ÉTUDES
SUR LESVARIATIONS
DE LARICHESSE
ENCONSTITUANTS AZOTÉS
DES LAITS DE VACHEIV. — RELATION ENTRE LA TENEUR EN PROTEINES ET LE TAUX BUTYREUX
C. ROSSETTI R. JARRIGE
PAR
Station de recherches sur
l’Élevage,
C. N. R. Z., Jouy-en-Josas.Nous avons montré
précédemment (J ARRI GE
et ROSSETTI, 1957b)
que la teneur moyenne en constituants azotés
présente,
entre vaches dela même race, des différences sensibles et
reproductibles qui
seraientlargement
héritables(H ANCOCK 1953 ).
Il est doncpossible
de tenircompte
de ce caractère dans la sélection du bétaillaitier,
cequi
pose deuxproblèmes pratiques
parrapport
à la méthodeclassique
de sélectionsur le taux
butyreux :
i
o Celle-ci
permet-elle
une amélioration efficace de la richesse enprotéines ?
S’il en estainsi,
il est inutile de déterminer directement la teneur en azotequ’on
pourra estimer àpartir
du tauxbutyreux ;
2
° Peut-on
augmenter indépendamment
la teneur enprotéines
et letaux
butyreux,
defaçon
à obtenir d’unepart
des laits « beurriers » richesen matières grasses et relativement pauvres en azote
(L o rrriA 1947),
et d’autre
part,
des laits «fromagers
» avant tout riches en caséine.Ces
problèmes
nous amènent àenvisager
les variations de la teneuren
protéines,
sous lesaspects théoriques
suivants :i
o Une
partie
de ces variations est-elle liée à celles du tauxbuty-
reux ? 2
°
Quelle
estl’importance
de cette liaison etcorrélativement,
cellede la variation
indépendante ?
3
°
Quelles
sont les causesqui
déterminent cetteliaison ;
celle-cipré-
sente-t-elle des variations de nature et d’intensité entre vaches de la même race ?
(’) Avec la collaboration technique de M*"’ J. Jwc, )I,e C. Le GALLO et Il. DUIN.
Les nombreux travaux sur les laits de
mélange
et les laits individuels résumés au tableau I ont établiqu’il
existe une liaisonpositive plus
oumoins étroite entre teneur en
protéines
et tauxbutvreux ;
ilsn’apportent
cependant
aucuneréponse
aux deux autresproblèmes,
et surtout nepermettent
pas deconclure,
comme on l’a faitgénéralement
etimpli-
citement que la sélection sur le taux
butyreux
entraîne une amélioration simultanée de la teneur enprotéines.
KRIZFNFCKY( 1943 )
les a discutéset a montré
qu’il
fallait attacherbeaucoup plus d’importance
aux liaisonsintra-individuelles
(ensemble
des laits d’une mêmevache)
et surtoutinter-individuelles
(chaque
vache étantreprésentée
par ses valeursmoyennes).
Ces dernièrescatégories
de calculs(tableau II) [GAINES
et OVER-MAN
(1038),
PRESSLER(1 937 ),
I,ONIsA(1 947 ),
PIEL(1953),
COMBERG(I95I),
AuRIOI,( 195 6)], jointes
à la méthodeplus
récented’analyse
hié-rarchique
de la variance[BONNI!R
et HANSSON( 194 6),
HANSSON etBONNI!R
( I95 o),
I,ARSSONet al.( I949 )]
ont mis en évidence les différences individuelles de nature vraisemblablementhéréditaire,
dans les relations entre tauxbutyreux
et teneur enprotéines.
Sur le matériel limité que nous avons
présenté précédemment (cf.
JARRIG!
etR OSSETTI ,
I957a)
nous allonsreprendre
ces diverses méthodes suivant leur ordrechronologique
pour :- démontrer l’existence de relations entre ces deux
constituants,
aux différents niveaux
(ensemble
deslaits, intra-vaches, inter-vaches),
- montrer
qu’elles
sont variables d’un animal àl’autre,
- et surtout,
analyser
leursignification
etdégager
leurs consé- quences.Rappelons
que nous avons suivi 28 vaches(tableau III)
au coursd’une lactation
(réalisée
dans des conditionscomparables),
à l’aide d’en moyenne 30échantillons constitués sur4 8
heures etrépartis
de lafaçon
suivante : un par semaine au cours des deux
premiers
et des deux derniers mois de lactation et un parquinzaine
dans l’intervalle.Ensemble des échantillons individuels
Existence d’une liaison : corrélation et régression linéaires.
