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Fonctionnement réflexif de la mère et désorganisation de l'attachement de l'enfant : liens avec la sensibilité et l'orientation mentale maternelle

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Academic year: 2021

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FONCTIONNEMENT RÉFLEXIF DE LA MÈRE ET

DÉSORGANISATION DE L’ATTACHEMENT DE L’ENFANT :

Liens avec la sensibilité et l’orientation mentale maternelle

Thèse

Eva Bérubé-Beaulieu

Doctorat en psychologie – recherche et intervention

Philosophiae doctor (Ph.D.)

Québec, Canada

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Résumé

Depuis les premières observations menant à l’identification de l’attachement désorganisé, plusieurs facteurs pouvant contribuer au développement de ce type d’attachement chez l’enfant ont été étudiés. Environ 15 % des enfants au sein de la population normale présenteraient ce type d’attachement qui a été lié au développement de diverses problématiques à court et à long terme. L'objectif principal de la présente thèse est donc de mieux saisir l’influence de certaines caractéristiques maternelles pouvant influencer la désorganisation de l’attachement de l’enfant, soit le fonctionnement réflexif (FR), l’orientation mentale maternelle (OMM) et la sensibilité de la mère. Pour ce faire, 88 dyades mère-enfant ont été évaluées, et ce, à trois reprises, grâce à l’entrevue d’attachement chez l’adulte (AAI) et à deux situations d’interaction. Dans un premier temps, les analyses acheminatoires réalisées montrent que le lien entre le FR et l’attachement de l’enfant est médié par la sensibilité maternelle. De plus, un effet de médiation est retrouvé entre l’OMM - commentaires appropriés et l’attachement de l’enfant par le biais de la sensibilité. Dans un deuxième temps, deux groupes de mères et leurs enfants partageant des caractéristiques communes ont été identifiés par une analyse de classes latentes. Le premier comprend des mères ayant des caractéristiques identifiées comme « insuffisamment bonnes » puisqu’associées à une plus forte présence d’enfants ayant un attachement désorganisé dans le groupe. Ainsi, on retrouve chez ces mères un faible niveau de FR, de sensibilité maternelle et d’OMM – commentaires appropriés, mais également un faible niveau d’OMM – commentaires inappropriés. Des caractéristiques « suffisamment bonnes » sont retrouvées chez le deuxième groupe de mères qui ont davantage d’enfants ayant un attachement organisé, c’est-à-dire un niveau élevé de FR, de sensibilité maternelle et d’OMM – appropriés, et un niveau faible d’OMM – inappropriés. La présente thèse offre ainsi une vision plus intégrée quant aux facteurs influençant le développement de l’attachement de l’enfant, répondant à certaines critiques d’auteurs actuels dans le domaine quant à la nécessité de synthétiser les données dans la compréhension des relations mère-enfant.

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Table des matières

Résumé ... iii

Liste des tableaux ... ix

Liste des figures ... xi

Liste des abréviations ... xiii

Remerciements ... xv

Chapitre I. Introduction ... 1

La Théorie de l’Attachement ... 1

L’origine au sein de la psychanalyse ... 1

L’éthologie ... 5

La théorie de l’attachement ... 6

Le système comportemental de l’attachement ... 7

Le système de parentage ... 8

Les modèles cognitifs opérants ... 9

La situation étrangère et le système de classification de l’attachement ... 10

L’organisation sécure (B) ... 11

L’organisation évitante (A) ... 12

L’organisation ambivalente (C) ... 12

La désorganisation ... 13

L’étiologie de la désorganisation ... 15

La Sensibilité Maternelle ... 19

Les caractéristiques de la sensibilité maternelle ... 20

Le contexte d’évaluation de la sensibilité maternelle ... 21

La sensibilité maternelle et l’attachement de l’enfant ... 22

La sensibilité maternelle et le développement de l’enfant ... 24

L’Orientation Mentale Maternelle ... 25

L’OMM et l’attachement de l’enfant ... 26

L’OMM et la sensibilité maternelle ... 27

L’OMM, la sensibilité maternelle et l’attachement de l’enfant ... 28

Le Fonctionnement Réflexif ... 29

La mesure du FR ... 31

Le FR et l’attachement de l’enfant ... 32

Le FR et la sensibilité maternelle ... 33

Le FR et l’OMM ... 34

Le FR, l’OMM et la sensibilité maternelle ... 35

Constats au Terme de la Revue de la Littérature ... 37

Objectifs et Hypothèses ... 38

Chapitre II. Méthodologie ... 43

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Procédure ... 46

Première rencontre ... 46

Deuxième rencontre ... 47

Troisième rencontre ... 48

Instruments de mesure ... 48

Adult Attachment Interview (AAI) ... 48

La situation étrangère ... 49

L’échelle de sensibilité maternelle ... 50

La grille de codification des références aux états mentaux ... 51

Analyses ... 52

Chapitre III. Résultats ... 57

Statistiques Descriptives et Analyses Préliminaires ... 57

Statistiques descriptives ... 57

Analyses corrélationnelles ... 58

Analyses Acheminatoires – Premier Objectif ... 59

Effets directs ... 61

Effets indirects ... 62

Analyses des Profils Latents – Deuxième Objectif ... 62

Tests a posteriori ... 66

Chapitre IV. Discussion ... 67

Rappel de la Problématique ... 67

Distribution de l’Attachement de l’Enfant ... 68

Prédiction de l’Attachement de l’Enfant ... 69

Du Fonctionnement Réflexif de la Mère à l’Attachement de l’Enfant ... 69

Association entre le fonctionnement réflexif et la sensibilité maternelle ... 69

Association entre la sensibilité maternelle et l’attachement de l’enfant ... 71

Fonctionnement réflexif de la mère et attachement de l’enfant : médiation par la sensibilité maternelle ... 72

Association entre le Fonctionnement Réflexif de la Mère et l’Orientation Mentale Maternelle ... 74

De l’OMM à l’Attachement de l’Enfant ... 76

OMM - commentaires appropriés et attachement de l’enfant : médiation par la sensibilité maternelle ... 76

Orientation mentale maternelle - commentaires inappropriés, sensibilité maternelle et attachement de l’enfant ... 77

Constat Général du Modèle Acheminatoire ... 78

Constats à la Suite de l’Analyse de Classes Latentes ... 78

Caractéristiques de la classe 1 ... 79

Caractéristiques de la classe 2 ... 81

Considérations Méthodologiques, Limites et Suggestions pour des Recherches Futures ... 82

Contexte d’évaluation ... 83

Cotation de l’OMM ... 84

Caractéristiques de l’échantillon ... 84

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Caractéristiques de l’enfant ... 85

Implications Cliniques ... 87

Conclusion ... 91

Bibliographie ... 93

Annexe A. Situation étrangère ... 109

Annexe B. Tableau 4 ... 111

Annexe C. Tableau 5 ... 113

Annexe D. Formulaire de consentement ... 115

Annexe E. Formulaire de consentement relatif à l’autorité parentale ... 119

Annexe F. Adult Attachement Interview (AAI) ... 121

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Liste des tableaux

Tableau

1 Indices de comportements désorganisés (Main & Solomon, 1990) ... 14

2 Moyennes, écarts-types et différences de groupe aux scores de fonctionnement réflexif, de sensibilité maternelle et de l’orientation mentale maternelle selon

l’attachement de l’enfant ... 58

3 Résumé des corrélations entre le fonctionnement réflexif, la sensibilité maternelle, l’orientation mentale maternelle et l’attachement de l’enfant ... 59

4 Statistiques descriptives des dyades mère-enfant, selon la présence d’un trauma familial dans l’histoire de vie de la mère ... 111

5 Moyennes et écarts-types des scores de fonctionnement réflexif, de sensibilité maternelle et de l’orientation mentale maternelle selon la présence d’un trauma familial dans l’histoire de vie de la mère ... 113

6 Indices de qualité d’ajustement selon le nombre de classes latentes ... 129

7 Moyennes et écarts-types des scores de fonctionnement réflexif et de sensibilité maternelle et proportion d’appartenance pour l’orientation mentale maternelle et l’attachement de l’enfant, selon chaque classe latente ... 130

