FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
■A-ISnSTÉE] 1902-1903 N° 2
PAR LES PRÉPARATIONS IGDURÉES
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenuepubliquementle 5 Novembre 1902
par
Pierre-Joseph-Victor-Jean BUFOl'îîT Élève du Service de Santé de la Marine
Externe des Hôpitaux Né à Toulon (Var), le 23 Juin 1878.
MM. BADAL, Examinateursde la Thèse ( DUPOU
Y^'
CABANNES,
professeur.. Président.
professeur.. J agrégé >Juges.
agrégé )
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE A. LAPON
41, Rue de Metz, 41
1902
FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUI
M. de NABIAS Doyen. | M. PITRES Doyen honoraire.
PROFESSEURS
MM. MICÉ )
DUPUY > Professeurs honoraires.
MOUSSOUS Clinique interne I
/ rl 1 Hhb.
Cliniqueexterne SLANELONGUE
Pathologie etthérapeu¬
tiquegénérales VERGELX.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecineopératoire.. MASSE.
Cliniqued'accouchements LEFOUR.
Anatomiepathologique COYNE.
Anatomie CANNIEU.
Anatomie générale et
histologie VIAULT.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
Médecine légale MORACHE.
Physique médicale BERGONIE.
Chimie BLAREZ.
Histoirenaturelle GUILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
Matière médicale de NABIAS.
Médecineexpérimentale FERRE.
Cliniqueophtalmologique BADAL.
Clinique des maladies chirur¬
gicalesdes enfants PIÉCHAUD.
Clinique gynécologique BOURSIER.
Clinique médicale des
maladies des enfants. A. MOUSSOU Chimiebiologique DENIGES.
Physiquepharmaceutique SIGALAS.
Pathologie exotique.... LE DANTEC.
AGRÉGÉS EN EXERCICE
section de médecine(Pathologie interne etMédecine légale).
MM. MONGOUR.
CABANNES.
Pathologie externe
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section dechirurgie et accouchements MM. DENUCÉ.
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BEGOU1N.
Accouchements MM. FIEUX.
ANDERODIAS.
Anatomie.
section des sciences an atomiques etphysiologiques
MM. GENTES. I Physiologie MM. PACHO.N
CAVALIE. | Histoire naturelle .. BEILLE.
section des sciencesphysiques
Chimie M. BENECH. | Pharmacie M. DUPOll
COURS COMPLÉMENTAIRES :
Clinique des maladiescutanées etsyphilitiques MM.
Clinique des maladies des voies uri'naires
Maladies dularynx,des oreilles etdu nez Maladies mentales
Pathologie externe Pathologieinterne Accouchements
Physiologie
Eiibryologie Ophtalmologie
Hydrologieetminéralogie
Pathologieexotique
Le Secrétairede laFacidté
DUBREUILH.
POUSSON.
MOURE.
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DENUCE.
RONDOT.
ANDERODIAS.
PACHON.
PRINCETEAU.
LAGRANGE.
CARLES.
LE DANTEC.
LEMAIRE.
Par délibération du 5 août 1870, la Faculté aarrêtéquelesopinions émisesdanslesThèsesV1
sont présentées doivent être considérées connue propresà leurs auteurs, etqu'ellen'entend le"
,onnerniapprobation ni improbalion.
A LA MÉMOIRE DE MES GRANDS PARENTS
A MON PÈRE ET A MA MÈRE
Faible témoignagede monprofond respect ei de mon éternelle reconnaissance.
A TOUS LES MIENS
Qui m'ont aimé où témoigné quelque intérêt.
A MES CAMARADES du Corps de Santé de la Marine
et de l'Année Coloniale.
.vr.:nr l. ^ -
■
m
A mon Maître
MONSIEUR LE DOCTEUR ARNOZAN
PROFESSEUR DK,THERAPEUTIQUEA LA FACULTÉDEMÉDECINEDEBORDEAUX MÉDECIN DES HOPITAUX
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR BADAL
PROFESSEUR DE CLINIQUE OPHTALMOLOGIQUE A LA FACULTÉDE MÉDECINE
DE BORDEAUX
CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
Cinq années se sont écoulées depuis que nous avons
entrepris l'étude de laMédecine.Durant ce temps qui,sous certains rapports fut trop long, et bien trop court sous
d'autres, nous avons vécu des heures que notre vie d'étu¬
diant a rendues parfois bien gaies, mais que nous avons
essayé d'employer de notre mieux pour nous montrer
digne de ce titre de Docteur que la Faculté va aujourd'hui
nous concéder.
