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Topologie $p$-adique sur les mots

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Texte intégral

(1)

J

OURNAL DE

T

HÉORIE DES

N

OMBRES DE

B

ORDEAUX

J

EAN

RIC

P

IN

Topologie p-adique sur les mots

Journal de Théorie des Nombres de Bordeaux, tome

5, n

o

2 (1993),

p. 263-281

<http://www.numdam.org/item?id=JTNB_1993__5_2_263_0>

© Université Bordeaux 1, 1993, tous droits réservés.

L’accès aux archives de la revue « Journal de Théorie des Nombres de Bordeaux » (http://jtnb.cedram.org/) implique l’accord avec les condi-tions générales d’utilisation (http://www.numdam.org/conditions). Toute uti-lisation commerciale ou impression systématique est constitutive d’une infraction pénale. Toute copie ou impression de ce fichier doit conte-nir la présente mention de copyright.

Article numérisé dans le cadre du programme Numérisation de documents anciens mathématiques

(2)

Topologie

p-adique

sur

les

mots

par

JEAN-ÉRIC

PIN

RÉSUMÉ 2014 Cet article est une introduction aux aspects combinatoires de la distance p-adique et de la topologie p-adique sur les mots. On

donne plusieurs définitions équivalentes de ces notions, illustrées par divers

exemples et propriétés. Après avoir décrit de façon détaillée les ouverts,

on démontre que la distance p-adique est uniformément équivalente à une

distance obtenue à partir des coefficients binomiaux définis sur les mots. On donne également deux exemples de suites convergentes dans la topologie

p-adique. Le premier exemple est constitué par la suite des puissances d’ordre

pn d’un mot fixé, qui converge vers le mot vide. Le second est formé par

la suite des préfixes du mot de Prouhet-Thue-Morse : pour chaque nombre

premier p, on peut extraire de cette suite une sous-suite qui converge vers

le mot vide dans la topologie p-adique. La plupart des démonstrations sont

omises, à l’exception de celles qui tiennent en quelques lignes.

1. Introduction

Cet article est un article de

synthèse

sur les

aspects

combinatoires de

la distance

p-adique

et de la

topologie p-adique

sur les mots. En

revanche,

nous n’abordons pas les

aspects

analytiques

et les

applications

à la théorie des groupes. Nous invitons le lecteur intéressé par ces

développements

mathématiques

à consulter le récent livre

[4].

Cet article ne contient pas de

résultats nouveaux, sauf

peut-être

le théorème 4.4. On ne trouvera pas non

plus

de démonstrations sauf

lorsqu’elles

s’écrivent en

quelques lignes.

La

topologie p-adique

sur les mots

peut

être définie de diverses

façons,

qui

sont décrites dans la section 2 : distances

p-adiques, topologie initiale,

ou encore

topologie

trace de la

topologie p-adique

sur le groupe libre.

La

description précise

des ouverts nécessite

quelques

outils de théorie des

automates,

qui

sont

présentés

dans la section 3. La section 4 est de nature

plus

combinatoire : on y démontre que les coefficients binomiaux sur les

Manuscrit reçu le 17 octobre 1991, version définitive le 7 décembre 1993.

Travail réalisé dans le cadre du PRC Mathématiques et Informatique.

Les résultats contenus dans cet article ont été exposés au colloque "Thémate",

(3)

mots fournissent une définition

purement

combinatoire de la

topologie

p-adique.

On en déduit une série de

propriétés remarquables

des

ouverts,

qui

sont détaillées dans la section 5. On

évoque

aussi dans cette section une

conjecture

sur la caractérisation des ouverts

qui

sont reconnaissables au sens de la théorie des automates. On

présente

dans la dernière section un

curieux lien entre la suite des

préfixes

du mot infini de Prouhet-Thue-Morse

et la

topologie p-adique :

pour

chaque

nombre

premier

p, on

peut

extraire

de cette suite une sous-suite

qui

converge vers le mot vide.

2.

Topologie

et structure uniforme

p-adique

sur les mots

Soit p un nombre

premier.

Pour tout entier n, on note

vp(n)

la valuation

p-adique

de n, c’est-à-dire

l’exposant

de p dans la

décomposition

de n en

facteurs

premiers.

