Direction de la faune et des habitats Direction régionale Mauricie - Bois-Francs
La restauration du touladi des réservoirs de la Haute-Mauricie
Plan d'action 1995-1997
UTILISATION PAR LE TOULADI (Salvelinus namaycush) DE FRAYERES ARTIFICIELLES AMÉNAGÉES
EN ZONE LITTORALE PROFONDE
par Jean Benoît
et Jean Scrosati
Ministère de l'Environnement et de la Faune Trois-Rivières, septembre 1996
ai
La restauration du touladi des réservoirs de la Haute-Mauricie
P l a n d ' a c t i o n 1 9 9 5 - 1 9 9 7
UTILISATION PAR LE TOULADI (Salvelinus namaycush) DE FRAYERES ARTIFICIELLES AMÉNAGÉES
EN ZONE LITTORALE PROFONDE
Gouvernement du Québec Ministère de l'Environnement et de la Faune
Hydro
Québec
Référence à citer :
BENOÎT, J. et J. SCROSATI. 1996. Utilisation par le touladi (Salvelinus namaycush) de frayères artificielles aménagées en zone littorale profonde. Ministère de l'Environ- nement et de la Faune,»Direction de la faune et des habitats et Direction régionale Mauricie - Bois-Francs, Trois-Rivières Ouest, Rapport technique. 24 p. + annexes.
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Québec, 1996 ISBN: 2-550-30583-3
Ill
AVANT-PROPOS
Après avoir précisé les éléments de la problématique du touladi dans les réservoirs du Québec, un groupe de travail conjoint, Hydro-Québec (Vice-présidence Environnement et Collectivités et Vice-présidence région Mauricie) - ministère de l'Environnement et de la Faune (Direction régionale Mauricie - Bois-Francs et Direction de la faune et des habitats), concluait à la nécessité de préciser la situation du touladi dans les réservoirs de la Haute-Mauricie et d'apporter des solutions concrètes afin d'y assurer la restauration des stocks. Le plan de restauration des réservoirs de la Haute-Mauricie se veut également un projet pilote dont la démarche pourrait être appliquée à d'autres réservoirs, le cas échéant.
Une démarche structurée a été entreprise afin d'atteindre les objectifs suivants :
Compléter les informations environnementales (physiques, biologiques et socio- économiques) sur ces réservoirs;
Établir l'impact du marnage sur les habitats et les populations de touladi des réservoirs de la Haute-Mauricie, en particulier sur les sites de reproduction, et sur le processus de recrutement de l'espèce dans ces milieux;
Évaluer et proposer la mise en place de mesures d'atténuation via l'aménagement de l'habitat de reproduction du touladi et/ou à partir d'une gestion intégrée des eaux des réservoirs.
Un plan d'action, couvrant les années 1995 à 1997 inclusivement, établit la liste des études et des activités à réaliser dans le cadre d'une entente de partenariat entre Hydro- Québec et le ministère de l'Environnement et de la Faune. Cette entente établit le partage des rôles et des responsabilités de chacun des organismes et la présente étude s'inscrit dans le cadre de la réalisation des activités 1995 du plan d'action.
RESUME
L'aménagement de frayères artificielles à touladi, sur des sites localisés en dessous de la zone de marnage, est une façon d'atténuer l'impact environnemental de la gestion de l'eau des réservoirs. L'efficacité réelle d'une telle mesure n'ayant jamais été démontrée, la présente étude vise justement à valider l'utilisation de frayères de qualité aménagées à proximité de frayères naturelles, mais en zone plus profonde. Les aménagements du lac aux Sables ont servi de sites de validation.
La profondeur des frayères naturelles du lac aux Sables varie, en moyenne, de 0,1 mètre à 1,3 mètre. Les substrats observés y sont de faible qualité d'ensemble avec 73 % de substrats favorables et 8 % de non favorables. Les frayères aménagées sont nettement plus profondes, variant de 1,83 mètre à 2,5 mètres. Elles présentent un substrat idéal permettant une perméabilité optimum pour les oeufs de touladi.
L'utilisation par le touladi de l'ensemble des aires de fraie diffère selon les sites et l'origine naturelle ou artificielle des frayères. L'abondance des dépôts d'oeufs observée à l'automne 1995, à partir d'indices semi-quantitatifs, montre des différences notables entre les sites d'un même type de frayères et une forte variabilité entre les frayères naturelles et aménagées. Parmi les aspects les plus distinctifs de cette comparaison, on doit noter que les frayères naturelles sont les moins utilisées par le touladi, que les plus grandes densités d'oeufs ont été observées exclusivement sur les frayères aménagées, et que c'est sur celles-ci que l'on retrouve la plus grande variabilité des indices d'abondance.
Il est également intéressant de constater une très nette relation entre l'abondance des oeufs sur les frayères aménagées et la répartition des sédiments sur ces dernières.
La densité des oeufs observée sur deux frayères fut de 44,8 oeufs au mètre carré sur les sites aménagés comparativement à 11,4 oeufs au mètre carré sur les sites naturels. La présence sur certaines frayères artificielles de dépôts d'algues et de sédiments fins deux ans après leur aménagement soulève un problème de qualité à long terme de ce type d'intervention.
L'utilisation différente des frayères naturelles et aménagées apparaît directement reliée à la qualité relative de ces sites. La relation entre les indices d'abondance des oeufs sur les frayères aménagées et la répartition des sédiments fins sur ces dernières soulignent l'importance de cette variable dans la sélection des sites de fraie. La forte proportion de substrats favorables, la forte perméabilité de même que l'absence de sable, de gravier et de cailloux peuvent expliquer cette différence de qualité. Toutes ces constatations appuient l'hypothèse que la qualité du substrat est un facteur déterminant pour le comportement reproducteur du touladi et que la profondeur des frayères est un facteur secondaire dans le processus de sélection des sites de reproduction par cette espèce. Des recommandations sont proposées afin de préciser des avenues de recherche complémentaires.