C'est à l'Ecole annexe.de Toulon que nous avons débuté
et nous conservons un excellent souvenir des Professeurs
qui ont guidé nos premiers pas dans notre carrière médi¬
cale.
A Bordeaux, lors de notre première année d'Ecole nous avons eu l'avantage de faire partie des services de MM.
les Docteurs Saint-Philippe et Monod dont nous avons
toujours sû apprécier les excellents conseils.
Puis, nous avons eu l'honneur d'être pendant une trop
courte année l'externe de M. le Professeur Badal. De ce
Maître admiré nous emportons le meilleur souvenir, car non seulement il a sû nous inspirer la plus vive sympathie,
mais c'est encore un devoir pour nous de lui exprimer ici
toute notre admiration professionnelle. Il nous a initié et instruit à cette science si intéressante et si délicate qu'est l'Ophtalmologie : c'est à lui que nous devons nos faibles connaissances, et nous nous efforcerons plus tard de ne pas nous montrer trop indigne d'un Maître si distingué.
C'est encore à lui que nous devons l'idée de notre thèse dont il nousfait aujourd'hui le grand honneur d'accepter
la présidence : nous l'en remercions très sincèrement.
C'est dans le service de AT. le Professeur Arnozan que
nous avons eu l'avantage de passer notre dernière année
— 1G —
d'externat. A ce Maître aussi modeste que savant nous devons beaucoup; nous avons contracté envers
lui
unedette dereconnaissance: nousn'y faillirons point. Pendant
deux ans il a mis son laboratoire à notre disposition, et
dans maintes circonstancesilnousatémoigné des marques d'intérêt dont nous sommes heureux de le remercier
Enfin, avant d'aborder notre sujet, nous tenons
égale¬
ment à remercier notre bon camarade Edmond Aubaret.
Interne des Hôpitaux et Prosecteur
d'Anatomie, qui
nousa aidé dans ses précieux conseils dans
l'élaboration de
ce travail, ainsi que notre excellent ami leDl"Georges Lcvet.
Médecin destroupes coloniales dont le dévoûment à
notre
égard ne s'estjamais démenti etqui
afacilité
notretâche
au cours des quelques expériences que nous avons
dû
faire.
P. D
Novembre 1902.
AVANT-PROPOS
Dès que la cataracte a été bien connue et apris saplace
dans la pathologie oculaire, les médecins aussi bien que les chirurgiens, ontcherché chacun de leur côté, et suivant les moyens dont ils disposaient, à supprimer l'obstacle apporté à la vision par l'opacification de la lentille cristal- linienne.
La chirurgie de la cataracte, avant d'en arriver à ce
procédé aussi élégant que simple qu'est l'extraction, a
passé par des phases longues et bienhésitantes, au cours
desquelles la dépression, le broiement, respiration, l'abais¬
sement et la réclinaison ont eu tour à tour leur période de
succès et d'oubli.
Mais c'est également de longue date, puisque Celse s'en
est occupé, que les médecins ont dirigé leurs efforts de ce
côté, et ont essayé eux aussi, de dissiper, pardesprocédés
purement médicaux, l'opacité des fibres du cristallin. Dans les temps les plus anciens, les remèdes les plus bizarres
et que la thérapeutique ne cite aujourd'hui qu'à titre his¬
torique ont été expérimentés: les uns sans résultat, les
autres avec succès ou un prétendu succès. Car il nous est difficile de savoir si ceux qui préh ridaient guérir leurs- malades, traitaient de véritables c itar. êtes. En effet, en 1780 nous voyons déjà de Wenzd en faire la remarque dans son Traitéde laCataracte etcombattre ceux qui pré¬
tendaient la guérir par le mer ur chez « les malades affectés du vice vénérien.» Ils la confondaient,,dit-il, avec de légers engorgements ganglionnaires qui se forment
— 18 —
entre les laines de la cornée. Malgré cela, cette
question
du traitement médical de la cataracte, tour à tour
mise
enhonneuretfortement battue en brèche àdesépoques
moins
reculées, a été de tout temps unproblème
auquel la théra¬
peutique oculaire a essayé
de donner
unesolution difficile
à trouver, mais qui n'est peut-êtrepas
introuvable. En tous
cas, elle a sollicité et fait naître
les recherches les plus
intéressantes de praticiens dont
la bonne foi et la compé¬
tence en la matière ne sont pas
discutables. Depuis quel¬
quesannéessurtoutelle
parait prendre
uneimportance nou¬
velle, car les travaux d'oculistes autorisés eten
particulier
