Les symboles Σ et Π. Le binôme de Newton
Nous consacrons ici un long chapitre au symbole Σ (et au symbole Π). A terme, la maîtrise de ce symbole est une compétence essentielle à acquérir et nous pensons qu’il faut y consacrer un nombre conséquent de pages.
Plan du chapitre
1 Le symbole Σ . . . .page 2 1.1 Etude d’un exemple . . . page 2 1.2 Définition . . . page 3 1.3 Règles de calculs . . . page 4 1.4 Changement de variables . . . page 5 1.5 Sommes télescopiques . . . page 7 1.6 Plusieurs calculs de
X
nk=1
k, X
nk=1
k
2et X
nk=1
k
3. . . page 10 1.7 Somme de termes consécutifs d’une suite arithmétique ou d’une suite géométrique . . . page 12 1.7.1 Suites arithmétiques . . . page 12 1.7.2 Suites géométriques . . . page 13 1.8 L’identité a
n− b
n. . . page 14 1.9 Sommes trigonométriques . . . page 15 1.10 Sommes doubles . . . page 16
2 Le binôme de Newton . . . . page 19 2.1 Les coefficients binomiaux . . . page 19 2.2 La formule du binôme de Newton . . . page 22 2.3 Application à la trigonométrie . . . page 25 2.3.1 Linéarisation . . . page 25 2.3.2 Polynômes de Tchebychev . . . page 27
3 Le symbole Π . . . . page 27
1 Le symbole Σ
1.1 Etude d’un exemple
Nécessité d’une nouvelle notation. La somme S
ndes entiers impairs 1, 3, 5,..., 2n − 1 s’écrit S
n= 1 + 3 + 5 + ... + (2n − 1).
Cette notation cohérente se révèle à l’usage pleine de pièges. En effet, que signifie l’écriture 1 + 3 + 5 + ... + (2n − 1) quand n vaut 1, 2, 3 ou même 4 ? Si on ne réfléchit pas suffisamment, on écrit S
2= 1 + 3 + 5 + ... + 3, alors qu’il fallait comprendre que S
2était constituée de 2 termes, en commençant par 1 et en finissant par 2 × 2 − 1 = 3. C’est encore pire avec S
1qui ne contient qu’un seul terme. On peut trouver désagréable que soit écrit explicitement le nombre 5 dans l’écriture de S
n, alors qu’il n’apparaît ni dans S
1, ni dans S
2... De manière générale, dans de nombreuses situations, les notations utilisant des pointillés sont sources d’erreurs si elles ne sont pas maîtrisées.
Pour cette raison et par souci de concision, on introduit une nouvelle notation. La somme S
nci-dessus est la somme des n nombres 2 × 1 − 1 = 1, 2 × 2 − 1 = 3,..., 2 × n − 1. Ils ont une écriture commune, à savoir 2k − 1 où k prend successivement les valeurs 1, 2,..., n. On décide alors de la noter
X
nk=1
(2k − 1) ( ∗ )
(la lettre grecque Σ correspondant à notre S, initiale du mot somme). On peut apporter sur l’expression ( ∗ ) les commentaires suivants :
⋄ en bornes du symbole Σ, on voit que k varie de 1 à n et on a donc en évidence le nombre de termes de la somme, à savoir n, ce qui était peut-être moins évident dans la notation utilisant des pointillés ;
⋄ dans l’expression X
nk=1
(2k − 1), nous avons fait l’effort de donner une écriture commune à chacun des termes de la somme et donc de comprendre cette somme, ce qui n’est pas le cas dans l’expression 1 + 3 + 5 + . . . + (2n − 1) ;
⋄ X
nk=1
(2k− 1) est une expression compréhensible même quand n = 2 ou n = 1. Dans ce dernier cas, la somme est constituée d’un seul terme et on parle donc d’une somme de un terme. Cette phrase a un sens conventionnel.
⋄ la somme obtenue est une fonction de n, mais n’est pas une fonction de k, ce qui est explicite dans la notation S
n(et non pas S
n,k) ou encore, on ne retrouve pas la lettre k dans le résultat final. Ainsi, on peut écrire une phrase du genre
∀ n ∈ N
∗, X
nk=1
k = n(n + 1) 2 , mais par contre, la phrase ∀ k ∈ N
∗, ∀ n ∈ N
∗,
X
nk=1
k = n(n + 1)
2 n’a aucun sens. Pour cette raison, la variable k est dite muette et on peut la remplacer par n’importe quelle autre lettre sans que cela ne modifie le résultat final :
X
ni=1
i = X
nk=1
k = X
nk′=1
k
′= . . . = n(n + 1) 2 .
⋄ l’écriture de S
nn’est absolument pas unique, et par exemple, on pourrait tout à fait considérer que les entiers 1, 3,..., 2n − 1 sont de la forme 2k + 1 où k varie cette fois-ci de 0 à n − 1 et écrire S
n=
n−1
X
k=0
(2k + 1), mais aussi que ces entiers sont de la forme 2k − 3 où k prend les valeurs 2, 3,..., n + 1 et écrire dans ce cas S
n=
n+1
X
k=2
(2k − 3) ; l’essentiel est d’obtenir 1 pour la première valeur de k considérée, 3 pour la deuxième,... et 2n − 1 pour la dernière.
Que signifie calculer une somme ? Calculons maintenant la somme proposée et pour cela, posons nous d’abord la question : que signifie la phrase « calculer la somme S
n» ? Calculer 1 + 3 + 5 consiste à effectuer les deux additions pour obtenir 9. De même, calculer 1 + 3 + ... + (2n − 1) consiste à effectuer les n − 1 additions et donc à exprimer le résultat sous une forme n’utilisant plus de pointillés.
Dans les paragraphes suivants, on décrira quelques techniques de calculs de somme. Ici, en calculant les premiers termes,
nous allons essayer de deviner une formule générale, formule que l’on démontrera ensuite par récurrence.
On trouve S
1= 1 puis S
2= 1 + 3 = 4 puis S
3= 1 + 3 + 5 = 9 puis S
4= 1 + 3 + 5 + 7 = 16 puis S
5= S
4+ 9 = 16 + 9 = 25.
Il apparaît, semble-t-il, la suite des carrés des nombres entiers, mais cette constatation est insuffisante. Nous ne savons toujours pas ce que vaut S
6avant de l’avoir calculé, et pour savoir si nous avons vu juste, il faut se diriger vers un raisonnement de portée générale : si au k-ème carré parfait, à savoir k
2, on ajoute le (k + 1)-ème nombre impair, à savoir 2k + 1, on obtient k
2+ 2k + 1 = (k + 1)
2qui est bien le (k + 1)-ème carré parfait. Tout semble coller et nous pouvons donc démontrer par récurrence que : ∀ n ∈ N
∗,
X
nk=1
(2k − 1) = n
2.