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Liste des figures

Figure

1 Modèle acheminatoire original ... 41

2 Coefficients de régression standardisés (β) des variables dépendantes continues et rapport de chance (RC) pour les variables dépendantes catégorielles (N = 95;

R2 = .28) ... 61

3 Scores moyens aux mesures de fonctionnement réflexif et de sensibilité maternelle pour chacune des classes latentes ... 63

4 Pourcentage (%) de mères ayant émis un nombre faible et élevé de commentaires appropriés et inappropriés sur les états mentaux de leur enfant, selon chaque

classe ... 64

5 Pourcentage (%) d’enfants ayant un attachement organisé et désorganisé, selon chaque classe latente ... 65

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Liste des abréviations

A ... Attachement de l'enfant de type évitant AAI ... Entrevue d'attachement chez l’adulte (Adult Attachment Interview) B ... Attachement de l'enfant de type sécurisé C ... Attachement de l'enfant de type ambivalent D ... Attachement de l'enfant de type désorganisé FR ... Fonctionnement réflexif GC ... Groupe contrôle GT ... Groupe de mères ayant vécu un trauma intrafamilial OMM ... Orientation mentale maternelle PDI ... Parental Developmental Interview

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Remerciements

Le long chemin parcouru pour en arriver à l’achèvement de ma thèse n’aurait pas été possible sans la présence et le soutien de bien des gens. Tout d’abord, je tiens à souligner la contribution financière du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), laquelle m'a permis de réaliser ces études. Un énorme merci également à toutes ces mères qui ont participé à cette recherche dans un désir de participer au développement des connaissances dans le domaine de l’attachement de l’enfant. Sans vous, aucune ligne des prochaines pages n’aurait été écrite puisque vous êtes l’essence même de ce travail.

Je tiens à remercier les Drs George Tarabulsy et Catherine Herba d’avoir participé au processus final d’évaluation de ma thèse et d’avoir pris ce temps pour l’enrichir par leurs commentaires. Par vos réflexions, vous m’avez transmis toute votre passion pour ce domaine de la recherche et ainsi permis d’améliorer le résultat final. Un merci également à Dr Stéphane Sabourin, qui a fait partie de mon comité de thèse depuis le tout début, et qui m’a toujours appuyée. Je veux aussi remercier Dre Lina Normandin qui, depuis le début de ce processus, m’a suivie dans ce projet. Vos questionnements quant à certains aspects touchant le domaine clinique ont été grandement appréciés et m’ont toujours menée à pousser plus loin ma réflexion.

Je souhaite également remercier ma directrice de recherche, Dre Karin Ensink, pour, tout d’abord, m’avoir introduite au sein de l’équipe de votre laboratoire. En effet, avant mon admission au doctorat, j’avais « flirté » avec le domaine du sommeil et des neurosciences. Toutefois, j’avais toujours imaginé que ma carrière allait évoluer auprès des enfants. Mon arrivée au sein du laboratoire et mon évolution au cours des années passées au doctorat m’ont confirmé que ma place était bien dans ce domaine, où je m’épanouis à tous les jours. Je vous remercie également de m’avoir permis d’évoluer au sein de cette recherche auprès des mères et des enfants. Je l’ai toujours dit : j’adore ma thèse! Bien qu’elle m’ait parfois fait pleurer et rager, ce fut un réel plaisir de lire tous ces articles, de rédiger toutes ces lignes et de réfléchir avec vous aux relations mère-enfant au cours de ces années. Vous m’avez partagé votre passion et votre expertise sur le fonctionnement réflexif et la relation

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mère-enfant, ce dont je vous suis très reconnaissante. Merci également pour votre soutien au cours des dernières étapes qui ont été parfois plus laborieuses.

À tous mes collègues du laboratoire : sachez que j’ai été charmée dès la première fois où je suis entrée dans le local du 12e étage, à vous voir discuter de cas cliniques avec passion. J’ai toujours senti votre présence comme un réel soutien, comme si je faisais partie d’une famille où chacun pouvait compter l’un sur l’autre. J’ai passé tellement de beaux moments avec vous à rire, à pleurer de rire et parfois même à pleurer parce que je m’étais fait mal… Certains comprendront! Vous avez été les meilleurs compagnons que je pouvais avoir pour passer à travers toutes ces années de dur labeur. Ce fut un réel bonheur d’être auprès de vous, et je vous serai éternellement reconnaissante pour tout cela. J’ai également commencé mon doctorat avec mes deux mousquetaires, Marie-Ève et Annie. Nous avons évolué ensemble à travers tout ce processus, à partager des grandes étapes et des grands moments. Je considère être arrivée dans la bonne année, puisque je vous ai rencontrées! Ce doctorat n’aurait jamais été ce qu’il a été sans vous. Un merci également à mon équipe de recherche dirigée : Catherine C., que j’aimais si bien appeler ma « bénélove », Catherine N. et Carole-Anne. Par votre arrivée dans le projet, vous m’avez insufflé un élan positif qui m’a donné une force pour continuer. Je tiens aussi à remercier mes collègues de premiers stages et maintenant amies, Paule et Christine. Christine, on s’est connues il y a maintenant presque huit ans alors qu’on faisait de la saisie de données de façon compulsive. Ton rire, tes blagues, ton optimiste, ont toujours réussi à me rendre heureuse. On va se le dire : on a été une équipe du tonnerre au cours des années! Et toi Paule, par ta force, tu m’as toujours impressionnée. Votre amitié sera toujours précieuse pour moi.

À la gang de « l’asso » : Mathieu, Simon, Marie-Audrey et Marie-Ève. On s’est adoptés au cours d’une AG qui nous a liés pour quelques années. Bien que nous étions réunis pour travailler, nous avons eu un réel plaisir à partager ces tâches ensemble. Je n’oublierai jamais l’équipe d’enfer que nous étions pour organiser les partys et les moments incroyables que nous avons vécus. Une amitié profonde s’est établie entre nous que je souhaite conserver.

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Depuis maintenant deux ans, j’ai intégré une merveilleuse équipe de psychologues au Centre jeunesse de Québec. Rosée et Béatrice : c’est avec grand plaisir que j’espère continuer à travailler avec vous auprès de ces enfants et familles. J’ai aussi un merci tout spécial à faire, à ceux que j’aime bien nommer « les gars ». Christophe, mon français préféré, avec qui c’est toujours un réel bonheur de partager les discussions sur notre pratique clinique. Et Jean, clinicien que j’admire, auprès de qui je vais souvent chercher conseil. Bien que vous me reprochiez de vous rendre bien plus bavards que vous croyez l’être, je tiens à vous remercier pour toutes ces discussions que nous avons eues, car ce fut pour moi un réel plaisir. Au cours du développement de ma pratique clinique, j’ai eu la chance d’avoir comme superviseur un homme que je respecte et admire énormément. Alain, tu as été et seras toujours ma référence et mon point d’appui dans ma pratique clinique. Ta confiance envers moi m’a permis de me développer, tant cliniquement que personnellement. Cet accueil que tu m’as offert, sans jugement, je t’en serai éternellement reconnaissante.

Depuis maintenant tellement d’années, j’ai également eu la chance d’être entourée de merveilleux amis. Cassandre, je crois ne pas t’avoir assez dit merci pour être ce que tu es. Ta force tranquille est quelque chose qui me réconfortera toujours. Ces années passées auprès de toi, à partager diverses passions et de nombreux moments de bonheur, ont rendu ma vie tellement plus belle et riche. Et toi, Pierre-Luc : ta joie de vivre contagieuse et tes moments de folie sont pour moi tellement précieux. À ta façon, tu as su me rendre heureuse dans les moments les plus difficiles. Avoir pu compter sur vous à travers toutes ces années est inestimable. Vous avez accepté mes absences, mes humeurs plus difficiles et mes préoccupations, sans juger et en restant toujours là pour moi. Merci de tout mon cœur!

