FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1900-1901 N° 70
DE LA
COEXISTENCE 1 RMICISSE1W
ET DE COUPS ÉTRANGERS DANS L'ŒSOPHAGE
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN'MÉDECINE
présentée et soutenue publiquementle 26 Juillet 1901
PAR
Constant-Aimé-Alcide
DEL AIRENé àChallans(Vendée), le 5octobre 1875.
: MM. P1ÉCHAUD, professeur.... I''é i<lent
\ DEMONS, professeur.... i
Examinateursde la lliese i
PRINCETEAU, agrégé
^ Juge*.
'
CHAVANNAZ, agrégé. '
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
imprimerie y. cadoret
17, liiK PiiQUëLIN-MoMÈBE, 17 (ancienneruemontméjan)
1901
FAf.UI.Tli DE
MÉDECINE ET DE PIIAKMAC1E DE I10RIIEAM
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Pardélibération du 5août 1ST9, laPacultèaarrêtéque lesopinions émises dansles
qui sont présentées doivent être considérées comme propres à leurs auteurs,
et qu'ele n
leurdonnerni approbation niimprobation.
hèsesqul
A LA MÉMOIRE DE MA MÈRE
A MON PÈRE
A MES FRÈRES ET SOEURS
ME1S ET AMICIS
A mon Président de Thèse,
Monsieur le Docte ur T. PIÉCHAUD
Professeurdeclinique chirurgicale
infantile,
àla
Faculté de MédecinedeBordeaux,
Officierde l'Instructionpublique.
AVANT-PROPOS
Aumoment cle terminernos études médicales, nous ne man¬
querons pas, suivant l'ancienne tradition, de remercier les
maîtres qui, durant le temps passé à la Faculté, ont bien voulu
s'intéresser ànous.
N'ayant jamais cherché à attirer sur nous l'attention denos professeurs, nous n'avons pas eu l'avantage d'être remarqué du grandnombre. Nous n'en sommes que plus reconnaissant àqui
abien voulunoustémoigner quelque bienveillanceetnousaider
de ses conseils.
A M. leprofesseur Piéchaud,nousdemandonsd'agréer l'hom¬
mage de notreprofonde reconnaissancepourla sollicitude bien¬
veillante aveclaquelleil a bien voulu nous suivre et nous aider
de ses conseils. Le temps passé dans son service restera dans
notre mémoire commele meilleur de notre vie d'hôpital. Nous
le remercions aussi dugrand honneur qu'ilnous fait en voulant
bien présidernotre thèse.
Après ce maître dévoué, nous ne manquerons pas d'adresser
nos sincères remercimentsàsonchef declinique, M. le D'Guyot, qui, après nous avoir inspiré notre travail, a bien voulu nous aiderde ses conseils.
Merci enfin à M. le Dr Gourtin, chirurgien de l'Hôpital des
entants et à l'aimable Directeur de la maison de santé d'Arès, M. le Dr Peyneau, qui ont bien voulu nous fournir l'observation principalede notre thèse.
DE LA
COEXISTENCE III! RÉTRÉCISSEMENT
et de corps étrangers dans l'œsophage
INTRODUCTION
En abordantnotre sujet, nous ne prétendonspasfaire absolu¬
mentœuvreoriginale. Lesrétrécissementsetlescorpsétrangers
de
l'œsophage
ont été en effetbien souventétudiés avant nous; les observations publiées sur ces faits sont pour ainsi dire sansnombre, mais les faits de coexistence de rétrécissement et de corps étrangers sontbienplus rares.
Malgré de longues et patientes recherches, nous n'avons pu
eneffetentrouver que deux observations et encore datent-elles de
longtemps.
La réunion de ces deux faits semble pourtant toute naturelle.11 n'y a rien d'extraordinaire à ce qu un organequi, normale¬
ment, arrête et fixe les corps étrangers, doive, dans les cas de
rétrécissement,
les arrêter à plus forte raison. Les chances de déglutition d'objets tenus dans la bouche, avalés pardéfiou parmégarde ne sont pas diminuées pour cela.
Et cependant, au point de vue du traitement, le chirurgien
seraconduit à agir de toute différente façon, dans ces cas, pour
— 12 —
l'extraction des corps étrangers, puisqu'un
rétrécissement
anor¬mal viendra en gêner la sortie. Il
lui
faudraalors les combiner
pour traiter les deux
accidents.