• Pour n = 1, S
1= X
1k=1
(2k − 1) = 1 = 1
2et la formule proposée est exacte.
• Soit n > 1. Supposons que X
nk=1
(2k − 1) = n
2. Alors,
n+1
X
k=1
(2k − 1) = X
nk=1
(2k − 1)
!
+ (2n + 1) = n
2+ 2n + 1 (par hypothèse de récurrence)
= (n + 1)
2.
Nous avons montré par récurrence que ∀ n ∈ N
∗, X
nk=1
(2k − 1) = n
2.
Les n − 1 additions ont été effectuées. Maintenant il est certain qu’il persiste dans le résultat final une multiplication (n
2= n × n), mais on peut estimer que la somme, elle, a été calculée.
1.2 Définition
On se donne une suite (u
n)
n∈Nde nombres complexes.
Pour p et n entiers naturels donnés tels que p 6 n, la somme des nombres u
p, u
p+1,..., u
nest notée X
nk=p
u
k. X
nk=p
u
k= u
p+ ... + u
n( ∗ ).
Ainsi, X
0k=0
u
k= u
0, X
5k=3
u
k= u
3+ u
4+ u
5, X
3k=1
u
2k+1= u
3+ u
5+ u
7et X
2nk=n+1
u
k= u
n+1+ u
n+2+ ... + u
2n−1+ u
2n. On peut donner une définition plus méticuleuse de P
nk=p
u
k, évitant l’utilisation de pointillés. On pose X
pk=p
u
k= u
pet ∀ n > p,
n+1
X
k=p
u
k=
X
nk=p
u
k
+ u
n+1(definition par récurrence).
La variable de sommation k est muette, ce qui signifie que la valeur de la somme n’est pas une fonction de k et que cette variable peut donc être remplacée par n’importe quelle autre variable, à l’exception des variables utilisées en bornes (ici les variables n et p), sans modification du résultat.
Analysons maintenant le nombre de termes de la somme ( ∗ ). On commence par le cas particulier où 1 < p < n. L’idée est de tout rapporter à l’entier 1.
nentiers
z }| { 1 ... (p − 1)
| {z }
p−1entiers
p ... n
| {z }
n−(p−1)entiers
.
Il y a ainsi n − p + 1 entiers entre les entiers p et n, p et n compris. Ce résultat reste clair quand p = n (dans ce cas, n − p + 1 = 1) ou p = 1 ou p = 0 (dans ce cas, n − p + 1 = n + 1). Donc, si n et p sont deux entiers naturels tels que p 6 n,
entre p et n, (p et n compris), il y a n − p + 1 entiers, la somme
X
nk=p
u
kest constituée de n − p + 1 termes.
Donnons maintenant différentes interprétations possibles d’une telle somme. Dans le cas d’une suite réelle, on peut inter- préter
X
nk=0
u
kcomme la hauteur totale d’un escalier dont la hauteur de la marche n
o0 est u
0, la hauteur de la marche n
o1 est u
1,..., et la hauteur de la marche n
on est u
n, étant entendu que si u
k> 0, la marche est montante et si u
k< 0, la marche est descendante (et de même pour l’escalier tout entier si
X
nk=0
u
k< 0).
u
0u
1u
2u
3u
n−1u
nX
nk=0
u
kDans le cas où la suite (u
n)
n∈Nest une suite de réels positifs, on dispose d’une autre interprétation graphique. En abscisse, on place les nombres 0, 1,..., n, n + 1, et en ordonnée, les nombres u
0, u
1,..., u
n.
u
0u
1u
2u
n−1u
n0 1 2 3 n − 1 n n + 1
. . . .
Si on note A
kle point de coordonnées (k, 0) et B
kle point de coordonnées (k, u
k) alors, puisque la distance de 0 à 1 est 1, u
0= u
0× 1 est l’aire du rectangle (A
0A
1B
1B
0), et plus généralement, puisque entre les deux entiers consécutifs k et k + 1, il y a 1 d’écart, u
k= u
k× (k + 1 − k) est l’aire du rectangle (A
kA
k+1B
k+1B
k). Par suite,
X
nk=0
u
kest la somme des aires des rectangles ci-dessus.
1.3 Règles de calculs
On commence par des résultats évidents qui ont besoin d’être énoncés mais nul besoin d’être démontrés.
(u
n)
n∈Nétant une suite complexe, pour n ∈ N , on pose S
n= X
nk=0
u
k. 1) ∀ n ∈ N , S
n+1= S
n+ u
n+1, et donc aussi ∀ n ∈ N
∗, u
n= S
n− S
n−1. 2) Pour n et p tels que 0 6 p < n,
X
nk=0
u
k= X
pk=0
u
k+ X
nk=p+1
u
k(relation de Chasles ).
En 1), la première formule fait comprendre comment on passe de la somme n
on à la somme n
o(n + 1) (on rajoute u
n+1), et la deuxième formule permet de récupérer u
nen fonction de S
n. Par exemple, si on sait que pour tout entier naturel n, X
nk=0
u
k= n(n + 1)
2 , on peut connaître la valeur du n-ème terme de la suite u : pour n > 1, u
n= S
n− S
n−1= n(n + 1)
2 − (n − 1)n
2 = n((n + 1) − (n − 1))
2 = n.
On peut noter que puisque l’on désirait obtenir la valeur de u
n, on n’a pas écrit u
n+1= S
n+1− S
n= ..., mais on a écrit u
n= S
n− S
n−1= ...
En 2), on doit simplement mettre en garde contre une trop grande analogie avec les intégrales. La relation de Chasles pour les intégrales est
Z
c a+ Z
bc
= Z
ba
. La deuxième intégrale « démarre » où « finit » la première. Avec le symbole Σ,
la première somme finit à p et la deuxième commence à l’entier suivant p + 1. Pour ne pas commettre l’erreur de faire
redémarrer la deuxième somme à p et ainsi répéter deux fois le terme u
p, il ne faut pas hésiter à se redétailler les différentes sommes à l’aide de pointillés en explicitant les débuts et les fins de sommes :
u
0+ u
1+ ... + u
n−1+ u
n= (u
0+ ... + u
p) + (u
p+1+ ... + u
n).
Soient (u
n)
n∈Net (v
n)
n∈Ndeux suites de nombres complexes.
1) ∀ n ∈ N , X
nk=0
(u
k+ v
k) = X
nk=0
u
k+ X
nk=0
v
k. 2) ∀ n ∈ N , ∀ λ ∈ C ,
X
nk=0
λu
k= λ X
nk=0
u
k. 3) ∀ n ∈ N , ∀ (λ, µ) ∈ C
2,
X
nk=0
(λu
k+ µv
k) = λ X
nk=0
u
k+ µ X
nk=0
v
k(linéarité de Σ).
