Fabrique d'Horlogerie par procédés mécaniques

Seizième Année. — N° 71 Prix du numéro : 10 centimes

Dimanche 8 Septembre 1901.

Bureaux: R u e de l a S e r r e , 58

M1EDEM OEM)GEEE

S U I S S E

ABONNEMENTS

Un a n : Six mois:

Suisse . . . . Fr.6»— Fr. 3»—

Union postale » 12»— » 6»—

On s'abonne a tous les bureaux de poste. Paraissait le Jeudi et le Dimanche à la Ghaax-öe Fonûg

ANN0N6ES

suisses 20 ct., étrangères 25 et. la ligne Offres et demandes de place

10 centimes la ligne.

Les annonces se paient d'avance.

Organe de la Chambre suisse de l'Horlogerie, des Chambres de commerce, des Bureaux de contrôle et des Syndicats professionnels.

•i - I - - • ' " •

Les Consulats suisses à l'étranger reçoivent le j o u r n a l .

Bureau des Annonces: HAASENSTEIN & VOGLER, 32, rue Leopold Robert, CHAUX-DE-FONDS et succursales en Suisse et à l'étranger.

L'Italie et les agences d'émigration e n S u i s s e

A plusieurs reprises déjà, la presse ita- lienne a eu à s'oecuper de certaines agen- ces d'émigration suisses qui, sans s'inquié- ter du sort qui attend les emigrants dans les pays de l'autre côté de l'Atlantique, n'Iié- silent pas à engager les pauvres diables à s'expatrier.

P o u r v u qu'elles fassent leurs bénéfices, que les promesses faites pour atlbicr leurs clients se réalisent ou n o n , l'avenir leur est indifférent.

A la suite de nombreuses plaintes d'émi- grants à destination d u Canada, le gouver- nement italien vient de s'occuper sérieuse- ment de la question.

La circulaire suivante a été récemment adressée à tous les préfets et sous-préfcls du pays :

Il est venu à la connaissance du commissariat de l'émigration que quelques agences d'émigra- tion suisses installées prés de nos fronliéres ont fait répandre dans le royaume de nombreux ma- nifestes et circulaires, afin d'inciter nos agricul- teurs à émigrer au Canada où le gouvernement avait besoin de 20,000 ouvriers, pour la récolta des blés dans la province de Manitolea. A ces ouvriers on promettait, outre l'entretien, fr. 12.50 par jour.

Ni le gouvernement italien, ni le commissariat de l'émigration n'ont reçu le moindre avis qui leur permette de juger de la valeur de ces pro- messes. Par contre, nous savons ce qui est ar- rivé dernièrement quand une compagnie de navi- gation étrangère voulut exécuter l'œuvre de spé- culation entreprise par ces agences suisses et quelques agences italiennes, en transportant des émigrés au Canada. Tout le monde connaît l'is- sue malheureuse de cette expédition, les souffran- ces et les privations à la rencontre desquelles nos compatriotes sont allés, transportés au Canada en une saison où le climat peu clément ne.leur- permettait pas de trouver du travail, de sorte qu'ils durent se rendre à leurs frais aux États- Unis, ou attendre un moment plus propice pour trouver de l'occupation. Môme en ce cas la situa- tion ne répondait nullement aux promesses. D'ail- leurs la récolte du blé, le travail le mieux rétri- bué, ne dure qu'un mois et comme dans tout le nord de l'Amérique on se sert de faucheuses mé- caniques, le nombre d'ouvriers est très restreint.

Mais les susdites agences suisses n'offrent pas seulement du travail fort bien rétribué au Canada : elles indiquent encore comme point de destina- tion aux émigrés une série de localités situées aux Etats-Unis, comme New-York, Boston, Chi-

cago, San Francisco, etc., en leur promettant de fournir le billet de voyage sans qu'il leur soit nécessaire d'exhiber un passeport pour l'étran- ger.

La circulaire d u commissariat s'occupe ensuite longuement de la dernière promesse

« faite pour attirer le plus de clients possi- ble sans s'inquiéter de ce qui leur arrivera plus tard ». D'abord on connaît les diffi- cultés que les Etats-Unis font pour l'admis- sion des emigrants, qu'ils arrivent par mer

« « p a r t e r r e ; p u i s s'expatrier sans passe- port constitue une violation de la loi ita- lienne sur l'émigration ; enfin les emigrants, sans papiers nécessaires, ne peuvent nulle part, en cas de besoin, réclamer l'aide des représentants de leur pays.

