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Multiples modèles attentionnels et capture contingente

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Texte intégral

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Master

Reference

Multiples modèles attentionnels et capture contingente

DUMAS, Tiffany Nathalie

Abstract

Alors que certains auteurs suggéraient qu'un seul élément à la fois pouvait agir comme modèle attentionnel et guider l'attention visuelle, Irons, Folk et Remington (2012) ont démontré que l'attention pouvait être guidée par deux modèles attentionnels maintenus en mémoire. Comme la mémoire de travail visuelle a une capacité maximale de 3-4 éléments, nous avons testé s'il était effectivement possible de maintenir deux modèles attentionnels à la fois, mais également jusqu'à trois, avec un paradigme de capture contingente. Selon nos résultats, les participants ne semblaient pas capables de maintenir plus d'un modèle attentionnel pour guider leur recherche visuelle, contrairement à notre hypothèse et à ce qu'avaient trouvé Irons et al. (2012). Cette différence de résultats pourrait s'expliquer par l'utilisation de couleurs plus proches, donc plus difficiles à différencier. En conclusion, on pourrait rechercher plusieurs couleurs et donc maintenir plusieurs modèles attentionnels à la fois, mais que si elles sont assez distinctes.

DUMAS, Tiffany Nathalie. Multiples modèles attentionnels et capture contingente. Master : Univ. Genève, 2019

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:123689

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MULTIPLES MODÈLES ATTENTIONNELS ET CAPTURE CONTINGENTE

Plan d’études

PSYCHOLOGIE CLINIQUE INTEGRATIVE PSYCHOLOGIE COGNITIVE

PAR Tiffany Dumas

Directeur du mémoire

Dirk Kerzel

Jury

Dirk Kerzel Roland Maurer Nicolas Burra

Genève, août 2019

Université de Genève

Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation

Section de psychologie

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RÉSUMÉ

Alors que certains auteurs suggéraient qu’un seul élément à la fois pouvait agir comme modèle attentionnel et guider l’attention visuelle, Irons, Folk et Remington (2012) ont démontré que l’attention pouvait être guidée par deux modèles attentionnels maintenus en mémoire.

Comme la mémoire de travail visuelle a une capacité maximale de 3-4 éléments, nous avons testé s’il était effectivement possible de maintenir deux modèles attentionnels à la fois, mais également jusqu’à trois, avec un paradigme de capture contingente.

Selon nos résultats, les participants ne semblaient pas capables de maintenir plus d’un modèle attentionnel pour guider leur recherche visuelle, contrairement à notre hypothèse et à ce qu’avaient trouvé Irons et al. (2012). Cette différence de résultats pourrait s’expliquer par l’utilisation de couleurs plus proches, donc plus difficiles à différencier. En conclusion, on pourrait rechercher plusieurs couleurs et donc maintenir plusieurs modèles attentionnels à la fois, mais que si elles sont assez distinctes.

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Déclaration sur l’honneur

Je déclare que les conditions de réalisation de ce travail de mémoire respectent la charte d’éthique et de déontologie de l’Université de Genève. Je suis bien l’auteur-e de ce texte et atteste que toute affirmation qu’il contient et qui n’est pas le fruit de ma réflexion personnelle est attribuée à sa source ; tout passage recopié d’une autre source est en outre placé entre guillemets.

Genève, le 12 août 2019

Prénom, Nom Tiffany Dumas Signature :

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Remerciements

Je souhaite avant tout remercier toutes les personnes qui m’ont accompagnée, aidée et conseillée au cours de ce travail de mémoire.

Je tiens particulièrement à remercier le Professeur Dirk Kerzel pour sa disponibilité et sa supervision à chaque étape de ce travail. Merci pour votre aide et vos conseils qui ont été précieux afin de mener ce travail à terme.

Je remercie également le Professeur Roland Maurer et Nicolas Burra qui ont accepté de faire partie du jury lors de ma soutenance.

Je suis également reconnaissante envers tous les étudiants qui ont participé à l’expérience et sans qui cette recherche n’aurait pas été possible.

Finalement, je souhaite exprimer ma gratitude envers ma famille et mes amis qui m’ont soutenue et apporté leur soutien moral tout au long de ce travail.

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1. Préambule ... 7

2. Introduction ... 7

2.1 L’attention visuelle et la mémoire de travail visuelle ... 7

2.2 Théories de l’attention visuelle ... 8

2.2.1 La théorie de la concurrence biaisée ... 8

2.2.2 Autres théories de l’attention visuelle ... 9

2.3 La capture attentionnelle ... 10

2.3.1 Capture attentionnelle automatique ... 10

2.3.2 Capture attentionnelle flexible ... 12

2.4 Facteurs influençant la capture attentionnelle ... 15

2.4.1 Cibles fixes vs. cibles changeantes ... 16

2.5 Différents états des objets en mémoire de travail visuelle ... 17

2.6 Multiples modèles attentionnels ... 18

2.6.1 Preuves comportementales ... 18

2.6.2 Mesure des mouvements oculaires ... 22

2.6.3 La N2pc ... 22

2.7 Objectif et hypothèse de recherche ... 24

2.7.1 Objectifs ... 24

2.7.2 Hypothèse de recherche ... 25

3. Méthode ... 25

3.1 Participants ... 25

3.2 Matériel ... 26

3.3 Stimuli ... 26

3.4 Design expérimental ... 26

3.5 Procédure ... 28

3.6 Hypothèse opérationnelle ... 29

4. Résultats ... 31

4.1 Résultats principaux ... 31

4.2 Analyse des erreurs ... 33

5. Discussion ... 35

5.1 Interprétation des résultats ... 35

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5.2 Hypothèses explicatives ... 36

5.2.1 Recherche de singleton vs. recherche de caractéristiques ... 36

5.2.2 Mémoire à long terme vs. mémoire de travail ... 37

5.2.3 Différences de couleurs ... 38

5.3 Limites ... 42

5.4 Contributions et perspectives futures ... 42

Conclusion ... 43

Bibliographie ... 44

Annexes ... 48

Annexe I : Résultats des analyses des temps de réaction ... 48

ANOVA à mesures répétées ... 48

Tests T ... 52

Annexe II : Résultats des analyses des taux d’erreurs ... 54

ANOVA à mesures répétées ... 54

Tests T ... 58

Annexe III : Feuille de consentement ... 59

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1. Préambule

La question à la base de ce travail concernait la nature du lien entre la mémoire de travail et l’attention visuelle. A quel point le contenu de la mémoire de travail peut-il influencer notre attention visuelle ? Est-ce qu’il influence même automatiquement notre recherche visuelle ? Par exemple, si l’on a l'intention d'acheter des raisins verts, la couleur "vert" sera stockée en mémoire de travail, et quand nous passerons par le rayon des pommes, notre attention sera-t-elle capturée par des pommes vertes, plutôt que par des pommes rouges, même si nous n'avons pas l'intention d'acheter des pommes ?

En s’intéressant à cette thématique, on se rend compte que la nature de ce lien entre mémoire de travail et attention visuelle n’est pas claire, et que la littérature n’est pas unanime à ce sujet.

2. Introduction

2.1 L’attention visuelle et la mémoire de travail visuelle

Plusieurs raisons nous mènent à nous questionner sur le lien pouvant exister entre ces deux concepts. Tout d’abord, on peut définir l’attention visuelle comme le mécanisme qui nous permet de sélectionner les informations visuelles pertinentes pour nos buts actuels et de supprimer celles qui ne sont pas pertinentes, et la mémoire de travail visuelle comme étant le mécanisme nous permettant de retenir activement l’information visuelle pertinente et de prévenir l’interférence des informations non pertinentes. On remarque que leurs définitions sont semblables : les deux concepts traitent de manière sélective certaines représentations visuelles prioritairement aux autres, la différence étant que dans le cas de la mémoire de travail le stimulus est absent (Olivers, Meijer, & Theeuwes, 2006). De plus, il existerait un chevauchement entre les régions du cerveau qui s’activent pour l’attention et celles qui s’activent pour la mémoire de travail (LaBar, Gitelman, Parrish, & Mesulam, 1999). Ces observations ont mené à l’hypothèse que ces deux concepts pourraient refléter une seule fonction générale s’occupant d’un même type de contenu (Olivers et al., 2006). Mais ce qui nous questionne principalement à propos du lien existant entre la mémoire de travail et l’attention visuelle, c’est l’influence que l’une pourrait avoir sur l’autre.

