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Le bois dans les constructions fluviales. Données et perspectives de recherche

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Environnement, Sociétés, Espaces

Le bois dans tous ses états

Le bois dans les const

Données et perspectives de recherche

Emmanuelle Miejac (UMR 6575 - Archéologies et Territoires, Tours)

Après avoir travaillé sur le problèm e de l'o ccu p a tio n de l'espace au travers de i'étude des zones d e franchissement et des structures perm ettant ce franchissement (Miejac 1997) - les ponts, les bacs e t les gués - une problém atique plus large a été définie, elle vise à retrouver le paysage ancien de la Loire au travers notam m ent des constructions présentes dans le it du fleuve (Miejac 2000). Les modifications, naturelles ou anthropiques, qu'il a subit sont, pour l'instant, difficiles à appréhender. Ce n'est que par un travail pluridisciplinaire m êlant histoire, archéologie, hydrologie, sédimentologie et géom orphologie que l'on pourra a pproche r un portrait fiable du fleuve ancien. Il est intéressant d'élargir cette problém atique à des lieux, à des rivières aux caractéristiques différentes afin de mettre l'accent sur des particularités régionales. C'est pourquoi, le Saint-Laurent et quelques affluents autour de Q uébec (C anada) s'intégrent aujourd'hui à ces préoccupations (Miejac, 2000). Les am énagem ents de rivière, faits de pierre et d e bois, par leur position dans le lit mineur participent à cette étude. Au-delà de ce tte problém atique générale, il est apparu que le bois e t son utilisation faisaient partie intégrante des différentes approches du milieu. De plus, lors de l'étude des constructions fluviales, de nombreux problèmes liés à l'emploi des différentes essences et qualités d e bois se sont faits jour.

En Loire, sur les quelques sites étudiés dans le Val d'Orléans dont les datations s'étalent entre le Xllle et le XVIIIe siècle, on constate l'utilisation majoritaire du chêne - Quercus robur le plus souvent (Miejac 1995). On peut se dem ande r s'il y avait un choix réel dans cette utilisation presque systématique. Peut-on lier l'em ploi de c e tte essence aux facilités d'approvisionnem ent? De grandes forêts de chêne bordaient en effet la Loire autour d'Orléans, de Blois et de Gien. Il est apparu que les pieux de chêne retrouvés présentaient des qualités très variées - cernes plus ou moins serrés, notamment - probablem ent liées à la nature du terrain dans lequel ils avaient poussé. Il semble aussi y avoir une hom ogénéité dans l'em ploi des différentes qualités pour une m êm e période historique. Peut-on généraliser cette constatation et faut-il la rapprocher d'une gestion différente du dom aine forestier selon les époques ? Une explication plausible serait éventuellem ent celle d'un fort besoin en chêne au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, notamment destiné à la construction navale. En liaison avec ce tte question, on peut se dem ander d'où provenaient les bois em ployés dans les am énagem ents fluviaux : directem ent de la berge ou de la forêt toute proche ? Rappelons que la navigation était importante sur la Loire, facilitant ainsi le transport du bois des diverses constructions. On sait, par exemple, que les chantiers de construction des bateaux fluviaux étaient situés en am ont de Cosne, durant l'époque moderne. Une autre question importante est celle du lien entre la fonction de la construction et le bois utilisé - essence et qualité. Com m e mentionné, bien que le chêne soit presque toujours em ployé, sa qualité est très variable. Enfin, il serait important de mener une étude précise sur la forme des pieux employés selon leur utilisation. Ils peuvent en effet être taillés en forme de pointes ; ils présentent alors 4, 6 ou 8 pans, renforcés par brûlage ou par des pointes de fer (Bonnamour 1992). Pour l'instant, il est difficile d e répondre, le déchaussement des pieux n'est pas aisé car ils sont enfoncés de 2 à 4 m dans le sédiment.

