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Le blanchissage d'argent : (art. 305 bis et 305 ter CP)

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Le blanchissage d'argent : (art. 305 bis et 305 ter CP)

CASSANI, Ursula

CASSANI, Ursula. Le blanchissage d'argent : (art. 305 bis et 305 ter CP). Fiches juridiques suisses , 1994, no. 135

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:42605

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(2)

135

Droit pénal

LE BLANCHISSAGE D'ARGENT

(Art. 305 bis et 305 ter CP)

C. D. 343

MISE AU POINT 1" f•hdcr 19'J4

S ummaJre

par Ursula assani

Dol"le11r 11/l droif AVOCill!' Cluugé~ de co11rs supplt!<mte

d l'Universilé de Ge111h·e

P11gc

1. lNTRODUCTJON .. , ...............•... , . . . 2

A. DÉFJNITIO ......... , . . . . . • . . . . . . 2

B. TERMINOLOGIE ..•............ , . . . . .. - -.... -.. -.. - ... -. . . i

C. l'ÉLADORATION DE NORM S RÉGTSSl\NT LE BLANCrUSSAGE . . . . . . . 2

l. I.e confcxle intcrnolional ..... _ . . . . . . . . . . . . . 3

2. Surveillance et :mto·régulallon dans Je ectcuc bancaire . . . . . . 4

3. La répression du blanc:hissagc sur la ba~e de la LStup . . . . . . 5

4. l!élabor1.1tion des art. 305 bi et 305 ter: CP . . . . . . . . . . 6

5. Le n()uveao «train de m1: ores" contre les otga.nlsat!ous crin1inelles... . . . 1

Il. l~E BIEN JURIDIQUE PROTKGÉ l'All .LES AU'l~ 305 hi" cl JOS Ier cr . . . 7

m.

L'ARl: 305 his CP . .. . . .. . .. .. . . • .. . . . • . . . . . . .. . . . .. A. L'OBJET DE L'INFRACTION .......... : ............................... . 1. Les valeurs patriwonJales ..... : . . . • . • . . . • ..•........ , ..•. 2. L11 1novenancc c(•un .:rime . . . . . . . . . . . . : . . ......... . B. LE Cül'llPOlrn:'.MJ:::NT CN 'RIMINI:'.: ............. . 1. L't!Dtmvc à lu t.-UDfiscaJion. it l'idcntificuliou de L'origine <111 à la ctécou~cnc -.......... . 2. Les act.es d't'ntnwc . . . . . . . . .. 3. Enlr:.wc par absten1lon . . . . . .................. , ............. : ........... . C. ÉLÉ ŒNTS SUBJECTIFS . . . .. D. PEINE ....................... . 8 8

s

9 12 12. 13 14 15 16 E. LE BLANCHISSAÇiE AGGRAVÉ . . . .. . . . ... .. ... . . . .. .... . . .. . . ... . . 16

1. L'auteur aglf comme membre d'une organi~afton crlmlnelle (Ill. a) . . . 17

2. I111ufeur agit comm membre.d'une bande ronnéc pour se llvr~r de manlè~e systématique a1,1 blanchissage d'nrgenl (lil. b) . . . • • . . . • • . . . • . . . 18

3. L'11uteur réalise un chlIDc d'11ffalrcs ou un goln Importants en faisant métier de blanchir de l'argcnl (lit. c) ... , . . . • . . . . . . . . . . . . . . • . . 18

l\~ L'ART. 305 Ier" CP .......... ..

A. L'AUTEUR ...•..•.... , B. L'ACTE CONSTITUTIF , ... .

J. L'acceptation (elc:.) de ,·aleurs patrimoniales .... , • • • . . . • . . •...... -...... . 2. Le ~éfaut de ''igil:ince dans l'identification de l'ayDDt droit écon.omique ............. ..

19 19 20 20 20

(3)

C. ÉLÉMENT SUBJI CHF ......

. D. PAHTICIPATIOI\ .....•...

E. PEINE ...... . .

. .

. ... ... -·

. .............•.. • ... ~.I

V. CONCOURS . . . . .....•.•.•.•.............•...•.•......•....•... , . . 2~

VI. 8IBLIOGRAPHlE . . . . . . . . . . . . 25

1. INTRODUCTION

A. DÉFINI'l10N

Le blanchissage de l'arg1ml sale est l'acte par lequel l'existence, la source illicite ou l'emploi illicite de ressources sont dissimult!s, dans le but de les faire apparaître comme acquises de manière licite.

Blanchir de l'argent, c'est le réintroduire. da11s l'économie légale, lui donner l'apparence de la légalité et permellœ ainsi <tu délinquant d'en jouir sans l!tre découvert: celui qui blanchit de l'argent provenant d'un crime aide donc le délin- quant à profiter pleinement du produit de son iufr.action.

Les organisations criminelles mettent souvent sur pied des mécanismes de blaucbissagc extrêmement sophistiqués passant par un réseau complexe de relais.

li n'en demeure pas moins que la réintroduction de l'argent sale dans le circuit normal de l'économie légale comporte un certain nombre de risques; elle repré- sente le «talon d'Achille» des organisations criminelles'.

En frappant le blanchisseur de l'nrgenl i>ale, on vise donc à frapper nu premier chef les organisations criminelles; inlerclirc le hlanchi~sage. c'est /uf/cr co111re le crime organisé.

B. TERMlNOLOGl.E

Plusieurs termes sont utilisés pour désigner le phénomène du blam.:hissage de l 'nrgent sale: Je blanchissage, Je blanchimenl ou encore le recyclage de l'argent sale. Le législateu'r suisse a opté dans le texte français de la loi pour le terme de blanchissage d'argent, da os le texte en J311gue allemande, pour le tenne de « Geld- wascherei »et dans le te.XIe italien pour celui de «riciclaggio di deoaro».

.

.

C. L'ÉLABORATION DE NORMES RÉGISSANT LE BLANCHISSAGE L'importance du blanchissage de l'argent sale pour l'économie criminelle n'a été reconnue que très récemment.

1 Paolo 8emasconL fin•lllUnlerwelt, Zurich 1988, p. 27; ruessAgc, FF 1989 Il, p. 963.

- 2 -

!

(4)

l. Le contex1e infernaCional

Sur le plan international, c'est essentielleme.nt sur l'initiative des Etats-Unis que le blanchissage est devenu un !hème essentiel de !11 politique criminelle depuis quelques années; conformément à l'optique américaine. l'attention s'est d'ailleurs souvent focalisée sur l'argent de la drogue. Cette prise d~ conscience progressive d'un nouvel enjeu de la luue contre la criminalité a eu ùe nombreuses concrétisa- tions sur le plan international, notamment:

Rccomniandation N° R (80) du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe du 27 juin 1980 relative aux mesures contre le transfert et la mise i1 l'abri des capitaux d'origine criminelle (1980).

Recommandarions du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire de la Banque des Règlements lntemationau:< du 12 décembre 1988 approuvées par les gou- verneurs des Ranques Centrales du Groupe des Dix: ce11e déclaration de prin- cipe engage les banques à se doter d'un mécanisme de contrôle de l'identité des clienls.

Convention des Nations Unies contre le trafic illicite des stupéfiants el des substances psychotropes du 20 décembre 1988 (Convention de Vienne): cette convention vise le blanchimetll de l'argent de la drogue. La Suisse l'a signée, mais ne l'a pas encore ratifiée.

