PRODUITS DE SAMELSON ET WHITEHEAD
1. Cat´egorie d’un espace
En 1934 Lusternik et Schnirelmann ont introduit un tr`es joli invariant homotopique d’un espaceX ∈Top, sa cat´egorie (terminologie malheureuse ...) CAT(X) : le plus petit cardinal d’un recouvrement deXpar des ferm´es contractiles. Dans cette section on ´etudie un invariant tr`es semblable (voir lemme 2) `a la d´efinition plus ´evidemment ’homotopique’.
Rappelons qu’on note Topnd∗ la cat´egorie des espaces topologiques point´es (X,∗) pour lesquels l’inclusion du point-base i:{∗} −→X est une cofibration. Soit X∈Topnd∗ . D´efinition. On noteraXkn⊂Xn le sous-espace ferm´e form´e desn-uplets(x1,· · · , xn) o`u au moinsn−kdesxico¨ıncident avec le point base∗. AinsiX0n={∗},X1n=X∨X∨· · ·∨X, ..., Xnn=Xn.
D´efinition. On dira que X est de cat´egorie inf´erieure `a n(not´e cat(X)< n ou catX ≤ n−1) si la n-diagonale
∆n: (X,∗)−→(Xn, Xn−1n )
est compressible (c’est-`a-dire homotope relativement `a {∗} `a une application de X dans Xn−1n ).
Lemme 1. Si cat(X)< n alors cat(X) < n+ 1.
Preuve : Cel`a ressort aussitˆot du diagramme commutatif (X,∗) ∆n+1//
∆n×Id
((Q
QQ QQ QQ QQ QQ
QQ (Xn+1, Xnn+1) (Xn×X, X? n−1n ×X)
OO
2 Exemples : cat(X)<1 si et seulement si X est contractile ; cat(X)<2 si et seulement si X est unH-coespace.
Preuve :Dire que cat(X) <2, c’est dire que la diagonale ∆2 :X−→X×Xest homotope (relativement `a {∗}) `a une application µ :X −→ X∨X, qui d´efinit alors un coproduit surX.
2 Lemme 2. cat(X)< n si et seulement si X=∪ni=1Xi avec chacun des Xi ⊂X ferm´e et tel qu’il existe une d´eformation de X contractant Xi en un point.
1
Preuve : Supposons cat(X) < n. Notons F : I ×X −→ Xn avec f0 = F(0,·) = ∆n et f1 : X −→ Xn−1n . Notons pi : Xn −→ X la i-`eme projection et hi = pi◦f1. Posons Xi=h−1i ({∗}). Commehi est continueXi est un ferm´e deX. On a bien-sˆurX=∪ni=1Xi. Enfinpi◦F est une d´eformation de X qui ´ecrase Xi au point∗.
R´eciproquement, supposons X = ∪ni=1Xi, avec Xi ferm´e contractile de X via une d´eformation globale Hi : I ×X −→ X. Les Hi d´efinissent les composantes d’une ho- motopie H : I ×X −→ Xn reliant ∆n : X −→ Xn `a une application h : X −→ Xn d’image h(X)⊂Xn−1n car lesXi recouvrent X.
2 Lemme 3. Si X est homotopiquement ´equivalent `a Y, alors cat(X)< n si et seulement si cat(Y)< n.
Preuve : Soit FY : I ×Y −→ Yn une homotopie reliant f0 = ∆n : Y −→ Yn `a f1 :Y −→Yn−1n . Soitf :X−→Y d’inverse d’homotopieg:Y −→X. Commeg◦f ∼IdX, on obtient que la compos´ee
FX :I×XId×f−→ I×Y −→FY Yn g
n
−→Xn
est une homotopie reliant ∆n :X −→ Xn `a une application `a valeur dans Xn−1n . Donc catX≤catY. D’o`u le r´esultat par symm´etrie.
2 Th´eor`eme 1. Soit f :X−→Y de cofibre Cf. Alors cat(Cf)≤1 + cat(Y).
Preuve : D’apr`es le lemme pr´ec´edent on peut supposer quitte `a remplacer Y par son
´equivalent d’homotopie ’cylindre de f’ quef est une inclusion. On a alorsCf =Y ∪CX.
CommeY ֒→Cf on a le diagramme Y _
//(Cnf)I
Cf
gt
=={
{ { {
∆n //Cfn .
