• Aucun résultat trouvé

Titre: L officier, la colonie et l indigène : conceptions du maintien de l ordre à travers le Manuel tactique du groupe de l AOF (1910) Auteur:

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Titre: L officier, la colonie et l indigène : conceptions du maintien de l ordre à travers le Manuel tactique du groupe de l AOF (1910) Auteur:"

Copied!
21
0
0

Texte intégral

(1)

Titre: L’officier, la colonie et l’indigène : conceptions du maintien de l’ordre à travers le Manuel tactique du groupe de l’AOF (1910)

Auteur: Thomas VENNES (M. A.), Candidat au doctorat, Université de Sherbrooke Publication: Commandement colonial, résistances et décolonisation - Une histoire de l’Afrique contemporaine

Sous la direction de: Patrick DRAMÉ et de Boris LUKIC Pages: 70-90

URI: http://hdl.handle.net/11143/19144 DOI: https://doi.org/10.17118/11143/19144

(2)

L’

officier

,

La coLonie et L

indigène

:

conceptions du

maintien de L

ordre à travers Le

M

anuel tactique du groupe de l

’aoF (1910)

Thomas VENNES (M. A.), Candidat au doctorat Département d’histoire, Université de Sherbrooke

Le Manuel tactique pour le groupe de l’AOF de 1910 est une synthèse des savoirs militaires pour l’Afrique occidentale française (AOF) et permet aux officiers de se familiariser avec les conditions particulières de la fédération. Les considérations derrière sa création sont d’ordre internes et touchent avant tout à des enjeux de maintien de l’ordre spécifique à des territoires « pacifiés » ou en voie de l’être. Suivant une tendance implantée dans le savoir-faire colonial depuis la conquête de l’Algérie, les populations colonisées déjà pacifiées et à pacifier sont soumises à l’examen afin d’outiller l’officier avec un savoir vulgarisé qui lui permettra d’agir sur le territoire1. Conquérant, occupant et commandant, l’officier se trouve dans un monde qu’il doit comprendre et organiser afin de le pacifier et d’y maintenir l’ordre. Ce manuel permet aussi de mieux comprendre ce que les autorités entendent par la « pacification ». Il illustre surtout l’importance de la racialisation dans les pratiques de maintien de l’ordre.

La présente étude se concentre particulièrement sur comment les représentations des populations « indigènes » de l’AOF s’articulent dans le manuel tactique. Elle est structurée autour des trois questions suivantes. Quels sont les savoirs et les connaissances néces- saires pour les officiers nouvellement stationnés en AOF afin de continuer la pacification et de maintenir l’ordre? Quelle représentation des populations aofiennes donne-t-elle?

Comment ces représentations s’arriment-elles en actualité avec les intérêts militaires et métropolitains? Afin de pacifier les populations aofiennes et pour maintenir l’ordre, les au- torités militaires mobilisent des outils intellectuels et des technologies de contrôle, soit la catégorisation ethnologique et le racialisme propre à la pensée européenne du 19e et 20e siècles. Conséquemment, l’essentialisation, la racialisation, la construction de hiérarchies raciales et de catégories ethniques servent à faire sens des populations que ces officiers doivent surveiller et commander au-delà de l’usage d’une force brute et permanente. Les populations sont vulgairement caractérisées par leurs hostilités, leurs méfiances, leurs

1.  Jacques Frémeaux, L’Afrique à l’ombre des épées : 1830-1930. 2 : Officiers administrateurs et troupes coloniales, vol. 2, Paris, Service historique de l’Armée de terre, 1995, p. 44‑48.

(3)

loyautés, leurs coutumes, leurs niveaux de développement civilisationnel, leurs habiletés militaires et leurs propensions au travail.

Dans une première partie, nous montrons que le manuel initie les officiers à la guerre, la « pacification » et le maintien de l’ordre en colonie, s’appuyant avant tout sur des sa- voirs acquis sur le terrain, l’adaptation, le renseignement et la collaboration étroite entre l’administration civile et militaire. Il est alors nécessaire d’identifier et de faire ressortir les grandes caractéristiques des « races » aofiennes, plus particulièrement qui est soumis et qui ne l’est pas. Notre analyse soutient que ces caractéristiques s’appuient sur des lo- giques d’essentialisation et de racialisation. Enfin, la dernière partie illustre comment les considérations derrière le recrutement des tirailleurs ainsi que des travailleurs en vue de la mise en valeur inclus dans le manuel participent également à l’essentialisation et à la racialisation des populations aofiennes.

1. c

ommentfaire La guerre

,

deLa métropoLe à La coLonie

.

1.1 UnegUerreasymétriqUeetdepacification

Le Manuel tactique pour le groupe de l’A.O.F. de 1910 est le premier d’une longue sé- rie d’ouvrage publié par le ministère de la Guerre jusqu’aux décolonisations. La dépêche no 14-1/8 du ministère souligne son but : « […] fournir aux cadres des troupes coloniales les moyens de posséder avant même leur arrivée dans la Colonie où ils sont appelés à servir, les résultats de l’expérience souvent chèrement acquise par leurs devanciers et qui pourrait risquer de se perdre si elle n’était méthodiquement codifiée2. ». Ainsi, le manuel répond au besoin de regrouper et de synthétiser les savoirs militaires dans des colonies qui, bien que reconnues par les puissances impériales européennes comme appartenant à la France, ne sont pas toutes pleinement intégrées dans l’empire. La situation géopoli- tique de l’AOF doit être prise en considération afin de comprendre le contexte de produc- tion du manuel3. En 1910, la fédération a atteint sa pleine étendue depuis seulement six ans. Composée de six colonies, soit le Sénégal, la Mauritanie, la Guinée, la Côte-d’Ivoire, le Dahomey et le Haut-Sénégal et Niger (HSN), cette fédération est créée en 1895 et in- corpore de nouveaux territoires jusqu’en 1904, le dernier venu étant le HSN. Sur papier, ces territoires sont officiellement sous domination française, mais la réalité du terrain est

2.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 1.

3.  Les circonstances menant à la création du manuel ne se limitent pas au contexte de l’AOF. Il faut consi- dérer que l’armée française en colonie a fait peau neuve en 1900. Cette date officialise la création de l’ar- mée coloniale en la détachant du ministère de la Marine et en la remettant entre les mains du ministère des Colonies et du ministère de la Guerre Xavier Boniface, « Les armées outre‑mer », dans Hervé Drévillon et Olivier Wieviorka, dir., Histoire militaire de France. De 1870 à nos jours, vol. 21, Paris, Perrin, 2018, p. 109.

(4)

toute autre. La « pacification » des « indigènes » dans de nombreuses régions se poursuit bien au-delà de la Grande Guerre.