Pour conserver de l'ordre dans notre travail, nous avons dû
traiter successivement, après un rapide aperçu
anatomique de
l'œsophage, d'abord lesrétrécissements, puis les
corpsétrangers
de l'œsophage, en faisant
suivre
cesdeux études respectives de
deux cas decoexistence déjà publiés et d'un autre encore
inédit.
CHAPITRE PREMIER
ANATOMIE DE L'ÛESOPHAGE
L'œsophage est la portion du tube digestif qui, faisant suite
au pharynx, s'étend de la partie inférieure du cou à la partie supérieure de l'abdomen pour aller s'aboucher dans l'estomac.
Nous avons donc à y considérer trois parties : la première, cervicale; la deuxième, thoracique et la troisième, abdominale.
11 s'étend de la sixième vertèbre cervicale à la partie latérale gauche de la onzième dorsale. L'œsophage a pour limite supé¬
rieure le bord inférieur du cartilage cricoïde et du muscle
crico-thyro-pharyngïen,
pour limite inférieure, le bord dumus¬cle dentelé au niveau duquel, à l'intérieur, se montre la sépa¬
ration entre l'épithélium œsophagien et l'épitliélium gastrique.
Dans toutson parcours, l'œsophage est appuyésur la colonne
vertébrale. Toutd'abord, il est directement situé sur la colonne vertébrale, puis se porte à gauche où il déborde la trachée
artère. C'est là seulement que pour l'opération de 1 œsophago-
toniie externe il est accessible.
Luis il pénètre dans le thorax. Là il revient sur la ligne
médiane au niveau de la quatrième vertèbre dorsale. Au
moment de franchir l'orifice diaphragmatique, il revient à
gauche pour s'ouvrir directement dans l'estomac.
Lœsophage,dans son ensemble, présente doncdeux
courbes
allongées : l'une, supérieure, à convexité gauche; l'autre, inté¬rieure, à convexité droite. *
Après avoir vu ses limites,sa forme, il nous reste à parler de
ses rapports.
Dans sa portion cervicale, il a directement en avant de lui la
partie membraneuse de la trachée artère, en arrière, la dernière
vertèbre cervicale et la première dorsale. C'est là un fait qu'il
est bon de se rappeler et qui sert dans sa recherche pour
l'œsophagotomie, que sur la ligne médiane il n'y a rien entre
la trachéeet la colonne vertébrale que l'œsophage.
De chaque côté se trouvent : le lobe latéral du corps thy¬
roïde, la carotide primitive, l'artère thyroïdienne inférieureet
le nerf récurrent; mais, par suite de l'inclinaison à gauchede l'œsophage, ce nerf passe sur sa face antérieure; la carotide gauche devient alors plus rapprochée encore. Il est recouvert
par le muscle sterno-hyoïdien gauche; tous inconvénients
qui
compensent l'avantage de l'atteindre de ce côté et qui donnent
à l'œsophagotomie sa difficulté.
Dans sa portion thoracique, il est en rapport avec les divers
organes contenus dans le médiastin postérieur; particulièrement
en avant, avec la trachée artère, puis, à la bifurcation de ce conduit, avec la bronche gauche et la face postérieure ducœur.
En arrière, se trouvent le canal thoracique, la grande
veine
azygos, les artères intercostales droites et la colonne
vertébrale
dont il s'éloigne un peu vers sa partie inférieure.
A droite, le feuillet droit de la plèvre du médiastin
posté¬
rieur.
A gauche, l'origine de la carotide primitive gauche, la sous-
clavière gauche, l'angle que font les deux portions
horizontale
et descendante de l'aorte, le feuillet gauche du
médiastin et
enfin l'aorte thoracique, qu'il croise bientôt très
obliquement
en avant, pour se diriger vers l'orifice diaphragmatique.
Dans sa portion diaphragmatique ou abdominale, il traverse
d'abord une sorte de canal musculeux qui lui est ménagé
clans
le diaphragme au devant de l'entrecroisement des piliers
de.ee
muscle entre lesquels passe l'aorte. Dans ce trajet,
l'œsophage
reçoit quelques filets musculaires grêles et pâles, qui
descen¬
dent le long de sa partie inférieure et jusque sur l'estomac;
filets qui le fixent et le maintiennent dans sa position. Les rap¬
ports sontcomplétés en avant et à gauche par le lobe
gauche
du foie; à droite, par le lobe de Spiegel. Le péritoine
l'enve-
— lo —
loppe presque complètement et le rattache à ces parties par de petits replis.