Rapports cl recommandations .du Groupe d'Action Financière sur le blan- chiment des capitm1x (GAFI, Financial Action Task Force on Moncy-Lauade- ring): ce groupe d'experts a été formé en 1989 par les sept pays les plus industrialisés et 8 autres membres fondateurs (dont la Suisse) et a émis, pour la première fois le 7 février 19902, des recommandations en matière de hlan- chimenl.

Convention N° 141 du Consdl de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits' du crime, raliliée par la Suisse en date du 11 mai J 993, entrée en vigueur le 1" septembre

1993

3

O:tte

convention s'applique à toutes les infractions principales graves el introduit un standard minimum pour l'entraide internationale, en particulier dans le domaine de la coilfiscatfon du produit de l'infraction. L'art. 6 oblige les Etats qui sont parties à la convention à réprimer le blanchiment.

Directive de la Communauté Européenne du 10 juin 1991 relative à la prévcn- tiqn de l'utilisation du système. fi.nancier aux fins du blancft4nent de capitaux (911308/CEE)': cette directive n'est pas directement applicable dans les Etats membres, mais oblige ceux-ci à élaborer une législation nationale pour lutter contre le blanchiment.

1 Dulletin Cl'B 20 (1990). p. 33. .

1 Arrêté et texte de ln convention, RO 11193, p. 231!4: message, FF t!l92 VI, 8.

'JO n• l66l7ï, 1991.

(5)

2. Surveillunce et aoto-régulation dans le secteur bancaire

La place financi~re suisse, bénéficiant d'une tradition de libre circulation des·

capitaux et d'une exceUente réputation pour l'efficacité de ses services et la discré- tion exemplaire assurée par son secret bancaire rigoureusement observé (mais nullement illimité), offrait évidemment des facilités particulièrement appréciables pour les personnes désirant recycler de l'argent de provenance douteuse. La place financière suisse a donc sans aucun doute fonctii:mné longtemps comme une des plaques tournantes du blanchissage international, ce qui a été révélé par des scan- dales retentissants depuis les années septante.

Cet état de fait a d'ailleurs été reconnu par les professionnels de la finance depuis fort longtemps déjà. Les premières manches dans la lutte contre le blan- chiment -ou pour l'identification de l'origine des fonds déposés en Suisse - ont été menées par les milieux bancaires et par leur autorité de surveillance, dans le but déclaré de préserver ainsi la réputation de la placc.fina11cière suisse.

a) La surveillance de-la Commission féc!éra/e des banques

Les banques suisses sont soumises, en vertu de l'art. 1" Loi sur les banques (LB), à l'autorisation et à la sutveillance de la Comnùssion fédérale des banques (CFD). Confonnément à l'art. 3, al. 2 lit. c LB, la CPB est chargée du contrôle de la "garantie d'une activité irréprochable" des établissements bancaires. Dès le mi- lieu des années septante, la CFB s'est efforcée d'élargir la.portée de cette disposi- tion «de manière à consolider les bases de la confiance dont le sccteW' bancaire en tant que tel doit se montrer digne»5L'acceptation de fonds d'orîgi~e criminelle n'est pas compatible avec la garantie d'une activité irréprochable.

Diios cette perspective, la banque a «l'obligation d'exiger des précisions et d'éclaircir l'arrière-plan économique d'une opération, uon seulement lorsque celle-ci comporte un risque, mais également en cas d'opération fiduciaire, <lorsque des indices donnent à penser qu'elle pourrait être un élément d'une transaction immorale ou illicite, ou lorsqu'il s'agit d'une affaire compliquée, inusuelle ou im- portante>» 6

li çst à noter que depuis l'entrée en vigueur des dispositions pénales régissant le blanchissage, la CFD a p~blié des Directives relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment dè capitaux du 18 décembre 1991 (Circ.-CIJ3 91/3) qui ont pour but de concrétiser la pratique de la CFB relative à la garantie d'une activité irréprochable et à l'organis~tion interne adéquate et de fournir des éléments

d'intcrpr~tation pour les art. 305 bis el ter.

b) La convention de diligence

Parallèlement à la sutveillance de la CFB, les banques se sont donné des règles qui -.ont destinées à définir une ligne de conduite pour le secteur bancaire. La.

diligence requise du banquier est définie dans la Convention relative à l'obligation

'Message, FF 1989 Il, p. 967.

Message, FF 1989 Il, p. 967, chant le bulletin de la CFB n• 11, p. 15.

(6)

de diligence des banque.s (CDB) dont la première mouture remonte à 1977 et qui a été remaniée en 1982, 1987 et en 1992. li s'agit d'une convention à caractère privé (ATF 109 lb 154, IT 1985 I 248), conclue entre l'Association suisse des banquiers 7 et les banques suisses, et qui précise - entre autres obligations de diligence - les vérificalions que les établissements bancaires doivent faire lorsqu'ils entrent en relation d'affaires avec un client, afin d'établir l'identité de leur cocontractant et, le cas échéant, de l'ayant droit économique des fonds confiés. La diligence qu'elJe impose aux banques es! un standard minimum reconnu par la CFB et par le TF, mais qui ne lie pas les instances étatiqu~s de manière contraignante, notamment quand il s·agit d'interpréter l'art. 3 al. 2 lit. c LB concernant la garantie d'une activité irréprochable (ATF 111 lb 128, IT 1988 II 22 et 1986 I 26).

Cet instrument de lutte contre le blanchissage n'est donc pas un instrument appartenant au droit étatique, mais une conve111io11 privée. Il va de soi qu'il ne lie que les parties à la convention, et que son champ d'application ne s'étend pas aux secteurs non-bancaires de l'économie, qui peuvent également se prêter à des acti- vités d_e blanchissage. D'autre part, le but premier de cette convention était la.

sauvegard_c des intérêts des milieux bancaires eux-mêmes - la sauvegarde de la réputation du secteur bancaire suisse8 - et non la lutte contre le blanchissage en tant que telle.

3. La répression du blanchissage sur la base de la Loi fédérale sur les stupéfianCs

Uart. 19 ch. 1 al. 7 LStup déclare punissable «celui qui finance un trafic illicite de stupéfiants ou sert d'intermédiaire pour son financement».

Dans un arrêt rendu en octobre 1989, le TF a appliqué cette disposition au recyclage de l'argent de la drogue (arrêt Magharia11, ATF 115 IV 256, JT 1991 IV 83)9•

Cette jurisprudence peut surprendre, puisqu'à première vue celui qui finance le trafic de stupéfiants intervient avant la transaction, alors que celui qui recycle l'argent de la drogue n'intervient qu'après la commission de l'infraction-portant sur le commerce de stupéfiants. Bien que l'argumentation exposée ne soit pas limpide, le TF semble appuyer sa co11clusio11 sur les considérations suivantes (ATF 115 IV 264; JT 1991 IV 89/90):

Dans les opérations financières liées au trafic professionnel de stupéfiants, l'infraction n'est en règle générale p<ls 1:.ntièrement achevée avec la mise en circulation des stupéfiants; elle n'est entièrement accomplie qu'à partir du moment où les auteurs ont atteint tous leurs objectifs (non précisés par le TF).

Dans cet intervalle, il y a place pour des actes de complicité, soit des actes de

«financement» au sens de l'art. 19 ch. 1 al. 7 LStup.

1 Jnilialerne111, la COB (version 1977 et 1982) liair ln Banque Nationale el les banques.

•cr. art. J Préambule COB.

Cette jurisprudence a été confirmée par un ATF du 23 décembre t992, également c Sarkcv et Jean Magharian, sur recours en cassation, qui n'est pas encore publié.