Et maintenant, ma famille. Merci à mes oncles et mes tantes que j’adore : Rachou, Yvon, Réjean et Carole. Que serais-je sans vous, sans votre amour infini et votre présence inébranlable? Vous avez accepté sans juger mes absences et avez été au rendez-vous dans les moments importants de ma vie. Quoi demander de plus? Grand-maman, ton absence lors de ma soutenance est à l’opposé de toute la présence que tu as su montrer envers moi au cours de ces nombreuses années. Je sais comment tu tenais à être présente et j’espère au

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plus profond de mon cœur que tu iras pour le mieux. Saches que tu m’as toujours donné la plus belle chose qu’une petite-fille pouvait recevoir : un regard toujours rempli de fierté et d’amour. À mes frères et sœurs, qui avez fait preuve de tant de compréhension et qui vous êtes souvent ajustés à mes horaires et contraintes de temps, je ne peux que vous dire merci. Je suis assurément la sœur la plus choyée. Cette force qui nous unit m’a toujours rendue moi-même plus forte. Vous savez, j’ai été bien malheureuse pour tous ces moments où j’ai dû m’absenter pour poursuivre mes études mais, ce qui m’a toujours impressionné, c’est que vous n’avez jamais exprimé de frustrations face à cela, que de l’acceptation pure. Merci! Maintenant, un nouveau chapitre débute dans notre vie de famille : l’arrivée de deux merveilleuses « cocottes », Loulou et Chloé. Elles me confirment à toutes les fois que je les vois ce pourquoi j’ai choisi le travail avec les enfants. Un merci aussi à Anny, qui a été une des premières sources d’inspiration quant à mon avenir professionnel. À l’âge de 15 ans, j’avais décidé que je voulais devenir psychologue. Et me voilà maintenant, à l’aube de l’exercice de cette profession, sans jamais avoir douté que je voulais faire ce métier. Une partie de moi se souvient bien que c’est en partie grâce à toi, Anny, si j’ai décidé de faire ce métier.

Et maintenant, je tiens du plus profond de mon cœur à remercier mes parents. Chose certaine, votre passion pour le développement des enfants, vous me l’avez transmise. Et peut-être même trop, lorsqu’on voit le nombre d’années d’études que j’ai passé! Papa, ton amour infini pour nous, tes enfants, est la plus belle chose que tu m’aies donnée. J’ai toujours eu le sentiment que j’aurais pu faire n’importe quoi dans ma vie, que tu aurais été présent pour me soutenir. Et bien, voilà! Ça a donné une docteure finalement! Merci pour toutes les petites attentions que tu as envers moi, comme pour toujours t’assurer que je ne manque de rien. Ton accueil inébranlable et ton écoute sont inestimables. Maman, c’était toi qui me disais, lorsqu’on parlait de mon avenir, « ouvre toutes les portes que tu peux ouvrir ». Je pense que je les ai pas mal toutes ouvertes maintenant, grâce à toi! Ta force de caractère et ta volonté m’ont toujours impressionné et, évidemment, inspiré. J’ai toujours eu le sentiment que tu avais confiance en moi, et c’est ce qui m’a poussé à continuer mes projets. Merci d’avoir été là à tous les moments, même les plus difficiles.

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Le doctorat m’aura permis une autre chose merveilleuse : te rencontrer toi, mon amie Marie-Ève. Si on m’avait dit, lorsqu’on s’est rencontrées la première fois, qu’on développerait une amitié aussi riche qu’est la nôtre, jamais je ne l’aurais cru. Au cours de ces années d’études, nous nous sommes appuyées l’une contre l’autre pour faire face aux épreuves qui se présentaient à nous. La force qui nous unit m’a toujours rendue plus forte et m’a permis, à bien des moments, de remonter mes manches alors que je pensais laisser tomber la serviette. Nous avons vécu une tonne d’émotions ensemble, des plus plaisantes aux plus difficiles. La « fonction contenante », tu en es la championne avec moi! Merci, mon amie d’être tout ce que tu es : un brin de folie, ou comme j’aime si bien t’appeler : « un Ça sur deux pattes », avec une touche de sensibilité, combinée à une force intérieure incroyable et une dévotion infinie. Tu es une amie incroyable comme je souhaite à chacun. Maintenant, l’avenir nous appartient et je sais qu’il sera encore plus beau en ta compagnie.

Enfin, mon amour, je ne sais pas si tu savais dans quoi tu t’embarquais lors de notre rencontre. Probablement que tu ne t’imaginais pas autant de périples à mes côtés. Nous avons traversé non pas un long fleuve tranquille, mais une mer qui nous a réservé ses surprises et ses défis, avec des tempêtes qui pouvaient surgir après les périodes de calme. Et toi, tu as maintenu le cap, fort à mes côtés. Ces années d’études nous ont amenés à faire des sacrifices, compromis et choix pour notre couple et notre avenir. Je suis tellement fière de nous, d’être rendus où l’on est. Tu as été le meilleur acolyte que je pouvais avoir pour partager ces années d’études : toujours compréhensif, patient, sans jamais me faire de pression ou me montrer de ressentiment face à cette situation. Tu m’as supportée à toutes les étapes, devant mes découragements, mes angoisses qui me figeaient. Sans toi, cette thèse ne serait pas ce qu’elle est. Dans le dernier tournant pour la soutenance, tu as été d’un soutien incroyable, et je sais que tu y as mis toutes tes énergies pour que l’on puisse enfin passer à une autre étape. Je me dois aussi de remercier aussi ta maman Josée, pour sa compréhension sans borne et sa générosité. Et avec ta rencontre, venait aussi des amis, un merveilleux groupe d’amis que j’ai appris à connaitre et à aimer au fil de ces années. Jérémie et Émilie, Mélodie et Vincent, Azade et Isabelle, Simon et Martine : je vous remercie pour tous ces moments de plaisir et de bonheur qu’on a passé ensemble. Être avec vous m’a bien souvent été d’un grand réconfort et d’un soutien incroyable.

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Merci à tous, c’est la fin d’un merveilleux chapitre de ma vie, et le début d’un nouveau auprès de vous tous que j’aime tant!

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Chapitre I.

Introduction

La Théorie de l’Attachement L’origine au sein de la psychanalyse

Plusieurs grands psychanalystes ont porté, dans leurs écrits, un regard sur la relation mère-enfant. Selon les différentes écoles de pensée, certains auteurs ont accordé un degré d’importance différent à la mère et à certains éléments contextuels dans le développement de l’enfant. Bien que la relation mère-enfant soit toujours d’actualité dans la recherche en psychologie, les origines de ces réflexions prennent racine dans la psychanalyse par l’entremise d’auteurs qui ont réfléchi au développement psychologique de l’enfant dans sa relation avec la mère.

Sigmund Freud, pionnier de la psychanalyse, s’est peu attardé aux comportements concrets de la mère auprès du nourrisson et de leurs conséquences sur son développement. Néanmoins, il considère la relation de l’enfant avec sa mère comme étant unique et immuable, de sorte qu’elle s’avère le prototype de toutes les relations d’amour ultérieures (Freud, 1938). Une génération plus tard, Anna Freud (1954) insistait sur le caractère quasi-accessoire de la mère et la décrivait comme n’étant qu’une intermédiaire entre le besoin de l’enfant et la satisfaction de sa pulsion. Selon cette vision, l’investissement libidinal sous-jacent à la relation d’attachement est associé à la satisfaction et à la décharge pulsionnelle, non pas à la considération de la mère comme objet d’amour par l’enfant (Freud, 1954). Elle décrit d’ailleurs que c’est par l’expérience répétée de la satisfaction de ses besoins primaires que l’enfant porte moins attention à son propre corps et s’oriente davantage vers les personnes du monde extérieur responsables de la satisfaction de ses besoins (Freud & Burlingham, 1944). Enfin, Anna Freud fut l’une des premières à adopter une perspective développementale dans la compréhension des psychopathologies infantiles (Fonagy, 2004). L’influence de cette dyade sur le développement de l’enfant est ainsi considérée dans sa conception de la relation mère-enfant.