Vil
REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier M. Michel Legault du Service de la faune aquatique de la Direction de la faune et des habitats (MEF) pour son rôle important dans la planification du projet et pour sa participation à la révision des textes. Nous remercions également M.
Roger Bérubé du Service milieu naturel de la Vice-présidence Environnement et Collectivités (Hydro-Québec) pour ses commentaires judicieux lors de la révision des textes. Le travail de Mme Claudette Monfette, du Service de l'aménagement et de l'exploitation de la faune, fut très apprécié lors du traitement de textes.
IX
TABLE DES MATIÈRES
Page
AVANT-PROPOS iii RÉSUMÉ v REMERCIEMENTS vii TABLE DES MATIÈRES ix LISTE DE LA FIGURE ET DES TABLEAUX xi 1. INTRODUCTION 1 2. MATÉRIEL ET MÉTHODES 4 2.1 Localisation du site d'étude 4 2.2 Protocole d'échantillonnage 4 2.3 Traitement statistique 8 3. RÉSULTATS 9 3.1 Caractéristiques des fray ère s naturelles 9 3.2 Comparaison des fray ères naturelles et aménagées 11 3.3 Utilisation des frayères 11 3.4 Dénombrement des oeufs 14 4. DISCUSSION 18 5. RECOMMANDATIONS 22 LISTES DES RÉFÉRENCES 23 ANNEXE 1 25 ANNEXE 2 53
XI
LISTE DE LA FIGURE ET DES TABLEAUX
Page
Figure 1. Courbes bathymétriques et localisation des frayères à touladi du lac
aux Sables 5
Tableau 1. Caractéristiques des frayères naturelles du lac aux Sables, résultats
de juin 1991 10 Tableau 2. Caractéristiques des frayères naturelles et aménagées à touladi du
lac aux Sables, résultats de novembre 1995 12 Tableau 3. Abondance relative des dépôts d'oeufs observés sur les frayères
naturelles et aménagées du lac aux Sables, novembre 1995 13 Tableau 4. Nombre moyen d'oeufs par parcelle échantillon observée sur les
frayères naturelles et aménagées du lac aux Sables, novembre
1995 15 Tableau 5. Dépôts d'oeufs estimés pour les frayères naturelles et aménagées
du lac aux Sables, novembre 1995 15 Tableau 6. Coefficient de corrélation de rang de Spearman reliant le nombre
d'oeufs par parcelle et les variables de l'habitat de fraie du touladi
du lac aux Sables 17
1. INTRODUCTION
Le touladi {Salvelinus namaycush) est un poisson dont les activités reproductrices s'effectuent presque exclusivement en milieu lacustre au moment de l'automne. La période de fraie varie selon la latitude mais a généralement lieu en octobre dans le Québec méridional. La période d'incubation des oeufs dure de 4 à 5 mois selon les températures de l'eau (Martin 1957; Chabot 1981). Pour notre région, la grande majorité des oeufs devrait éclore autour du 1er mars, cette dernière pouvant survenir aussi tôt que la fin janvier et aussi tard que le début avril (Chabot 1981; Wilton 1985).
Chez le touladi, les reproducteurs utilisent des sites de fraie très particuliers et la plupart de ces sites sont utilisés d'année en année. Les caractéristiques les plus communes des sites de fraie observés en Mauricie sont :
Substrat composé à plus de 90 % de cailloux, de galets et de blocs (40 mm à 500 mm de diamètre), propre (sans sable ni limon) et perméable aux oeufs (interstices abondants et profonds).
Site fortement exposé à l'action des vagues, ayant une pente relativement forte (>20 %) et localisé à proximité d'une zone profonde (>30 m).
Localisés près des rives et à moins de 2 mètres de profondeur.
Une telle description est très proche des caractéristiques moyennes observées sur un grand nombre de frayères en Ontario (MacLean et al. 1990).
La profondeur moyenne des frayères du Québec comme celle des frayères de la région n'a jamais été calculée. Elle est de 1,4 m pour les lacs de l'Ontario (MacLean et al.
1990).
2
Le comportement reproducteur du touladi rend l'espèce très vulnérable aux fluctuations du niveau d'eau telles qu'observées dans les réservoirs hydro-électriques du Québec. En effet, le type de gestion de l'eau qui y est pratiqué engendre une baisse hivernale des niveaux d'eau, ce qui est susceptible d'exonder les oeufs déposés durant l'automne en zone littorale. L'amplitude et la durée du marnage ont alors un rôle déterminant dans le recrutement et la survie d'une population.
Une étude récente au réservoir Mondonac en Haute-Mauricie a justement montré qu'un marnage de deux mètres exondait la presque totalité des oeufs déposés (Laçasse et Gilbert 1992). Elle a mis en lumière l'importance de la profondeur des sites de fraie sur la vulnérabilité du touladi dans les réservoirs régionaux. Ainsi, l'exploitation des réservoirs de la Haute-Mauricie aurait vraisemblablement un impact majeur sur le touladi et sur la pêche sportive à cette espèce.
Une revue récente de la littérature antérieure portant sur le comportement reproducteur et l'habitat de fraie du touladi et d'une espèce au comportement parfois similaire, l'omble chevalier (Salvelinus alpinus; Laçasse et Benoît 1996), a montré que, dans la majorité des cas, les caractéristiques du substrat constituent un facteur déterminant dans la sélection d'un site de fraie. Ainsi, à moins que le substrat ne soit de meilleure qualité en plus grande profondeur en terme de perméabilité et de propreté, il semble que ces espèces vont chercher à utiliser davantage les sites les moins profonds offrant un substrat propice à la fraie.