(7)

Le TF semble estimer, par aiÎleurs. que celui qui recycle l'argent de la drogue contribue de ce fait à un nouvel investissement de ces fonds dans un trafic de·

stupéfiants futur. La question - pourtunt essentielle - de savoir si l'investisse- ment futur dans un nouveau trafic de stupéfiants est indispensable ou si l'ÎJlves- tissement dans des affaires «propres» peut suffire. est cependant laissée ou- verte 10

Le blanchissage de l'argent provenant de la drogue, ou du moins celui prove- nant du trafic professionnel de la drogue, était donc déclaré punissable p11r la jurisprudence du TF avant même l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions sur le blanchissage. L'art. 19 LStup réprime par ailleurs, à son ch. 3, les infractions commises par négligence: contrairement au blanchissage au sens de l'art. 305 bis CP. le recyclage réprimé au titre du financement du trafic de stupéfiants est donc punissable, même en cas de négligence 11

Pour les problèmes de concours entre les art. 305 bis CP et 19 ch. 1 al. 7 LStup, cf. Chap.

V.

d, -infra.

4. L'élaboration des arf. 305 bis et 305 ter Cl'

Le processus législatif en matière d'incrimination du blanchissage a été ex- trêmement rapide. En 1983 encore, quand la commission d'experts s'est attelcfo à la révision des infractions contre le patrimoine. personne ne songeait à légiférer en matiêre de blanchissage. Certaines voix se sont cependant élevées pour regretter ceue-.L11cune pendant la procédure de consultation sur la révision des infractions contre le patrimoine qui a eu lieu entre 1985 et 1986, soit dans la période qui suivait la d6couvertc de la «Pizza Connection » en 'l 984.

Le 21 juillet 1986, le Département fédéral de justice et police a chargé Paolo Bemasconl. l'ancien Procureur général cJu Solloceneri, de pr6parer un projet de disposition pénale eo matière de blanchissage. Moins de deux mois plus tard, l'expert a remis son rapport avec trois propositions alternatives de normes pénales.

La procédure de consultation s'est déroulée de février à juin 1987.

En novembre J 988, suite à la divulgation de l'affaire de la Lebanou Connec- tion (dans laquelle était impliquée la Shakarchi Trading AG), le Conseil fédéral a décidé d'accélérer le processus législatif et de le détache1· de la révision des in(rac- tions contre le patrimoine. Une commission d'étude a été constituée par !'Office fédéral de la jtL~ticc; sept mois plus lard, le Conseil fédérnl soumettait le projet de loi avec un message daté du 12juin 1989 (FF 1989 Il p. 961).

Le prnjtt du Conseil fédéral a .été accepté à l'unanimité par les deux Chambres 12• Adopti;1: le 23 mars 1990, la nouvelle est entrée en vigueur le l" août 1990.

,.Celte qu<seiun est également lai5.«!e ouvcne dans 1'1\TF Ma!:harian du 23 déœmbrc 1\1113, sur recours en cassation, p. 16.

11 ATF ll5 IV 265, JT l991 IV 90, confirmé par SJ 1993. p'. 139, cl Pra l993 n•' t73, p. 658, ce dernier arr~t optnnl cependant pour une interprétation restrictive de la n~gligcnce conccru3nt Je lien de connexité entre l'opération financière et le tr31ic de stupéfinn~.

"DO CN 1989 JI, p. t873; DQ CE 19'.>0. p. 202.

(8)

S: Le nouveau «truin de mesures» contre.les organisalions criminelles La lutte conire les organisations criminelfes est loin· d'être achevée ;ivèc l'en- trée en vigueur des art. 305 his et ter CP. Lors des travaux législatifs concernnnl le blanchissage, la nécessité de réviser plusieurs autres dispositions avait été re- connue, mais provisoirement abandonnée afin d'accélérer ainsi l'entrée en vigueur des dispositions sur Je blauchissage.

Ces domaines qui avaient ainsi été laissés de côté ont fait l'objet, en février 1991, d'.un avant-projet prévoyant un nouveau «train de mesures» contre les orga- nisations criminelles. En date du 30 juin 1993, le Conseil fédéral a publié son message sur la "révision du droit de la confiscation, pu11issnbi/ité de l'orgn11isation criminelle, droit de co1111111111ica1ion du financier·' 13• Les grands axes de cette révi- sion sont les suivants:

L'introduction d'une disposition (art. 260 ter CP) réprimanl la participation et Je soutien à une organisation crimineUe;

L'introduction d'un al. 2 à J'arl. 305 ter CP conférant aux personnes visées par celle disposition le droit de communiquer aux autorités de poursuite les infor- mations qui leur permettent d'établir. que des valeurs patrimoniales pro- vienuenl d'un crime (droit de communication du financier)";

La révision des dispositions relatives à la confiscation, notamment la possibilité de confisquer les valeurs patrimoniales appartenant aux org1111isations crimi- aeUes même lon;que lèur provenance délictueuse ne peut être établie; des allégements en matière de preuve; la séparation claire ~ntre la confiscation d'objets dangereux à des fins de sûreté (Sicherungseinziehung) et la confisca- tion de valeurs patrimoniales visant à supprimer un avantage illicite {Abschi.ip-·

fungseinziehung).

Il. LE BIEN JURIDIQUE PROTÉGÉ PAR LES ART. 305 bis el ter CP

L'art. 305 bis réprime ks actes proprt:s à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales d'origine criminelle.

L'art. 305 ter réprime l'omission de vérifier l'identité de l'ayant droit économique dans les opérations financières.

u FF 1993 llI 269.

· "La difficulté qui se pose provient du fait que les b:mquiers sont LeÎlus par l'art. 47 LB à la sauvegiird( du -.:crct bancaire qui serait violé rar la communication à des lie1s dïoformations co11cer- nant un client. I,<!~ hanquiers ont donc app<:lé de leurs vœux une dispœition qui leur conférerait clairement le droit de d~noncer l'existence de fonds d·origlnc délictueuse. fi est ~ noter, cependant, qu'en l'étal actuel du droit, la communication aux autorités d'infomiations concernant une infrnction r.rave ne constituerait pas une violation punissable do secret bancaire. puisque k hanquier pourrnil se prévaloir du fait justificatif exrra-lc!gal de ln dHense d'in1c!r~1S légitimes (dans le mtmc se1u, CFB, .

. Directives rela1ives à la prévention el à la lune contre le blanchiment de capitaux. du 18.dc!cembre

1991, Circ.-CFB 9113, p. 6 note 1; Z11berbiihln, Banken ais Hilfspolizistcn zur Verhinderung dtr Geld- wfischcrci? -Sich1 cines Bankaufsehcr~. p. 57: Sc:l1111id, f'SA vol. 8, 120; Ackcrmmm, GcldwHschcrci -Moncy Laundcring, p. 140; n1101icê: Stratenwertll; GeldwUscherei - ein Lehrstück der üesct:zgcbu11g, p. 112; Message du Conseil fédéral, FF 1993 Ill 315).

(9)

Le but premier poursuivi parTincrimination du blanchissage est, nolL~ l'avons déj3 relevé. d'attei11die les org01tisatio11s crimi11ellel._ Or. la notion d'organisation criminelle n'apparaît pas comme un élément constitutif c.lt:s art. 305 bis et ter. elle ne smvient qu'à l'art. 305 bis ch. 2 lit. a pour définir une circonstance aggravante.

Le texte léga.1 de l'art. 305 bis ne reflète nullement le souci de réprimer un acte d'assistance à une organisation criminelle; il y a à cet égard uoe i1111déq11atio11 cerrai11e entre le bw de la loi et l'exprcssfott de cc but dans le texte légat•~.