Chaque jour, nous sommes confrontés à une multitude d’informations visuelles qui nous entourent mais nous ne faisons pas attention à chacune d’entre elles. L’allocation de notre attention peut être volontaire, mais peut aussi être involontaire. Les déplacements d’attention volontaires sont appelés « top-down » et dépendent de nos buts, alors que les captures involontaires de l’attention semblent être « bottom-up », c’est-à-dire que c’est le

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stimulus lui-même, de par ses propriétés physiques saillantes, qui attire notre attention. Mais certaines études ont suggéré que les captures involontaires ne sont pas toujours bottom-up, et peuvent en réalité être parfois de nature top-down (Irons, Folk, & Remington, 2012). En effet, on utiliserait les représentations maintenues en mémoire de travail pour contrôler notre système perceptif, en biaisant l’allocation de notre attention vers des objets qui sont pertinents par rapport à nos buts actuels (Woodman & Luck, 2007).

2.2 Théories de l’attention visuelle 2.2.1 La théorie de la concurrence biaisée

En 1995, Desimone et Duncan proposent une théorie du contrôle attentionnel afin d’expliquer l’interaction entre les facteurs top-down en mémoire de travail et les facteurs sensoriels bottom-up dans le contrôle de l’attention. Tout d’abord, comme ils l’ont démontré, la division de l’attention entre deux objets, par exemple dans une expérience simple où l’on présente dans le champ visuel deux objets desquels les participants doivent identifier certaines propriétés et donner des réponses séparées, entraine une moins bonne performance par rapport à la focalisation de l’attention sur un seul sujet, et ce autant pour des propriétés simples, telle que la taille ou l’orientation, que pour des propriétés plus complexes, comme la forme (Desimone & Duncan, 1995). Cette limitation semble se produire à l’entrée du stimulus, et non pas pendant le stockage ou lors de la réponse. En effet, l’interférence liée au traitement de deux objets en simultané disparaît si l’on présente les deux objets l’un après l’autre, et ce même si les deux réponses doivent être mémorisées et données ensemble à la fin de l’essai.

Ainsi, selon Desimone et Duncan (1995), les différents objets de l’input visuel sont en concurrence pour être traités par le système visuel, dont la capacité de traitement est limitée.

Cette compétition est biaisée en partie par des mécanismes bottom-up liés à la saillance de l’objet (la façon dont il est séparé du fond), mais aussi en partie en faveur de l’information qui est pertinente pour le comportement actuel (mécanismes top-down). Si l’on doit sélectionner un objet parmi plusieurs en compétition dans notre champ visuel, on va préactiver une représentation de la cible à partir de notre mémoire de travail. Ainsi, une fois que les objets apparaitront, l’objet cible aura un avantage dans la compétition pour l’attention sélective, parce que ses caractéristiques ont déjà été activées par la représentation en mémoire de travail. Ce modèle pourrait prédire une capture attentionnelle automatique par la mémoire de travail : si la mémorisation visuelle d’un élément implique inévitablement l’activation de ses caractéristiques perceptives, cela devrait avantager automatiquement les objets du champ visuel qui comportent ces caractéristiques (Olivers et al., 2006).

On peut mettre en lien cette théorie avec ce qu’ont étudié pour leur part Chelazzi, Miller, Duncan et Desimone (1993). Ils ont étudié l’activité du cortex inféro-temporal grâce à

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l’enregistrement unitaire de cellule chez des singes pendant une tâche de recherche visuelle.

Ils ont démontré que les neurones qui répondaient à la présentation initiale de la cible maintenaient une activité neuronale accrue pendant l'intervalle de rétention, ce qui semble refléter le maintien de la cible dans la mémoire de travail. Lorsque la cible était ensuite présente dans l’affichage de recherche, ces neurones étaient déjà dans un état plus actif que les autres neurones, ce qui leur donnait un avantage concurrentiel. Par conséquent, les neurones déjà actifs qui réagissaient à l'élément cible répondaient fortement, tandis que les neurones qui réagissaient aux éléments non cibles étaient supprimés. De cette manière, la théorie de la concurrence biaisée propose que les inputs sensoriels reçoivent un avantage concurrentiel lorsqu'ils correspondent à des représentations qui sont actuellement actives dans la mémoire de travail (Woodman & Luck, 2007).

2.2.2 Autres théories de l’attention visuelle

Une relation similaire entre la mémoire de travail et l'attention est suggérée dans plusieurs autres théories. La plupart des théories globales de l'attention proposent que l'observateur utilise les caractéristiques de la cible recherchée pour biaiser l’allocation de l'attention vers les stimuli entrants.

Par exemple, dans la théorie de l’engagement attentionnel de Duncan et Humphreys (1989), il est suggéré que la sélection attentionnelle dépend du degré auquel une représentation perceptive correspond au modèle de la cible qui est maintenu en mémoire. Par ailleurs, selon le modèle de capture contingente involontaire de l’attention proposé par Folk, Remington et Johnston (1992), on utiliserait nos buts, ou les buts de la tâche, pour créer des paramètres de contrôle attentionnel ajustés par rapport aux propriétés pertinentes de la cible recherchée. Leur rôle serait de s’assurer que l’attention est accordée aux objets qui peuvent avoir de l’importance pour la tâche qui est en cours, et les stimuli qui correspondent à ces paramètres de contrôle attentionnels attireraient alors automatiquement l’attention. La capture de l’attention dépend donc des objectifs de l’observateur (Irons et al., 2012).

Ainsi, toutes ces théories proposent que la priorité attentionnelle d'une entrée sensorielle est automatiquement déterminée par sa correspondance avec un ensemble de propriétés définies par la cible. Si ces propriétés sont stockées dans la mémoire de travail, alors ces théories prédisent que les entrées sensorielles qui correspondent au contenu de la mémoire de travail provoqueront une allocation involontaire de l'attention (Woodman & Luck, 2007). Les représentations stockées en mémoire de travail jouent donc un rôle clé dans le contrôle de l’attention en permettant le déplacement de l’attention vers les objets pertinents pour nos buts actuels (Beck, Hollingworth, & Luck, 2012). La question qui se pose est alors de savoir si cette capture de l’attention par la mémoire de travail est automatique.

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2.3 La capture attentionnelle

2.3.1 Capture attentionnelle automatique

Plusieurs études ont eu pour but de tester si la capture attentionnelle par le contenu de la mémoire de travail visuelle était automatique. Tout d’abord, Olivers, Meijer et Theeuwes (2006) avaient pour hypothèse que l’attention visuelle et la mémoire de travail visuelle partageaient les mêmes processus, donc que le contenu de la mémoire de travail devait interférer avec la recherche visuelle en dirigeant automatiquement l’attention vers les stimuli correspondants au contenu de la mémoire de travail. Leur paradigme de base, comme illustré sur la Figure 1, était le suivant : les participants devaient tout d’abord mémoriser un élément (couleur ou forme) avant la tâche de recherche visuelle, dans laquelle il y avait, lors de certains essais, un distracteur de type singleton (qui saute aux yeux car il est l’unique élément coloré ou de forme différente parmi les autres). Ce distracteur pouvait être soit lié à l’élément mémorisé (couleur/forme semblable), soit non lié (couleur/forme différente). La tâche des participants était de retrouver la cible, qui était d’une forme différente des autres éléments, et de rapporter la lettre qu’elle contenait. A la fin de chaque essai, il y avait un test de mémoire lors duquel il fallait rapporter la couleur ou la forme mémorisée au départ. Ce paradigme subissait quelques modifications selon les différentes expériences, mais le principe de recherche de singleton accompagnée d’une tâche de mémoire restait toujours le même.