L'aménagement de frayères artificielles pour le touladi sur des sites localisés en dessous de la zone de marnage représente donc une mesure d'atténuation qui pourrait être appliquée dans les réservoirs de la Haute-Mauricie. La condition de mise en oeuvre serait que la perméabilité et la propreté du substrat sur les frayères artificielles soient supérieures à ce qu'on retrouve sur les frayères naturelles situées dans la zone de marnage, de façon à exercer une attraction chez les reproducteurs. Le potentiel de sédimentation apparaît comme le facteur le plus susceptible de limiter le succès à long terme des frayères artificielles, en dépit de caractéristiques de substrat initialement
3
optimales. Cette variable devra donc faire l'objet d'une attention particulière et d'un suivi ultérieur afin de s'assurer du maintien de l'efficacité des aménagements.
L'efficacité réelle des fray ères artificielles demande cependant une validation. Le but de la présente étude consiste justement à caractériser et à évaluer l'utilisation par le touladi de frayères de qualité aménagées à proximité de frayères naturelles, mais en zone plus profonde. Des frayères artificielles aménagées au lac aux Sables en février 1993 ont servi de site de validation. Leur utilisation a été vérifiée près de trois ans après leur aménagement.
Les objectifs précis du protocole d'étude sont de mesurer et de qualifier les aires de fraie artificielles et naturelles situées à proximité, tout en vérifiant leur utilisation comme frayères. Un décompte des oeufs est employé comme indice de mesure de l'utilisation.
Une analyse comparée entre les deux types de frayère permettra de statuer sur la validité des aménagements.
2. MATERIEL ET MÉTHODES
2.1 Localisation du site d'étude
Le lac aux Sables se situe dans la portion supérieure du bassin de la rivière Batiscan à l'intérieur des limites administratives de la municipalité de Lac-aux-Sables. Les coordonnées géographiques du plan d'eau sont 46°53'01" de latitude nord et de 72°21'48"
de longitude ouest.
Le lac a une superficie de 530 hectares, une longueur de 5,2 kilomètres, une altitude de 157 mètres, une profondeur moyenne de 21,7 mètres et une profondeur maximale de 41,5 mètres. Le profil bathymétrique du plan d'eau et la localisation des sites de fraie à touladi sont présentés à la figure 1. Les fray ères artificielles ont été aménagées à l'hiver
1993 à proximité de sept frayères naturelles (Scrosati et Benoît 1994).
2.2 Protocole d'échantillonnage
L'inventaire des frayères a eu lieu lors de deux campagnes- d'échantillonnage. Une première a eu lieu en juin 1991 et a permis de décrire l'état général de quatre frayères naturelles. La seconde campagne a eu lieu après la fin de la période de reproduction en novembre 1995 et visait l'observation de l'ensemble des frayères aménagées.
Les frayères furent visitées en embarcation motorisée. Deux plongeurs et un aide technique réalisèrent les inventaires. L'aide technique assistait les plongeurs lors du transport et de l'utilisation du matériel. Il participait également à la prise de données près de la rive.
Lors de la première campagne d'échantillonnage, l'équipe de travail a installé près de chaque frayère et ce, de façon parallèle à la rive, une corde graduée à tous les cinq mètres. Des transects formés par des cordes plombées graduées ont ensuite été placés
Municipalité Hé
LAC-AUXSABLES I Gouvernement du Québec
I Ministère de l'Environnement et de la Faune I Direction régionale Maurtcle - Bols-Francs
Emplacement des Frayères à Touladi
NOTES : Agrandissement à partir de cartes à l'échelle 1:20 000 et de photos de 1966.
Levés bathymétriques : 1973 Êquidistance des courbes : 10 pieds 0 500 1000 1500 2000 2500 pieds
Figure 1. Courbes bathymétriques et localisation des frayères à touladi du lac aux Sables
perpendiculairement à la corde graduée. Un axe de référence à deux dimensions (x,y) a ainsi été créé.
Le transect débutait à l'axe de référence et suivait le fond jusqu'à la limite de la fray ère naturelle. Les plongeurs inventoriaient les frayères à tous les demi-mètres avec l'aide d'un quadrat de 0,125 m2 (25 x 50 cm) dont le centre était placé sur le transect. Les variables évaluées furent : la distance de la rive, la profondeur et la nature du substrat. La distance de la rive était mesurée sur le transect et la profondeur avec l'aide d'une règle graduée à tous les décimètres.
La nature du substrat était établie en estimant approximativement (précision de 10%) la proportion des divers types de substrat à l'intérieur du quadrat. Les types de substrat utilisés pour cet inventaire sont ceux décrits par Archambault (1985) et sont :
Classe granulométrique Roche-mère
Grosses roches Galet
Gravier grossier Gravier moyen Gravier fin Sable Vase
Code 9 8 7 6 5 4 3 2
Diamètre des particules (mm)
•
>400 200 à 400
65 à 200 20 à 65
2 à 20 0,02 à 2 0,002 à 0,02
Le protocole de l'inventaire de novembre 1995 est très différent du précédent. L'équipe de travail se devait d'établir le niveau d'élévation des eaux du plan d'eau (règle de niveau du quai municipal). Elle a ensuite vérifié en plongée l'état général de la sédimentation et l'abondance des oeufs sur chaque site aménagé. Il a été retenu pour les fins de l'étude quantitative deux sites montrant une présence évidente et une répartition uniforme des oeufs.
Les plongeurs ont ensuite installé sur chaque frayère retenue trois repères permanents (tige métallique) disposés en triangle rectangle de façon à créer un plan de référence à deux dimensions (x,y). L'axe de référence (x) était localisé parallèlement à la rive en zone profonde. Ce dernier était divisé en sites échantillons équidistants d'un mètre. Pour les besoins du plan d'échantillonnage, un site sur deux a été retenu comme site de localisa- tion de transect. La première position a été choisie de façon aléatoire.
Sur chaque site de transect, il a été mis en place un axe (y) constitué par une corde plombée graduée au mètre. Le transect débutait à l'axe de référence et suivait le fond jusqu'à la rive. Les sites échantillons étaient disposés à tous les mètres et inventoriés avec l'aide d'un quadrat de 0,25 m2 (50 x 50 cm) placé de chaque côté du transect. Pour chaque parcelle échantillon, on relevait la profondeur, la nature et la perméabilité du substrat, la présence de sédiments et le nombre d'oeufs.