Ces résultats sont clairs. 1) signifie que (u
0+ v
0) + (u
1+ v
1) + ... + (u
n+ v
n) = (u
0+ u
1+ ... + u
n) + (v
0+ v
1+ ... + v
n), 2) signifie que λu
0+ λu
1+ λu
n= λ(u
0+ u
1+ ... + u
n) et 3) est un cumul des résultats de 1) et 2) (le mot linéarité sera correctement défini dans les différents chapitres d’algèbre linéaire). D’autre part, ces résultats restent bien sûr valables en changeant les bornes du Σ.
Ainsi, on peut par exemple écrire que X
nk=1
1 k − 1
k + 1
= X
nk=1
1 k −
X
nk=1
1
k + 1 ou aussi que X
nk=1
2k
2− 3k + 1
= 2 X
nk=1
k
2− 3
X
nk=1
k + X
nk=1
1. Il faut noter au passage la signification de la dernière somme : X
nk=1
1 = 1 + 1 + ... + 1
| {z }
nfois
= n.
On a additionné les termes d’une suite constante.
La règle 2) est source d’erreurs classiques. Elle signifie que l’on peut mettre en facteur de X
nk=0
toute expression indépen- dante de k. Ainsi, dans
X
nk=1
3n(cos θ)k2
k, on peut mettre en facteur 3, n et cos θ, mais pas k ou 2
k: X
nk=1
3n(cos θ)k2
k= 3n(cos θ) X
nk=1
k2
k.
Soit (u
n)
n∈Nune suite complexe.
1) ∀ n ∈ N , Re X
nk=0
u
k!
= X
nk=0
Re(u
k) et Im X
nk=0
u
k!
= X
nk=0
Im(u
k).
2) ∀ n ∈ N , X
nk=0
u
k= X
nk=0
u
k.
Ici, on a simplement rappelé que la partie réelle (resp. la partie imaginaire ou le conjugué) d’une somme est la somme des parties réelles (resp. des parties imaginaires ou des conjugués). Grâce à ces résultats, on peut par exemple écrire que X
nk=0
cos(kθ) = X
nk=0
Re e
ikθ= Re X
nk=0
e
ikθ! .
1.4 Changement de variable
On veut calculer X
nk=1
1 k − 1
k + 1
. Cette somme rentre dans le cadre général des sommes télescopiques qui sera détaillé plus loin. Ici, nous allons la calculer grâce à un changement de variable. La linéarité du symbole Σ permet d’écrire :
X
nk=1
1 k − 1
k + 1
= X
nk=1
1 k −
X
nk=1
1 k + 1 =
1 + 1
2 + ... + 1 n
− 1
2 + 1
3 + ... + 1 n + 1
.
Dans la deuxième somme, on peut considérer que k + 1 est un entier k
′prenant toutes les valeurs de 2 à n + 1 et donc X
nk=1
1 k + 1 =
n+1
X
k′=2
1 k
′.
Le changement de variable permet de mieux comprendre que la somme considérée était la somme des inverses des entiers 2, 3,..., n + 1. Pendant le changement de variable, on avait besoin de deux lettres : la lettre k désignant un entier variant de 1 à n et la lettre k
′désignant un entier variant de 2 à n + 1. Mais une fois que le changement de variable a eu lieu, un nouvel exercice commence avec la somme
n+1
X
k′=2
1
k
′. La lettre k
′apparaît alors comme une complication inutile de l’expression et il est largement préférable de réécrire
n+1
X
k=2
1
k la somme précédente, cette écriture représentant aussi la somme 1
2 + ... + 1
n + 1 . On rappelle à ce sujet que la variable de sommation est muette (voir page 3). Ainsi, en fin de parcours, nous réutilisons la même lettre k, pour désigner un nouvel objet, mais quoi de plus normal (heureusement que depuis le début de votre scolarité, vous vous êtes permis de réutiliser plusieurs fois la lettre x et on a du mal à imaginer ce qui se serait passé dans le cas contraire).
On peut alors terminer le calcul pour n > 2 : X
nk=1
1 k − 1
k + 1
= X
nk=1
1 k −
X
nk=1
1 k + 1 =
X
nk=1
1 k −
n+1
X
k=2
1 k = 1 +
X
nk=2
1 k −
X
nk=2
1 k − 1
n + 1 = 1 − 1
n + 1 = n n + 1 . En pratique, on utilise deux types de changement de variable et deux seulement :
• Translation : on pose ; k
′= k + p où p est un entier relatif donné.
• Symétries : on pose k
′= p − k où p est un entier relatif donné.
Ces deux changements de variable ont en commun d’associer de manière bijective un ensemble de nombres entiers consé- cutifs à un autre. La translation est un changement de variable strictement croissant et la symétrie est un changement de variable strictement décroissant. Rappelons à ce sujet que le symétrique d’un réel x par rapport à un réel a est 2a − x.
En effet, le milieu des deux nombres x et 2a − x est 1
2 (x + (2a − x)) = a.
Par exemple, dans X
nk=1
k, posons k
′= n + 1 − k (symétrie par rapport au nombre rationnel n + 1
2 ) ou ce qui revient au même k = n + 1 − k
′. A priori, l’entier k
′varie en décroissant de n + 1 − 1 = n à n + 1 − n = 1. Néanmoins, un Σ est toujours pensé avec une variable croissante et la borne du bas est toujours inférieure ou égale à la borne du haut. Un changement de variable décroissant permet donc de parcourir la somme en sens inverse :
1 + 2 + ... + (n − 1) + n = X
nk=1
k = X
nk′=1
(n + 1 − k
′) = X
nk=1
(n + 1 − k) = n + (n − 1) + ... + 2 + 1.
On doit noter que pour passer d’une variable k à une variable k
′, on a besoin d’avoir k
′en fonction de k (k
′= f(k)) pour trouver les nouvelles bornes du Σ mais aussi k en fonction de k
′(k = f
−1(k
′)) pour pouvoir remplacer dans l’expression à sommer.
Exercice 1. Pour n > 2, on considère la somme S
n=
n+1
X
k=3
k2
2k+1. Faire une translation d’indices où la nouvelle variable varie de 0 à n − 2 et une symétrie d’indices où la nouvelle variable varie de 3 à n + 1.
Solution 1. Soit n > 2. On pose k
′= k − 3. On obtient S
n=
n+1
X
k=3
k2
2k+1=
n−2
X
k′=0
(k
′+ 3)2
2(k′+3)+1=
n−2
X
k=0
(k + 3)2
2k+7.
De même, effectuons une symétrie par rapport au milieu de 3 et n + 1, à savoir 3 + n + 1
2 = n + 4 2 . On pose donc k
′′= n + 4 − k. On obtient
S
n=
n+1
X
k′′=3
(n + 4 − k
′′)2
2(n+4−k′′)+1=
n+1
X
k=3
(n + 4 − k)2
2n+9−2k.