Finalement, le commissariat engage les préfets et sous-préfets à faire saisir les pu- blications des agences suisses et à répandre le plus possible sa circulaire. B.

On sait que toutes les agences d'émigra- tion établies en Suisse sont sous la surveil- lance d'un office fédéral, ressortissant au Département politique. Nul doute que cet office ne soit saisi de la question traitée par notre collaborateur, et qu'il ne rensei- gne le public sur la valeur des critiques de l'autorité italienne. Si elles sont fondées, il y a là un abus grave à réformer sans au- cun retard. (Le Genevois.)

Informations

Les intéressés peuvent demander des renseignements sur la maison

d ' A r g e n t , Avenue de Neuilly, P a r i s inconnue à celle adresse

au Secrétariat général de la Chambre can- tonale du Commerce, à la Chatix-de-Fonds.

L'amélioration du change au Brésil M. P. Leroy-Beaulieu écrit dans \'Economiste ce qui suit: Le Brésil et lu République argentine se sont, en partie, relevés, au point de vue du change des abîmes où la dépréciation de leur pa- pier-monnoie exubérant les avait entrainés. Ils se sont relevés par une méthode très simple, la seule qui existe ; ils ont retiré une quantité assez importante du papier-monnaie exubérant qui était en circulation et, en môme temps, ils se sont ef-

forcés d'améliorer la situation de leur budjet, c'est-à-dire de le remettre en équilibre. De l'un et de l'autre côté, ils ont réussi, si non encore totalement, du moins partiellement, ce qui est déjà un grand point. Les efforts du Brésil et de la République Argentine dans celte double direc- tion : retrait du papier-monnaie et amélioration du budget, outre le résultai matériel acquis, ont obtenu aussi un résultat matériel d'une grande importance; la défiance qui existait à l'endroit de ces deux pays et de leur avenir finanier s'est dissipée el a fait place, au moins dans cer- tains cercles, si non encore à de la confiance, du moins à de l'espérance.

L'exemple du Brésil est singulièrement topique et honorera grandement la présidence de M.

Campos-Salles. En réduisant de moins de 13 °/°>

du 31 août 1898 au 30 juin 1901, le total des bil- lets en circulation, soit de 789,364,000 milreis à 088,608,000, il a obtenu une reprise du change de plus de 100 °/°. soit de 5 pence à plus de 10 pence le milreis. Ce résultai si remarquable est dû, pour la plus grande partie, à la réduction des billets en circulation, accomplie graduelle- ment avec une inlassable persévérance et malgré des crises diverses, durant trois années consécu- tives, mais parallèlement aussi à l'amélioration, du budjet et à la constitution d'un fonds à Lq.n,-:

dres qui assure pendant un certain temps le paie- ment en espèces des intérêts de ladelte extérieure ; quand ce fond sera épuisé, on a toute raison de croire, si la politique financière du Brésil reste fidèle aux principes des dernières années, que ce pays aura surmonté la crise dont il a commencé d'être affecté il y a dix ans environ et qu'il sera revenu à une situation normale.

Il n'y est pas encore, quoiqu'il en soit rappro- ché. Son budjet a encore besoin d'être raffermi, et le cours de 10 et 10 '/a pence pour le milreis auquel se tient actuellement le change est encore singulièrement éloigné du pair qui est à 27 pence;

il se trouve même fori au-dessous du cours de 14 pence qui fut, très fugitivement atteint il esl vrai, il y a quelques mois.

L'Angleterre et l'opinion allemande Le Nouvelliste de Hambourg vient de publier un vif réquisitoire contre la politique anglaise.

Passant rapidement en revue les principaux in- cidents de cette politique au XVIIIe el au XIX"

siècle, le journal allemand montre que ce n'est pas d'aujourd'hui que les actes des gouverne- ments anglais n'ont rien de généreux ni de juste.

Aujourd'hui plus que jamais, ajoute le Nou- velliste, l'nrgenl domine l'Angleterre et les colo- nies. Voilà un fait que la guerre sud-africaine et l'histoire de son développement ont mis en pleine lumière. La politique anglaise est sous l'entière domination de l'argent; essentiellement utilitaire, elle a perdu toute notion morale.