L’hypothèse principale était que si la mémoire de travail active des représentations qui sont partagées avec l’attention, on devrait trouver plus d’interférence (temps de réaction plus lent) lorsque le distracteur est semblable à l’objet à mémoriser que lorsqu’ils ne sont pas liés. Ils ont conduit sept expériences qui ont permis de démontrer plusieurs faits différents. Tout d’abord, la charge de la mémoire de travail entraine une interférence de la part de distracteurs singleton dans une tâche de recherche visuelle par rapport à une tâche de recherche visuelle seule sans la présence d’une tâche de mémoire l’accompagnant. Cette interférence est accrue lorsque le distracteur est identique ou lié au contenu de la mémoire de travail, ce qui signifie que la mémoire de travail visuelle et l’attention visuelle partagent les représentations des stimuli pertinents pour la tâche. Par contre, ils n’ont trouvé cette interférence liée au contenu de la mémoire de travail que lorsque les participants étaient encouragés à utiliser un type de mémoire plus visuel (en rendant le contenu de la mémoire difficile à verbaliser) plutôt qu’un encodage verbal. Par ailleurs, seuls les éléments qui sont activement maintenus en mémoire attirent l’attention visuelle : les éléments qui ne sont plus pertinents peuvent être supprimés de façon sélective de la mémoire de travail et n’entrainent donc pas d’interférence. Finalement, ils ont déterminé que l’augmentation des effets d’interférence est due au fait que les mouvements oculaires sont plus fréquemment dirigés vers le distracteur lié à la mémoire, et non pas en raison de fixations plus longues. En résumé, ce qui ressort de leurs résultats, c’est

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une capture de l’attention par la mémoire de travail sur la base des représentations spécifiques à son contenu.

Ces résultats ont confirmé et élargi d’autres constatations précédentes à ce sujet.

D’autres études, telles que celle de Farah (1989) ou de Downing (2000) avaient déjà suggéré une interaction basée sur le contenu entre la mémoire de travail et l’attention visuelle, mais aucune ne permettait de conclure à une automaticité de cette interaction, car dans leurs tâches, l’attention portée au stimulus correspondant n’était pas néfaste pour la tâche. Les participants pouvaient donc s’être volontairement intéressés à l’objet qui leur avait été demandé d’imaginer ou dont ils devaient se souvenir, car ils pensaient que cela pourrait les aider dans cette tâche. Le fait de déployer son attention sur l’objet en question afin de se rafraichir la mémoire est appelé rééchantillonnage perceptif stratégique (Woodman & Luck, 2007), et dans ce cas la tâche peut amener une allocation volontaire plutôt qu’automatique de l’attention. Dans l’expérience d’Olivers et al. (2006), afin d’éviter que les participants n’utilisent le distracteur semblable pour rafraîchir leur mémoire de l’objet à mémoriser, le distracteur semblable n’était jamais totalement identique à cet objet.

Figure 1 : Exemple de la séquence d’un essai dans le paradigme de base d’Olivers et al. (2006). Les différents patterns correspondent à différentes couleurs.

Par ailleurs, bien que Pashler et Shiu (1999) avaient fourni une solide base pour la capture attentionnelle automatique, ce n’était pas une preuve du rôle de la mémoire de travail visuelle dans cette capture, car dans leur étude, la capture pouvait avoir été causée par l’amorçage plutôt que par la mémoire. En effet, l’activation, même brève, d’une image peut suffire à induire la priorisation d’un objet qui y correspond. Ainsi, pour contrôler l’effet

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d’amorçage, Olivers et al. (2006) ont utilisé une condition dans laquelle les participants ne devaient pas mémoriser l’objet, mais uniquement le regarder. Ainsi, comme ils ont trouvé une capture uniquement dans la condition mémoire et pas dans la condition d’observation, cela prouve que ce n’est pas un effet d’amorçage qui induit la capture attentionnelle. Ils ont ainsi fourni une nouvelle preuve de la capture attentionnelle par la mémoire de travail tout en évitant les interprétations alternatives précédemment apportées.

2.3.2 Capture attentionnelle flexible

Pourtant, Woodman et Luck, en 2007, ont pour leur part démontré le contraire. Leur but était de tester si l’influence de la mémoire de travail sur l’attention visuelle était effectivement automatique et rigide, comme l’avaient démontré Olivers et al. (2006), ou si elle était contrôlée et flexible. Afin d’éviter une allocation volontaire de l’attention, il fallait éliminer toute motivation pour les participants à porter leur attention sur le stimulus. Les participants étaient donc encouragés à ne pas prêter attention aux éléments qui correspondaient à l’information stockée en mémoire de travail, car les éléments correspondants n’étaient jamais les cibles dans la tâche de recherche. Woodman et Luck (2007) avaient pour hypothèse que si l’attention est capturée automatiquement par les objets qui correspondent au contenu de la mémoire de travail, ces objets devraient capturer l’attention même s’ils ne sont jamais les cibles. Par contre, si l’attention est déployée de façon stratégique, les objets correspondants ne devraient pas capturer l’attention des participants. Leur paradigme expérimental était quelque peu différent de celui d’Olivers et al. (2006). Comme illustré sur la Figure 2, les participants devaient tout d’abord mémoriser un carré coloré présenté au centre de l’écran, puis l’écran de recherche apparaissait, dans lequel il y avait six éléments de couleurs différentes. Leur tâche était de retrouver la cible selon sa forme, différente des autres éléments. A la fin de chaque essai, il y avait un test de mémoire dans lequel un carré coloré était présenté et les participants avaient pour tâche de dire si c’était la même couleur qu’ils avaient eu à mémoriser au départ, ou une couleur différente. Dans ce paradigme, la couleur n’est pas pertinente pour la tâche de recherche, d’autant plus que la cible n’était jamais de la même couleur que celle mémorisée. Dans la moitié des essais, un des distracteurs était de la même couleur que celle retenue en mémoire, et dans l’autre moitié des essais, aucun distracteur ne portait cette même couleur. Ainsi, si l’attention est automatiquement biaisée vers les objets qui correspondent au contenu de la mémoire de travail visuelle, le distracteur de la même couleur que celle qui est retenue en mémoire (distracteur correspondant) devrait automatiquement attirer l’attention, ce qui entrainerait des temps de réponse plus lents vers la cible. Afin d’éviter un encodage verbal de la couleur, les participants devaient effectuer une tâche de suppression articulatoire pendant chaque essai. A travers cinq expériences faisant varier légèrement le paradigme de base, Woodman et Luck (2007) ont démontré que lorsque

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les participants savaient que la cible ne correspondra jamais à l’élément maintenu en mémoire, ils étaient capables d’éviter de façon stratégique les éléments qui correspondent aux représentations maintenues en mémoire de travail, ce qui leur a même permis de faciliter leur réponse et d’être plus rapides.