La
première
méthode utilisée pour mettre en évidence une liaison entre la teneur enprotéines
a été dereporter
sur un tableau decorrélation,
l’ensemble desanalyses
de laits demélange
ou de laitsindividuels,
indé-pendamment
de leur provenance(vache-stade lactation...),
et de calculerune droite de
régression.
Cette
méthode, appliquée
à l’ensemble de nos8 55 échantillons,
nous révèle une liaison à ce niveau avec des valeurs tout à faitcomparables
aux résultats antérieurs réunis dans le tableau I.
y =
17 ,68
+ 0,441 x rx
y =
0,675 xX
+ 0,019.Il faut immédiatement remarquer que, comme les autres auteurs,
nous avons fait une
adaptation
à une droite sans avoir démontré que la liaison était linéaire. Ce fait a été admisimplicitement
par laplupart
des auteurs du tableau I, et confirmé par l’étude
critique
de KRIZFNFCK-V(194
3
) ;
par contre, les auteurs scandinaves ont montré que cette liaison est curvilinéaire à l’échelle d’un ensemble de laitsindividuels,
la teneuren
protéines augmentant plus
vite pour les tauxbutyreux plus
élevés(Bo
N
rrmx
et HANSSON194 6,
I,nRSSOrr1950 ).
Comme le montre le gra-phique
2 où nous avonsreporté
les moyennes de la teneur enprotéines
par classe de taux
butyreux (i point),
il en est peu être de même dans notre ensemble de laits : nous n’avonscependant
pas recherchél’équation
de cette
régression curvilinéaire,
car ce calcul seraitpurement
formelet
stérile,
notre matériel étanthétérogène.
Pour mettre en évidence cette
hétérogénéité,
nous avons calculé les mêmesrégressions
linéaires pour l’ensemble des laits de chacune desraces et obtenu les valeurs suivantes :
l,e coefficient de corrélation est, cette
fois-ci, beaucoup plus
faible(très significativement
inférieur auprécédent) :
il estcependant significatif
pour les vaches
Frisonnes,
mais non pour les Normandes. Nous ne retrou-vons
plus,
à l’échelle de la race,qu’une
liaison très faible alorsqu’elle
était très forte pour l’ensemble des laits. I,e
graphique
i nousexplique
immédiatement ce
paradoxe :
les laits des Normandes étantplus
richesque ceux des Frisonnes en matières grasses et en matières
azotées,
nousavons deux
populations
distinctes : si on lesréunit,
on obtient un nuage depoints ellipsoïdal
dont legrand
axe a unepente élevée ;
pourparfaire
cette
ellipse,
les laits del’unique
vachepie
rouge viennent combler unvide dans le
quadrant supérieur gauche.
Ainsi,
nous avons bien une corrélationpositive
entre teneur en pro- téines et tauxbutyreux,
mais sa valeur traduit avant tout les artifices del’échantillonnage.Un problème surgit
immédiatement :pourquoi
neretrouvons-nous
qu’une
liaison très faible pour l’ensemble des laits dechaque
race ?Toujours
pour la même raison : cet ensemble esthétérogène
et
correspond
à lajuxtaposition plus
ou moins nette despopulations
individuelles
groupant
chacune les valeurs d’une même vache. A l’inté- rieur de chacuned’elles,
existe en moyenne une liaison fondamentale(tableau III), qui disparaît
si on groupe les vaches de la même race, mais renaît si on réunit les vaches des deux races. Ce opetit jeu
de cache-cache » illustre fort bien la stérilité de ces calculs
statistiques appliqués
sans discernement à des ensembles
hétérogènes
de laits individuels et, àplus
forteraison,
de laits demélange ;
ils révèlent destendances,
maisne
permettent
aucune conclusiongénétique.
Pourétayer
cettecritique,
il nous faut maintenant démontrer l’existence de ces
populations
indi-viduelles
grâce
àl’analyse hiérarchique
de la variance.Analyse de la variance.
L’analyse
des relations entre le tauxbutyreux
et la teneur en pro- téines est d’abordperturbée
par le fait que ces deux constituants évoluent defaçon
sensiblementparallèle
au cours de la lactation(cf. J:!RRiG!
et ROSSETTI 1957
a).