Il offre aussi des rapports généraux d'une autre nature.
Durant tout son parcours il est entouré d'un tissu cellulaire
lâcheetséreuxqui lui permetdes glissements faciles surlespar¬
ties voisines. Ces glissementssontcependantun peumoinséten¬
dus vers le haut où ce tissu est un peu plus serré,et vers le has
où il est remplacé par le péritoine lui-même.
Sur son trajet de nombreuxganglions lymphatiques se logent
dans cettegainecellulaireetenparticulierauniveaude la bifur¬
cation de la trachée. Les deux nerfspneumogastriques prennent
sur lui leur point d'appui et l'entourent d'un réseau anastoino-
tique allongé dans le sens vertical. Tout à fait à sa partie supé¬
rieure, le pneumogastrique gauche est en avant de lui, le droit
en arrière, pour, de là, se porter chacun à sa place défini¬
tive.
Dune façon générale, l'œsophageprésentela forme d'untube cylindrique, ouplutôt légèrement aplati dans lesens antéro-pos- térieur, surtout dans sa portion cervicale.
Sa longueur moyenne chez l'homme est de 25 centim. Son
calibre a été très attentivement étudié eu égard à la double questiondes corps étrangers et du cathétérisme.
Dabord légèrement évasé, il va en se rétrécissantjusqu'à la
troisième ou quatrième vertèbre dorsale. Puis il revient insensi¬
blementàun diamètreplus considérableetfinitpars'ouvrir dans
1estomac par un véritable infundibulum qui est le cardia.
Lœsophage figurerait donc assez bien deux cônes allongés
dontles sommets s'abouchent vers la troisième ou la quatrième
vertèbre dorsale et dont les bases élargies s'ouvrent l'une dans
le pharynx, l'autre dans l'estomac.
Son origineestétroite, c'estlà le point le moins dilatable, puis
Mentune dilatation olivaire, puis encore un rétrécissementpro¬
cessif auquel fait suite un élargissement également progressif.
Dépendant cette ampliation n'est pas continue; elle est en eHet
interrompue
auniveau de la bronche gauche pour se con¬tinuer plus loin.
— 16 —
Enfinundernier rétrécissement,trèsétroit
mais très dilatable,
se trouve au passage de
l'œsophage à travers le diaphragme.
A l'extérieur, l'œsophage présente une
coloration d'un gris
rosé, une surfacelisse et
luisante
commecelle d'une séreuse.
A l'intérieur la muqueuse se présente commeune
membrane
flasque, mobile, dont
la couleur blanchâtre contraste avec la
couleur rougeàtre du pharynx et
l'aspect cendré de l'estomac.
Sesparois sont charnues et
épaisses de 3 à A millimètres.
Elles reviennent surelles-mêmesets'aplatissentau
point d'en¬
treren contact.
La muqueuse présente
aussi des sillons longitudinaux et, à sa
partie
terminale, quelques rides transversales qui indiquent une
sorted'expulsion decettemuqueusevers
l'estomac dans la déglu¬
tition.
Structure. — L'œsophage
comprend
àtitre d'éléments fonda¬
mentaux quatre tuniques
emboîtées les
unesdans les autres :
l'externe fibreuse; une deuxième franchement
musculeuse, la
troisième cellulo-fibreuse et l'interne muqueuse. Comme
élé¬
ments accessoires, on trouve des artères,
des veines, des vais¬
seaux lymphatiques et des
nerfs.
La tunique externe est
composée de fibres de tissu conjonctil
entremêlés de très belles fibres élastiques. Celle
qu'elle
recou¬vre est franchement musculaire, avons-nous
dit, mais la strati¬
fication, la direction, la provenance
et jusqu'à l'espèce de ses
fibres ont donné lieu à des contestations.
Les fibres propres
constituent deux couches de fibres muscu¬
laires àdirection tout opposée.
La plus
superficielle
necontient
quedes fibres longitudinales
qui partent toutes
de la face postérieure et des bords latéraux
du cartilage cricoïde et recouvrent
complètement le tube œso¬
phagien.