De plus comme CX est contractile on dispose d’une compressionCf ft
−→(Cf)I reliant l’identit´e de Cf `a une application f1 :Cf −→Y. L’application
ht= (gt, ft) :Cf −→(Cfn+1)I
est alors une homotopie reliant ∆n+1:Cf −→Cfn+1 `a une application Cf −→(Cf)n+1n . 2 D´efinition . Soit X ∈ CW∗. On appelle stratification de X de hauteur k une suite de sous-complexes
{∗}=P0 ⊂P1⊂ · · · ⊂Pk=X
telle que chaque Pi s’obtient `a partir de Pi−1 par recollement de cellules (de dimensions possiblement diff´erentes !). Autrement dit Pi est la cofibre d’une application Λ −→ Pi−1, o`u Λ est un coproduit de sph`eres de dimension possiblement diff´erentes.
Exemple :SiXest un CW-complexeconnexe, sa filtration squelettale est une stratification.
Corollaire 1. Si X∈CW∗ admet une stratification de hauteur k alors cat(X)≤k.
Lemme 4. Si
{∗}=P0 ⊂P1⊂ · · · ⊂Pk=X {∗}=Q0 ⊂Q1 ⊂ · · · ⊂Ql=Y sont des stratifications de X et Y alors les
Rj =∪ji=0(Pi×Rj−i) forment une stratification de X×Y.
Corollaire 2. cat(Sp1 × · · · ×Spk)≤k.
Preuve :Appliquer le lemme en utilisant la stratification squelettale deSi standard (une cellule de dimension 0 et une cellule de dimension i).
2 2. Quelques ph´enom`enes de nilpotence
Dans cette section G d´esigne un H-groupe muni pour simplifer d’une unit´e stricte : si x∈G alorsx·1 = 1·x=x (et pas seulement `a homotopie pr`es).
SiX ∈Topnd∗ alors [X, G]∗ est un groupe. Si de plus X est un H-cogroupe comme la sph`ereSi (c’est-`a-dire un espace de cat´egorie cat(X)≤1), on a montr´e dans le cours que [X, G]∗est un groupe ab´elien. Dans cette section on ´etudie plus g´en´eralement les propri´et´es du groupe [X, G]∗ en fonction de la cat´egorie cat(X).
D´efinition. – Si Γ d´esigne un groupe et x, y ∈ Γ, on note [x, y] le commutateur xyx−1y−1 de x et y. Plus g´en´eralement on d´efinit par r´ecurrence [x1, x2,· · · , xk] = [x1,[x2,· · ·xk]].
– Si A et B sont des sous-ensembles de Γ on note[A, B] le sous-groupe de Γ engendr´e par les commutateurs [x, y], x∈A, y∈B.
– On d´efinit Z1(Γ) = Γ et Zi+1(Γ) = [Γ, Zi(Γ)] pour i ≥ 1. C’est la suite centrale descendante deΓ.
– Le groupe Γ est dit nilpotent s’il existe un entier c avec Zc+1(Γ) ={1}. Le plus petit tel entier c est appel´e la classe de nilpotence de Γ. Ainsi il y a ´equivalence entre la notion de groupe nilpotent de classe 1 et la notion de groupe ab´elien.
Lemme 5. (a) Le groupe Γ est nilpotent de classe c si et seulement si [x1, x2,· · · , xc] = 1
pour tousx1,· · · , xc ∈Γ.
(b) Si a, b, c∈Γ, alors
[a, bc] = [a, b]·[a, c] modZ3(Γ) . (c) Si a, b, c∈Γ alors
[a,[b, c]]·[b,[c, a]]·[c,[a, b]] = 1 mod Z4(Γ) .
Lemme 6. Soit Φ : G×G −→ G d´efinie par Φ(x, y) = (xy)(x−1y−1). Alors Φ|G∨G est homotopiquement triviale.
Plus g´en´eralememt on pose Φ1 : G −→ G l’identit´e et on d´efinit par r´ecurrence les commutateurs it´er´es Φn:Gn−→Gpar Φn+1 = Φ◦(Id×Φn) (en particulier Φ2= Φ). Le lemme pr´ec´edent se g´en´eralise en :
Th´eor`eme 2. L’application Φn|Gnn−1 est homotopiquement nulle.
Preuve : Par r´ecurrence sur n (on le sait d´ej`a pour n= 1 et pour n= 2 par le lemme).