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À la même époque, René Spitz, médecin et psychanalyste viennois, a développé une théorie élaborée autour de stades développementaux au cœur de laquelle une place très importante est accordée à la mère et à son rôle spécifique dans les interactions mère-enfant (Spitz, 1945, 1965). Selon lui, la mère serait en quelque sorte un « accélérateur » du développement des différentes capacités déjà présentes chez l’enfant. De plus, il considère la figure maternelle comme un élément-clé dans le développement de la régulation émotionnelle de l’enfant. En effet, Spitz (1945) a été un des premiers auteurs à souligner l’importance de l’expression émotionnelle de la mère pour l’enfant afin d’apporter à ce dernier réconfort et contenance. Il affirme d’ailleurs que la réaction émotionnelle de la mère permet à l’enfant d’évaluer s’il est en sécurité et que l’exposition répétée aux affects de la mère lui permettra à son tour d’intérioriser ses propres réactions émotionnelles et d’évaluer par lui-même s’il est en sécurité ou en danger. Ainsi, les travaux de Spitz et de ses successeurs ont permis de promouvoir l’idée que la régulation des affects assure une fonction développementale clé du système d’attachement (Emde, 1980; Fonagy, 2004).

L’apport d’Éric Erikson va également dans le même sens et touche davantage l’angle transactionnel de la dyade mère-enfant, laquelle permet, selon lui, le développement d’un sentiment de soi chez l’enfant. Le concept d’Erikson (1950) le plus intimement lié à la théorie de l’attachement est celui de la confiance de base, qu’il définit comme étant la capacité à recevoir et à accepter ce qui est donné. Selon lui, le niveau de confiance de l’enfant trouve sa source dans les relations infantiles précoces et serait tributaire de la qualité de la relation à la mère plutôt que de la quantité de manifestations d’amour ou de nourriture (Erikson, 1959). Cette confiance de base se développerait donc au sein de la relation mère-enfant et serait basée sur la capacité de l’enfant à développer une vision cohérente de la personne qui s’occupe de lui, c’est-à-dire une personne en qui il peut avoir confiance et qui répond à ses besoins à la fois physiques et affectifs d’une manière qui est prévisible pour lui (Erikson, 1964). À travers ses écrits, Erikson identifie également l’importance de la stimulation modérée, de la régulation réciproque ou mutuelle et de l’état non intrusif du parent dans la relation avec son enfant (Fonagy, 2004).

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Quelques années plus tard, les idées de Donald Winnicott, pédiatre, psychiatre et psychanalyste anglais, sont venues orienter davantage la vision de la relation mère-enfant telle qu’on la conçoit toujours aujourd’hui. Pour cet auteur, le développement de l’enfant et la construction de son monde interne dépendrait de la présence d’un environnement suffisamment bon, donc imparfait, mais adapté à ses besoins. Winnicott (1962) souligne d’ailleurs l’importance que l’enfant soit, dans les premières semaines de sa vie, confronté le moins possible aux difficultés d’adaptation de la mère lors de leurs interactions et que cette dernière s’adapte aux besoins du nourrisson d’une manière sensible. Une adaptation presque parfaite de la mère à l’enfant serait alors nécessaire pour qu’il puisse acquérir suffisamment d’expériences de toute-puissance, lesquelles sont nécessaires selon lui à la formation du moi. Ce que Winnicott (1969) appelle la « préoccupation maternelle primaire » entretiendrait l’illusion, chez le nourrisson, que cette mère, en parfait accord avec lui, est en fait sa propre création et qu’elle serait même une partie de lui. Cependant, selon Winnicott, des intrusions seront présentes tôt ou tard et viendront tranquillement réduire le sentiment de toute-puissance chez le nourrisson et le sortiront de l’état de symbiose initialement présent. Ce serait donc par l’entremise de soins suffisamment bons que l’enfant en viendrait à perdre cette omnipotence, laquelle s’avère une étape permettant le développement normal du moi (Winnicott, 1962).

Dans ses écrits, Winnicott (1956) décrit un système à double direction qui existerait entre le regard de la mère et de son nourrisson. Reprenant en quelque sorte les idées de Spitz, Winnicott (1962) soutient que le nourrisson serait dépendant de la capacité de la mère à percevoir et à répondre à ses besoins et intentions pour en arriver à intégrer les pulsions qui l’envahissent. Il décrit que la mère se doit donc d’être le miroir des états internes de l’enfant en lui retournant cet affect de façon modulée, ce qui lui permettrait de faire face à ce sentiment qui l’envahit. Pour Winnicott (1956), une mère sensible est perçue comme réconfortante par l’enfant lorsqu’elle combine à la fois une réponse en résonance émotionnelle avec ce qu’il vit à celle qui exprime un affect contradictoire, mais sécurisant pour lui.

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Les théories de Mélanie Klein, psychanalyste britannique, se concentrent notamment sur les pulsions orales de l’enfant et postulent un désir inné du sein de la mère. Selon elle, la première relation d’objet est celle avec le « bon » et le « mauvais » sein. Ainsi, la gratification obtenue par le « bon » sein génèrerait un sentiment de sécurité chez l’enfant, semblable à celui vécu alors qu’il était encore dans le ventre de sa mère (Klein, Heimann, Isaacs, & Rivière, 1952). Ces idées sont le prélude à celles de Wilfred Bion qui, quelques années plus tard, a jeté un éclairage nouveau sur la réciprocité des interactions mère-enfant en introduisant l’importance de la fonction contenante chez la mère (Bion, 1962). Dans sa conceptualisation, le nourrisson serait envahi par divers stimuli qu’il n’est pas en mesure de comprendre et auxquels il n’arrive pas à donner un sens. Conséquemment, par l’entremise du mécanisme d’identification projective, l’enfant serait porté à communiquer avec la mère de façon à éveiller chez elle les sentiments dont il désire être débarrassé (Bion, 1962). Le rôle de la mère serait donc de donner un sens à ces expériences en acceptant les affects intenses de l’enfant et en y répondant émotionnellement et physiquement de façon à ce que les sentiments impossibles à gérer pour lui deviennent plus tolérables (Bion, 1967). Dans ce contexte, la mère se doit d’être le miroir des affects de l’enfant et de lui refléter cette expérience affective par des signaux émotionnels qui lui indiqueront que l’affect est « contenu ». Ces projections de la mère rendent donc l’expérience plus acceptable pour l’enfant et pourra être intériorisée sous la forme d’une représentation supportable de ces moments d’interaction avec elle. Ultimement, une intériorisation de cette modulation sera possible chez l’enfant, lui permettant ainsi de réguler lui-même ses propres états affectifs (Bion, 1967).

Un échec du donneur de soins à contenir les sentiments envahissants du nourrisson par l’intermédiaire de la reconnaissance et de la réflexion serait d’ailleurs source du développement d’un soi morcelé et incohérent de même que d’une mauvaise régulation des émotions (Bion, 1967). Par exemple, une mère peut être détachée du vécu affectif de son nourrisson par son incapacité à se représenter l’état mental de ce dernier, ou encore parce que la détresse de celui-ci évoque en elle des expériences douloureuses qui l’empêchent de réfléchir (Fonagy, 2004). À l’autre bout du continuum, une mère peut être envahie par les affects de l’enfant et lui renvoyer un message de détresse étant donné sa préoccupation trop

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forte pour sa propre expérience interne. Dans ces contextes, l’enfant ne serait pas en mesure de bénéficier d’une compréhension externe de son expérience subjective et n’arriverait pas à donner lui-même un sens aux affects qui l’envahiront (Bion, 1967). De grandes difficultés à identifier, à tolérer et, ultimement, à réguler son expérience émotionnelle pourraient conséquemment se développer. Ainsi, selon Winnicott et Bion, l’expérience par l’enfant de son propre monde interne à travers le regard de sa mère permettra également la formation d’un sentiment de sécurité chez lui.

Ces décennies de réflexion et d’élaboration de théories psychanalytiques à propos de la dyade mère-enfant ont mis en lumière le rôle crucial joué par cette relation sur le développement de l’être humain. Parallèlement à ces idées, des auteurs se sont également intéressés aux réflexes primitifs dans la relation entre une mère et son enfant mais, cette fois, chez les animaux.

