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LES HUMANITÉS NUMÉRIQUES, COMBIEN DE DIVISIONS ?

Éléments pour une sociologie critique de curricula d’éducation au numérique en sciences humaines

Laurent Tessier

Éditions du Croquant | « Zilsel » 2020/2 N° 7 | pages 355 à 385 ISSN 2551-8313

Article disponible en ligne à l'adresse :

--- https://www.cairn.info/revue-zilsel-2020-2-page-355.htm

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Les Humanités Numériques, combien de divisions ?

Les Humanités Numériques,

combien de divisions ?

Éléments pour une sociologie critique de curricula d’éducation au numérique

en sciences humaines

Laurent Tessier1

Les Humanités Numériques (ou Digital Humanities) peuvent, de la manière la plus succincte, être définies comme un champ de recherches et de pratiques interdisciplinaires ayant pour objet les applications et les usages des technologies numériques par les sciences humaines et sociales (plutôt appelées humanities, huma- nités, dans le monde anglophone). Depuis les travaux de pionniers menés dès les années 19502, des chercheur·euse·s de plus en plus nombreux ont rejoint ce qui allait devenir un véritable mouve- ment international, regroupant toutes les disciplines des huma- nités (histoire, littérature, langues, etc.). Dès 1973 était ainsi créée l’Association for Literary and Linguistic Computing, aujourd’hui European Association for Digital Humanities, qui fait elle-même partie de l’Alliance of Digital Humanities Organizations (ADHO3).

Créée en 2005, celle-ci regroupe entre autres l’Association for Com- puters and the Humanities (ACH), la Canadian Society for Digital Humanities (CSDH/SCHN), centerNet, the Australasian Associa- tion for Digital Humanities (aaDH), ou encore la Japanese Asso- ciation for Digital Humanities (JADH). Témoignant de son dyna- misme, la conférence mondiale d’ADHO accueille chaque année plus de mille participants4.

Les sciences humaines et sociales ne sont donc pas, comme on pourrait le penser, des utilisatrices tardives ou marginales de l’informatique ou du numérique. Dès les débuts de l’informatique,

1. Institut Catholique de Paris, l.tessier@icp.fr

2. Thomas N. Winter, Roberto Busa, S.J., and the Invention of the Machine-Generated Concor- dance, Lincoln, University of Nebraska, 1999.

3. Alliance of Digital Humanities Organizations : adho.org

4. Les dernières conférences annuelles se sont tenues à Utrecht, Mexico et Montréal (adho.org/conference).

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des chercheur·euse·s en sciences humaines et sociales s’y inté- ressent et s’en saisissent avec l’objectif de traiter leurs corpus de recherche de manière plus systématique ou tout simplement dif- férente5. Si les premiers travaux de ce type font la part belle à la constitution de bases de données, aux analyses de texte (text mi- ning) et autres fouilles de données (data mining), les perspectives s’élargissent progressivement à l’analyse des réseaux, ou encore aux technologies de visualisation permettant d’approcher les sources de manières renouvelées6.

Pour autant, les chercheur·euse·s de différentes disciplines qui inscrivent leurs pratiques dans le cadre des HN ne veulent pas que leurs travaux et expérimentations soient résumés à l’usage d’outils nouveaux par des disciplines anciennes. Plus profondé- ment, c’est en tout cas l’hypothèse que je vais soutenir ici, ils am- bitionnent de proposer un modèle général de rapport aux techno- logies. En témoigne le manifeste (francophone) des HN, qui tente d’en définir les principes et les objectifs. Parmi eux, on peut retenir les suivants, qui précisent la visée éducative au sens large des HN :

« Nous, acteurs des digital humanities, nous nous constituons en communauté de pratique solidaire, ouverte, accueillante et libre d’accès […] Nous avons pour objectifs le progrès de la connaissance, le renforcement de la qualité de la recherche dans nos disciplines, et l’enrichissement du savoir et du pa- trimoine collectif, au-delà de la seule sphère académique […] Nous appelons à l’intégration de la culture numérique dans la définition de la culture générale du XXIe siècle […]

Nous lançons un appel pour l’accès libre aux données et aux métadonnées. Celles-ci doivent être documentées et intero- pérables, autant techniquement que conceptuellement […]

Nous sommes favorables à la diffusion, à la circulation et au libre enrichissement des méthodes, du code, des formats et des résultats de la recherche […] Nous appelons à l’intégra-

5. L’expression Digital Humanities est stabilisée depuis relativement peu de temps : seu- lement une vingtaine d’années dans le contexte anglo-saxon et encore moins dans le contexte francophone. A propos de cette évolution sémantique, voir Susan Schreib- man Et. Al. (ed.), A companion to digital humanities, Malden (Mass.), Blackwell, 2004.

6. Scott Weingart présente sur son blog une analyse quantitative des propositions de communication soumises chaque année à la conférence d’ADHO. La dernière confé- rence analysée est celle de 2016, à Cracovie. Les dix mots-clés les plus courants des propositions de communication de cette édition étaient (de la première à la dixième position) : text analysis ; historical studies ; data mining / text mining ; archives, repositories, sustainability and preservation ; literary studies ; visualisation ; corpora and corpus activities ; interdisciplinary collaboration ; digitisation, ressource creation and discovery ; content analysis (scottbot.net/HIAL.1.html).

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tion de formations aux digital humanities au sein des cursus en Sciences humaines et sociales, en Arts et en Lettres. Nous souhaitons également la création de diplômes spécifiques aux digital humanities et le développement de formations professionnelles dédiées. »7

On le voit, pour les rédacteurs de ce manifeste, la visée est à la fois de développer des formations spécifiquement dédiées aux Hu- manités Numériques, mais aussi plus généralement de promou- voir une certaine approche de la « culture numérique » dans l’en- semble de la société. Ce texte, il faut le préciser, a été élaboré col- lectivement lors d’un évènement typique des HN, un « ThatCamp », tenu les 18 et 19 mai 2010 à Paris8. Il ne rencontrerait sans doute pas l’assentiment inconditionnel de la multiplicité des acteurs qui participent des HN, comme le laissent déjà deviner les commen- taires lui répondant lors de sa publication9. Malgré ces réserves, ce texte donne une idée minimale de la variété et de l’ambition des objectifs des HN, certains tenants de cette approche allant même jusqu’à fonder les humanités numériques sur la perspec- tive d’un véritable « humanisme numérique » revitalisant le pro- jet humaniste « classique » dans son ensemble10. Il ne s’agit donc pas là seulement d’enjeux propres au monde de la recherche en sciences humaines et sociales. Il est question aussi de toucher plus largement aux relations entre sciences, éducation et socié- té11 et de proposer un véritable modèle d’éducation au numérique (nous reviendrons sur cette expression) qui s’étend tendancielle- ment à l’ensemble du système éducatif. Les ambitions révolution- naires affichées par les HN semblent en cela s’inscrire dans une économie de la promesse fort répandue chez les acteurs du numé- rique12. Face à ces promesses et ces ambitions, certains dénoncent au contraire ce mouvement des HN, comme le fait Éric Guichard