Pour éliminer cetteinterférence,
nous avons donc d’abord classé les échantillons par stade de lactation en 6périodes
succes-sives de deux mois : sauf dans la
première
et ladernière,
onpeut
admettreque la
composition
du lait demeure sensiblement constante dans chacune d’elles. A l’intérieur de chacune de cespériodes,
nous avonsréparti
leséchantillons en 15 classes de taux
butyreux : <
25 ; 25 à 27 ; 27 à 29... ;nous avons dû
prendre
cet intervalle de 2points
par suite du nombre élevé de variables vis-à-vis du nombre limitéd’échantillons ;
nous pou-vons admettre
cependant
que la variation du tauxbutyreux
à l’intérieur de ces classes est suffisamment faible pourqu’on puisse négliger
les varia-tions de la teneur en
protéines qui
lui sont liées. Nous avons ensuiteséparé
les échantillons des Normandes et des Frisonnes et calculé : à l’intérieur de ces nouvelles classes les variations inter-vaches et intra vaches(tableau IV).
Après
avoir éliminé l’interférenceprépondérante
du stade de lacta-tion,
cetteanalyse
nous montre des influencessignificatives
hiérarchisées du tauxbutyreux,
de la race et del’individu,
etpermet
dedégager
lesfaits suivants : ’
1
° I,es teneurs en matières azotées
correspondant
aux diverses classesde taux
butyreux présentent
des différencessignificatives :
il existe doncune liaison entre ces deux
constituants, indépendamment
du stade delactation ;
2
° Mais il y a, à l’intérieur des classes de taux
butyreux,
une varia-tion
indépendante
de la teneur en matièresazotées ;
elle résulte d’abord des variations entre vaches de racesdifférentes,
que nous montrait legraphique
r, maisaussi,
et surtout des différences entre vaches de la mêmerace
qui
sontsignificativement supérieures
aux variations intra-vaches : les teneurs enprotéines
des différentes vaches de la même race ne serépartissent
donc pas de la mêmefaçon
entre les diverses classes de tauxbutyreux.
Ces résultats confirment ceux que les auteurs scandinaves ont obtenus
sur trois
troupeaux
différents(BoNrmE R
et HaNSSOrr194 6,
HANSSONet BONNIER 1950, I,aRSSOrr et al.
i 949 ),
et nouspermettent
deséparer
la variation de la teneur en matières azotées en deux
parties :
une varia-tion liée à celle du taux
butyreux (indépendamment
du stade delactation)
et une variation
indépendante, qui
est de nature individuelle. Ce sontces différences entre vaches
qui masquent plus
ou moins la liaison fon- damentale entre teneur enprotéines
et tauxbutyreux,
à l’échelle de l’ensemble des laits individuels de la race etqu’il
nous fautanalyser
maintenant.
Analyse
des relations intra individuelles Valeur et signification des coefficientsde corrélation intra-individuels.
Le tableau III
donne,
pourchaque vache,
la valeur du coefficient de corrélation entre la teneur enprotéines
et le tauxbutyreux
de la séried’échantillons
prélevés
au cours de sa lactation. Tous ces coefficientssont
positifs,
mais 8 d’entre eux ne sont passignificativement
différentsde
zéro ;
d’autrepart
ladispersion
estbeaucoup plus
forte chez les Nor- mandes( 0 , 0 6 2
pourJoliette
à o,g2 pourPastille)
que chez les Frisonnes( 0 , 31
8
ào,8oi).
Cette distribution est sensiblement voisine de cellesrapportées
par les trois études antérieures de PRESSIER(ig 37 )
sur vachespie noire,
de COXIBERG(zg5i)
surpie
noires et de PIEL(zg5 3 )
sur Brunesdes
Alpes
dont legraphique
4 donne leshistogrammes.
Cette liaison
positive
intra-individuelle entre tauxbutyreux
et ma-tières azotées
provient
du fait que ces deux constituants évoluent enmoyenne dans le même sens au cours de la
lactation,
notammentpendant
les deux
premiers
et les deux derniers mois où sont concentrés presque la moitié de nosanalyses (échantillons hebdomadaires).