Ces résultats démontrent que la relation entre les représentations en mémoire de travail visuelle et ce qui est sélectionné par l’attention visuelle est plus complexe que ce qui était proposé dans la théorie de compétition biaisée et d’autres théories de l’attention. Il semble peu probable d’expliquer les résultats qu’ils ont obtenu en proposant que l’attention des participants ait été attirée par l’objet correspondant, mais qu’elle ait ensuite été détournée très rapidement, car cela nécessiterait des changements d’attention extrêmement rapides et des études antérieures en électrophysiologie suggèrent qu’il est peu probable que l’attention puisse se déplacer en moins de 100 millisecondes. La théorie de l’attention visuelle (TVA) de Bundesen (1990) pourrait expliquer les résultats obtenus dans cette étude. Cette théorie propose que les observateurs utilisent un modèle cible en mémoire de travail pour biaiser la sélection perceptive et ainsi traiter les éléments similaires en augmentant le poids de l’attention qui est accordée aux caractéristiques du modèle. Il serait aussi possible pour les observateurs d’utiliser le contenu de la mémoire de travail pour accorder un poids de zéro (ou de valeur faible) aux caractéristiques de l’élément en mémoire pour éviter que les éléments similaires n’attirent l’attention. Ceci pourrait expliquer le fait que les participants aient été plus rapides à identifier la cible alors qu’il y avait un distracteur semblable à l’élément maintenu en mémoire de travail en sachant qu’il ne serait jamais la cible (Woodman & Luck, 2007). En plus d’avoir démontré que les participants pouvaient éviter stratégiquement les éléments correspondants au contenu de leur mémoire de travail alors qu’ils effectuent une tâche de recherche visuelle, les auteurs suggèrent également qu’une fois cette tâche terminée, ils peuvent cette fois concentrer leur attention de manière stratégique sur les éléments correspondants dans le but d’actualiser leur représentation en mémoire de travail. Ils nomment cela l’hypothèse de rééchantillonnage perceptif stratégique, et elle s’appuie sur deux constatations. Tout d’abord, la précision de la mémoire augmentait plus il y avait d’éléments correspondants ; et lorsque, dans leur dernière expérience, le contenu de la mémoire pouvait correspondre aux caractéristiques de la cible, les participants étaient plus rapides à trouver les cibles qui correspondaient à l’élément maintenu en mémoire, et ils se souvenaient aussi plus précisément de cet élément. Cette hypothèse pourrait selon eux expliquer pourquoi dans des études antérieures il a été constaté que l’attention était dirigée vers les éléments correspondant au contenu de la mémoire de travail. Ainsi, si l’on reprend la théorie de l’attention visuelle (TVA), les éléments correspondants au contenu de la mémoire de travail reçoivent tout d’abord une pondération attentionnelle proche de zéro en prévision de la

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recherche visuelle, mais une fois la recherche visuelle terminée, leurs pondérations attentionnelles peuvent être ramenées à une valeur proche de 1, afin de procéder à une stratégie de rééchantillonnage perceptif. L’attention visuelle passe donc de l’évitement des éléments correspondants au contenu de la mémoire à l’orientation de l’attention vers ces éléments dans le cadre de deux tâches différentes, la recherche visuelle puis le maintien de la mémoire (Woodman & Luck, 2007).

Figure 2 : Exemples de séquences d’essais du paradigme de base de l’expérience de Woodman et Luck (2007).

A : Essai dans lequel les distracteurs sont non correspondants. B : Essai dans lequel il y a un distracteur correspondant à l’objet en mémoire de travail.

Bien que l’étude d’Olivers et al. (2006) et celle de Woodman et Luck (2007) montrent quelques similitudes, on peut surtout noter des différences qui pourraient potentiellement participer à l’explication des différences de leurs résultats. Dans les deux cas, la dimension pertinente afin de retrouver la cible était la forme alors que la dimension non-pertinente (distracteur) était la couleur, et dans les deux études le contenu de la mémoire de travail ne figurait jamais sur la cible. Par contre, si dans l’étude de Woodman et Luck (2007), l’écran de recherche comporte plusieurs couleurs hétérogènes, chez Olivers et al. (2006), il n’y a qu’un élément unique (singleton) qui est coloré et qui saute donc aux yeux. De plus, c’est aussi le cas pour la cible, chez Woodman et Luck (2007) elle ne saute pas aux yeux car sa forme varie très peu des distracteurs (seul le côté d’ouverture du carré diffère) alors que dans l’étude d’Olivers et al. (2006), la cible saute aux yeux car elle est la seule d’une forme différente des distracteurs autour d’elle, les tâches de recherche sont donc différentes. Est-ce que cette différence participe à l’écart de résultats qui ont été obtenus entre les deux études ?

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2.4 Facteurs influençant la capture attentionnelle

En 2009, Olivers s’est penché sur les résultats contradictoires tels que ceux de l’étude d’Olivers et al. (2006), qui démontrent une capture automatique de l’attention par la mémoire de travail dans la recherche visuelle, et ceux de Woodman et Luck (2007), entre autres, qui n’ont pas réussi à trouver ces effets de capture, et ont même rapporté, à l’inverse, une inhibition sur la base du contenu de la mémoire de travail. A travers sept expériences, il a exploré un certain nombre de facteurs qui pourraient expliquer cette différence, dont l’utilisation d’une tâche de suppression articulatoire, l’hétérogénéité de l’affichage, les effets d’une recherche facile ou difficile, la similarité entre la cible et l’élément maintenu en mémoire, la constance (par rapport à la variabilité) de la cible d’un essai à l’autre, l’influence de stimuli de basse énergie, et l’effet d’instructions différentes sur l’apparition ou non d’une capture attentionnelle par la mémoire. Parmi les différences existantes entre l’étude de Olivers et al.

(2006) et celle de Woodman et Luck (2007), Olivers (2009) a ainsi démontré que ce n’est pas la présence ou l’absence d’une tâche articulatoire qui peut expliquer l’absence d’effets de capture par la mémoire. Ce n’est pas non plus l’hétérogénéité de l’affichage de la cible, c’est- à-dire le fait que chez Olivers et al. (2006), il y ait un unique distracteur coloré alors que chez Woodman et Luck (2007) tous les éléments de l’affichage sont colorés. Le niveau de difficulté de la recherche (facile ou difficile) ne jouerait pas non plus un rôle important dans l’apparition des effets de capture attentionnelle, on ne peut donc pas dire que le fait que la recherche de caractéristiques dans l’affichage de Woodman et Luck (2007), probablement plus sérielle et plus difficile que la recherche d’élément unique dans l’affichage d’Olivers et al. (2006) soit une raison de la différence de résultats. Olivers (2009) a également démontré que ce n’est pas parce que chez Woodman et Luck (2007) la cible et l’objet maintenu en mémoire partagent des similarités, alors que chez Olivers et al. (2006), la cible était différente de l’objet mémorisé, que l’un ne trouvait pas de capture attentionnelle alors que l’autre oui, parce que dans son expérience, quand les éléments étaient similaires, la capture attentionnelle restait présente.

Le nombre de distracteurs n’affectait pas non plus les résultats, et des instructions différentes ont peu d’impact. Il a finalement identifié le changement de cible à chaque essai comme étant le facteur principal influençant la capture attentionnelle basée sur le contenu de la mémoire.

Lorsque les participants devaient se souvenir activement de la cible de recherche à chaque essai, l’élément à mémoriser perdait son effet sur la recherche visuelle. Il a également démontré que l’énergie de surface des éléments de l’affichage pouvait aussi jouer un rôle sur la force de l’interférence basée sur la mémoire : des stimuli très minces ne parviennent pas à induire une capture de l’attention par la mémoire.

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2.4.1 Cibles fixes vs. cibles changeantes

Ainsi, selon Olivers (2009), la différence cruciale serait donc le fait que la cible changeait d’essai en essai (varied mapping) dans l’étude de Woodman et Luck (2007) alors qu’elle restait fixe (consistent mapping) dans celle d’Olivers et al. (2006). Lorsque la cible change à chaque fois, avant chaque essai on présente aux participants non seulement l’objet à mémoriser, mais également la cible de recherche, et tous deux doivent être retenus. La cible à rechercher est donc probablement prioritaire sur l’objet à mémoriser dans la mémoire de travail, ce dernier prend alors une représentation plus passive et a donc peu d’effet sur la recherche. Quand la cible reste fixe, cela permet de développer avec l’entrainement des mécanismes de sélection de cible plus automatiques (Olivers, 2009).

Selon Olivers (2009), sa conclusion selon laquelle un objet en mémoire de travail visuelle n’interagit avec la recherche visuelle que lorsque les participants ne doivent pas mémoriser une nouvelle cible de recherche à chaque essai suggère que la mémoire de travail visuelle ne peut maintenir activement plusieurs objets à la fois. Cela s’expliquerait par une capacité limitée de la mémoire de travail visuelle qui ne pourrait réellement maintenir qu’un seul objet à la fois. Ainsi lorsque la cible de recherche reste constante d’un essai à l’autre, la charge sur la mémoire de travail est minimale, et il reste suffisamment de capacité pour maintenir un autre élément. Cet élément est alors activé de manière suffisante pour interférer avec la recherche visuelle. A l’inverse, lorsque la cible change à chaque essai, il faut faire l’effort de la mémoriser et il n’y a plus assez de capacité pour que l’objet en mémoire n’interfère sur la recherche. Pourtant, l’idée d’une capacité limitée à un objet va à l’encontre des estimations de la capacité de la mémoire de travail de trois à quatre éléments en moyenne (Cowan, 2001).