Exercice 2. Pour n > 2, montrer à l’aide d’un changement d’indices que
2n−1
X
k=n+1
ln
sin kπ 2n
=
n−1
X
k=1
ln
sin kπ 2n
. Solution 2. Soit n > 2. Pour k ∈ {n + 1, ..., 2n − 1}, posons k
′= 2n − k ou encore k = 2n − k
′. Quand k décrit {n + 1, ..., 2n − 1}, k
′varie de 2n − (2n − 1) = 1 à 2n − (n + 1) = n − 1 et donc,
X
2nk=n+1
ln
sin kπ 2n
=
n−1
X
k′=1
ln
sin (2n − k
′)π 2n
=
n−1
X
k′=1
ln
sin
π − k
′π 2n
=
n−1
X
k′=1
ln
sin k
′π
2n
=
n−1
X
k=1
ln
sin kπ
2n
.
1.5 Sommes télescopiques
Soit (u
n)
n∈Nune suite de nombres complexes.
∀ n ∈ N
∗,
n−1
X
k=0
(u
k+1− u
k) = u
n− u
0.
Pour s’en convaincre, il suffit d’écrire la somme non pas sous sa forme initiale (u
1− u
0) + (u
2− u
1) + (u
3− u
2) + ... + (u
n−1− u
n−2) + (u
n− u
n−1), mais sous la forme −u
0+ (u
1− u
1) + (u
2− u
2) + ... + (u
n−1− u
n−1) + u
net on voit les termes intermédiaires se simplifier par télescopage. On dit que la somme considérée est télescopique. Ce calcul se visualise :
u
1− u
0+ u
2− u
1+ u
3− u
2+ u
4− u
3.. . .. . + u
n−1− u
n−2+ u
n− u
n−1?
− u
0+ u
1− u
1+ u
2− u
2+ u
3− u
3.. . .. . + u
n−2− u
n−2+ u
n−1− u
n−1+ u
nu
n− u
0Le calcul ci-dessus peut être traité de manière synthétique à l’aide du symbole Σ. Pour n > 2, on a :
n−1
X
k=0
(u
k+1− u
k) =
n−1
X
k=0
u
k+1−
n−1
X
k=0
u
k= X
nk′=1
u
k′−
n−1
X
k=0
u
k= X
nk=1
u
k−
n−1
X
k=0
u
k= u
n+
n−1
X
k=1
u
k−
n−1
X
k=1
u
k− u
0= u
n− u
0.
On a d’autres lectures possibles du résultat encadré plus haut. La différence u
k+1− u
kvisualisée sur une droite muni d’un repère (0, − → i ) s’identifie au vecteur −−−−− u
ku
k+1→ . La formule écrite s’interprète alors comme la relation de Chasles usuelle pour les vecteurs :
(u
1−u
0)+(u
2−u
1)+...+(u
n−1−u
n−2)+(u
n−u
n−1) " = " −−− u
0u →
1+ −−− u
1u →
2+...+ −−−−−−− u
n−2u
n−1→ + −−−−− u
n−1u →
n= −−− u
0u →
n" = " u
n−u
0. C’est la bonne vieille formule « extrémité - origine ».
On peut aussi réutiliser un escalier où cette fois-ci les marches ont pour hauteur (u
1− u
0), (u
2− u
1),..., (u
n− u
n−1).
Dans ce cas, u
kne désigne pas la hauteur d’une marche mais désigne l’altitude à laquelle se trouve le bas de la marche n
ok + 1 : le bas de cette marche est à l’altitude u
ket le haut à l’altitude u
k+1de sorte que la hauteur de cette marche est égale à u
k+1− u
k. La hauteur totale de l’escalier est alors la somme
n−1
X
k=0
(u
k+1− u
k). Ayant démarré à l’altitude u
0et
terminé à l’altitude u
n, la hauteur cherchée est u
n− u
0. Représentons ce calcul dans le cas où la suite (u
n)
n∈Nest une suite réelle croissante (de sorte que chaque différence u
k+1− u
kest positive).
u
1− u
0u
2− u
1u
3− u
2u
n−1− u
n−2u
n− u
n−1n−1
X
k=0
u
k= u
n− u
0u
0u
1u
2u
3u
nLe résultat sur les sommes télescopiques est l’outil de base permettant de calculer différentes sommes. On veut calculer une somme du type
X
nk=0
u
k. On cherche (mais on ne trouve pas toujours) une suite (v
n)
n∈Ntelle que pour tout entier k, on ait u
k= v
k+1− v
k(de même que pour calculer une intégrale, on peut chercher des primitives de la fonction à intégrer).
Si on trouve une telle « suite primitive », alors on peut calculer la somme :
∀ n ∈ N , X
nk=0
u
k= X
nk=0
(v
k+1− v
k) = v
n+1− v
0.
En prenant l’opposé des deux membres, on a aussi
∀ n ∈ N , X
nk=0
(v
k− v
k+1) = v
0− v
n+1.
Exercice 3. Calculer les sommes suivantes : 1)
X
nk=1
1 k(k + 1) et
X
nk=1
1
k(k + 1)(k + 2) , 2)
X
nk=1
k × k! (où k! = 1 × 2 × . . . × k), 3)
X
nk=0
2 sin x 2
cos(kx),
4) X
nk=0
(k + 2)2
k(chercher une suite primitive sous la forme (ak + b)2
k)).
Solution 3.
1) Soit n ∈ N
∗. X
nk=1
1 k(k + 1) =
X
nk=1
(k + 1) − k k(k + 1) =
X
nk=1
1 k − 1
k + 1
= 1 − 1
n + 1 = n n + 1 et X
nk=1
1
k(k + 1)(k + 2) = X
nk=1
(k + 2) − k 2k(k + 1)(k + 2) = 1
2 X
nk=1
1
k(k + 1) − 1 (k + 1)(k + 2)
= 1 2
1
1 × 2 − 1 (n + 1)(n + 2)
= n(n + 3) 4(n + 1)(n + 2) . 2) Soit n ∈ N
∗.
X
nk=1
k × k! = X
nk=1
(k + 1 − 1) × k! = X
nk=1
((k + 1) × k! − 1 × k!) = X
nk=1
((k + 1)! − k!) = (n + 1)! − 1.
3) Soit n ∈ N . X
nk=0
2 sin x 2
cos(kx) = X
nk=0
sin x 2 + kx
+ sin x 2 − kx
= X
nk=0
sin
k + 1
2
x
− sin
k − 1 2
x
= sin
n + 1 2
x
− sin
− 1 2 x
= sin (2n + 1)x
2 + sin x
2 .
4) Posons u
k= (ak + b)2
ket cherchons a et b tels que, pour tout entier k, u
k+1− u
k= (k + 2)2
k.
u
k+1− u
k= (a(k + 1) + b)2
k+1− (ak + b)2
k= 2
k(2(a(k + 1) + b) − (ak + b)) = (ak + 2a + b)2
k.