Parsuite,
lavaleur du coefficient de corrélation individuel traduit le
degré
de simili-tude entre les deux courbes
d’évolution,
comme le montrentparfaitement
les
graphiques
3correspondant
aux valeurs extrêmes :- la vache Pastille a
présenté
àpartir
du 2e mois de lactation unecourbe d’enrichissement
particulièrement régulière
etaccentuée,
aussi bien pour le tauxbutyreux
que pour la teneur enprotéines,
cequi
donneune
répartition quasi
linéaire despoints
sur le tableau de corrélation et un coefficient voisin de l’unité( 0 , 92 ) ;
- au contraire les deux courbes
correspondantes
de la vacheJoliette
sont très nettement
différentes,
voire mêmeopposées
dans certainespériodes,
parexemple
de la 4e à la ioe semaine et de la 22e à la 34e ; il en résulte un nuage depoints
circulaire et un coefficient de corrélation presque nul(0,05).
Comme la teneur en matières azotées
présente
une évolution rela- tivementrégulière
chez toutes les vaches, la valeur du coefficient de corré- lationdépend
en définitive des variations du tauxbutyreux. I,’analyse
des
graphiques
individuels nous montrerait ainsi que les huit coefficientsnon
significatifs
sont associés à desirrégularités
du tauxbutyreux
soitdans l’évolution
générale
au cours de la lactation(Joliette : 0 , 0 6 2 ,
Astrée:0 , 125
, I,inotte : 0,330, Rose :
o, 340 )
soit d’unprélèvement
à l’autre(Pietje : 0 , 31 8,
Dalhia :0 , 3 6 0 , Tulipe : 0 , 379 ).
Cesirrégularités peuvent
être
caractéristiques
de l’animal(grandes
fluctuationsjournalières)
oudéterminées par les facteurs
climatiques
alimentaires oupathologiques ;
enfin un
petit
nombre d’entre elles estprobablement
associé à une traiterelativement
incomplète,
notamment chez certaines Normandes àtemps
de traite trèslong (ex. Joliette).
Dans ces conditions nous ne pouvons pas dire si nos coefficients de corrélationphénotypiques
intra-individuels rendentcompte
correctement de la liaisongénétique (action
desgènes communs)
entre matières azotées et tauxbutyreux,
et par suite en déduirequ’il
existe entre vaches des différences dans l’intensité de cette liaison.Pour
permettre
de telles conclusions il faut comparer des corrélationsindividuelles obtenues dans les mêmes conditions de milieu
(climat- alimentation)
et débarrassées au maximum de l’influence des facteursphysiologiques qui
sontprépondérants
aux deux extrémités de lalactation ;
d’une
part
au cours de laphase d’appauvrissement
des deuxpremiers mois,
d’autrepart
àpartir
du 5emois degestation
où le nouveléquilibre
hormonal associé au
développement
dufoetus,
détermine une augmenta- tion deplus
enplus
nécessaire des deux teneurs en matières azotées et matières grasses : celles-ciprésentent
enfin dans ces deuxpériodes
une étroite liaison
négative
avec laquantité
delait,
alorsqu’elles
en sontpratiquement indépendantes
dans l’intervalle(cf. J ARRIGE
et ROSSETTI1
957 a).
C’est donc la corrélation calculée à
partir
des laits sécrétés entre le 3e mois
après
levêlage
et le 5e mois degestation qui
aura leplus’de
chances de rendre
compte
de la liaisongénétique ;
pour avoir ungrand
nombre de
valeurs,
nous nous sommes adressés à un nouveau matériel et nous avonsanalysé
les laitsjournaliers
de 4 vaches.Différences individuelles dans l’intensité de la liaison
Matériel. - Nous avons dosé les teneurs en matières grasses, ma-
tières azotées et lactose des laits
journaliers de 4
vaches du 3emois de lactation au tarissement. Le tableau ci-dessous donne larépartition
desprélèvements
et lesgraphiques
5, les moyennesarithmétiques
hebdo-madaires des teneurs.
Ces 4 vaches dont nous avions étudié les lactations
précédentes (cf.
tableauIII)
ont été maintenues dans les mêmes conditions de milieu etd’alimentation ; malheureusement,
enplus
de la différence de5
-6
semaines dans lesvêlages,
nous avons eu trois autres facteurs de per- turbation :- en
juillet,
la teneur en matières azotées a diminuérégulièrement jusqu’à
des valeurs anormalement basses situées au-dessous du « minimumphysiologique
n(graph. 5 ) ;
cette chute est vraisemblablement due àune sous-alimentation latente associée à la sécheresse
(manque d’herbe, apport
d’unfourrage
vert dequalité médiocre) ;
- la vache Pervenche a subi une
gastrotomie (corps étranger)
le10
octobre,
tandis que la vache Actée a été tarie par erreur un moistrop tôt ;
-
enfin,
lesanalyses
ont dû êtreinterrompues pendant
une semaineau mois d’août et les
prélèvements
effectués sur4 8
heures du I octobreau 28 novembre.
