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La densité mammaire : un concept radiologique

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a densité mammaire est un concept radiologique, mais elle a un impact majeur sur la fiabilité de l’interprétation des mammographies. Elle préoccupe tout naturellement les radiologues, mais également les épidémiologistes et les gynécologues. Le sujet a suscité, et suscite encore, outre des études à objectifs épidémiologiques, de nombreuses présentations lors de congrès et mises au point [1].

Un sein dense est un sein qui apparaît “blanc” sur les mammographies parce que son contenu en graisse est peu important. Parmi tous les organes explorés par des méthodes d’imagerie, le sein présente beaucoup de particularités. Son développement est lié aux stimulations hormonales et son aspect varie tout au long de la vie. Il se développe à la puberté, subit des modifications cycliques pendant la période d’activité génitale et une involution en postménopause. L’utilisation de plus en plus fréquente du traitement hormonal substitutif (THS) chez des patientes ménopausées interfèr e avec l’involution postménopausique physiologique de la glande. La proportion de tissu grais- seux et de tissu fibroglandulaire varie avec l’âge. Les femmes jeunes ont globalement des seins plus denses que celles qui sont plus âgées parce qu’avec l’âge, la densité mammaire mammo- graphique diminue graduellement mais sans rupture abrupte dans le temps. Cependant, si glo- balement les seins sont plus graisseux chez les femmes plus âgées, il n’y a pas de limite d’âge pour ce qui est de la probabilité d’avoir un sein dense [ 2 ].

Wolfe le premier a, en 1976, essayé d’établir un lien entre l’aspect du sein et le risque de cancer [ 3 ]. Malgré les controverses concernant la reproductibilité de ses conclusions, une cor- rélation nette entre la densité mammaire et le risque de cancer apparaît dans les publications récentes [ 4 ]. Selon les différents auteurs, le risque relatif varie de 2 à 6 chez les femmes âgées

La densité mammaire : un concept radiologique

J. Stinès (1)

L

1. Service de radiodiagnostic, centre A l e x i s - Vautrin, avenue de Bourgogne, 54511 Va n d œ u v r e - l è s - N a n cy Cedex.

Breast density: radiologic concept

Mots clés : Sein, Mammographie, Technique, Densité, Risque de cancer.

Keywords : Breast, Mammography, Technique, Density, Cancer risk.

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de 40 à 59 ans [ 5 - 1 0 ]. On manque cependant d’études multivariées parce que la densité du sein n’est qu’un élément parmi des facteurs de risque.

En dehors de modifications de physiologie bien connues, il y a également des modifica- tions ethniques [11]. Les variations ethniques (de taille, de densité et de fréquence des can- cers du sein) devraient être prises en compte quand on organise un programme de dépistage du cancer du sein [12].

Il y a des discordances entre densité du sein et risque de cancer. C’est le cas par exemple des femmes qui ont un surpoids corporel, des seins plutôt graisseux, et qui ont cependant un risque augmenté de faire un cancer du sein. Il conviendrait peut-être aussi de distinguer la densité constitutionnelle de la densité acquise lors de la prise d’un THS et aussi de tenir compte de l’âge auquel on constate une hyperdensité du sein [13].

Au total, même si on admet que les femmes qui ont les seins denses font effectivement plus de cancers du sein, il faudrait certainement prendre en compte également les autres facteurs de sur-risque (âge, alimentation, THS, ethnie, antécédents familiaux, antécédents de masto- pathie à risque, etc.) et il est regrettable que l’on isole autant le facteur densité alors que mani- festement il n’est pas le seul indicateur de risque.

Le parenchyme mammaire, la technique mammographique et la visibilité des structures mammaires

Le sein est com- posé d’une enve- loppe cutanée qui contient les éléments glandulaires (lobules et canaux) et le tissu conjonctif de sou- tien. Celui-ci est fait de deux éléments

très différents : un tissu pauvre en fibres de collagène (tissu du manteau) qui subit d’importantes modifications physiologiques et un tissu périlobulaire dense qui se modifie beaucoup moins. Le ratio de la quantité d’épithélium comparé au tissu de soutien est de l’ordre de 1 à 6 [ 1 4 ]. L’ é p i- thélium glandulaire est difficile à voir directement sur les radiographies car il se confond avec les tissus de soutien.

Le tableau I donne les résultats de corrélation radiohistologique obtenue par micro-radiogra- phie [ 1 4 ]. Même dans ces conditions expérimentales, la distinction entre les différents éléments repérables histologiquement reste très difficile.