En prenant a = 1 puis b = 0 (de sorte que 2a + b = 2), ou encore, en posant u
k= k2
kpour tout entier k, on a bien u
k+1− u
k= (k + 2)2
k. Mais alors,
X
nk=0
(k + 2)2
k= X
nk=0
(u
k+1− u
k) = u
n+1− u
0= (n + 1)2
n+1.
➱ Commentaire . En 1)a), 1
k(k + 1) résulte bien sûr de la réduction au même dénominateur d’une fraction de dénominateur k et d’une fraction de dénominateur k + 1 et il ne faut pas longtemps pour que l’on essaie de calculer la différence 1
k − 1
k + 1 . En b), on essaie de généraliser l’idée. Le seul écueil à éviter est de calculer 1
k(k + 1) − 1
k(k + 2) car la deuxième fraction n’est pas obtenue en remplaçant k par k + 1 dans la première.
Exercice 4.
1) Montrer que pour a et b réels strictement positifs donnés, on a Arctan a− Arctan b = Arctan
a − b 1 + ab
(la fonction Arctangente est définie dans le chapitre « Fonctions de référence » et la fonction tangente est étudiée dans le chapitre
« Trigonométrie »).
2) Calculer lim
n→+∞
X
nk=1
Arctan
1 k
2+ k + 1
. Solution 4.
1) Soient a et b deux réels strictement positifs. Arctan a ∈ i 0, π
2
h et Arctan b ∈ i 0, π
2 h . Par suite, Arctan a − Arctan b ∈ i
− π 2 , π
2
h . Mais alors, tan(Arctan a − Arctan b) existe et
tan(Arctan a − Arctan b) = tan(Arctan a) − tan(Arctan b)
1 + tan(Arctan a) tan(Arctan b) = a − b 1 + ab = tan
Arctan a − b 1 + ab
.
Ainsi, les deux nombres Arctan a − Arctan b et Arctan
a − b 1 + ab
sont dans i
− π 2 , π
2
h et ont même tangente. On en déduit que ces deux nombres sont égaux.
2) Soit k ∈ N
∗.
1
k
2+ k + 1 = 1
k(k + 1) + 1 = (k + 1) − k k(k + 1) + 1 , et donc, puisque k et k + 1 sont des réels strictement positifs, le 1) permet d’écrire
Arctan 1
k
2+ k + 1 = Arctan(k + 1) − Arctan(k).
Soit n ∈ N
∗. Par télescopage, on obtient X
nk=1
Arctan 1
k
2+ k + 1 = X
nk=1
(Arctan(k + 1) − Arctan(k)) = Arctan(n + 1) − Arctan(1) = Arctan(n + 1) − π 4 , et immédiatement,
n→+∞
lim X
nk=1
Arctan 1
k
2+ k + 1 = π 4 .
Il se peut dans certains cas, que l’on ne connaisse d’une suite (u
n)
n∈Nque son premier terme u
0et les différences successives
u
k+1− u
k. On peut alors récupérer les termes de la suite (u
n)
n∈Npar une variante de la formule précédente :
∀ n ∈ N
∗, u
n= u
0+
n−1
X
k=0
(u
k+1− u
k).
On peut de nouveau noter que, puisque l’on désire la valeur de u
n, on n’a pas écrit u
n+1= u
0+ X
nk=0
(u
k+1− u
k), mais on a écrit u
n= ... On utilise ce résultat dans l’exercice suivant (déjà posé dans le chapitre « Ensembles, relations, applications ») :
Exercice 5. On se donne un entier n supérieur ou égal à 2. Dans le plan, on trace n droites telles que deux quelconques de ces droites ne soient pas parallèles et trois quelconques de ces droites ne soient pas concourrantes.
Déterminer le nombre P(n) des régions du plan définies par ces n droites.
Solution 5. Il est clair que P(1) = 2. Soit n > 1. Supposons connaître le nombre P(n) de régions du plan déterminées par n droites vérifiant les conditions de l’énoncé. On trace une (n + 1)-ème droite (D
n+1). D’après les hypothèses de l’énoncé, (D
n+1) coupe les n premières droites en n points deux à deux distincts. Ces points définissent sur (D
n+1) (n + 1) intervalles (dont deux sont non bornés). Chacun de ces intervalles coupe l’une des P(n) régions en deux nouvelles régions, rajoutant ainsi une nouvelle région aux P(n) régions préexistantes. On a donc :
∀ n > 1, P(n + 1) = P(n) + (n + 1).
On peut alors calculer P(n). Soit n > 2.
P(n) = P(1) +
n−1
X
k=1
(P(k + 1) − P(k)) = 2 +
n−1
X
k=1
(k + 1) = 2 + X
nk=2
k = 1 + X
nk=1
k = 1 + n(n + 1) 2 ce qui reste vrai pour n = 1.
➱ Commentaire . Pour résoudre cet exercice, il faut commencer par tracer patiemment une droite, puis deux droites, puis trois droites, puis quatre droites en comptant à chaque fois, puis en traçant lentement une cinquième droite, il faut essayer de comprendre ce qui se passe ...
1.6 Plusieurs calculs de la somme des n premiers entiers, de leurs carrés et de leurs cubes
Pour (n, p) ∈ ( N
∗)
2, on pose S
p(n) = X
nk=1
k
p. On se propose de calculer S
p(n) quand p ∈ {1, 2, 3}. Chacune des techniques de calcul ci-dessous est digne d’intérêt. On peut déjà énoncer les résultats suivants qui sont à apprendre et à connaître :
∀ n ∈ N
∗, X
nk=1
k = n(n + 1) 2 ,
X
nk=1
k
2= n(n + 1)(2n + 1)
6 ,
X
nk=1
k
3= n
2(n + 1)
24 =
X
nk=1
k
!
2.
Commençons par calculer de différentes manières S
1(n).
Premier calcul. Au lycée, on démontre le résultat ci-dessus, soit par récurrence, soit de la façon suivante :
1 + 2 + ... + k + ... + (n − 1) + n
n + (n − 1) + ... + n + 1 − k + ... + 2 + 1 (n + 1) + (n + 1) + ... + (n + 1) + ... + (n + 1) + (n + 1) et donc S
1(n) + S
1(n) = (1 + 2 + ... + n) + (n + ... + 2 + 1) = (n + 1) + (n + 1) + ... + (n + 1)
| {z }
ntermes
= n(n + 1), ce qui fournit le résultat. Il est intéressant de voir ce que donne cette démonstration en utilisant le symbole Σ :
2S
1(n) = X
nk=1
k + X
nk=1
(n + 1 − k) = X
nk=1
(n + 1) = n(n + 1).