La priorité relative des tâches pourrait aussi être une explication. La mémoire de travail pourrait jongler activement avec les différentes représentations nécessaires pour les différentes tâches, de sorte que la cible soit prioritaire par rapport à l’objet à mémoriser lors de la tâche de recherche visuelle. Lorsqu’il n’est pas nécessaire de mémoriser une cible, car elle reste constante durant toute l’expérience, l’objet à mémoriser est le seul objet présent en mémoire de travail et est donc automatiquement prioritaire. Olivers (2009) propose l’idée d’un

« foyer d’attention mnémonique », en se référant à ce qu’avait proposé Cowan en 1995, selon qui les représentations en mémoire de travail sont en réalité des représentations de la mémoire à long terme maintenues actives par le foyer de l’attention. Les représentations hors de ce foyer seraient alors plus sujettes à l’interférence que celles qui sont dans le focus d’attention. En accord avec Cowan (1995), Oberauer (2002) a pour sa part proposé qu’un nombre limité de représentations de la mémoire à long terme seraient activées pour les rendre disponibles, mais qu’un seul de ces éléments serait directement accessible. Ainsi, lorsqu’il faut

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se souvenir d’une nouvelle cible à chaque essai, l’attention se porte sur sa représentation pour la maintenir active en mémoire, ce qui se fait aux dépens de l’objet à mémoriser, qui est retiré du centre de l’attention, mais qui reste disponible. Lorsque la cible reste toujours la même, il est possible de faire passer la représentation de la cible dans le sous-ensemble des éléments activés et potentiellement accessibles, en dehors du foyer d’attention. Le foyer est alors disponible pour l’objet à mémoriser, ce qui le rend directement accessible et lui permet d’interférer avec la recherche (Olivers, 2009).

2.5 Différents états des objets en mémoire de travail visuelle

Il semblerait donc que toutes les représentations en mémoire de travail n’aient pas le même statut. L’élément qui s’applique à la tâche en cours est actif et directement disponible, alors que les représentations stockées pour une utilisation ultérieure sont temporairement périphériques aux manipulations mentales actuelles. Selon Olivers, Peters, Houtkamp et Roelfsema (2011), bien que la mémoire de travail est capable de stocker plusieurs objets, on ne peut en rechercher qu’un seul à la fois. Ainsi, comme illustré sur la Figure 3, il y aurait une division entre plusieurs états représentationnels dans la mémoire de travail : quand un objet est nécessaire pour une tâche visuelle imminente, il reçoit le statut de modèle de recherche, ou modèle attentionnel. Il obtient alors un accès complet à l’entrée visuelle et biaise la sélection en faveurs des objets correspondants par le biais de connexions de rétroactions au cortex visuel. Bien que la capacité de la mémoire de travail visuelle permette de représenter plusieurs objets, un seul modèle peut être actif à la fois. Par conséquent, les objets de mémoire accessoires sont inactifs mais leur souvenir reste précis. Olivers et al. (2011) proposent que ces différents éléments de mémoire interagissent entre eux, de sorte que plus le modèle attentionnel est fort, plus l’influence des éléments de mémoire accessoires est faible. Le blocage de l’élément accessoire peut ne pas toujours être complet, par exemple si la représentation de la cible est faible, ou si l’élément accessoire est particulièrement fort. En résumé, une seule représentation en mémoire de travail visuelle pourrait contrôler l’attention à un moment donné. Ils ne sont pas les premiers à avancer une proposition de ce type : plusieurs chercheurs avaient déjà suggéré que toutes les représentations en mémoire de travail ne sont pas égales (Cowan, 2001), et qu’un seul objet serait entièrement actif (McElree, 2011 ; Oberauer, 2002 ; Beck, Hollingworth, & Luck, 2012).

Ce modèle permet d’expliquer pourquoi, dans les études où la cible changeait d’essai en essai, et que les participants devaient donc se souvenir de deux objets à chaque essai, les éléments de mémoire accessoires n’avaient pas d’effet sur la recherche. Étant donné que la cible est nouvelle à chaque essai, les participants doivent maintenir un modèle fortement actif en mémoire de travail, entrainant ainsi la suppression des éléments accessoires. A l’inverse, les études dans lesquelles la cible restait fixe d’un essai à l’autre ont démontré un effet des

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éléments de mémoire accessoires sur la recherche. Dans ces conditions, la recherche peut devenir automatisée, l’activité de la mémoire de travail passe donc d’explicite et laborieuse à des représentations plus implicites et moins exigeantes au niveau cognitif. Ainsi, avec la pratique, le modèle attentionnel peut être partiellement déchargé vers d’autres systèmes, ce qui réduit le blocage des éléments de mémoire accessoires, leur permettant d’affecter la recherche (Olivers et al., 2011).

Figure 3 : Différents états dans la mémoire de travail visuelle : un modèle de recherche unique (T) avec une influence directe sur la représentation de l’entrée visuelle, et des éléments de mémoire accessoires (A) inactifs

avec peu d’influence sur les zones sensorielles (Olivers, 2011).

2.6 Multiples modèles attentionnels 2.6.1 Preuves comportementales

Selon Olivers et al. (2011), une seule représentation à la fois de la mémoire de travail peut servir de modèle de recherche, et cette représentation bloque l’effet des autres représentations en mémoire sur l’attention visuelle. Certaines observations démontrant que la détection de cible de conjonction de couleurs était très inefficace (Wolfe, Yu, Stewart, Shorter, Friedman-Hill, & Cave, 1990), ont mené à la suggestion que la sélection attentionnelle de la cible ne peut être guidée que par une seule caractéristique d’une dimension particulière à la fois (Grubert & Eimer, 2016). Pourtant, des études ont ensuite suggéré qu’il pourrait être possible de maintenir plus d’un modèle attentionnel à la fois, notamment pour rechercher plusieurs couleurs simultanément. Par exemple, D’Zmura (1991) avait démontré une recherche efficace de deux cibles colorées qui étaient linéairement séparables des distracteurs. Étant donné que les représentations de la mémoire de travail visuelle peuvent

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être stockées directement dans le système visuel lui-même (Luck, 2008), si plusieurs représentations sont actives dans le système visuel, il devrait leur être possible de contrôler simultanément l’attention (Beck et al., 2012).

Irons, Folk et Remington (2012), ont testé si l’attention spatiale peut être guidée par des réglages de contrôle attentionnels pour deux couleurs différentes. En d’autres mots, s’il est possible de maintenir deux modèles attentionnels simultanément pour guider la recherche visuelle, contrairement à ce qu’ont proposé Olivers et al. (2011). Afin de mesurer les déplacements de l’attention spatiale, Irons et al. (2012) ont utilisé la validité spatiale dans une tâche d’indiçage spatial (Posner, 1980) qui avait déjà été utilisée dans de nombreuses études sur la capture attentionnelle. Les participants devaient identifier une lettre cible colorée apparaissant à l’un des quatre emplacements de l’affichage, accompagnée par deux lettres blanches et une lettre de couleur non pertinente, le distracteur. Comme illustré sur la Figure 4, avant la cible, un indice coloré non prédictif était présenté dans l’un des emplacements.

L’indice pouvait être d’une des couleurs cibles, ou d’une couleur non pertinente. La tâche d’indiçage spatial est fondée sur le raisonnement que si l’indice capture l’attention, il devrait affecter le temps nécessaire à détecter la cible : si la cible apparaît ensuite au même endroit, le temps de réponse sera réduit, car l’attention était déjà présente au bon emplacement. A l’inverse, si la cible apparaît ensuite dans un emplacement différent de celui de l’indice, les temps de réponse seront ralentis, car l’attention doit se déplacer une seconde fois de l’emplacement de l’indice à celui de la cible. Une différence significative entre le temps de réaction des essais valides et non valides est appelée effet de validité et est considérée comme une preuve que l’indice a capturé l’attention. La théorie de la capture contingente prédit que cet effet de validité ne se produit que pour les indices qui correspondent aux réglages de contrôle attentionnels (Folk et al. 1992). Dans l’étude d’Irons et al. (2012), les participants cherchaient une cible qui pouvait se présenter de façon aléatoire de l’une des deux couleurs (ex. rouge et vert) et devaient réussir à ignorer la couleur distractrice (ex. bleu). Si les participants peuvent adopter deux modèles attentionnels pour deux couleurs distinctes, des effets de validité devrait être retrouvés pour les indices correspondants à ces deux couleurs, mais pas pour les indices de couleurs non-pertinentes.