Le sein a une structure tridimensionnelle et l’image mammographique résulte de la somma- tion des différents éléments anatomiques. L’image finale résulte donc de la superposition de tous les éléments tissulaires du sein (graisse et tissus non graisseux). La structure fibreuse du sein est plus clairement identifiable quand la quantité de tissu graisseux est plus abondante. Les diff i c u l- tés de l’examen mammographique sont de distinguer des densités tissulaires proches ce qui cor-

Structures histologiques Traduction radiologique Épithélium galactophorique Peu perceptible

Tissu conjonctif Opacité dense, homogène

Fibrose Opacité linéaire, dense, irrégulière

Tissu graisseux Image claire, étendue

Tableau I.Résultats des confrontations anatomohistoradiologiques [14].

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respond à des effets de sommation d’éléments fibreux normale d’une distorsion architecturale ou d’une stroma-réaction d’origine tumorale. La définition d’un sein normal est difficile et l’on fait souvent des confusions entre ce qui correspond à des effets physiologiques et des modifications dystrophiques [15, 16]. Les densités des structures mammographiques sont basses et il y a un recouvrement entre les densités d’éléments normaux et des tissus pathologiques.

Le sein comporte cependant des macrostructures qui peuvent être identifiées avec une technique mammographique adéquate. Certaines d’entre elles ne deviennent cependant visibles que lors- qu’elles augmentent de taille ou qu’il y a une modification de leur absorption par les rayons X (contenu graisseux ou calcifications). La glande mammaire est composée de 15 à 10 lobes drainés par des canaux mammaires qui vont jusqu’au mamelon. Chaque lobe est composé de la conver- gence de canaux qui proviennent des unités ductolobulaires terminales qui sont entourées d’un tissu conjonctif peu dense qui constitue les lobes [ 1 7 ]. Ces unités ductolobulaires terminales ne sont pas normalement visibles, mais peuvent apparaître lorsque leur taille augmente ou qu’elles contiennent des calcifications. La proportion de tissus “canalaires” et lobulaires est très variable.

L’hydratation a un impact majeur sur la visibilité des structures normales du sein et des éléments pathologiques. Plus le sein contient de graisse et mieux les détails structuraux de l’image seront perceptibles.

On peut retenir des constatations cliniques et expérimentales :

– que le tissu conjonctif de connexion apparaît mal défini quand le sein est plus hydraté ;

– que des éléments tissulaires linéaires et denses apparaissent moins nets dans un environnement hydrique ;

–que des opacités peuvent apparaître ou disparaître en fonction du degré d’hydratation de la glande ; – et qu’il y a donc également un flou lié à la charge hydrique en mammographie [ 1 6 ].

On peut enfin ajouter que la répartition de graisse et de tissu fibroglandulaire est variable, et il y a tous les intermédiaires entre un sein presque complètement graisseux et un sein complètement fibroglandulaire, mais cette répartition n’a qu’une mauvaise corrélation avec l’âge, bien que chez les femmes âgées, la densité mammaire ait tendance globalement à diminuer [ 1 8 ].

Le radiologue sait donc qu’il y a deux éléments de densité très différents dans le sein : la graisse qui apparaît noire sur une mammographie et des éléments de densité hydrique : eau, tissu de sou- tien et éléments glandulaires en petite quantité (5 %) et que la quantité de “glande” qu’il y a dans un sein ne peut pas être prédite par la mammographie. Il n’est pas possible non plus de dire dans les 95 % “d’opacité” qui n’est pas d’origine glandulaire quelle est la proportion d’eau et de tissu conjonctif (pour s’en convaincre, il suffit de regarder des mammographies à différentes périodes du cycle ou les mammographies des patientes en décompensation cardiaque). Il semble, de plus, n’y avoir aucune corrélation entre la densité radiologique des seins et les éventuelles anomalies histo- logiques bénignes ou frontières qu’on peut y trouver [ 1 9 ]. On ne fait pas radiologiquement la dif- férence entre une surcharge hydrique et une prolifération épithéliale.

La densité du sein, telle qu’elle va apparaître sur le film analogique, dépend de la composition mais aussi de l’épaisseur du sein, des constantes radiologiques, du film utilisé et de son dévelop- pement. En numérique, elle dépend des algorithmes de traitement des images, du réglage des moni- teurs des consoles d’interprétation et de la reprographie. Les paramètres de l’exposition sont adap- tés selon la patiente, mais aussi selon les souhaits des radiologues qui peuvent avoir des préférences individuelles en termes de densité optique et de contraste.