L’éthologie

C’est par l’étude du comportement animal que l’éthologie a su offrir une vision différente, mais complémentaire, à celle des psychanalystes quant à la relation d’attachement entre une mère et son enfant. Selon ce champ d’étude, l’attachement permet une proximité avec toute figure qui se veut protectrice et qui aidera le nouveau-né à se protéger des dangers présents dans l’environnement. Le lien entre deux individus est donc vu comme étant nécessaire à la survie. Cette idée a d’ailleurs été appuyée par l’étude du phénomène « d’empreinte » par Konrad Lorenz (1937) qui montrait l’aspect instinctif de la conduite des oisillons, lesquels devenaient « attachés » à la première figure rencontrée. En effet, certains oisillons qui avaient aperçu Lorenz à la sortie de leur œuf avaient l’habitude de le suivre constamment et ce, malgré le retour de leur mère biologique. Ainsi, il vit dans ces comportements une forme d’empreinte laissée par le premier objet en contact avec l’animal naissant et une façon de maintenir proximité avec la figure la plus susceptible d’assurer sa survie, c’est-à-dire celle présente dès sa naissance.

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La recherche de proximité, non seulement pour assurer la survie, mais également pour y trouver une forme de réconfort, a été observée quelques années plus tard par Harlow (1958) dans son étude auprès de singes rhésus. Alors que l’on séparait de jeunes singes de leur mère, deux mères substituts leur étaient offertes. La première était en métal et fournissait de la nourriture alors que la deuxième n’offrait rien d’autre qu’un côté plus chaleureux par sa texture de fourrure. Devant ces deux mères, les bébés singes choisirent d’aller chercher réponse au besoin physiologique de se nourrir auprès de la mère substitut en métal, mais passèrent la majorité de leur temps auprès de celle plus chaleureuse physiquement. Bien que les comportements de ces animaux fussent tout d’abord orientés vers la survie en cherchant réponse à leur besoin de base, les travaux d’Harlow soulignent toute l’ampleur de la recherche d’une certaine forme de sécurité affective et de réconfort auprès des figures maternelles.

La théorie de l’attachement

Bien qu’il reprochait aux psychanalystes de s’intéresser principalement aux processus internes, d’utiliser une méthode de recherche rétrospective, mais surtout de réduire la création du lien d’attachement à une pulsion primaire basée sur la satisfaction des besoins oraux et physiques, John Bowlby, psychiatre et psychanalyste anglais, a intégré certains apports de la psychanalyse et de l’éthologie pour développer, au milieu du 20e siècle, la théorie de l’attachement (Fonagy, 2004). Selon Bowlby (1969), une perspective évolutionniste doit être utilisée dans l’étude de la relation mère-enfant puisque les objectifs ultimes de l’ensemble des êtres vivants sont la survie et l’évolution de leur espèce. L’attachement aurait ainsi une fonction biologique de protection de l’enfant, amenant ce dernier à rechercher la proximité des parents en situation de stress. Ainsi, lorsque l’enfant demeure près de sa mère, il est alors moins exposé à des risques, augmentant par le fait même ses chances de survie (Bowlby, 1969). Les travaux de Bowlby s’appuient sur une méthode d’observation de la dyade mère-enfant lors d’une situation particulière alors que les enfants sont séparés de leur mère. À ce moment, il s’intéressait à la détresse qui avait été provoquée chez les enfants par cette séparation puisqu’elle permettait de mieux comprendre le lien mère-enfant et ainsi évaluer les conséquences possibles sur le développement de l’enfant.

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Le système comportemental de l’attachement. Selon Bowlby (1969), l’enfant possèderait à sa naissance des stratégies lui permettant d’assurer sa survie, ce qui formerait le système comportemental de l’attachement. Ce système serait plus fortement activé lorsque l’enfant perçoit des signes de danger réel ou potentiel, tels que la présence d’éléments inconnus, les sensations de fatigue et de faim ou lorsqu’il est malade ou blessé (Bowlby, 1969, 1987). À l’intérieur de ce système, deux catégories de comportements permettraient d’assurer la proximité de l’enfant à sa mère. La première réfère aux comportements de signal alors que l’enfant tente de capter l’attention de sa mère pour être en interaction avec elle (sourires, babillages, cris, pleurs, pointage). Le résultat de ces comportements est alors un rapprochement de la mère de son enfant. La deuxième catégorie réfère aux comportements d’approche (p. ex. se diriger vers la mère ou la suivre), lesquels ont pour conséquence, à l’inverse de la première catégorie, de mener l’enfant vers sa mère. Ce système comportemental d’attachement permet donc à l’enfant d’augmenter la proximité avec la figure d’attachement et ainsi d’y trouver réconfort. Les systèmes d’exploration et de peur sont également des composantes associées au système comportemental d’attachement. Ces deux systèmes feront l’objet d’une description dans les sections suivantes.

L’exploration de son environnement aurait une fonction de survie pour l’enfant. Elle lui permettrait de mieux le comprendre, ainsi que les interactions qui y ont cours (Bowlby, 1969). L’enfant pourrait ensuite appliquer à nouveau cette compréhension lorsque des éléments nouveaux ou similaires se produiraient dans l’environnement. Toutefois, il ne peut effectuer cette exploration de façon autonome que lorsque la figure d’attachement représente pour lui une base sécurisante, un endroit pour s’y réfugier en cas de besoin (Ainsworth, Blehar, Waters, & Wall, 1978; Bowlby, 1969). Ainsi, tant la présence de la mère que le sentiment chez l’enfant que cette dernière sera disponible en cas de besoin constituent des éléments nécessaires pour favoriser l’exploration de son environnement (Ainsworth & Bell, 1970; Bowlby, 1973; Sorce & Emde, 1981).

La présence de la mère aurait aussi un important rôle à jouer lorsque le système comportemental de la peur est activé chez l’enfant. À ce moment, ce dernier cherchera à

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être près de sa mère pour obtenir protection. Pour Bowlby (1969), cette réaction de peur aurait pour fonction la protection de l’intégrité de l’individu, et serait donc biologiquement adaptée. Ainsi, l’enfant se retrouve moins vulnérable face à la peur lorsque la mère représente pour lui une base sécurisante, que sa présence soit réelle ou imaginée (Sorce & Emde, 1981).

L’interaction entre ces trois systèmes comportementaux (attachement, exploration et peur) permettra une réponse de l’enfant qui sera adaptée à la situation à laquelle il doit faire face. De fait, la réaction de l’enfant sera différente selon les caractéristiques de l’environnement et la disponibilité de la mère, tout en ayant pour but de maintenir une proximité avec cette dernière (Bowlby, 1973). Dans un environnement inconnu, éloigné de la mère, l’enfant aura plutôt tendance à diminuer son exploration. À l’inverse, lorsque l’enfant a la certitude que sa mère sera disponible en cas de besoin, il aura une plus forte tendance à explorer, ce qui est d’autant plus juste lorsque l’environnement lui est familier (Ainsworth & Wittig, 1969). Ainsi, chacun des systèmes offre à l’enfant des informations qui lui permettent d’adapter ses comportements à une situation donnée.

Le système de parentage. Les comportements de la mère en réponse aux comportements d’attachement de l’enfant sont d’une grande importance quant à la qualité du développement de l’attachement de ce dernier. Selon Bowlby (1969, 1973), le système de parentage serait simultanément activé au système d’attachement de l’enfant, notamment lorsque la mère perçoit une situation inquiétante, dangereuse ou stressante pour son enfant. Ce système aurait également une fonction adaptative, c’est-à-dire d’assurer la protection et les soins à l’enfant (George & Solomon, 2008). Une fois le système activé, la mère doit alors évaluer la situation à partir des différents indices perçus et déterminer les comportements les plus appropriés à adopter afin d’assurer la protection et la sécurité de l’enfant. Les comportements peuvent alors être de maintenir une proximité, de prendre ou suivre l’enfant, de lui signaler de la suivre, de l’appeler, de le regarder ou même de lui sourire. Tous ces comportements visent à assurer la proximité, les soins et le confort à l’enfant (George & Solomon, 2008) et contribuent au développement de l’attachement.