Ce qui est visé en réalité par ces dispositions, ce sont des actes qui rendent plus difficiles la découverte et la confiscàtion des gains illicites: il s'agit d'infractioris contre {'admi11istratio11 de la justice. En d'autres termes, et pour reprendre la cri- tique de Strate11wer1Ji, ces dispositions sont conçues dans l'optique du procureur et répriment le fait de rendre plus ardu Je travail des autorités chargées de la répres- sion pénale 16.

Cette option prist: par Je législateur se reflète également dans la position systé- matique de ces dispositions qui sool rangées dans le titre dix-septième du Code pénal réprimant les crimes ou délits contre l'<1dministration de la justice. L'article 305 bis entretient des relations très étroites avec l'art. 305 CP, entrave à l'action pénale. Alors que cette dernière disposition réprime la soustrac.;tion d·unc per- sonne à la poursuite pénale (Pcrsonc11bcgii11stiis1111g), l'art. 305 bis sur Je blan- chissage réprime la soustraction d'une valeur patri111011iale à la mainmise des auto·

rités pénales, soit plus précisément à la confiscation (Sachbegl/nstig1111g).

Ill. L'A

irr.

305 bis CP

A. L'OBJET DE L'INFRACTION

L'infraction réprimée à l'article 305 his porte sur des valeurs patrimoniales provenant d'un crime:

1. Les \'tllcurs pulrimoniales

Bien que la note margù1ale de l'ai1. 305 bis - «blanchissage d'argent» - sug- gère que seul l'argent est visé, le champ d'application de la norme est nettement plus large: toutes valeurs patrimoniales provenant d'un crime peuvent faire l'objet du blanchissage, qu'il s'agisse de choses mobilières ou immobilières, d·argent, de créances ou d'autres droits 17

li s'agit là d'uni: différence essentielle par rapport au recel (art. 144 CP) qui ne porte que sur de~ choses, au sens que Je droit civil confère. à cette notion, soit sur des objets corporels, y compris l'argent, mais à l'exception des créances 11011 incor- porées dans w1 tirre (ATF 81IV158, JT 1956 IV 40). ·

u S1ra1e11 .. ·erth, Oeldw~scherei -ein LchrstUck der Oesetzgebunj\. p. 102.

·~ S1m1e111ver1ft, tnc. cit.

"Message, FF 1989 U. p. 98:!.

- 8 -

(10)

2. l~ provcnnncc d'un crime

L'objet de l'infraction de blanchissage a été obtenu par un crime. Fn d'autres tennes,

les valeurs om été obtenues grâce à une infraction préalable et cette infrac1io1\

e .st

un crime.

a) Provena11ce délictueuse des valeurs patrimoniales

ll s'agit là de l'élément le plus délicat et qui risque de devenir la vérirnblc pierre d'achoppement de la répression pénale 13, du moins si la jurisprudence l'ap- plique avec ri!:,'lleur.

Cet élément soulève en effet deux difficultés:

tw) Tl suppose établi de quelle i11fractio11 principale (\lor1at) les valeurs pro- viennent. Dans la plupart des cas, cetlc preuve sera très difficile à rapporter, surtout lorsqu'il s'agit d'infractions couuuises à l'étranger.

De même, lorsque l'argent provient d'une organisation criminelle qui est suffisamment grande pour entn:tenir plusieurs activités illicites qui lui rap- portent de l'argent, il sera virtuellemeni impossible d'étâblir la provenance exacte de certains fonds. La mafia, par exemple, est connue pour eotretenir des activités criminelles dans des secteurs aussi variés que le trafic de stupé- llants ou d'armes. les enlèvements, les.extorsions (rackets), la corruption. ~le., sans pour autant trier ces fonds selon leur origine.

bb) La deuxième difticulté posée est œlle de l'interprétation de la notion de pro- venance:

Par définition. les produits directs de l'infraction principale (prod11c~a sce- /eris) proviennent de ladite infraction. C'est le cas, par exemple, de l'objet obtenu par une infraction contre la propriété, tel qu'un objet volé, ou encore des avantages patrimoniaux obtenus par une infraction contre les

intérêts pécuniaires. ·

Ln

même chose vaut en ce qui concerne les valeurs obtenues au moyen d'infrnctious contre les intérêts collectifs, infractions qui ne portent atteinte aux intérêts pécuniaires d'aucun lésé, mais dont l'accomplisse- ment peut néanmoins conférer à l'auteur un avautage patrimonial: Je tra- fic de stupéfürnts, d'armes, de fausse monnaie, o:tc.

- La question est plus délicate en ce qui concerne les 11v1111tages obtenus indirectement 1111 mu yen d'1111e infraction:

Toute infraction peut être le fait d'un auteur qui est payé par un tiers pour la commettre (par exemple, le tueur à gages). Cette récompense

"Srro1e111ve11h, Schweitecische.s SvaCcechl, Teilievisioocn, § 4, ch. 10, p. 74.

(11)

(praetium sceleris), qui constitue un avantage 'indirect de l'infraction, pcut- elle faire l'objet de blanchissage? La réponse es~ affinnative, puisque l'art.

59 CP prévoit la dévolution à l'~tat des avantages qui ont décidé l'auteur à commettre l'i.u!raction ou qui l'ont récompensé, cc qui constitue une forme d_c confiscation d'un avantage illicite. ·

Plus importante en pratique est la que.stiou du blanc/lissage des valeurs de remp/acemem. Si l'auteur de l'iilfracticin principale a déjà substitué une auire valeur patrimoniale à celle obten"ue par l'infraction, cette valeur de substitution, obtemie indirectement au moyeu de l'infraction, est-elle en- core susceptible de blanchissage? Autrement dit, le blanchissage peut-il porter sur des valeurs qui ont déjà subi d'autres.actes de blanchissage?

Cette question n'est pas sans rappeler uné vieiÏle controverse connue des pénalistes dans le cadre .de l'a11.

144

CP sur. le recel: le recel porte-t-il uniquement sur l'objet obtenu par l'auteur de l'infraction principale ou également sur des objets de substitution, par exemple des objets achetés par le voleur au moyen de l'argent qÙ'il a· soustrait (Ersatzhehlerei)? Dans le cadre du recel, la doctrine et la jurisprudence ont clairement opté pour l'exclusion des objets de remplacement (ATF 95 N 8, JT 1969 IV 51; ATF 116N198, JT 1992 lV 22): La seule ~xception à ce principe est le change d'argent: lorsqu'une somme d'argent. obtenue par l'infraction principale est changée dans d'autres coupures de la même monnaie, ces autres cou- pures peuvent encore faire l'objet du ·recel (~TF 95 IV 9, JT 1969 N 52;

ATF 116 IV 200, JT 1992 IV 23); si l'argenrest, en re'.".anche, cl1angé dans une autre monnaie; ces billets d'une autre monnaie ne ,sauront plus être recelés (ATF 116 IV 201, JT 1992 IY 24).

Dans le cadre du blanchissage, la question de la punissabilité des in- fractions portant sur des valeurs de substitution (Ersatzgeldwlisclierei, S11r- rogatgeld111llscherei) est encore très ouverte:

Bernasco11i, l'auteur de l'avant-projet, estimait qu'il fallait étendre l'application de l'art. 305 bis .aux produits de remplacement, autrement dit aux valeurs obtenues après l!ll ou plusieurs actes de blanchissage 19•

Le messugç du Conseil fédéral opte pour un point de vue plus restric- tif, afin d'éviter de jeter le soupçon sut: des ac.tivités économiques parfaite- ment licites. Cet argument est illustré par l'exemple suivant: « ... imagi- nons, par exemple, que le. cartel çte Médellin accapare une fabrique de machines avec des fonds provenant d'un trafic de.drogue; il serait indubi- tablem_ent excessif de considérer l'acquisition de pièces de machlnes comme du blanchissage d'argent, mê~e si le processûs de production a été partiellement financé par des· fonds d'origine délictueuse» 20•

1Bem4SC011i, Rapport explic.itif, p. 12.