Le terme de « pacification » a beaucoup de sens et d’implication. Pour de nombreux chercheurs, il existe un flou assez important entre la pacification et la guerre. Il est même utilisé comme synonyme dans plusieurs contextes4. Pour Samia el Mechat, le terme a deux acceptations : 1) le rétablissement de l’ordre par la répression d’un mouvement de contestation et d’insurrection; 2)  un processus d’apaisement, de conciliation et de ré- tablissement de la paix, autrement dit un phénomène multidimensionnel s’appuyant néanmoins sur l’armée5. Pour garder les acquis de la pacification, il faut s’appuyer sur le « maintien de l’ordre » et le « devoir de civilisation ». Surtout, la pacification « permet à l’administration d’organiser des espaces économiques et sociogéographiques selon des règles définies par et pour la métropole, d’imposer sa domination et de fonder la coloni- sation sur des bases réputées solides et durables6. » Elle implique en conséquence un mouvement continu, une permanence, de la progression et de la régression. Elle est aussi une situation particulière d’affrontements répétée où chaque nouvelle confrontation peut être le fruit d’un nouveau conflit7. L’administration coloniale, qu’elle soit militaire ou civile, cherche dans ce contexte à concilier des impératifs et des logiques contradictoires, soit le compromis et la répression. La tactique de la « tache d’huile » est une tentative de concilier cette contradiction, impliquant une action combinée de force et de politique. La connaissance des « races » détermine comment pacifier certaines populations et quelles actions militaires ou administrative il faut employer.8

Comme nous allons le voir, ce manuel est explicitement destiné à la pacification et au maintien de l’ordre en AOF. À la fin de la première section, l’ouvrage donne quatre

« observations » dont deux indiquent clairement à quel théâtre d’opérations ce manuel s’adresse : « 3 - les opérations militaires en AOF ont pour but de pacifier quelques régions révoltées et non pénétrées encore et de donner la chasse à des bandes de pillards venus de l’Afrique du Nord ou du Liberia » et « 4 - La guerre contre un envahisseur européen n’est pas étudiée9. » Il s’agit alors d’un regard endogène sur les menaces à l’ordre coloniales

4.  Mahir Şaul et Patrick Royer, West African Challenge to Empire: Culture and History in the Volta-Bani Anticolonial War, Athens, Ohio University Press, 2001, p. 358 ; Jean‑François Klein, «La "pacification", un processus impérial », Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe, 2020, consulté le 13 septembre 2021, https://ehne.fr/fr/node/12418.

5.  Samia El Méchat, dir., Coloniser, pacifier, administrer: XIXe-XXIe siècles, Paris, CNRS éditions, 2014, p. 8.

6.  Ibid., p. 7.

7.  Ibid., p. 7‑8.

8.  Ibid., p. 9.

9.  Ibid., p. 78.

(5)

et non pas sur des menaces exogènes10. Ce sont donc les populations sous domination française qui sont considérées comme potentiellement dangereuses pour l’ordre colonial.

Toutefois, la guerre à l’européenne est bien explicitée dans le manuel :

Toutefois dans nos règlements généraux sont formulés un certain nombre de principes invariables sur lesquels repose toute action de guerre. Ils in- diquent en outre les moyens d’action; mais d’une manière large, laissant au chef le soin de les approprier à chaque cas particulier.

En conséquence, bien qu’ils soient établis en vue de la guerre en Europe, ils constituent la base qui permet de régler notre conduite dans la prépara- tion et l’exécution d’une opération aux colonies11.

L’entrecroisement des savoirs et des pratiques militaires applicable au continent euro- péen et ceux pour les colonies entrainent une hybridation intéressante. Cette adapta- tion au contexte colonial et la présence d’esprit des officiers coloniaux de ne pas cal- quer la guerre coloniale sur la guerre européenne sont assez généralisées12. Néanmoins, la guerre d’annihilation clausewitzienne, adéquate aux guerres entre Européens sur le continent, et les guerres coloniales ont des éléments similaires. Par exemple, certaines tactiques adoptées par les officiers coloniaux pendant les conquêtes reflètent souvent un désir d’« annihiler » l’ennemi à travers des batailles concentriques et décisives. Dans d’autres cas, les officiers optent pour des campagnes de destruction systématique et des

10.  Ibid. 11.  Ibid., p. 1.

12.  Dierk Walter, Colonial violence: European empires and the use of force, traduit par Peter Lewis, Oxford ; New York, Oxford University Press, 2017, p. 202‑203.

(6)

« opérations de nettoyage13 », encore un reflet des tactiques d’« annihilation » des doc- trines militaires européennes. Autant que dans la doctrine métropolitaine, l’usage de la puissance de feu est aussi au cœur de la doctrine coloniale et l’offensive est préférée à la défensive. L’« école coloniale » importe donc certains principes de la guerre européenne14.

Or, les éléments primordiaux qui distinguent ces deux théâtres de guerre sont l’asy- métrie entre les belligérants qui s’accentue au courant du 19e siècle, autant au niveau technologique qu’organisationnelle15, ainsi que le statut des ennemis aux colonnes fran- çaises. Réagissant à l’asymétrie régnante, ces ennemis optent pour des tactiques de gué- rilla16. En conséquence, les « indigènes » révoltés deviennent « illégitimes » et barbares par ses méthodes de guerre, d’autant plus qu’ils ne sont pas organisés, pour la plupart, dans des systèmes étatisés et bureaucratiques. L« ’indigène » est parfois dépeint comme un individu soumis à l’influence des chefs, des prophètes ou des marabouts. Ceux-ci l’in- citent à la violence contre une force vraisemblablement plus civilisée, mieux équipée et redoutablement efficace.

13.  Le désir d’annihilation, ou d’extermination, n’est pas synonyme de génocide. Il s’agit de vouloir ex- terminer la force militaire adverse. Cela dit, en raison de l’amalgame entre les populations civils et com- battantes en contexte colonial, une telle vision de la guerre peut être un moteur à des dynamiques gé- nocidaire. C’est le cas, notamment, lors de la répression des populations Héréros et Namas en Afrique allemande de l’ouest (1904‑1908). Isabel V. Hull, Absolute Destruction: Military Culture and the Practices of War in Imperial Germany, Ithaca, NY, Cornell Univ. Press, 2006, p. 55‑56 ; L’extermination peut aussi être une pratique localisé qui mène à un massacre de masse, tel que l’argumente Le Cours Grandmaison en soulignant l’aspect systématique et organisé des enfumades et des razzias en Algérie lors des campagne de Bugeaud. Olivier Le Cour Grandmaison, Coloniser. Exterminer. Sur la guerre et l’État colonial, Paris, Fayard, 2005, p. 140‑143 ; Cette dynamique d’annihilation peut aussi se manifester dans des « opérations de nettoyages », tel qu’observé par Patrick Dramé lors de la guerre du Mono. En effet, les colonnes de tirailleurs sillonnent le territoire à la recherche des poches insurrectionnel afin de les mater violement et d’obtenir leurs soumissions inconditionnelles. Patrick Dramé, L’Impérialisme colonial français en Afrique : enjeux et impacts de la défense de l’AOF : 1918-1940, Paris, Harmattan, 2007, p. 93‑94 ; Il est également utile de noter que les guerres d’exterminations en colonie ne sont pas une règle générale. Les circons- tances immédiates, les ressources à la disposition de l’armée, les objectifs politiques et la surveillance civile sont notamment des freins au pratiques génocidaire, d’autant plus que l’objectif ultime du colo- nialisme est la « mise en valeur » du territoire et des populations colonisées. La nuance s’impose quand il s’agit de colonie de peuplement où des pratiques et des dynamiques génocidaires sont plus fréquent en raison de la présence des colons qui cherchent à exploiter la terre par et pour eux‑mêmes. Dierk Walter, Colonial violence, op. cit., p. 187, 191‑192.