La profondeur des parcelles échantillons était mesurée avec l'aide d'une corde graduée (précision au décimètre) et reliée à un flotteur. La nature du substrat était établie en estimant approximativement (précision de 10%) les types de substrat à l'intérieur du quadrat. Les types de substrat utilisés sont ceux décrits au guide en usage au ministère (MEF 1994) et correspondant aux catégories suivantes :
Classe granulométrique Roc
Gros bloc Bloc Galet Caillou Gravier Sable Limon
Code R Bx
B G C Gr
S L
Diamètre des particules (mm)
>500 250 à 500
80 à 250 40 à 80
5 à 40 0,125 à 5
<0,125
8
La perméabilité du substrat était établie en estimant approximativement (précision 10 %) la proportion des interstices qui sont supérieurs à 10 cm de profondeur. La présence ou l'absence de sédiments fins était ensuite notée de façon qualitative. La densité des oeufs était compilée à partir d'un décompte total.
Avant le début de la prise de données, les plongeurs se sont concertés afin de calibrer leurs évaluations de la nature et de la perméabilité du substrat.
2.3 Traitement statistique
L'étude des relations qui existent entre les différentes variables de l'habitat de fraie du touladi et le nombre d'oeufs par parcelle a été réalisée avec l'aide d'une analyse de corrélation de rang de Spearman (Scherrer 1984). La nature semi-quantitative de certaines variables et l'absence pour certaines variables de distribution binormale expliquent l'usage de cette approche non-paramétrique.
Un plan d'échantillonnage a été conçu afin d'estimer le nombre total d'oeufs déposés sur chaque frayère. Le type de plan retenu s'appuie sur un échantillonnage aléatoire systématique (Scherrer 1983). La facilité de réalisation et du traitement des données explique le choix de cette approche. Les estimateurs utilisés sont ceux associés à une variable quantitative (Cochran 1977). Le descripteur écologique choisi est le nombre d'oeufs par parcelle échantillon. Le taux de couverture du nombre de parcelles (f= n\N) est de 25 %.
L'équation 10-61 de Scherrer (1984; n = 10 000 * z2a/2 * s2x / P.R.2 * x2) a été utilisée afin de vérifier le niveau d'erreur. L'erreur d'estimation acceptable devrait être comprise entre 15 et 30 %. Les intervalles de confiance des estimés du nombre moyen d'oeufs par parcelle ont été réalisés en tenant compte que ce nombre est une variable de dénombre- ment. L'équation 10-58 de Scherrer a été utilisée pour calculer l'intervalle de confiance.
3. RESULTATS
3.1 Caractéristiques des frayères naturelles
Les aires de fraie à touladi du lac aux Sables sont réparties sur tout le pourtour du plan d'eau (figure 1). Elles sont, pour la plupart, localisées sur une pointe bien exposée à l'action des vagues. Comme l'orientation du plan d'eau est dans l'axe des vents dominants de direction nord-est ou sud-ouest, les pointes sont bien exposées à l'effet érosif des vagues de forte amplitude. Les frayères sont également toutes situées à proxi- mité d'une zone profonde car le profil bathymétrique du lac est relativement uniforme avec une prédominance des zones profondes.
Les caractéristiques physiques de quatre frayères naturelles sont présentées au tableau 1.
La profondeur des frayères varie de nulle à moins de deux mètres. Ainsi, la partie supérieure des sites se trouve en moyenne à 0,11 mètre et la partie inférieure à 1,32 mètre. La pente des frayères est relativement forte avec une pente moyenne de 22 %.
Les sites de fraie sont de bonnes dimensions avec une longueur moyenne de 37,5 mètres et une largeur moyenne de 5,3 mètres. On trouvera à l'annexe 1 les données brutes observées sur les différentes frayères et à l'annexe 2, les représentations tridimensionnel- les des frayères étudiées.
Le substrat des frayères est assez hétérogène d'un site à l'autre car on observe sur les frayères inventoriées (tableau 1) une bonne variation des taux d'abondance par catégorie de substrat. La présence substantielle (+ 5 %) de sable, de gravier fin, de grosses roches et de roche-mère est un indicateur de la faible qualité d'ensemble de certaines frayères.
La faible proportion des substrats optimums tels le gravier grossier et le galet sur plusieurs sites confirme cette évaluation.
La situation moyenne des substrats observée sur les frayères du lac aux Sables (tableau 1) est la suivante : les substrats favorables à la fraie du touladi (40 mm à 500 mm), soit pour cet inventaire le gravier moyen, le gravier grossier et le galet, cumulent 73 % des
Tableau 1. Caractéristiques des frayères naturelles du lac aux Sables, résultats de juin 1991
Site*
1 2 3 9 Moy.4
Profondeur moyenne1
Haut
0,18 0,00 0,11 0,13 0,11
Bas
1,24 1,73 1,48 0,84 1,-32
Pente
%
17 28 20 22 22
Longueur (m)
40 60 10 40 37,5
Largear moyenne2
(m)
5,8 6,1 5,5 3,9 5,3
Superficie*
233 369 55 158 204
Substrat moyen*
Sab
15,5 % 1,7 % 0,5 % 1,9 % 4,9 %
GrF
2,9 % 0,5 % 0,5 % 9,2 % 3,3 %
GrM
10,4 % 16,4 % 6,4 % 14,1 % 11,8%
GrG
36,1 % 47,8 % 6,2 % 38,2 % 32, î %
Gai
34,4 % 33,5 % 36,2 % 13,2 % 29,3 %
GR
0,9 % 0 % 44,4 %
4,6 % 12,5 %
Rm
0 % 0 % 5,9 % 18,9%
6,2 % 1- Niveau d'eau inférieur de 30 cm en comparaison du niveau de novembre 1995 (référence = 0).
