures au sol et des services visant à fournir aux utilisateurs des informations fiables et à jour grâce à un ensemble de services liés aux questions environnementales et de sécurité (voir FigureI.8). La Commission Européenne et le haut représentant de l’Union Européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ont adressé au Parlement Européen et au Conseil, en avril 2016, une communication conjointe proposant « une politique intégrée de l’UE pour l’Arctique ». L’environnement fragile de l’Arctique est un indicateur direct et clé du changement climatique, qui nécessite des mesures spécifiques, comme convenu dans l’accord mondial conclu lors de la COP-21 tenue à Paris en décembre 2015. La « politique intégrée de l’UE pour l’Arctique » a identifié et traite trois domaines prioritaires :

1. Les changements climatiques et la sauvegarde de l’environnement arctique. 2. Le développement durable dans et autour de l’Arctique (exploitation des ressources

naturelles comme le poisson, les minéraux, le pétrole et le gaz), l’« économie bleue » et une navigation sûre et fiable (par exemple, la route maritime du nord arctique). 3. La coopération internationale sur les questions arctiques (recherche scientifique, projets de coopération, gestion de la pêche/protection des écosystèmes, pêche com-merciale).

La surveillance continue de l’environnement vaste et rude de l’Arctique à l’aide de sa-tellites d’observation de la Terre, de navigation et de communication est considérée comme essentielle. La Commission Européenne a exprimé les besoins des utilisateurs [Duchossois et al.,2018a,b]. Elle recommande comme première priorité, une mission d’imagerie radio-métrique par micro-ondes répondant à la politique européenne et qui fournira des produits opérationnels de l’océan et de la banquise à haute résolution spatiale et radiométrique et avec au moins une revisite quotidienne des régions polaires. La mission Copernicus Imaging Microwave Radiometer (CIMR) est l’une des six missions candidates prioritaires

(23)

Fig. I.9 Design préliminaire de la mission CIMR réalisé par c Airbus dans le cadre du projet MICROWAT

de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) dans le cadre de l’expansion du programme Co-pernicus.

CIMR sera un radiomètre imageur en micro-ondes basses fréquences à balayage co-nique qui inclura des canaux d’observations entre 1,4 et 36,5 GHz et volera en orbite polaire héliosynchrone, pour fournir la température de la surface de la mer, la vitesse du vent océanique, la salinité et la concentration en glace avec une précision et une résolution spatiale accrues par rapport aux produits actuels. Il sera équipé d’une antenne pliable de l’ordre de 7 m de diamètre et de récepteurs à faible bruit à 1,4, 6,9, 10,65, 18,7 et 36,5 GHz (bandes L, C, X, Ku et Ka). Une description complète des exigences de la mission CIMR est présentée dans Donlon [2018]. La mission CIMR est actuellement en étude de phase A/B1 à l’ESA et devrait être pleinement mise en œuvre pour un lancement d’ici horizon 2025.

5

Plan de la thèse

Dans cette thèse nous nous concentrons sur l’estimation des paramètres de surface de l’océan et de la banquise avec les observations satellites en micro-ondes basses fréquences. Cela s’intègre en partie dans le projet d’étude de la mission CIMR. L’objectif est de déve-lopper des méthodes d’estimation ou proposer des pistes d’amélioration des estimations qui soient utilisables avec les missions micro-ondes passives actuelles et adaptées pour la future mission CIMR.

Dans le Chapitre II de cette thèse, nous traiterons de l’estimation des paramètres océaniques. Nous présenterons d’abord les modèles de transfert radiatif pour l’océan. Une comparaison des principaux modèles de transfert radiatif sera effectuée avec l’aide d’observations satellites. Enfin les erreurs d’inversion sur les paramètres océaniques seront évaluées, notamment avec la configuration de la mission CIMR.

Dans le ChapitreIII, nous nous concentrerons sur l’estimation des paramètres liés à la banquise. Une première partie traitera de l’inversion de la concentration en glace mer. Une nouvelle méthode sera proposée et évaluée. La deuxième partie traitera de l’estimation

(24)

de l’épaisseur de neige sur la banquise, de la température d’interface neige-glace et de la température effective de la glace. Nous nous baserons sur un jeu de données de mesures

in situ colocalisées avec des mesures satellites.