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Le contraste radiologique est le résultat de différences d’absorption entre la graisse et les éléments fibroglandulaires principalement représentés par le tissu de soutien. La visibilité des différentes den- sités dépend de la technique. La perception visuelle du contraste dépend de la densité optique et l’on a montré qu’une densité optique plutôt élevée augmente la visibilité des petits cancers [ 2 0 ].

Sur un cliché sous-exposé (blanc), le sein apparaîtra beaucoup plus dense que sur un cliché sur- exposé plus “noir”. L’agrandissement géométrique permet d’augmenter le contraste de détail avec, comme conséquence, une meilleure visualisation des détails fins de l’architecture ainsi que des microcalcifications. Le contraste entre la graisse et les éléments de densité hydrique du sein est opti- misé en mammographie conventionnelle en utilisant une anode de Molybdène avec également une filtration Molybdène. Le contraste augmente quand on utilise un kilovoltage bas et lorsque l’on uti- lise une grille. Avec un kilovoltage bas, le contraste est augmenté, mais les temps d’exposition sont également augmentés ce qui expose à un risque de flou cinétique. Il en résulte également une aug- mentation de la dose d’irradiation à la glande. Pour des seins épais, il convient d’utiliser des fais- ceaux plus énergétiques, mais qui écrasent un peu le contraste [ 2 1 ]. Le rôle du récepteur d’image est de traduire la modulation de l’intensité du faisceau qui résulte de l’absorption des rayons X dans le sein. En principe, les différentes densités doivent être présentées dans la partie linéaire de la courbe sensitométrique des films, mais ce n’est pas toujours le cas, et il n’est pas rare que l’on n’ait pas une représentation correcte des modulations du faisceau primaire.

Des études préliminaires ont montré qu’en technique numérique, les proportions de seins grais- seux et de seins denses dans la classification BI-RADS ne sont pas significativement modifiées [ 2 2 - 2 4 ], mais ces données méritent d’être confirmées par des séries concernant les matériels les plus r é c e n t s .

Par ailleurs, on regarde ensuite les films sur un négatoscope. Selon la puissance et l’éclai- rement de celui-ci, la perception que le lecteur aura de la densité optique des films sera très variable. (La mesure des densités optiques avec un densitomètre ou en numérisant les films permet cependant d’avoir des valeurs objectives). Après acquisition d’images mammogra- phiques numériques, il faut faire l’interprétation sur des consoles dédiées. L’ i n f o r m a t i o n numérique subit un transcodage. L’aspect final du sein dépend des performances du détec- teur, des algorithmes de traitement de l’image et du réglage des moniteurs. Il y a donc de lar- ges possibilités de manipuler l’information contenue dans l’image brute originale qui traduit simplement les différences d’absorption des rayons X dans le sein.

À l’échelon individuel, il est difficile de définir avec précision à partir de quand un sein est dense ou non, ce qui peut être problématique quand on cherche à évaluer le risque qu’ont les femmes qui ont des seins denses de faire plus de cancers du sein que celles dont les seins sont graisseux, d’autant plus que le nombre de cancers est souvent faible dans les publications étudiées et qu’une variation de classification peut avoir des conséquences sur les conclusions finales.

Classifications des seins normaux

La densité du sein n’a en soi aucune connotation pathologique. C’est un terme qui est lié à des éléments fonctionnels. Les densités peuvent être localisées ou diffuses [25]. Il y a beau- coup de manières différentes pour classer les seins normaux. Wolfe les a classés en quatre catégories avec risque ascendant de cancer du sein (N1, P1, P2, DY) :

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– les seins N1 sont presque entièrement graisseux ; – dans les seins P1, on voit des travées denses “galac- tophoriques” qui occupent moins de 25 % de la sur- face du sein ;

– dans la catégorie P2 à risque élevé de cancer, les éléments opaques occupent plus de 25 % de la surface ; – la catégorie DY(malheu- reusement qualifiée de dysplasique) a le risque le plus élevé avec une densité supérieure à celle de la graisse et ne comporte pas d’éléments canalaires pro- éminents [26, 27] ;

Quelques études ont montré que la classification de Wolfe est assez bien cor- rélée avec les classifica- tions qui tiennent compte simplement de la densité [4].

La classification BI-RADS permet de classer les seins en quatre groupes pour lesquel- les le risque de rater un cancer en raison de l’importance de la densité mammaire ou du caractère hétérogène du tissu fibro-glandulaire augmente lors-que l’on passe de la caté- gorie 1 à la catégorie 4 [ 2 8 ] e t l’on utilise très largement (y compris dans le cadre de la campagne nationale de dépis-

tage des cancers du sein) le lexique BI-RADS de l’American College of Radiology:

– type 1 : le sein est presque complètement graisseux (figure 1a) ; – type 2 : il y a des opacités fibroglandulaires éparses (figure 1b) ;

– type 3 : le tissu glandulaire est dense et hétérogène et cela peut diminuer la sensibilité de la mammographie (figure 1c) ;

Figure I.