Supposons que Φn|Gnn
−1 est homotopiquement nulle. Comme Gnn−1 ֒→ Gn on a le dia- gramme
Gnn−1
_
//GI
Gn
gt y<<
yy yy
//G
.
L’application h : G×Gn −→ (G×G)I d´efinie par ht(x, y) = (x, gt(y)) est alors une homotopie reliantId×Φn`af :Gn+1 −→G×Gv´erifiantf(G×Gnn−1)⊂G× {1}. Comme f({1} ×Gn)⊂ {1} ×G, on obtient
f(Gn+1n ) =f({1} ×Gn∪G×Gnn−1)⊂G∨G .
Mais Φn+1 = Φ ◦(Id ×Φn) est homotope `a Φ ◦f. Ainsi Φn+1|Gn+1n est homotope `a Φ|G∨G◦f|Gn+1n et est donc homotopiquement nulle d’apr`es le lemme pr´ec´edent.
2 Th´eor`eme 3. SoitX ∈Topnd∗ de cat´egorie< cet GunH-groupe connexe. Alors[X, G]∗ est un groupe nilpotent de classe < c.
Preuve :Il suffit de montrer que tous les commutateurs [x1,· · · , xc] = 1, o`uxi ∈[X, G]∗. Soit fi :X −→ G repr´sentant xi et notons f le produitf1× · · ·fc. Alors [x1,· · ·xc] est repr´esent´e par la compos´ee
X−→∆c Xc −→f Gc −→Φc G .
Par hypoth`ese ∆c est compressible dans Xc−1c . On a donc un diagramme commutatif `a homotopie pr`es :
X ∆c //
gDDDDD""
DD
D Xc f //Gc Φc //G
Xc−1c
i
OO
f //Gcc−1
i′
OO
o`u ieti′ sont des inclusions. Donc la compos´ee sup´erieure est homotope `a Φc◦i′◦f ◦g.
Mais Φc◦i′ est homotopiquement nulle par le th´eor`eme pr´ec´edent.
2 Corollaire 3. Si X est un produit de k sph`eres, alors [X, G]est nilpotent de classe ≤k.
3. Produit de Samelson
Soient X1, X2 ∈Topnd∗ etX =X1×X2. Notons pi :X −→Xi, i= 1,2 et p12:X−→
X1∧X2 =X/(X1∨X2) les projections naturelles.
Lemme 7. (a) Les morphismes p∗i : [Xi, G]∗ −→[X, G]∗ sont des monomorphismes.
(b) Le morphisme p∗12 est un isomorphisme de [X1 ∧X2, G]∗ sur le sous-groupe Γ1 de [X, G]∗ des applications homotopiquement nulles en restriction `a X1∨X2.
(c) Pour tout xi ∈[Xi, G]∗,i= 1,2, le commutateur [p∗1(x1), p∗2(x2)] appartient `a Γ1. Preuve :
Pour (a) : Notons i1 = Id× {∗} : X1 −→ X l’injection naturelle. Alors p1 ◦i1 = IdX1
donci∗1◦p∗1 est l’identit´e de [X1, G]∗. Donc p∗1 est injective. De mˆeme pour p∗2. Pour (b) :Consid´erons la suite co-exacteX1∨X2
֒→i X−→p12 X1∧X2 −→Σ(X1∨X2)−→
Σ(X1×X2). On en d´eduit la suite exacte
[Σ(X1×X2), G]∗ −→[Σ(X1∨X2), G]∗ −→[X1∧X2, G]∗ p∗12
−→[X, G]∗ i∗
−→[X1∨X2, G]∗ . Le terme de gauche est [X1 ×X2,ΩG]∗ −→ [X1∨X2,ΩG]∗ qui est clairement surjectif.
On en d´eduit imm´ediatement quep∗12est un isomorphisme sur Γ1.
Pour (c) : choisissonsfi :Xi −→Gdes repr´esentants dexi. Le commutateur [p∗1(x1), p∗2(x2)]
est la classe d’homotopie de l’application
X1×X2f−→1×f2 G×G−→Φ G , qui en restriction `aX1∨X2 vaut
X1∨X2 −→G∨G−→Φ G .
Comme Φ|G∨G est homotopiquement nulle, on en d´eduit [p∗1(x1), p∗2(x2)]∈Γ1.