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Figure 4 : Exemple de la séquence d’un essai dans l’expérience d’Irons et al. (2012). Dans une expérience, les couleurs cibles étaient rouge et vert, et la couleur non pertinente bleue. Dans une autre version de l’expérience,

les couleurs cibles étaient bleu et vert, et la couleur non pertinente rouge.

Les résultats de cette expérience soutiennent l’hypothèse selon laquelle l’attention peut être guidée par deux couleurs cibles : quand les participants cherchaient une des deux couleurs cibles présentée avec un distracteur non pertinent, les indices de couleurs cibles capturaient l’attention, alors que ce n’était pas le cas des indices de couleur non-pertinente.

Le fait que la couleur non pertinente ne capturait pas l’attention indique que les participants n’appliquaient pas seulement une large recherche pour les singletons de couleur, mais qu’ils cherchaient spécifiquement les couleurs cibles. Irons et al. (2012) se sont demandés si ces résultats étaient limités aux couleurs linéairement séparables de la couleur distractrice (rouge et vert sont linéairement séparables de bleu, bleu et vert sont linéairement séparables de rouge). Stroud, Menneer, Cave, Donnelly, et Rayner (2011), avaient découvert que la recherche de deux cibles était plus efficace quand elles étaient linéairement séparables des distracteurs, suggérant ainsi que les participants adoptaient un seul modèle de recherche général qui incluait les deux couleurs cibles avec les couleurs intermédiaires mais excluait les couleurs extérieures. Pour cette raison, Irons et al. (2012) ont alors reproduit la même expérience, mais en utilisant l’ambre comme couleur distractrice, qui est une couleur intermédiaire entre le rouge et le vert (couleurs cibles). Ainsi, si les participants sont capables de chercher spécifiquement pour deux couleurs, l’effet de validité devrait être observé pour les indices vert et rouge, mais pas pour les indices couleur ambre. Les résultats ont démontré que l’attention était bel et bien capturée par les indices de couleurs cibles, mais pas pour les indices non-pertinents de couleur ambre. Le pattern de temps de réaction étant similaire à celui de l’expérience précédente, cela suggère que les participants ont utilisé la même stratégie quand les couleurs étaient linéairement séparables et quand elles ne l’étaient pas.

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Irons et al. (2012) ont également écarté l’hypothèse selon laquelle au lieu de chercher deux couleurs simultanément, les participants auraient simplement inhibé la couleur distractrice, en ajoutant une expérience dans laquelle la cible était présentée avec trois distracteurs au lieu d’un seul. Il serait peu probable que les participants aient été capables d’inhiber les trois distracteurs avec un seul modèle d’inhibition.

Leur étude s’est également intéressée à l’influence de l’amorçage entre essais, car il a été suggéré que l’amorçage entre les essais pourrait expliquer les effets de capture contingente : les indices pertinents ne capteraient l’attention que parce qu’ils sont fréquemment amorcés par la cible (Belopolsky et al., 2010 ; Theeuwes & Van der Burg, 2007

; Kristjansson, Wang, & Nakayama, 2002). Si les participants cherchent deux couleurs de cibles différentes et ne peuvent pas maintenir deux modèles attentionnels en même temps, la capture attentionnelle peut être amorcée par la cible de l’essai précédent : l’identification d’une cible verte peut amorcer la capture par le vert, et donc un indice vert présenté lors de l’essai suivant capterait l’attention. L’amorçage entre essais n’était pas l’explication des effets de capture contingente lors de la recherche d’une cible unique (Folk & Remington, 2008), mais il n’a pas été exploré lors de la recherche de cibles multiples. Afin d’évaluer l’amorçage entre essais dans la recherche de deux cibles, Irons et al. (2012) ont évalué si la couleur de la cible à l’essai N déterminait la capture par l’indice lors de l’essai N+1. Si la capture attentionnelle est amorcée par la cible précédente, les effets d’indiçage ne doivent se retrouver que lorsque la couleur de l’indice correspond à la couleur de la cible précédente. Si les participants peuvent maintenir deux modèles attentionnels, tous les indices de la couleur des cibles devraient capturer l’attention. Irons et al. (2012) n’ont trouvé aucune preuve d’amorçage entre les essais dans leurs expériences, ce n’est donc pas l’explication de leurs résultats.

En conclusion, Irons et al. (2012) ont fourni une preuve de la possibilité de maintenir deux modèles attentionnels simultanément dans le but de guider l’attention, contrairement à la proposition d’Olivers et al. (2011), selon laquelle un seul modèle attentionnel à la fois peut influencer la recherche visuelle. Leurs résultats à travers cinq expériences ont démontré de façon consistante que quand les participants cherchaient deux couleurs cibles, seuls les indices de couleurs cibles capturaient l’attention et entrainaient un effet de validité spatiale.

Les recherches tendent à démontrer que les paramètres de contrôle attentionnel peuvent être plus précis, complexes et flexibles qu’on le pensait (Irons et al., 2012). Malgré tout, bien que les participants soient capables de chercher deux cibles simultanément, Irons et al. (2012) ont tout de même trouvé des temps de réaction plus lents et une moins bonne précision en comparaison à d’autres études de capture contingente. Le fait que la recherche de deux cibles soit moins efficiente que celle d’une seule cible pourrait potentiellement être due au coût additionnel sur les ressources attentionnelles ou de mémoire de travail.

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2.6.2 Mesure des mouvements oculaires

De leur côté, Beck et al. (2012), en étudiant les mouvements oculaires, sont également arrivés à la conclusion que l’on peut utiliser plusieurs modèles attentionnels simultanément pour guider la recherche visuelle vers des objets pertinents. Ils ont proposé aux participants une tâche dans laquelle ils devaient soit chercher une couleur à la fois avant de chercher la seconde, soit chercher les deux couleurs de manière simultanée. Dans leur étude, le fait de rechercher de manière simultanée deux caractéristiques distinctes n’a pas entrainé de coût en comparaison à la recherche séquentielle de ces caractéristiques. Selon eux, ces résultats démontrent que deux représentations actives maintenues en mémoire de travail visuelle peuvent guider l’attention simultanément.

2.6.3 La N2pc

Selon Grubert et Eimer (2016), l’absence d’effet comportemental d’indiçage spatial pour les indices distracteurs dans l’étude d’Irons et al. (2012) ne signifie pas nécessairement que ces indices n’ont pas capturé l’attention. En fait, l’attention aurait pu se porter initialement sur ces indices là également, mais se serait ensuite retirée des indices qui ne correspondent pas à l’une des deux couleurs pertinentes pour la tâche. Dans ce cas, l’absence d’effet d’indiçage pour ces indices non pertinents ne serait pas le reflet de l’absence de capture attentionnelle, mais plutôt la participation de processus de contrôle supplémentaires aux étapes qui suivent l’allocation initiale de l’attention aux deux types d’indice. Cette possibilité que les indices distracteurs attireraient l’attention lors d’une recherche multicolore peut être testée avec des mesures de potentiels évoqués cérébraux (ERP) qui permet d’obtenir des marqueurs temporels précis des processus de sélection attentionnelle (Grubert & Eimer, 2016).

La composante N2pc est particulièrement utile pour étudier l’évolution temporelle de la capture de l’attention, car cette composante est un marqueur électrophysiologique lié à la sélection attentionnelle (Grubert & Eimer, 2016). Mesurée par les électrodes pariéto- occipitales et déclenchée environ 175 millisecondes après l’apparition du stimulus, la N2pc est une négativité controlatérale à la cible présentée parmi des distracteurs (Luck & Hillyard, 1994).