2- Estimé minimum en raison du niveau d'eau de juin.
3- Importance relative des catégories de substrat (grille de substrat non normalisé, Archambault 1985).
4- Moyenne non pondérée.
11
substrats observés tandis que les substrats non-favorables représentés par le sable et le gravier fin cumulent respectivement 8 % des substrats moyens. Les grosses roches et la roche-mère, des substrats peu favorables à la fraie du touladi, complètent cette description.
3.2 Comparaison des frayères naturelles et aménagées
Les résultats du tableau 2 permettent de comparer les caractéristiques des frayères naturelles et aménagées. Premièrement, on y remarque que les frayères aménagées sont nettement plus profondes que les frayères naturelles avec un écart moyen de 1,4 mètre.
Deuxièmement, le substrat moyen des frayères naturelles est très hétérogène en comparaison des frayères artificielles, le substrat de ces dernières ayant été sélectionné afin d'assurer des conditions idéales pour la reproduction du touladi. Finalement, le taux de perméabilité du substrat est très supérieur sur les frayères artificielles en raison des types de pierre utilisée lors de l'aménagement.
3.3 Utilisation des frayères
L'utilisation par le touladi des différents sites de fraie diffère selon les sites et l'origine des frayères naturelles ou artificielles. L'abondance relative des dépôts d'oeufs observée à l'automne 1995, à partir d'indices semi-quantitatifs (tableau 3), montre des différences notables entre les sites d'un même type de frayères et une forte variabilité entre les frayères naturelles et aménagées.
Parmi les aspects les plus distinctifs de cette comparaison, on doit noter que les frayères naturelles sont les moins utilisées par le touladi, que les plus grandes densités d'oeufs (indices A et B) ont été observées exclusivement sur les frayères aménagées, et que c'est sur les frayères aménagées que l'on retrouve la plus grande variabilité de mesure comme l'indique la diversité des indices d'abondance. Il est également intéressant de constater une très nette relation entre les indices d'abondance des oeufs sur les frayères aménagées et la répartition des sédiments sur ces dernières.
Tableau 2. Caractéristiques des frayères naturelles et aménagées à touladi du lac aux Sables, résultats de novembre 1995
8FN 9FN5 Moy.6
8FA 9FA Moy.6
Profondeur moyenne (m)2
Haut
0,40 0,46 0,43 1,81 1,83 1,82
Bas
1,03 1,13 1,08 3,03 2,80 2,92
Longueur 0*0
26 30 28 18 30 24
Largeur moyenne (m)
3,15 3,20 . 3,18 6,75 4,50 5,63
Superficie
82 96 89 122 136 129
Substrat moyen3
Sab
3,7 % 0,5 % 2,1 % 0 % 0 % 0 %
Gra
9,0 % 0 % 4,5 % 0,6 % 0 % 03 %
Cai
42,4 % 63,2 % 52,8 % 7,1 % 11,6%
9,4 %
Gat
35,9 % 33,0 % 34,5 % 90,8 % 88,3 % 89,6 %
Roc
9,1 % 3,3 % 6,2 % 1,5 % 0 % 0,8 %
Perméabilité du substrat4
12,8 % 14,4 % 13,6 % 90,2 % 84,1 % 87,2 % 1- FN : Fray ère naturelle; FA : Fray ère artificielle.
2- Niveau d'eau à la référence 0.
3- Importance relative des catégories de substrat (grille normalisée de substrat, MEF 1994).
4- Pourcentage des interstices rocheux dont la profondeur est de plus de 10 cm.
5- Seulement une partie de la frayère naturelle.
6- Moyenne non pondérée.
13
Tableau 3. Abondance relative des dépôts d'oeufs observés sur les frayéres naturelles et aménagées du lac aux Sables, novembre 1995.
Site#
Frayéres 1 2 3 5 6 8 9 Total
Indices Naturelles
D D C C E C C 4C; 20; 1Ë
d'abondance1
Aménagées C E C A D B B
IA; 2B; 2C; ID; IE
Présence d'algue brune et/ou de sédiments fins sur
les frayéres aménagées Présence localisée Présence uniforme Présence localisée
Aucune Présence uniforme Présence localisée Présence localisée
-
1- Légende :
A- Oeufs très abondants et uniformément répartis sur l'ensemble de la frayère.
B- Oeufs abondants et uniformément répartis sur l'ensemble de la frayère.
C- Oeufs peu abondants et uniformément répartis sur l'ensemble de la frayère.
D- Oeufs peu abondants et concentrés sur certaines parties de la frayère.
E- Absence d'oeufs.
14 3.4 Dénombrement des oeufs
Le nombre moyen d'oeufs par parcelle échantillon calculé sur les frayéres naturelles varie de 5,1 à 6,2 oeufs avec une valeur moyenne de 5,7. Sur les frayéres aménagées, le nombre moyen d'oeufs varie de 14,5 à 29,7 oeufs par parcelle avec une moyenne de 22,4 oeufs (tableau 4). De tels résultats correspondent à des densités moyennes de 11,4 oeufs au mètre carré pour les frayéres naturelles et de 44,8 oeufs au mètre carré pour les frayéres artificielles.
Les nombres moyens d'oeufs des frayéres naturelles sont comparables entre eux car les estimés sont mutuellement inclus dans leurs intervalles de confiance (Pr = 0,95). Les nombres moyens d'oeufs calculés sur les frayéres aménagées sont cependant signifïcative- ment distincts (Pr = 0,95) démontrant un niveau d'utilisation différent entre les deux sites.
Les dénombrements moyens calculés pour les frayéres naturelles et les frayéres artificiel- les sont à leur tour significativement distincts (Pr = 0,95), leurs intervalles de confiance s'excluant mutuellement. Il est à noter que les distributions de probabilité associées aux observations sur les deux types de frayéres ne sont pas de même type. Les dénombre- ments d'oeufs par parcelle sur les frayéres aménagées suivent une distribution contagieuse (binomiale négative) tandis que ceux sur les frayéres naturelles suivent une distribution plus régulière. Les deux dénombrements n'appartiennent donc pas à une même population statistique.