Les nombres

p-adiques

peuvent

être définis comme le

complété

de 2Z pour la distance

p-adique, définie,

pour tout

couple

d’entiers relatifs

(x, y),

en

posant

On se propose d’étendre la construction

précédente

de 2Z aux groupes libres

de base finie. Ce

qui

va

jouer

maintenant le rôle de valuation

p-adique,

ce

sont les

morphismes

de groupe du groupe libre dans un p-groupe

(i.

e. un

groupe fini dont l’ordre est une

puissance

de

p).

Cette construction est en

fait un cas

particulier

des

topologies profinies

introduites par M. Hall

[7].

Soit

F(A)

le groupe libre de base

(finie)

A. On dit

qu’un

groupe G

sépare

deux éléments u et v du groupe libre s’il existe un

morphisme

de

groupe cp de

F(A)

dans G tel que

p(v).

On pose

alors,

pour tout u, v E

F(A),

vp(u)

= min existe un

p-groupe d’ordre

p"‘ qui

sépare u

et

1}

Nous démontrerons

plus

loin que

dp

est une distance sur

F(A),

qui

est

ultramétrique

et invariante par

translation,

ce

qui

signifie

que, pour tout

triplet

de

(u, v, w)

de

F(A),

on a

(4)

On

appellera

dp

la distance

p-adique

sur

F(A).

Cette distance définit une

topologie

(la

topologie

p-adique)

et une structure

uniforme(*),

(la

structure

uniforme

p-adique).

Muni de cet

distance,

le groupe libre devient un groupe

topologique.

Plus

précisément,

on a la

propriété

suivante.

PROPOSITION 2.1. La

multiplication

du groupe libre est uniformément continue pour la distance

p-adique.

Il est

temps

de

rappeler

la construction du monoïde et du groupe libres. On

part

d’un

ensemble A, baptisé alphabet,

dont les éléments sont des lettres. Un mot sur

l’alphabet

A est une suite finie de

lettres,

que l’on note

par

simple juxtaposition :

La

longueur

d’un mot u, notée

lui,

est le nombre d’éléments de la suite de lettres

qui

compose le mot. Par

exemple

labaabl =

5. Le

produit

(ou

concaténation)

de deux mots est le mot

ala2 - - -

arblb2 - - - bS

obtenu en les

plaçant

bout à bout. La concaténation est

une

opération associative, qui

munit l’ensemble A* des mots d’une struc-ture de monoïde dont l’élément neutre est le mot

vide,

que l’on note 1 pour cette raison. Le

produit

s’étend aux

parties

de A* en

posant,

pour tout

X"Y c A*"

et munit à son tour l’ensemble

T~(A*)

des

parties

de A* d’une structure de monoïde.

Le monoïde A* est le monoïde libre sur l’ensemble

A,

car il

possède

la

propriété

universelle

qui

caractérise les structures libres : toute

application

de A dans un monoïde M se

prolonge

de

façon

unique

en un

morphisme

de monoïde de A* dans M. Il en résulte en

particulier

que tout monoïde

engendré

par un ensemble A est

quotient

de A*.

La construction du groupe libre de base A est un peu

plus compliquée.

On considère d’abord l’ensemble des inverses formels des éléments de A

~*~ La notion d’espace uniforme est peut-être moins familière que celle de topologie. Très

grossièrement, les topologies permettent une définition abstraite des suites convergentes,

alors que les structures uniformes permettent de définir suites de Cauchy et espaces

(5)

et on

prolonge l’application

a ~ a

(de

A dans

~4)

en une involution de

l’ensemble A = A U A. Il suffit

pour cela de poser a = a pour toute lettre

à de

~4.

On considère ensuite le monoïde

présenté

sur

A

par les relations

aâ = âa = 1 pour tout a E A. Par

construction,

le monoïde ainsi obtenu

est un groupe, et c’est en fait le groupe libre sur A. On le note

F(A)

et on

note 7r :

A4* 2013

F(A)

le

morphisme

de monoïde

qui

définit le

quotient.

Il existe une autre

représentation

du groupe libre

qui

est

plus

facile à utiliser. On dit

qu’un

mot de

Ã*

est réduit s’il ne contient aucun facteur

de la forme aâ ou âa. On

peut

démontrer que tout mot u de

~4*

est

équivalent

à un

unique

mot réduit

b(u).