» FF 1989 Il, pp. 982 '·

(12)

Le message21 propose donc-le critère de délimitation suivant: sont susceptibles de blanchissage -toutes les valeurs qui peuvent faire l'objet d'une confiscalio11 au sens de l'arr:·58 CP. C~ci dit, la définition qes valeurs sujettes à la confiscation est elle-niême controversée. La doctrine majori- taire semble admettre aujourd'pui le principe de 111 confiscation de cer- tains objets de remplacement, mais chaque auteur adopte sa propre défini~

tioo des.. valeurs de substitution qui sont encore susceptibles de confiscation 22•

Selon Graber, les produits· de substitution sont soumis à la confiscation et doivent donc également poÙvoir faire l'objet d'un blanchissagelJ.

n

fo~de sa conclusion.sur un argument téléologique pèrtinent: un des mo.tifs qui ont conduit à l'introduction d'une disposition sur le blanchissage était précisément que l'art. 144

CP

était inadéquat pour saisir ces ~ctes_parce qu'il ne s'appliqµait pas aux produits de remplacement. Exclure l'« Ersatz- geldwlJSéherei » revieµdrait à condamner l'art 305 bis à être aussi inapte à remplir ce besoin normatif que l'est l'art. i«f414 ..

Seul Stratenwerth nie résolum"ent là pos~ibilité dë cq!lfisquer ·les va- leurs oe substitutio!12S· qu'il écarte également parmi les objets susceptibles

de blanchissage26. .

Ainsi qu'il ·a été relevé ci-desstis27, les disp.ositions régissant la confis- cation font aclucllemeiu l'objet-d'une refonte législative.

mess.age du

Conseil fédéral à l'appui de cc projet 28 distingue deux hypolhès.ès :·.

si la vàleur directement obtenue par l;infraction princip~le est une chose. (c.-à·d. un objet cor°porel mobilier ou immobllier), seule cette dernière pourra faire l'objet de la confiscation, à l'~xclusi~!l de toute valeur .. èle remplacement (principe cle la spécinlité)-!

2' FF 1989 U, p. 982.

v. ~chu/tz (RJB 1987, p. 313) lirnile la confiscation aux objets qui ont été achetés aû mO)•en de l'argent obtenu par l'infraclion; Re/1berg (Stra.frccht Il, p. 84) donne le m~me exemple, sans toutefois limiter la conlls<:ation des objets de remploi à œne situation; Trùluef (Kurz.kommentar, n. 6-ad arl. SS) se prononce pour la corUi.scalion de cc que l'auteur a achett ou acquis au m0yen de la valeur patrimo- 1niale obtenue par l'infraction; Oalllnrd (La confiscation des gains illicites, p. 173 s.) se prononce c,ri principe contre la confiscation des produits de remplacement mais réserve des exceptions qui en pra·

tique auront une portée très large, en admellaot la'conJi5<:31ion lorsque le produit de remplacement csl une somme d'argent (acquise en remplacement d'un ou1n. billet do banque ou par la vente (etc.) d'un . objet corporel obtenu par l'infraction) ·ou lorsque le produit de rcmplftccment est un objet corporel acquis au moyen d'tmc ~ommc d'argent obtenue par l'infraction principale. L'!iypothèse d'une créance n'est pas envisagée.

"Graber, Ocldwiischerei, p. 119; Schmid (FSA vol. 8, p. 111) soutient Je même point de Ylie, sans toutefois le moliver.

,. Orabu, op. cil, p. 118.

u Stratenwerth, Schwei1.erisches Strafrecht, AT li, 1989, § 14, ch. S4, p. 496.

~ Teilrevisionen, § 4, ch. 11, p. 74.

21 Cb.ap. 1, A, S. .

u Message du 30 juin 1993. FF 1993 Ill 299 s.

(13)

si Je résultat direct de l'infraction se présente sous fom1e de bilh:ls de banque, de devises, d'effets de change, de chèques, d'avoirs en compte ou d'autres créances, la valeur poun-a être confisquée ruême en cas de transformation, aussi longtemps que son mouvement pourra êJre iden- tifié de façon certaine et documentée (autrement dit, aussi longtemps que le «paper trail» sera maintenu).

Cette définition du champ de la·confiscation peut d'ores et déjà s'ap- pliquer de lege Iota. Elle se répercute sur la portée de l'art. 305 bis: il faudra admettre qu'il n'y a pas de blanchissage du produit de remplace- ment 'dans la première hypothèse envisagée mais bien dans la seconde.

Indépendamment du problème du blanchissage des valeurs de rem- placement, il convient de noter que le- blnncbissage aggravé (art. 305 bis ch. 2) constitue un crime et que celui qui blanchit des valeurs patrimo- niales dont il sait qu'elles ont fait l'objet d'un blanchissage aggravé, se rendra toujours coupable de blanchissage, non pas au litre de la Ersat<,- geldwiischerei; mais à celui du blanchissage du résultat direct du crime de blanchissage aggravé.

b) L'lnfraclio11 principale est un crime

L'infraction préalable doit être un crime au sens de l'art. 9 al. 1 CP.

Lorsque l'infraction principale a été commise à l'étranger, l'art. 305 bis ch. 3 déclare que le blanchisseur est punissable si l'infraction préalable est aussi punis·

sable à l'étranger. En d'autres termes, l'infraction principale doit pouvoir être qualifiée d'infraction pénale à l'étranger,. et de crime en Suisse. Peu importe, en revanche, que le droit pénal étranger connaisse ou non la distinction entre crimes, délits et contraventions, et qu'elle qualifie également l'infraction principale de crime.

Contrairement à l'art. 144 sur le recel, le blanchissage ne suppose pas que l'iiûraction principale. soit une infraction contre le patrimoine. Tout crime peut constituer l'infracti~ri· préalable au blanchissage, à condition bien sûr qu'il puisse être question d'un produit ou résultat de cette i11fractio11. Oc, si l'on adhere à la thèse que des avantages indirects tirés d'une infraction - en particulier le praetium sceleris -sont également susceptibles.de blanchissage, aucun crime n'est,

de par sa

nature, exclu du champ des infractions préalables.

B. LE COMPORTEMENT INCRJM1NÉ

Le comportement incriminé est décrit comme un acte propre à entraver l'ide11- tification de l'origine, la découverte 011 la confiscation de valeurs patrimoniales.

1. Ventrave à la confiscntion, à l'l<lentlfication de l'origine ou à ln décou~ertc La notion d'entrave à la confiscation renvoie clairement à l'art. 58 CP. L'acte réprimé est uo acte susceptfüle de rendre la confiscation plus difficile.

(14)

Plus délicate est la question de savoir ce qu'il faut entendre par entrave à l'identification de l'origine et de la découverte. .

Le message du Conseil fédéral précise qu'il s'agit de protéger par là les intérêt.ç des enquêtes contre le crime organisé, plus précisément des enq112tes pénales, à l'exclusion des enquêtes des tribunaux civils, des autorités fiscales ou encore de la CFB29Ces restrictions ne se reflètent cependant pas dans le texte de la loi.