de notre Maître le Professeur Badal l'ont bien remise en honneur. C'est d'ailleurs sur ses conseils que nous avons entrepris quelques
recherches. Car,
neserait-ce
pasun
résultat superbe que de
rendre
sa transparenceà
uncris¬
tallin opacifié, et celasans y
toucher,
sansmodifier
enrien
la situation qu'il occupe dans
l'œil normal,
enunmot,
pardes procédés purement
médicaux? Mais,
noushâtons de
le dire, une pareille méthode ne peut
s'appliquer à toutes
les cataractes, et loin de nous la pensée de
vouloir
pro¬poser un traitement de
la
cataracte.Car
noussommes
persuadés que, de mêmequ'il n'y
a pas uneiritis, mars
différentes iritis qui suivant leur nature et
surtout leur
êtiologie, demandent un traitement
différent, de même il
n'existe pas une cataracte mais
des
cataractes.Certaines,
à notre avis, peuventêtre arrêtées
dans leur évolution par
un traitement médical, et c'est ce que nous essayerons
d'établir. Car nous estimons que, lorsqu'on peut le
faire,
il est préférable d'éviter au
malade
uneintervention qui
bien souvent l'effraie au point qu'il la refuse, et
qui, lors¬
qu'il l'accepte peutentraîner toutes
les complications d'une
infection post-opératoire, très rare il est
vrai, mais
cepen¬dant possible. En même temps c'est
lui supprimer l'incon¬
vénient de porterdes verresdont l'emploi est
quelques fois
peu commode. Tel sera donc le but de notre
travail auquel
nous donnons on le voit de bien modestes limites.
— 1!) —
Nous commencerons par examiner les principales mé¬
thodes qui ont été employées jusqu'ici, nous dirons ensuite
un mot de la pathogénie de la cataracte, et- nous expose¬
rons les quelques expériencesque nous avons faites. Enfin
nous rapporterons quelques observations cliniques, en
indiquant le traitement quinous paraîtdevoir être employé.
CHAPITRE PREMIER
SOMMAIRE: Étude historique des différents traitements em¬
ployéspour guérir lacataracte sansopération.—Méthode de Goudret, de Mackenzie, de Siebel, de Pugliatti, de Richard, de Guépin, de Desmarres, de Martin.— Le trai¬
tementphosphoré.— Résultats obtenus.— Lamédication ioduréenous paraît préférable.
Le traitement Médical de la cataracte, comme nous l'avons dit, a, dans les époques les plus éloignées, exercé la sagacité des spécialistes, et, plus on s'avance dans le passé, plus on voit combien dans ces temps reculés il était
en honneur. Il ne faudrait pas croire que si nous repre¬
nons cette question, nous avons l'intention de revenir sur
ces tentatives tombéesdéjà dans l'oubli le plus complet, et d'y ajouter nous-mêmes une nouvelle tentative qui, très probablement serait vouéeà la même destinée. Cependant,
comme la question a été longtemps laissée dans l'ombre, depuis surtout que la technique chirurgicale a réalisé ses nierveillleux progrès, il nous a paru curieux et intéressant
de résumer les diverses tentatives qui ont été faites dans
cette voie aux diverses époques. Ce rapide exposé per¬
mettra aisément de se rendre compte que les différents
auteurs qui ont traité les cataractes sans intervention
chirurgicale, ont presque tous satisfait aux tendances générales de leur époque en s'inspirant des doctrines
pathogéniques
en cours à ce moment, doctrines le plussouvent erronées, car elles n'avaient pour base aucune donnée scientifique bien certaine. On pourra de même constater, qu'avec la diversité des traitements préconisés
oo
dans cc but, ils ont pu arriver à
des résultats qui méritent
de fixer notre attention. En nous mettant
surtout à l'abri
deserreurs facilesàcommettre àce
sujet,
etenappréciant
ces faits anciens avec la plus
scrupuleuse
etla plus totale
impartialité, nous pourrons encore,
à ce titre, invoquer
leur témoignage à
l'appui de la thèse
que noussoutenons.
Nous n'avons cependant pas
la prétention de reproduire
ici un historique complet, et
do rapporter
endétail toutes
les méthodes qui ont été tentées à
toutes les époques et
dans tous les pays: les
limites de
cemodeste travail ne
nous le permettent pas, et ce
serait d'ailleurs, il nous
semble, par trop
fastidieux. Nous
passeronsseulement en
revue les traitements qui nous ont paru
intéressants et
avoir quelque
logique,
et ceuxqui semblent avoir conduit
leurs auteurs à quelque résultat.