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Les modèles cognitifs opérants. La relation mère-enfant se construit avec les réactions de la mère en cas de dangers réels ou pressentis par l’enfant. Ce dernier en vient à construire graduellement un ensemble d’attentes en fonction de l’accessibilité et du degré de réponse de la mère lors de ses expériences de détresse, ce que l’on identifie dans la littérature comme étant des modèles cognitifs opérants (internal working models). Dans ses interactions avec sa mère, l’enfant développe des représentations mentales de soi, de sa figure d’attachement et de sa relation avec cette figure (Bowlby, 1969).

Deux éléments seraient essentiels au développement du modèle de soi chez l’enfant, soit la perception d’être accepté et de pouvoir obtenir l’affection de la part de la figure d’attachement. Pour ce qui est de la représentation qu’il pourra développer de cette figure d’attachement, ce serait alors son accessibilité et sa capacité à offrir le soutien émotif à l’enfant qui seraient importants (Bowlby, 1973). Main, Kaplan et Cassidy (1985) proposent une compréhension plus nuancée du modèle cognitif opérant en insistant sur le fait qu’il n’est pas une image objective de soi et de la figure d’attachement, mais plutôt une représentation généralisée des réponses passées de la figure d’attachement aux signaux de détresse et du besoin de proximité manifestés par l’enfant envers cette figure. Ces représentations mentales, qui se développent au cours des premiers mois de la vie de l’enfant, lui permettraient d’anticiper, d’interpréter et d’être guidé dans ses interactions. Ainsi, elles seraient à la base même des relations que l’enfant développera tout au long de la vie, étant à l’origine des sentiments, pensées et comportements qu’il aura envers les autres (Bowlby, 1969).

Dans sa théorie, Bowlby stipule que ces modèles cognitifs opérants pourraient se modifier en réponse aux changements dans l’environnement et ce, dès l’enfance. Bowlby (1980) mentionne que lorsque les modèles existants entrent en contradiction avec une situation nouvelle, rendant difficile l’interprétation des relations, un ajustement des modèles cognitifs opérants pourrait être effectué. Cependant, cette transformation serait complexe puisque les attentes associées aux modèles cognitifs sont caractérisées comme étant plutôt conservatrices étant donné que l’interprétation des nouvelles expériences s’effectue en fonction des expériences précédentes (Bowlby, 1980).

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Ainsi, les différences individuelles sur le plan des modèles cognitifs opérants s’organisent à partir de patrons habituels de réponse de la figure d’attachement aux besoins de réconfort et de sécurité de leur enfant (Main et al., 1985). Il est possible d’observer globalement trois types de réponse chez la figure d’attachement : (1) permettre à l’enfant l’accès lorsqu’il recherche proximité, (2) bloquer l’accès et (3) bloquer l’accès de façon contradictoire et imprévisible. Ces réponses viendraient ainsi modifier la trajectoire naturelle de recherche de proximité commune aux enfants et mèneraient, selon les auteurs, aux trois grands types d’attachement organisé : sécure, évitant et ambivalent.

La situation étrangère et le système de classification de l’attachement

Afin d’observer l’organisation des interactions mère-enfant, Ainsworth, Bell et Stayton (1971) ont élaboré une procédure, la situation étrangère. Celle-ci facilite l’observation de l’organisation de l’attachement en période de détresse et ce, hors du milieu naturel puisque appliquée en laboratoire. Cette procédure (voir Annexe A) a pour objectif d’activer le système d’attachement lors des séparations, permettant ainsi d’observer l’organisation relationnelle, et d’inférer la sécurité à partir des réunions. Elle expose l’enfant à un environnement inconnu et à une personne étrangère alors que la mère est présente ou absente (Ainsworth & Bell, 1970). Elle comprend deux épisodes de séparations et deux de réunions entre la mère et l’enfant. C’est à la suite de nombreuses observations en Ouganda, qu’Ainsworth a identifié que les enfants démontraient généralement un malaise ou des pleurs lorsque les parents quittaient la pièce, mais étaient réconfortés au retour de ces derniers. Elle en est arrivée à choisir d’appliquer cette procédure auprès d’enfants âgés d’environ 12 mois, car, selon elle, c’est à ce moment qu’il est possible d’observer par la locomotion et l’expression de l’enfant le degré d’organisation de l’attachement (Ainsworth, 1967). Cette procédure revêt un caractère alarmant qui crée inconfort et détresse chez l’enfant et la mère. L’inconfort observé informe sur la manière dont l’enfant perçoit sa figure d’attachement pour faire face à un stresseur, c’est-à-dire si elle constitue une source de soutien et de réconfort, et donc si elle est sécurisante (Ainsworth et al., 1978). Ainsi, la situation étrangère permet d’examiner la force et la qualité des comportements d’attachement de l’enfant envers sa mère dans une situation de stress, en plus d’évaluer l’équilibre entre les comportements d’attachement et d’exploration présents chez l’enfant

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(Ainsworth et al., 1971). Cette procédure s’inscrit dans la lignée des travaux de Bowlby et vient supporter plusieurs de ses idées.

La codification utilisée lors de l’évaluation de l’attachement par l’entremise de la situation étrangère est fondée sur l’observation d’une série de comportements de l’enfant en ce qui concerne la recherche de proximité, le maintien de contact, la résistance interactive et l’évitement. Ces comportements sont principalement observés lors d’épisodes de réunion. La manière dont s’organisent ces quatre catégories de comportements détermine ainsi la classe principale qui sera attribuée à l’enfant (Ainsworth et al., 1978). Trois sous-types d’attachement organisés ont ainsi été identifiés.

L’organisation sécure (B). Les besoins, les signaux et les intentions de l’enfant sécure seraient clairs et la mère reconnaitrait bien ces signaux, ce qui lui permettrait d’intervenir de manière cohérente, chaleureuse et prévisible (Ainsworth et al., 1971). En vertu des caractéristiques de la dyade, ces enfants en arriveraient à avoir confiance que leur figure d’attachement soit disponible et que celle-ci réagira de façon sensible et bienveillante à leur besoin de proximité et de réconfort. L’enfant sécure interagirait donc facilement avec sa mère et, de manière générale, son exploration serait efficace et structurée. Lors des séparations au cours de la situation étrangère, l’enfant se retrouverait en détresse. Toutefois, le retour de sa mère le réconforterait rapidement lui permettant de reprendre son exploration et son jeu (Ainsworth et al., 1978; Main & Solomon, 1990). Ainsi, la régulation émotionnelle chez ces enfants est considérée comme flexible et ouverte puisque ces derniers arrivent à exprimer de façon directe leurs émotions, ayant confiance qu’ils auront une réponse sensible de leur mère à leurs signaux émotionnels. De fait, ils rechercheront une aide auprès de leurs mères pour les aider à faire face aux émotions négatives vécues (Cassidy, 1994). Dans leur méta-analyse, van IJzendoorn, Schuengel et Bakermans-Kranenburg (1999) ont retrouvé un attachement sécure chez 62 % des enfants. Différentes recherches sur l’attachement dénotent que la sécurité d’attachement est associée à une bonne santé mentale à long terme et à une meilleure capacité d’adaptation à différents contextes (Cassidy, Ziv, Mehta, & Feeney, 2003; Thompson, 2008; Weinfield, Sroufe, Egeland, & Carlson, 2008).