Ce mot est obtenu à

partir

de

u en

supprimant

les occurrences de tous les facteurs de la forme aâ et

âa,

et en itérant ce

procédé

(on

démontre que le résultat est

indépendant

de l’ordre de

suppression

des

facteurs).

Par

exemple,

b(aabâbbabbbâb)

= ab. Il

est clair que u et

6(u)

ont la même

image

par r. De

plus,

la restriction de 7r

à l’ensemble .R des mots réduits est une

bijection,

notée

/3,

de R sur

F(A),

qui

permet d’identifier le groupe libre à 1-~. La situation est résumée sur la

figure

suivante :

Figure

2.1. Un

diagramme

commutatif

Les

opérations

de groupe

s’interprètent

facilement dans R. L’inverse d’un mot s’obtient en « retournant» le mot et en

remplaçant

chaque

lettre par son inverse formel. Par

exemple,

si u =

abâbaa,

l’inverse de

u est le mot

ââbabâ.

Pour calculer le

produit

dans le groupe

libre,

on

effectue la concaténation habituelle et on réduit le résultat obtenu.

Ainsi,

si u = abâbaa et si v =

àâbab,

le

produit

dans le groupe libre est

égal

à

6 ( ababaaaabab)

= abb.

Il est

important

de remarquer que R n’est pas un

sous-monoïde

de

A*

et

que

~3

n’est donc pas un

morphisme

de monoïdes. En

revanche, puisqu’un

mot ne contenant aucune lettre barrée est nécessairement

réduit,

A* est un

sous-ensemble de

R,

et

/3

induit une

application

injective

du monoïde libre

A* dans le groupe libre

F(A),

ce

qui

permet

d’identifier le monoïde libre à

une

partie

du groupe libre.

En

particulier,

on

appellera topologie p-adique

(resp.

structure

uniforme

p-adique)

sur A* la restriction à A* de la

topologie p-adique

et de la

(6)

structure uniforme

p-adique

sur

F(A).

Nous allons voir que l’on

peut

donner

plusieurs

définitions

équivalentes

de ces deux notions.

Une

première façon

de

procéder

consiste à utiliser la notion de structure

initiale.

Rappelons

que si E est un ensemble et si X = est une famille

d’applications

Wi : 2? 2013~ de E dans un espace

topologique

(resp.

uniforme)

la

topologie

(resp.

structure

uniforme)

initiale définie

par X

est la

topologie

(resp.

structure

uniforme)

la moins fine

qui

rend continue

(resp.

uniformément

continue)

chacune des

applications

Une base d’ouverts pour cette

topologie

est obtenue en

prenant

les intersections

finies d’ensembles la forme

wivi 1,

où est un ouvert de

T.

On

peut

alors

énoncer

PROPOSITION 2.2.

(1)

La

topologiep-adique

(resp. la

structure

uniformep-adique)

sur

F(A)

est

la

topologie

(resp.

structure

u niform e)

initiale définie par les

m orp hism es

de groupe de

F(A)

dans un p-groupe muni de la

topologie

discrète

(resp.

la structure uniforme

discrète).

(2)

La

topologie

p-adique

(resp. la

structure

uniformep-adique)

sur A* est la

topologie

(resp.

structure

uniforme)

initiale définie par les

morphismes

de monoïde de

F(A)

dans un p-groupe muni de la

topologie

discrète

(resp.

la structure uniforme

discrète).

Ce résultat

permet

de donner une caractérisation

simple

des suites

conver-gentes

et des suites de

Cauchy. Rappelons qu’une

suite d’éléments d’un ensemble E est dite ultimement constante

(resp.

ultimement

égale

à

u)

s’il existe un entier no tel que, pour tout n &#x3E; np, un =

M~o

(resp.

un =

u).

PROPOSITION 2.3.

(1)

Une suite d’éléments de

F(A)

est une suite de

Cauchy

si et

seulement

si,

pour tout

morphisme

de groupe cp de

F(A)

dans un

p-groupe, la suite est ultimement constante.

(2)

La suite

(un )n&#x3E;o

converge vers un élément u de

F(A)

si et seulement

si,

pour tout

morphisme

de groupe cp de

F(A)

dans un p-groupe, la suite

est ultimement

égale

à

cp(u).

