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BEAUX-ARTS DEPUIS BONNARD...

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Academic year: 2022

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BEAUX-ARTS

DEPUIS BONNARD...

Ce printemps parisien, dont on pouvait craindre qu'il ne fut moins riche que les précédents en grandes manifestations artistiques, sera finalement extrêmement brillant. Après la présentation du Musée de Besançon au Pavillon de Marsan et les deux expositions de gravures à la Bibliothèque nationale et à l'Orangerie, le Musée national d'Art moderne nous offre, sous le titre Depuis Bonnard...

un ensemble des plus heureux.

Nous le devons à la Société des Amis de ce musée et il nous permet d'apprécier sa contribution à l'accroissement de ses collections. Le rôle que jouent, dans la vie artistique, ces « Amis » des Musées est loin d'être négligeable. Les Amis du Louvre, sous l'impulsion de M. Jacques Dupont, organisent des expositions aussi sensation- nelles que celle du Cabinet de V Amateur que nousjvîmes il y a deux ans à l'Orangerie et font des dons importants à notre galerie nationale;

le plus récent est une admirable porte de bois du xive siècle, véritable portail de cathédrale, sculptée par des artistes rémois e t découverte dans le Pas-de-Calais. Elle, va être exposée dans les salles de sculp- ture gothique du Louvre où elle ne manquera pas de susciter une vive curiosité. Pour les avantages substantiels qu'ils offrent à leurs membres, pour leur contribution à l'enrichissement de notre grand musée, les Amis du Louvre justifient amplement le prestige qui s'attache à une société ancienne et puissante.

Les Amis du Musée national d'Art moderne se sont groupés plus récemment, mais l'exposition qu'ils organisèrent en 1952 au Pavillon de Marsan nous prouva leur vitalité. Ils étaient présidés, à cette époque, par Georges Grammont, un amateur à qui notre reconnais- sance est acquise puisqu'il à fait oeuvre de mécène extraordinaire- ment généreux en fondant, à Saint-Tropez, ce Musée de l'Annon- ciade qui est assurément le musée de province le plus riche en pein- ture moderne. Prématurément disparu, il a été remplacé par M. Mau- rice Bérard dont la famille s'honore d'avoir compté parmi ses amis Auguste Renoir. Le portrait des demoiselles Bérard que nous a laissé le maître de Gagnes est un de ses chefs-d'œuvre. Le secrétaire général de cette société suit, lui aussi, une solide tradition familiale

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puisque M. Robert Pacquement est le fils de l'illustre collectionneur Charles Pacquement. Quand j'aurai nommé, parmi les membres du comité, MM. Jean-Arthur Fontaine, Marcel Beurdley, le comte Fran- çois de Ganay j'aurai dit que cette association groupe des hommes de goût et qui entendent enrichir un musée qui ne peut, hélas ! en raison de l'état déplorable de ses bâtiments, nous présenter toutes ses collections.

Si cette association est de fondation récente, il convient de ne pas oublier qu'à l'époque où nos musées nationaux reléguaient les meil- leurs peintres modernes dans les plus mauvaises salles de l'ancien Luxembourg, déjà M. Charles Pacquement avait fondé une Société des Amis du Luxembourg qui prit pour tâche d'ouvrir les yeux des pouvoirs publics. Elle y parvint si bien et ses dons furent si généreux que, déjà, quand s'ouvrit, en 1937, le Musée d'Art moderne, il n'était pas indigne des galeries analogues organisées depuis longtemps à l'étranger.

Les Amis de ce musée, qui ont pris la succession des Amis du Luxembourg, ont un mérite qui n'est point négligeable : ils sont éclec- tiques et leurs achats portent sur toutes les tendances de l'art contem- porain. Il est loin d'en être ainsi partout et il m'est arrivé, il y a quel- ques mois, de visiter un musée de province qui possède, lui aussi, une société d' « Amis » fort active. Toutefois la salle où ses nombreuses donations sont placées donne la sensation qu'il s'agit pour ses mem- bres de valoriser, en les faisant entrer dans une galerie officielle, certains peintres auxquels ils s'intéressent personnellement. Ce n'est là, je m'empresse de le dire, qu'une impression. Mais actuelle- ment la spéculation s'est si.bien glissée dans les milieux artistiques et on voit des jeunes peintres vendre leurs tableaux des sommes si astronomiques, qu'on est conduit à supposer que certains amateurs sont moins soucieux de la valeur artistique des toiles qu'ils achètent que de leur valeur matérielle, et nous savons bien que certains ont plus confiance dans la stabilité de leurs' Renoir que dans celles de leurs Royal Dutch.