14.  Douglas Porch, « Bugeaud, Galliéni, Lyautey: The Development of French Colonial Warfare », dans Makers of Modern Strategy: from Machiavelli to the Nuclear Age, Oxford, Oxford University Press, 1986, p. 377‑378.

15.  Patrick Royer, La guerre en miroir: conquête coloniale et pacification au Soudan occidental, Paris, Les Indes savantes, 2019, p. 61.

16.  Dierk Walter, Colonial violence, op. cit., p. 209.

(7)

1.2 LesprincipesdeLagUerreen afriqUecoLoniaLe

L’initiative et l’autonomie, deux traits qui se résument dans l’idée de « débrouillardise » de l’historien Anthony Clayton17, sont au fondement de la philosophie de l’action guerrière en colonie. Cette débrouillardise doit néanmoins s’appuyer sur l’un des piliers du maintien de l’ordre : le renseignement18. Le manuel de 1910 vient combler ce besoin essentiel en abordant assez sommairement les différentes zones géographiques, les traits physiques et psychologiques des populations de l’A.O.F. ainsi que les tactiques « […] adaptés res- pectivement aux grandes régions de l’Afrique Occidentale Française différentes par la constitution géographique, par le climat et par les mœurs des habitants19. » L’introduction au document est particulièrement révélatrice de la philosophie militaire qui y sous-tend.

L’idée de « débrouillardise » s’applique aussi à la question du renseignement et du savoir.

Le véritable savoir-faire de la guerre coloniale ne s’apprend pas dans les écoles de guerre, ni dans les manuels militaires, mais à travers l’expérience personnelle et d’autrui, oral et écrit :

Mais ce manuel serait inutile et même dangereux s’il devait être considéré comme un mémento fixant par un simple effort de mémoire la solution de toutes les difficultés qui se présenteraient en période d’opérations. Il se- rait alors susceptible d’affaiblir la notion primordiale d’initiative et l’esprit de décision chez les cadres et pourrait les éloigner de la réflexion et de l’étude. Or, dans tous les cas, nos règlements appropriés aux circonstances spéciales de la guerre aux colonies devraient suffire avec le jugement et le bon sens.

Il doit être considéré simplement comme une base préparatoire au travail personnel.

Pour se mettre réellement à la hauteur de la tâche qui leur incombera, les cadres devront s’en inspirer et compléter ses enseignements auprès des chefs et des camarades; faire appel à leur propre expérience. Ils de- vront avant tout méditer sur les leçons de l’histoire militaire de l’Afrique Occidentale Française, dont les éléments peuvent être puisés dans les œuvres des ARCHINARD, des GALLIENI et des autres Chefs qui ont partici- pé à la conquête de l’Afrique Occidentale Française20.

17.  Anthony Clayton, France, Soldiers and Africa, London, Brassey’s, 1988, p. 26.

18.  Jean‑Pierre Bat et Nicolas Courtin, « Le renseignement français en Afrique »:, Revue Défense Natio- nale, no 7, juillet 2016, p. 65.

19.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 2.

20.  Ibid., p. 2.

(8)

Le peu d’influence des conflits coloniaux sur la doctrine militaire française, leurs ab- sences dans l’enseignement militaire21 et l’infime quantité d’études sur ces campagnes à des fins de formation militaire22 montre comment il est important pour les officiers de se former et de s’informer auprès de leurs collègues et des grandes figures de la conquête de l’AOF. L’importance des cohortes d’officiers qui se regroupent autour d’officiers par- ticuliers tels qu’Archinard et Gallieni23, sont aussi une preuve de cette philosophie. Elle repose sur une réalité somme toute évidente du monde colonial et impérial : considérant la mobilité des acteurs de l’autorité coloniale dans l’empire, un nouvel apprentissage doit être fait à chaque redéploiement. Il n’est pas rare pour les officiers d’être déployés dans plusieurs colonies différentes pendant leurs services militaires. Cela dit, ils doivent alors s’adapter aux réalités du terrain, et plus particulièrement aux populations à pacifier ou à maintenir pacifiées. Comme le souligne le manuel : « [...] en effet, la nature des villages ou points d’appui, les méthodes de défense, les procédés de combat, la valeur physique et morale de l’indigène sont des conditions qui, avec beaucoup d’autres, font varier les règles d’application des principes de la guerre24. »

La collaboration avec les autorités civiles lors d’opérations de maintien de l’ordre est un élément clé de la guerre coloniale. Cette collaboration résulte d’une conjoncture par- ticulière ainsi qu’une négociation entre civil et militaire25. Elle témoigne de l’importance d’impliquer des acteurs qui connaissent le terrain. Ainsi, les commandants de cercle et les commandants militaires doivent procéder d’un commun accord lors d’«  opération de police », le tout sous l’égide du lieutenant-gouverneur et du commandant supérieur26. Également, il est explicité l’importance de connaitre et de comprendre l’indigène. Ici, la notion du renseignement en colonie comme étant un « all-source intelligence27 » obtenu de façon ouverte et secrète est primordiale. De cette façon, la collaboration entre militaire et civil est aussi mise de l’avant dans la gestion des crises : « […] lorsque des opérations ont lieu dans sa région, si le commandant d’un cercle n’est pas le commandant de la colonne, il met à la disposition de celui-ci son service d’information tout en continuant à

21.  Douglas Porch, « Bugeaud, Galliéni, Lyautey: The Development of French Colonial Warfare », art. cit., p. 400, 402‑403.

22.  Vincent Joly, Guerres d’Afrique : 130 ans de guerres coloniales : l’expérience française, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, p. 31.

23.  Ibid., p. 116, 120.

24.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 2.

25.  Ibid., Annexe 1., « Attributions des autorités civiles et militaires en vue de l’emploi des forces militaires aux colonies. Extrait de la Circulaire du Ministre des Colonies du 19 juillet 1912 », p. 85‑89.

26.  Ibid., p. 87.

27.  Martin Thomas, Empires of intelligence: security services and colonial disorder after 1914, Berkeley, University of California Press, 2008, p. 2.

(9)

se renseigner lui-même par de nouveaux agents. Il transmet au chef de l’expédition les renseignements recueillis28. »

Le manuel n’offre pas d’information complexe et détaillée sur les populations indigènes, mais plutôt un aperçu sur qui doit être surveillé avec suspicion, qui est ouvertement hos- tile et sur qui l’on peut s’appuyer. Construite en partie par le service de renseignement ain- si que par les savoirs accumulés par des explorateurs, des missionnaires, des militaires et des civils, ces renseignements permettent aux officiers, dans les mots de Jacques Frémeaux, d’« abréger la conquête ou la pacification » en identifiant « […] à qui pourra être imposée la reddition29. »

En répondant aux besoins militaires, le manuel catégorise les populations africaines par l’entremise de la racialisation et de l’essentialisation. Cette approche est propre à la mentalité européenne des 19e et 20e siècles. En effet, en étudiant la remise en question de la « mission civilisatrice » par le monde colonial après la Première Guerre mondiale, l’historien Michael Adas souligne la propension dans la mentalité victorienne de la fin du siècle à vouloir classifier, catégoriser et hiérarchiser30. L’anthropologue Benoit de L’Estoile montre également, à travers l’idée wébérienne de la rationalité bureaucratique, que « le besoin de savoir est donc inscrit dans les exigences de l’administration bureaucratique, et la production d’un savoir spécifique apparaît comme une des caractéristiques de cette forme de domination31. » L’instrumentalisation des savoirs à des fins de dominations est au cœur du projet colonial :

Ainsi, l’effort de connaissance considérable, réalisé dès avant la conquête et pendant celle‑ci par les explorateurs, puis par les militaires, a pu être interprété sur le mode du travail de renseignement qui fait partie de l’arsenal des technologies de conquête, puis de contrôle, des populations soumises et pacifiées. Plus généralement, l’administration des territoires conquis implique un travail de rationalisation, au sens d’une mise en ordre du monde colonisé32.