Le but de l’étude de Grubert et Eimer (2016) était d’utiliser la composante N2pc comme marqueur de la capture attentionnelle dans une tâche d’indiçage spatial semblable à celle d’Irons et al. (2012) afin de tester si les processus de sélection attentionnelle peuvent être contrôlés efficacement par des modèles de recherche simultanés pour différentes couleurs.

Dans leur première expérience, les participants cherchaient l’une ou l’autre de deux cibles possibles définies par la couleur (rouge ou vert) qui étaient présentées parmi des objets gris.

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Comme chez Irons et al. (2012), le tableau de recherche comportait un élément distracteur coloré (bleu). Le tableau de recherche était précédé par l’affichage de l’indice qui contenait, parmi des éléments gris, un indice non informatif coloré, soit correspondant à une des couleurs cibles, soit à la couleur du distracteur (voir Figure 5). Alors que les auteurs s’attendaient à confirmer les effets comportementaux rapportés par Irons et al. (2012), c’est-à-dire que les indices de couleurs correspondantes capturent l’attention (temps de réaction plus rapides pour les cibles apparaissant à l’endroit indicé et déclenchement d’une N2pc) alors que les indices de couleur distractrice ne devraient démontrer aucun de ces effets, leur première expérience a démontré la présence d’une N2pc en réponse aux indices distracteurs, malgré le fait que les effets comportementaux reproduisent les résultats d’Irons et al. (2012). Cela suggère que les couleurs non pertinentes à la tâche ne peuvent être complètement empêchées d’attirer l’attention. Grubert et Eimer (2016) ont alors conduit une seconde expérience afin de réconcilier les résultats comportementaux et électrophysiologiques apparemment contradictoires, dans laquelle ils ont réduit l’intervalle entre l’affichage de l’indice et celui de la cible de 200 à 100 millisecondes afin de tester si l’attention est en fait initialement attirée puis retirée des indices distracteurs. Dans ce cas, l’affichage de recherche est traité alors que l’attention n’a pas encore été retirée de l’indice non pertinent, les indices distracteurs suscitent cette fois-ci des temps de réaction démontrant une capture de l’attention. Ces résultats suggèrent que le contrôle de la sélectivité attentionnelle se fait en deux étapes temporellement distinctes : une rapide capture attentionnelle initiale par toutes les couleurs, suivie d’un retrait de l’attention des indices qui ne correspondent pas au modèle de recherche actif. Leur troisième expérience, en comparant la recherche de deux couleurs et la recherche d’une seule couleur, a permis de démontrer que la présence de la N2pc pour les indices distracteurs n’était pas spécifique à la recherche de plusieurs couleurs, ce n’est donc pas une preuve de l’altération de la sélectivité attentionnelle lors de recherche multiple. Finalement, une dernière expérience postule que leur paradigme, avec un seul distracteur coloré en plus de la cible, ne permettait pas de supprimer le mode de recherche par singleton. Ils ont donc conduit une expérience dont l’affichage de recherche était hétérogène, afin de forcer les participants à effectuer une recherche de caractéristique particulière (voir Figure 5). Dans ce cas, une N2pc n’a été suscitée que pour les indices de couleurs cibles, et elle avait une amplitude similaire qu’il y ait une ou deux couleurs à rechercher. Grubert et Eimer (2016) en concluent donc que lorsque la demande d’une tâche requiert l’adoption d’une recherche de caractéristiques spécifiques, la sélection de la cible peut être contrôlée par plus d’un paramètre de contrôle attentionnel. Leurs résultats supportent l’affirmation d’Irons et al. (2012). De multiples réglages du contrôle attentionnel pour différentes couleurs peuvent donc être activées simultanément afin de sélectionner les objets qui y correspondent et d’exclure du traitement les objets non correspondants, et comme les marqueurs comportementaux et électrophysiologiques de la

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capture attentionnelle étaient semblables quand les participants cherchaient une seule ou deux couleurs simultanément, cela suggère que les processus de contrôle attentionnel peuvent opérer de manière autant efficiente durant une recherche de caractéristiques multiples que lors de la recherche d’une seule caractéristique.

Figure 5 : déroulement des essais dans les expériences de Gruber et Eimer (2016)

2.7 Objectif et hypothèse de recherche 2.7.1 Objectifs

Alors qu’Olivers et al. en 2011 proposaient qu’il n’est possible de maintenir qu’un seul modèle attentionnel à la fois pour guider l’attention visuelle, et que les autres éléments en mémoire de travail, appelés « éléments de mémoire accessoire » ne peuvent influencer l’attention, Irons et al. (2012) ont ensuite contredit cette théorie en démontrant que l’attention pouvait être guidée par deux modèles attentionnels différents que les participants maintenaient simultanément en mémoire. Résultats qui ont plus tard été confirmés par Grubert et Eimer (2016).

C’est donc cette recherche et sa conclusion qui nous ont mené à notre étude. Nous avons décidé de pousser plus loin leur recherche. Comme ils ont démontré qu’il était possible de maintenir deux modèles attentionnels à la fois, et étant donné que la mémoire de travail visuelle a une capacité maximale de trois à quatre éléments, notre but est de tester s’il est effectivement possible de maintenir non seulement deux modèles attentionnels à la fois, mais également jusqu’à trois.

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Notre étude permet d’investiguer des questionnements proposés par des études précédentes. Tout d’abord, Irons et al. (2012) proposaient qu’il serait utile que des recherches ultérieures examinent s’il est possible pour les participants de chercher deux cibles non linéairement séparables avec des différences de couleurs plus petites que celles utilisées dans leur étude. Dans notre étude, les différences de couleurs utilisées sont effectivement bien plus proches que dans la leur. De plus, Grubert et Eimer (2016) ont suggéré que de futures études d’indiçage spatial pourraient utiliser des cibles changeantes plutôt que fixes comme ils l’ont fait, ainsi qu’Irons et al. (2012) dans leurs études, afin d’étudier la possibilité que les cibles fixes soient représentées dans la mémoire à long terme plutôt que la mémoire de travail, alors que lorsque les cibles sont changeantes, elles sont stockées dans la mémoire de travail et donc seraient pour leur part potentiellement soumises à des limitations du nombre de modèles attentionnels actifs à la fois. Dans notre étude, les couleurs mémorisées par les participants changent de manière aléatoire à chaque essai, donc ce sont bien des cibles changeantes.

2.7.2 Hypothèse de recherche

Comme Irons et al. (2012) ont pu démontrer qu’il était possible de maintenir deux modèles attentionnels à la fois pour guider la recherche visuelle, et comme la capacité de la mémoire de travail s’élève à trois ou quatre éléments, nous pensons qu’il devrait être possible de maintenir jusqu’à trois modèles attentionnels simultanément.

Étant donné que le but de notre recherche est de reproduire et d’étendre la recherche d’Irons et al. (2012), notre paradigme expérimental est inspiré du leur. Nous utilisons également une tâche d’indiçage spatial afin de mesurer la capture attentionnelle. Nous nous attendons donc à ce que les indices correspondants aux couleurs à mémoriser attirent l’attention des participants, qu’il y en ait une, deux ou trois, mais que ce ne soit pas le cas de la part des indices de couleurs distractrices.

3. Méthode 3.1 Participants

Dix-neuf étudiants (13 femmes et 6 hommes) en première année de Bachelor en psychologie à l’Université de Genève ont participé à cette expérience avec un âge moyen de 20.21 ans. Ils avaient tous une acuité visuelle normale ou corrigée. Leur participation a été récompensée par la validation d’heures d’expérimentations. La procédure de l’expérience a été approuvée par la commission éthique de la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education de l’Université de Genève et tous les participants recevaient et signaient le consentement éclairé avant le début de l’expérience.

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3.2 Matériel

Les participants étaient assis en face de l’écran, la tête stabilisée sur une mentonnière, leur permettant de maintenir une distance de 70 cm avec l’écran. Les stimuli étaient présentés sur un écran 23.6-inch LCD à 100 Hz avec une résolution de 1,920 x 1080 pixels (VIEWPixx Light, VPixx Technologies Inc., Canada). L’expérience était programmée sur Matlab (The MathWorks Inc, Natick, MA, USA).