D'autre part, il est douteux que ces .termes aient une portée propre. Il est

certes possible d'imaginer des actes qui sont propres à entraver l'identification et la découverte, mais non la confiscation de valeurs patrimoniales provenant d'un crime. Un premier exemple serait l'acceptation (etc.) d'un produit de substitution d'un objet ~orporel provenant d'un crime, acte qui, conformément à ce qui vient d'être exposé, ne constitue ni un recel, ni une entrave à la confiscation. Un autre exemple serait l'acceptation de valeurs patrimoniales qui ne sont plus soumises à la confiscation, parce qu'un tiers de bonne foi en est devenu le propriétaire ou parce que l'infraction principale est prescrite 30• li faut nier, cependant, que l'on puisse encore, en pareilles hypothèses, parler.de blanchissage.

2. Les actes d'entrave

La loi se contente d'un acte qui est «propre• à entraver la confiscation; peu importe, donc, que la.découverte, l'identification de l'origine ou la confiscation aient effectivement été entravées.

n

suffit que l'acte ait abstraitement été prop~e à entraîner ce résultat; l'art. 305 bis réprime un délit de mise en·danger abstrait.

L'appréciation n'est donc pas concrète, mais doit se faire selon l'expérience géné- rale de la vie 11

Les transactions suivantes sont couramment ci.tées à ti.tre d'exemples:

le cltange de l'argent {dans d'autres coupures de la même monnaie ou daJ1S une autre monnaie);

Je paiement sur un compte, le transfert d'un compte à un autre compte;

la vente, l'achat, la donation, l'échange (troc). ,

Il

y

aura cependant souve.nt matière à hésitation quant à savoir si un acte précis est propre à entraver la confiscation. Ainsi en va+il. par exemple, de la banqùe qui accepte des billets apportés ·par un courrier de la mafia dans une valise de banque et crédite le montant déposé à un compte ouvert au nom de ce dernier.

19 FF t989 Il 983 s.

'°Le TF avait estimé, dans l'ATF !OS lV 171, que la prescription pénale absolue était·un obstacle à la conliscatlon des valeurs; il est partiellement revenu sur cette position dans l'ATF 117 IV 243, estimant que, s'agissa!'t 'd'infractions soumises à une prescription absolue plus brive, le délJli de pres- cription de la confiscation Joit Etre d'au moins 10 ans en vertu de l'art. 127 CO. La doctrine est divisée:

Gaillard (La confiscation des gains illicites, p. 162) exclut la confiscation en cas de prescriplion de l'infraction; la doctrine dominante l'admet lorsqu'il s'agit de confisquer un objet dangcreu~ ou, scion·

certains auteurs. de supprimer un av~nrage pat.rirnonial dont l'auteur de l'infraction coniinuc à profiler (Sdwltl, RJB 1918, p. 324; RU.bug, StraCrcchr Il, p. 119; Tndrse~ Kun.kommentar, o. 20 ad art. 58 CP; Stramrwtrth, Scbwci=isches Strafrechl, AT 11, § 14 n. 20; Aclu:rmnnn, Geldw~sclierei -Moncy laundering, p. 212); cf. ~galcmcol l'art. 59 ch. 1 al. 3 du Projet de révision du CP.

)>Message, FF 198!1 Il, p. !183; Stra1e11wertlr, Tcilrevisiooeo, § 4, ch. 15, p. 76; Graber, Geld·

wüscherei, pp. 133 ss; Sc/11nid, FSA vol. 8, p. 117.

(15)

Sans aucun doute cette banque fournit-elle une assistui1ce à une organisation cri-

·minellc, notamment parce qu'elle pourra maintenant disposer plus facilement de l'argent par des opérations bancaires plutôt que par le transport d'une valise. Mais peut-on dire pour autant qu'il y a une entrave à la mainmise des autorités? Au contraire, la confiscation sera plus aisée et non plus difficile, ce qui est d'ailleurs admis dans le message du Conseil féMral32Néanmoins, le message voudrait que de. tels actes tombent sous le coup de l'art. 305 bis.

· ta juiisprudence publiée jusqu'à présent a trait sans exceptions ii des actes qui relèvent de la dissimulatiou, voire de. la simple acceptation, de sommes d'argent provenant du trafic de la drogue''· Ces acti;s sont indéniablement pro1>rcs à entra- ver la ·confiscation, même s'ils n'ont plus rien à voir avec le sens lilléral de la note marginale de l'art. 305 bis, « blancbi~sage ,;~ notiqn qui vise des actes par lesquels des valeurs patrimoniales· ~'~.ales» sont «lavées» et.réintroduites dans le circ\lit de l'économie légale (ATF 119 lV 62, SJ 1993 p. 6l0).

Le Tribunal fédéral réfuse c!ooc expressément d'interpréter l'acte ~~primé par référence à la note marginale, méconnaît par là le principe selon lequel les titres et notes marginales doivent être pris en considération dans l'interprétation du sens de la loi (ATF 108 IV 163;

IT

1983 IV 140; ,ATF 80 lV 243, JT 195.'.'i IV 77; ATF 77 lV 204, JT 1953 IV 63). L'interprétation ainsi préconisée aboutit au résultat insou- tenable que la destruction d'un objet provenant du crime, ou encore la co11som111n·

fion de stupéfiants'\ tombent sous le coup de l'art. 305bis, puisqu'il s'agit là sans aucun doute d'actes qui sont susceptibles d'entraver la confiscation.

Un arrêt récent du Tribunal fédéral porte cependant à croire qu'il pourrait revenir à une interprétation plus (espectueuse de la portée littérale de la notion de

«blanèhissage ».Cet arrêté retient une violation à l'art. 305bis à l'égard d'un fidu- ciaire qui avait aidé autrui à placer discrètement l'argent d'origine criminelle par des intermédiaires, sur des comptes en banque et dans deux comrats d'assurance à prime unique conclus au oom de tiers. L'élément qui paraît avoir été déterminant :iux yeux·

du

'fiibunal fédéral, fut que rauteur avait ainsi perplis la réintroduction de l'nrgent dans l'économie lég~lc, lo~t en évitant l'identification de.l'ayant droit économique par la division du montant total en plusieurs sommes dont il savait qu'elles étaient suffisamment petites pour échapper à des vérifications (ATF du 22 septembre 1993, X~· MP Bern~).

3. Enlrnve par nbstcntion

Conformément aux principes µénéraux. régissnnl la punissabilité des ilûrac- Lions par abstention, le blanchissage d'argent peut être commis par omission, pour autant que l'auteur soit redevable d"un devoir juridique d'agir (Gnran1e11pftich1)'$·

,, fF i989 Il, p. 983.

u ATF 119 IV 59, SJ 1993 p. 610; RSJ 1993 p. 232; rechl 1992 p. 112; jurisprudence approuvée par Ar{/ (rccht 1992 p. 112). ro11trn: Strnte11w1!•tl1, Teilrevisioncll, §4, ch. 13, p. 7.S, Ack~rmann, Geld·

w"scherei-Money Uiundering. p. 261 s.

"StratenH"ert/1, /oc. cit.

»Message, FF 1989 JI, p. 983; Grabtr, Geldwascherei, p. 136.

(16)

S'agissant d'une infraction contre l'administration de. la justiœ. seules les per- sonnes occupant une· position furiaique particulière qui leur confère k devoir de sauvegarder les intérêts de la justice ont un devoir juridique d'agir36C'est Je cas des fonctionnaires de la police, de la douane, etc., mais non de n'imporre quel citoyen, fùt-il banquier37•

L'omissiC1n peut également être punissable lorsque le devoir jul'idique d'agir découle d'un devoir de surveillance, en particulier la responsabilité du supérieur hiérarchique qui, par hypothèso, aurait connaissance du fait que des employés

subalterne.~ commenent des actes de blanchissage mais qui ne ferait rien pour les en empêcher'~.