On en déduit un

premier

exemple

de suite

convergente :

COROLLAIRE 2.4. Pour tout u E

F(A),

on a lim

u""

= 1.

n

Démonstration. Soit ~o un

morphisme

de groupe de

F(A)

dans un

p-groupe G d’ordre

p’.

Pour tout n &#x3E;

k,

on a =

(p(u))P"

= 1

puisque

pn

est un

multiple

de l’ordre de G. il

(7)

Comme la

multiplication

est

continue,

on en

déduit,

pour tout x, y, u E

F(A),

En

particulier,

en

prenant x

=

u-1

et y =

1,

on obtient la formule

Cette dernière formule

permet

de

«remplacer

les inverses par des

limites »,

et

permet

de démontrer que le monoïde libre est dense dans le groupe libre.

PROPOSITION 2.5. Le

complété

du groupe libre pour la distance

dp

est

un groupe

compact.

Le monoide libre est dense dans le groupe libre et son

complété

pour la distance

dp

est donc aussi un groupe

compact.

Citons encore une

propriété

élémentaire des

morphismes

entre structures

libres.

Rappelons qu’une application

cp d’un espace

métrique

(E, d)

dans

un espace

métrique

(E’,d’)

est contractante

si,

pour tout u, v E

E,

d’

PROPOSITION 2.6. Tout

morphisme

de monoïde

(resp. groupe)

entre deux monoides

(resp. groupes)

libres est une

application

contractante pour la

distance

p-adique.

Pour décrire les ouverts de la

topologie

p-adique

de

A*,

nous aurons

besoin de

quelques

définitions

empruntées

à la théorie des automates.

3. Parties reconnaissables

On dit

qu’une partie

L de A* est reconnue par un

morphisme

de monoïde

cp : A* ~ lll si L =

cp-1(cp(L)).

Notons

qu’il

est

équivalent

de dire

qu’il

existe une

partie

P de M telle que L = car si L =

cp-1 (P),

il vient

c,~-1 cp(L) -

L. Par

extension,

on dit

qu’un

monoïde M reconnaît L s’il existe un

morphisme

de monoïde cp : ~l* 2013~ M

qui

reconnaît L. Une

partie

L de A* est dite reconnaissable si elle est

(8)

Exemple

3.1. L’ensemble L des mots de

longueur multiple

de n est reconnu

par le

morphisme

de

monàde ço :

A* -4 défini par

En

effet,

on a L =

~"~(0).

Exemple

3.2. Soit M le monoïde formé des six matrices

muni de la

multiplication

usuelle des matrices. Le

morphisme

~ :

-M défini par

~ ~ ~

reconnaît l’ensemble

(ab)+

des

puissances

non nulles du mot

ab, puisque

On

peut

aussi définir les

parties

reconnaissables en utilisant des

au-tomates. Un automate déterministe

fini

ou

simplement

automate est un

quintuplet

,~1 =

(Q,A,.,qo,F)

Q

est un ensemble fini

(l’ensemble

des

états),

A est un ensemble fini

( l’alphabet)

dont les éléments sont des

lettres,

- est

une

application

de

Q

X A dans

Q,

qui

à un

état q

et une lettre a associe

l’état q - a, qo est un état de

Q, appelé

état initial et F est un ensemble fini

d’états, appelé

l’ensemble des états

L’application

(q, a)

- q - a

se

prolonge

de

façon

naturelle en une action de A* sur

Q

en

posant,

pour

toutqEQ,uEA*etaEA,

ce

qui

revient à poser, pour tout mot

~ *~ Faut-il dire « finals» ou « finaux» ? Les deux sont

acceptables, mais Grévisse indique

que « finaux» se répand de plus en plus, notamment chez les grammairiens. On le trouve

(9)

Chaque

mot u de A* définit donc une transformation

p(u)

de

Q

(i.

e. une

application

de

Q

dans

lui-même).

L’application

p ainsi définie est un

morphisme

de monoïde de A* dans le monoïde

?-(Q)

des transformations de

Q,

muni

de l’opération

(f,g)

H

go f.

L’ensemble

p(A*)

est un sous-monoïde

de

T(Q),

noté

M(A),

et

appelé

le monoïde de A.