Si,
parexemple,
nousvoulions nous étendre sur la méthode de
Scultet qui,
en1672 traitait la cataracte par le fiel de
brochet mêlé
avecdu sucre, sur celle de Spigel qui
employait l'huile de lotte,
ou sur celle de Stoerck qui
recommandait l'extrait de
ciguë, nous
pourrions
toutaussi bien commenter la valeur
de l'euphraise, des cloportes,
delà coquelourde, de l'extrait
dejusquiame et
de bien d'autres remèdes successivement
proposéspour
dissiper l'opacité du cristallin cataracté.
Aussi, nous en arrivons de suite au
travail Goudret qui
en 1640, dans son Traité de la Cataracte expose non
seulement son traitement, mais s'efforce en même temps
de le rendre rationnel par l'explication
qu'il donne de la
pathogénie cle la cataracte.
Voici d'ailleurs quelle est sa
conception: Une matièrehétérogène pénètre dans le cris¬
tallin,endétruit successivement latransparence,et,comme
un voile plus ou moins épais s'oppose à
l'action de la
lumière sur la rétine. C'est par les vaisseaux
capillaires
que la matière opaque
arriverait
aucristallin; elle v
arriverait très probablement sous
forme d'une
vapeurqui
s'y condenserait. Bien
qu'il ait
vula cataracte
seformer
— 23 —
rapidement et ariver à son maximum d'intensité dans la période d'un mois, Goudret admet (pie, le plus ordinaire¬
ment, elle se fait d'une manière lente, sourde, sans cause
appréciable. « Elle résulte nécessairement, dit-il, d'un dé-
» faut d'absorption, d'une suspension du mouvement cen-
» trifuge dans le cristallin. Les résultats du traitement
» sincipital justifient pleinement cette explication, puisque
» ce traitement dissipe souvent et en quelques jours non
» seulement les symptômes de la goutte sereine, une taie,
» un albugo, mais même la cataracte commençante. Or,
» ces effets résultent du courant qui ayant lieu vers le
» sinciput, détourne celui qui s'était primitivement porté
» sur lesnerfs, sur la conjonctive etsur le cristallin. » L'auteur cite ensuite 31 observations très détaillées; les
cataractes qu'il atraitées sont toutes descataractesséniles incomplètes, des cataractes capsulaires ou capsulo-lenti-
culaires. Sur les trente-et-un cas qu'il rapporte il compte vingt-six succès, et tous ces malades ont été vus un an ou
. deux après la fin du traitement qui, en moyenne a duré
de quarante jours à trois mois.
Voici quelle est sa façon de procéder:
1° Cautérisationsincipitalesoit àla pommade ammonia¬
cale, soit au cuivre rouge incandescent (ce dernier pro¬
cédé plus douloureux mais plus rapide). Cette cautérisa¬
tion estlabasedu traitementetnedoitjamais être négligée.
2° Electricité voltaïque ; 3° Collyre ammoniacal;
4° Iodure de potassium à l'intérieur; 5° Sangsues à la tempe;
6° Laxatifs si le régime ne suffit pas à entretenir la
liberté du ventre.
En suivant l'ordre chronologique, c'est ensuite le Traité pratique des Maladies [de
l'Œil
deMackenzie qui
afixé
notre attention. Dans son traité, l'auteur consacre un cha¬
pitre au traitement médical de la cataracte, chapitre dans
lequel il fait surtout une revue
critique des divers traite¬
ments qui ont été proposés
à cette époque. Trois méthodes
différentes ont été employées pour
guérir la cataracte
sans opération, àsavoir
:la méthode antiphlogistique, la stimu¬
lante et la révulsive. Or, est-on
jamais arrivé
àl'aide de
ces moyens, se
demande l'auteur, à rétablir la transpa¬
rence de la lentille cristallinienne devenue opaque
% Pour
lui, beaucoup de
praticiens qui ont
cruobtenir des gué-
risons se sont illusionnés sur la nature de
l'affection qu'ils
traitaient : il s'agissait le plus souvent en
effet, de
casoù
la lymphe
plastique s'était épanchée
audevant de la cap¬
sule ou bien de cas de rupture de cette
membrane et
d'absorption du
cristallin
opaque,produite par l'action
dissolvante de l'humeur aqueuse ;
certains
autresenfin
sesont trouvés en présence des
glaucomes
avecamaurose
commençante, qu'ils ont
pris
a tort pourdes cataractes et
soumis à divers modes de traitement qui
réussissent
assezsouvent à rendre à la rétine uncertain degré de
sensibilité.