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L’organisation évitante (A). Les mères de ces enfants étant plus souvent rejetantes face aux manifestations affectives de l’enfant, dans les moments de détresse ou tout autre besoin de type émotionnel, la stratégie d’évitement deviendrait une façon pour l’enfant de contrer le rejet (Ainsworth et al., 1978; George & Solomon, 1996). Ainsi, avant la séparation, lors de la situation étrangère, l’enfant évitant serait plutôt tenté à explorer, ou porterait son attention vers les jouets ou l’étrangère. Il engagerait très peu d’interactions avec sa mère, comme par exemple un sourire ou la désignation d’un jouet à celle-ci, bien qu’il pourrait se tourner vers elle pour avoir une assistance plutôt instrumentale (Waters, Wippman, & Sroufe, 1979). Le départ de celle-ci lors des épisodes de séparation ne semblerait pas le préoccuper. Au moment des réunions, l’enfant éviterait physiquement (c’est-à-dire passerait devant) et regarderait peu ou pas la mère (Ainsworth et al., 1978; Main & Solomon, 1990). Lorsque la mère le prendrait dans ses bras, aucun effort pour maintenir le contact ne serait fait. Ainsi, ces enfants auraient tendance à contrôler l’expression de leurs émotions pour maintenir la relation qu’ils ont avec leur mère plutôt rejetante. Il est considéré que ces enfants présenteraient une sur-régulation émotionnelle (Cassidy, 1994). Dans la population générale, environ 15 % des enfants manifesteraient un attachement évitant (van IJzendoorn et al., 1999).

L’organisation ambivalente (C). Chez l’enfant ayant ce type d’attachement, le sentiment que sa mère répond bien à ses besoins serait présent. Toutefois, ce serait la réponse sporadique de la mère à l’égard des comportements, besoins et signaux de l’enfant qui amènerait ce dernier à avoir peu confiance en la capacité de la mère à y donner réponse de façon constante (Ainsworth et al., 1978; George & Solomon, 1996). Cette expérience amènerait l’enfant à être attentif aux comportements et mouvements de sa mère de manière exagérée. Ainsi, le maintien de la proximité physique et du contact avec elle serait préoccupant pour lui, ce qui diminuerait son exploration de l’environnement (Ainsworth et al., 1978). L’enfant ayant ce type d’attachement tenterait, au début de la situation étrangère, d’être en contact avec la mère d’une manière rapide. Il montrerait également de la résistance aux initiatives de cette dernière à l’orienter vers les jeux ou l’exploration (Main & Solomon, 1990). Au moment de la séparation, il serait en détresse et difficilement calmé par l’étrangère. Comparativement aux enfants sécures, une réponse émotionnelle exagérée

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en cas de détresse serait observée, lui permettant de s’assurer d’une réponse adéquate de la mère à son égard (Ainsworth et al., 1978). Ces enfants présenteraient donc une sous- régulation émotionnelle (Cassidy, 1994). Lors du retour de celle-ci, l’enfant chercherait sa proximité et son contact, puis résisterait avec colère une fois ce contact obtenu. Les enfants ayant un attachement ambivalent sont donc difficilement consolables dans les épisodes de réunion étant donné leur résistance au contact avec la mère (Ainsworth et al., 1978). L’attachement ambivalent serait observable chez 9 % des enfants de la population normale (van IJzendoorn et al., 1999). Enfin, Ainsworth et ses collaborateurs (1971) soulignaient que, bien que les comportements de ces mères ne soient pas constants, celles-ci démontreraient un investissement émotionnel très fort quant à leur rôle de mère.

De façon générale, les trois types d’attachement décrits plus haut concernent des stratégies cohérentes/organisées de l’enfant ayant la même fonction, soit de diminuer la détresse associée à l’activation du système d’attachement. Bien que des comportements différents les caractérisent, ces trois types d’attachement sont tous associés à l’utilisation constante chez l’enfant de stratégies adaptatives spécifiques en moment de stress (Main, 1995). Toutefois, en utilisant cette classification d’Ainsworth et de ses collaborateurs, plusieurs chercheurs éprouvaient de la difficulté à classifier les comportements d’attachement de certains enfants. Par exemple, on identifiait chez eux des stratégies contradictoires ou des comportements d’interaction inusités lors de la situation étrangère. Étant donné l’impossibilité de classifier ces enfants dans l’une des trois catégories d’attachement organisé, Main et Solomon (1986) ont ainsi proposé l’existence d’une quatrième catégorie d’attachement, soit celle d’un attachement désorganisé/désorienté.

La désorganisation

C’est après avoir étudié près de 200 cas que Main et Solomon (1990) en sont venus à établir cette catégorie d’attachement caractérisée par des comportements inusités des enfants lors de la situation étrangère, et plus particulièrement lors des épisodes de réunion. En vertu de cette catégorisation, au moment de la séparation, ces enfants démontreraient de la détresse et la mère s’avèrerait incapable de la diminuer à son retour. De plus, lors de la

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réunion, ces enfants n’adopteraient pas une stratégie organisée pour retrouver un réconfort, mais auraient plutôt des comportements atypiques et désorganisés (Main & Solomon, 1990; van IJzendoorn et al., 1999). Le Tableau 1 présente la classification développée par Main et Solomon (1990), ainsi que des exemples de comportements pouvant être observés selon chacune des sept sous-classes. Dans la population générale, environ 15 % des enfants présentent un attachement désorganisé, et ce pourcentage pourrait doubler ou tripler chez les populations à risque élevé (van IJzendoorn et al., 1999).

Tableau 1

Indices de comportements désorganisés (Main & Solomon, 1990)

Comportements de l’enfant associés au développement de la désorganisation (12-18 mois) Classification des

comportements

Comportements

1. Comportements séquentiels contradictoires

1. L’enfant a des comportements d’attachement assez forts, suivis par de l’évitement, une expression figée ou un comportement bizarre.

2. Comportements simultanés contradictoires

2. L’enfant a des comportements d’évitement qui sont accompagnés de comportement de recherche de contact, parfois même de détresse.

3. Expressions ou mouvements incomplets, mal orientés ou interrompus

3. L’enfant exprime une détresse intense qui s’accompagne d’une distanciation par rapport à la mère.

4. Comportements stéréotypés, mouvements asymétriques ou mal calculés et postures anormales

4. Alors que la mère est présente, l’enfant, par exemple, trébuche sans raison apparente ou l’enfant se tire les cheveux à répétition avec une expression confuse.

5. Expressions et comportements lents, immobiles et figés

5. L’enfant fige durant vingt secondes et plus. Ensuite, il reste calme pendant plus de trente secondes avec une expression faciale confuse.

6. Indices d’appréhension envers le parent

6. L’enfant se courbe les épaules quand il approche le parent ou manifeste une expression faciale de peur. 7. Indices directs de

désorganisation ou de désorientation

7. L’enfant erre dans la pièce de façon désorientée, a des expressions bizarres ou confuses ou a de multiples changements brusques d’affects.

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La classification « D » (attachement désorganisé) au cours de la petite enfance et durant la période scolaire constituerait un prédicteur important de problèmes d’ajustement tout au long du développement (Carlson, 1998; Main & Solomon, 1986; Moss, Rousseau, Parent, St-Laurent, & Saintongue, 1998; Sroufe, Carlson, Levy, & Egeland, 1999; van IJzendoorn et al., 1999). Une stabilité à long terme de la relation d’attachement désorganisée a également été montrée dans la méta-analyse de van IJzendoorn et ses collaborateurs (1999). Différentes études ont souligné l’association de l'attachement désorganisé à des problèmes de comportements extériorisés (Bureau & Moss, 2010; Fearon, Bakermans-Kranenburg, van IJzendoorn, Lapsley, & Roisman, 2010; Lyons-Ruth, Easterbrookks, & Cibelli, 1997; Madigan, Moran, Schuengel, Pederson, & Often, 2007; van IJzendoorn et al., 1999), ainsi qu’avec les problèmes de comportement intériorisés (Brumariu, Kerns, & Seibert, 2012; Bureau, Easterbrooks, & Lyons-Ruth, 2009;

Carlson, 1998; Lecompte, Moss, Cyr, & Pascuzzo, 2014; Moss et al., 2006). Une association entre l'attachement de type désorganisé et la qualité du fonctionnement cognitif de l'enfant a également été relevée dans la littérature (Fearon & Belsky, 2004; Green & Goldwyn, 2002; Lyons-Ruth, Repacholi, Mcleod, & Silva, 1991). De même, il semble que les enfants ayant ce type d’attachement éprouveraient des difficultés au sein des relations avec leurs pairs (Jacobvitz & Hazen, 1999). Ces difficultés seraient également présentes à l’âge adulte (Sroufe, 2005). Enfin, l’attachement désorganisé est associé à la présence de psychopathologies (Carlson, 1998; Nakashi-Eisikovits, Dutra, & Western, 2002), de symptômes dissociatifs (Carlson, 1998; Lyons-Ruth, Dutra, Schuder, & Bianchi, 2006) et de troubles de la personnalité (Westen, Nakash, Thomas, & Bradley, 2006).