Les automates

peuvent

être

représentés

par un

graphe

étiqueté

dont

les états forment les sommets et les arêtes sont les

triplets

de la forme

(q, a, q.a~

q est un état et a une lettre. L’état initial est

représenté

par

une flèche entrante et les états finaux par des flèches sortantes. Par

exemple,

l’automate A =

({0,1, 2}, {a, &#x26;}, ’, 1, {0, 2}),

avec

est

représenté

sur la

figure

3.1.

Figure

3.1. Un automate.

Soient q un état et u un mot. Pour

«lire » q . u

sur ce

graphe,

il suffit

de suivre le chemin

d’origine

q et

d’étiquette u :

l’état d’arrivée donne le résultat. Par

exemple

1 - abaaba = 0.

Le monoïde d’un automate est un groupe si et seulement si

chaque

lettre induit une

permutation

de l’ensemble des états. Par

exemple,

le monoïde

associé à l’automate

représenté

sur la

figure

3.2 est un groupe.

(10)

L’ensemble des mots reconnus

par A

est

l’ensemble,

noté

L(A),

des

étiquettes

des chemins issus de l’état initial et

qui

arrivent dans un état

final :

IR reste à établir

l’équivalence

des deux définitions des

parties

reconnais-sables. Si A est un

automate,

l’ensemble

L(,A)

est reconnu par le

morphisme

p : A* ~

M(,A).

En

effet,

si on pose P E

T(Q) ~

1 f (qo)

E

F},

on a

L(.A~

=

Réciproquement,

soit p : ~4* 2013~ M un

morphisme

de monoïde de A* dans un monoïde fini M et soit P une

partie

de M.

L’ensemble L = est alors reconnu par l’automate

(M,

A, ., 1,

P),

l’action de A sur M est

donnée,

pour tout m e M et tout a E

A,

par les formules :

Si on a, avec les notations

précédentes,

L =

~-1 (P),

on a aussi

A* B

L =

~p-1 (M ~

P).

Par

conséquent,

si L est reconnu par il en est de même de

A* ~

L. On démontre

également

facilement que si

Li

et

L2

sont reconnus

respectivement

par les monoïdes

Ml

et

M2,

alors

L,

n

L2 et L,

U

L2

sont

reconnus par le

produit

direct

M1

x

M2 .

On en déduit en

particulier

que

l’ensemble des

parties

de A* reconnues par des p-groupes forme une

algèbre

de Boole

(pour

l’union,

l’intersection et la

complémentation

dans

A*).

Nos donnerons dans la section 4 une

description plus explicite

de ces

parties.

On déduit des remarques

précédentes

et de la

proposition

2.2 que la

topologie p-adique

sur A* admet pour base d’ouverts les

parties

reconnues

par un p-groupe, ce

qui

fournit la

description

suivante des ouverts.

PROPOSITION 3.1. Les ouverts de la

topologie p-adique

de A* sont les unions

(finies

ou

infinies)

de

parties

de A* reconnues par des p-groupes.

Notons enfin que les

parties

reconnues par un p-groupe sont à la fois

(11)

4.

Topologie p-adique

et coefficients binomiaux

Les coefficients binomiaux définis sur les entiers

peuvent

être eux aussi

étendus aux mots. Leur

définition,

due à S.

Eilenberg

[5],

repose sur la

notion de sous-mot. On dit

qu’un

mot u E A* est un sous-mot d’un mot

v E A* si u = aia2 ... an

(où

ai, a2,

... ,

A~

et si v se factorise sous la

forme v = avec E A* . Par

exemple,

abca est un sous mot de

accbacabac ;

pour le

voir,

il suffit de faire

apparaître

en gras le mot abca : accbacabac. Le coefficient binomial

(u)

est le nombre de

façons

distinctes d’écrire u comme sous-mot de v. De

façon plus formelle,

si u = ala2 ... an comme

ci-dessus,

On a par

exemple

et,

si n et m sont des

entiers,

ce

qui

montre bien

qu’il s’agit

d’une

généralisation

des coefficients

binomi-aux habituels ! On

peut

aussi définir les coefficients binomiaux à

partir

des

formules de récurrence

suivantes,

u, v E A* et

a, b

E A :

Une troisième méthode consiste à utiliser

l’automorphisme

de

Magnus

il de

l’algèbre

défini par

p(a)

= 1-f- a pour tout a e A. On démontre que

pour tout mot v E

A*,

1

(12)

Enfin,

on

peut

utiliser le fait que pour tout mot E

A*,

l’application

T : A* ---+ du monoïde libre dans le monoïde des

matrices carrées d’ordre n à coefficients entiers définie par

est un

morphisme

de monoïdes.