Quoique De L’Estoile se réfère particulièrement à l’administration civile à partir des années 1920, son analyse permet de comprendre certaines logiques et pratiques de l’armée colo- niale. En tant qu’outil pour la pacification et le maintien de l’ordre, le Manuel tactique pour le groupe de l’A.O.F. s’inscrit dans cette entreprise de contrôle.

28.  Ibid., p. 68.

29.  Jacques Frémeaux, L’Afrique à l’ombre des épées : 1830-1930. 2 : Officiers administrateurs et troupes coloniales, op. cit., p. 45.

30.  Michael Adas, « Contested Hegemony: The Great War and the Afro‑Asian Assault on the Civilizing Mission Ideology », Journal of World History, vol. 15, no 1, 2004, p. 79.

31.  Benoît De L’Estoile, « Science de l’homme et “domination rationnelle” savoir ethnologique et poli- tique indigène en afrique coloniale française », Revue de Synthèse, vol. 121, no 3‑4, juillet 2000, p. 296.

32.  Ibid., p. 299.

(10)

Ainsi, le conflit colonial présenté dans le manuel est une guerre endogène qui prend plusieurs euphémismes telles la « pacification » et l’« opération de police ». Ceci mène inexorablement à l’identification, la description et la catégorisation des populations ao- fiennes. Selon nous, le manuel construit une image de l’« indigène » qui vient le racialiser et essentialise une posture qu’elles avaient à un temps donné. Ces « savoirs » se ratta- chent, bien évidemment, à d’autres éléments intrinsèques à la pratique de la guerre, tels la géographie, le climat, l’infrastructure et les tactiques à favoriser dans des contextes spécifiques. Le tout permet de répondre aux anxiétés des officiers postés en colonie, conscients de leur présence en territoire étranger et parfois hostile, nécessitant alors des outils appropriés pour pacifier, commander et, ultimement, maintenir l’ordre.

2. u

nordre à maintenir

,

des

«

indigènes

»

à pacifier

2.1 connaitreL’afriqUe, connaitresonennemi

La guerre, la conquête et la rencontre de l’autre, qu’elle soit violente ou pacifique, sont productrices d’anxiétés et ne se réservent pas au contexte colonial. Néanmoins, ce contexte fait converger ces trois phénomènes en un seul lieu. À travers la guerre, on conquit des territoires occupés par un « autre », l’Africain, qui est une personne noire, de culture et de « race » étrangère aux Européens. Malgré les rapprochements, l’assimilation de certains « évolués » et la loyauté déclarée de certaines populations et de leurs chefs, l’Africain restera toujours étranger33. Il faut, en conséquence, le connaître afin de le « pa- cifier », « l’apprivoiser », le commander et le « civiliser ». Ce manuel sert d’introduction au savoir et au renseignement propice à aider l’officier dans ces tâches. Certains éléments qui s’y trouvent sont attendus d’un manuel militaire telles les tactiques et les formations à favoriser ainsi que des descriptions de campagnes militaires et de combats dans des contextes particuliers.

D’autres éléments relèvent de préoccupations qui sont tout à fait naturelles et sont re- liés à la survie, tels que connaitre les maladies présentes et leurs traitements, ou encore l’importance de l’approvisionnement en eau. En ce qui a trait aux brèves descriptions des diverses races de l’AOF, l’enjeu principal est de montrer qui est hostile, qui va collaborer et qui va avoir besoin de persuasion. Deux autres éléments propres au contexte colonial sont aussi présents dans ces descriptions. La première est la propension au travail. En effet, il s’agit d’informer sur qui fait un bon travailleur en vue de la « mise en valeur » ou pour effectuer des travaux au service de l’armée. La deuxième est d’informer le lecteur sur les races martiales afin de souligner lesquelles sont aptes au service militaire. Les tirailleurs sénégalais et leurs recrutements sont des éléments clés de la mission de l’ar-

33.  Albert Memmi, Portrait du colonisé précédé de Portrait du colonisateur, Paris, Gallimard, 2012, p. 139‑140.

(11)

mée en colonie considérant d’une part, la publication récente de la Force Noire de Charles Mangin et la levée d’une armée coloniale en vue d’une guerre en Europe et, d’autre part, le rôle primordial des tirailleurs dans la conquête, la pacification et le maintien de l’ordre dans l’empire. Ces deux derniers éléments seront explicitement discutés à la partie trois.

Chacune des quatre parties du manuel, soit les « Notions Générales » et trois manuels distincts pour chaque zone géographique de l’AOF («  pays soudanais  », «  pays saha- rien » et les « régions forestières du sud »), contient des informations sur les différentes

« races » de l’AOF. C’est en particulier dans la première partie, « Notions générales », que nous retrouvons un chapitre complet qui s’y dédie. La logique derrière ce travail d’ethno- logie militaire à un impact significatif. Elle essentialise des postures qui avait une certaine vérité à un moment précis, des postures adoptées par des populations indigènes lors des conquêtes et des pacifications dont certaines sont encore en cours. Dans le chapitre

« Les races de l’Afrique Occidentale française », ces postures ne sont pas rattachées à des positions politiques et des considérations stratégiques du moment formulé par les populations « indigènes », par exemple se faire allier des Français pour combattre un ennemi régional. Elle ne souligne que la posture en essentialisant la « race » au complet.

En effet, les commentaires sur les populations Lobis, Birifons, Oulés, Bobos, Samos et Dagaris illustre bien cette généralisation : ils sont des « peuples très primitifs, belliqueux, n’ayant qu’une organisation rudimentaire. Les luttes intestines sont communes; ils em- ploient des flèches empoisonnées. L’absence d’autorité et de lois chez ses peuples les rend peu aptes à faire de bons tirailleurs avant que leur état social ne soit amélioré 34. » L’officier nouvellement posté en colonie sait maintenant que ces populations, qui habitent une zone récemment conquise, soit vers la fin 1898, et encore en voie de pacification35, sont hostiles non seulement envers la France, mais aussi entre eux. Le conflit et la mé- fiance sont une partie intrinsèque de leur nature. La section portant sur les « habitudes de combat » des populations soudanaises est aussi révélatrice de la façon dont le manuel fixe et dénature des phénomènes complexes :

Dans tout le Soudan, les races différentes vivent côte à côte, sans affini- tés culturelles. Les groupements manquent de cohésion. Certaines races (Mossis, Oules) ignorent l’organisation la plus rudimentaire.

