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Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ?. La dérive critique de l’anthropologie médicale

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Bulletin Amades

Anthropologie Médicale Appliquée au Développement Et à la Santé  

58 | 2004 58

Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ?

La dérive critique de l’anthropologie médicale

Raymond Massé

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/amades/582 DOI : 10.4000/amades.582

ISSN : 2102-5975 Éditeur

Association Amades Édition imprimée

Date de publication : 1 juin 2004 ISSN : 1257-0222

Référence électronique

Raymond Massé, « Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ? », Bulletin Amades [En ligne], 58 | 2004, mis en ligne le 06 février 2009, consulté le 20 septembre 2020. URL : http://

journals.openedition.org/amades/582 ; DOI : https://doi.org/10.4000/amades.582 Ce document a été généré automatiquement le 20 septembre 2020.

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Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ?

La dérive critique de l’anthropologie médicale

Raymond Massé

1 Dans la foulée de l’invitation faite par Jean Benoist et Alice Desclaux pour débattre de la

« routine » et de l’essoufflement de l’anthropologie médicale, je me permets un plaidoyer pour une reculturalisation partielle de l’étude des rapports de l’individu avec la maladie. Pourquoi plaider pour un concept désormais honni par l’anthropologie contemporaine ? Et bien, justement peut-être notre discipline se doit de défendre non seulement le pluralisme dans les modes de vie, mais aussi la pluralité des perspectives théoriques et méthodologiques. Comme toute discipline prétendant étudier des phénomènes complexes, multidimentionnels, elle doit éviter les ornières des modes et du prêt-à-penser. Aussi parce que si les anthropologues veulent jouer leur rôle de traducteurs culturels, s’ils souhaitent prêter leur voix aux discours profanes et prétendre à la défense de la diversité (culturelle, religieuse, politique), ils doivent d’abord éviter les dogmatismes et les anathèmes trop aisément portés sur les concepts et théories.

2 Les problèmes de santé, voire de santé publique, sont-ils tous réductibles à des problèmes de répartition asymétrique des pouvoirs ? Si personne ne nie que l’amélioration de la santé des populations passe par une plus juste distribution des richesses, des expositions à des conditions de vie (ou de travail) à risque, faut-il réduire la santé publique à un champ d’action politique ? Plus est, l’anthropologie doit-elle recentrer son mandat de recherche sur la seule dénonciation des rapports de pouvoir ? Quelle est alors sa spécificité dans le champ des sciences sociales de la santé ? L’analyse des représentations sociales (ou des réseaux sémantiques, des savoirs populaires, des symboliques) de la maladie, des soignants ou des institutions de soins, en redonnant la parole aux malades eux-mêmes, en insistant sur la description du vécu quotidien, en analysant les impacts de la maladie sur l’environnement familial et social immédiat, bref en redonnant une place à l’analyse herméneutique, interprétative et à une phénoménologie du vécu des infortunes, ne constitue-t-elle pas, en soi, une stratégie de

Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ?

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modification des rapports de pouvoir ? Recadrer l’humain comme être de culture, ne représente-t-il pas une avenue complémentaire à sa définition comme être politiquement et économiquement dominé ? Une anthropologie qui dévalorise l’analyse du travail de la culture sur la signification de la santé et de la maladie, qui en arrive à n’y voir qu’un culturalisme‚ négativement connoté, a-t-elle encore un avenir ? Quelle est la place d’une anthropologie de la santé malade de la culture ? 

3 Or, la tendance lourde observée en anthropologie médicale au cours des vingt dernières années en est une de basculement vers l’économie politique de la santé. Une telle

« dérive » confirme l’importance d’une perspective plus englobante qui est celle d’une anthropologie soucieuse d’analyser la maladie à travers les diverses épaisseurs de la réalité vécue par le malade, soit l’articulation entre les multiples dimensions de la maladie : 1) explications causales référant aux facteurs macrosociétaux et structurels (surtout politiques, économiques), 2) vécu concret des malades (ex : conditions concrètes d’existence dans le quotidien du travail, des rapports sociaux, des conditions de logement) et 3) interprétations du sens (représentations culturelles de la maladie).

Là réside, je crois, la spécificité de l’approche anthropologique, c’est-à-dire dans sa capacité à recadrer les leçons à tirer de terrains minutieux, réalisés par des chercheurs sensibles au vécu, préoccupés par le décodage culturel, le tout recontextualisé dans le cadre des structures politiques et économiques nationales et internationales. En fait, l’anthropologie de la santé doit lutter contre tous les réductionnismes, qu’ils soient culturels, économiques ou politiques. Voir la maladie comme un simple champ d’expression du potentiel d’interprétation culturelle, comme simple résultante d’inégalités économiques ou comme une forme de résistance aux biopouvoirs ne peut conduire qu’à des réductionnismes ou à des surinterprétations du sens. Le défi pour l’anthropologie réside, croyons-nous, dans la conjugaison des niveaux d’analyse macro et micro, du politique et du culturel, de rapports de pouvoir et du vécu quotidien, du sens construit par le chercheur et du sens construit par le malade lui-même.

AUTEUR

RAYMOND MASSÉ

Directeur, Département d'anthropologie, Université Laval, Québec, Canada

Débat – L’anthropologie médicale, quels acquis, quels horizons ?

Bulletin Amades, 58 | 2004

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