7. La version francophone du manifeste, dont est tiré cet extrait est disponible à cette adresse : tcp.hypotheses.org/318. Elle est elle-même inspirée du Digital Hu- manities Manifesto publié à l’Université d’Harvard par Jeffrey Schnapp en 2009 : rll-faculty.fas.harvard.edu/jeffreyschnapp/publications/digital-humanities-manifesto.

8. Je reviendrai plus loin sur la spécificité de ce format.

9. Voir les commentaires sous la publication du manifeste à la même adresse : tcp.hypo- theses.org/318.

10. Milad Doueihi, Pour un humanisme numérique, Paris, Seuil, 2011.

11. Michael Bourgatte, Michael Ferloni & Laurent Tessier (dir.), Quelles humanités numé- riques pour l’éducation ?, Paris, MkF éditions, 2016.

12. Voir Harro Van Lente, Promising Technology: The Dynamics of Expectations in Technologi- cal Developments. Enschede, University of Twente (Thèse de doctorat), 1993 ; ou encore Marc Barbier, Lionel Cauchard, Pierre-Benoit Joly, Catherine Paradeise & Dominique Vinck, « Pour une Approche pragmatique, écologique et politique de l’expertise », Re- vue d’anthropologie des connaissances, vol. 7, № 1, 2013, p. 62-66.

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dans un texte récent, dans lequel il affirme avec virulence que

« les humanités numériques n’existent pas », qu’elles « ne sont qu’un slogan creux […] peu compatible avec nos tentatives de développer une rationalité critique et sereine »13 ; ou encore que celles-ci ne se- raient que le cheval de Troie des GAFAM14 dans leurs tentatives d’intrusion à l’école et l’université.

Mais au-delà des panégyriques et des anathèmes, dont l’ana- lyse sémiotique présenterait en soi un intérêt, est-il possible d’éva- luer à l’aide d’outils sociologiques la place réelle que les HN oc- cupent aujourd’hui dans l’éducation au numérique des étudiant·e·s et des élèves français ? En mobilisant ces outils, je vais tenter de montrer ici comment les ambitions des HN se traduisent concrè- tement par des prises de position tangibles mais limitées dans le système éducatif français.

Pour cela, je vais tout d’abord présenter, en m’appuyant sur de précédentes recherches, le contexte de l’éducation au numérique en France, qui voit selon moi s’opposer deux paradigmes concur- rents : les TICE (Technologies de l’Information et de la communi- cation pour l’Enseignement) et les EdTech (Educational Technolo- gies). Je fais l’hypothèse qu’il est possible d’interpréter le position- nement des HN comme une sorte de voie intermédiaire entre ces deux paradigmes. Afin de tester cette hypothèse, je propose de mettre à profit les outils de la sociologie du curriculum, en les ap- pliquant aux formations en HN et, plus précisément dans le cadre de cet article, aux Masters en Humanités Numériques. Cette étude se conclura par une réflexion sur les limites actuelles de l’expan- sion des HN, en particulier dans l’enseignement secondaire.

Les Humanités Numériques : un paradigme éducatif parmi d’autres

À partir du moment où les Humanités Numériques affichent l’am- bition de proposer un modèle générique d’éducation au numé- rique, elles entrent en concurrence avec d’autres manières de la concevoir et de la mettre en œuvre. Car, bien sûr, ce terrain de l’éducation au numérique n’est pas vierge de conceptualisations ni de pratiques. Que ce soit en France ou dans d’autres contextes nationaux, les acteurs du monde éducatif (scolaire, universitaire)

13. La présente citation est extraite de la présentation de l’article sur la liste de diffu- sion « DH ». L’article, non-publié dans sa version définitive, est disponible sur HAL : hal.archives-ouvertes.fr/hal-02403315.

14. Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft.

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se sont massivement saisis de la question numérique de- puis plusieurs décennies.

La réponse éducative à la « révolution numé- rique » a suscité et

continue de susciter des débats passion- nés, qui recouvrent aussi des luttes d’in- fluences académiques et politiques. J’ai tenté de montrer ailleurs que la question de l’éducation au numérique en France s’était structurée, depuis le milieu des années 1980 jusqu’au milieu des an- nées 2010, autour d’un pa- radigme dominant, celui des TICE, mais que ce paradigme était aujourd’hui en perte de vitesse15. On pourrait dire que les TICE incarnaient une forme d’éducation au numérique pensée par les enseignants et les acteurs du système éducatif et universitaire français. Celle-ci passait par la définition de compétences forma- lisées par des référentiels nationaux, devant être validés par tous les apprenants en fonction de leur niveau (B2i en fin de collège ; C2i en fin de Licence notamment16). Sans entrer ici dans le détail de ces référentiels, on pourrait résumer l’objectif éducatif fonda- mental des TICE comme celui de former des citoyens aux enjeux politiques et sociaux du numérique, en appliquant une approche déductive, avec une ambition théorique affirmée. Ainsi la pro- grammation informatique était-elle envisagée dans le cadre des TICE comme une connaissance à la fois théorique et pratique ; savoir coder reposant non pas seulement sur un bricolage prag- matique, mais sur un apprentissage systématique des éléments de logique formelle et de mathématiques qui le fondent, appren-

15. Laurent Tessier, Éduquer au numérique ? Un changement de paradigme, Paris, MkF, 2019.

16. Le Certificat Informatique et Internet délivré dans le cadre de la Licence universitaire, faisait jusqu’en 2019 suite au Brevet Informatique et Internet (voir à ce propos la thèse de Bruno Devauchelle, Le Brevet Informatique et Internet (B2i), d’un geste institutionnel aux réalités pédagogiques. Saint-Denis, Université Paris VIII, 2004). Ils sont aujourd’hui en passe d’être remplacés par un nouveau dispositif typique du paradigme EdTech que nous allons évoquer ci-après : PIX (pix.fr).