Si les coefficients de corrélation ont été vraisemblablement faussés
en valeur absolue par ces différents
incidents,
ils demeurent néanmoinscomparables
d’un animal àl’autre,
notamment dans lapériode
moyenne de la lactation réalisée aupâturage
demai-juin
à octobre.Variabilité journalière. - Nous avons traduit les variations de la
quantité
et de lacomposition
du lait d’unjour
àl’autre,
par les diffé-rences
journalières
relatives :La moyenne de ces différences
(tableau V)
nous donne une estima-tion de la fluctuation
journalière
en dehors de l’évolution orientée au cours de la lactation.Que
ce soit pour l’ensemble des laits dechaque
vache ou pour ceuxproduits
dans laphase
moyenne(juin
àoctobre),
nous arrivons à deux conclusionsimportantes :
- les fluctuations de la teneur en matières azotées sont très limitées
( 2 ,
5
p. 100 en moyenne, du même ordre que lelactose),
2 à 3 foisplus
faibles que celles de la
quantité
de lait(6
à 7 p.100 )
et 3à 4
foisplus
que celles du taux
butyreux (8
à 10 p.ioo) qui
est le constituant orga-nique
de loin leplus variable ;
’- il existe des différences très nettes entre nos
quatre
vaches :par
exemple : Joliette
estbeaucoup plus irrégulière qu’Eglantine
aussibien pour la teneur en matières azotées que pour la
quantité
de lait etle taux
butyreux.
Corrélations entre taux butyreux
(y)
et teneur en matières azotées(x).
Nous avons calculé
(tableau VI)
des coefficients de corrélation pour l’ensemble des laits et, pour différentes tranches de lactation enprenant,
cette
fois-ci,
comme variableindépendante,
la teneur en matières azotées totalesqui
estbeaucoup plus régulière
et traduit enpartie
le stade de lactation.Les valeurs obtenues pour l’ensemble des laits sont fortement
positives
parcequ’elles résultent,
une fois deplus,
del’augmentation
simultanée des deux constituants en fin de lactation : la liaison faible
ou même
négative
avant la saillie et au cours des deuxpremiers
moisde
gestation,
devientpositive
au cours des 3e et 4e mois et très étroiteau 5e et 6e. Les valeurs individuelles des deux
premières
tranches degestation,
sont d’ailleurs relativement artificielles etdépendent
partrop
de
l’échantillonnage,
notamment de laplace
de la saillie parrapport
à la
dépression
estivale de la teneur enprotéines (graph. j ).
Par contre, nous éliminons ces erreurs de
découpage,
en considérant l’ensemble des laits depâturage (de mai-juin
à finoctobre) qui
corres-pondent
en gros à l’ensemble des troispremières
tranches et sont doncproduits
dans des conditionsphysiologiques
trèscomparables
et desconditions de milieu
identiques.