L'étude récente menée dans la région de Q uébec, sur le Saint-Laurent et les rivières affluentes, perm et de premiers constats. Tout d'a bord, les colons se sont adaptés à leur milieu et ont rapidem ent utilisé les essences locales pour construire les am énagem ents fluviaux - ponts, quais, pêcheries fixes (Miejac 2000). Ils exploitaient une grande variété d'essences. Pour les pêcheries, du bois tendre : de l'érable (A c e r sp.) ou d e l'osier. Ce type de construction non pérenne, détruite avant l'arrivée des glaces, implique l'utilisation de bois n'ayant pas la meilleure résistance dans l'eau (Moussette 1979). Pour la construction des ponts et des quais ou des châssis form ant une clôture autour des propriétés proches de l'eau : le « cèdre » - Thuja occidentalis - un bois a d a p té lorsqu'il est enfoui dans la terre ou sous forme de poteaux. Enfin, pour les quais, au d ébut du

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XVIIIe siècle, d'a près G édéon (1712) et selon les données de fouilles du chantier de la gare de Q u é b e c : les tirants - pièces luttant contre la poussée de la terre - étaient des troncs de « cèdre » - Thuja occidentalis - et de « tam arack » - Larix laricina - bois résistant, alors que les parements pouvaient être en « pruche canadie nne » - Tsuga canadensis - ou en pin blanc - Pinus strobus (Cloutier 1997; Leclerc 1995; L'Anglais 1993). À la fin du XVIIe siècle et durant le XVIIIe siècle, les intendants voulurent mettre en p la ce de grands chantiers de construction navale. Mais le bois qui semblait de bonne qualité - du chêne blanc ( Quercus alba) notam m ent révèle à l'usage de graves défauts. Les bateaux, de com m erce ou de guerre de fort tonnage, sont rapidem ent détruits. La documentation écrite est prolixe dans l'énoncé des essences utilisées, malheureusement l'espèce est rarement précisée. Le chêne est par ailleurs souvent rem placé par des bois de moindre qualité, a p p e lé « merisier » pour Betula alleghaniensis. mais aussi « noyer », « frêne », « orm e »,

«érable», «saule» ...essences qui n'étaient pas utilisées en France. D'après les qualités de ces différents bois, il est probable que le frêne : Fraxinus am ericana était utilisé ainsi que le noyer cendré : Juglans cinerea et l'orme blanc ou l'orm e liège : Ulmus am ericana ou U. racemosa. Dans le cas de l'érable : A ce r sp. et du saule : Salix sp., il est plus difficile de proposer une espèce particulière. L'un des premiers problèm es de la construction navale est l'approvisionnement en matériaux. Les archives sont riches : actes réservant le chêne, interdisant son emploi à tout autre usage, exploration des forêts autour d e Q uébec et dans la vallée du Saint- Laurent jusqu'au lac Champlain.

Cette appa re n te pénurie de bois de qualité met pourtant en avant l'adaptation des colons à leur milieu par le choix des sites exploités : proximité des rivières pour la facilité du transport, construction des navires en une seule saison afin que le bois ne s'altère pas lors d'un hivernage forcé et destructeur. Enfin, si dans un premier temps l'emploi des essences de bois canadien s'est révélé assez difficile, les Français canadiens puis les Anglais ont somme toute assez rapidem ent a d a p té leurs besoins aux bois disponibles. Au d ébut de l'installation de la colonie, on importe du bois d'Europe. On va ensuite exploiter les ressources locales, non sans mal semble-t-il (Cf. supra). Finalement, les bateaux construits sont de moindre tonnage et l'exportation des différentes essences vers l'Europe va s'organiser.

En conclusion, bien que le bois em ployé soit différent d'un pays à l'autre, d'un continent à l'autre, il est possible de trouver des points communs. Ainsi, les pêcheries fixes construites en France sont de types relativement semblables à ceux installés au Canada, par les amérindiens puis les colons. Les Français ont-ils importé leur technique, l'ont-ils apprise aux contacts des populations locales. Les mêmes observations peuvent être faites pour la construction de petites embarcations - canots d 'é c o rc e utilisés par les amérindiens e t par les colons. Une forte différence ressort pourtant : celle de la nature du milieu naturel et par extension de sa gestion. Alors qu'en France et en Europe, la forêt est contrôlée et organisée, elle est, au C anada, encore naturelle et présentée com m e une étendue aux ressources illimitées. Le rapport d e l'Homme à son milieu est donc com plètem ent transformé. Ce n'est que depuis quelques années que les problèmes d'environnem ent rentrent vraiment dans les préoccupations gouvernementales.