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tissage placé sous la responsabilité des professeurs de mathéma- tiques. On pourrait ajouter que le rapport idéologique des TICE au monde du numérique impliquait également une insistance sur leurs dangers (risques liés à la pratique des réseaux sociaux, etc.), dans une logique de protection des mineurs préalable à la décou- verte de ce monde par les apprenants. Cette approche reposait en- fin sur des investissements matériels lourds et standardisés, un équipement unifié devant permettre de lutter contre les inégali- tés entre apprenants.

Ce paradigme des TICE, principalement élaboré dans le contexte français17, se trouve aujourd’hui mis en concurrence avec un paradigme élaboré quant à lui dans le monde anglo-saxon, ce- lui des EdTech. Alors que le contexte d’émergence institutionnelle

17. Ou francophone, si l’on considère les apports significatifs apportés à la construction de ce paradigme par des chercheurs belges ou québécois (Marcel Lebrun & Jean-Marie de Ketele, Théories et méthodes pédagogiques pour enseigner et apprendre : Quelle place pour les TIC dans l’éducation ?, Bruxelles, De Boeck, 2007 ou encore Milad Doueihi, Le temps des hu- manités digitales: la mutation des sciences humaines et sociales, Limoges, Fyp éditions, 2014.

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des TICE était celui des institutions éducatives, celui des EdTech est celui des géants privés de la Silicon Valley, qui revendiquent d’ailleurs à cet endroit une volonté de rupture avec les formats scolaires classiques jugés inadaptés au monde à venir, leur pré- férant des méthodologies éprouvées en contexte entrepreneurial (hackathons, barcamps, etc.). Pour le dire autrement, les TICE re- présentent une manière de concevoir l’éducation au numérique par les enseignants, alors que les EdTech sont la manière dont les professionnels du numérique l’imaginent. Plutôt que la focalisa- tion sur les risques et les dangers des TICE, les EdTech adoptent logiquement une tonalité enthousiaste, fondée sur le modèle de la start-up, et préconisent de se plonger dans le bain numérique le plus vite possible, sans restriction aucune. On comprend dès lors que l’enjeu fondamental n’est pas pour eux la formation à une ci- toyenneté numérique (dans le sens de former de futurs citoyens à un usage critique des technologies tenant compte de leurs enjeux sociaux et politiques), mais plutôt de préparer aux usages profes- sionnels du numérique qui seront (selon eux) de plus en plus pré- sents quelle que soit la voie professionnelle choisie par l’apprenant (en témoignent par exemple les nombreuses listes des « métiers de demain » qui font florès chez ces futurologues de l’éducation). Leur approche se veut inductive, l’accent étant mis sur la pratique plu- tôt que sur la théorie. Ainsi, l’apprentissage du code est-il proposé dans une approche hacker/maker où l’on se forme « par projet », de manière utilitaire en fonction d’un objectif contextuel donné. Les parcours sont individualisés en fonction de la réussite de l’appre- nant (selon la théorie de l’« adaptive learning ») plutôt que standar- disés par classes d’âge. Logiquement également, les EdTech pré- conisent que le choix des équipements matériels soit laissé aux apprenants, selon la théorie du BYOD (« Bring Your Own Device »), les acteurs privés fournissant des solutions mises en concurrence.

Soutenues et encouragées par les GAFAM et tout un en- semble de start-up dédiées, les EdTech bénéficient aussi de la bien- veillance du gouvernement et en particulier de Jean-Michel Blan- quer, ministre de l’Éducation Nationale18. Cependant, l’État n’étant pas un objet monolithique19, d’autres forces en son sein agissent également pour contrecarrer cette influence des EdTech. C’est par

18. A propos de cette lutte entre tenants des TICE et des EdTech, je me permets de ren- voyer à mon ouvrage, Laurent Tessier, Éduquer au numérique ? Un changement de paradigme, op. cit., dont la présente étude constitue un prolongement direct.

19. Jean-Numa Ducange & Razmig Keucheyan, La fin de l’État démocratique. Nicos Poulant- zas, un marxisme pour le 21e siècle, Paris, Presses universitaires de France, 2016.

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exemple le cas d’une partie des acteurs de la DNE (Direction du Numérique pour l’Éducation) de ce même ministère, qui à travers différentes actions de formation, militent pour une éducation au numérique opposée aux EdTech. Comme on le verra dans la der- nière partie de ce texte, l’une de leurs stratégies est justement de promouvoir le courant des Humanités Numériques, considéré par eux comme une alternative à la mainmise des GAFAM sur l’édu- cation au numérique.

Quelle sociologie du curriculum pour quelles Humanités Numériques ?

En termes de contexte d’émergence, d’objectifs éducatifs, de rap- port à la théorie et à la pratique du numérique, de modalités cur- riculaires typiques, ou encore de préconisations d’équipement, les HN se situent-elles plutôt du côté des TICE ou des EdTech ? Ou constituent-elles une forme de troisième voie entre ces deux pa- radigmes pour l’instant dominants ?

Il faut le dire tout de suite, les ramifications d’un tel pro- jet sociologique sont nombreuses, si on veut le mener de manière conséquente, et je serai loin de les épuiser ici. Mon ambition est d’entreprendre une véritable démarche de sociologie des Huma- nités Numériques, de leurs traductions concrètes dans les curri- cula scolaires et universitaires, au-delà des injonctions et des in- cantations, des polémiques, voire des paniques morales que l’édu- cation au numérique peut susciter dans et hors des cercles aca- démiques. En quoi devrait alors consister ce projet de sociologie des curricula en HN et comment le circonscrire ? En premier lieu, la sociologie du curriculum étudie classiquement l’introduction d’une discipline ou d’un objet d’enseignement dans le curriculum scolaire et universitaire, en décrivant le processus de transposi- tion du « savoir savant » (ici les recherches en HN) au « savoir en- seigné » dans les cursus20. De manière indissociable, il s’agit éga- lement de cerner comment sont identifiées et construites les pra- tiques sociales de référence21 propres à cette « culture numérique »22

20. Yves Chevallard, La transposition didactique : du savoir savant au savoir enseigné, Grenoble, Éditions la Pensée sauvage, 1985.

21. Voir Jean-Pierre Martinand « Pratiques de référence, transposition didactique et sa- voirs professionnels en sciences techniques », Les sciences de l’éducation, pour l’ère nou- velle, № 2, 1989, p. 23-29 ; ou encore Christian Orange « Didactique de l’informatique et pratiques sociales de référence », Revue de l’EPI (Enseignement Public et Informatique),

№ 60, Association EPI (Enseignement public et informatique), décembre 1990.