Enfin, le ChapitreIVconclura cette thèse. Nous reviendrons sur les réponses apportées et nous décrirons les perspectives. Les performances de la mission CIMR et ses avantages pour l’estimation des paramètres océaniques et polaires par rapport aux missions actuelles seront résumés.

(25)
(26)

Chapitre II

Estimation des paramètres océaniques

1

Introduction

L’observation de l’océan est importante pour la prévision océanique, la prévision nu-mérique du temps (NWP pour Numerical Weather Prediction), la circulation océanique, l’analyse méso-échelle, l’étude et la modélisation du changement climatique. La tempéra-ture de surface de la mer (SST pour Sea Surface Temperatempéra-ture), la salinité de surface de la mer (SSS pour Sea Surface Salinity) et la vitesse du vent océanique (OWS pour Ocean

Wind Speed) sont des variables fondamentales pour la caractérisation de l’océan. Ces

va-riables peuvent être extraites à partir de mesures micro-ondes passives par satellite. Pour cela un modèle de transfert radiatif (RTM pour Radiative Transfer Model) est nécessaire afin d’interpréter la température de brillance observée depuis le satellite en termes de SST, SSS et OWS. Dans ce premier chapitre, nous étudierons les modèles de transfert radiatif pour l’océan qui permettent à partir des paramètres caractéristiques de l’océan (SST, SSS, OWS) de modéliser l’émissivité de surface de l’océan jusqu’à la température de brillance mesurée depuis le satellite par l’instrument micro-onde passif.

La Section 2.1 sera consacrée à la description théorique des modèles de transfert radiatif océaniques. Habituellement, les modèles de transfert radiatif océaniques sont dé-veloppés pour une application et/ou des instruments spécifiques, c’est-à-dire une gamme sélectionnée de fréquences et d’angles d’incidence. Avec la mission CIMR [Kilic et al.,

2018], les observations à 1,4 GHz (bande L) seront combinées aux observations à 6,9, 10,6, 18,7 et 36,5 GHz (bandes C, X, Ku et Ka) pour la première fois, et fourniront des mesures de SST, de SSS et d’OWS coïncidentes. Jusqu’à présent, les modèles de transfert radiatif océaniques existants ne sont pas conçus pour des applications combinant des ob-servations à 1,4 GHz avec des fréquences micro-ondes plus élevées de 6,9 à 89 GHz. Dans la Section2.2 de ce chapitre, nous proposons de comparer avec les observations satellites trois modèles de transfert radiatif océaniques pour des gammes de fréquences allant de 1,4 à 89 GHz. Les RTMs océaniques sélectionnés sont : (1) le modèle rapide FASTEM (FAST Microwave Emissivity Model) développé au UK Met Office [Liu et al.,2011], (2) le modèle semi-empirique de RSS (Remote Sensing System), développé avec des obser-vations SSM/I et WindSat pour les fréquences entre 6 et 89 GHz [Meissner and Wentz,

2004, 2012] et avec Aquarius à 1,4 GHz [Meissner et al., 2014, 2018], et (3) le modèle physique du LOCEAN développé pour la mission SMOS [Dinnat et al.,2003,Yin et al.,

(27)

2016].

Enfin la Section 3sera dédiée à la description de la méthode d’inversion pour estimer les paramètres océaniques. La méthode d’inversion par estimation optimale sera présentée avec la méthode pour calculer les erreurs théoriques d’inversion. La sensibilité aux para-mètres à des fréquences allant de 1.4 à 89 GHz seront étudiées. Puis les erreurs d’inversion seront évaluées pour différentes gammes de SST, de SSS et d’OWS et pour des situations réelles en Atlantique Nord et globalement. Le potentiel de la future mission CIMR sera comparé aux missions existantes AMSR2 et SMAP.

2

Modèles directs de transfert radiatif micro-onde pour les

variables océaniques

2.1 Théorie du transfert radiatif pour l’océan

Par définition, la température de brillance de l’océan dans la direction (θ, φ) s’écrit :

T Bocéan(θ, φ) = SST × eocéan(θ, φ),

où eocéan est l’émissivité de surface de l’océan, et SST la température de surface de l’océan. A l’équilibre thermodynamique (loi de Kirchhoff), l’émissivité peut s’écrire de manière générale :

e= a = 1 − R

avec a le coefficient d’absorption et R le coefficient de réflexion de la surface.