Cependant il est
fermement convaincu
quecertains cas de
cataractes, et surtout de cataractes au
début,
ontété sinon
complètement
guéris, du moins heureusement influencés
et arrêtés dans leur évolution par une
thérapeutique
appropriée.Pour lui, la saignée et le mercure
doivent vraisembla¬
blement produire de bons
effets si l'inflammation est la
cause de l'opacité du
cristallin
etde
sacapsule. Et il est
persuadé que
dans les cataractes fibrineuses, et en parti¬
culier dans la cataracte de Morgagni surtoutsi on la
traite
tout à fait au début, ces remèdes doivent avoir une
réelle
efficacité.
PuisMackenziecritique la
méthode de Ware qui emploie
l'éther en applications sur
l'œil
une oudeux fois
parjour
et qui pratique des
frictions faites
surl'œil
pardessus In
paupière avec le bout
du doigt trempé dans
unlininient
volatil ou légèrement mercuricl.
Il
exposeensuite la mé
thode cle Goudret que nous venons ce rapporter dans les lignes qui précèdent, et, avec Magendie, se déclare parti¬
san de l'électricité galvanique. Le mémoire de Goudret,
lui paraît en effet parfaitement d'accord avec la concep¬
tion qu'il a, de l'influence exercée par le nerf de la cin¬
quième paire, sur la nutrition de l'œil. Car, d'après ses
expériences, la section de ce nerf produisant l'arrêt de nutrition de l'œil, l'opacification de la cornée, et la trans¬
formation des humeurs en « une substance qui ressemble
à du lait caillé», il lui paraît très logique d'admettre que la cataracte est liée à un défautd'action dunerfqui préside
à la nutrition de l'œil. 11 en conclue donc que, si ses vues
sont exactes, on aura de lbrtes chances, en modifiant ou en stimulant l'action du nerf de la cinquième paire, d'agir
sur la nutrition du cristallin, et de lui rendresa transpa¬
rence naturelle.
Ln résumé c'est la méthode de Goudret qui lui parait devoir être employée, mais ilne l'acceptequ'en la limitant.
L'électricité seule devra être prescrite et si, la saignée et le mercure
peuvent dans queques cas être des adjuvants utiles, la cautérisation syncipitale devra être rejetée d'une
manière absolue.
Jusqu'en 1837, nous ne trouvons aucun travail qui nous paraisse assez intéressant pour être rapporté ici. C'est à cette époque que Sichel fait paraître .son Traité de la.
Cataracte, où il se pose la question suivante : « Lst-il
» possible d'arrêter ou d'annuler le travail organique qui
» donne naissance à la cataracte, ou, en d'autres termes,
» la guérison de la cataracte est-elle possible par un trai-
» tement
pharmaceutique
interne ou externe t » Avant de répondre à cette question, l'auteur remonte aux causesqui produisent la cataracte, et distingue trois cas dans la
pathogéniede cette affection.D'après lui elle estle résultat : 1" D'un défaut de nutrition, d'une espèce de mortifi¬
cation du cristallin due à l'Age avancé du malade;
— 28 —
2° D'une inflammation, d'une congestion aiguë ou chro¬
nique, suite de
lésions
externes oude
causesconstitution¬
nelles, telles que les
diathèses arthritique, syphilitique,
rhumatismale, dartreuse, etc. :
3° De ces diathèses même sans véritable phlegmasie.
Les cataractes lenticulaires dépendraient de lapremière
de ces deux causes, tandis que les deux dernières donne¬
raient naissance aux cataractes capsulaircs ou capsulo-
lenticulaires.
D'après Sichel, il
serait
tout àfait illusoire
«de vouloir
» arrêter les progrès du marasme
du cristallin, consé-
» quence de l'âge. »
Et, après des recherches conscien¬
cieuses, il se croit en droit d'accuser
de
mensonge ceux quiprétendentguérir les cataractes séniles
pardes remèdes
pharmaceutiques.
Cependant, il est persuadé qu'on peut,
à l'aide d'un traitement rationnel, guérir certaines cata¬
ractes. Mais, ce ne sont ni les saignées, ni les
révulsifs, ni
les absorbants, ni les remèdes spéciaux qui
méritent
d'attirer la confiance du praticien et d'assurer la
guérison
du malade. Pour Sichel, la médication doit être exclusive¬
ment basée sur les deux points suivants :
ci) Les règles de la
pathologie générale
;[,) Le diagnostic exact et
précis de la
naturede la
cataracte.
