Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XX - n° 5-6 - mai-juin 2016 121
É d i t o r i a l
Les secrets du cerveau
I l est habituel de dire que le cerveau n’a pas livré tous ses secrets. Sans doute ne le fera-t-il jamais, tant la complexité de son fonctionnement est source d’émerveillement, même si des machines créées par l’homme peuvent le battre aux échecs ! Le mystère est aussi dans l’origine et la nature de ce que les philo sophes appellent l’esprit, les poètes, le senti- ment, les croyants, l’âme, et le commun des mortels, le cœur ou encore le moral.
Derrière les mots, il y a sans doute des réalités diffé- rentes, mais comment matérialiser la pensée ? Peut-on réduire l’homme à sa biochimie ?
Le voile se lève néanmoins sur certains aspects de la physiologie du cerveau ou des mécanismes de ses dysfonctionnements.
Jean-Marie Bourre nous rappelle tout d’abord ce que l’on peut considérer aujourd’hui comme un grand classique : le rôle des acides gras polyinsaturés à longue chaîne oméga-3, en tout premier lieu l’acide cervonique, dans la fluidité et les échanges membranaires et donc dans les fonctions des neurotransmetteurs. Mais ce sont mainte- nant un certain nombre de données épidémiologiques, expérimentales et cliniques qui sont en faveur de leur rôle dans la dépression, sa survenue, voire sa sévérité.
Avec cependant beaucoup de prudence pour ne pas attribuer au-delà de ce qui est raisonnable une res- ponsabilité nutritionnelle à une pathologie complexe.
Mais Corinne Joffre et Sophie Layé enfoncent le clou en attribuant à la dépression une composante inflam- matoire modulée par l’alimentation. C’est d’ailleurs probablement en partie du fait de leur effet anti-
inflammatoire que l’acide eicosapentaénoïque (EPA) et l’ acide docosahexaénoïque (DHA) sont impliqués dans la dépression ou l’humeur. Des études épidémio- logiques non citées ici suggèrent également que le régime alimentaire occidental pourrait favoriser une inflammation de bas grade systémique et cérébrale, via les cytokines, mais aussi via le microbiote et donc l’intestin. C’est d’ailleurs l’une des composantes de l’axe intestin-cerveau que Gilles Mithieux explore depuis des années et dont il nous livre ici le “pur jus”, en particulier le rôle de l’intestin dans la néoglucogenèse, facteur impliqué dans le contrôle des sensations alimentaires et, de façon synergique, dans la régulation de la glycémie.
L’alchimie de cette fonction est extraordinaire, puisque c’est un acide gras issu du métabolisme des fibres par le microbiote qui stimule la néoglucogenèse via un arc réflexe mettant en jeu un récepteur des acides gras dans la veine porte ! La démonstration est stupéfiante.
Enfin, Catherine Féart nous conduit vers d’autres pistes de recherche sur la relation éventuelle entre le déclin cognitif léger, lié à l’âge, et les facteurs environnemen- taux, notamment nutritionnels. Que les supplémen- tations isolées ne donnent pas les résultats rêvés par certains ne nous surprend guère ; au contraire, constater les bienfaits d’une diététique globale (diaita = genre de vie) telle que le régime méditerranéen, associé très fortement, selon de nombreuses études, à une activité physique régulière, nous conforte dans nos recom- mandations.
Dr Jean-Michel Lecerf Service nutrition, institut Pasteur, Lille.
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