L'insertion du larynx
sefait
par untendon que l'on
peut considérer comme un
véritable ligament antérieur ou sus-
penseur de
l'œsophage.
Du bord libre et des faces latéralesde cetendon
partent deux
ordres de fibres; les unes, verticales,
descendent directement
sur la face antérieure de l'œsophage,
tandis
qued'autres des-
- 17 -
cendent obliquementsur les côtés pour se porter enarrière où elles s'anastomosent en hauteur et en épaisseur avec les fibres
venant du côté opposé. L'œsophage est donc enveloppé com¬
plètement par cette couche musculaire assez serrée pour qu'à
travers les mailles de l'entrecroisement on puisse à peine aper¬
cevoir la couche de fibres circulaires. Celle-ci, sous-jacente, est moinsdense, moins épaisse, mais plus homogène que la précé¬
dente.
Les fibres supérieures semblent, continuer le constricteur inférieur du pharynx.
En descendant, les fibres dessinent des ellipses plus oumoins
inclinées qui s'entrecroisent et s'anastomosent pour redevenir
transversales dans la partie inférieure. La couche circulaire possède alors une plus grande épaisseur, sans toutefois arriver
à constituer un véritable sphincter autour du cardia. Plus bas encore, les derniers anneaux s'inclinent pour former les deux plansinternes de la tunique musculaire de l'estomac.
Ces deux couches musculaires sont directement en rapport l'une avec l'autre; ellessont recouvertesendehors par la mince tunique séreuse dont nous avons parlé et, en dedans, par la tunique cellulo-fibreuse.
On admet, en général, que dans le tiers supérieur, surtout dans la portion extra-thoracique, il n'y a que des libresmuscu¬
laires striées. Cependant, comme exception, quelques-unes sont anastomosées entre elles. Au-dessous, des fibres lisses et des fibresstriées, surtout dans la couche circulaire. Enfin, vers la
terminaison, les fibres seraient toutes de nature organique,
comme celles de l'estomac et de l'intestin.
Gillette (1845) résumait ainsi ses affirmations :
1° 11 existe toujours des fibres musculaires striées et même il
nY a fiue de celles-là dans la partie supérieure de l'œsophage;
Dans lapartiemoyenne, au contraire, il n'ya que des libres lisses;
3° Età la pai'tie inférieuredes fibres lisses et des fibresstriées,
mais le nombre de celles-ciest moins considérableenbas qu'en haut,
Delaire
2
— 18 —
Mais il faut ajouter à cette structure et compter
aussi les
fibres accessoires, éléments musculaires déliés que
le muscle
œsophagien emprunte ou
envoie
aux organesles plus voisins.
Telles sont les fibres trachéo-œsophagiennes.
Les fibres broncho-œsophagiennes qui, de la
bronche gauche,
descendent sur l'œsophage.
Le faisceau cortico-œsophagien voisin des
fibres précédentes
mais non constant.
Les fibres pleuro ou
médiastino-œsophagiennes, naissant de
la lame droite ou gauche de la plèvre
médiastine, qui passent
devant l'aorte pour aller se confondre avec
les fibres longitudi¬
nales et circulaires de l'œsophage.
Les faisceauxde renforcementdelaportion
abdominale
cons¬tituent en grande partie les adhérences que
l'œsophage
con¬tracte avec les bords de l'ouverture du diaphragme et de
plus
ces muscles accessoires vont doubler la tunique
musculaire.
Rouget admet que du bord
de chaque pilier diaphragniati-
que se portent sur
l'œsophage des fibres musculaires pâles et
grêles qui s'y terminent en
décrivant des
ansesqui s'entrecroi¬
sentsur la face antérieure avec celles du côté opposé.
Ces fais¬
ceaux, sans former un véritable
sphincter, correspondent au
sphincter
œsophagien de certains animaux.
Tous ces faisceaux accessoires sont composés de fibres
lisses,
excepté cependant les
libres phréno-œsophagiennes, qui sont
striées, et grâce auxquelles
l'élément strié
serencontre à. la
partie inférieure
de la portion
moyennede l'œsophage.
Latunique cellulo-fîbreuse ou nerveuse,
la plus mince des
tuniques de l'œsophage, est peu
distincte. Elle est blanchâtre
et constituée par du tissu
conjonctif
presque pur,traversé de
fibres élastiques nombreuses.