Si l'affection est d'origine dyscrasique, les
antisyphiliti¬
ques, les
antipsoriques, les antiscrofuleux seront mis en
usage ; si elle est
liée
àunediathêse arthritique, liémorroï-
dale, à une affection rhumatismale, etc...,
il faudra,
pourarrêter l'opacité, user des moyens propres
à guérir
cesaffections. Mais il ajoute que les
prétendues méthodes
spécifiques «inventées
parle charlatisme, et pronées par
l'ignorance » ne
méritent ni d'être citées ni d'être prises
en considération.
C'est surtout dans son chapitre sur la «
cristalloïdité
» queSichel paraît partisan du traitement médical
;mais
s'il en affirme l'efficacité d'une manière presque absolue1
il a soin de faire remarquer qu'il n'entend parler que de
cataractes commençantes, et dont le processus débute toujours par la cristalloïde. C'est aussi dans ce
chapitre
qu'il expose actuellement les « moyenspharmaceutiques »qu'il emploie, etc'est de la façon suivanteque nous pouvons résumer les différents points de la médication qu'il préconise :
A) Cataractes lenticulaires : 1° Pratiquer des émissions sanguines souvent répétées, et employer les mercuriaux
tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, dans le but d'empêcher
la production d'une matière plastique sur la capsule,
ou pour en provoquer la résorption si déjà elfe s'était produite ;
2° Recommander l'usage des narcotiques mydriatiquos
pour maintenir l'ouverture pupillaire dans une dilatation permanente, et prévenir les adhérences qui pourraient se former entre la capsule antérieure du cristallin et la face postérieure de l'iris.
B) Cataractescapsalairesoucapsulo-lenticulaircs; C'est- à-dire relevant d'une origine diathésique.
1" Le traitement sera celui de cette diathôsc, comme par
exemple le mercure dans la syphilis ;
2" Administrer des purgatifs et donner des mercuriaux extérieurement et intérieurement pour ramollir la matière exsudative : dans ce but on peut également conseiller
l'usage interne des antimoniaux, et les préparations ioduï'êes en frictions autour de la base de l'orbite;
3° Instillation d'une solution d'extrait de belladone pour déchirer les adhérences ;
1" Instillation entre les paupières d'une solution de laudanum d'abord diluée, puis pure ;
5° Application sur le bord libre des paupières d'une pommade au précipité rouge d'abord, au précipité blanc
ensuite, à des doses prudemment et graduellement
augmentées.
— 28 —
Os deux donnePS poiutK du
traitement
n: •devront être
employas queI<n*s<|ii<1 fouit* irritabilité inflammatoire aura
disparu.Après
Siebel, c'est Pugliatti qui s'occupa de la question,
et lit paraître en
18-15
son «essai clinique
surl'efficacité
des remèdes résolutifs dans letraitementde la cataracte ».
(Annalesde la
chirurgie française et étrangère. Tome XV).
Son travail est divisé en trois parties: dans la
première,
il explique
pourquoi il
asongé à traiter médicalement la
cataracte et quelles sont les
raisons expérimentales et
cliniques qui
lui
permettentd'espérer
que cetraitement
peut
réussir
;dans la seconde, il
expose safaçon de
procéder et
quels
sontles agents thérapeutiques dont il
use ; enfin, dans son dernier
paragraphe, il fait
unesélec¬
tion entre les différentes variétés de cataractes et pose
les*
indications et les contre-indications.
11 remarque, tout
d'abord,
quel'idée du traitement
de la cataracte remonte à une époque déjà éloignée et que, lorsqu'on n'avait pas encore
trouvé des
«ressourcesméca¬
niques » pour
abaisser, extraire, récliner
oubroyer le
cristallin, on ne prescrivait quedes
remèdes dits médicaux
ou résolutifs, internes ou externes, et l'on
voyait dans-
quelques casl'opacité disparaître et la cataracte guérir.
Puisilconstate, nonsans regret,queles ophtalmologues
de
son époque commencent, à tort,
à
neplus accorder d'im¬
portance au
traitement médical, soit général, soit local de
de la cataracte, et que, presque toujours,
ils préfèrent
opérer. Il avoue
d'ailleurs avoir partagé lui-même cette
opinion, et
avoir enseigné pendant vingt
ansles mêmes
principes.