Nous obtenons des coefficients de corré- lationsignificativement
différents(dernière ligne
du tableauVI)
d’autantplus
élevés que la variabilitéjournalière
du tauxbutyreux (tableau V)
est
plus
faible : Pervenche8, 1
p. ioo eto,q.g 3 &dquo;&dquo;, Eglantine 8, 4
p. 100 eto,a5 7
&dquo;,
Actée 10,4p. 100 et 0,155,Joliette m, 4
p. 100 et 0,101.Pour
préciser
la nature de la liaison dans cettepériode
nous avonsanalysé
la variance du tauxbutyreux
en relation avec la teneur en ma-tières azotées
(tableau VII) ;
nous avonspris
comme intervalle de classe de celles-ci la moitié de son écarttype,
cequi
nous a donné sensiblement le même nombre de classes pour les 4 vaches(8
pourPervenche,
9 pour Actée etJoliette,
m pourEglantine) ;
nous avons d’autrepart
calculé lerapport
de corrélationqui exprime
la liaison de lafaçon
laplus géné-
rale sans
impliquer d’hypothèse
sur sa nature ; c’est par définition lerapport :
somme des carrés du taux
butyreux
entre classes de matières azotées Somme des carrésI,e tableau nous montre que,
seule,
Pervencheprésente
une liaisonsignificative
mais nonlinéaire ;
chezEglantine
la liaisonapproche
leseuil de
signification
et seraitpeut-être linéaire ;
enfin iln’y
a pas de liaison chez les deux autres vaches.En
définitive,
il existerait donc des différences individuelles :(sché-
matisées par le
graph. 6) :
- d’abord dans
l’amplitude
de la variationjournalière
du tauxbutyreux (ainsi
que des autresconstituants) ;
- ensuite dans la
part
de cette variation totalequi
est liée à cellede la teneur en matières azotées : en admettant que le
rapport
de corré-lation en soit une estimation
valable,
elle serait de 2i,5p.ioopour Joliette, 2
6,
4
p. ioo pourActée, 30 ,8
p. ioo pourEglantine
et6 3 , 5
p. ioo pourPervenche ;
- dans l’intensité de la liaison entre les deux teneurs et, par
suite,
à titre
d’hypothèse,
dans le nombre degènes
communs aux deux sécré- tions.Ces conclusions n’ont naturellement de valeur que dans la mesure
où nous admettons que les corrélations
phénotypiques
que nous avons calculées traduisent les liaisonsgénétiques
fondamentales avec la mêmeapproximation
chez nosquatre
animaux. Nouscomptons
les vérifier ultérieurement enappliquant
à des animaux maintenus dans des condi- tions de milieu moinsvariables,
ces méthodesd’interprétation qui, elles,
demeurent valables.Itu l
ations interiii(li%-i(luelles Existence d’une liaison.
I,e
graphique
7 où nous avonsreprésenté chaque
vache par ses va- leurs moyennespondérées
en matières grasses et matières azotéestotales,
nous montre immédiatement que, en moyenne, la teneur en matières azotées
augmente
avec le tauxbutyreux.
Ensupposant
que cette liaison inter- individuelle estlinéaire,
nous obtenons les coefficients suivants :La corrélation est hautement
significative
pour les Frisonnes maisnon pour les normandes en raison de leur
dispersion ;
elle le redevient pour l’ensemble des vaches parce que la teneur en matières azotéesaugmente
en mêmetemps
que le tauxbutyreux quand
on passe des Frisonnes(t.
b. : 34,0, m. a. t. :3 i, 4 )
aux Normandes(t.
b. : 43,4, m. a. t. :3 6, 4
).
En moyennequand
le tauxbutyreux augmente
d’unpoint
entredeux
individus,
la teneur en matières azotéesaugmente
mais d’une quan- titébeaucoup plus
faible : o,4g chez les Frisonnes et o,24 chez les Nor-d .! , i, !- - !- d .matières azotées
mandes ;
il en résulte une diminution durapport matières azotées
!! taux butyreux .Nous avons admis en accord avec KRIZENECKY
( 1943 )
que la liaisonentre les deux teneurs, est linéaire et de la forme y = ax -E- b et par suite que leur
rapport
est une fonctionhyperbolique
du tauxbutyreux
z =
a+ ! .
Nous constatons que ces courbes rendent assez biencompte
des deux distributions(graph. 7 )
mais nous n’avons pas assez de valeurs pour démontrer que larégression
linéaire est la meilleurereprésentation
de la liaison : c’est là d’ailleurs un
problème
relativement formel si onconsidère
l’importance
des écarts individuels.Différences individuelles.
Pour un même taux
butyreux
nous avons des différences allantjusqu’à
5 g dans la teneur en matières azotéestotales,
parexemple
de34,6 (Joliette)
à3 g,8 (Actée)
pour 47 g de matières grasses ;réciproque-
ment à la même teneur en matières
azotées,
de 35 g parexemple
corres-pondent
des tauxbutyreux
allant de3 8,5 (Cabale)
à 47,2(Joliette).
La teneur en
protéines n’augmente
donc pasobligatoirement
avec letaux
butyreux quand
on passe d’une vache à l’autre à l’intérieur de la même race.Ces différences se traduisent par de
larges
variations durapport
d i, , m. a. t. caséine 1
des moyennes
pondérées et
t. b. t. b.caséine
que nous pouvons résumerde la
façon
suivante :Nous constatons que les Normandes
présentent
unedispersion beaucoup plus
élevée que les Frisonnes et une moyenne nettementplus
faible : d’une race à l’autre la teneur en
protéines augmente
moins viteque le taux
butyreux
cequi
est en accord avec les observations de GAINES et Ov!xMnrr( 193 8)
aux U. S.A.,
et de I,.!RSSON et al.( 1949 )
en Suède(cf. graph. 8).
