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Étude statistique de la dernière épidémie de grippe à Paris

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J OURNAL DE LA SOCIÉTÉ STATISTIQUE DE P ARIS

V. T URQUAN

Étude statistique de la dernière épidémie de grippe à Paris

Journal de la société statistique de Paris, tome 32 (1891), p. 62-67

<http://www.numdam.org/item?id=JSFS_1891__32__62_0>

© Société de statistique de Paris, 1891, tous droits réservés.

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I I I .

ÉTUDE STATISTIQUE DE LA DERNIÈRE ÉPIDÉMIE DE GRIPPE A PARIS.

L'épidémie de grippe qui a pris fin à Paris dans le courant de février 4890, a causé assez de ravages pour qu'il y ail intérêt à en faire la statistique : nous al- lons indiquer combien la maladie a fait de victimes, comment elle s'est comportée dans sa période d'ascension, d'état et de déclin; nous dirons enfin comment elle s'est répartie dans les divers quartiers de la capitale.

D'après les chiffres publiés à YOfjftciel par le Service de la statistique municipale, la mortalité causée par les maladies des organes de la respiration avait commencé à s'aggraver dès le commencement du mois de novembre, et l'on peut affirmer que c'est à cette seule aggravation qu'est dû l'accroissement constaté dans la mor- talité des mois de novembre, de décembre et de janvier.

Voici le nombre total des décès relevés par la statistique municipale pour les dernières semaines des années 1888 et 1889, et des premières semaines des an- nées 1889 et 1890. Ces totaux sont rapprochés des décès occasionnés par les ma- ladies des organes de la respiration (pneumonie, broncho-pneumonie, bronchite chronique et bronchite aiguë), et notamment par la phtisie pulmonaire :

Tolal des décès

Deces par maladie des urganeb de la respiration.

43e semaine 44» _ 45e - 46e 41" _ 48« — 49e - 50« — 51e 52« —

1"

1889

922 879 899 911 968 1,020 1,091 1,188 1,356 2,334

1890.

2,683 2,078 1,493 1,147 1,046 1,067

1888

996 946 900 873 806 876 942 981 982 1,033

1889

970 1,114 1,027 1,040 1,111 1,100

1889.

118 120 112 136 128 162 207 243 332 742

1890.

977 757 427 242 207 163

1888.

159 139 135 129 108 121 132 165 193 183

1889

155 212 181 186 206 170

Deces pai phtisie.

1 8 8 9 .

206 204 220 179 180 192 206 20 i 212 421

1890.

465 351 282 257 239 238

D'après ce tableau, on voit que la mortalité générale à Paris a commencé à dépasser la moyenne hebdomadaire pendant la 46e semaine de Tannée 1889 (vers le 15 novembre), et que ses progrès se sont fait sentir progressivement jusqu'au 15 décembre, date à laquelle l'épidémie s'est aggravée tout à coup : la mortalité s'est trouvée doublée à l'époque de Noël, et c'est au 1er janvier de l'année 1890 qu'elle a atteint son maximum d'intensité: elle était alors à peu près trois fois plus forte

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qu'en temps ordinaire (2,683 décès dans la première semaine, au lieu de 970 cons- tatés dans la semaine correspondante de 1889).

Une centaine de personnes meurent chaque semaine à Paris, par suite de mala- dies des organes delà respiration. En temps ordinaire, ce nombre augmente, et at- teint quelquefois le chiffre de 200, pendant l'hiver. Or, il se trouve qu'à partir delà 47e semaine de 1889, les décès de ce genre ont augmenté comme suit: 128, 162, 207, 243, 332, 742, 977. Au moment du 1er jour de Tan, les décès causés par les

maladies des organes de la respiration ont été six fois plus fréquents que Tannée précédente. Mais, à partir de ce moment, les décès diminuent rapidement : 977, 757, 427, 242, 207, 163 décès. L'épidémie était donc complètement terminée dès la 6e semaine de 1890, la mortalité générale étant revenue à son taux normal.

Les bulletins de la statistique municipale forment une catégorie spéciale des décès causés par la phtisie pulmonaire. Ces décès, comme on peut le voir par le

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tableau ci-dessus et par le diagramme qui en est la traduction, ont suivi une marche parallèle à celle de l'épidémie de grippe; le nombre de phtisiques emportés pendant les trois semaines les plus meurtrières ayant dépassé de deux à trois fois ia moyenne ordinaire: 465 décès pendant la première semaine de Tannée 1890.