3.3 Stimuli

L’écran de mémorisation consistait en un disque coloré (rayon = 0.36°), potentiellement entouré d’un anneau coloré (rayon = 0.72°), lui-même potentiellement entouré d’un anneau coloré (rayon = 1.08°).

L’écran sur lequel s’affichaient l’indiçage ainsi que la cible était composé d’un écran de fixation central entouré de quatre anneaux gris clairs. La distance entre le centre de la croix de fixation et le centre des anneaux étaient de 3°. Les anneaux étaient composés d’un cercle intérieur (rayon = 1.1°) et d’un cercle extérieur (rayon = 1.4°). La largeur de la ligne était de 1 pixel ou 0.03°. Lors de l’affichage de l’indice, chacun des anneaux étaient remplis : trois des anneaux étaient gris clairs, et un anneau était coloré. Lors de l’affichage de la cible, une lettre T, retournée à 90° dans le sens des aiguilles d’une montre ou dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, apparaissait dans chacun des anneaux. Les barres du T avaient une épaisseur de 0,3°. Deux des lettres T étaient colorées (la cible ainsi que le distracteur) et les deux autres lettres T étaient gris clairs.

Les couleurs étaient définies dans l’espace CIELAB car dans ce modèle d’apparence des couleurs, les distances approchent les différences de couleurs perçues (Fairchild, 2005).

3.4 Design expérimental

Les participants mémorisaient de manière aléatoire entre une et trois couleurs avant la recherche visuelle. Les couleurs à mémoriser changeaient aléatoirement à chaque essai, afin que les participants utilisent bel et bien leur mémoire de travail, et non pas leur mémoire à long terme. Les couleurs à mémoriser étaient présentées au sein d’un disque et non pas séparées l’une de l’autre afin d’éviter de les présenter sur une ligne horizontale, ce qui pourrait induire un biais d’exploration spatiale chez les participants qui risqueraient de plutôt chercher leur cible dans les deux carrés horizontaux et non pas dans les deux carrés verticaux.

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L’indice présenté avant la cible pouvait être correspondant, c’est-à-dire d’une des couleurs à mémoriser, ou alors non-correspondant, d’une couleur qui n’est pas mémorisée par le sujet. De plus, l’indice pouvait apparaître soit en position valide, c’est à dire au futur emplacement de la cible, soit en position invalide, dans un emplacement différent de la cible.

Dans notre expérience, l’indice se trouvait en position valide dans un quart des essais.

Comme illustré dans la Figure 6 ci-dessous, les couleurs sont spécifiées par le degré de rotation, il existe donc 360 couleurs différentes. Comme les couleurs sont séparées à chaque fois de 60°, on en choisissait six de manière aléatoire à chaque essai (Figure 6). Quand le participant mémorise une couleur (par exemple C1), l’indice peut être soit de la même couleur (C1), soit d’une couleur distractrice (D1). Dans l’affichage de la cible, on retrouve donc C1, le distracteur D1, et deux caractères gris. Quand il mémorise deux couleurs (par exemple C1 et C2), l’indice peut être coloré soit comme C1, soit comme C2, ou alors de la couleur distractrice D1, qui est non linéairement séparable des deux couleurs retenues en mémoire.

La cible pourra donc être colorée soit comme C1, soit comme C2, et dans les deux cas elle sera accompagnée du distracteur D1, ainsi que de deux caractères gris. Quand le participant mémorise trois couleurs (par exemple C1, C2 et C3), l’indice peut être coloré d’une de ces trois couleurs pertinentes, ou alors d’une des trois couleurs distractrices (D1, D2 ou D3). Si la cible est C1, elle sera accompagnée soit de D1, soit de D3 en tant que distracteur ; s’il s’agit de C2, le distracteur pourra être soit D1, soit D2 ; et si la cible est C3, le distracteur sera alors D2 ou D3. Dans chaque cas, la cible et le distracteur sont accompagnés de deux caractères gris. En résumé, comme illustré sur la Figure 6, la différence de couleur entre la cible et son distracteur reste toujours constante, fixée à 60°, afin que ce ne soit pas plus facile dans certains cas que dans d’autres de différencier les deux couleurs et donc de retrouver la cible.

Si l’indice présenté était une couleur distractrice (non-correspondant), c’est ce distracteur-là qui était ensuite présent pour accompagner la cible, afin qu’il n’y ait jamais un distracteur de couleur différente entre l’affichage de l’indiçage et celui de la cible.

Il y a donc trois variables indépendantes : le nombre de couleurs à mémoriser (une, deux ou trois), la couleur de l’indice (correspondant ou non-correspondant), et sa position (valide ou invalide). La variable dépendante mesurée est le temps de réaction des participants avant de donner leur réponse.

Les participants effectuaient deux passations lors de deux jours différents de trois blocs de 192 essais à chaque fois, ce qui équivaut à un total de 1152 essais.

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Figure 6 : Exemple des 6 différentes couleurs possibles lors d’un essai afin que la différence de couleur soit toujours constante entre la cible et son distracteur. Entre chaque angle il y a une différence fixe de 60°.

3.5 Procédure

Comme illustré sur la Figure 7, chaque essai commençait par un écran de fixation durant une seconde, suivi de l’affichage de l’écran de mémorisation pendant 306ms, puis d’un écran gris vide pendant 706 ms. La croix de fixation entourée des anneaux vides apparaissaient ensuite pendant 706 ms, avant l’affichage de l’indiçage qui durait 47ms. L’écran de fixation et les anneaux vides apparaissaient à nouveau pendant 106ms avant l’affichage de la cible pendant 50 ms. Après la présentation de la cible, l’écran de fixation reste affiché jusqu’à la réponse du participant.

Les participants répondaient à l’orientation de la lettre cible correspondante à la couleur qu’ils avaient en mémoire en cliquant sur le bouton droit de la souris dans le cas où le T était retourné dans le sens des aiguilles d’une montre, et sur le bouton gauche s’il était retourné dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. On donnait pour instruction au participant de répondre le plus vite possible tout en étant le plus juste possible, et d’essayer d’ignorer l’indice.

L’expérience consistait en deux séances d’à chaque fois 3 blocs de 192 essais. Lors de la première séance, le participant recevait les instructions puis effectuait un entrainement d’au moins 20 essais jusqu’à montrer une bonne maitrise de la tâche avant de débuter l’expérience. A la fin de la premières passation, nous vérifiions que le participant avait atteint le seuil de réussite de 75% pour continuer l’expérience et revenir une seconde fois. Lors de la seconde passation, le participant recommençait par un entrainement afin de se sentir à nouveau à l’aise avec la tâche, et nous vérifiions à nouveau que le seuil de réussite de 75%

avait été atteint lorsqu’il avait terminé.

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Les participants étaient informés visuellement de leurs erreurs, de leurs anticipations (RT < 0.2 s), ainsi que de leurs réponses trop tardives (RT > 1 s).

Figure 7 : Séquence d’événements dans l’expérience, où les participants peuvent rechercher une, deux ou trois couleurs.

3.6 Hypothèse opérationnelle

Lorsque l’indice est en position valide, comme c’est le cas ci-dessous sur la Figure 8 dans l’exemple du haut, la cible apparaît ensuite à ce même endroit, donc si l’indice a capturé l’attention du participant, quand la cible apparaît, il n’a plus besoin de déplacer son attention et la cible est traitée plus rapidement. Son temps de réaction est alors plus rapide. A l’inverse, si l’indice est en position non-valide, comme dans l’exemple du bas (Figure 8), l’attention du participant devra être redéplacée vers la position de la cible qui apparaitra ailleurs, et le temps de réaction sera alors plus lent.

Si l’on trouve une différence significative entre les temps de réaction lors des essais valides et non valides, c’est ce qu’on appelle un effet de validité, et cela signifie que l’indice a effectivement capturé l’attention, car s’il n’y a pas de différence, c'est que l’attention ne s’est

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