22. Au sens de Dominique Cardon, Culture numérique, Paris, Presses de Sciences po, 2019.

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visée par les HN. Les orientations des usages des technologies en contexte éducatif ne peuvent ainsi être déterminées sans avoir au préalable défini « un portrait des usages technologiques des appre- nants en dehors des institutions éducatives »23.

À la suite des travaux de Forquin24, Barrier, Quéré et Van- neuville25 proposent une définition critique du curriculum, allant dans ce sens. Selon eux, le curriculum « recouvre à la fois le conte- nu des savoirs enseignés, les modes d’articulations entre différents enseignements, les méthodes pédagogiques employées, et les mo- des d’évaluation des connaissances mobilisés. Il invite ainsi à pen- ser ensemble les différentes facettes d’un cursus d’enseignement, en envisageant aussi bien ses dimensions cognitives que sa mise en œuvre pratique, pour le resituer dans des dynamiques sociales ».

S’appuyant également sur les travaux de Bernstein26, ils insistent sur « les luttes de pouvoir relatives à la fabrication des programmes d’enseignement. La définition de ce qui peut – et doit – être légiti- mement enseigné, la mise en forme didactique des savoirs, leur ar- ticulation dans un programme ainsi que la façon de les transmettre font fréquemment l’objet de débats, de négociations ou de conflits […] Les curricula peuvent en effet être investis par différents acteurs et groupes sociaux en concurrence pour l’imposition d’intérêts, de valeurs ou de visions du monde spécifiques. » Ils évoquent à ce pro- pos « les diverses arènes qui participent à l’élaboration des curricu- la : les établissements d’enseignement bien sûr, mais aussi les orga- nismes de certification, les agences d’assurance qualité, les organi- sations intervenant dans le financement de l’enseignement (fonda- tions, agences publiques, entreprises), les administrations de tutelle, les associations ou syndicats professionnels… »27

23. Simon Collin & Thierry Karsenti, « Usages des technologies en éducation : analyse des enjeux socioculturels », Éducation et francophonie, vol. 41, № 1, 2013, p. 192.

24. Jean-Claude Forquin, Sociologie du curriculum, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008.

25. Julien Barrier, Olivier Quéré et Rachel Vanneuville, « La fabrique des programmes d’en- seignement dans le supérieur : Institutions, pratiques enseignantes et reconfigurations curriculaires », Journées d’étude du Réseau d’Études sur l’Enseignement Supérieur, Institut Français de l’Education, Lyon, 2016 pupitre.hypotheses.org/2681.

26. Basil Bernstein, Pédagogie, contrôle symbolique et identité : théorie, recherche, critique, trad.

de G. Le Déroff Ramognino & p. Vitale, Sainte-Foyes, Presses de l’Université Laval, 2007.

27. Cette sociologie critique du curriculum dans laquelle j’inscris également ces travaux sur les paradigmes d’éducation au numérique englobe donc les questions institutionnelles : structuration des institutions, enjeux de pouvoirs internes et externes, stratégies de positionnement et de concurrence. Mais elle devrait aussi contenir, à un niveau plus fin, l’observation et l’analyse des pratiques enseignantes, avec les interprétations, les traductions, les éventuelles résistances des enseignants qui sont toujours ceux, in fine, qui font exister les curricula. (Ce que je ne pourrai pas présenter dans le présent article mais qui constitue une suite logique de ce travail toujours en cours.)

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Comme on a com- mencé à le voir, les Hu- manités Numériques concernent d’abord des pratiques de

recherche. Elles visent à penser en quoi les recherches en sciences hu- maines et sociales sont modifiées par les nouveaux outils du numérique, à dé- velopper de bonnes pratiques, à créer des outils et à encourager l’appropriation de ces outils dédiés. Mais ce faisant, ce mouvement se traduit aussi, petit à petit, par des ac- tions de formation et d’éducation au numérique dans les diffé- rents niveaux du curriculum universitaire, en commençant par les étages « les plus hauts » et en se poursuivant « vers le bas » du curriculum. Comme le montrent à la fois les travaux de sociologie du curriculum et les approches plus pragmatiques de curriculum building28, l’introduction d’un élément nouveau de curriculum, thé- matique ou disciplinaire, commence en effet le plus souvent « par le haut ». De manière idéal-typique, une nouveauté théorique est d’abord introduite par des chercheur·euse·s au niveau de sémi- naires doctoraux, puis en Master, en Licence, et enfin éventuel- lement dans le système scolaire secondaire et primaire. On peut ajouter que le développement d’un contenu d’enseignement doit logiquement d’abord être élaboré dans le supérieur avant d’irri- guer le monde scolaire, puisqu’il faut que les futurs enseignants puissent y être formés avant de l’introduire à l’école.

Aux États-Unis, cette traduction pédagogique des HN a fait un chemin significatif dans l’enseignement supérieur, comme en témoignait déjà en 2012 l’impressionnant volume intitulé Digital Humanities Pedagogy29 qui en dressait un état des lieux. Dans ce

28. Michael F. Connelly (ed.), The Sage handbook of curriculum and instruction, Los Angeles, Sage, 2008.

29. Brett D. Hirsch, Digital humanities pedagogy: practices, principles and politics, Cambridge, OpenBook Publishers, 2012.

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volume, les auteurs présentent une série de projets pédagogiques en HN réalisés au cours des années 2000 à différents niveaux univer- sitaires (depuis la formation doctorale jusqu’aux under-graduates).

On voit des exemples d’intégration des HN dans différentes dis- ciplines : l’utilisation des outils numériques dans un cours d’his- toire exploitant des archives publiques30, un atelier d’écriture in- tégrant des formes d’écritures numériques31 ou un projet de re- cherche en ligne sur Walt Whitman proposés à des étudiant·e·s de littérature32. Mais ce hand-book présente aussi des projets pé- dagogiques propres aux curricula en Digital Humanities dévelop- pés par différentes universités, depuis les bachelors33 jusqu’au doc- torat en humanités numériques, dont la présentation des enjeux scientifiques et pédagogiques ouvre le volume34. Le concept de multiliteracy35 permet aux auteurs d’insister sur le fait que, dans chacun de ces curricula, l’un des enjeux pédagogiques va être de faire articuler aux étudiant·e·s des literacies multiples, ayant trait aux disciplines classiques (par exemple, savoir comment appré- hender et manipuler des textes en langues anciennes) et aux HN (par exemple, apprendre différents langages de programmation) qui faisaient autrefois chacun l’objet de cursus autonomes, ensei- gnés de manière très différents, à des étudiant·e·s aux profils dis- tincts (littéraires versus scientifiques, pour le dire très rapidement).

