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Facteurs socioculturels québécois relatifs aux troubles du comportement chez les élèves francophones
d'origine québécoise du secteur public primaire de l'est de montréal
Par : Paula St-Arnaud Département de Psychiatrie
Division de psychiatrie sociale et transculturelle
Université McGiII
Décembre 2008
"Mémoire présenté à l'Université McGiII, à la réalisation partielle des exigences du degré de maîtrise en psychiatrie sociale et transculturelle"
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Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
Table des matières
Table des matières I
Table des illustrations Il
Résumé Ill Abstract IV Préface V 1. Introduction 1 2. Protocole de recherche 4 2.1 Présentation de la problématique 4
2.2 Recension des écrits 4
2.2.1 Historique 4
2.2.2 État de la situation 5
2.2.3 Multiples facteurs de risque 7
2.3 Besoin pour la recherche 11
2.4 Question de recherche 12 2.5 Objectifs 12 2.6 Méthodologie 13 3. Profil de l'échantillon 17 3.1 Institution 17 3.2 Familles 18 3.3 Enfants 19
4. Présentation des résultats 19
4.1 Un parcours marqué de ruptures et de conflits 20
4.2 Un dialogue de sourds 24
4.3 Le besoin de relation et de reconnaissance 28
4.4 La place des croyances 33
4.5 Un besoin de repères 37
5. Liens avec la littérature 42
6. Implications cliniques 47
7. Conclusion 52
Annexe I - Documents d'approbation éthique
54
Annexe II - Questionnaires d'entrevue 56
Annexe II - Questionnaires d'entrevue 57
Annexe III - Formule de consentement parental
63
Annexe IV - Principaux regroupements par thèmes
64
Références 109
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
Table des illustrations
Tableau 1 : Portrait des familles 18
Figure 1 : Zones de regroupement des éléments du discours
20
Tableau 3 : Paroles illustrant les ruptures et les conflits 22
Tableau 3 : Paroles illustrant les ruptures et les conflits (suite) 23
Tableau 4 : Paroles illustrant le dialogue de sourds 26
Tableau 4 : Paroles illustrant le dialogue de sourds (suite) 27
Tableau 5 : Paroles illustrant le besoin de relation et de reconnaissance 30
Tableau 5 : Paroles illustrant le besoin de relation et de reconnaissance (suite) 31 Tableau 5 : Paroles illustrant le besoin de relation et de reconnaissance (suite) 32
Tableau 6 : Paroles illustrant l'importance des croyances 35
Tableau 6 : Paroles illustrant l'importance des croyances (suite) 36
Tableau 7 : Paroles illustrant le besoin de repères 38
Tableau 7 : Paroles illustrant le besoin de repères (suite) 39
Tableau 7 : Paroles illustrant le besoin de repères (suite) 40
Tableau 7 : Paroles illustrant le besoin de repères (suite) 41
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
Résumé
En constante augmentation au cours des dernières décennies, les troubles du comportement présentent un réel défi pour l'intervention et ont d'importantes conséquences dans les familles, le milieu scolaire et la société. L'auteure présente une étude de cas multiple avec trois niveaux d'analyse imbriqués. Dans le cadre d'un devis qualitatif, les données subjectives sont recueillies au moyen d'un questionnaire au cours d'entrevues semi-dirigées. Une analyse verticale individuelle et une analyse horizontale collective exposent les relations entre les perspectives subjectives des acteurs impliqués (parent, enfant et enseignant) et permettent l'accès au contexte socioculturel. Les
résultats mettent en lumière les expériences de vie marquées de ruptures et de conflits, les besoins de relation, de reconnaissance et de repères exprimés par les enfants. Aussi, l'absence relative de communication entre les personnes impliquées et la place
des croyances spirituelles entourant cette problématique sont révélées. Enfin, des pistes
d'intervention sont proposées.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
Abstract
For the last few decades, youth behavioral problems have been constantly increasing. As an outcome of the complex interactions of multiple factors, these problems seriously challenge families, the educational system and society. The author presents a multiple case study, with three levels of analysis. Through a qualitative method, subjective data are collected through semi-structured interviews. An individual vertical analysis and a collective horizontal analysis give access to the subjective perspectives of participants (the parent, child and teacher) and the sociocultural context. The results show pattern of life marked by ruptures and conflicts, the need for relation, recognition and guidance.
Furthermore, there is a marked absence of communication between the implicated
people and spiritual beliefs surrounding this problematic are considered. Intervention
avenues are suggested.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
Préface
Nous tenons à souligner la contribution financière de l'Institut de Recherche en Santé du Canada et le Département de Psychiatrie de l'Université McGiII. Sans le soutien du Strategie Training Program in Culture and Mental Health Service Research et la bourse Maysie MacSporran, la présente étude n'aurait pas été possible.