T Bocéanpeut être décomposée en deux termes qui dépendent de la permittivité relative de l’océan r(qui elle même est fonction de la SST, de la SSS et de la fréquence), de l’angle d’incidence θ, de l’angle d’azimut φ et du vent de surface ~U :

T Bocéan = T Bplat(r, θ) + T Brugosité(r, θ, φ, ~U)

T Bplat est la température de brillance de l’océan lorsque sa surface est plate c’est-à-dire lorsqu’il n’y a pas de vent pour engendrer des vagues ou rugosités. T Brugosité est la température de brillance due à l’action du vent ~U sur la surface de l’océan engendrant des vagues/rugosités qui mènent aussi à la formation d’écume.

Dans le cas où il n’y a pas de vent et que la surface de l’océan est plate, la réflexion à la surface est seulement spéculaire et R devient le coefficient de réflexion de Fresnel (RF r), qui dépend de l’angle d’incidence θ et de la permittivité relative de l’eau r.

T Bplat= SST × (1 − RF r(θ, ))

Les coefficients de réflexion de Fresnel en polarisation verticale (RF r,V) et horizontale (RF r,H) s’écrivent : RF r,V = rcosθ− √ r− sin2θ rcosθ+ √ r− sin2θ 2 RF r,H = cosθr− sin2θ cosθ+√r− sin2θ 2

(28)

Table II.1 – Présentation des modèles de constantes diélectriques pour l’océan et leur domaine de validité.

Modèle Température Salinité Fréquence

Klein and Swift[1977] 5˚C - 30˚C 4%- 35% 1 GHz - 10 GHz

Ellison et al.[1998] 2˚C - 30˚C 20%- 40% 3 GHz - 40 GHz

Ellison et al.[2003] -2˚C - 30˚C 35% 3 GHz - 105 GHz

Meissner and Wentz[2004] -2˚C - 29˚C 0%- 40% 1 GHz - 90 GHz

Meissner and Wentz[2012] -2˚C - 29˚C 0%- 40% 1 GHz - 90 GHz

Liu et al.[2011] -2˚C - 30˚C 0%- 39% 1 GHz - 410 GHz

Habituellement, un modèle de transfert radiatif océanique inclut un modèle de constante diélectrique/permittivité pour calculer rde l’océan puis l’émissivité d’un océan plat. En-suite, pour la partie induite par le vent plusieurs approches sont possibles. Elles prennent notamment en compte un modèle de rugosité dont le paramètre principal est le spectre de vagues. Enfin la fraction d’écume doit être estimée avec son émissivité.

2.1.a Constantes diélectriques

Les modèles de constantes diélectriques ou de permittivité relative rpour l’eau de mer reposent sur une approche semi-empirique : r est reliée à la fréquence ν par une fonction paramétrique dont les paramètres ont été ajustés sur des mesures de constantes diélec-triques à différentes SSTs, SSSs et fréquences. La fonction paramétrique est l’équation de relaxation proposée par Debye [Debye,1929] :

r(ν) = r∞+

rs− r∞ 1 + (iν/νr) −

iσi 2πν0

avec rs = s/0 la permittivité statique relative, r∞ = /0 la permittivité relative à

haute fréquence, νr la fréquence de relaxation, σi la conductivité ionique de l’eau de mer et 0 la permittivité du vide. Pour des études sur des gammes de fréquence plus larges,

une équation de Debye à deux fréquences de relaxation, dite « double » est utilisée :

r(ν) = r∞+ rs− 1 1 + (iν/νr1) + 1− r∞ 1 + (iν/νr2) − iσi 2πν0

avec 1 la permittivité intermédiaire et νr1 et νr2 les deux fréquences de relaxation. Les principaux modèles de constante diélectrique et leurs plages de validité sont pré-sentés dans le Tableau II.1.Klein and Swift[1977] ont proposé un modèle de constantes diélectriques, en utilisant les travaux deStogryn[1971], avec les mesures effectuées à 2,653 GHz [Ho and Hall, 1973] et à 1,43 GHz [Ho et al., 1974] sur des échantillons d’eau de mer et de solutions de NaCl. Leur modèle fournit la température de brillance d’une mer plate avec une erreur de 0,3 K pour des salinités entre 4 et 35 psu. Ce modèle convient aux basses fréquences, mais il devient moins précis au-dessus de 10 GHz.