Elle n'a presque pas
d'adhérence
avecla couche musculeuse,
tandis qu'elle double
absolument la couche
muqueusequ elle
accompagne dans ses plissements
et déplacements.
Elle renferme le corps même des
glandes qui
souvrent dans
l'œsophage et quelques
paquets adipeux.
La tunique muqueuse
unie
àla précédente est pâle. Elle
— 19 —
paraît presque lisse malgré les papilles qui sont assez apparen¬
tes et les ouvertures glandulaires de sa surface. Elle est consti¬
tuée par du tissu conjonctif serré, traversé par des fibres élas¬
tiques très fines et même par des fibres musculaires non striées et longitudinales.
Elle est revêtue d'un épithélium pavimenteux stratifié sem¬
blable àcelui de la cavité buccale.
Lesglandes œsophagiennessont plutôt logées dans la couche précédente que dans la muqueuse.Ce sontles glandes en grap¬
pes, à acini distincts et à conduits excréteurs assez longs, mises
enévidence par Sappey qui les injecta.
Les artères viennent successivement, en allant de haut en bas : des thyroïdiennes inférieures, pour la portion cervicale;
bronchiques
et de l'aorte même, pour la portion thoracique et enfin, pour sa terminaison, de la coronaire stomachique.Elles s'anastomosent entre elles dans l'épaisseur même de la paroiœsophagienne et aboutissentaux papilles de la muqueuse où elles forment des anses par lesquelles l'artériole se continue dans la veinule.
Le système veineux est plus développé que le système arté¬
riel. Il forme un plexus à mailles allongéesdansle sens de l'axe
œsophagien, surtout dans sa partie inférieure,entre les couches
celluleuse et
fibro-muqueuse.
Les veines se rendent aux veines thyroïdiennes inférieures,
aux
bronchiques,
aux péricarcliques, à la grande azygos et ù lacoronaire
stomachique.
Les
lymphatiques
naissent de la muqueuse. A l'origine, ils forment des réseaux très serrés, surtout apparents au cardia,ou ils
s'interrompent
brusquement sans communiquer avec leslymphatiques
de l'estomac.Plus haut les réseaux d'originesont plusrares etles branches qui en émanent suivent un trajet ascendant assez long entre les tuniques œsophagiennes avant de se porter en dehors vers les ganglions qui entourentl'œsophage.
Les nerfs viennent de deux sources : des
pneumogastriques
et du grand sympathique. Les premiers fournissentles princi-
paux rameaux nerveux
et cela
enraison même des rapports
intimes qu'ils affectent avec
l'œsophage.
Le grand
sympathique envoie, de
saportion thoracique quel¬
ques filets rares et
grêles qui
seconfondent dans leur distribu¬
tion ultérieure avec les précédents sans que
leur terminaison
soit parfaitement connue
dans l'épaisseur de la muqueuse et de
ses papilles.
CHAPITRE II
RÉTRÉCISSEMENT DE L OESOPHAGE
On entend par rétrécissement de l'œsophage un état patholo¬
gique diminuant son calibre, l'effaçant sans l'obstruer, causant des troubles fonctionnels variés, et, cependant susceptible de
transformations régressives par un traitement approprié. C'est
par une gêne,un obstacle au coursde ladéglutition, que se tra¬
duisent la plupart des affections de l'œsophage, et c'est un rétrécissement effectif de l'organe qui produit cet obstacle.
Nombreux sont les ouvrages qui ont été publiés soit sur l'ensemble du sujet, soit sur le traitement à suivre. Nombreu¬
ses aussi sont les observations de rétrécissement, mais, ainsi
que nous le disions au début, les observations de rétrécisse¬
ments accompagnés de corps étrangers manquent absolument,
Nous allons cependant étudier en quelques mots les rétré¬
cissements en général, donner quelques modes de traitement,
nous réservant de ne discuter que l'opportunité de ceux se rap¬
portant à notre sujet.
Ces rétrécissements de l'œsophage sont toujours le résultat
d un trouble pathologique antérieur, actuellement épuisé, ou existant encore.
On endistingue plusieurs variétés :
1° D'abord le rétrécissement congénital. Les cas en sont
rares, et dans les quelques exemples publiés, l'enfant mourut toujours d'inanition au bout de quelquesjours.