De ces spéculateurs masqués je suis sûr qu'il n'en existe pas un seul à la Société des Amis du Musée national d'Art moderne. Tout au plus pourrait-on s'inquiéter de la volonté de quelques-uns d'entre eux d'être « à la page ». A cet égard il n'est pas sans signification d'observer, dans les premières salles de la brillante exposition que je vous signale, les dates auxquelles ces tableaux entrèrent au musée.

C'est en 1929 que furent donnés ces incontestables chefs-d'œuvre que sont la Danseuse, de Van Dongen, et Le Buffet, d'Henri Matisse, pièces maîtresses aujourd'hui de nos collections nationales. H n'est pas douteux que ces œuvres aillent au Louvre quand les délais heu- reusement fixés par l'administration seront écoulés.

Le don le plus ancien est celui du très beau paysage de Segon- zac ; les Derain, le Dufresne, le Paddock, de Raoul Dufy, ont égale- ment été offerts bien avant la guerre. Des œuvres comme Les Enfants du boulanger, de Roger Chastel, le René Crevel, de Christian Bérard,

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le Christ en croix, de Jean Fautrier indiquent qu'il y a vingt-cinq ans, ces amateurs tenaient à saluer l'éveil des jeunes talents. On ne saurait dissimuler qu'il y ait, dans ces choix, par mal de déchet et il y a assurément du courage à placer aujourd'hui, à côté de Gromaire dont la situation était, en 1931, moins assurée qu'aujourd'hui, t d'autres artistes qui sont loin d'avoir tenu les promesses qu'ils don- naient à cette époque.

Que penserons-nous, dans un quart de siècle, des œuvres de Calmettes, Dimitrienko, Âckermann, Barat, Dauchot, Mauny ou Palou que la société a récemment acquises pour le musée ? Je dois dire honnêtement que je n'en sais rien. Si un ou deux de ces peintres surnagent ce sera déjà un beau résultat. Le reste, mon Dieu ! ira dans les réserves rejoindre des artistes qui, eux- aussi, durant %i temps, furent à la mode et qui se nomment Rochegrosse, Dagnan- Bouveret, Gormon et tous ceux qui occupaient les plus belles cimaises du Luxembourg...

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Ce prestigieux ensemble nous suggère maintes réflexions sur l'évolution du goût, mais son intérêt essentiel est de nous permettre d'admirer quelques pièces essentielles de la peinture contemporaine.

J'ai signalé jusqu'ici les premières salles dans lesquelles figurent - trente-cinq toiles choisies parmi les cent qui furent offertes au musée.

Les suivantes sont celles qui justifient le mieux le titre : Depuis Bonnard...

En effet l'exposition de 1952, au Pavillon de Marsan, s'intitulait De Cézanne à Matisse. Cette fois les organisateurs ont voulu complé- ter ce panorama et ils ont demandé aux membres de la Société de choisir dans leurs collections particulières des œuvres d'artistes plus jeunes. La liaison est faite par Matisse et par des maîtres de sa généra- tion : Bonnard, d'abord, avec une puissante nature morte, une grande composition, La Porte-fenêtre, le portrait de MlleBérard, etc..

Vuillard et Laprade représentent, avec lui, ce qu'on a longtemps nommé, avec une nuance de dédain qui nous paraît aujourd'hui incompréhensible, le « post-impressionnisme ».

Sur le panneau de gauche de la même salle voici un homme qui, lui, est inclassable : ce grand isolé que fut et reste, malgré sa gloire, Georges Rouault. Dans ces huit toiles s'inscrit une évolution d'autant plus émouvante que si, en apparence, il n'y a aucun rapport entre l'extraordinaire Clown à la loge qui est de 1906 et la récente Tête de Christ, un même esprit donne son unité à cette œuvre bouleversante.

Le panneau qui est, avec celui-là, le plus passionnant, c'est celui qui nous présente dix toiles fauves, peintes entre 1904 et 1906 par Vlaminck, Derain, Dufy, Friesz, Marquet, Manguin, Van Dongen.