À travers ces premières mises en applications concrètes des principes des HN, on voit immédiatement apparaître deux axes structurants de ce paradigme éducatif. D’un côté, la dimension

« hands-on »36, c’est-à-dire la pratique des outils numériques à un niveau avancé, incluant des éléments de programmation informa- tique permettant notamment de pratiquer une fouille et une analyse de texte assistée37. Mais au-delà de ces skills, de ces compétences techniques, les curricula en HN insistent aussi sur l’acquisition de méthodes, voire d’habitus à la fois dans le rapport aux sources et aux communautés de recherche. Ce que montre par exemple le dernier chapitre de l’ouvrage38, consacré aux usages de Wikipé- dia, aux pratiques collaboratives de recherche et aux politics of free

30. Ibid., p. 79.

31. Ibid., p. 97.

32. Ibid., p. 151.

33. Ibid., p. 365.

34. Ibid., p. 33.

35. Ibid., p. 365.

36. Ibid., p. 47.

37. Computer-assisted text analysis, ibid., p. 241.

38. Ibid., p. 389.

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knowledge. L’usage de Wikipédia, dans le paradigme HN, est ainsi totalement décomplexé dans une perspective de rapport ouvert au savoir débordant les institutions éducatives classiques alors qu’à la même époque, Wikipédia faisait encore largement figure d’épouvantail dans le contexte scolaire et universitaire.

Qu’en est-il à présent de l’introduction de ce type de for- mations en France ? Les formations en HN ont été, il faut le pré- ciser, plus tardives à se développer en France que dans d’autres pays comparables. L’association francophone des HN, Humanis- tica39, a elle-même seulement été fondée en 2014, intégrant des structures internationales existantes depuis déjà une dizaine d’an- nées. On peut faire l’hypothèse que cela est au moins en partie lié à la structure très disciplinaire de l’université française, qui représente un frein objec- tif pour toute initiative in- terdisciplinaire. Les moda- lités d’évaluation des ensei- gnant·e·s-chercheur·euse·s propres au système français (structuration du CNU en sections disciplinaires, notamment) tendent par exemple à invisibiliser ce type d’activité. Ce dont se plaignent d’ailleurs les acteurs des HN, comme on peut le constater dans ce compte rendu d’atelier consacré aux HN en 201240 :

« En France en parti- culier, le débat est surdéterminé par une opposition très forte et statutaire entre chercheurs et ingénieurs. Trop souvent, ma- nifester un intérêt pour ce qui est perçu comme “technique”

fait basculer du côté de l’ingénieur. Cette opposition est in- connue ou beaucoup plus faible dans certains pays, comme l’Allemagne ou le Luxembourg par exemple. Aux États-Unis, c’est la notion d’“alternative academic careers” (#alt-ac) qui

39. humanisti.ca.

40. Aurélien Berra et Florence Clavaud, « Formations et humanités numériques en France », THATCamp Paris 2012 : Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, Pa- ris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2012. books.openedition.org/

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a récemment émergé sur la base d’une reconnaissance de double compétence. […] Les profils “transdisciplinaires” sont merveilleux sur le papier mais non reconnus dans les com- missions de sélection. »

Cependant, malgré ce « retard à l’allumage », la France constitue aujourd’hui un foyer de développement avéré pour les HN. Ce dy- namisme, qui fut au départ le fait de quelques « passeurs » parti- culièrement actifs41, s’appuie à la fin des années 2010 sur des an- crages institutionnels significatifs42.

Au cœur des curricula français en HN : les parcours de Master

En France, on a vu se développer au cours des années 2010 de plus en plus de formations universitaires, soit intégralement soit en par- tie consacrées aux HN. Ces formations ont d’abord pris la forme de modules et d’évènements à destination des chercheur·euse·s. Les THATCamp (pour The Humanities and Technology Camp), emblé- matiques des HN, constituaient ainsi des lieux hybrides de forma- tion et de recherche propres à ce champ et à cette « communauté de pratiques » en voie de constitution. Le concept de THATCamp a été développé au Center for History and New Media de la George Mason University en 2008. Il a essaimé par la suite aux États-Unis puis dans le reste du monde (plusieurs THATCamp ont eu lieu à Pa- ris depuis 2010). Dans ces évènements, il n’y a pas de sélection en amont de papiers à partir de résumés, qui seraient ensuite lus lors d’un colloque de manière magistrale. Le THATCamp est constitué d’ateliers dont les thèmes sont décidés collectivement et de ma- nière horizontale par tous les participants au début de la manifes- tation. La participation est ouverte, et associe habituellement non seulement des chercheur·euse·s, mais aussi des informaticien·ne·s, des ingénieur·e·s, des documentalistes, des enseignants du secon- daire, etc. On voit la logique de formation qui est à l’œuvre : partir des besoins des participants et construire collectivement les sa-

41. Des chercheur·euse·s, mais aussi souvent, il faut le souligner, des ingénieur·e·s, l’un des enjeux des HN, qui mériterait en soi d’être étudié dans le cadre d’une sociologie des pro- fessions universitaires, étant les reconfigurations induites par ce champ de recherches.

42. Voir les projets développés dans le cadre de la Très Grande Infrastructure de Recherche (TGIR) « Human-Num » en France : huma-num.fr, du consortium européen DARIAH (Di- gital research Infrastructure for the Arts and Humanities) : dariah.eu, ou encore le développe- ment du futur Campus Condorcet, qui fait la part belle aux HN (campus-condorcet.fr).

Là encore, les enjeux institutionnels liés à ces regroupements et dont le développe- ment des HN participe mériteraient un développement en soi.

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voirs à partir de l’apport de chacun. Par opposition avec les col- loques ou conférences classiques, leurs instigateurs parlent éga- lement à leur propos de « non-conférences ».

Ce format horizontal et informel des THATCamp est inspi- ré de celui des barcamps, organisés dans le monde des technolo- gies numériques depuis au moins 200543. On note là une parenté avec les barcamps du monde des EdTech, mais avec des différences philosophiques essentielles. Du côté des EdTech, l’objectif visé est de favoriser la constitution de réseaux utiles pour les participants dans la réalisation de projets de développements informatiques.