L’étiologie de la désorganisation. Selon Main et Hesse (1990), la désorganisation chez l’enfant prendrait origine dans les interactions caractérisées par des comportements de la mère perçus comme effrayants pour l’enfant. Ces auteurs positionnent cette expérience de peur au sein des interactions avec la figure d’attachement comme étant susceptible d’empêcher la relation de s’organiser de manière cohérente. Plutôt que d’être une base à partir de laquelle l’enfant s’organise, la mère deviendrait une personne qui suscite de la crainte chez l’enfant. Il existerait alors un dilemme, chez l’enfant, entre le désir d’être rassuré et la peur ressentie face aux comportements de la mère, ce qui l’amènerait, en

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situation de stress, à adopter des comportements bizarres et conflictuels (Main & Hesse, 1990). Puisque son système d’attachement serait à la fois activé et inhibé par les comportements de la mère, l’enfant se trouverait incapable de trouver une stratégie organisée, tel qu’observé chez les enfants sécures, évitants ou ambivalents (Hesse & Main, 1999). La « peur sans solution » a donc été considérée, depuis les écrits de ces auteurs, comme étant le dilemme au cœur de la désorganisation. Ainsi, bien que les mères d’enfants ayant un attachement insécure puissent avoir des comportements rejetants ou anxieux au sein de la relation, ces enfants arriveraient à développer une stratégie d’attachement cohérente pour être réconfortés (Weinfield et al., 2008). Le développement de stratégies cohérentes pour gérer leurs émotions ne serait toutefois pas possible pour les enfants ayant un attachement désorganisé étant donné cette impossibilité de retrouver un certain réconfort auprès de la mère (Solomon & George, 1996). Aucune régulation émotionnelle ne serait donc possible chez ces enfants, ce qui représente une difficulté fondamentale de cette catégorie d’attachement (DeOliveira, Bailey, Moran, & Pederson, 2004).

À partir de cette hypothèse que la peur créée par les comportements maternels serait la base même du développement d’un attachement désorganisé, plusieurs chercheurs se sont donc intéressés à ces comportements chez la mère que l’on considère « atypiques ». Main et Hesse (1992) ont ainsi élaboré une première mesure permettant l’observation de ces comportements maternels pouvant générer de la peur chez l’enfant, le Frightened or frightening behavior inventory. Les comportements pouvant effrayer l’enfant dans l’immédiat (comportements dissociés, comportements effrayants et affects d’effroi chez la mère) et ceux pouvant perturber indirectement l’enfant (comportements timides et déférents, comportements sexualisés ou romantiques et désorganisation/désorientation) y sont évalués. Selon les auteurs de cette grille, les comportements directs et effrayants seraient plus présents au sein de familles abusives et maltraitantes (Main & Hesse, 1990) et on les associerait à la présence de pertes et de traumas non résolus chez la mère (Hesse & Main, 2006).

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Un peu plus tard, Lyons-Ruth, Bronfman et Parsons (1999) ont voulu élargir cette idée. Ils ont émis l’hypothèse que ce ne serait pas seulement la peur de l’enfant, provoquée par les comportements effrayés/effrayants de la mère, qui mènerait à la désorganisation, mais bien tout sentiment de peur présent chez l’enfant que la mère ne réussirait pas à soulager. Afin d’illustrer leurs propos, les auteurs apportent l’exemple d’une mère qui répond de façon contradictoire aux signaux de son enfant, qui se retire et répond de façon superficielle, ou encore qui hésite puis répond sommairement aux signaux. La notion d’insensibilité a donc été ajoutée par Lyons-Ruth et ses collaborateurs à la classification de Main et Hesse, ce qui donna naissance au Atypical Maternal Behavior Instrument for Assessment and Classification (AMBIANCE; Lyons-Ruth, Bronfman, & Atwood, 1999). L’importance de considérer l’insensibilité dans la genèse de l’attachement désorganisé a ainsi été reconnue à l’intérieur des études s’intéressant aux comportements maternels atypiques.

Tel que présenté précédemment, la recherche sur le développement de l’attachement désorganisé a largement été influencée par l’hypothèse de Main et Hesse (1990) à l’effet que ce serait la présence de comportements effrayants chez la mère qui générerait un dilemme paradoxal chez l’enfant entre son besoin de proximité et la crainte du parent. Toutefois, cette hypothèse demeure, à ce jour, difficile à confirmer puisque des études confirmant la présence d’indicateurs physiologiques de peur chez l’enfant, par exemple l’élévation du niveau de cortisol ou encore l’analyse des réactions du visage de l’enfant, lors de la présence de tels comportements maternels sont nécessaires (Lyons-Ruth & Jacobvitz, 2008). Pour l’instant, l’étude de Luijk et ses collaborateurs (2010) confirme la présence d’une pente plus aplatie du niveau de cortisol diurne chez les enfants ayant un attachement désorganisé, comparativement à ceux ayant un attachement organisé. Toutefois, il ne s’agit pas de résultats associés directement à la présence de comportements maternels qui pourraient être effrayants pour l’enfant. Par ailleurs, certaines différences neurobiologiques ont été également associées à la présence de désorganisation chez l’enfant. Par exemple, l’étude de Tharner et ses collaborateurs (2011) montre que les enfants avec une région gangliothalamique (incluant ganglions de la base et thalamus) plus large à 6 semaines avaient moins de risques de développer un attachement désorganisé.

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Cette région est notamment associée aux comportements orientés vers un but, et donc dans la recherche de proximité de l’enfant dans la relation d’attachement avec sa mère. Toutefois, certains questionnements demeurent quant à l’interprétation des résultats, notamment quant à leur spécificité à la présence de désorganisation de l’attachement. Les auteurs émettent l’hypothèse que cette différence de structure pourrait aussi être associée à un problème d’ajustement socio-émotionnel plus global. Enfin, certaines études se sont intéressées aux composantes génétiques pouvant être associées à la désorganisation de l’enfant. Toutefois, les résultats s’avèrent contradictoires, notamment ceux des études qui s’intéressent au gène récepteur de la dopamine (DRD4). Le système dopaminergique, lié aux structures sous-corticales comme celui des ganglions de la base, serait impliqué au niveau de l’attention, de la motivation et du système de récompense, qui sont tous considérés importants dans le développement de l’attachement (Bakermans-Kranenburg & van IJzendoorn, 2007). Certaines études (Barry, Kochanska, & Philibert, 2008; Lakatos et al., 2000; Spangler, Johann, Ronai, & Zimmermann, 2009) ont souligné la présence d’un effet d’interaction entre les gènes et l’environnement en montrant qu’une variation du gène récepteur DRD4 pouvait rendre les enfants plus susceptibles aux influences de l’environnement, positives comme négatives, et ainsi être associée au développement d’un attachement désorganisé. Toutefois, d’autres études, dont certaines de plus grande envergure, n’ont pas trouvé d’association entre les éléments génétiques associés au système dopaminergique, mais aussi sérotoninergique et celui de l’oxytocine, avec la présence d’un attachement désorganisé chez l’enfant (Bakermans-Kranenburg & van IJzendoorn, 2004; Luijk et al., 2011).

Devant ces résultats contradictoires et encore peu probants, certaines hypothèses alternatives peuvent être formulées. Ainsi, l’étude des comportements maternels, notamment la sensibilité maternelle dans l’étude du développement de l’attachement chez l’enfant, s’avère toujours pertinente et pourrait venir supporter l’idée de Lyons-Ruth, Bronfman et Parsons (1999) à l’effet que la désorganisation prendrait également racine dans l’incapacité de la mère à répondre aux sentiments de peur présents chez l’enfant, sentiments qui n’ont pas nécessairement été provoqués par la mère. La prochaine section

Figure

Figure 1. Modèle acheminatoire original.
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