Les estimés des dépôts d'oeufs réalisés à partir des dénombrements par parcelle échantillon sont présentés au tableau 5. Au total, plus de 1 800 oeufs ont été déposés sur les deux frayéres naturelles et près de 11 000 oeufs sur les frayéres aménagées. En tenant compte que les femelles capturées sur les frayéres du lac aux Sables pondent en moyenne 3 000 oeufs (observations sur les fraies de 1992 et 1994) et que les dépôts d'oeufs totaux calculés pour les deux frayéres inventoriées cumulaient près de 13 000 oeufs, il est raisonnable de prétendre qu'un minimum de cinq femelles a utilisé ces sites.
15
Tableau 4. Nombre moyen d'oeufs par parcelle échantillon observée sur les frayéres naturelles et aménagées du lac aux Sables, novembre 1995
Site #
Frayeras
8 9 Moyenne
Nombre moyen d'oeufs Naturelles
6,2 (n = 38)
5,1 (n = 43)
5,7
Aménagées 29,7 (n = 63)
14,5 (n = 58)
22,4 {n = 121)
Intervalle de confiance (Pr - 0*95) Naturelles
4,2-8,4 3,7 - 6,7 4,4 - 7,0
Aménagées
23,0 - 36,5 10,1 - 18,818,0-26,8
Tableau 5. Dépôts d'oeufs estimés pour les frayéres naturelles et aménagées du lac aux Sables, novembre 1995
Site#
Frayéres 8 9 Moyenne
Dépôts d'oeufs Naturelles
. 948 (n = 38)
884 (n = 43)
1 832 (n - 81)
Aménagées 7 480 (n = 63)
3 352 (n = 58)
10 832
<n-121)
Intervalle de confiance (Pr » 0,95) Naturelles
587 - 1 309 578 - 1 190 l 400 - 2 264
Aménagées 5 783 - 9 177 2 151 - 4 553 8 692 - 12 972
16
L'analyse de corrélation de rang entre les dénombrements d'oeufs et les diverses variables d'habitats par type de frayère est présentée au tableau 6. Les résultats d'analyse sur les frayères naturelles regroupées indiquent une relation significative (Pr = 0,95) entre l'abondance du sable et les dénombrements d'oeufs. La corrélation est négative ce qui indique une concordance inversement proportionnelle, c'est-à-dire que le nombre d'oeufs diminue avec l'augmentation de l'abondance du sable. Les coefficients de corrélation calculés pour les frayères naturelles indiquent une relation hautement significative (Pr = 0,99) entre les dépôts d'oeufs et la profondeur. Cette corrélation est négative démontrant une abondance plus grande des oeufs dans les parties supérieures de ces frayères.
Les corrélations de rangs entre les données observées sur les frayères naturelles et aménagées regroupées (tableau 6) présentent plusieurs relations hautement significatives (Pr = 0,99). Une première association relie les dénombrements d'oeufs à la profondeur.
En raison d'une corrélation positive, l'abondance des oeufs augmente avec la profondeur.
La seconde association met en évidence une augmentation du nombre d'oeufs avec l'importance du galet. Une troisième relation lie de façon inverse l'abondance des oeufs et des cailloux. Finalement, il existe une correspondance entre le nombre d'oeufs et la perméabilité du substrat, le nombre d'oeufs augmentant avec la perméabilité.
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Tableau 6. Coefficient de corrélation de rang de Spearman reliant le nombre d'oeufs par parcelle et les variables de l'habitat de fraie du touladi du lac aux Sables (relation hautement significative en gris, Pr = 0,99)
Site#x
9FN (n = 43)
8FN (n = 38)
FN (n = 81)
9FA (n = 58)
8FA (n = 63)
FA ( n = 1 2 1 )
FT (n = 202)
Profondeur - 0,2854 - 0,0414 - 0,0948 - 0,507 i
« 0,3975 - 0,3055 0,1955
Substrat Galet
-0,1124 0,0586 - 0,0271 - 0,2172 0,0066 - 0,0088 0,2853
Cailloux 0,1511 0,1280 0,1242 0,2222 0,1343 0,0586 - 0,1873
Gravier -0,1160 -0,1591 - 0,0987
NA2
NA NA NA
Sable -0,2631 - 0,2735 - 0,251Ô3
NA NA NA NA
Perméabilité du substrat
-0,1090 0,1272 - 0,0027
0,0184 0,0945 0,1384 0,3619
1- FN : Fray ère naturelle; FA : Fray ère artificielle; FT : Frayère artificielle et naturelle.
2- NA : Non applicable.
3- Relation significative (Pr = 0,95).
18 4. DISCUSSION
Les caractéristiques des frayères naturelles du lac aux Sables, telles l'exposition aux vagues, la proximité d'une zone profonde, la profondeur moyenne et la pente, sont dans l'ensemble comparables à la situation commune en Mauricie. Cependant, les observations sur les substrats indiquent que 73 % d'entre eux sont favorables à la fraie du touladi et que 8 % des substrats ne sont pas favorables, cette dernière catégorie étant principalement composée de sable (5 %). Ce dernier résultat diffère substantiellement de la situation régionale où l'on observe un taux de 90 % de substrat favorable avec absence de sable.
L'importance relative des substrats observés sur les frayères à touladi est un bon indicateur de la qualité des sites de fraie d'un plan d'eau car parmi tous les paramètres descriptifs, c'est le plus variable et possiblement, le plus limitant pour l'espèce. Les caractéristiques des substrats moyens observés sur les frayères naturelles du lac aux Sables permettent de conclure que leur qualité est plutôt faible. C'est ce constat qui en
1993 avait amené la réalisation des frayères artificielles.