2° Rétrécissements dus à l'absorption de substances causti¬
ques. C'est, de tous, le cas le plus fréquent. Le mal procède
par une perte de substance que le caustique a déterminée, etle
— 22 —
rétrécissement dépend d'un tissu de cicatrice, réparateur il est vrai, mais exerçant sa rétractioninévitable.
Dans d'autres cas moinsgraves, lerétrécissement, plus tardif,
résulte d'une inflammation lente du tissu sous-muqueux avec
hypertrophie des tuniques
œsophagiennes
etauxdépens du cali¬
bre de l'œsophage. On a signalé comme cause
de rétrécisse¬
ment, une hypertrophie de la tunique
musculaire formant,
surun point, un véritable anneau
constricteur.
3° La syphilis de l'œsophage a,
d'après Lancereaux,
pour qualité spéciale de rétrécir lecalibre de
ceconduit, qu'il
s'agisse d'une gommecirconscrite, ou
d'une infiltration syphili¬
tiqueet,dans ces cas,si letraitement
spécifique arrive
troptard,
il n'y a lieu alors que de s'attaquer au
rétrécissement.
4° Enfin les dégénérescences organiques :Squirrhe,
encépha-
loïde, épithélioma, etc. agissent de
bonne heure
surla perméa¬
bilité du conduit. Beaucoup de ces lésions ne se décèlentque par la gêne de la déglutition, sous
l'influence de cette réduc¬
tion de calibre.
Quelques auteurs veulent aussi y
ajouter le rétrécissement
du à l'alcoolisme chronique. D'abord on n'a pas
d'exemples
concluants; puis alors il s'agirait d'une
inflammation chroni¬
que ulcéreuse ou athéromateuse.
5° Deplus, l'obstruction du canal
œsophagien
peutêtre
pro¬voquée par des lésions
d'ordre pathologique,
serapprochant
plus ou moins des
précédentes, mais qui agissent d'une autre
manière; par des polypes, qui,
abstraction faite de leur nature,
empiètent directement sur
la lumière du conduit
àla manière
d'un corps étranger; par des
compressions extérieures
parrap¬port au conduit : toute tumeur,
développée
aucontact, de l'œso¬
phage. peut en déterminer la
compression
àunmoment donné.
La plus commune de ces tumeurs est
l'anévrysme de d'aorte
thoracique, puis viennent les abcès et
les encéphaloïdes du
.-mé¬dia stin postérieur. Ces causes agissent
d'abord
parcompression
directe, puis par déplacements latéraux et
enfin elles peuvent
déterminer de lagangrène.
Dans tout rétrécissement, ilfauttenir compte aussiduspasme
— 23 —
qui vient s'ajouter plus ou moins à toute coarctation et semble
en augmenter l'étendue ou la puissance.
Le siège du rétrécissement n'est soumis à aucune loi; il se
produit où agit la cause; mais dans les coarctations spontanées,
les chances sont en faveur des points normalement rétrécis :
origine du conduit, niveau de l'intersection de la bronchegauche
et de l'aorte, enfin passage du diaphragme.
Quand l'obstruction est due à une compression externe, le siège est forcément en rapport avecla cause de cette compres¬
sion.
Au point de vue du nombre, les rétrécissements sont simples
ou multiples. Ce dernier cas est surtout fréquent dans les empoisonnements par les caustiques. Alors le tissu de cicatrice, inextensible, ordinairement de teinte ardoisée, affecte parfois la dispositionen brides, en rayons étoilés.
La forme, la hauteur et le calibre sont variables à l'infini, suivant les différentes causes du rétrécissement, suivant la réaction plus ou moins grande du conduit et suivant les points
touchés.
Les plus fréquents, de nature cicatricielle, se présentent
comme des indurations limitées sous forme d'anneaux, de plaques. Le type d'empoisonnement caustique est l'ulcère simple, la gangrène limitée. Une gomme syphilitique évacuée
conduit en dernier lieu au même résultat.
Les produits néoplasiques peuvent affecter la disposition polypeuse aussi bien pour le tissu fibreux que pour une dégé¬
nérescence plus grave.
Les cancers, épithéliomas, encéphaloïdes, squirrhes forment
debonne heureun obstaclesur letrajet duconduitœsophagien,
soit en lui faisant perdre d'abord sa souplesse etsa dilatabilité,
soit en empiétant sur sa lumière même.