Du côté des THATCamp, on vise une formation critique aux tech- nologies et à leurs enjeux, dont la logique n’est pas uniquement instrumentale. Les THATCamp ont joué un rôle important dans la formation d’un réseau interdisciplinaire de chercheur·euse·s, ac- tif notamment en France. Ces formations s’adressant entre autres aux doctorants, elles peuvent en ce sens être considérées comme des lieux de formation doctorale, même si elles ne sont pas tou- jours identifiées comme telles.

À la suite de ces formations de « niveau recherche », les HN ont peu à peu fait leur apparition au niveau Master, soit de ma- nière modulaire, soit directement en tant que spécialité de Master (et ce de manière assez rapide, si on considère le développement relativement récent des HN en France). Ces formations ont été référencées d’abord de manière informelle et participative dans le cadre des THATCamp44, puis via un référencement « officiel » effectué par le consortium DARIAH au niveau européen, nom- mé « Digital Humanities Course Registry »45. En 2012, seules trois formations de niveau Master étaient identifiées en France. De- puis, on constate un fort développement, avec des orientations très diverses, d’abord en termes d’appellation et de dénomina- tion. Certains Masters comportent une formation aux HN mais n’en portent pas le titre tandis que d’autres en prennent le titre sans forcément répondre à la définition courante qu’en donne le groupe de référence.

Une requête effectuée sur cette base de données permet de constater que la France compte 33 formations universitaires en

43. Isabelle Berrebi-hoffmann, Marie-christine Bureau et Michel Lallement, Makers. Enquê- te sur les laboratoires du changement social, Paris, Seuil, 2018.

44. Aurélien Berra & Frédéric Clavaud (dir.), « Formations et humanités numériques en France », THATCamp Paris 2012 : Non-actes de la non-conférence des humanités numériques, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2012, books.openedition.org/

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45. dh-registry.de.dariah.eu, consulté le 1er octobre 2019.

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HN, dont 18 au niveau Master (sur 87 au niveau Master pour l’en- semble de l’Europe). Ces 18 formations sont les suivantes (classées par intitulé, université et unité de rattachement) :

Tableau 1

Parcours de Masters en Humanités Numériques en France en 2019.

On constate ici immédiatement la variété des possibles ouverts par le cadre très large des HN, en termes de dénominations et d’orientations professionnelles et/ou scientifiques, de rattache- ments disciplinaires et institutionnels. En suivant la cartogra- phie des Masters HN dans le contexte français produites par DA- RIAH, je propose ici d’observer de manière plus précise quelques exemples apparaissant comme typiques de mise en curriculum du

Mention Lettres parcours Édition Numérique

et Imprimée de Textes Littéraires (ÉdNITL) Université Lille 3 Lettres modernes Mention Sciences du Langage parcours

Lexicographie, Terminographie et Traitement Automatique des Corpus (LTTAC)

Université Lille 3 Sciences du langage

Master « Patrimoine et musées », parcours

« Médiation culturelle, patrimoine et numérique »

Université Paris 8

Vincennes-Saint-Denis Médiation Culturelle

Master sciences du langage

parcours Humanités numériques : linguistique et informatique

Université de Cergy-Pontoise Lettres modernes

Programmation et exploitation

du web pour historien Université Paris 1

Panthéon-Sorbonne Histoire Modélisation de données

historiques Université Paris 1

Panthéon-Sorbonne Histoire

Master Humanités numériques Université Lyon 2 Info-Com

Analyse et structuration

des données historiques Université Paris 1

Panthéon-Sorbonne Laboratoire de Médiévistique Occidentale de Paris Master Métiers de la Science des Patrimoines :

spécialisation « Patrimoine écrit et édition numérique »

Université François-Rabelais Centre d’Études Supérieures de la Renaissance (CESR)

Master Humanités numériques Université Rennes 2 UFR Sciences Sociales Mention Humanités numériques Université Paris 8

Vincennes-Saint-Denis UFR MITSIC

Informatique et Sciences sociales (DCISS) Université Grenoble-Alpes Sciences sociales et humaines Humanités classiques et humanités

numériques Université Paris-Nanterre Langues et littératures

grecques et latines M.Sc. Program in Natural Language Processing

(NLP) Université de Lorraine Institute of Digital science,

Management and Cognition

Master in Digital Humanities Sorbonne Nouvelle LLD

Master in Digital Humanities Université François-Rabelais Centre d’études supérieures de la Renaissance

Master Digital and computational humanities Université Paris Sciences et

Lettres (PSL) École nationale des chartes, EHESS, ENS, EPHE Master « Technologies des Langues » Université de Strasbourg Faculté des Langues

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paradigme éducatif des HN, en analysant leurs modes de présen- tation et de positionnement, ainsi que leurs maquettes. J’ai pour cela sélectionné les Masters HN des institutions suivantes : Paris Ouest-Nanterre, Université Paris VIII, École des chartes, Univer- sité Technologique de Compiègne (UTC), Université de Lyon et Institut d’Études Politiques (IEP) de Paris46.

Le Master Humanités, « parcours47 Humanités classiques et humanités numériques », de l’Université Paris-Ouest Nanterre est l’une des premières formations de ce type en France. Il s’inscrit dans un contexte institutionnel général de promotion des « hu- manités », puisque Nanterre est également le lieu de la première Licence « Humanités » en France. Créé dans une première version au tournant des années 2010, il a été le premier Master HN à être évalué par l’AERES en 201248. Dans la version actuelle de ce cur- riculum, en œuvre depuis 2014-2015, celui-ci est centré sur une formation en sciences de l’Antiquité : « tradition philologique et études littéraires » ; « grammaire et linguistique du latin et du grec ancien », « réflexion sur le patrimoine antique et sa présence dans le monde contemporain » ; « mythologie et croyances religieuses », à quoi s’ajoute une initiation aux humanités numériques. Les HN sont donc ici pensées comme un apport supplémentaire dans le cadre d’un cursus en « humanités ». Elles ne se substituent pas aux éléments de formation « classiques » (philologie, grammaire) mais viennent apporter un regard et des outils complémentaires à la formation de base. Ce parcours, qui peut être suivi en présen- tiel ou à distance, peut également être articulé avec une prépa- ration au CAPES dans le Master MEEF « Lettres », option Lettres classiques ou encore avec l’École du Louvre.