40G LA FEDERATION HORLOGERE SUISSE Cette politique ne peut manquer de produire

des fruits funestes. Il n'est pas téméraire de pré- voir que l'Angleterre va au-devant de graves crises intérieures qui écluteront le jour où la mi- sère que la guerre sud-africaine a décliainée sur les classes inférieures se fera sentir dans toute son intensité. Mais c'est principalement sur la situation extérieure de l'Angleterre que cette guerre exercera un contre- coup désastreux.

L'Europe n cru jusqu'à ce jour à l'invincibilité de l'Angleterre et cela seul a rendu possible le rôle arrogant que l'Angleterre a joué jusqu'à présent. La triste guerre sud-africaine a eu cet heureux effet d'éclairer les peuples du continent sur l'impuissance de l'Angleterre. Mais il est étrange que la diplomatie européenne semble ne pas avoir conscience que l'invincibilité ne forme que le côté passif de la guerre. Si l'on veut ac- complir quelque chose par la force, il ne suffit pas de n'être pas vaincu soi-même, il faut encore être en mesure de vaincre son adversaire.

La guerre sud-africaine a prouvé que l'Angle- terre en est incapable. Les puissances européen- nes ne feront plus attention désormais aux re- montrances anglaises; elles poursuivront doré- navant leurs buts nationaux, sans s'inquiéter de savoir si cela pourra plaire ou déplaire sur les bords de la Tamise. Ainsi l'Angleterre sera, tôt ou tard peut-être, amenée à comprendre qu'elle doit respecter les droits des nations et ménager leurs susceptibilités. C'est là l'inévitable effet de la guerre sud-africaine : son rôle de puissance universelle intangible et redoutée est fini une fois pour toutes.

«Questions diplomatiques et coloniales.»

Le premier syndicat jaune

Le premier en dale des syndicats jaunes de Saône-et-Loire est celui des corporations ouvrières des usines du Creusot, fondée le 1e r novembre 1899, après la deuxième grève.

La première grève avait surpris tout le monde, et M. Schneider avait cru briser la résistance de ses ouvriers en refusant de reconnaître le syndicat rouge qui groupait les deux tiers de ceux-ci. Le syndicat n'en devint que plus puissant et la grève abou- tit à l'arbitrage de M. Waldeck-Roussau constatant que « l'intermédiaire du syndi- cat auquel appartient l'une des parties, peut-être utilement employé si toutes deux y consentent, mais ne peut être imposé. »

Cette sentence ne donnait nullement sa- tisfaction au syndicat et il ne l'accepta qu'avec le secret désir de reprendre la lutte au plus tôt. En effet, une nouvelle grève éclatait en mai 1899.

Sur l'invitation de M. Schneider, deux cent cinquante ouvriers seulement rentrè- rent dans les ateliers le vendredi 2 juin.

On dut les protéger et les nourrir avec du pain et du saucisson. Comme c'était le jour maigre, que ces ouvriers étaient des démo- crates chrétiens, la chose fut trouvée plai- sante et ils furent dénommés saucissons.

Les saucissons furent expulsés des sociétés de secours mutuels. Ils fondèrent alors un syndicat, dont M. Mangemalin, peintre à l'usine, fut n o m m é président. Le gland de leurs insignes était jaune ; ils devinrent les jaunes. Ils furent d'abord traqués et obligés de ne sortir qu'armés. Aujourd'hui, ils sont 5215, alors que les rouges ne sont plus que 200 ou 300. (Musée social.)

Les syndicats professionnels en France La direction du travail au ministère du com- merce vient de publier Y Annuaire des syndi- cats professionnels, industriels, commerciaux et agricoles constitués conformément è la loi du 21 mars 1884.

Cet annuaire donne la situation des syndicats, des unions de syndicats et des bourses du travail au l 'r janvier 1901.

11 existait à cette date 8035 syndicats ouvriers se répartissant ainsi: 2382 syndicats patronaux

3287 ouvriers, 162 mixtes cl 2204 agricoles. Les syndicats formés par les ouvriers agricoles seuls, les bûcherons, les jardiniers, sont classés dans celte statistique avec les syndicats ouvriers; de môme les syndicats d'éleveurs, de patrons, jardi- niers, horticulteurs, laitiers, marchands de bois, pépiniérisles, sylviculteurs, etc., ont été mainte- nus avec les syndicats patronaux ; ce sont ceux qui, recevant comme adhérents des propriétaires et quelques journaliers, forment un type spécial et sont en réalité des syndicats mixtes qui sont classés comme syndicats agricoles.