L’idée de ce premier calcul est l’utilisation d’une propriété particulière des suites arithmétiques : on passe de 1 à 2 en
ajoutant 1 et de n à n − 1 en retranchant 1, de sorte que les sommes 1 + n et 2 + (n − 1) sont égales. . .
Deuxième calcul. On cherche une suite primitive de la suite à sommer, c’est-à-dire une suite (v
n) telle que
∀ k ∈ N
∗, v
k+1− v
k= k. On pense immédiatement à du degré 2 et on calcule : (k + 1)
2− k
2= 2k + 1. Pour n ∈ N
∗, on a alors
X
nk=1
((k + 1)
2− k
2) = X
nk=1
(2k + 1) = 2 X
nk=1
k + X
nk=1
1 = 2S
1(n) + n.
Par télescopage, on obtient S
1(n) = 1
2
"
nX
k=1
((k + 1)
2− k
2) − n
#
= 1
2 ((n + 1)
2− 1 − n) = (n + 1)((n + 1) − 1)
2 = (n + 1)n
2 .
Ici, l’idée était de faire de la somme à calculer une somme télescopique, et on y est approximativement parvenu. On pourra généraliser cette idée à S
2(n), S
3(n),... en calculant (k + 1)
3− k
3, (k + 1)
4− k
4...
Troisième calcul. C’est une variante du calcul précédent. La différence (k + 1)
2− k
2n’a pas fourni k mais 2k + 1. Le triangle de Pascal fournit une suite (w
n) telle que, pour k ∈ N
∗, w
k+1− w
k= k. En effet, la relation de Pascal , réexposée plus loin, permet d’écrire pour k > 2,
k = k
1
= k + 1
2
− k
2
(= k(k + 1)
2 − k(k − 1) 2 ), et donc, pour n > 2,
S
1(n) = X
nk=1
k = 1 + X
nk=2
k + 1 2
− k
2
= 1 +
n + 1 2
− 2
2
= n + 1
2
= n(n + 1) 2 .
La recherche systématique de polynômes B
ptels que ∀ k ∈ N
∗, B
p(k + 1) − B
p(k) = k
pconduit à la découverte des polynômes de Bernoulli qui seront étudiés dans le chapitre « Polynômes » et dans le cours de deuxième année.
Quatrième calcul. Comme souvent, représenter graphiquement un objet permet de comprendre cet objet.
n
∗ ∗ ∗ . . . . . . ∗
∗ ∗ ∗ ∗ ∗
n .. . . .. + . .. .. . n
∗ ∗ ∗ ∗
∗ ∗ . . . . . . ∗ ∗
n
=
n + 1
∗ ∗ . . . . . . ∗
∗ ∗ ∗
.. . .. . n
∗ ∗ ∗
∗ ∗ . . . . . . ∗
Ainsi, X
nk=1
k est le nombre de points d’un triangle isocèle ayant n points de côté. Pour cette raison les nombres n(n + 1) 2 sont appelés nombres triangulaires (vous connaissiez déjà les nombres carrés : n
2est le nombre de points d’un carré ayant n points de côté). Comme d’habitude, deux triangles font un rectangle, et on lit directement 2S
1(n) = n(n + 1).
Nombres triangulaires
1 3 6 10 15 21 28 36 45 55....
On peut aussi définir les nombres pentagonaux, hexagonaux,..., voire pyramidaux,... mais nous n’en parlerons pas ici.
Passons maintenant au calcul de S
2(n) = X
nk=1
k
2et S
3(n) = X
nk=1
k
3. Nous traiterons ce calcul à travers un exercice.
Exercice 6. En utilisant les expressions développées de (k + 1)
3− k
3et (k + 1)
4− k
4, calculer S
2(n) = X
nk=1
k
2et S
3(n) =
X
nk=1
k
3.
Solution 6. Nous vous laissons démontrer les identités (a + b)
3= a
3+ 3a
2b + 3ab
2+ b
3et (a + b)
4= a
4+ 4a
3b +
6a
2b
2+ 4ab
3+ b
4(en développant (a + b)(a + b)
2puis (a + b)(a + b)
3) qui sont des cas particuliers de la formule du
binôme de Newton exposée plus loin dans ce chapitre.
Soit n ∈ N
∗. Pour 1 6 k 6 n, on a (k + 1)
3− k
3= 3k
2+ 3k + 1. En additionnant ces n égalités, on obtient : (n + 1)
3− 1 =
X
nk=1
((k + 1)
3− k
3) = 3 X
nk=1
k
2+ 3 X
nk=1
k + X
nk=1
1 = 3S
2(n) + 3S
1(n) + n, et donc,
S
2(n) = 1 3
(n + 1)
3− 1 − 3 n(n + 1)
2 − n
= 1 6
2(n + 1)
3− 3n(n + 1) − 2(n + 1)
= n + 1
6 2 n
2+ 2n + 1
− 3n − 2
= (n + 1)(2n
2+ n)
6 = n(n + 1)(2n + 1)
6 .
De même, (n + 1)
4− 1 = X
nk=1
(k + 1)
4− k
4= 4S
3(n) + 6S
2(n) + 4S
1(n) + n, et donc,
S
3(n) = 1 4
(n + 1)
4− 1 − 6 n(n + 1)(2n + 1)
6 − 4 n(n + 1)
2 − n
= n + 1 4
(n + 1)
3− n(2n + 1) − 2n − 1
= (n + 1)
24 (n + 1)
2− (2n + 1)
= n
2(n + 1)
24 .
1.7 Somme de termes consécutifs d’une suite arithmétique ou d’une suite géométrique
1.7.1 Suites arithmétiques On rappelle le résultat suivant :
Soient (u
n)
n∈Nune suite arithmétique complexe et n et p deux entiers naturels tels que n 6 = p, X
nk=p
u
k= (u
p+ u
n)(n − p + 1)
2 = (premier terme + dernier terme) × (nombre de termes)
2 .
Pour démontrer ce résultat, on utilise le fait que les sommes u
p+ u
n, u
p+1+ u
n−1= u
p+ r + u
n− r = u
p+ u
n, u
p+2+u
n−2= u
p+2r +u
n− 2r = u
p+u
n,..., et plus généralement u
k+ u
n+p−k= u
p+(k− p)r + u
n+(p−k)r = u
p+u
nsont égales. Cela donne
2 X
nk=p
u
k= X
nk=p
u
k+ X
nk=p
u
k= X
nk=p
u
k+ X
nk′=p
u
n+p−k′= X
nk=p
u
k+ X
nk=p
u
n+p−k= X
nk=p
(u
k+ u
n+p−k)
= X
nk=p
(u
p+ u
n) = (n − p + 1)(u
p+ u
n).
Exercice 7. Calculer les sommes : 1)
n+1
X
k=3
k, 2) X
nk=1
(2k − 1).
Solution 7.
1) Pour n > 2,
n+1
X
k=3
k = (3 + (n + 1))((n + 1) − 2)
2 = (n − 1)(n + 4)
2 .