A la suite des lésions propres du rétrécissement, il y a lieu
de mentionner diverses altérations secondaires qui surviennent
commecomplications.L'ulcérations'emparantdu rétrécissement peut arriver à produire une perforation.
La compression de la paroi par un anévrvsme aortique peut
— 24 -
arriver au même résultat par la gangrène. La cause agit alors
de dehors en dedans.
Il résulte deces perforations des infiltrations ou des épanclie-
ments dans lemédiastinpostérieur, dans l'uneoul'autre plèvre, quelquefois la rupture de l'aorte ou d'un anévrysme.
Etant donné un rétrécissement notable ayant pour effet
d'amener la mort par inanition, on trouvera anatomiquement
tous les signes de la consomption portée à l'extrême etjusqu'à
des gangrènes partielles, résultat d'une nutrition plus qu'insuf¬
fisante.
Symptomatologie. — Les symptômes du rétrécissement
de
l'œsophage sont fournis par les troubles de ladéglutition,les
résultats du cathétérisme, par l'auscultation, par l'exploration
directe du cou et de la poitrine, par le palper et la
percussion,
par l'œsophagoscopie, et enfin par les phénomènes généraux
dus à la gêne de la nutrition.
Les troubles de la déglutition jouent le principal rôle dans
la
recherche du rétrécissementou du moins appellent lespremiers
l'attention du malade et du médecin.
Le malade éprouve d'abord une certaine hésitation à
avaler;
il se sent obligé de mâcher davantage ou de choisir des mets demi-liquides. Puis,à mesure que son rétrécissementaugmente,
il ne peut plus faire passer que les boissons.
Les renvois, les régurgitations éveillent chez le patient 1
idée
d'un obstacle qui se fait toujours sentir au même point,
celui
du rétrécissement. Peu à peu, les aliments s'accumulent au-
dessus du point rétréci, dans une dilatation acquise du
canal, et
nous voyons alors se produire la pseudo-digestion
œsopha¬
gienne, qui permet aux aliments de demeurer dans cette
dila¬
tation pendant un certain temps, etle vomissement œsophagien
se produisant lorsque la masse alimentaire est trop grosse en
ce point.
Ces derniers phénomènes ne sont possibles que lorsque
le
rétrécissement siège assez bas, autrement le rejet des
aliments
est immédiat.
De cet empêchement à la déglutition, des efforts
qu'il
en-traîne èt de la nature même de la lésion, résultent certains malaises : douleur, déchiremeut au point rétréci. L'accumula¬
tion des substances avalées amène la compression des organes
voisins, de la trachée, la suffocation, la turgescence des veines
du cou etdu visage, l'asphyxie.
Enfin le malade a la sensation d'un écoulement successifavec
gargouillement à travers le rétrécissement.
L'auscultation ne fournit pas des résultats bien précis. Ces résultats, du reste, peuvent varier avec les différents cas. Ham¬
burger distingue trois degrés décelés parl'auscultation.
Au premier degré, dit-il, on entend quelques bulles remonter
le long de la colonne liquide qui descend.
Audeuxième degré, c'est un léger gargouillement, et au troi¬
sième, enfin, des bruits de régurgitation sonore.
Par le palper direct et la percussion, on peut trouver une tumeur formée au-dessus du rétrécissement par l'accumulation
des aliments. Dans la portion cervicale, on pourrait aussi recon¬
naître des causes de compression extérieures au conduit. Si la
cause est dans la poitrine, anévrysmes de l'aorte, tumeurs du médiastin, ganglions lymphatiques hypertrophiés, on la recon¬
naîtra à ses caractères habituels.
L'œsophagoscopie
ne peut fournir que des données incertai¬nes, mais elle servira à reconnaître un rétrécissement de la
partie supérieure de l'œsophage au niveau du larynx.
Le procédé parexcellence, celui qui renseigne le plus exacte¬
ment, est certainement le cathétérisme, pratiqué soit au moyen de sondes en caoutchouc, soit, ce qu'il y a de mieux, avec une
longue tige flexible, en baleine ou en métal, terminée par une olive mobile et de dimensions variables. Le même instruinènt devientun agent possible de dilatation.
Le cathétérisme permetde déterminer :
Le siège du rétrécissement, par la profondeur à laquelle
1olive se trouve arrêtée. On prend pourpoint de repèrel'arcade dentaire supérieure.