2
D´efinition. On d´efinit le produit de Samelson par [X1, G]∗×[X2, G]∗ −→ [X1∧X2, G]∗
(α, β) −→ < α, β >= (p∗12)−1[p∗1(α), p∗2(β)] .
On suppose dor´enavantX=Sp,Y =Sq. Le smash-produit X∧Y s’identifie avec Sp+q. On obtient ainsi un produit de Samelson
<·,·>:πp(G)×πq(G)−→πp+q(G) .
Th´eor`eme 4. Le produit < α, β >est bilin´eaire. De plus < β, α >= (−1)pq+1 < α, β >.
Preuve : Prouvons la lin´earit´e `a droite. Soitα∈πp(G), β, γ∈πq(G). Alors
< α, β+γ >=p∗12−1[p∗1(α), p∗2(β+γ)]
=p∗12−1[p∗1(α), p∗2(β)p∗2(γ)]
=p∗12−1([p∗1(α), p∗2(β)]·[p∗1(α), p∗2(γ)] mod Z3([Sp×Sq, G]∗)) . Mais Sp×Sq est de cat´egorie ≥2, doncZ3([Sp×Sq, G]∗) ={1}, et le r´esultat.
On d´emontre de mˆeme la lin´earit´e `a gauche.
Pour la r´egle de commutation, notons t : Sp ×Sq −→ Sq ×Sp la permutation des facteurs. On a t(Sp∨Sq) =Sq∨Sp donct induit encoret:Sp+q−→Sp+q. Alors
< β, α >=p∗12−1[p∗1(β), p∗2(α)] = (t−1pt)∗[p∗1(β), p∗2(α)]
=t∗p∗12−1[(tp1)∗(β),(tp2)∗(α)]
=t∗p∗12−1[p∗2(β), p∗1(α)]
=−t∗ < α, β > .
On d´eduit le r´esultat du fait quet est de degr´e (−1)pq.
2 Notonsπp,q,r(G) le groupe [Sp×Sq×Sr, G]∗. On a alors les morphismesp∗1 :πp(G)−→
πp,q,r(G), p∗2 : πq(G) −→ πp,q,r(G), p∗3 : πr(G) −→ πp,q,r(G), p∗12 :πp+q(G) −→ πp,q,r(G),
· · ·,p∗123:πp+q+r(G)−→πp,q,r(G).
Lemme 8. Pour tout α∈πp(G), β∈πq(G), γ ∈πr(G), on a
< α, < β, γ >>=p∗123−1[p∗1(α), p∗2(β), p∗3(γ)] .
Preuve : Remarquons que les applications p12◦(1×p12) :Sp×Sq×Sr −→Sp+q+r et p123 :Sp×Sq×Sr−→Sp+q+r sont naturellement homotopes. Notonsh:Sp×Sq×Sr−→
Sq×Sr la projection naturelle, remarquons quep12◦h=p23. Donc p∗123< α, < β, γ >>= (1×p12)∗p∗12(< α, < β, γ >>)
= (1×p12)∗p∗12p∗12−1[p∗1α, p∗2p∗12−1[p∗1β, p∗2γ]]
= [(1×p12)∗p∗1α,(1×p∗12p∗2p∗12−1[p∗1β, p∗2γ]]
= [p∗1α, p∗23p∗12−1[p∗1β, p∗2γ]]
= [p∗1α, h∗[p∗1β, p∗2γ]]
= [p∗1α,[h∗p∗1β, h∗p∗2γ]]
= [p∗1α,[p∗2β, p∗1γ]]
.