De même,Ellison et al.[1998] ont proposé un modèle de constantes diélectriques avec une précision de 1% entre 3 et 20 GHz et 3% entre 20 et 40 GHz à une température entre 2 et 30◦C et une salinité entre 20 et 40 psu. Pour les fréquences supérieures à 40 GHz,

(29)

Fig. II.1 TB de surface pour une mer plate (sans vent) au nadir en fonction de la SST pour différents modèles de constantes diélectriques à 1,4 (gauche), 6,9 (milieu) et 37 (droite) GHz.

la formule simple de Debye n’est plus valable. Ellison et al. [2003] proposent un modèle de permittivité utilisant la double formule de Debye, mais qui n’inclut pas de sensibilité à la salinité. Ce modèle est valable entre 3 et 105 GHz pour des températures comprises entre -2 et 30◦C et seulement pour une salinité de 35 psu. La précision sur la permittivité

est de 3%.Liu et al. [2011] ont proposé un modèle de constantes diélectriques basé sur le modèle deEllison et al.[2003], en ajoutant une sensibilité à la salinité. Il est valable entre 1.4 et 410 GHz et une erreur inférieure à 3% est attendue. Les mesures utilisées pour la paramétrisation sont comprises entre -2 et 30◦C pour la température, et entre 0 et 39 psu

pour la salinité.

Meissner and Wentz[2004] ont proposé un modèle de constantes diélectriques de l’eau pour des salinités comprises entre 0 et 40 psu. Ils utilisent l’équation double de Debye. Le modèle est ajusté avec des mesures en laboratoire et des observations SSM/I. Pour l’eau de mer, le modèle est valable jusqu’à 90 GHz et sur une gamme de températures comprises entre -2 et 29◦C. Dans Meissner and Wentz [2012], des modifications ont été

apportées, en utilisant des observations entre 6 et 90 GHz, pour améliorer la cohérence entre les températures de brillances de surface prévues et mesurées.

Les FiguresII.1etII.2montrent la température de brillance au nadir (θ=0) pour une

mer plate en fonction respectivement de la SST et de la SSS, et à différentes fréquences en utilisant différents modèles de constantes diélectriques. On observe que les modèles de constantes diélectriques donnent des résultats avec des différences plus ou moins im-portantes en fonction de la fréquence, de la SST ou de la SSS. On observe aussi que la variation de la température de brillance d’un océan plat en fonction de la SST est très différente en fonction de la fréquence. Cette différence dans la variation en fonction de la SST joue un rôle important pour sélectionner les fréquences qui permettent de restituer un paramètre avec la meilleure précision possible.

(30)

Fig. II.2 TB pour une mer plate (sans vent) au nadir en fonction de la SSS pour différents modèles de constantes diélectriques à 1,4 (gauche), 6,9 (milieu) et 37 (droite) GHz.

2.1.b Contribution du vent

Généralement la surface de la mer n’est pas plate. Elle est composée de vagues induites par l’action du vent et qui la rendent rugueuse. La surface de la mer peut être modélisée comme un ensemble de facettes inclinées avec des pentes Su et Sc dans le sens du vent de face (direction dans le sens du vent en anglais upwind) et du vent de travers (direc-tion transverse au vent en anglais crosswind). La fonc(direc-tion de densité de probabilité de ces pentes P (Su, Sc) peut être exprimée en première approximation comme une fonction gaussienne bidimensionnelle où σu et σc sont les variances des pentes.

P(Su, Sc) = 2πσ1 uσc exp[−1 2(( Su σu )2+ (Sc σc )2)]

Chaque facette a une température de brillance locale (T Bl) dans la direction du radio-mètre. Pour déterminer T Bocéan, il faut alors intégrer toutes les T Bl sur la distribution statistique des pentes :

T Bocéan(θ, φ) = Z Su Z Sc T Bl(θl, φl)ΩP (Su, Sc)dSudSc, (II.1) où θ et φ sont les angles qui indiquent la direction du radiomètre dans le système de coordonnées Terre, et θl et φl sont ceux du système de coordonnées local. Ω est l’angle solide de la surface vu par le radiomètre.

Ici, différents types de modèles peuvent être appliqués. Les modèles de géométrie optique considèrent les vagues de grande échelle comme un ensemble de facettes avec différentes pentes auxquelles s’applique la réflexion de Fresnel. Dans le cas du modèle optique géométrique, les facettes constituant les vagues sont considérées comme lisses.