On peut évaluer de 5,000 à 6,000 le nombre des victimes de l'épidémie ; c'est en effet de ce nombre que les décès des mois de décembre et de janvier ont dépassé ceux des périodes correspondantes dans les années précédentes.

Si Ton considère les ravages faits par l'épidémie, suivant Vàge des décédés, on trouve qu'ils ont été beaucoup plus considérables parmi les adultes et les vieillards que parmi les enfants.

D'un autre côté, le nombre d'adultes hommes enlevés par des inflammations aiguë s des organes respiratoires a été double de celui des femmes du même âge, tandis que dans la vieillesse, au contraire, les femmes ont souffert de l'épidémie autant que les hommes, si ce n'est plus.

Gela tient sans doute, fait remarquer M. Berlillon dans son rapport sur l'état sanitaire de la première semaine de 1890, à ce fait que les hommes adultes ne peu- vent pas se soigner aussi complètement que les femmes, leur profession les obligeant à ne pas se ménager, tandis que les femmes ont plus de loisir et peuvent mieux soigner leur convalescence. Dans la vieillesse, au contraire, les deux sexes sont également inoccupés et, parlant, également casaniers.

Pendant l'épidémie de grippe, toutes les maladies chroniques susceptibles de se compliquer d'accidents pulmonaires se sont trouvées aggravées, et leur terminaison fatale s'est trouvée hâtée; on en a trouvé de nombreux exemples chez les phtisiques et chez les personnes atteintes de maladies organiques du cœur.

Il nous reste à examiner maintenant quels sont les quartiers de Paris qui ont le plus souffert de Tinfluenza. Nous devons toutefois formuler cette réserve, que la statistique n'a pu connaître que le nombre des décès, et non celui des individus atteints. Force nous est de supposer que la proportion des décès, relativement au nombre des personnes atteintes, a été le même partout, ce qui n'eal pas démontré.

Sous le bénéfice de cette observation, voici quel a été le nombre des personnes décédées dans chacun des quartiers de Paris, rapprochés de ceux qui sont morts à la suite de maladies des voies respiratoires, pendant les onze semaines qui se sont écoulées du 24 novembre 1889 au 8 février 1890. (Voir le tableau ci-après.) Ce tableau montre que la moyenne de la proportion des décès occasionnés par les maladies des voies respiratoires a été de 46 p. 100 décès et de 3.4 pour 1,000 habitants pendant la durée de l'épidémie. Mais on peut voir, par les rapports qui sui- vent, qu'il y a à cet égard de grandes différences entre les divers quartiers.

Alors que la moyenne des décès par influenza s'est élevée, pendant l'épidémie, à 3.4 par 1,000 habitants pour l'ensemble des quatre-vingts quartiers, on constate qu'elle s'est élevée à 8.4 par 1,000 habitants dans le quartier de la Salpêtrière, à 4.4 p. 1,000 dans le quartier Saint-Merri, à 4.3 p. 1,000 dans les quartiers de Plaisance et de la Santé, et à 4.2 dans ceux delà Sorbonne et du Jardin des Plantes.

Elle n'a été, au contraire, que de 1.5 par 1,000 habitants dans celui de Bercy, à 1.6 p. 4,000 au Palais-Royal, à 1.7 p. 1,000 au faubourg du Roule, à 1.8 aux Invalides, à la Cliaussée-d'Antin et à la Porle-Sainl-Denis.

TABLEAU.

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Nombre de décès occasionnés par des maladies des organes de la respiration sur 1,000 habitants, pendant la période du 15 novembre 1889 au 1er février 1890.

Décès par 1,000 habitants.

Bercy Palais-Royal Faubourg-du-Roule

Invalides, Chaussée-d'Antin, Porte-Saint-Denis Gaillon, Champs-Elysées, Porte-Dauphine Saint-Georges

Odéon, Saint-Thomas-d'Aquin, Europe, Ternes Faubourg-Montmartre

Place Vendôme Archives

Notre-Dame, Val-de-Grâce, Madeleine, Bassins

Vivienne, Notre-Dame-des-Champs, Saint-Ambroise, Plaine-Mon- ceau

Saint-Germain-TAuxerrois, Saint-Germain-des-Prés, École-Militaire, Rochechouart

Arts-et-Métiers

Bonne-Nouvelle, Sainte-Avoye, Saint-Gervais, Maison-Blanche, Petit- Montrouge, Auteuil, Muette, La Chapelle

Porte-Saint-Martin, Quinze-Vingts, Croulebarbe, Batignolles . . . Arsenal, Gare, Épinettes, La Villette, Charonne