Les soulèvements sont en général l’œuvre des chefs religieux (?), d’un chef de tribu. Les agitateurs, les faux prophètes, grâce à la crédulité du noir, (?) les musulmans qu’ils vont les venger des (?) et les fétichistes qu’ils les dé- barrasseront de la domination des « blancs ». La promesse du pillage sert d’appât.

34.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales. », p. 13.

35.  Jeanne‑Marie Kambou‑Ferrand, Peuples voltaïques et conquête coloniale, 1885-1914 : Burkina Faso, Paris, L’Harmattan, 1993, 478 p.

(12)

L’instigateur du mouvement cherche ensuite à emporter avec ses premiers fidèles un succès sur un petit détachement. S’il réussit, les hésitations sont levées et les guerriers viennent à lui par petit paquet, à pied ou à cheval, au nombre de plusieurs milliers souvent. Mais ils ne forment pas une armée organisée et les chefs ont rarement leurs hommes complètement dans la main36.

Le noir du Soudan est de facto crédule et aisément manipulable. Tant que leurs chefs font preuve de bravoure, que la victoire contre le « Blanc » soit présentée comme envisageable suivant une confrontation d’une puissance propagandiste considérable, et que la résis- tance permet d’obtenir un certain bénéfice d’ordre matériel, les populations les suivront.

2.2 Civilisationet « sauvagerie » : unemesuredévaluation

Le niveau de développement civilisationnel qu’attribue le manuel aux différents peuples et leurs propensions à une posture hostile prend aussi une place importante dans les savoirs militaires présents dans le manuel. S’il note l’« organisation rudimentaire » et la

« primitivité » des populations soudanaises, le manuel fait des remarques similaires à propos des populations adjas de la Côte-d’Ivoire qui sont décrites en deux mots : « om- brageux et sauvages37. » Encore plus que les populations soudanaises, les Adjas sont hors des circuits coloniaux et sont encore à « pacifier » en 191038. Ils habitent les forêts de la Côte-d’Ivoire et sont hostiles à la pénétration française. Le manuel attribue d’ailleurs cette posture à leurs milieux de vie, la forêt, qui non seulement pèse sur la nature de l’in- digène, mais détermine le mode de combat qu’ils favorisent.

La « sauvagerie » est, bien entendu, fixée par le niveau de développements d’élément tels l’agriculture et l’élevage. Ainsi, lorsqu’on parle des populations noires de la zone équato- riale, l’auteur montre que si l’une des difficultés pour contrôler le territoire est les grandes forêts denses et envahissantes, « un deuxième est la sauvagerie des habitants. Dans cette zone, l’élevage est à peu près nul et les ressources vivrières sont très réduites39. » Plus loin, l’on compare les populations de la forêt équatoriale aux populations soudanaises :

« Dans la forêt équatoriale les races noires sont à peu près pures et d’habitude plus ar- riérées que celles du Soudan40. » Ces observations sur ces populations sont également

36.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales. », p. 15. Malheureusement, la microfiche consultée était tachée à certains endroits, rendant la lecture de certain mot impossible. Dans son ensemble, la citation ne perd pas sa nature.

37.  Ibid., p. 32.

38.  Les populations adjas sont seulement « pacifié » à partir des années 1918 suivant leur soulèvement causé par l’augmentation des exigences coloniales, Patrick Dramé, L’Impérialisme colonial français en Afrique : enjeux et impacts de la défense de l’AOF : 1918-1940, op. cit., p. 89.

39.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales. », p. 4.

40.  Ibid., p. 10.

(13)

présentes dans l’ouvrage de Gabriel Angoulvant, La Pacification de la Côte-d’Ivoire41, ainsi que dans le Manuel à l’usage des troupes employées outre-mer de 192442, illustrant leurs attraits et leurs forces dans les savoirs militaires coloniaux. Elles suivent une logique sous-jacente aux modernités européennes et à la « mission civilisatrice » : la maitrise de la nature et le développement du territoire à des fins d’exploitation sont les preuves ultimes de développement civilisationnelles43.

Ces observations sont aussi le produit d’un certain réalisme. L’environnement et le cli- mat sont de puissants déterminants dans les modes de vie et les pratiques de combat.

La section sur les « habitudes de combats des indigènes des forêts », l’auteur rattache leurs méthodes guerrières à celle de la chasse :

Ces indigènes superstitieux, orgueilleux à l’excès, jaloux de leur indépen- dance, possèdent toutes les qualités du chasseur: patience; sens de l’ob- servation; coup d’œil infaillible. Ils en ont également la mentalité, car ils mesurent leur succès à la guerre aux pertes qu’ils infligent à l’adversaire.

Leurs procédés de combat consistent à peu près uniquement dans l’em- buscade à effectif variable et dans le retour offensif, par petits groupes, sur les flancs et la queue du détachement en marche, ou sur une troupe en station ou momentanément arrêtée dans un village ou une savane à faible étendue44.

Ces propos se rattachent à des observations faites sur le terrain et acquis par l’expé- rience. Elles sont surtout des observations faites sur des territoires encore hostiles à la pénétration française. Or, on attribue les méthodes de combats de ces populations à un caractère de chasseurs intrinsèque à sa nature. Il n’est pas question d’y voir une stratégie gagnante permettant à ces populations de résister à la tutelle française que seules les campagnes de pacification brutales de Gabriel Angoulvant de 1908 à 1915 mettront fin.

41.  « L’indigène de la forêt est individualiste. La vie isolée, indépendante, en campement de quelques familles, d’une seule même, lui sied et c’est là une influence bien caractéristique du milieu », Gabriel An- goulvant, La pacification de la Côte-d’Ivoire : 1908-1915, méthodes et résultats, Paris, Larose, 1916, p. 7. « Le caractère des populations a subi l’influence de la forêt; l’empreinte qui en résulte est si durable que des peuplades venues de l’Est – les Baoulés par exemple – sont restées individualistes à l’excès même dans les savanes qui constituent leur habitat actuel », Ibid., p. 8.

42.  « On a vu que le milieu climatique et physique exerce une influence sur le caractère des races. Aux unes, il donne des sentiments pacifiques; chez les autres, il développe soit les instincts guerriers, soit seulement le goût de l›indépendance; il a même son rôle dans les vicissitudes historiques et sociales de leur passé. » Manuel à l’usage des troupes employées outre-mer, Paris, Charles‑Lavauzelle et Cie Éditeurs militaires, 1924, p. 107.

43.  Alice L. Conklin, A Mission to Civilize: the Republican Idea of Empire in France and West Africa, 1895- 1930, Stanford, Stanford University Press, 1997, p. 5.

44.  Ibid., p. 33

(14)

L’annexe 2 du manuel destiné au territoire soudanais, « Remarques au sujet des co- lonnes », est particulièrement révélatrice des tactiques de pacification préconisées ainsi que leur fondation racialiste :

Les indigènes nous jugent avec leur mentalité; il faut donc se pénétrer de cette mentalité. Respectant la force, ils sont inaccessibles à la persuasion.

Un combat suivi de la rentrée des troupes ne produit pas de résultats du- rables. Seule l’occupation permet de donner à notre action un caractère définitif. Une expédition doit avoir en vue l’établissement ou la consolida- tion de notre pouvoir, la création ou le maintien d’un pouvoir indigène qui suit nos intérêts.