C. ÉLÉMENTS SUBJECTIFS

L'infraction ne contieul aucun élément constitutif subje_ctif: elle n'exige en particulier pas que l'auteur agisse par dessein d'enrichissement· illégitime.

Il s'agit d'une i11frnctio11 inte11tio1111elle. Contrairemenl à ce qu·a,;ait pré\•u l'au- teur de l'avant-projet, la négligence n'est pas t:éprimée. Ber1uise<mi>9 avait souhaité réprimer également la « négJlgence grave», notion qui est pourtant inconnue <lu droit pénal suisse. La commission d'experts a abandonné cette idée, qui a de nouveau été longuement évoquée par les chambres. Celles-ci ont ·cependant renoncé à la réintrodüire, lui préférant la solution de l'art. 305 ter CP qui réprime la violation intentionnelle d'un devoir de vigilance.

En ce qui concerne la co111u1issa11ce de la prove11n11c'1 criminelle des valeurs, la loi reprend une formule employée également à l'art. 144 sur Je recel: l'auteur

« .rnvnit 011 tlevair prés1i111er qu'elles prove11aien1 d'1111 crime».

De même qu'à l'art 144, cette formule ne vise pas la négligence, mais le dol éventuel'°. L'auteur doit donc avoir au moins envï"sagé et acq:pté ln provenance criminelle des valeurs patrimonia!ei;. Ceci dit, l'on ne saurait se montrer trop exi- geant .quant à la précision avec laquelle il doit connaître l'infraction· dont pro- vie1u1e111 les valeurs. Point n'est besoin que l'auteur ait su exaclemcnt <le quelle infraction principale il s'agissait, ui que celte infraction érait qualifiée de crime. Il suffit qu'il ait envisagé et accepté que cette infraction était susceptible d'entraîner une sanction pénale importante.

M cr., en ce qui concerne l'art 305, l'ATF 106 IV 276: le rémoin d'Wle infraction qui refuse de collabore,r avec les autorités pénales en l~ur ,révél•nt l'identili ile l'auteur, ne se reod pas coupable d'une entrave à l'action pénale, car il n'a pas de position de gar3nt; également ATF H7 IV 467:

üaran1ens1elluni: niée pour un pasteur et son épouse chcl qui un fugitif vient se réfugier pour quelques heures. L'ATF 118 IV 309 (ad art. 2.S Cl') a ~galcrncnl nié l'existence d'un devoir juridique d'a~'Îr - ~1

notamment de d~nonccr -dans le cas d'un (onctionnaire travaillant b l'Universilé de Genève qui avail connaissance d'escroqueries et de faux dans les titres commis par un liers. ces actes ne portant toutefois

'J)as aneinte aux intérets pécuniaires confiés au fonctionnaire

1' Grnber, Geldwascherei, p. 137; ScJimid. FSA vol. 8, p. 120: l'organe de contrôle a cependant un devoir de dénoncer l'i11fraclion constatée à la CFB (url. 21 al. 4 LB).

"ATF \l8 IV Jltl; 117 IV 130.

"Rapport c.xplicatif. p. 25.

"'Mcssâgc. 1-'F 1\ll\\111, p. 984.

(17)

Conformément au principe de la concomitance, l'auteur doit avoir connaissan- ce de la provenance délictueuse au momènt où il remplit les éléments constitutifs objectifs de l'infraction. Celui qui commettrait sans le savoir un 1111te·de blan- chissage, et n'apprendrait qu'après coup la provenance délictueuse de l'infraction, ne saurait être accusé d'avoir violé l'art. 305 bis. Ceci dit, tout nouvel acte de blanchissage que l'auteur commettrait sur les mêmes valeurs après avoir eu con- naissance dè l~ur origine criminelle serait évidemment punissable''. Le banquier qui aurait accepté de bonne foi des valeurs en les croyant légitimement acquises et qui, après avoir appris des faits troublants, les verserait sur un autre compte ou permettrait à son client de faire un retrait, pourrait évidemment se voir accuser de blanchissage.

ll e.st d'ailleurs à noter que la COB ne livre pas au banquier qui serait confronté à une telle situatiqn des lignes de· conduite très claires. Alors que l'édi- tion 1987 de la COB (art. 9 al. 3) obligeait encore les banques à rompre les rap- ports contractuels aussi rapidement que possible, la COB actuelle déclare que les rapports contractuels ne doivent pas être rompus si cette rupture constituerait elle-même un acte punissable ou relevant du droit de surveillance (art. 6 al. 4 COB). Le banquier qui n'apprend des faits troublants qu'après avoir accepté les fonds délictueux se trouvera donc confronté à un véritable dilemme, puisque tout nouvel acte sur les valeurs, y compris la rupture des rapports contractuels, pourrait lui être reproché au titre du blanchissage. L'issue de ce dilemme résidera alors

dan~ la communication de ces soupçons aux autorités pénales en leur laissant ainsi la faculté d'ordonner ou non des mesl!res de blocage, solution qui est d'.ores el déjà prévue par la Cîrc.-CFB 9113 sur le blanchiment des capitaux (ch. 7.2) et dont le;: caractère licite est expressément constaté par le projet d'un nouvel art. 305 bis al. 2•2

D. PEINE

Vinfraction de base est punissable de l'emprisonnement ou - alternativement - de l'amende (art. 305 ch. 1 al. 2). Le montant de l'amende est fixé pnr L'art. 48·CP à Fr. 40 000.-, étant précisé qu'en cas de cupidité, le juge n'est pas tenu par. ce plafond (art. 48 ch. 1 al. 2).

E. LE BLANCHISSAGE AGGRAVÉ

,_,e cas aggravé de blanchiss~ge, réprimé à l'nrt. 305 bis .ch. 2, est un crime passible de la réclusion pour 5 ans ·au plus ou de l'emprisonnement.

" la pûnissabili~ de\'TI êlre oite l'auteur es! devenu le propriétaire de bonne Coi des valeurs

patrimoniales. puisque l'objet n'est alors plus soumis à la confl.scallon (Graber, Geldwlscherei, p. 145;

G11ggisberg, Krilische Betcachlungen, p. 58; Scltmid, FSA vol. 8, p. 119).

•J Sur l'admissibilité de celte communication en l'état actuel du droit p~nat, en particulier au regard du secret bancaire garanti par l'art. 47 LB,

cr.

la note 14, wprn. L'AP •k LF rclatlvc à la tutie contre le blanchissage d'argent que le Conseil fédéral a rendu public en janvie'r 1994 prévoit d'inlro·

duirc non pas un droit, mais un devoir de communication du financier (art 8 AP LBA); solution qui est conrorme au droit enropécn (Directive 91/308/CEE).

(18)

La peine privative de liberté est en outre cumulée avec l'amende, dont ie montant maximal est particulièrement élevé, soit Fr. 1 million. C,e. montant corres- pond au maximum prévu pour les cas aggravés en matière de stupéfiants (art.19 ch. 1 al. 9, 2• phrase LStup).

L'art. 305 bis ch. 2 énumère les circonstances aggravantes; cette liste n'est pas exhn11stive.

l. Vauteur agit comme membre d'une organisation criminelle (lit. a)

L'organisation criminelle était jusqu'à présent une notion inconnue du droit pénal suisse. ·

Le message du Conseil fédéral.., définit l'organisation criminelle comme une organisation

composée d'au moins trois perso1111es;

formée pour ~ne certaine période ou pour une durée imlérerminée;

constituée en vue de comme/Ire des crimes;

et dont l'activité comprend les infractions les plltS graves, en particulier des actes de violence criminelle.