2) Pour n ∈ N
∗, X
nk=1
(2k − 1) = (1 + (2n − 1))n 2 = n
2.
➱ Commentaire . Rappelons que les suites arithmétiques sont les suites de la forme u
n= an + b (où a et b sont indépendants de n). Ainsi, dans les deux cas nous devions calculer une somme de termes consécutifs d’une suite arithmétique. En 1), il aurait été très maladroit d’écrire P
n+1k=3
k = P
n k=1k
− 1 − 2+ (n + 1) et de même en 2), il aurait été un peu maladroit d’écrire P
nk=1
(2k − 1) = 2 P
nk=1
k − P
nk=1
1. Dans les deux cas, nous avons utilisé la formule (premier terme+ dernier terme)×(nombre de termes)/2.
1.7.2 Suites géométriques On rappelle les résultats suivants :
Soient q un nombre complexe et n un entier naturel Si q 6 = 1,
X
nk=0
q
k= 1 − q
n+11 − q , et si q = 1, X
nk=0
q
k= n + 1, Soient (u
n)
n∈Nune suite géométrique complexe de raison q 6 = 1
et n et p deux entiers naturels tels que p ≤ n, X
nk=p
u
k= u
p1 − q
n−p+11 − q = premier terme × 1 −
raisonnombre de termes1 −
raison.
Notons que si q est un réel strictement supérieur à 1, il faut avoir comme réflexe d’écrire X
nk=0
q
k= q
n+1− 1
q − 1 , écriture dans laquelle numérateur et dénominateur sont strictement positifs.
Ainsi, X
nk=0
2
k= 2
n+1− 1
2 − 1 = 2
n+1− 1 et X
nk=1
1 2
k= 1
2 × 1 − 1
2
n1 − 1
2
= 1 − 1 2
n.
Démontrons les résultats ci-dessus. Pour n dans N et q ∈ C , posons S
n= X
nk=0
q
k. On suppose que q est différent de 1 (le résultat est clair quand q = 1). Alors
S
n− qS
n= X
nk=0
q
k− X
nk=0
q
k+1= X
nk=0
(q
k− q
k+1) = 1 − q
n+1(somme télescopique), d’où le résultat. Plus généralement, si (u
n)
n∈Nest une suite géométrique de raison q 6 = 1,
X
nk=p
u
k= X
nk=p
u
pq
k−p= u
p n−pX
k=0
q
k= u
p1 − q
n−p+11 − q . Exercice 8. Calculer
1)
n−1
X
k=3
2
k, 2)
X
nk=0
cos(kπ), 3)
X
nk=0
2
kcos 2kπ 3 , 4)
X
nk=1
kx
kpour x ∈ R . Solution 8.
1) Pour n > 4,
n−1
X
k=3
2
k= 2
32
n−3− 1
2 − 1 = 2
n− 8.
2) X
nk=0
cos(kπ) = X
nk=0
(−1)
k= 1 − (−1)
n+11 − (−1) = 1
2 (1 + (−1)
n) =
1 si n est pair
0 si n est impair .
3) En posant j = e
2iπ/3(voir le chapitre « Nombres complexes »),
X
nk=0
2
kcos 2kπ 3 = Re
X
nk=0
2
ke
2ikπ/3!
= Re X
nk=0
(2j)
k!
= Re
2
n+1j
n+1− 1 2j − 1
= Re 2
n+1j
n+1− 1
2j
2− 1 (2j − 1) (2j
2− 1)
!
= 1 7 Re
2
n+2e
2i(n+3)π/3− 2
n+1e
2i(n+1)π/3− 2e
4iπ/3+ 1
(car j
3= 1 et j
2+ j = −1)
= 1 7
2
n+2cos 2(n + 3)π
3 − 2
n+1cos 2(n + 1)π
3 + 2
.
4) Pour x ∈ R et n ∈ N
∗, posons f
n(x) = X
nk=0
x
ket S
n(x) = X
nk=1
kx
k. Alors,
xf
n′(x) = x X
nk=1
kx
k−1= X
nk=1
kx
k= S
n(x).
Si x ∈ ] − ∞ , 1[ ∪ ]1, + ∞ [, f
n(x) = x
n+1− 1
x − 1 et donc
S
n(x) = xf
n′(x) = x (n + 1)x
n(x − 1) − (x
n+1− 1)
(x − 1)
2= x nx
n+1− (n + 1)x
n+ 1 (x − 1)
2. Si x = 1, on a directement S
n(1) =
X
nk=1
k = n(n + 1) 2 .
1.8 L’identité a
n− b
nThéorème 1. Soient a et b deux nombres complexes et n un entier naturel non nul.
a
n− b
n= (a − b) a
n−1+ a
n−2b + ... + ab
n−2+ b
n−1= (a − b)
n−1
X
k=0
a
n−1−kb
k.
Démonstration . Par télescopage, on obtient
(a − b)
n−1
X
k=0
a
n−1−kb
k= a
n−1
X
k=0
a
n−1−kb
k− b
n−1
X
k=0
a
n−1−kb
k=
n−1
X
k=0
a
n−kb
k−
n−1
X
k=0
a
n−1−kb
k+1=
n−1
X
k=0
a
n−kb
k− a
n−(k+1)b
k+1= a
n− b
n.
❏ Ainsi,
a
2− b
2= (a − b)(a + b), a
3− b
3= (a − b)(a
2+ ab + b
2), a
4− b
4= (a − b)(a
3+ a
2b + ab
2+ b
3).
Cette identité est liée au paragraphe précédent : quand a = 1 et b = q, on obtient 1 − q
n= (1 − q)
n−1
X
k=0
q
k. Quand n est impair, on a −b
n= +(−b)
net on obtient une nouvelle identité :
Théorème 2. Soient a et b deux nombres complexes et n un entier naturel impair.
a
n+ b
n= (a + b) a
n−1− a
n−2b + ... − ab
n−2+ b
n−1= (a + b)
n−1
X
k=0
(−1)
ka
n−1−kb
k.
Ainsi,
a
3+ b
3= (a + b)(a
2− ab + b
2), a
5+ b
5= (a + b)(a
4− a
3b + a
2b
2− ab
3+ b
4).
1.9 Sommes trigonométriques
Les différents résultats sur les sommes de termes consécutifs d’une suite géométrique et sur les sommes télescopiques ont une application dans le calcul de certaines sommes trigonométriques.
Pour θ ∈ R et n ∈ N , on pose S
n(θ) = X
nk=0
cos(kθ). On se propose de calculer S
n(θ) par deux méthodes différentes (la somme précédente a une grande importance dans la théorie des séries de Fourier par exemple (les séries de Fourier sont au programme de certains BTS mais ne sont plus abordées en mathématiques spéciales depuis le dernier changement de programme)).