Le lien entre la

topologie p-adique

et les coefficients binomiaux

provient

essentiellement du résultat suivant :

PROPOSITION 4.1.

[5].

E

A*,

soit p

un nombre

premier

et soit r un

entier. Alors l’ensemble

est reconnu par un p-groupe.

Démonstration. Posons x = E

A*,

et notons

Tp :

le

morphisme

de monoïdes obtenu en réduisant T modulo

p.

L’image

de Tp est un monoïde de matrices

unitriangulaires

(c’est-à-dire

triangulaires supérieures

et ayant des 1 sur la

diagonale)

à coefiicients dans

et on peut vérifier que ce monoïde est en réalité un p-groupe. La

formule

montre que T reconnaît

L(x, r, p).

o

La

proposition

4.1

permet

de vérifier que

dp

est bien une distance.

En

effet,

la

principale

difficulté consiste à démontrer que alors

dp(u, v) #

0. Or

si u ~

v, on

peut

supposer,

quitte

à intervertir u et v, que

(13)

est reconnu par un p-groupe G. Comme u E L

puisque

( ù) =

1

et v e

L

puisque

(v) =

0,

G

sépare u

et v,

et

dp(u, v)

&#x3E; 0. Ceci démontre en

particulier

que le groupe libre est résiduellement fini.

Il est facile de construire un automate

qui

reconnaît

L(x, r, p).

Prenons par

exemple

A = =

abc,

p = 2 et r = 1. Ce

qui précède

montre

qu’il

suffit de mémoriser

(u a), ( b)

et

( b~)

modulo 2. On

prendra

donc pour ensemble d’états

{O, 1}3,

chaque

état

représentant

une valeur

possible

du

triplet

«u), ( b) , ( b~) ) .

L’action des lettres se calcule facilement en utilisant

la formule 4.1. L’automate obtenu est

représenté

sur la

figure

4.1.

Figure

4.1. Un automate reconnaissant

L(abc,1, 2).

La

proposition

4.1 donne des

exemples

de

langages

reconnus par un

p-groupe. Ces

exemples

sont en fait

génériques,

comme le montre le résultat

qui

suit.

PROPOSITION 4.2.

(Eilenberg

et

Schützenberger

[5]).

L’ensemble des par-ties de A* reconnues par un p-groupe est

l’algèbre

de Boole

engendrée

par les

parties

de la forrne

L(x, r, p)

avec x E A* et U r p.

La démonstration de ce résultat utilise une caractérisation

remarquable

des p-groupes. Définissons une congruence Nk sur A* en

posant U

-k v si

et seulement si

Le monoïde

quotient

=

A*/

est un

p-groupe

qui possède

la

(14)

PROPOSITION 4.3. Tout p-groupe d’ordre

pn

engendré

par A est

quotient

de

Gpn (A, p).

Posons

maintenant,

pour tout mot u, v E

A*,

(on

fait la convention habituelle et

On vérifie

que dp

est une distance linéaire

ultramétrique.

THÉORÈME 4.4. Les distances

dp

et

dp

sont uniformément

équivalentes.

Démonstration. Si

(§§) fl Q)

mod p,

le p-groupe

qui

reconnaît l’ensemble

L(x,

(~) , p)

sépare

u et v. L’ordre de ce groupe est

majoré

par le nombre de matrices

unitriangulaires supérieures

d’ordre

Ixl

+ 1 à coefficients dans

soit On en déduit que

Réciproquement,

si u et v sont

séparés

par un p-groupe G d’ordre

pn,

la

proposition

4.3 montre que G est

quotient

de

Gpn .

Il en résulte que U

fipn v

et donc

Par

conséquent,

les distances

dp

et

dp

définissent la même structure

(15)

5.

Propriétés

des ouverts

Les

propositions

3.1 et 4.2 fournissent une

description

des ouverts de A* pour la

topologie p-adique.