Éléments bibliographiques

B onnam our L. 1992. Fouille d 'a m é n a g e m e n ts m é d ié va u x dans le lit de b Saône au sud de Chalon. In: R e vue A rc h é o lo g iq u e d e l'Est e t d u Centre-Est 43, fasc. 2, n°162, 1992, Paris: éd. du C.N.R.S., p. 353-378.

Cloutier C. 1997. Rapport d e fouille, p la c e d e b Gare, Q ué bec.

C a ta lo g n e G. (d e ) 1712. Plan des seigneuries et habitations des g o u ve rn e m e n ts de Q ué bec, Trois-Rivières et M on tré al, nov. 1712. Bulletin d e R echerches Historiques, vol. XXI, nov. 1932.

L'Anglais P.G. 1993. Le site d e l'îlot Hunt. R apport de la d e u x iè m e c a m p a g n e d e fouille. 1993, Celât, Université Laval, Q u é b e c, 127p.

Leclerc M. 1995, A p p ro p ria tio n d e l'e s p a c e e t urbanisation d 'u n site d e la Basse ville d e Q uébec. La p re m iè re c a m p a g n e d e l'îlot Hunt. M ém oire d e Maîtrise, Q ué bec, 168 p.

M ie ja c E. 1995. Prospections en Loire a u tour d'O rléans, les datations, SRA, Orléans, 15 p.

M ie ja c E. 1997. Passer la Loire, p o n t b a c e t gués au fil d u fleuve autour d e b b o u c le d'O rléans. Les lieux d e fra n c h is s e m e n t d e b Loire d e Cosne-sur-Loire à Chaum ont-sur-Loire aux é p o q u e s m é d ié v a le e t m o d e rn e . D o cto ra t d 'a r c h é o lo g ie d e l'université d e Paris 1 sous la direction de L. Pressouyre et E. Rieth, 1250 p.

M ie ja c E. 2000. L 'o c c u p a tio n du Saint Laurent e t de quelques rivières autour de Q u é b e c aux XVIIe et XVIIIe siècle, R e vu e d'histo ire d e b culture matérielle. 20 p.

M oussette M. 1979. La p ê c h e sur b Saint Laurent, Montréal, 212 p.

Discussion

À la suite de ce tte intervention, se sont posées les questions des lieux de prélèvem ent des bois utilisés pour les constructions présentées dans l'exposé (H. Guiot) et des propriétés des bois liés à c e tte utilisation.

Com m ent influe le climat sur l'utilisation? Quel est l'action du gel sur le bois (fissures de gel)? L'étude des propriétés du bois en fonction des conditions climatiques est à développer. En outre, quelle signification précise recouvre véritablem ent le terme de «résistance» à propos d'un bois? On constate que ces préoccupations rejoignent d'ailleurs celles des deux exposés précédents.

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Les problèmes d'utilisation des ligneux fournis par les forêts du C anada, pour la construction navale, rappellent qu'une bonne connaissance des qualités des bois, et une gestion prévoyante des forêts, perm ettent l'obtention de matériaux appropriés. Mais la mauvaise qualité du bois des forêts canadiennes qu'ont ressenti les premiers colons n'était-elle pas dû à leur inadaptation initiale au milieu, co m p te tenu d e leurs besoins e t de leurs habitudes européennes ? Ne peut-on pas faire le lien a vec la façon dont les colons se sont évertués à doter les bois américains de noms vernaculaires européens issus de leur expériences passées. On connaît ainsi un grand nombre de « cèdre » qui en aucun cas n'appartiennent au genre Cedrus sp. Il en serait de m êm e du « merisier » mentionné par E. Miejac qui ne serait pas un vrai merisier mais un bouleau jaune - Betula alleghaniensis Britt. (D. Marguerie).

Enfin, il est rappelé la nécessité d'intégrer plus systématiquement la dendrologie aux problém atiques régionales, en évitant surtout de négliger les séquences courtes (A. Billamboz).

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