A ces chiffres il convient d'ajouter 696 sociétés ou caisses d'assurances mutuelles agricoles que la loi du 4 juillet 1900 a admis à se constituer en se soumettant aux prescriptions de la loi du 21 mars 1884.

Au 1^er janvier 1000, il y avait 7081 syndicats dont 2157 patronaux, 2685 ouvriers, 175 mixtes et 1824 agricoles. Le nombre des syndicats pa- tronaux a donc augmenté l'an dernier de 225, celui des syndicats ouvriers de G02, et celui des syndicats agricoles de 180.

Au cours de l'année 190O, le nombre des unions syndicales a passé de 173 à 200, et celui des bour- ses du travail de 65 à 75.

Les syndicats professionnels existant au 1^er jan- vier dernier comprennent le personnel suivant, 170,030 personnes dans les syndicats patronaux- 588,832 dans les syndicats ouvriers 29,044 dans les syndicats mixtes, 533,454 dans les syndicats agricoles; soit un personnel total de 1,321,360 syndiqués — auxquels on pourrait ajouter 48,458 membres appartenant à des sociétés ou caisses d'assurances mutuelles agricoles.

Le nombre des patrons syndiqués était, au 1^er janvier 1891, de 93,411 ; il a donc presque doublé dans ces dix dernières années, alors que le nombre des ouvriers syndiqués, qui était de 139,692 au 1^er janvier 1891, quadruplait pendant cette même période décennale.

Les femmes adhérents aux syndicats profes- sionnels sont au nombre de 43,470, dont 2180 dans les syndicats patronaux, 32,065 dans les syndicats ouvriers, 4716 dans les syndicats mix- tes et 3725 dans les syndicats agricoles ; de plus les caisses d'assurances mutuelles agricoles en comptent 784.

(Moniteur de la bijouterie et de Vhorlogerie.)

La protestation socialiste

L ' « Arbeilerstimme», de Berne, qui a organisé le meeting, dit de protestation, du 25 août, n'est pas contente de la réponse du Conseil fédéral à ses délégués.

Voici de quelles réflexions le journal en accompagne la publication :

« A u x ouvriers organisés a faire mainte- nant les démarches qui leur paraîtront né- cessitées par les circonslances.

S'ils acceptaient une pareille réponse sans «agir avec énergie» (en lettres gras- ses dans le texle) eh bien !, alors il ne nous resterait qu'à dire que chaque peuple a le gouvernement qu'il mérite.

Le dernier mot n'est pas encore dit dans cette affaire. Nous ne voulons pas préjuger la décision des délégués des ouvriers orga- nisés. Nous voulons seulement répéter ce que nous avons dit déjà dans notre dernier n u m é r o .

La journée de Berne n'est que le point de départ d'un grand mouvement qui vise à faire une réalité de nos droits légalement garantis, en première ligne du droit de li- bre réunion et de libre association.

Nous n'avons rien à attendre de l'autori- té supérieure fédérale. Nous devons donc crier à l'ouvrier suisse: Aide-loi, le ciel l'aidera. »

Les salaires en Angleterre Le «Board of trade» vient de publier une sta- tistique qui montre quel énorme progrès ont fait les salaires ouvriers dans ces dernières années.

Sans abuser des chiffres, qui, dit-on, se prêtent à toutes les interprétations, il faut signaler que, pendant l'année dernière, 1,112,684 ouvriers, le

septième du total, ont bénéficié d'une majoration de salaires de 212.000 liv. sterl. par semaine (5,300,000 fr.), qui, multipliés par 52, donnent vraiment un formidable total. En 1899, l'aug- menlation de salaires aurait représenté 91,000 livres sterling par semaine et 81,000 en 1898.

Les salaires qui ont le plus augmenté sont ceux des mineurs (5 fr. 50 par semaine). Le progrès est moins sensible en ce qui cencerne la diminu- tion des heures de travail ; elle a été de huit heu- res par semaine pour quelques-uns, et de six et quatre heures pour d'autres. Ces résultats ne sont dus que pour 5 °/° aux grèves ; la presque totalité a été obtenu à l'amiable.

L'abus des communiqués On lit dans la Revue :

« Dans sa dernière assemblée, la Société de la presse vaudoise a décidé de lutter énergiquement contre l'abus des communiqués gratuits.

C'est une chose singulière que l'idée que se font de la presse des personnes d'ailleurs intelligentes et bien intentionnées. Voilà, par exemple, une commission d'un lir cantonal qui nous demande l'insertion, à titre de communiqué gratuit, d'un appel aux fabricants désireux de soumissionner certaines fournitures.