La comparaison des frayères naturelles et aménagées en zone plus profonde a mis en relief des différences importantes de qualité entre les deux types de frayère. La forte proportion des substrats optimums, la perméabilité du substrat aux oeufs et l'absence de sablé et de gravier observées sur les frayères aménagées en font des sites de reproduction de meilleure qualité que les frayères naturelles.
L'utilisation différente des frayères naturelles et aménagées apparaît, à prime abord, directement reliée à la qualité relative de ces sites. La forte proportion de substrats favorables, la forte perméabilité de même que l'absence de sable et de gravier expliquent cette différence de qualité. La relation entre les indices d'abondance des oeufs sur les frayères aménagées et la répartition des sédiments fins sur ces dernières soulignent l'importance de cette variable dans la sélection des sites de fraie.
19
L'abondance variable d'algues brunes et/ou de sédiments fins sur les frayères artificielles est dépendante des processus d'érosion et de l'hydrodynamique du lac aux Sables. Le processus de déposition des sédiments fins est un phénomène complexe qui est principalement influencé par la direction et la force des courants lacustres. L'importance des algues brunes sur le substrat péri-riverain est fonction de l'influence érosive des vagues.
La présence sur certaines frayères de dépôts d'algues et de sédiments fins moins de deux ans après leur aménagement soulève le problème de leur maintien à long terme. Des dépôts de sédiments trop importants risquent de provoquer une désaffection de ces frayères par le touladi. Seul un suivi sur plusieurs années permettrait d'établir la durée de leur utilisation.
Les estimés d'abondance des oeufs réalisés sur les frayères aménagées sont de toute évidence sous-estimés en raison de la difficulté de compter les oeufs à plus de 30 centimètres dans le substrat. Le nombre et la profondeur des interstices permettent l'accès aux oeufs mais limitent les capacités d'observation des plongeurs dans la portion profonde du substrat. Les dénombrements sur les frayères aménagées ont donc une valeur minimale. Un tel biais engendre également une sous-estimation de l'écart entre les dénombrements sur les frayères naturelles et celles aménagées.
La comparaison des dénombrements d'oeufs entre les frayères naturelles et celles aménagées confirme les différences qualitatives observées sur l'ensemble des sites de fraie. Les différences de distribution des oeufs entre les deux types de frayères sont particulières et proviendraient d'une distribution anormale des oeufs sur les frayères naturelles. Les oeufs étant pondus en paquet, il est normal d'observer une distribution contagieuse des oeufs comme observée en zone plus profonde. À notre avis, la distribution régulière des oeufs résulterait de l'action des vagues lors de la ponte. Les oeufs seraient éparpillés plus régulièrement sur les frayères en faible profondeur où l'action des vagues aurait un effet dispersant. La faible perméabilité du substrat sur les frayères naturelles et la flottabilité des oeufs favoriseraient un tel phénomène. L'effet des
20
vagues est d'ailleurs facilement observable sur les parcelles échantillons immédiatement situées près des rives où l'on observe une dispersion régulière des oeufs sur la portion riveraine des parcelles.
Les estimés du nombre d'oeufs par frayère doivent être utilisés avec discernement car on connaît peu de choses sur la prédation effectuée sur les oeufs. Lors des dénombrements, il a été observé fréquemment la présence de perchaude {Perça flavescens), de barbotte brune (Ameiurus nebulosus), de lotte (Lota Iota) et de plusieurs espèces de cyprins dans le substrat des frayères aménagées. Ces poissons sont tous des prédateurs potentiels des oeufs de touladi. De plus, le substrat des frayères naturelles offre une faible protection pour les oeufs. Tous ces éléments sont donc susceptibles de biaiser les estimés d'abondance et la comparaison entre les deux types de frayères. Le court intervalle de temps entre la fin de la période de fraie du touladi et le début de nos inventaires limite cependant l'importance de ce biais.
L'analyse de corrélation de rang a mis en évidence plusieurs relations entre l'abondance des oeufs et les variables de l'habitat. La relation négative entre les dénombrements d'oeufs et la quantité de sable appuie les connaissances antérieures qui affirment que ce substrat n'est pas recherché par le touladi pour sa reproduction. La diminution d'abondance des oeufs en fonction de la profondeur des quadrats sur les frayères aménagées montre une utilisation plus grande des parties supérieures de ce type de frayère. Des observations non quantifiées sur la présence de sédiments fins et sur les portions profondes des frayères aménagées expliqueraient cette relation.
La plus grande utilisation des frayères aménagées par le touladi du lac aux Sables apparaît directement reliée à la qualité relative de ces sites. La forte proportion de substrats favorables sur les frayères artificielles, leur forte perméabilité de même que l'absence de sable et de gravier expliquent cette différence de qualité. La relation entre les indices d'abondance des oeufs sur les frayères aménagées, et la répartition des sédiments fins sur ces dernières mettent en évidence l'importance de la qualité des substrats dans la sélection des sites de fraie. L'analyse de la corrélation de rang démontre à son tour l'importance
21
du galet et de la perméabilité du substrat dans le processus de sélection des sites de reproduction. Toutes ces constatations appuient l'hypothèse que la qualité du substrat est un facteur déterminant dans le comportement reproducteur du touladi et que la profondeur des frayères est un facteur secondaire dans le processus de sélection des sites de reproduction par cette espèce.
Au bilan, l'aménagement de frayères artificielles pour le touladi sur des sites localisés en dessous de la zone de marnage représente une mesure potentielle d'atténuation dans la gestion des réservoirs hydroélectriques. La condition de mise en oeuvre serait que la perméabilité et la propreté du substrat sur les frayères artificielles soient supérieures à ce qu'on retrouve sur les frayères naturelles situées dans la zone de marnage, de façon à exercer une attraction chez les reproducteurs. Le potentiel de sédimentation apparaît comme le facteur le plus susceptible de limiter le succès à long terme des frayères artificielles, en dépit de caractéristiques de substrat initialement optimales. Une étude préliminaire de la sédimentation dans les zones à aménager pourrait prévenir ce problème.