Lorsque les foyers d’agitation sont éteints, il reste à achever la destruction des bandes de dissidents et à protéger les tribus soumises qui pourront ensuite nous aider à réduire les rebelles. Ce sera l’œuvre des colonnes mo- biles s’appuyant sur les postes et harcelant sans cesse les irréductibles.

La pacification complète est obtenue en combinant la force et l’action po- litique basée sur la connaissance du pays et des habitants45.

Cet extrait explicite comment établir son autorité et d’amenuiser l’usurpation; quand et comment user de la force; et enfin ce qu’il faut savoir sur l’« indigène », essentiellement qu’il respecte seulement la force de l’autorité. En effet, il est écrit plus loin dans l’annexe 2 que « […] la douceur et la persuasion sont des moyens d’action illusoires si le noir ne se rend pas compte que l’autorité possède la force46. »

Ce que dénote aussi cet extrait est les outils du « commandement » tel que compris par le politologue et historien Achille Mbembe. Il souligne comment la relation entre le colo- nisateur et le colonisé est circonscrite par deux traditions philosophiques qui font de l’in- digène le « prototype même de l’animal ». La première est hégélienne, où « le colonisé est étranger, un faisceau de pulsion, mais pas de capacités ». La deuxième est bergsonienne où il est possible de sympathiser avec le colonisé et même de l’aimer. Il se crée alors un rapport de familiarité et de domestication, ou encore de dressage entre le colonisateur et le colonisé47. Le dressage initial, donc, est de montrer que « l’autorité possède la force ».

Il existe aussi dans cet extrait la conscience d’usurpation comme discuté par Albert Memmi. Or, contrairement au colonisateur de Memmi qui culpabilise en constatant sa position de privilège et son illégitimité48, les autorités militaires doivent s’affirmer comme

45.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Première partie, Manuel tactique pour les pays soudanais », p. 82.

46.  Ibid.

47.  Achille Mbembe, De la postcolonie: essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine, Paris, La Découverte, 2020 (2000), p. 82.

48.  Albert Memmi, Portrait du colonisé précédé de Portrait du colonisateur, op. cit., p. 34‑35.

(15)

pouvoir conquérant légitime sur le territoire et auprès des populations. En effet, elles sont pleinement conscientes qu’elles viennent s’imposer sur des structures de pouvoirs pré- existantes et remplacent ultimement une autorité ancienne et reconnue par les popula- tions locales. Elles doivent donc se montrer fortes et protéger le prestige de la civilisation française toute en se montrant bienveillantes et faisant ressentir aux populations « indi- gènes » les avantages de la paix française. L’annexe 2 souligne par exemple l’importance de défendre les « tribus soumises » qui, reconnaissant l’autorité française et ses bien- faits, leur viendront en aide. Il est aussi important qu’« en général, la liberté, les biens, les mœurs et les coutumes de l’indigène sont respectés ». En notant les motifs poussant les indigènes à se battre, que l’auteur résume par « la défense d’intérêt privé ou de son indé- pendance », il est mentionné que, pour ce faire accepter des populations locales et ame- nuiser l’usurpation, « il faut agir sur l›indigène par l’intérêt: ouvrir des marchés, utiliser les produits du pays pour les troupes en offrant des prix rémunérateurs, installer un service médical ». Cet extrait se rattache aux idées générales derrière la tactique de la « tache d’huile ». Également pour éviter de nouvelles violences, il est noté que « dans un pays nouvellement conquis, on évite d’exaspérer la population. On n’use de rigueur qu’envers les tribus qui manquent à leurs promesses49. »

Les populations non pacifiées ou en voie de l’être occupent une place importante dans ce manuel. En effet, elles sont une source de préoccupations importantes pour les offi- ciers qui doivent composer avec et, ultimement, maintenir l’ordre. Ainsi, le manuel fournit des informations de base pour débuter l’étude des officiers qui doivent par après s’infor- mer auprès de diverses sources. Toutefois, le manuel contient aussi nombre d’informa- tions à propos des populations fiables. Que ce soit comme alliés fidèles à l’entreprise coloniale, potentiel bassin de recrutement pour des tirailleurs ou de travailleurs dans la perspective d’une éventuelle mise en valeur, le manuel éclaire sur qui les officiers peuvent s’appuyer, qui peut être recruté et qui peut être efficacement mis au travail.

3. L

es

«

indigènes

»

auservice de La

f

rance

3.1 lespopulations « paCifiées » En règle générale, les populations mentionnées dans les extraits plus hauts habitent des régions nouvellement conquises, tardivement occupées ou simplement inoccupées par l’administration coloniale. Dans d’autres régions, les commentaires sur les popula-

49.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Première partie, Manuel tactique pour les pays soudanais », p. 82.

(16)

tions illustrent qu’elles sont « pacifiées50. » À propos des ouolofs du Sénégal, il est écrit qu’« […] ils acceptent volontiers notre domination51. » Les Cotocolis du Dahomey sont quant à eux « paisibles et soumis52. » Dans la description sur les Bambaras, dont cer- tains groupes s’associent et collaborent avec les autorités françaises depuis le début du 19e siècle et deviennent l’archétype du tirailleur sénégalais53, le manuel souligne qu’il est

« bon cultivateur », « un guerrier brave », et « peut être cité comme le type de tirailleurs sé- négalais: tempérament vigoureux, caractère gai, ouvert, intelligence moyenne, mais d’une loyauté et d’une confiance absolues en ses chefs ». Surtout, le Bambara peut faire face à l’un des éléments les plus anxiogènes pour les autorités militaires. Il est « notre meilleur appui contre les races musulmanes54. »

Le manuel regorge d’indice sur les « races » qui peuvent s’intégrer aux tirailleurs séné- galais. Il s’agit d’informer sur qui est apte à être « commander » et qui fait un bon soldat.

Cette information est un reflet de l’influence et la place de l’idée d’une « Force noire » et des théories autour des « races martiales » dans la mentalité militaire55, elle est aussi un reflet de l’importance de ces soldats dans la conquête et le maintien de l’ordre en AOF.

L’introduction de la section dédiée aux tirailleurs sénégalais dans les « Notions générales » illustre également la pratique de faire des caractérisations raciales. Les populations in- digènes nouvellement conquises ou en opposition ouverte à la France ne peuvent être recrutées : « Les indigènes de la grande forêt de la Guinée et de la Côte d’Ivoire, les no- mades des régions du Nord de l’AOF se plient mal à la discipline et à notre autorité. Avant de servir utilement comme tirailleurs, il faut que leur mentalité soit transformée. Ce sont ces populations qui fournissent les dissidents et les irréductibles56. » Si ces races ne sont pas recrutables, les autres, depuis longtemps « pacifiés », le sont plus : « Au contraire, les autres races qui constituent d’ailleurs la majorité de la population de l’A.O.F. paraissent franchement attachées à nous. Nous pouvons semble-t-il; compter sur elles […]57 » Par exemple, le manuel indique que « […] Les Ouolofs font des soldats parfois peu disciplinés,

50.  Les commentaires signifient très certainement ici que la « pacification » se fait dans l’optique d’un rétablissement de l’ordre colonial, mais plus particulièrement à travers des méthodes de séduction des populations « indigènes », pour acquérir leur confiance.