Pourquoi gratuit? Les comités d'organisation des tirs paient tous leurs fournisseurs; ils paient leurs vins, leur bière, les orfèvres qui livrent les coupes, les charpentiers qui font la cantine. Pour- quoi les journaux, qui sont des entreprises comme les autres, seraient-ils seuls tenus à des services gratuits ?

Les journaux ne vivent pas de l'air du temps;

ils ont à payer des rédacteurs, des correspon- dants, les agents télégraphiques, des administra- treurs, des compositeurs, des pressiers, des cli- cheurs, des plieuses, des expéditeurs, une lourde taxe postale, leur encre, leur papier, etc.. etc.

Chaque année, leurs charges deviennent plus lourdes; ils feraient faillite si le produit de leur page d'annonces ne leur permettait pas d'amélio- rer leur situation.»

Nouvelles diverses

Le c o m m e r c e e t l'industrie de ta R u s - sie. — Le ministre des finances russe vient de publier la statistique du commerce étranger de la Russie: il en résulte que les importations ont atteint une valeur de 572,496,000 roubles et les exportations 688,552,000 roubles.

Les p r u d ' h o m m e s à Bienne. — On écrit de Bienne à la Tribune de Genèvç :

A chaque renouvellement des juges prud'hom- mes, la constatation s'accentue toujours plus que les premiers intéressés sont précisément ceux qui s'en désintéressent le plus. Et cependant ce roua- ge, malgré les imperfections qu'il présente, a sans conteste ses grands avantages, aussi bien sous le rapport des frais que sous celui de la ra- pidité de la liquidation des différends. Il est bien possible que MM. les avocats, par exemple, su- bissent un déchet de par cette resolution, mais c'est là un de ces accidents ou conséquences de toute innovation. Ce qu'il y de certain, c'est que bien des litiges s'arrangent aux prud'hommes qui ne recevraient jamais de solution devant le tribunal, à cause des frais.

Sur 4000 ayants-droit au vote, ceux des can- didats ouvriers qui ont obtenu le plus de voix ont réuni 72 voix, et ceux qui en ont obtenu le moins, 8.

Pour les candidats patrons, le plus 10 voix, le moins 2.

Ces chiffres se passent vraiment de commen- taires !

Le prix d e s s e r f s . — A l'occasion du 40me

anniversaire de l'émancipation des serfs de Rus- sie, — auquel la venue du tsar donne un intérêt plus voisin de nous, — un journal russe publie quelques prix des serfs pendant la fin du dix- huiliéme siècle et le commencement du dix- neuvième.

Dans les archives de Smolensk, on retrouve les traces d'un marché conclu en 1751, où une veuve et sa fille sont évaluées 3 roubles. En 1771, une jeune fille valait 5 roubles. Les prix allaient augmentant: en 1785, la jeune fille était comptée 7 roubles, et 10 en 1791 ; en 1803, le prix mon- tait jusqu'à 13 roubles.

Les acheteurs de chair humaine se lamentaient sans doute, el les vieilles gens rappelaient « le bon temps d'autrefois», vers 1732, quand on

avait un homme, sa femme et trois enfants pour 7 roubles. Les fils des émancipés se reportent avec moins de regret vers ce passé heureusement aboli et rêvent d'une liberté plus haute encore et plus complète. La devront-ils à Nicolas I I ?

La f o r t u n e d e l ' E u r o p e . — Voulez-vous connaître l'état de la fortune de l'Europe? Quand on n ' a pas le sou, ca fait toujours plaisir de jon- gler avec les milliards.

La fortune mobilière et immobilière de l'Eu- rope est de 1,175 milliards. Le capital mobilier seul représente environ 500 milliards. Au point de vue de la richesse totale, les principaux Etats européens se succèdent dans l'ordre suivant:

Angleterre 295 milliards, France 247, Allemagne 201, Russie 160, Autriche 103, Italie 79, Belgi- que 25, Hollande 22 milliards.

D'après ces chiffres, voici quelle devrait être la fortune moyenne de chaque h a b i t a n t ; un An- glais doit avoir 7,400 francs, un Français 6,600, un Hollandais 4,600, un Belge et un Allemand 3,900, un Autrichien et un Italien, 2,500, et un Russe 1,500.