Il était bon de nous rappeler que des peintres qui allaient s'engager dans des directions si différentes sont partis des mêmes recherches, au temps de leur commune jeunesse. Ces paysages et ces figures

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peintes dans des tons purs, avec des couleurs « telles qu'elles sortent du tube », éclipsent un peu le grand panneau décoratif de Ma tisse qui leur fait face.

La salle suivante est réservée, d'une part à Raoul Dufy, d'autre part à Maurice Utrillo et à sa mère, Suzanne Valadon. Nous avons ensuite les cubistes que dominent incontestablement Braque et Picasso. Puis les artistes qui, comme Roger de la Fresnaye et Jacques Villon, s'écartèrent assez vite des disciplines un peu simplistes de ce mouvement. La salle six est celle des expressionnistes ; il y a, là aussi, des œuvres capitales, Les Fiancés, de Chagall, Le Dindon, de Soutine, et un ensemble de Modigliani comme nous en avons rare- ment vu : le Nu assis est un chef-d'œuvre classique, mais je ne sais si^e n'éprouve pas plus de tendresse encore pour le portrait d'enfant, daté de 1917, avec son modeste tablier noir... Dernier des « peintres maudits » Modigliani excite beaucoup les imaginations ; André Salmon,' qui l'a connu intimement, va lui consacrer un livre définitif ; mais on espère que la mort de Max Ophiils annulera le projet qu'avaient certains de lui consacrer un film romanesque.

Après ces œuvres prestigieuses et dont certaines n'ont jamais été vues en public, ces grands collectionneurs ont voulu montrer qu'ils ne rejetaient aucune expérience. On leur en sait gré, même si l'on pense que certains d'entre eux cèdent quelque peu au goût du jour ; il est, en effet, difficile de croire que là postérité mettra au rang des œuvres que je viens de nommer les sous-produits du fauvisme e t du cubisme qui figurent dans les dernières salles, aux côtés de quel- ques excellentes toiles des « peintres de la réalité poétique », et des témoignages pseudo-surréalistes d'un Miro et d'un Salvador Dali.

L'exposition se termine sur Francis Gruber dont il n'est pas douteux que, s'il eut vécu* il eût exercé sur le destin de notre peinture une action décisive, et sur son meilleur disciple, Bernard Bufiet.

LES PEINTRES TÉMOINS DE LEUR TEMPS

Ce bilan d'un demi-siècle de peinture nous confirme que les artistes contemporains se sont, depuis Cézanne, privés d'un support que leurs prédécesseurs jugeaient indispensables. : le sujet. Sur les deux cents toiles réunies au Musée national d'Art moderne, on n'en trouverait pas dix qui soient autre chose que des paysages, des natures mortes, des nus ou des portraits.

Cette volonté de revenir à des thèmes primordiaux correspondait au désir des peintres indépendants de réagir contre les « grandes machines » qui peuplaient, il y a cinquante ans, les salles d'honneur du Salon. Déjà, pourtant, une réaction s'était manifestée et la fonda- tion, en 1890, de la Société Nationale des Beaux-Arts témoignait d'un esprit libéral opposé au sectarisme dont faisaient preuve les

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maîtres de Fart académique qui réfutèrent systématiquement tout ce qui compte, depuis un siècle, dans la peinture française.

Mais la Nationale elle-même a vieilli. Prise entre les Artistes Français et le Salon d'Automne elle a compris qu'elle, ne pouvait survivre qu'en s'infusant un sang nouveau. Depuis trois ou quatre ans elle a fait largement appel aux jeunes et, dans le Salon qui s'est récemment ouvert au Musée municipal d'Art moderne, les salles les plus attachantes sont celles où sont réunies les œuvres des concur- rents au Grand Prix des Jeunes attribué à un peintre âgé de moins de quarante ans.

C'est avec une vive satisfaction que nous les voyons, ces jeunes, revenir, sinon à la toile de Salon, du moins à des œuvres où ils tentent de se dépasser, de se mesurer avec des thèmes plus amples que ceux qu'ils traitent d'ordinaire. Ce « retour au sujet », que j'ai remarqué au dernier Salon de la Jeune Peinture, peut-être les

« Peintres témoins de leur temps » n'y sontwls pas étrangers.