Première méthode. Soient θ ∈ R et n ∈ N . S
n(θ) = Re X
nk=0
e
ikθ!
= Re X
nk=0
e
iθk! . Maintenant, e
iθ= 1 ⇔ θ ∈ 2π Z . Deux cas se dégagent.
• Si θ / ∈ 2π Z , e
iθ6 = 1 et
S
n(θ) = Re 1 − e
iθn+11 − e
iθ!
= Re
e
i(
n+12 −12)
θe
−i(n+1)θ/2− e
i(n+1)θ/2e
−iθ/2− e
iθ/2= Re
e
inθ/2−2i sin((n + 1)θ/2)
−2i sin(θ/2)
= sin((n + 1)θ/2)
sin(θ/2) Re(e
inθ/2) = cos(nθ/2) sin((n + 1)θ/2)
sin(θ/2) .
• Si θ ∈ 2π Z , on trouve directement S
n(θ) = X
nk=0
1 = n + 1.
Première méthode (variante). Pour θ / ∈ 2π Z , X
nk=−n
e
ikθ= X
−1k=−n
e
ikθ+ 1 + X
nk=1
e
ikθ= 1 + X
nk=1
e
ikθ+ e
−ikθ= 1 + 2 X
nk=1
cos(kθ) = 1 + 2(S
n(θ) − 1) = 2S
n(θ) − 1.
Par suite,
2S
n(θ) − 1 = X
nk=−n
e
ikθ= e
−inθ1 − e
i(2n+1)θ1 − e
iθ= e
i(−n+(2n+1)/2−1/2)θsin((2n + 1)θ/2)
sin(θ/2) = sin((2n + 1)θ/2) sin(θ/2) . Ainsi, S
n(θ) = 1
2
1 + sin((2n + 1)θ/2) sin(θ/2)
= sin(θ/2) + sin((2n + 1)θ/2)
2 sin(θ/2) = cos(nθ/2) sin((n + 1)θ/2)
sin(θ/2) .
Deuxième méthode. Par télescopage, on obtient
2 sin θ
2 S
n(θ) = X
nk=0
2 sin θ
2 cos(kθ) = X
nk=0
sin
kθ + θ
2
− sin
kθ − θ 2
= X
nk=0
sin
k + 1 − 1 2
θ
− sin
k − 1 2
θ
= sin
n + 1 − 1 2
θ
− sin
− 1 2 θ
= sin
(2n + 1)θ 2
+ sin
θ 2
= 2 sin
(n + 1)θ 2
cos
nθ 2
.
De plus, si θ / ∈ 2π Z , alors θ
2 ∈ / π Z et donc sin θ
2 6 = 0. On réobtient alors S
n(θ) = cos(nθ/2) sin((n + 1)θ/2)
sin(θ/2) .
Exercice 9. Pour θ ∈ R et n ∈ N , calculer les sommes suivantes : 1) X
nk=0
sin(kθ), 2) X
nk=0
cos
2(kθ).
Solution 9. Soient θ ∈ R et n ∈ N .
1) Si θ / ∈ 2π Z , X
nk=0
sin(kθ) = Im 1 − e
iθn+11 − e
iθ!
= Im
e
i((n+1)/2−1/2)θe
−i(n+1)θ/2− e
i(n+1)θ/2e
−iθ/2− e
iθ/2= sin(nθ/2) sin((n + 1)θ/2)
sin(θ/2) .
Si θ ∈ 2π Z , X
nk=0
sin(kθ) = 0.
2) X
nk=0
cos
2(kθ) = X
nk=0
1
2 (1 + cos(2kθ)) = 1 2
X
nk=0
1 + X
nk=0
cos(2kθ)
!
= 1
2 (n + 1 + X
nk=0
cos(2kθ)). Puis, si θ / ∈ π Z , X
nk=0
cos(2kθ)) = Re X
nk=0
e
2ikθ!
= Re
1 − e
2i(n+1)θ1 − e
2iθ= Re
e
i(n+1)θ−2i sin((n + 1)θ)
−2i sin(θ)
= cos((n + 1)θ) sin((n + 1)θ)
sin(θ) ,
et donc
X
nk=0
cos
2(kθ) = 1 2
n + 1 + sin(2(n + 1)θ) 2 sin(θ)
.
Si θ ∈ π Z , X
nk=0
cos
2(kθ) = X
nk=0
1 = n + 1.
➱ Commentaire . Dans la solution ci-dessus, nous n’avons supposé acquise aucune formule et nous avons redémarré les calculs à zéro. En 2), une variante était P
nk=0
cos
2θ + P
nk=0
sin
2θ = P
nk=0
1 = n + 1 et P
nk=0
cos
2θ − P
nk=0
sin
2θ = P
nk=0
cos(2θ) = . . . Puis on obtient P
nk=0
cos
2θ ou P
nk=0
sin
2θ en ajoutant ou en retranchant membre à membre.
1.10 Sommes doubles
Quand on développe l’expression (a
1+ a
2) (b
1+ b
2+ b
3), on obtient a
1b
1+ a
1b
2+a
1b
3+a
2b
1+a
2b
2+a
2b
3. Si les deux parenthèses avaient contenu respectivement 6 et 9 termes au lieu de 2 et 3, l’expression développée aurait été constituée de 6 × 9 = 54 termes et serait ingérable. On a de nouveau besoin d’une notation synthétique. Le même développement peut s’écrire
X
2i=1
a
i!
X
3j=1
b
j
= X
2i=1
X
3j=1
a
ib
j
= X
16i62, 16j63
a
ib
j= X
(i,j)∈J1,2K×J1,3K
a
ib
j.
La première égalité est obtenue en distribuant chacun des termes de la première parenthèse sur la deuxième. Dans l’avant- dernière expression, les encadrements 1 6 i 6 2, 1 6 j 6 3 signifient que les deux indices i et j varient respectivement de 1 à 2 et de 1 à 3, indépendamment l’un de l’autre, ou encore que le couple (i, j) prend les 2 × 3 = 6 valeurs suivantes : (1, 1), (1, 2), (1, 3), (2, 1), (2, 2), (2, 3). Par ailleurs, la suite (a
ib
j)
16i62, 16j63est un exemple de suite double (on dit aussi suite à double entrée). Il faut deux indices pour décrire son terme général et l’on pourrait décider de le noter u
i,j(u
i,j= a
i× b
j), insistant ainsi sur le fait que deux numéros sont nécessaires pour décrire un terme. Ceci nous amène à la définition suivante :
Définition 1. Soit (u
i,j)
(i,j)∈N2une suite double complexe. Pour n, p, q et r entiers naturels donnés tels que n 6 p et q 6 r, on pose
X
n6i6p, q6j6r
u
i,j= X
pi=n
X
rj=q
u
i,j
.
On a maintenant une définition générale qui mérite d’être analysée. L’expression X
2i=1
X
3j=1