Mais, s'il reconnaît
son erreur,il
neveut pas
être exclusiviste, et, bien qu'en écrivant ces lignes,
il ait
devant lui des faits incontestables de guérison obtenue
par la
méthode résolutive, il n'en
pose pasmoins
enprin¬
cipe l'opération pour un
certain nombre de
cas ;mais il
réserve l'autre méthode pour certaines variétés
de cata¬
ractes, et conseille de l'appliquer, au moins àtitre
d'essai-
— 2'.) —
avant d'en venir* à la « ressource chirurgicale ». Ml, s'il a
expérimonté dans c<> sens, c'est que des faits cliniques accidentels, mais probants, se sont présentés A, son obser¬
vation. Ces laits étaient relatifs à des individus opéréspar lui de cataracte complète d'un côté, atteints de l'autre de
cataracte incomplète « occasionnéeet entretenue peut-être
par un travail phlogistiquc ou d'une autre nature ». Après l'opération de la cataracte complète, il a vu l'autre œil
s'éclaircir petit à petit, spontanément, l'opacité du cris¬
tallin, de sa capsule ou de l'humeur de Morgagni dispa¬
raître tout à fait et l'organe reprendre ses fonctions
normales. Et ilcite, àce sujet, une observation trèsprécise.
Il a naturellement déduit de ces faits que la guérisonde la
cataracte sans opération était possible, et que l'homme de
l'art devait la tenter, sinon pour suppléer au travail de la nature, du moinspourl'aideret lefavoriserdans samarche
curative. Et cette conclusion lui semble d'autant plus logique qu'elle est conforme aux données de certaines théories, aux préceptes de quelques auteurs anciens et
aux faits publiés par quelques auteurs modernes respec¬
tables. Il cite alors Richter qui déclare « avoir guéri des
» cataractes à l'aide du vin antimonial de Huxam, du
» Uniment sulfureux de Jesser, du mercure combine ou
» non avec du sel volatil de corne de cerf » ; Montiggia qui déclare qu'il est toujours convenable d'essayer des
traitements médicaux des cataractes avant de les opérer ;
Travers, Roche et Sanson, Staber, bien d'autres encore, et en particulier Goudret.
Il cherche ensuite à prouver que l'on peut, à l'aide de
remèdes externes et internes, faire disparaître l'opacité cristallinienne, à donnerune explication plausible et basée
sur l'expérience de la
possibilité de guérir la
cataractesans opération. Rien que dans ses
dernières recherches
ilait associé des remèdes internes aux topiques résolutifs,
ce n'est que sur ces derniers
qu'il
a surtoutinsisté.
Queles remèdes externes appliqués près
du siège de
la cata-— 30 —
racte puissent transmettre leur action jusqu'à la partie affectée, il en était convaincu depuis l'époque où, étant
encore élève, il faisait sur les cadavres diverses expé¬
riences dans le but de se procurer des cataractes. Pour
cela il appliquait sur le globe oculaire, sur les paupières
ou même à la tempe des compresses trempées dans des
acides minéraux très dilués; le cristallin devenait ainsi
opaque, et la cataracte artificielle était immanquable. Le
cristallin perdait évidemment sa transparence par l'action pénétrante du liquide appliqué. Or, si sur le cadavre les
choses se passent ainsi dans des conditions physico¬
chimiques brutes, c'est-à-dire sans l'influence de la vie, il
suppose qu'une pareille action doit se faire plus profondé¬
ment sentir chez le vivant. Et il conclue que l'on doit toujours essayer le traitement médical; s'il ne réussit pas
en effet, il aura au moins contribué à préparer le succès
de l'opération, « car son action aura combattu les compli¬
cations de la cataracte, les phlogoses sourdes, et, en un mot aura simplifié la maladie».
Enfin Pugliatti expose les diverses tentatives thérapeu¬
tiques qu'il a faites avant d'en arriver à la méthode qu'ila défiinitivement adoptée. Tout d'abord il a essayé comme traitement externe «l'esprit decorne cle cerf»
recommandé
par Richter et Scarpa, puis la pommade ammoniacale
do
Goudret ausynciput; maisces essais ne lui ont pasdonné grand succès. Il a ensuite employé l'ammoniaque
liquide
qu'il a appliqué à la tempe très près de l'anglepaipôbfal
externe, à l'aide de compresses enplusieurs doubles trem¬
pées dans ce médicament et couvertes d'un verre
de
montre convexe. Il obtenait alors des phlyctènes, puisune cseharre assez profonde qu'il renouvelait plusieurs
fois
jusqu'à disparition complète de la cataracte, résultat
qu'il
n'obtenait qu'au bout de plusieursmois. Comprenant
alors
que l'action de l'ammoniaque était, clans bien des cas, trop lente et insuffisante, il lui a associé, à titre cle réso¬
lutif, l'usage interne de l'iodure cle potassium à la dose
de
— 31 —
trois à vingt-cinq centigrammes par jour, et il a ainsi obtenu des résultats satisfaisants.