Affirmer que les compositions groupant de nombreux éléments furent rigoureusement rejetées par les artistes contemporains serait d'ailleurs une contre-vérité. Picasso lui-même, en particulier avec son Guernica,a prouvé que l'émotion qu'il éprouvait en présence d'un événement historique, U pouvait nous la faire partager comme nous partageons l'indignation de Delacroix à l'annonce des Maaaacna de Scio. Un Dufresne, un Gromaire, un Goerg — la récente exposi- tion de ce dernier chez Drouant-David en témoigne avec éclat — ont toujours estimé qu'un tableau était tout autre chose qu'une « sur- face à deux dimensions recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées. »

Il n'en reste pas moins qu'en fournissant des thèmes précis à ses adhérents, le groupe des « Peintres témoins de leur temps » a lancé un utile rappel à l'ordre. Elle a commencé par organiser des visites d'usines, d'établissements modernes pour rappeler que, sui- vant le mot de Gérard Bauêr, « les artistes sont les vrais témoins ; ils voient, dans l'air et la lumière, l'âme du temps qui passe ». Car il est évidemment fâcheux que, durant tant d'années, le» peintres aient laissé aux photographes le soin de nous laisser des images de l'évolution de la société contemporaine et des profonds, change- ments qui se sont opérés dans le décor de notre vie.

Après avoir exposé les œuvres inspirées par ces lieux que, le plus souvent, ils découvraient, ces peintres acceptèrent de se soumettre chaque année à des thèmes imposés. Je me souviens avec une sym- pathie particulière des ensembles que le Musée Galliera nous pré- senta sous le titre Le Dimanche ou L'Homme dans la ville. Les plus illustres maîtres se prêtèrent à ces expériences et acceptèrent sans effort cette nage à contre-courant, cette réaction contre la a peinture»

peinture » : Van Dqngen, Fernand Léger, Raoul Dufy, François Desnoyer, Marcel Gromaire, Edouard Goerg, Picasso, Chagall.

Mais, enhardi par cette réussite, le comité donna aux artistes, l'an dernier, un thème qui était au-dessus des moyens de la plupart

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d'entre eux. On se souvient de cette décevante exposition de por- traits où le visage humain était si souvent prétexte à d'ingénieuses variations plastiques. Celle de cette année n'est pas, non plus, entiè- rement satisfaisante. On peut en trouver les raisons dans le fait qu'un certain nombre des adhérents de la première heure ont disparu : Dufy, Léger, Kisling, Utrillo, d'autres encore parmi les meilleurs représentants de l'Ecole de Paris nous ont récemment quitté. Ces absences ont provoqué des départs qui n'ont pas tous été comblés par les nouveaux venus.

Je crois pourtant que la déception que nous éprouvons à Galliera a des causes plus profondes et qui tiennent au succès même qu'a connu l'initiative des « Peintres témoins de leur temps ». Ils ont si bien réussi que, maintenant, les jeunes abordent, sans avoir de complexes, les grandes compositions. Ils sortent de leur atelier, ils regardent la vie autour d'eux. Ils n'ont certes pas le goût des grands sujets mytho- logiques ou historiques, mais ils sont souvent d'excellents « témoins » de notre époque. La partie est gagnée, au moins chez les représen- tants de la dernière génération. De ce fait la nouveauté du parti pris par M. Kischka et ses amis nous apparaît moins évidente. Il faut bien avouer d'ailleurs que les incontestables réussites qu'on remarque à l'exposition de Galliera sont perdues dans un flot de médiocrités.

Le thème imposé cette année était pourtant excitant : Le Sport tient, en effet, une place importante dans notre vie et il n'est aucun de ses aspects qui ait été négligé par ces « témoins ». Certains d'entre eux ont même inscrit au nombre des sports les Jeux de Gardians en Camargue (Yves Brayer), L'Autobus du Parc des Princes (Simone Dat), Les Plaisirs de la plage (François Desnoyer), La Pêche à la ligne (Michel de Gallard), ou la contemplation de la mer.

En réalité, cette fois encore, la peinture prime le sujet, et les spor- tifs sont assez déconcertés par l'interprétation que les peintres et les sculpteurs donnent de leurs gestes. En revanche les amateurs d'art peuvent -éprouver de vives satisfactions devant les envois de Van Dongen, Carzou, Buffet, Fontanarosa ou Marcel Gimond.

G. CHARENSOL.

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