Il est à noter, cependant, que le projet de l'art. 260 ter CP concernant la puuissabi- lité de l'organisation criminelle, publié le 30 juin 1993, adopte une définition plus restrictive en décrivant l'organisation criminelle comme «une organisation qui tient sa structure et son effectif secrets et qui poursuit le but de commettre des actes de violence criminels ou de se procurer des revenus par des moyens crinû- nels » (art. 260 ter ch. 1 al. 1 Projet CP). Le message accompagnant ce projet défi- nit l'organisation criminelle comme suit:

Elle est composée d'au moins rrois personnes.

Elle a une «structure solide favorisant des préparatifs objectivement reconnais- sables, entrepris de manière systématique et conformément à un plân».

Ces préparatifs sont de nature à caractériser manifestement cette organisation comme partic11lièreme11t da11gere11se44

La structure et l'effectif de l'organisation sont maintenus seCl'et.1·, autrement dit, cette dernière s'entoure d'une «di:.·sim11/ntio11 qualifiée et systématique que favorisent notamment un haut degré de spécinlismio11 et de division de tâches et qui réserve aux seuls organes suprêmes une vue globale des structures de l'organisation,, 45

Enfin, l'activité ant6rieure de l'organisation doit démontrer qu'elle poursuit le bw de commellre des crimes violents ou de s'enricliir au moyen tlc crimes (vio·

lents or1 non), ce qui n'est pas le cas si l'enriclùssement est simplement un moyen d'atteindre un but différent 46

"'.FF 1989 Il, p. 985.

"Message du 30 juin 1993, FF 1993 Ut 290.

"FF 1993 Til 290.

"FF 1993 Ill 291.

(19)

1

1

. I

1

2. L'auteur agit comme membre d'une bande formée pour se livrer de manière' systématique ou blanclûssage d'argent (lit. b)

Conformément à ce qui est le cas aux art. 137 ch. 2 al. 2 et 139 ch. 2 al. 2, une· bande est formée d'au moins deux a.uteurs agissant à titre principal qui s'unissent avec la volonté de commettre ensemble plusieurs infractions autonomes (ATF 100 IV 220, JT 1975 IV 143; 105 IV 181, JT 1981 IY 7).

La bande doit être formée pour se livrer de mani~re systématique au blan- chissage d'argent, par q11oi il faut entendre, conformément au message du Conseil fédéral47, la. pratique contin11e du blanchissage d'argent.

3. L'auteur réalise un chiffre d'affaires ou un gain important en faisant métier de blanchir de l'argent (lit. c)

Cette circonstance aggravante est déjà connue eu matière de stupéfiants (art.19 ch. 2 lit. c LStup). . '·

Elle se compose de deux él6mcnts cumulatifs: l'autèur agit par métier et réalise ainsi un chiffre d'affaires ou u11 gain importants.

lUI) Le métier

Le métier est une circonstance aggravante classique qui a récemment donné lieu à un revirement de jurisprudence dans le cadre d~s art. 148 ch. 2, 137 ch. 1 bis et 144 al. 3 CP (ATF 116 IV 319, JT 1992 IV 79; ATF 116 IV 335; ATF 117 IV 119, JT 1993 IV 73). Conformément à cette jurisprudence; le métier peut être retenu si les éléments suivants sont réunis:

l'auteur a déjà commis l'infraction à plusieurs reprises;

il a agi d11os l'intention d'en tirer des revenus;

il est prêt à recommen,cer à un nombre ·impo11ant de reprises;

il pratique son activité criminelle à la manière d'une professioo, eu égard au temps qu'il y consacre, de la fréquence de son activité délictueuse et de l'im- portance des revenus qu'il en tife.

bb) Le chiffre d'affaires ou le gain importants

Ces éléments so11t alternatifs: il suffit que le chiffre d'affaires ou le gain soit important. Il se peut que l'auteur réalise des gains importants en blanchissant des sommes modestes, ou, à l'inverse, qu'il tire des gains négligeables du blanchissage de sommes importantes.

Ni la loi, ni le message du Conseil fédéral, ne précisent la manière de détermi-· ner si les gains ou le chiffre d'affaires sont importants. Cette tâche incombera donc à la jurisprudence qui a déjà eu l'occasion d'examiner ces notions dans le contexte de l'art.19 ch. 2 lit. c LStup, où elle s'est d'ailleurs montrée peu encline à formuler des critères d'appréciation48

"FF 198911. p. 986.

4 L'ATF 106 IV 227, JT 1981 IV 144, a laissé la qu~tioo ouverte pour des gains de fr. 1600.-:

l'ATf 117 IV 64 a considéré un chiffre d'affaires de Fr. 110000.-comme impor1ant.

(20)

IV. L'ART. 305 ter CP

L'avant-projet de Bernasconi proposait que le blanchissage soit pénalisé même lorsqu'il était commis par négligence (grave). Cette idée a été écartée au profit de l'introduction de l'art. 305 ter qui. réprime le défaut de vigilance e11 matière d'opéra- tions financières.

Il s'agit d'un délit de mise e11 danger abstrait. La répression porte sur le fait d'accepter des valeurs patrimoniales sans faire les vérifications requises; peu itn- porte, en revanche, que lesdites valeurs patrimoniales proviennent effectivement d'une activité criminelle.

A. L'AUTEUR

L'art. 305 ter constitue un délit propre pur (echres Sonderdelikt): peuvent seules tomber sous le coup de cette disposition les personnes qui dans l'exercice de leur profession acceptent, gardent en dépôt, aident à placer ou à transférer des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers. ·

Cette définition légale est très insatisfaisante, car.n'importe quel commerçant - le marchand de journaux comme la caissiere d'un grand magasin - accepte des valeurs patrimoniales dans l'exercice de sa profession et pourrait donc tomber sous le coup de"I'art. 305 ter s'il fallait s'en tenir à la formulation de la loi.

Or, cette Cormulation est beaucoup trop large. Ainsi que le précise le message du Conseil fédéral, sont seules visées les personnes qui ont une activité dans le secteur financier, parce qu'il s'agit là d'une «branche qui est plus spécialement

exposée aux abus»'9• ·

Sont des personnes qui ont une activité dans le secteur fi1u111cier les personnes qui travaillent dans les banques et les instituts financiers, les fiduciaires, les conseillers en placement, les administrateurs financiers, les agents de change ( money-changers), les marchands de métaux précieux (mais non les bijoutiers) et les avocats d'affaires (soir les avocats qui exercent des activités proches de celles des conseillers en placement ou des fiduciaires, à l'exclusion de ceux qui s'en tiennent aux activités traditionnelles de l'avocat) 50Pour le surplus, le message du Conseil (édéral précise qu'il incombera à la jurisprudence de compléter cette description du champ d'activité de l'auteur51

Par activité professio1111elle, il faut entendre une activité qui procure une source de revenus réguliers et non seulement occasionnels; point n'est besoin, en revanche, qu'il s'agisse de l'activité exclusive de! 'auteur. La délimitation risque d'être délicate, par exemple, pour les avocats qui ont à la fois une activité traditionnelle çl'avocat et une activité d'avocat d'affaires en conseillant leurs clients.dans l'investissement de leurs avoirs .. Quelle doit être la part dévolue aux activités financières pour que l'avocat s'oit considéré comme un professionnel du secteur financier52?

,.FF 198911, p. 988.

"'Message, FF 1989 li, p. 988.

" FI' 1989 Il 988.

"Stratenwerth, Teiltevisionen, § 4, ch. 30, p. !!().

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