2 Lemme 9. Pour tout α∈πp(G), β∈πq(G), γ ∈πr(G), on a
(a) p∗123−1[p∗2(β), p∗3(γ), p∗1(α)] = (−1)p(q+r)< β, < γ, α >>
(b) p∗123−1[p∗3(γ), p∗1(α), p∗3(β)] = (−1)r(p+q)< γ, < α, β >>
Preuve :Montrons (a), (b) se d´emontre de la mˆeme mani`ere. Notonsτ :Sp×Sq×Sr−→
Sq×Sr×Sp l’application τ(x, y, z) = (y, z, x). L’application τ induit τ′ : Sp+q+r −→
Sp+q+r et τ etτ′ sont toutes deux de degr´e (−1)p(q+r). On obtient : p∗123((−1)p(q+r)< β, < γ, α >>) = (τ′◦p123)∗ < β, < γ, α >>
= (p123◦τ)∗ < β, < γ, α >>
=τ∗[p∗1(β), p∗2(γ), p∗3(α)]
= [(p1◦τ)∗β,(p2◦τ)∗γ,(p3◦τ)∗α]
= [p∗2β, p∗3γ, p∗1α]
2 Th´eor`eme 5 (Identit´e de Jacobi). Pour tout α∈πp(G), β ∈πq(G), γ ∈πr(G), on a
(−1)pr < α, < β, γ >>+(−1)pq < β, < γ, α >>+(−1)qr< γ, < β, α >>= 0 Preuve :
Posonsα′ =p∗1α,β′ =p∗2β,γ′ =p∗3γ. On sait que
[α′, β′, γ′]·[β′, γ′, α′]·[γ′, α′, β′] = 1 mod Z4(πp,q,r(G)) .
maisZ4= 1 carSp×Sq×Sr est de capacit´e≥3. D’o`u le r´esultat en appliquant p∗123−1. 2 SoitXun espace simplement connexe. Alors ΩXest unH-groupe connexe et le produit de Samelson fournit un produitπp+1(X)×πq+1(X)−→πp+q+1(X). Ce produit peut ˆetre d´efini alternativement pourX non n´ecessairement simplement connexe. C’est ce qu’a fait Whitehead et ce que nous ´etudions `a la section suivante.
4. Produit de Whitehead Soitn, m ≥1 fix´es.
Lemme 10. Le groupe d’homotopie relativeπq(Sn×Sm, Sn∨Sm)est nul pour q < n+m, isomorphe `a Z pour q =n+m
Preuve :
Comme Sn∨ Sm est le n+m −1-squelette de Sn× Sm, la paire est n+m −1- connexe. D’o`u le r´esultat pourq < n+m. Pour q =n+m on applique Hurewicz relatif : πn+m(Sn×Sm, Sn∨Sm) =Hn+m(Sn×Sm, Sn∨Sm). MaisSn×Sma une uniquen+m- cellule, donc ce dernier groupe est Z.
2 Lemme 11. On a un isomorphisme naturel
πp(Sn∨Sm)≃πp(Sn)⊕πp(Sm)⊕πp+1(Sn×Sm, Sn∨Sm) . Preuve : On ´ecrit la suite longue de la paire (Sn×Sm, Sn∨Sm) :
· · · −→πp+1(Sn×Sm, Sn∨Sm)−→πp(Sn∨Sm)−→πp(Sn×Sm)
−→πp(Sn×Sm, Sn∨Sm)−→ · · · .
On aπp(Sn×Sm)≃πp(Sn)⊕πp(Sm). De plus le morphismeπp(Sn∨Sm)−→πp(Sn×Sm) est scind´epar les inclusions in:Sn−→Sn×Sm etim :Sm−→Sn×Sm.
2 D´efinition (Produit de Whitehead). On note{in, im}=d(in×im)∈πn+m−1(Sn∨Sm).
Pour tout espace X∈Topnd∗ , on d´efinit
[·,·] : πn(X)×πm(X) −→ πn+m−1(X)
(α, γ) −→ [α, β] = (α∨β)({in, im} .
Lemme 12. Soit X ∈ Topnd∗ . Soit α ∈ πp(X) d´efini par a : (Dp, ∂Dp) −→ (X,∗) et β ∈ πq(X) d´efini par b : (Dq, ∂Dq) −→ (X,∗). Alors[α, β] ∈ πp+q−1(X) est la classe d’homotopie de l’application c:∂(Dp×Dq) =∂Dp×Dq∪Dp×∂Dp −→X d´efinie par
h(x, y) =
a(x) six∈Dp, y∈∂Dq b(y) six∈∂Dp, y∈Dq
Preuve :
D´ecoule de la d´efinition de l’op´erateur bord
d:πn+m(Sn×Sm, Sn∨Sm)−→πn+m−1(Sn∨Sm) .
2 Lemme 13(Consistence des notations). Sip=q = 1, alors[α, β] =αβα−1β−1 ∈π1(X) . Preuve : Evident.
2 Th´eor`eme 6 (Comparaison Whitehead/Samelson). Soit τp :πp+1(X) −→πp(ΩX) l’iso- morphisme naturel pour p ≥ 0. Pour tout α ∈ πp+1(X), β ∈ πq+1(X), alors τ[α, β] = (−1)p < τ α, τ β >∈πp+q(ΩX).