Dans le tableau VIII nous avons fait une
analyse hiérarchique
dela variance des 3a3 valeurs individuelles du
rapport
observées entre lafin du 2e mois et la fin du
8 e ;
nous avons en effet montréprécédemment (J
ARRI
GE
et ROSSETTI 1957a)
que lerapport
demeurait sensiblement constant dans cettepériode,
alorsqu’il
diminuait defaçon significative
dans les deux
premiers
mois et fluctuait fortement dans les deux derniers.Nous avons successivement classé les valeurs par stades de lactation
(
3 périodes
de 2mois),
par races et par vaches.Cette
analyse
nous confirme d’abord que lerapport
m. a.t.,’t.
b.n’évolue pas au cours de la
période
de lactationenvisagée
et varie defaçon
hautementsignificative
d’une race àl’autre ;
elle nous démontre ensuite que les variations inter-vaches sontsupérieures
aux variationsintra-vaches et que ce
rapport
est donc unecaractéristique
individuelle.DISCUSSION
Existence d’une liaison
positive
à trois niveauxAu cours de
l’exposé
détaillé de nos résultats nous avons montréqu’il
existait entre la teneur enprotéines
et le tauxbutyreux
une liaisonpositive
à trois niveaux.- La
première apparaît
au niveau intraindividuel pour l’ensemble des laitsprélevés
à intervallesréguliers
au cours de lactation d’une mêmevache ;
elle traduit le fait que les deux constituants ont en moyenne uneévolution semblable et sa valeur est avant tout fonction de l’échantil onnage, et de la
régularité
du tauxbutyreux.
Calculée àpartir
des laits-journaliers
de laphase
moyenne de lalactation,
elle nous acependant permis
de montrer que l’intensité de la liaison intraindividuellepourrait
varier d’un individu à l’autre.
- La liaison interindividuelle dans
laquelle chaque
vache estreprésentée
par ses valeurs moyennespondérées (graph. 7 )
est de loinla
plus importante.
Entre individus de la même race, la teneur en pro- téinesaugmente
en moyenne avec le tauxbutyreux
mais à unrythme beaucoup plus faible ;
les coefficients derégression
de 0,495 pour les Frisonnes et 0,242 pour les Normandes n’ontqu’une
valeur très contin-gente
en raison de notreéchantillonnage limité,
mais sont du même ordreque ceux
rapportés
pour d’autres races(tableau II),
notamment parAuRio!,
( 195 6)
pour les 235premières
vaches PieRouge
de l’Est de sonenquête
sur lesaptitudes fromagères ( 0 , 2 8 2 ).
- Enfin les différences entre les Normandes et les Frisonnes seraient
un élément d’une liaison inter-races
qui
ressort dugraphique 8,
nousy avons
représenté chaque
race par la moyenne des valeurs individuelles obtenues par les auteurs du tableau I, notamment GAINES et OvERMAN(i 93
8).
Bien que chacune de cespopulations (à l’exception
des PieRouge)
soit
trop
limitée pour être vraimentreprésentative
de la race, elles serépartissent
très étroitement autour d’uneligne
derégression :
y = 0,412X + 17,49 y!! = 0, 947.
Les corrélations
positives
obtenues sur des ensembles de laits indi- viduels et, afortiori,
des laits demélange,
ne sont que la résultanteplus
ou moins
composite
de ces trois liaisons fondamentales. Leur valeur(tableau I) dépend
avant tout du nombre et de larépartition
des échan-tillons entre
individus,
race et stades de lactation(cf. graph. i).