1a. Type BI-RADS 1. Le sein est presque complètement graisseux.

1b. Type BI-RADS 2. Il y a des opacités fibroglandulaires éparses.

1c. Type BI-RADS 3. Le tissu glandulaire est dense et hétérogène et cela peut diminuer la sensibilité de la mammographie.

1d. Type BI-RADS 4. Le tissu mammaire est extrêmement dense ce qui peut masquer une lésion à la mammographie.

a b

d c

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– type 4 : le tissu mammaire est extrêmement dense ce qui peut masquer une lésion à la mam- mographie (figure 1d).

Bien qu’il n’y ait pas de limite stricte entre les différentes catégories BI-RADS, il semble qu’il y ait une concordance interobservateurs relativement satisfaisante pour classer les seins en fonction de leur apparence mammographique [ 2 9 ].

La classification BI-RADS introduit la notion de sein hétérogène et il est évident que, plus ce sein est hétérogène, plus les difficultés d’analyse radiologique augmentent et le risque de méconnaître un cancer masqué par des éléments fibroglandulaires normaux. En réalité, un sein dense mais à structure homogène pose moins de problèmes radiologiques qu’un sein un peu moins dense et très hétérogène. Si on parle beaucoup dans la littérature de sein dense, on ne quantifie pas du tout l’aspect plus ou moins hétérogène du sein. Il semble pourtant que cela pourrait constituer également un élément à prendre en compte.

En 1997, Tabar a proposé une classification en cinq groupes qui dépend de l’architecture tridimensionnelle de la glande. Dans son étude, il y a une différence significative de risque de cancer entre les groupes à bas risque et les groupes à haut risque avec une corrélation avec les autres facteurs de risque (parité, nombre d’enfants, âge de la première naissance).

Boyd en 1998 a proposé une classification en six catégories selon la quantité de graisse.

Selon cet auteur, les mêmes facteurs sont à l’origine des cancers et d’une augmentation de densité du sein [ 3 0 ].

Une publication récente d’Harvey tend à démontrer que l’on peut faire une quantification visuelle ou par planimétrie, que les résultats sont identiques et que l’on trouve également dans cette étude une augmentation du risque en fonction de la quantité de tissu dense [ 3 1 ].

Une quantification est possible à partir d’images numériques [ 3 1 ]. Certains auteurs ont aussi essayé d’améliorer les choses en numérisant les films et en utilisant pour le classement des éléments de texture [ 3 2 - 3 4 ], mais il est difficile de dire si ces méthodes ont une cohé- rence entre elles. On peut bien entendu aussi utiliser des mammographies d’emblée numé- r i q u e s [ 4 ].

Pour des besoins scientifiques, on peut partiellement gommer les défauts de reproducti- bilité par exemple de la classification BI-RADS en utilisant des lecteurs multiples, ce qui a par exemple été fait par Vachon qui a également associé une estimation quantitative fondée sur un système d’aide informatisé [ 3 5 ].

On peut aussi quantifier les éléments constitutifs du sein avec les ultrasons ou l’IRM [ 3 1 ].

En corrélant mammographie et IRM, Wei a pu montrer que la densité mammaire est bien corrélée avec la quantité de tissu fibroglandulaire contenue dans le sein [ 3 6 ], mais aucune étude macroscopique n’est capable de faire la distinction entre l’eau, les tissus mammaires et au sein de ces tissus mammaires ce qui revient à la glande et ce qui revient au conjonctif.

Au final, on peut considérer que l’évaluation de la densité mammaire est très difficile, non standardisée, et que les classifications font, dans la très grande majorité des cas, appel à la subjectivité. On peut cependant espérer que, dans le futur grâce à la numérisation, on pourra se mettre d’accord sur des méthodes d’évaluation standardisées et automatisées éliminant le côté subjectif des classements par des observateurs humains.

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Le sein dense : les conséquences pour la prise en charge des patientes

Il reste à déterminer à quoi va réellement servir la notion de sein dense. Elle peut être uti- lisée pour des études de risques de cancer ou pour établir des stratégies de dépistage, mais on peut aussi s’en servir pour moduler individuellement les modalités de dépistage du cancer du sein (technique mammographique, rythme de surveillance et utilisation de méthodes d’ex- ploration complémentaire comme l’échographie).