51.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 10.

52.  Ibid., p. 32.

53.  Vincent Joly, Guerres d’Afrique : 130 ans de guerres coloniales : l’expérience française, op. cit., p. 84.

54.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 12.

55.  Myron Echenberg, Les tirailleurs sénégalais en Afrique occidentale française, 1857-1960, Paris, Karthala, 2009 (1991), p. 42.

56.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 37

57.  Ibid.

(17)

mais intelligents, ils fournissent de bons gradés58. » Quant aux Mossis, « […] Bien encadré il peut faire un assez bon tirailleur, il est meilleur tireur que le Bambara59. » Si des races sont recrutables, d’autres le sont moins, tels les Sérères qui sont, tout simplement, des

« soldats médiocres60. »

L’historien Xavier Boniface soutient d’ailleurs que ces catégories sont surtout des constructions ethnographiques artificielles. Elles « [reposent] sur des stéréotypes concer- nant des ethnies et des peuples souvent mal connus et réduits à des acceptations géo- graphiques ou linguistiques ». De plus, ces critères pseudoscientifiques amènent à définir artificiellement certains peuples et à leur prêter des vertus spécifiques, notamment après la phase de la conquête, alors que la guerre menace en Europe. Ainsi, les Bambaras sont présentés comme une « race guerrière », alors que ce nom désigne d’abord une langue et non une catégorie ethnique61. Boniface constate également que les populations ré- calcitrantes à l’ordre colonial sont quasi exemptes du recrutement. Plusieurs passages du manuel montrent cette réalité. Or, la possibilité de transformer d’anciens ennemis en bons tirailleurs en est une aussi. Par exemple, les Djedis ou Fons du Dahomey ne sont pas à exclure du recrutement malgré leurs résistances passées : « Les anciens guerriers qui se montrèrent devant nous braves jusqu’à la témérité sont devenus agriculteurs. Le goût du métier militaire peut se développer à nouveau chez eux62. »

3.2 recrUterL’africain

Cité précédemment, les propos tenus sur la recrutabilité des Lobis, Birifons, Oulés, Bobos, Samos et Dagaris montrent comment est pensé le recrutement : « L’absence d’au- torité et de lois chez ses peuples les rend peu aptes à faire de bons tirailleurs avant que leur état social ne soit amélioré63.  » Les Manons de la vallée du Mani sont aussi peu recommandables : « braves, mais quelques-uns anthropophages; particulièrement sau- vages, détestant toute autorité; il n’y a pas grande espérance à fonder sur eux pour le re- crutement avant de nombreuses années64 ». L’enjeu du respect à l’autorité, qui d’ailleurs se ressent à travers leurs réactions à la conquête française, est primordial au recrutement.

Cet obstacle est présenté comme un trait civilisationnel potentiellement remédiable avec le « dressage » et l’intégration de ces « races » au réseau impériales.

58.  Ibid., p. 10.

59.  Ibid., p. 13 60.  Ibid., p. 11

61.  Xavier Boniface, « Les armées outre‑mer », art. cit., p. 111.

62.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 31.

63.  Ibid., p. 13.

64. Ibid., p. 13.

(18)

Au-delà du recrutement qui repose sur des traits raciaux et essentialistes, le « dres- sage » des tirailleurs, en d’autres mots leur entrainement, est un véritable exercice de commandement : « L’officier qui a instruit le tirailleur s’est montré soucieux de son bien- être et a pris la défense de ses intérêts est assuré de son dévouement. Toutefois il ne doit jamais se montrer faible s’il veut conserver son prestige d’autorité65. » Pour devenir un vrai tirailleur, l’indigène doit être dressé à respecter l’autorité « légitime ». Ainsi, il doit ai- mer et craindre son officier. D’où l’exclusion systématique de toutes les « races » perçues comme encore « sauvages », « jalouse de [leur] indépendance » et « détestant toute auto- rité ». Si ce constat peut avoir des racines réalistes, essentiellement qu’il ne soit pas aisé de recruter des soldats de populations encore ouvertement hostiles ou méfiantes, il n’en demeure pas moins qu’elle s’appuie aussi sur l’anxiété de perde son autorité, son prestige et son pouvoir de commandement. Avant de devenir un bassin de recrutement pour des tirailleurs, ces populations doivent avant tout être « pacifiées » et, selon les termes em- ployés par l’administration coloniale, minimalement « civilisées ».

Les passages sur les tirailleurs et les « races martiales » sont également accompa- gnés par la propension des différentes « races » aofiennes au travail. Sans que l’armée soit le moteur de la « mise en valeur » des colonies, la place de ces commentaires dans le manuel laisse croire qu’elle s’en préoccupe. Elles sont aussi un indice des préoccupa- tions générales de l’administration coloniale qui cherche à comprendre les populations afin d’adopter des politiques de « domination rationnelle »66. Il faut aussi souligner que l’armée s’adonne également à des travaux dans les colonies et, bien que ces observa- tions puissent paraître anodines, elles sont parfois les seules fournies. Les passages donnent donc des informations sur les populations jugées « paresseuses » et celles ju- gées « travaillantes ». Si « […] les Ouolofs n’ont pas un goût très vif pour le travail; ils sont joueurs et aiment les distractions67 », les Sérères ont quant à eux une « [...] constitution physique vigoureuse [qui leur] permet de se livrer aux travaux pénibles de la culture68. » Les Soussous, Ouandhadès et Guirganguès du HSN « ont les mêmes types généraux : paresseux, ils sont néanmoins bons agriculteurs. [...]. Les ouvriers en cuir et en bois sont habiles69. » Les Senoufous de la Côte-d’Ivoire sont quant à eux « [...] en général laborieux.

La race est rustique et forte. Les forgerons sont assez habiles70. » Encore une fois, ces segments donnent à l’officier des caractéristiques raciales qui peut potentiellement entra- ver son commandement et qui doit être pris en compte lorsqu’il s’adonne à des travaux.

65.  Ibid., p. 43.

66.  Benoît De L’Estoile, « Science de l’homme et ‘’domination rationnelle’’ savoir ethnologique et poli- tique indigène en afrique coloniale française », art. cit., p. 310‑311.

67.  CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions générales », p. 10.

68.  Ibid.

69.  Ibid., p. 13.

70.  Ibid., p. 28.

(19)

L’analyse et les informations sur les « indigènes » de l’AOF ne se limitent donc pas seu- lement aux populations qui doivent être pacifiées. Le manuel outille l’officier aux diverses tâches auxquelles il s’adonnera lors de son passage en colonie, soit le recrutement et l’entrainement de tirailleurs ainsi que des travaux.

c

oncLusion Publié en 1910 afin d’introduire aux officiers coloniaux les territoires et les populations de l’AOF, le Manuel tactique pour le groupe de l’A.O.F. est une porte d’entrée pour appré- hender les savoirs militaires coloniaux au début du 20e siècle. Son contexte de production permet de comprendre les motivations derrière sa publication, soit d’outiller l’officier pour la pacification et le maintien de l’ordre. Il est aussi possible d’observer d’autres rationnels qui façonnent son contenu. L’importance du renseignement en contexte colonial et la nécessité de commander l’indigène, gage d’un maintien de l’ordre efficace, mènent à une ethnologie militaire essentialisée et racialisée. Ainsi mis dans des cases, les différentes populations de l’AOF sont soit hostiles, méfiantes ou alliées à la domination française.