46. Cette sélection ne représente en aucun cas un échantillon représentatif de la popula- tion totale des Masters en HN. Le choix de ces formations s’est fait dans une logique exploratoire recelant une part de subjectivité évidente. J’ai sélectionné les Masters qui me semblaient les plus reconnus, visibles, installés, avec aussi l’idée d’explorer des cas suffisamment divers en termes de positionnement académique, de rapport au monde du numérique et aux questions de professionnalisation. La présente analyse a été ré- alisée dans le cadre d’un travail d’HDR soutenu à l’université Paris Descartes en 2018.

Les contenus des maquettes des Masters évoqués ci-après ont donc pu évoluer entre ce travail et leur présentation actuelle sur DARIAH ou sur les sites de leur université, cela ne remettant pas en cause à mon sens la typologie dans ses lignes essentielles.

47. La structuration institutionnalisée des Masters en trois niveaux de spécialisation : Do- maines, Mentions, parcours est évidemment fondamentale dans le cadre d’une socio- logie du curriculum. Cette structuration informe le curriculum et facilite la comparaison des formations. Comme on va le voir, la mise en œuvre de cette sociologie du curricu- lum permet de distinguer que les HN se situent d’abord au niveau du parcours, ce qui a une signification, à la fois pour les porteurs de ces formations et pour les apprenants et terme de poids relatif et de légitimité par rapport aux disciplines instituées.

48. Agence d’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, précédant la créa- tion de l’actuel HCERES.

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On peut analyser la formation proposée à l’École des chartes49, Master « technologies numériques appliquées à l’his- toire », selon une même logique et un positionnement similaire.

Elle propose aux étudiant·e·s d’articuler humanités « classiques » et « numériques », ces dernières apportant des outils supplémen- taires et nouveaux dans le cadre d’une formation centrée autour de la question des archives, avec des enseignements tels que : Pa- léographie latine : 12e-16e siècle ; Paléographie latine des origines au 12e siècle ; Diplomatique médiévale ; Introduction aux archives médiévales ; Genèse et tradition des actes de l’époque moderne ; Ar- chivistique contemporaine : la chaîne archivistique ; Latin médiéval : les documents de la pratique (initiation) ; Histoire de la littérature latine tardive, médiévale et renaissante : approche générique, etc.

De même, le Master « Archinfo », proposé par l’Université de Lyon inclut lui aussi un parcours (ici nommé « domaine d’ap- plication ») Humanités Numériques50. Il est présenté ainsi aux étudiant·e·s :

« Le terme Digital Humanities, ou Humanités Numériques, en- globe l’ensemble des pratiques, des méthodes et des dispositifs qui émergent de la rencontre entre d’une part les lettres, les arts, les sciences humaines et les sciences sociales et, d’autre part, le numérique. Cette rencontre débouche sur un renou- vellement des formes de vérification/validation/administra- tion de la preuve, en particulier en raison des rapports pos- sibles entre données primaires et publications, ainsi qu’entre les publications. La question de l’édition numérique est cen- trale pour les humanités numériques et nécessite d’être pen- sée en termes d’architecture de l’information. Le domaine d’application Humanités Numériques forme les étudiant·e·s à être conscients des enjeux scientifiques et institutionnels des projets de recherche en lettres, arts et SHS de manière à pouvoir intervenir dans ceux-ci en tant qu’architectes de l’information. »

Ce parcours, qui s’intègre à une formation plus large « d’archi- tecte de l’information » comprend trois modules : « Introduction aux Humanités numériques » ; « Gestion et manipulation de do- cuments numériques » ; « Bibliothèque et édition numériques ».

Le cas du Master proposé par l’Université Paris 8, qui se

49. Master Technologies numériques appliquées à l’histoire, École nationale des chartes : enc-sorbonne.fr/cursus/master-technologies-numeriques-appliquees-histoire.

50. archinfo.universite-lyon.fr/organisation-du-master/inf4-humanites-numeriques- 313979.kjsp.

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nomme « Master de Sciences Humaines et Sociales, mention Hu- manités Numériques », est déjà relativement différent des exemples précédents. Tout d’abord dans les modalités d’inscription de la perspective HN dans le curriculum : celles-ci ne constituent pas ici un « parcours », mais une mention. Autrement dit, il ne s’agit pas d’une modalité supplémentaire et optionnelle de spécialisa- tion proposée à certains étudiant·e·s dans le cadre d’une forma- tion plus générale. Au contraire, les HN constituent l’ossature, le cadre théorique général de la formation, ainsi présenté :

« Accéder à une compréhension fine des enjeux stratégiques, sociaux, culturels et professionnels du champ du numérique ; Construire une vision cohérente et raisonnée des principales problématiques théoriques, techniques et culturelles des TIC, de leurs usages, de leurs marchés, ainsi que des mutations structurantes et innovations en Recherche et Développement. » À partir de ce cadre général, vont se distinguer plusieurs par- cours, pensés dans une logique de professionnalisation, présen- tée comme suit :

« Faire l’expérience, dans le cadre d’un parcours profession- nalisant, de situations de réalisation, de simulation, de re- cherche et de collaboration (projets tutorés, mémoire, pro- totypes multimédia/crossmédia, mobilité, objets communi- cants, étude de cas, monographies d’entreprises, études et évaluations de dispositifs techniques). »

La mention Humanités Numériques est ainsi composée de cinq parcours professionnalisants qui visent notamment les métiers de l’information, de la com- munication et de l’édi- tion, auxquels la maî- trise des HN peut ap- porter une perspec- tive originale : Gestion Stratégique de l’Infor- mation ; Analyse et Va- lorisation des Usages Numériques ; Pratique Textuelles Numériques ; Créations et Éditions Nu- mériques ; Numérique : En- jeux, Technologies.

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Dans le même esprit, consistant à utiliser les HN afin de va- loriser des curricula professionnels, le Master proposé par l’UTC oc- cupe un positionnement historique particulier, du fait de la struc- ture particulière de l’UTC. Comme le rappelle, Jérôme Valluy, l’un des porteurs de cette filière à l’UTC : « Le défi est celui de l’hybrida- tion de l’informatique et des humanités. Dans presque tous les éta- blissements, ces matières sont disjointes. Les universités de techno- logies disposent d’un gros avantage : depuis des décennies, l’infor- matique y dialogue avec les sciences humaines. »51 Valluy détaille les apports des HN, tels qu’envisagés ici :

« Sur les 36 000 créations d’emplois anticipées sur les cinq prochaines années dans les secteurs informatique et numé- rique, une part croissante, aujourd’hui majoritaire (20 000), relève du numérique : web designer, community manager, dé- veloppeur web et mobile, analyste big data, architecte cloud computing, analyste cybersécurité, consultant référencement, etc. […] L’étude confirme le besoin de doubles compétences et de formations mixtes en informatique et sciences humaines.