Des mesures complémentaires demandant une exploitation particulière des eaux des réservoirs pourraient permettre le nettoyage du substrat des frayères artificielles et assurer la réussite des aménagements. Le rehaussement tardif des réservoirs lors des crues d'automne permettraitTautonettoyage du substrat des sites de fraie en deçà de la zone de marnage. Cette mesure limiterait également l'accès d'une partie des sites de fraie naturels aux reproducteurs.
22 5. RECOMMANDATIONS
À la lumière des résultats de cette étude et afin de compléter la documentation sur les outils d'intervention sur les aires de reproduction du touladi, il serait souhaitable de :
r 1) Développer des techniques d'obstruction des frayères riveraines afin que le touladi
utilise des sites en profondeur.
2) Valider les techniques de nettoyage de frayère à touladi afin de faciliter leur utilisation à long terme.
3) Vérifier périodiquement la sédimentation fine sur les frayères en relation avec leur utilisation par le touladi.
23
LISTES DES RÉFÉRENCES
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CHABOT, J. et J. ARCHAMBAULT. 1981. Quelques caractéristiques de frayères à touladi du lac St-Patrice, comté de Pontiac. Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du Québec, Service de l'aménagement et de l'exploitation de la faune, région de l'Outaouais. 19 p.
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LAÇASSE, S. et L. GILBERT. 1992. Évaluation de l'impact du marnage sur la reproduc- tion du touladi au lac Mondonac. G.D.G. Environnement ltée, pour le Service activités d'exploitation, vice-présidence Environnement, Hydro-Québec. 82 p. et annexes.
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24
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25
ANNEXE 1
Caractéristiques des aires de fraie à touladi du lac aux Sables Données brutes
â
CARACTERISATION DES AIRES DE FRAIE - LAC AUX SABLES - 1991 FRAYERE TRANSECT
# #
PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R %R_m %M_O 1
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 -
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0
0.85 0 0.1 0.25 0.35 0.35 0.45 0.7
100 100 100 25 10 10 5 5 10 20 20 30 10 10 90 50 30 40 20 10 10 - 10 10 10 10 30 10 10
10
50 60
15
10 40 50 60 80 50 80
60 80 80 95 95 90 75 60 50 40 50
20 30 30 10 10 10 90 30 50 90 50
10 10
5 20 20 40 40 10
30
60 20 40
FRAYERE TRANSECT PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R %R_m %M_O 1
1 1 1 1 1 1 . 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
2 - 2 - 2 - 2 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 -
6.5 7.0 7.5 8.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 7.5 8.0 8.5 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
0.75 1.05 0 0.1 0.15 0.25 0.4 0.45 0.35 0.75 1.05 0 0.15 0.25 0.4
10 10 100 40 40 80 20 20 20 10 10 10 10 10 10
50 100 50 40 40 40 20 20 10 10
40 40 10
30 40 10
20 20 10 70.
60 60 70 70
50 10
10 30 60 40 40
100 70 80
20 20
40 40 80 80 50 40 20
20
30 40 90
20 10
10
20 20 50 50 10 10 50 80 100 50
20 40 20
50
IV) CO
FRAYERE TRANSECT PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R %R_m %M_0 1
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 4 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 5 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 -
4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
0.5 0.5 0.7 1.1 0 0.1 0.25 0.35 0.5 0.5 0.85 1.35 0 0.1 0.2 0.25
10 10
10
50 40 30 30 30 10
10 50 10 30 20 30 10 10 10
10 10 10
30 10
20
10 10 10
20 60 20 20 10
40 40 100 80 100 40
10 20 20 20 90 30 30 30
40 50 50 50 70 10 10
50 50 20 50
40 40 50 50 50 50 50 50 100 100 100 90 50 20 10 20 20 80 80
r\3
FRAYERE TRANSECT ft It
PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R %R_m %M_O 1
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 6 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 7 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 -
4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
0.5 0.75 1.5 1.35 1.8 0 0.1 0.2 0.25 0.4 0.5 1.25 2.2 0 0.15 0.25 0.4
20
25 25 20 20 50 25 50 50 20 10
25 100 10 10 10 80 80 80 60 20
10
20 80 10
20
10 40 10 20
20
50
30 30 25 25 20 20 10 70
40 40 40 10
40 40
50 100 100 100 50 75 75 50 , 50 50 50 25 40 20 60 10 100
100 100
75 50 50 50 10 20 20 20
CO
o
FRAYERE TRANSECT PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R_m %M_O 1
1 1 1 1 1 1 1.
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 2 2 2 2 2 2 2
8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 8 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 9 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 -
4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
0.5 0.5 1 1.55 0 0.2 0.25 0.35 0.5 0.75 1.25 2 0 0.15 0.3 0.35
20
10 50 100 20 20 80 50 25 25 10 20 20 10 20 50
20 20
40 20
10
60 20
50 50 10 10 10
40 60 100 80
80
80 50 25 50 30 30 60 60
50 50 50 40 40 80 20 20
20 20 20 90 50
20 10 25 50 40 40 50 40 90 40 80 50
50 50 50 10 80 20
FRAYERE TRANSECT PROFOND, m
SUBSTRAT
%S %Gr_f %Gr_m %Gr_g %G %R %R_m %M_O 2
2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2
1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 1 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 2 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 - 3 -
4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0 5.5 6.0 6.5 7.0 7.5 8.0 8.5 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5
0.55 1.1 1.4 0 0.2 0.35 0.4 0.55 0 1.2 1.6 2.3 2.8 0 0.15 0.3
10 70 70 100
50
10
10 10
50 30 15 10 10
10 10 10 20 20
10 10
100 40 60 50 40 40 40 20 80 40
90 90 40 40 80 50
90 90 90 20 30
10 25 50 50 60 80 100 20 60 100 100 100 100 100
50 40 50
100 50
CO IV)