Variété

L'exportation de John Bull Le correspondant de Londres du Monde éco- nomique écrit à ce journal la correspondance suivante qui ne manque pas de p i q u a n t :

Le commerce extérieur du Royaume-Unis n e saurait être complet si l'on n ' y comprenait John Bull lui-même. S'il est un être humain qui se déplace facilement, c'est sans contredit l'Anglais.

Son île, trop petite pour son ambition et ses be- soins, l'aiguillonne, le pousse vers d'autres rives.

Toutes les latitudes, tous les climats lui convien- nent pourvu qu'il puisse s'y enrichir ou s'y amuser.

Ge système de déplacement est une nécessité nationale. En Angleterre, les moyens d'existence sont limités et dans presque toutes les familles anglaises on compte u n marin, un soldat ou u n émigré.

Des |sociétés philanthropiques, commerciales,

financières, voire même religieuses, des bureaux d'émigration contrôlés p a r l'Etat se chargent d'exporter J o h n Bull dans les colonies britan- niques.

Tous les a n s , plus de cent mille Anglais, y compris 35,000 Irlandais s'expatrient pour cher- cher en d'autres lieux un travail plus facile et mieux rétribué.

L'émigré anglais offre un mélange curieux de bon et de mauvais. Il empqrte avec lui ses us et coutumes et autant que possible ses aliments et ses boissons nationales. Son porte-manteau con- tient un attirail complet de tout ce qui peut con- tribuer à son bien être ; tout y est condensé, té- lescopé.

Sa bibliothèque de voyage se réduit à une bi- ble, u n Shakespaere, un guide, des brochures religieuses et quelques romans anglais moraux, insipides, mais à la mode.

En général l'Anglais ne parle qu'une langue, la sienne et cela assez mal, en négligé. Quand il parle une langue étrangère ilia parle à l'anglaise, c'est-à-dire à pleine bouche. Touriste ou voya- geur de commerce, John Bull reste Anglais II s'habille, vit, boit, mange,; pense, marche, court, joue, danse, porte les cheveux et la barbe, pense, parie, jure et prie à l'anglaise.

Il va à l'Opéra en complot gris-clair et dîne en habit noir. Il salue de la main et retire rarement son chapeau. Qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il fasse une chaleur tropicale* ou qu'il gèle il sort fréquemment en casquette e n étoffe bariolée, un mackintosh sous le bras 'et en guêtres jaunes dont il met les boutons de face. C'est ainsi qu'on le rencontre dans les magasins, dans les musées, à l'église anglicane, au bois, au théâtre ou dans les beuglants qu'il daigne patronner pour « ( p a r lé corrioupcheune française » , comme il dit dans son langage tamisé. Lorsqu'il déambule sur les boulevards, il n ' y à place que pour lui, ses grands poings, ses longs bras, ses jambes fendues en équerre et ses rlongs pieds plats en- vahisseurs. Il a le don de tout voir, de tout en- tendre, de tout sentir, d e ' t o u t absorber en u n temps relativement court. Il digère plus vite en- core.

A P a r i s , à Berlin, en Chine, en Afrique, il affi- che sa nationalité. S'il consent à vivre chez les autres, c'est pour son propre bien. Il assimile tout ce qui lui parait bon et retourne chez lui après fortune faite lorsqu'il s'aperçoit qu'il n'y a plus rien à gagner. S'il vend a u x Français, il achète tout ce qu'il lui faut chez ses compatriotes.

En affaire l'Anglais ne transige jamais. P a s de choix ; il vous vend l'article qui lui plaît, u n prix qu'il veut et sans consulter vos goûts. Les colonies britanniques se peuplent graduellement, systématiquement, d'Anglais de toutes les classes de la société.

Il y a des sociétées organisés pour l'émigra- tion de la femme, car. on a constaté qu'en An- gleterre il y a un million de femmes de plus que d'hommes. Partout où l'Anglais émigré, il cher- che à s'implanter, à donner, lui, ses qualités, ses vices, son pharisaïsme, s a politique tortueuse et sa religion multiforme. On ne peut dire que l'émigration britannique ait profité à d'autres pays si ce n'est a u x colonies britanniques sans population aborigène appréciable.

John Bull a su souffler a u x autres nations leurs possessions. Il colonise a u x dépens d'autrui, mais on doit reconnaître qu'il sait coloniser, conserver ce qu'il possède et que rarement il abuse de sa victoire.

Dès qu'il occupe un coin quelconque du globe, il y établi un comptoir, une mission èvangélique, une école, un public-house (café) et u n e ban- que, le tout protégé par son armée et sa flotte.

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