Il est montré dans la première partie comment les méthodes de la guerre en colonie s’appuient fortement sur le renseignement puisqu’il s’agit de pacifier et d’intégrer les po- pulations récalcitrantes à l’empire. La deuxième partie s’attaque à comment ce rensei- gnement se traduit dans le manuel. Les informations fournies aux officiers touchent au- tant à la géographie, la médecine ainsi que les populations de l’AOF, le tout pour répondre aux besoins de la pacification et du maintien de l’ordre qui doit se faire à travers l’usage de la force et la tempérance. Les alliés doivent être protégés et les récalcitrants convaincus ou éliminés. Au-delà du renseignement, l’outil primaire du maintien de l’ordre en AOF est le tirailleur sénégalais, discuté en troisième partie. Son recrutement doit se faire auprès des

« races martiales », catégorie ethnologique qui encore une fois catégorise, essentialise et racialise les populations dans une posture fixe. Quoique mentionnée sommairement, la propension au travail figure aussi dans le manuel et illustre une certaine préoccupation pour la « mise en valeur » de la colonie.

(20)

s

ources et bibLiographie

1. soUrces

CHETOM, 15 H 29 (SHD, GR 9 M 34), « Manuel tactique pour le Groupe de l’A.O.F. Notions géné- rales », 1910.

ANGOULVANT, Gabriel. La pacification de la Côte-d’Ivoire : 1908-1915, méthodes et résultats. Paris, Larose, 1916, 395 p.

2. étUdes

ADAS, Michael. « Contested Hegemony: The Great War and the Afro-Asian Assault on the Civilizing Mission Ideology ». Journal of World History, vol. 15, no 1, 2004, p. 31-63.

BAT, Jean-Pierre et Nicolas COURTIN. « Le renseignement français en Afrique »: Revue Défense Nationale, no 7, juillet 2016, p. 65-69.

BONIFACE, Xavier. « Les armées outre-mer ». Dans Hervé Drévillon et Olivier Wieviorka, dir., His- toire militaire de France. De 1870 à nos jours. vol. 21, Paris, Perrin, 2018, p. 103-132.

CLAYTON, Anthony. France, Soldiers and Africa. London, Brassey’s, 1988, 444 p.

CONKLIN, Alice L. A Mission to Civilize: the Republican Idea of Empire in France and West Africa, 1895-1930. Stanford, Stanford University Press, 1997, 367 p.

DE L’ESTOILE, Benoît. « Science de l’homme et "domination rationnelle" savoir ethnologique et politique indigène en afrique coloniale française ». Revue de Synthèse, vol. 121, no 3-4, juillet 2000, p. 291-323.

DRAMÉ, Patrick. L’Impérialisme colonial français en Afrique : enjeux et impacts de la défense de l’AOF : 1918-1940. Paris, Harmattan, 2007, 480 p.

ECHENBERG, Myron. Les tirailleurs sénégalais en Afrique occidentale française, 1857-1960. Traduit par Diane Duchaine. Paris, Karthala, 2009 (1991), coll. « Hommes et sociétés », 348 p.

EL MÉCHAT, Samia, dir. Coloniser, pacifier, administrer: XIXe-XXIe siècles. Paris, CNRS éditions, 2014, 377 p.

FRÉMEAUX, Jacques. L’Afrique à l’ombre des épées : 1830-1930. 2 : Officiers administrateurs et troupes coloniales. vol. 2, Paris, Service historique de l’Armée de terre, 1995, coll. « Publica- tions du Service historique de l’Armée de Terre », 311 p.

HULL, Isabel V. Absolute Destruction: Military Culture and the Practices of War in Imperial Germany.

Ithaca, NY, Cornell Univ. Press, 2006, 384 p.

JOLY, Vincent. Guerres d’Afrique : 130 ans de guerres coloniales : l’expérience française. Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, 336 p.

(21)

KAMBOU-FERRAND, Jeanne-Marie. Peuples voltaïques et conquête coloniale, 1885-1914 : Burkina Faso. Paris, L’Harmattan, 1993, 478 p.

KLEIN, Jean-François. « La "pacification", un processus impérial ». Encyclopédie d’histoire numé- rique de l’Europe., 2020, consulté le 13 septembre 2021, https://ehne.fr/fr/node/12418.

LE COUR GRANDMAISON, Olivier. Coloniser. Exterminer. Sur la guerre et l’État colonial. Paris, Fayard, 2005, 365 p.

MBEMBE, Achille. De la postcolonie: essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine.

Paris, La Découverte, 2020 (2000), 332 p.

MEMMI, Albert. Portrait du colonisé ; précédé de, Portrait du colonisateur. Paris, Gallimard, 2012, 161 p.

PORCH, Douglas. « Bugeaud, Galliéni, Lyautey: The Development of French Colonial Warfare ».

Dans Makers of Modern Strategy: from Machiavelli to the Nuclear Age. Oxford, Oxford Universi- ty Press, 1986, p. 376-407.

ROYER, Patrick. La guerre en miroir: conquête coloniale et pacification au Soudan occidental. Pa- ris, Les Indes savantes, 2019, coll. « Le temps colonial », 582 p.

ŞAUL, Mahir et Patrick ROYER. West African Challenge to Empire: Culture and History in the Vol- ta-Bani Anticolonial War. Athens, Ohio University Press, 2001, coll. « Western African studies », 404 p.

THOMAS, Martin. Empires of intelligence: security services and colonial disorder after 1914. Berke- ley, University of California Press, 2008, 428 p.

WALTER, Dierk. Colonial violence: European empires and the use of force. Traduit par Peter Lewis.

Oxford ; New York, Oxford University Press, 2017, 441 p.

Références

Documents relatifs

Le Mali a su également tirer profit du Cadre intégré renforcé (CIR) grâce à l'opérationnalisation de son Unité de mise en oeuvre, à travers laquelle

L’intérêt de l’étude de l’Ethos dans un corpus de chroniques journalistiques numérisé était de s’intéresser à la notion d’ethos contenu dans l’article qui

Une méthodologie en est proposée dans les composants du test le « MTA » (Livret théorique). Lister les épreuves d’un test comme résultats d’un mémoire ou d’une thèse

Placés à 20 °C et à l’obscurité, les tubercules de pommes de terre ayant séjourné quatre semaines dans azne colonie landaise révèlent un début de

« La seule différence avec une imprimante 3D "classique" réside dans le fait que l’atmosphère doit être contrôlée au cours de l’impression pour garantir la survie

La composante sur laquelle la société a dû être très attentive lors du lancement est la composante institutionnelle, en effet, la multitude des normes

Respect des contraintes horaires de production Mise en œuvre des techniques professionnelles Production dans le respect des consignes Réalisation de productions

Il arrive souvent que les produits phytosanitaires soient transvasés dans des emballages pour produits alimentaires (bouteilles de jus de fruit, sachets) par les détaillants