Nous allons

compléter

cette

description

en

montrant que les ouverts sont stables par diverses

opérations.

Soient

Lo,

Ll,

... ,

Lk

des

parties

de

A*,

ai, a2, ..., ak des lettres et r et n deux

entiers. On pose

Loa,L,.-.akLk =

~u

E A*

u

= uoal ul - - - akuk avec uo E

Lo, u1

E

Lk~

et on note l’ensemble des mots u de A* tels que le nombre de factorisations de u de la forme u = akuk avec uo e

Lo,

ul E

Li, ...,

uk E

Lk,

soit un entier congru à r modulo n. Par

exemple,

on a Le résultat

qui

suit

explique

l’intérêt de cette

opération

pour l’étude de la

topologie p-adique.

PROPOSITION 5.1.

[11].

Soit p

un nombre

premier

et

k,

r et n des entiers. Si

Lo,

... ,

Lk

sont des

parties

de A* reconnues par des p-groupes, alors

l’ensemble

akLk),,p.

est

également

reconnu pa.r un p-groupe.

On en déduit immédiatement deux

corollaires, également

tirés de

[11].

COROLLAIRE 5.2. Si

Lo, Ll,

... ,

Lk

sont des ouverts de A* pour la

topologie p-adique,

alors l’ensemble

(Loal L1 - - -

akLk)r,pn

est

également

ouvert.

Démonstration.

D’après

la

proposition 3.1,

chacun des

Li

est union

(finie

ou

infinie)

de

parties

reconnues par des p-groupes. Comme

l’opération

(Lo, Li,..., Lk) 1-+ (LoalL1 - - - akLk)r,pn

est distributive par

rapport

à

l’union,

L = est union de

parties

élémentaires de la

forme

(LoalLi ...

où chacun des

Li

est reconnu par un p-groupe.

Mais

d’après

la

proposition 5.1,

ces

parties

élémentaires sont elles-mêmes

reconnues par des p-groupes. Par

conséquent,

L est ouvert. a

COROLLAIRE 5.3. Si

Lo, Ll,

... ,

Lk

sont des ouverts de A* pour la

topologie p-adique,

et si ai, a2, ... ak sont des

lettres,

a.lors l’ensemble

akLk

est

également

ouvert.

(16)

Sous les mêmes

hypothèses,

on démontre que l’ensemble est

également

ouvert.

Exemple

5.1. Soient ai, a2 , ... , ak des lettres de A. Alors l’ensemble

A*aIA*a2A* ... akA*

des mots

ayant

aia2 ... ak comme sous-mot est un

ouvert de la

topologie p-adique.

Un

problème qui

n’est pas encore résolu à l’heure

actuelle,

mais

qui

semble en bonne

voie,

est la caractérisation des ouverts reconnaissables de la

topologie p-adique

de A* . Ce

qui

précède

montre que les

parties

de A*

qui

sont union finies de

parties

de la forme

où les ai sont des lettres et les

Li

sont des

parties

reconnues par des

p-groupes, sont des

parties

reconnaissables ouvertes pour la

topologie

p-adique.

On

conjecture

que

réciproquement,

toute

partie

reconnaissable

ouverte est de cette forme. On trouvera dans

[11]

une discussion

approfondie

de cette

conjecture

et de

conjectures

connexes.

On

appelle

substitution(*)

de A* dans B* un

morphisme

de monoïde

de A* dans

~(B*).

C’est donc une

application a

de A* dans

~(B*)

telle

que

a(1) = (1)

et

u(a1)u(a2)... u(an)

pour tout mot aia2 ... an . En

réalité,

on considère comme une relation sur A* x B * . En

particulier,

la notation

u-l

désigne

la relation inverse de u

[1].

Si L est une

partie

de

A*,

et K est une

partie

de

B*,

on pose

Ainsi

o~-1 (~~’)

est l’ensemble des mots de A*

qui

sont en relation avec un

mot de l( par la relation

(1-I.

THÉORÈME

5.4.

[11].

Soit (1 une substitution de A* dans B*. Si J( est un

ouvert de B* p.our la

topologie

p-adique,

u-l

(J()

est un ouvert de A*. La démonstration de ce résultat repose sur le fait

(non

trivial)

que si J(

est une

partie

reconnue par un p-groupe, alors est union finie de

parties

de la forme où les

Li

sont des

parties

reconnues

par des p-groupes.