Lahauteur sera appréciée par la différence de longueurentre les deux points où l'olive sera arrêtée en allant et en revenant.
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Le calibre sera indiqué parle diamètre de
l'olive qui
pourraforcer le rétrécissement.
D'autres signes peuventencoreêtre
recueillis; ainsi
unedévia¬
tion du conduit portera en sens inverse
l'anneau de la sonde.
De même, par le mouvement
possible de
côté etd'autre,
recon-naitra-t-on la dilatation de l'œsophage au-dessus du point
rétréci.
Enfin une succession de soubresauts indiquera la présencede
rétrécissements multiples.
Nous avonsparléplus hautdes
désordres amenés
parla
com¬pression du conduit :
suffocation, obstruction des vaisseux,
con¬somption, cachexie.
Nous avons dit un mot aussi des accidents qui peuvent
venir
compliquer la situation :perforations, épanchements dans les
médiastins, dans les plèvres, ouverture brusque
d'un
grosvais¬
seau et hémorragie foudroyante.
Au point de vue marche, durée et
terminaison
on nepeut
énoncer aucune loi générale ; ces questions dépendent
absolu¬
ment de lanature du malqui a produit le
rétrécissement, de
ce qui l'entretient.Ainsi il n'y a aucune analogie entre le
rétrécissement, tempo¬
raire dû fà une œsophagite traumatique et le
rétrécissement
cicatriciel qui ne se réduira pas.
Aucune analogie entre le rétrécissement à
marche aiguë et
courte et les rétrécissements qui s'établissent lentement.
11
y amême des rétrécissementsintermittents dus à l'inflammation
de
la muqueuseœsophagiennesous
l'influence de différentes causes.
Les rétrécissements par compression obéissent à
la
causequi
les produit et il arrive qu'ils existent
depuis longtemps avant
de provoquerdes troubles de la
déglutition.
Quoi qu'il en soit, un rétrécissement est
toujours chose grave
car sa marche est essentiellement progressive et la
dysphagie
finit par devenir absolue.
Aussi l'inanition est-elle rapide.
Cette issue fatale peut être hâtée par une des
complications
dont nous avons parlé, et auxquelles nous pouvons
ajouter la
tuberculose, sifréquente chezles
malades inanitiës
parunrétre-
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cissement œsophagien, comme l'ont montré Peter et son élève
Porchaire.
Cequi augmente encore la gravité du pronostic, c est que le
traitement long et pénible expose aussi à des accidents.
Le diagnostic repose sur l'étude des signes physiques; mais
avantde recourir à l'examen direct, on fera une enquête étiolo- gique aussi complète que possible. On étudiera la marche, la
durée de l'affection, on recherchera les signes des diverses complications que l'on peut avoir à redouter.
11 faut s'assurer que l'obstacle au passage de la sonde n est
pasproduit par un corps étranger ou une tumeur voisine qui comprime l'œsophage. Pour cela, on recherchera les signes
propres aux tumeurs intrathoraciques.
Il faut aussi s'enquérir de l'espèce de rétrécissement qui peut
fournir des indications au point de vue du traitement.
Un rétrécissement cicatriciel sera consécutif à une plaie œso¬
phagienne, à l'absorption d'une substance caustique, à un ulcère. Les désordres alors sont purement locaux et dordre mécanique.
Le rétrécissement cicatriciel estconsécutif à unléger trauma¬
tisme, à une action irritante légère ; sa marche est rapide, et il disparait quand le mal entre en résolution. Quand il y a un abcès desparois ces symptômes disparaissent brusquementpar
vofnique.
Le rétrécissement syphilitique sera reconnu par les antécé¬
dents dumalade, par l'action rapide de l'iodure de potassium.
S ilestdu à unulcère cicatriséou à l'évacuation d'une gomme, d rentre dans le cas du rétrécissement cicatriciel.
bans les cas d'occlusion cancéreuse, on a bientôt les phéno¬
mènes générauxde la cachexie; le mal s'étend aux organes voi¬
sinset on
peut ignorer si, dans l'œsophage, il est primitif ou secondaire. Il y a une courte période où la nature du mal reste
douteuse;
puis les progrès du mal vont vite, tout concourt à affirmer lagravité du cas.Danslecasde tumeur des parois, onestconduit à devinerpar
1obstacle à la déglutition l'épaississeméiit des tuniques œso-