Enfants-Rouges, Picpus, Javel

Mail, Sainte-Marguerite, Montparnasse, Clignancourt, Saint-Far- geau

Halles, Hôpital-Saint-Louis, Bel-Air + Saint-Victor, Gros-Caillou, Folie-Méricourt

Monnaie, Roquette, Saint-Lambert, Grenelle, Goutte-d'Or . . . . Père-Lachaise

Necker, Grandes-Carrières, Amérique, Combat Saint-Vincent-de-Paul, Pont-de-Flandre, Belleville Jardin-des-Plantes, Sorbonne

Santé, Plaisance Saint-Merri Salpêtrière

1.5 1.6 1.7 1.8 2.0 2.2 2.3 2.4 2.5 2.6 2.7 2.8 2.9 3.0 3.1 3.2 3.3 3.4 3.5 3.6 3.7 3.8 3.9 4.0 4.1 4.2 4.3 4.4 8.4 Afin de faire mieux encore ressortir les différences accusées par les rapports pré- cédents pour les divers quartiers de Paris, nous avons dressé le cartogramme ci- après, qui indique, par des teintes plus ou moins foncées, les divers degrés d'in- tensité apparente de l'épidémie, suivant le quartier:

Un simple coup d'œil jeté sur ce plan montre que les quartiers qui ont le plus souffert sont, sur la rive gauche, ceux qui s'étendent de la Salpêtrière à la Monnaie, 3.8 décès à 8.4 par 1,000 habitants. On constate ensuite, toujours sur la rive gau- che, un foyer secondaire*d'épidémie, du quartier du Gros-Caillou à celui de Plai- sance, 3.7 décès à 4.3 pour 1,000 habitants.

Sur la rive droite, l'épidémie a sévi particulièrement dans les quartiers populeux de Saint-Merri, du Mail, de Saint-Gervais, des Halles, des Enfants-Rouges et Bonne-

lre SÉRIE. 32« VOL. H» 2.

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— 66 —

Nouvelle. Dans ces quartiers, les plus denses de Paris, l'épidémie a pu facilement se propager et faire de sérieux ravages. Il est à remarquer que la mortalité des quartiers de la Monnaie et de la Sorbonne, d'une part, et de Saint-Merri et des Halles, de l'autre, s'est montrée à peu près la même, bien qu'ils soient séparés par la Seine. C'est donc dans le centre même de la capitale, dans l'ancien Paris, là où Ton compte encore le plus de petites ruelles et la plus grande densité de la popu- lation, que l'épidémie d'influenza a fait le plus de victimes. En dehors de ces foyers principaux, nous remarquons que, du quartier du Pont-de-Handre à ceux de la Roquette et de Bel-Air, l'épidémie a fait de très sérieux ravages (4 décès par 1,000 habitants en moyenne).

Quant aux quartiers qui ont le moins souffert, ils se trouvent surtout à l'ouest et dans le centre, et ce sont généralement des quartiers riches,'comme, par exemple, la Porte-Dauphine (2 décès par 1,000 habitants), du faubourg du Roule (1.7 décès), des Champs-Elysées (2 décès), des Invalides (1.8 décès).

On peut dire, en résumé, que si toutes les classes de la société parisienne ont paru également éprouvées, on ne peut en dire autant des quartiers; l'ouest et une partie du centre, de la Porte-Saint-Denis à la Madeleine ayant été relativement bien moins maltraités que le nord-est et le sud-ouest. Les agglomérations de population n'en ont pas moins attiré et aggravé l'épidémie d'influenza, comme cela a été toujours remarqué pour les autres épidémies. Notre statistique prouve donc, une fois de plus, la nécessité qu'il y aurait, au seul point de vue de l'hygiène, d'éclaircir la po- pulation là où elle est trop dense, au moyen de larges voies (comme l'avenue de TOpéra, qui a assaini, il y a une quinzaine d'années, toute la partie de la rive droite qui s'étendait de la rue Saint-Honoré à TOpéra). A cet égard, le chemin de fer mé- tropolitain projeté rendrait de grands services en facilitant aux populations trop agglomérées du centre l'accès des faubourgs et de la banlieue.

V. TURQUAN.

Quartiers dans lesquels les maladies des voies respiratoire-, ont oim-iô sur

l,0C0habitan's

2 0 et au-dessous ^ de 2 1 à 2 5 de 2 6 a 2 9 de 3 à 3 3 m

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(7)

— 67

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