(31)

Fig. II.3 Schéma expliquant le modèle d’optique géométrique de Prigent and Abba[1990]

Fig. II.4 Schéma expliquant le modèle deux échelles provenant deDinnat[2003]

Les ondes sont grandes par rapport à la longueur d’onde du radiomètre λ0. Seule la

réflexion spéculaire est prise en compte. T Bl est indépendant de φl. Dans ce cas, nous n’avons donc besoin que des variances des pentes de vagues σu et σc pour calculer la fonction de densité de probabilité des pentes P (Su, Sc) puis la température de brillance de la mer avec l’Equation (II.1). Cette approche est utilisée dansPrigent and Abba[1990], elle donne de bons résultats de premier ordre, mais ne tient pas compte de la diffusion qui est importante quand on travaille en basses fréquences micro-ondes (< 20-30 GHz).

Les modèles à double échelle considèrent en plus des vagues de grande échelle la diffusion par les rugosités de petite échelle sur chaque vague de grande échelle. Dans le modèle à deux échelles, la surface est modélisée comme une superposition de rugosités de petites échelles sur des vagues à grande échelle. Les facettes auparavant considérées comme lisses dans le modèle d’optique géométrique sont maintenant rugueuses. Les petites échelles sont les ondes dont la hauteur est petite par rapport à la longueur d’onde du radiomètre λ0 et les grandes échelles sont les ondes dont le rayon de courbure est grand

par rapport à λ0. Le nombre d’onde de coupure kc= λc qui sépare les ondes de petites échelles des ondes de grandes échelles, est choisi comme une fraction du nombre d’onde du radiomètre k0, il est habituellement entre k0/3 et k0/5. Dans ce cas un spectre de vagues ψ(k, φ0) est utilisé et est séparé en une partie grande échelle (GE) et une partie petite

(32)

échelle (PE) définies par : ψGE(k, φ0) = ( ψ(k, φ0) 0 si k < ksi k > kcc ψP E(k, φ0) = ( 0 ψ(k, φ0) si k < kc si k > kc

Pour résoudre l’Equation (II.1) dans le cas du modèle à deux échelles, la fonction de densité de probabilité P (Su, Sc) devient celle des vagues de grande échelle seulement

PGE(Su, Sc), avec les variances des pentes des vagues à grande échelle σu,GE2 et σ2c,GE. A noter que la variance des pentes est beaucoup moins variable en fonction de la vitesse du vent lorsqu’elle est limitée aux vagues de grande échelle. Puis les rugosités de petites échelles sont prises en compte, la surface des facettes n’est plus plane et T Blest exprimée :

T Bl(θl, φl) = SST × (1 − RP E(θl, φl)), Où RP E est la réflectivité induite par les rugosités de petites échelles.

Il existe plusieurs méthodes d’approximation pour déterminer RP E. Une des méthodes utilisées est la méthode des petites perturbations [Yueh et al.,1988,1994], selon laquelle

RP E est exprimé :

RP E(θl, φl) = Rc(θl, φl) + Ri(θl, φl)

Le terme de diffusion cohérente Rc est la fraction de puissance incidente qui se reflète spéculairement dans la direction (θl, φl), et le terme de diffusion incohérente Ri est la fraction de puissance incidente quelle que soit la direction (θα, φα) qui se diffuse dans la direction (θl, φl).

L’approche double-échelle est plus compliquée que le modèle d’optique géométrique, mais elle permet de prendre en compte la diffusion par des rugosités de petites échelles qui sont générées par le vent. La Figure II.5montre la différence en terme de température de brillance entre le modèle d’optique géométrique et le modèle à deux échelles. Pour cela le modèle de LOCEAN a été utilisé, en le configurant tel un modèle d’optique géométrique (seulement les vagues de grandes échelles sont prises en compte) puis en le configurant en modèle deux échelles (qui est la version d’origine du modèle). On observe des différences de plusieurs Kelvins entre les deux types de modèles.

2.1.c Spectres de vagues

Comme vu précédemment, pour simuler l’émissivité due à la rugosité de surface induite par le vent, un modèle de distribution des pentes de vagues dit modèle de spectre de vagues est nécessaire.