Ellesconservent un intérêt certain pour mettre en évidence les modifications de la
composition
et desqualités technologiques
des laits detroupeaux
ou de laiterie en fonction de
l’année,
lasaison,
l’alimentation et l’orien- tation de la sélection. C’est ainsi que VALEN(i 953 )
étudiant les relations entre teneur enprotéines (y)
et matières grasses(x)
des laits de 53laiteries disséminées dans toute laNorvège,
constate d’unepart
des variations trèsimportantes
d’unerégion
à l’autre(race...) mais,
d’autrepart,
une différencesystématique
entre les laitsproduits
aupâturage
et ceux pro- duits àl’étable ;
la liaison estbeaucoup plus
forte chez ces dernierscomme le montrent les moyennes nationales suivantes :
Par contre ce
type
de calcul nepermet
pasd’interpréter
les relations entre les deux constituants et,surtout,
d’en tirer des conclusionsgénétiques
comme l’ont fait
trop
d’auteursqui
auraient dû méditer sur lesdangers
et les limites de la méthode des corrélations
qu’on
ne saurait mieuxrésumer que l’H!RrTWR
( 1949 ) :
cc L’existence d’une corrélationplus
ou moins intense entre deux
grandeurs
est un faitmathématique
dontl’interprétation
sur leplan
causalpeut
être extrêmement variable et doit être discutée et, sipossible analysée
danschaque
casparticulier.
»(In
Les méthodes
statistiques,
p.66).
Amélioration de la teneur en
protéines
par la sélection sur le taux
butyreux
De la liaison interindividuelle
systématiquement positive
nous pou-vons conclure que dans l’ensemble les vaches à taux
butyreux élevé,
ontégalement
un laitplus
riche enprotéines
que la moyenne et surtout, que les vaches à faible tauxbutyreux.
En éliminant ces dernières pour sélec- tionner lespremières
nous devrionsaugmenter
la teneur enprotéines
enmême
temps
que le tauxbutyreux puisqu’elle
a une héritabilité aussi élevée sinonplus (H A rr COCk , 1953 ).
Pour vérifier cettehypothèse,
ilfaut comparer des
générations
successivesd’animaux,
notamment descouples mère-fille,
comme le fait actuellement AURIOL(i 95 6).
N’oublionspas en
effet,
que les corrélations interindividuelles calculées par les diffé- rents auteurs(tableau II)
nepermettent
pas de conclusionsgénétiques
absolues
puisque
ce sont des corrélationsphénotypiques portant,
deplus,
sur un nombre de vaches en
général
très réduit : onpeut cependant
penser que l’interférence des facteurs externes a été relativement
faible,
car les animaux étaient en
général
maintenus dans des conditions de milieucomparables (année, région...).
A défaut de preuves directes tout au moins pour
l’instant,
nouspouvons voir un
argument
indirect dans lacomparaison
de notreéchantillon de 16 Frisonnes à celui étudié en Frise par
J ANS E
et al.(z 9 j 4 ) ;
ce dernier
présente
en moyenne 5,7 g de matières grasses deplus ( 39 , 7
p. i ooo contre 3q.,o p. I
ooo)
et 1,9 g de matières azotées( 33 ,
6 p. i ooo contre 3z,7 p.i ooo).
Il semble donc que l’amélioration du tauxbutyreux poursuivie
en Frises’accompagnerait
d’uneaugmentation
de la teneuren
protéines qui
serait en gros trois foisplus
faible. Tout en n’attribuant pas unegrande signification
à cerapport
d’untiers,
il fautquand
mêmesouligner qu’il
est tout à faitcomparable
à la valeur moyenne des coeffi- cients derégression interindividuels,
dont iljustifierait
l’intérêtgénéti-
que.
Une telle amélioration serait d’ailleurs
déjà
très satisfaisante si onconsidère que les teneurs individuelles en matières azotées ont une dis-
persion
relativement étroite(cf. J ARRIGE
et ROSSETTI, 1957b)
et neprésentent
pas une liaison stricte avec le tauxbutyreux.
Nous constatonsainsi
(tableau III)
que la différence entre la teneur réelle et celle calculée àpartir
del’équation
derégression
est en moyenne de1 ,8
g pour nos Normandes et de 0,7 pour nosFrisonnes ;
cette dernière valeur est faible mais il n’en reste pas moinsqu’on
enignore toujours
lesigne.
Il
apparaît
donc difficiled’estimer,
avec undegré d’approximation
assuré,
la teneur en matières azotées àpartir
du tauxbutyreux pondéré (même
avec des lois derégression
calculées sur despopulations impor- tantes)
d’autantplus
que celui-ci est lui-même entaché dans lapratique
d’une erreur
qui peut
êtreimportante
ne serait-cequ’en
raison de sesfluctuations
journalières.
Endéfinitive,
pouraugmenter rapidement
lateneur en
protéines
deslaits,
il faut faire une sélection directe encontrôlant les différences individuelles par des
dosages
effectués aulaboratoire