L’informatique classique est demandée, mais en proportion décroissante dans les nouveaux emplois créés. Le numérique se développe en faisant appel aux données, méthodes et ré- flexivités numériques des sciences humaines, ainsi qu’à l’in- terprétation des big datas nécessitant des formations en “hu- manités numériques.” »

Les HN sont donc ici pensées comme un moyen d’unifier un cur- riculum articulant compétences en sciences humaines et en in- formatique, avec l’ambition de répondre aux « attentes des entre- prises » sur ce sujet. Dans cette logique, le Master « Digital Huma- nities » proposé par « Sciences Po Executive Education » est peut- être celui qui pousse le plus loin l’utilisation (le détournement ?) des Humanités Numériques comme un label permettant de po- sitionner une formation en sciences humaines de manière « mo- derne » et « professionnalisante ». On pourrait même aller plus loin : cette formation se présente sous le label des HN (ou plutôt des « DH »), alors qu’elle s’inscrit beaucoup plus dans le paradigme éducatif des EdTech52. Le fait que son fondateur soit Benoît Thieu-

51. Interview publiée sur le site promotionnel de l’UTC, 22 avril 2014 : interactions.utc.

fr/thematiques/science-de-linformation-information-automatique-decision/huma- nites-numeriques-hybrider-linformatique-et-les-sciences-humaines.html.

52. À la frontière entre HN et EdTech, on pourrait également citer le Master « AIRE » du CRI, qui se présente quant à lui comme un Master « EdTech », mais en ayant également recours à des éléments propres aux HN et à des acteurs qui se situent à la frontière et naviguent de manière fluide entre ces paradigmes. cri-paris.org/fr/master-aire-edtech.

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lin, directeur de l’agence La Netscouade53 en est d’ailleurs déjà un indice (il sera par la suite remplacé par Valérie Peugeot, membre comme lui du Conseil National du Numérique, sur lequel nous re- viendrons plus loin). Voici comment il présente cette formation :

« Le digital bouscule les acteurs en place, reconfigure les chaînes de valeur, fonde de nouveaux modèles économiques et bouleverse les pouvoirs. De nouveaux entrants à succès bous- culent les monopoles et créent des horizons d’opportunités.

La question, pour tout leader ou manager aujourd’hui, n’est donc plus de savoir si, mais bien quand et comment son ac- tivité va être impactée, puisque, dans sa forme ultime, cette (r)évolution digitale peut faire disparaître la société ou l’or- ganisation concernée. Cette incertitude peut être un facteur de stress ou d’inertie mais elle peut (et doit) aussi être une opportunité de penser et créer pour demain – à la condi- tion de disposer des connaissances, compétences et postures nécessaires. »

La présentation générale de la formation reprend cette ligne :

« Face à ce changement de paradigme sans précédent, l’Exe- cutive Master Digital Humanities permet aux professionnels de (re)penser leur stratégie organisationnelle, leur modèle d’affaires, leur environnement, leurs métiers et leurs pra- tiques pour les transformer en un ensemble d’opportunités.

Irriguée par le projet éducatif de Sciences Po, cette forma- tion repose sur deux approches qui fondent une conception intégrée du digital :

– le digital comme déterminant de la stratégie et facteur de rupture pour les organisations,

– une formation qui hybride sciences sociales et enjeux mé- tiers induits par le digital. »

On est ici assez loin des préoccupations définies dans le cadre des autres formations HN décrites plus haut. À l’intérieur de ce dernier cursus, les « Digital Humanities » ne constituent d’ailleurs qu’un module parmi dix autres, qui sont : Digital innovation ; Digi- tal transformation ; Digital Marketing ; Initiation au code ; Privacy et libertés numériques ; Design thinking ; Arts oratoires et rhéto- riques ; Hackathon ; Learning expedition.

53. lanetscouade.com. La Netscouade est une agence de communication spécialisée dans le marketing numérique.

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Au-delà des Masters, un impact limité

Derrière la visibilité et l’effet quantitatif global produit par le nombre de Masters (et donc d’étudiant·e·s formé·e·s), le passage du niveau recherche/doctoral au niveau Master entraîne une frag- mentation curriculaire significative, en termes de cadre épisté- mique, de dispositifs pédagogiques et de rapport à la question de la recherche et/ou de la professionnalisation.

À la suite de ces formations de niveau Master, et dans la logique de propagation descendante dans le curriculum évoquée plus haut, des formations aux HN apparaissent aujourd’hui au ni- veau Licence, indiquant que les HN s’inscrivent petit à petit dans la totalité du curriculum universitaire, pour aborder finalement le curriculum scolaire. L’apparition du paradigme des HN dans le curriculum scolaire est initiée par un organisme qui va jouer en la matière le rôle de passeur : le CNNum. Le Conseil National du Numérique est un organisme consultatif français créé en 2011. Il comprend initialement trente membres bénévoles choisis en rai- son de leurs compétences dans le domaine du numérique. Ceux- ci sont nommés en Conseil des ministres pour un mandat de trois ans. Il est censé être un organisme « indépendant », tout en étant placé sous la tutelle du secrétaire d’État chargé du numérique. Le CNNum a ainsi pour mission de « formuler de manière indépen- dante et de rendre publics des avis et des recommandations sur toute question relative à l’impact du numérique sur la société et l’écono- mie ». Il est en cela typique des nouveaux organismes de « gouver- nance » créés depuis le début des années 2000 par les gouverne- ments français, de type « haut conseil »54.

Dans sa première version, instituée par Nicolas Sarkozy, le CNNum avait pour fonction d’établir un pont entre le gouver- nement et les industriels du numérique : Pierre Kosciusko-Mo- rizet, fondateur de PriceMinister.com, en est l’instigateur, mais le conseil compte également dans sa première mouture Xavier Niel (fondateur de Free) ou Marc Simoncini (fondateur de Meetic).

Une nouvelle équipe est instituée par François Hollande après son élection, intégrant des entrepreneurs plus « compatibles » avec le nouveau gouvernement, dont Benoit Thieulin, qui le préside de

54. Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes ; Haut Conseil de la Santé Pu- blique ; Haut Conseil des finances publiques ; Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge ; Haut Conseil de l’Éducation, etc.

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