Cox and Munk[1954] ont trouvé un modèle empirique pour relier la distribution des pentes des vagues à la vitesse du vent. Ils ont fait des observations photographiques des éclats du soleil à la surface de la mer à des vitesses de vent comprises entre 1 et 14 m/s. Ils ont déduit de leurs observations que les distributions des pentes de vagues sont gaussiennes et que leurs variances dans la direction du vent de face (upwind) et du vent de travers (crosswind) sont liées linéairement à la vitesse du vent :

(33)

Fig. II.5 Comparaisons entre le modèle d’optique géométrique et le modèle deux échelles à différents angles d’incidence et pour plusieurs fréquences. La différence entre les températures de brillance de l’océan plat et de l’océan rugueux est donnée en fonction de la vitesse du vent. Les résultats ont été simulés à partir du modèle de LOCEAN. L’écume n’est pas considérée ici.

σ2

u = 3.16 × 10−3U12.5

où U12.5 est la vitesse du vent à 12,5 m au-dessus de la surface de la mer. Ces variances

de pente de vagues sont la référence pour de nombreux modèles, y compris les modèles de spectre de vagues qui définissent leurs paramètres pour reproduire les variances calculées parCox and Munk [1954].

Pour simuler la TB de l’océan avec le modèle deux échelles, il est nécessaire d’avoir l’expression du spectre de vagues ψ(k, φ0) pour calculer : les variances des ondes à grande

échelle σu,GE et σc,GE, la densité de probabilité des ondes à grande échelle PGE(Su, Sc) et le coefficient de diffusion pour les ondes de petites échelles RP E. Il existe plusieurs modèles de spectre de vagues (tels que Durden and Vesecky [1985], Elfouhaily et al.

[1997], Kudryavtsev et al.[1999] ou Bringer et al.[2014]). La plupart d’entre eux ont été ajustés à partir d’observations micro-ondes actives (radar).

Par exemple, le modèle proposé par Durden and Vesecky [1985] est ajusté avec des observations radar en bandes Ku, X et L. Ces calculs sont valables pour une large gamme d’angles d’incidence (0˚- 70˚). Le spectre de vagues Ψ peut être décomposé comme suit :

Ψ(k, φ) = 1

kS(k)Φ(k, φ)

(34)

de répartition angulaire. Le spectre de puissance omnidirectionnel est exprimé : S(k) =        b0k−3exp[−β(kc/k)2] , pour k < kj a0k−3 bku2 ∗ g∗ !alog10(k/kj) , pour k > kj

où kj = 2, kc = g/U19.5 avec l’accélération de pesanteur g = 9.81 m.s−2, et U19.5 la

vitesse du vent à une altitude de 19,5 m, g= g + γk2 avec γ = 7.25 × 10−5 m3 le

rapport entre la tension superficielle et la densité de l’eau. Les constantes a0 = 0, 004 et β = 0.74 proviennent du modèle de spectre de vagues de Pierson and Moskowitz[1964].

Les constantes a = 0, 225 et b = 1, 25 ont été ajustées par régression sur les données diffusiométriques à 13,9 GHz. Le spectre de puissance des vagues est paramétré pour reproduire le rapport entre σ2

u et σc2 observé par Cox and Munk [1954]. La fonction de répartition angulaire est exprimée :

Φ(k, φ) = 1 (1 + c(1 − exp(−sk2)cos(2φ)

Dans son modèle d’émissivité de la mer, Yueh [1997] utilise le spectre de vagues de

Durden and Vesecky[1985] et multiplie le coefficient d’amplitude du spectre a0par 2.Yin et al. [2012] a constaté que la multiplication du coefficient a0 par 1,25 permet de mieux

correspondre aux observations SMOS.

D’autres modèles de spectre de vagues existent mais celui de Durden and Vesecky

[1985] est le plus souvent utilisé dans les modèles de transfert radiatif pour l’océan. Le modèle deElfouhaily et al.[1997] n’a pas utilisé de données radar pour son développement. Le spectre proposé est basé sur les travaux du JONSWAP (Joint North Sea Wave Project) pour la partie grande longueur d’onde et sur les travaux dePhillips[1985] pour les petites longueurs d’onde. Le modèle tient compte de l’âge des vagues et du fetch (distance d’où vient le vent). Le modèle de Kudryavtsev et al.[1999] est un modèle physique de spectre de vagues pour des longueurs d’ondes courtes allant de quelques millimètres à quelques mètres. Il est basé sur l’équation de bilan de la densité spectrale d’énergie. Le modèle de

Bringer et al. [2014] est un modèle paramétrique simple pour le spectre omnidirectionnel de la surface de la mer pour des ondes courtes. Il est basé sur des données en bande C, Ku et Ka, et à différents angles d’incidence. Il utilise un modèle analytique de diffusion. Le spectre est également limité par plusieurs mesures optiques qui fournissent des conditions

a priori sur la variance des pentes.