(17)

COROLLAIRE 5.5. Soit p une

application

surjective

d’un

alphabet A

sur un

alphabet

B. Alors le

morphisme

de monoîde de A* dans B* défini par

p est une

application

ouverte.

Démonstration. Il suffit d’observer que est une substitution de B*

dans A* et

d’appliquer

le théorème 5.4. a

Nous pouvons à

présent

en déduire les

propriétés topologiques

des

applications x, à

et

fi

de la

figure

2. 1, R

étant muni de la

topologie

induite

par la distance

dp.

PRO P O S ITIO N 5 . 6 . Relativement à la distan ce

p-adi q ue,

on a les

propriétés

suivantes :

(1)

l’application x : A* --~

F(A)

est continue et

ouverte,

(2~

l’application 6 A* --~

R est ouverte mais non

continue,

(3)

l’application 0

R -

F(A)

est un

isomorphisme d’espaces uniformes,

mais pas une isométrie.

Démonstration.

(1)

résulte de la

proposition

2.6 et du corollaire 5.5.

6. Le mot de Prouhet-Thue-Morse et la

topologie

p-adique

Le mot de Prouhet-Thue-Morse est curieusement relié à la

topologie

p-adique. Rappelons qu’il s’agit

du mot infini t obtenu à

partir

du mot a par

itération du

morphisme

de monoïde r : A* 2013~ A* défini par

T(a) -

ab et

r(b)

= ba. On a ainsi

(18)

s’intéresse aux coefficients binomiaux de la forme

(~g1) ,

dont le tableau

ci-dessous donne les

premières

valeurs :

On constate

expérimentalement

que, pour certaines valeurs de m, les coefficients binomiaux

t-

du tableau sont tous

pairs,

et que pour m =

12,

ils sont tous

multiples

de 3.

L’explication

est fournie par le résultat suivant.

THÉORÈME 6.1.

[2].

Pour tout nombre

premier

p et pour tout entier n, il existe un entier m =

f (p,

rt)

tel que, pour tout mot x tel que 0

Ixl

:s;

n,

on ait

(~)

== 0 mod p.

Lorsque

p ~

2,

on

peut

prendre

pour

f

la fonction

Lx J

désigne

le

plus grand

entier inférieur ou

égal

à x. Pour p =

2,

on

peut

prendre

f (p, n)

=

2k

si n

Fk,

Fk

est le k-ième élément de

la suite de Fibonacci définie par

Fo

=

1,

Fl -

1 et

Fn+2

= pour

tout n &#x3E; 0. Les

premières

valeurs de

f (p, n)

sont données dans le tableau ci-dessous.

(19)

THÉORÈME 6.2.

[2].

Pour tout nombre

premier

p, il

existe une sous-suite

de la suite

qui

converge vers 1 dans la

topologie p-adique.

Démonstration.

D’après

le théorème

4.4,

une suite un converge vers le

mot vide si et seulement

si

b(u,,, 1)

tend vers

l’infini,

c’est-à-dire si et

seulement

si,

pour tout

k,

il existe un entier nk tel que, pour tout n &#x3E; no

et pour tout mot x tel que 0

Ixl

k,

on ait

( ~ ) _

0 mod p. Le théorème

6.1 montre alors que la suite converge vers 1 dans la

topologie

p-adique.

o

Le théorème 6.2 fournit des

exemples

de suites

convergentes

pour la

topologie

p-adique qui

ne sont pas

conséquences

du corollaire 2.4. On sait

en effet que la suite de Prouhet-Thue-Morse ne contient aucun facteur de

la forme

x3

(avec x

mot non

vide).

Elle ne contient donc a fortiori aucun

facteur de la forme

xp"

pour n &#x3E; 1 et le corollaire 2.4 ne

peut

être utilisé.

BIBLIOGRAPHIE

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J.-E. Pin

LITP-IBP, Université Paris VI et CNRS, Tour 55-65 4 Place Jussieu

F-75252 Paris Cedex 05

France

Figure

Figure  3.2.  Un  automate  dont le monoïde associé  est  un  groupe.
Figure  4.1.  Un  automate  reconnaissant  L(abc,1, 2).

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