Il remarque ensuite que le traitement médical ne
s'applique pas à toutes les cataractes et qu'il faut en
excepter les cataractes capsulaires survenues à la suite d'une opération. Et il termine en citant quinze observa¬
tions où sesmalades ontparfaitement guéri.
Voici comment peut se résumer sa méthode de traite¬
ment:
1° Sangsues à la tempe ; 2° Potion de tartre stibié ;
3°Ammoniaque liquide (soit comme révulsif, soitcomme
résolutif) ;
4° Collyre à l'iodure de potassium à l'intérieur (trois à
vingt-cinq centigrammes par jour).
La durée du traitement varie de quarante jours à trois mois.
Huit ans après, c'est-à-dire en 1853, Adolphe Richard reprit la question dans sa thèse d'agrégation où il traita
« desdiverses espècesde cataracteset de leurs indications
thérapeutiques
spéciales. » L'auteur est fermement con¬vaincu que, dans certains cas, le traitement médical doit être préféré à l'opération et que si on l'applique à des cataractes bien choisies,onestpresque certain d'enobtenir la guérison.
Il fait tout d'abord un paragraphe spécial pour la cata¬
racte traumatique qu'il traite de la façon suivante : Sa
règle absolue est l'expectation ; puis il donne les conseils- suivants : « Surveiller tout symptôme d'ophtalmie interner
» pour la combattre dès son début ; repos, régime, occlu-
» sion des deux yeux, applications réfrigérentes ; puis, si
» le travail réparateur qu'on a droit d'espérer languit,
» frictions fondantes(pommades iodurées, onguentmercu-
» riel), purgatifs, calomel à l'intérieur. »
Mais c'est surtout pour les cataractes fausses membra¬
neuses, c'est-à-dire capsulaires, qu'il est partisan du
traitement médical, car ses expériences personnellesetles
résultats obtenus lui permettent d'en affirmer l'efficacité.
Pour ce qui est, dit-il, des cataractes fausses-membra-
ncuses, le médecin est souvent témoin de l'inflammation
irienne aiguë ou chronique qui leur donne
naissance.
Avantcetteconceptionpathogénique, sesindications
théra¬
peutiques se résument à peu près à celle de
l'iritis.
«Voilà
» les cas, affirme-t-il, où l'usage de la belladone est d'un
» merveilleux secours. Quand les adhérences iriennes
» sont encore molles, la mydriase que vous provoquez
» isoie l'exsudation centrale en rompant les liens souvent
» finement vasculaires qui l'attachaient à l'iris, et par
» lesquels elle était entretenue: c'est, comme on l'a
dit,
» l'attaquer par la famine, et vous la voyez en effet
finir
» par disparaître entièrement, laissant cependant,
clans
» un bon nombre de cas, sa bordure indiquée par un
» pointillé pigmenta ire dont la vision n'est généralement
» pas gênée. » Plus loin, il insiste longuement encore sur l'usage longtemps continué de la belladone et conseille
de
lui associer des pommades iodurées en frictions
péri-orbi-
taires en administrant du calomel à l'intérieur.
A cette époque, beaucoup d'oculistes s'occupèrent de
la
question eton a beaucoup écritàcesujet. Aussi pourrions-nous longtemps citer des auteurs et des ouvrages.
Mais
nous l'avons dit, les limites de notre travail ne nous le permettent pas et des publications faites en 1857, nous
nous contenterons de signaler l'article que Guépin de
Nantes faisait paraître dans le Bulletin de thérapeutique.
car il est remarquable de précision. L'auteur affirme,
de
la façon la plus nette qu'il est possible à l'aide d'untraite¬
ment médical, sinon de guérir, du moins d'arrêter les opacités spontanées du cristallin, et même de les faire
rétrocéder. Comme les adversaires de cette méthode avaient objecté que les observations publiées
jusqu'ici
manquaient de détails, surtout au sujet de l'examen préa¬
lable de la cataracte à traiter, il expose clairement et