La FigureII.6présente la comparaison des modèles de spectre de vagues en fonction du vent pour différentes fréquences. Les modèles de Yin et al.[2012] etYueh [1997] utilisent le spectre de vagues de Durden and Vesecky [1985] mais avec le coefficient a0 devant le

spectre de puissance multiplié respectivement par 1.25 et 2. Le modèle deYin et al.[2012] est celui qui se rapproche le plus des résultats obtenus avec le modèle deCox and Munk

[1954]. On observe que les différences entre modèles peuvent aller jusqu’à 10 K à 37 GHz par exemple. Le choix du spectre de vagues est donc important et impacte la dépendance en OWS de la température de brillance de l’océan.

(35)

Fig. II.6 Comparaisons des TBs au nadir calculées pour différents spectre de vagues en utilisant le modèle de LOCEAN. SST = 10◦C, SSS = 36 psu, et l’écume n’est pas considérée ici.

2.1.d Modèles d’écume

Lorsque l’énergie accumulée devient trop grande les vagues formées par l’action du vent se brisent et de l’écume apparaît. Cette écume n’a pas les mêmes propriétés que l’eau de mer, c’est un ensemble de bulles d’air de rayons différents et sur une épaisseur qui peut varier. L’écume impacte donc le rayonnement émis par l’océan et doit être prise en compte dans le calcul de l’émissivité de surface de l’océan. Les modèles d’écume se décomposent en deux parties, la première consiste à évaluer le pourcentage d’écume présent à la surface de l’océan et la deuxième partie consiste à évaluer l’émissivité de l’écume.

La couverture d’écume de la surface de la mer dépend de la vitesse du vent. Plus le vent est fort, plus la fraction d’écume est importante. D’aprèsMonahan and O’Muircheartaigh

[1980], la fraction d’écume est exprimée selon une loi de puissance :

(36)

Table II.2 – Coefficients b et c de la loi de puissance (Equation (II.2)) pour différent modèles de couverture d’écume.

Modèle de couverture d’écume b c

Tang [1974] 7.75e-06 3.23

Wu[1979] 1.7e-06 3.75

Monahan and O’Muircheartaigh[1980] 3.84e-06 3.41

Monahan and O’Muircheartaigh[1986] 1.95e-05 2.55

WISE 2001 [Villarino et al.,2003] 0.43e-06 3.68

Goddijn-Murphy et al. [2011] 11.5e-05 1.59

Yin et al.[2012] 2.42 e-08 4.86

Salisbury et al.[2013] à 10 GHz 4.6e-5 2.26

Salisbury et al.[2013] à 37 GHz 3.97e-5 1.59

Yin et al.[2016] 3.83 e-06 2.76

Avec Fr la fraction d’écume, U10 la vitesse du vent à 10 m au-dessus de la mer et b et c

deux constantes qui varient selon le modèle de couverture d’écume utilisé.

Dans certains modèles, une dépendance à la stabilité entre l’atmosphère et l’océan ∆T = Tair− Tocéan est ajoutée. L’expression de la fraction d’écume devient alors :

F r= bUc

10· exp(a∆T )

En pratique ∆T est souvent considéré égal à zero.

Les modèles deTang[1974],Wu[1979] ou encore de la campagne WISE (WInd Salinity Experiment) en 2001 [Villarino et al.,2003] sont basés sur des mesures photographiques. Plus récemment, Yin et al. [2012, 2016] ont proposé un modèle de fraction d’écume paramétré pour les applications en bande L. Ils ont ajusté les constantes de la loi de puis-sance (Equation (II.2)) aux observations en bande L et étant donnée une loi d’émissivité de l’écume. Yin et al. [2012] utilise l’émissivité de l’écume de Stogryn [1972]. Alors que

Yin et al.[2016] utilise l’émissivité d’écume deAnguelova and Gaiser[2013].