Il est certain que la densité mammaire est effectivement un facteur prédictif indépendant de la sensibilité de la mammographie pour le diagnostic de cancer du sein [ 3 7 ] et le sein

“dense” et surtout “dense et hétérogène” représente, pour le radiologue, une réelle difficulté.

La diminution de sensibilité et de spécificité de la mammographie est bien étayée dans la lit- térature [38-40] et Egan, en 1977, signalait déjà la difficulté de détecter les cancers du sein dans les seins denses [ 4 1 ], mais une bonne technique radiologique permet, cependant, de voir correctement à “travers” certains seins dits “denses”. En technique numérique, lorsque l’on interprète sur console, on a une marge de réglages importante avec possibilité de modifier l’image en fonction des densités selon les zones du sein que l’on examine.

La presque totalité des unités de mammographie disposent d’un échographe à proximité.

L’utilité de l’échographie dans les seins denses a fait l’objet de multiples discussions. Les publications les plus récentes montrent cependant que le taux de détection de cancers non visibles en mammographie est loin d’être négligeable [29, 42, 43].

Le programme de dépistage français inclut l’examen clinique. C’est déjà une première réponse pour diminuer le nombre de faux négatifs de la radiologie. Il permet aussi le recours à l’échographie en cas de besoin (mais la limitation à 7 % des cas où l’on peut faire l’écho- graphie pose des problèmes et nécessite une réflexion dans le cadre du programme national français, et si l’on utilise l’échographie dans les seins denses, il faudra justifier cette pratique en l’évaluant) et l’on sait que la sensibilité de l’échographie s’améliore à mesure que le pour- centage de graisse contenu dans le sein diminue. Il n’y a donc aucune raison d’exclure du dépistage organisé une femme dont les seins sont plus denses, pas plus que celle qui a des seins volumineux ou dont la morphologie est mal adaptée à la mammographie, puisqu’en cas de difficulté, rien n’empêche un radiologue de faire une échographie complémentaire et de mettre en œuvre les mêmes moyens que dans un dépistage individuel.

Il y a bien des seins denses, mais à l’échelon individuel, il est difficile de classer certaines patientes. Il n’y a pas de problème pour caractériser les extrêmes (seins complètement grais- seux et seins très denses), mais entre ces situations, les limites entre les types BI-RADS sont imprécises et la plupart des radiologues ont du mal à ranger les seins dans un ou l’autre type.

S’il semble avéré que la densité du sein augmente le risque de cancer, pour évaluer réelle- ment ce risque, il faudrait aussi tenir compte des autres facteurs de risque qui peuvent être associés. Par ailleurs, avoir un sein graisseux n’est pas synonyme d’avoir un risque faible. Il faudrait disposer d’études multivariées pour dire si la densité du sein est un facteur indépen- dant et/ou quels autres facteurs il faudrait aussi prendre en compte [4]. En réalité, le radiolo- gue sait gérer globalement le problème que pose cette surdensité (une bonne technique radio-

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logique réduit le pourcentage de “seins denses” et l’obligation des contrôles de qualité a per- mis, chaque fois qu’il a été mis en place, d’améliorer la qualité des clichés). Il est tout à fait possible d’utiliser l’échographie dans le cadre du dépistage, mais il faut s’engager à évaluer cette pratique qui est d’ailleurs recommandée pour les femmes avec prédisposition génétique.

En France, pour l’instant, il n’y a aucune raison d’exclure du dépistage une femme quelle que soit la taille ou la densité de ses seins parce que les modalités de ce dépistage donnent des garanties d’efficacité et qu’elles se rapprochent en fait de celles d’un examen de dia- gnostic. Une prise en charge en dehors des campagnes les priverait de l’indispensable double lecture des clichés. Il n’y a aucune raison sérieuse non plus d’exclure du dépistage les fem- mes qui, sous THS, auraient vu augmenter la densité de leur sein. Le seul élément que l’on pourrait moduler est le délai entre les examens de dépistage. Si l’on veut des stratégies diffé- rentes selon les femmes, il faut tenir compte de l’ensemble des facteurs de risque et valider ces stratégies pour chaque catégorie. Cependant, le véritable débat ne sera pas seulement de nature scientifique ou technique, mais bien de nature médico-économique, et il restera à déter- miner si c’est la société ou le médecin à titre individuel qui doit décider de leur mise en œuvre en tenant compte de leur rapport coût-efficacité.

En tout état de cause, si l’on voulait véritablement adapter les modalités du dépistage à chaque femme en particulier, il faudrait tenir compte non seulement de la densité mammaire, mais également de tous les autres facteurs de risque et de la probabilité d’avoir ou non aff a i r e à un cancer évolutif.

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