Preuve :
Laiss´ee en exercice.
2 Regraduons les groupes d’homotopie Lk =πk+1(X). Pour xi ∈Li,yj ∈Lj etzk ∈Lk
on obtient ainsi
[xi, yj] = (−1)ij[yj, xi] .
(−1)ij[[xi, yj], zk] + (−1)jk[[yj, zk], xi] + (−1)ki[[zk, xi], yj] = 0 Autrement dit (L.,[·,·]) est une quasi alg`ebre de Lie gradu´ee.
5. Op´erations homotopiques
D´efinition. On appelle op´eration homotopique `a une variable de type(n;p)un morphisme de foncteurs f :πn−→πp, c’est-`a-dire la donn´ee pour tout X∈Top∗ d’un morphisme
fX :πn(X)−→πp(X)
satisfaisant pour toutφ:X−→Y la contrainte de commutativit´e du diagramme πn(X)
φ∗
fX
//πp(X)
φ∗
πx(X) fY //πp(Y) .
Lemme 14. L’ensemble des op´erations homotopiques `a une variable est en bijection na- turelle avec πp(Sn).
Preuve : L’applicationfSn :πn(Sn)≃Z−→πp(Sn) fournit un ´el´ement deπp(Sn).
R´eciproquement soit [α] ∈ πp(Sn) correspondant `a une application α : Sp −→ Sn. Si [x]∈πn(X) correspond `ax:Sn−→X, on posefX([x]) = [x◦α]∈πp(X).
2 D´efinition. De mˆeme une op´eration homotopique `a kvariable, de type (n1,· · ·nk;p), est un morphisme de foncteurs
πn1 × · · ·πnk −→πp .
Lemme 15. L’ensemble des op´erations homotopiques `a k variables de type (n1,· · ·nk;p) est en bijection naturelle avec πp(Sn1 ∨ · · · ∨Snk).
Ceci justifie l’int´erˆet de l’´etude des groupes d’homotopie πp(Sn1 ∨ · · · ∨Snk).
6. Le th´eor`eme de Hilton
Le th´eor`eme de Hilton exprimeπp(Sn1∨· · ·∨Snk),ni ≥2, comme une somme directe de groupes d’homotopie de sph`eres πp(Sm). Chaque facteur se trouve plong´e par un certain produit de Whitehead multiple.
D´efinition (Produits basiques). Les produits basiques de poids 1 sont les classes il, 1≤ l ≤k d’homotopie des injections naturelles Snl −→ Sn1 ∨ · · · ∨Snk. On les ordonne par la relation d’ordre i1 < · · · < ik. Par r´ecurrence un produit basique de poids w est un produit de Whitehead [a, b], a produit basique de poids u, b produit basique de poids v, avec u+v =w, a < b, et si b = [c, d] on doit avoir c ≤a. Les produits de poids w sont ordonn´es arbitrairement entre eux et sont strictements sup´erieurs aux produits basiques de poids < w.
Exemple :Sik= 2 et on posex=i1 ety=i2, les produits basiques sont poids 1 : x,y
poids 2 : [x, y]
poids 3 : [x,[x, y]], [y,[x, y]]
poids 4 : [x,[x,[x, y]]], [y,[x,[x, y]]], [y,[y,[x, y]]]
Chaque produit basiqueapeut ˆetre consid´er´e comme un ´el´ement deπna(Sn1∨· · ·∨Snk), na ´etant un entier facile `a d´eterminer. L’application β −→ a◦β est donc un homomor- phisme fa:πp(Sna)−→πp(Sn1 ∨ · · · ∨Snk). D’o`u un homomorphisme
f :⊕aπp(Sna)−→πp(Sn1 ∨ · · · ∨Snk) .
Th´eor`eme 7 (Hilton). Pour tout entierp l’homomorphisme f est un isomorphisme f :⊕aπp(Sna)−→πp(Sn1 ∨ · · · ∨Snk) .
On v´erifie facilement que les entiers na tendent vers l’infini. Il s’ensuit que la somme directe est finie. Par exemple pourp <4n−3 on obtient
πp(Sn∨Sn) =πp(Sn)⊕πp(Sn)⊕πp(S2n−1)⊕πp(S3n−2)⊕πp(S3n−2) .