Anguelova and Webster [2006] ont montré que la fraction d’écume est sous-estimée en utilisant des données photographiques ou vidéo car seule l’écume active (écume qui vient d’être formée) qui est très brillante est détectée et les résidus d’écume qui sont plus anciens et moins brillants ne le sont pas. La sensibilité à l’écume dépend de la fréquence. Lorsque la fréquence augmente la sensibilité à l’écume augmente et les couches d’écume plus fines et moins brillantes sont détectées. Anguelova and Webster[2006] ont développé un jeu de données de fraction d’écume dérivé des observations satellitaires à 10 et 37 GHz. Salisbury et al. [2013] et Albert et al. [2016] se sont basés sur ce jeu de données pour développer leur modèle de fraction d’écume à 10 et 37 GHz. Le modèle deSalisbury et al. [2013] suit la loi de puissance de Monahan and O’Muircheartaigh[1980] alors que le modèle deAlbert et al. [2016] s’écrit :

F r = 10.47e−5× (OW S − 1.058)2 à 10 GHz F r = 10.77e−5× (OW S + 1.789)2 à 37 GHz

Le Tableau II.2 résume pour chaque modèle de couverture d’écume la valeur des coefficients b et c utilisés dans l’Equation (II.2). La FigureII.7montre la comparaison de

(37)

Fig. II.7 Comparaisons des modèles de fraction d’écume en fonction de la vitesse du vent.

différents modèles de fraction d’écume. Les modèles deTang[1974] etWu[1979] montrent des fractions d’écume plus élevées que les autres modèles. On s’attend à ce que l’effet de l’écume soit négligeable en dessous de 7 m/s. Le modèle de Yin et al. [2016] calcule des fractions d’écume plus faibles que les autres modèles, il est adapté pour la bande L (1,4 GHz). On observe avec les modèles développés pour une fréquence particulière que la fraction d’écume calculée augmente avec la fréquence. Le modèle de fraction d’écume ne peut pas être choisi indépendamment du modèle d’émissivité de l’écume car c’est la combinaison des deux qui fournira la composante totale de l’émissivité de la mer due à l’écume.

Pour calculer l’émissivité de l’écume plusieurs modèles existent (Stogryn [1972], Ka-zumori et al.[2008],Liu et al.[2011],Anguelova and Gaiser[2013]). Le modèle deStogryn

[1972] offre une grande dépendance en fréquence. Il est valide entre 3 et 50 GHz et dépend aussi de l’angle d’incidence. D’après les mesures deRose et al. [2002] à 10,8 et 36,5 GHz, l’émissivité de l’écume déduite parStogryn[1972] est sous-estimée.Kazumori et al.[2008] ont donc proposé de nouvelles équations basées sur le travail de Stogryn[1972] mais qui ne dépendent pas de la fréquence. Puis Liu et al.[2011] ont utilisé l’émissivité de l’écume deKazumori et al.[2008], qui dépend de l’angle d’incidence et de la polarisation, et y ont ajouté une dépendance en fréquence.

Plus récemment, Anguelova and Gaiser[2013] ont proposé un modèle d’émissivité de l’écume pour les fréquences micro-ondes entre 1,4 et 37 GHz. Ce modèle est basé sur une approche physique et prend en compte de nombreux paramètres : épaisseur de la couche d’écume, profil vertical de la couche d’écume et le pourcentage d’air contenu dans l’écume. Ils ont montré en particulier que l’émissivité de l’écume à une fréquence donnée dépend aussi de l’épaisseur de l’écume.

La Figure II.8 présente la comparaison de différents modèles d’émissivité de l’écume en fonction de la fréquence. Le modèle Anguelova and Gaiser [2013] nécessite plus de

Figure

Fig. I.1 Figure provenant du rapport du GIEC 2013 illustrant l’anomalie de température de surface de la mer (en haut), l’anomalie de niveau de la mer (au milieu), l’anomalie de l’extension de la banquise en été (en bas) en fonction du temps.
Fig. I.3 Illustrations des différentes ondes électromagnétiques avec leurs fré- fré-quences et longueurs d’onde ainsi que l’absorption de celles-ci par l’atmosphère.
Fig. I.8 Les six thématiques des services d’information du programme Coper- Coper-nicus.
Table II.1 – Présentation des modèles de constantes diélectriques pour l’océan et leur domaine de validité.
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