Notre plus grande reconnaissance aux élèves, parents, enseignants et autres participants à cette étude. L'atteinte des objectifs aurait été impossible sans leur disponibilité, leur générosité, leur ouverture et leur confiance dans le partage de leur expérience personnelle. Merci également aux psychoéducatrices en charge des classes spécialisées qui ont aménagé des espaces permettant les entrevues avec les élèves et les enseignants. Nous tenons également à remercier la Commission scolaire de la
Pointe-de-l'île (CSPI) qui a autorisé le projet et favorisé le contact avec les divers
participants. Tout particulièrement madame Anna-Maria Folco, coordonatrice du Réseau
des Écoles de Montréal-Est, de Pointe-aux-Trembles et des écoles spécialisées. Nos
sincères remerciements aux collègues de la CSPI pour leur soutien, leur intérêt, leur disponibilité, la pertinence de leurs réflexions et le partage de leur expertise aux différentes étapes de ce projet. Un merci particulier à Claudine Pelletier, conseillère pédagogique à l'adaptation scolaire, ainsi qu'à Denis Beauregard, Catherine Lamy, Caroline Ouellet et Ghislain Thibodeault, psychoéducateurs. Un merci tout spécial à Danielle Roy, personne-ressource au service de soutien régional en psychopathologie, pour sa confiance, son ouverture et sa grande disponibilité.
Chaleureux remerciements à Dr Danielle Groleau, directrice de thèse et à Dr. Cécile
Rousseau, co-directrice, pour leur expertise, la qualité de leur soutien, leurs précieux conseils et leur rigueur au cours de ces années de travail. Merci pour la qualité de leur accompagnement dans le défi que représente la supervision d'une étudiante praticienne au sein de la recherche académique. Pour terminer, un merci spécial à Lise Séguin pour sa disponibilité et son soutien aux diverses étapes de cet ambitieux projet ainsi qu'à Xavier qui a sagement su faire avec une maman moins disponible au moment de la rédaction finale.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
1. Introduction
Depuis plusieurs années, les difficultés de comportement chez les jeunes font l'objet de multiples études, réflexions et questionnements. Elles occupent par conséquent une place significative dans notre société québécoise. Caractérisée par une interaction de
facteurs individuels, familiaux et sociaux ou institutionnels, cette problématique présente
un réel défi pour l'intervention et entraîne de nombreuses conséquences sur la société
en général.
L'intervention auprès des jeunes en difficulté d'adaptation, de leur famille et des divers
intervenants du milieu scolaire permet une observation privilégiée de la problématique.
Parce qu'elle donne accès à l'expérience et au vécu des personnes concernées, ce champ de pratique soulève des réflexions et questionnements quant aux influences et responsabilités des différents acteurs impliqués.
La présente recherche se veut une exploration visant une compréhension approfondie
du rôle des facteurs socioculturels dans les troubles du comportement chez les élèves
du primaire. Dans le cadre d'un devis qualitatif portant sur dix études de cas, les données subjectives sont recueillies au cours d'entrevues semi-dirigées par
l'intermédiaire d'un questionnaire inspiré du McGiII Illness Narrative Interview (MINI, Groleau et al. 2006). Par une analyse verticale individuelle, la relation entre les
perspectives subjectives des acteurs impliqués (parent, enfant et enseignant) est considérée. D'autre part, l'analyse horizontale collective permet l'accès au contexte
socioculturel et à une compréhension accrue du raisonnement social entourant les difficultés de comportement.
Cette étude de cas multiple avec trois niveaux d'analyse imbriqués permet de situer la trajectoire des troubles du comportement dans leur contexte socioculturel. Elle s'inscrit par ailleurs dans une quête continue d'une réponse culturellement sensible et plus adaptée aux besoins d'une clientèle en grande difficulté.
À titre d'entrée en matière, voici une situation professionnelle ayant présenté un sérieux
défi et sollicité nos propres capacités d'adaptation. Vous nous permettrez l'utilisation d'un discours plus personnalisé pour les quelques paragraphes à venir.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement L'histoire se déroule dans une école primaire où je travaillais auprès d'élèves en difficulté intégrés au régulier. J'accompagnais une famille d'origine québécoise. L'enfant démontrait une grande anxiété. Les symptômes, principalement des réactions excessives, des colères et de l'autostimulation dérangeaient le fonctionnement de la classe et paralysaient l'enseignant de par leur nature, leur fréquence et leur intensité. L'enfant inquiétait les intervenants depuis son entrée à la maternelle. Elle avait été évaluée en psychologie et recevait des services professionnels depuis plusieurs années
à même l'école. Les causes des difficultés demeuraient imprécises. On oscillait entre
l'hypothèse d'un abus sexuel et celle d'une limitation intellectuelle. C'est avec un regard
sévère et insistant que la direction m'a demandé de prendre le dossier et de chercher à comprendre ce qui se passait chez cette enfant. Dans l'école, elle était connue de tous comme une enfant bizarre, imprévisible et refermée sur elle-même. Ma relation était bonne avec la famille et l'enfant. Peu à peu, la jeune s'ouvrait à moi et se racontait. Au cours de la troisième année d'accompagnement, elle m'a raconté un épisode d'une émission de télévision où il y a des esprits noirs et des esprits blancs. Elle racontait que ces choses là existent réellement parce que chez elle la chaise berçante bouge, les
armoires claquent et la télévision s'allume toute seule. À cette étape, j'hésitais entre
l'hypothèse d'une imagination débordante et celle de premiers symptômes d'un trouble psychiatrique. Je l'ai questionnée un peu et elle a affirmé que toute la famille voyait aussi ces choses. Que penser et que faire de cette confidence? L'échange avec les collègues sur le sujet tournait rapidement autour d'histoires farfelues, suscitait des moqueries et
diverses autres formes de résistances. Les rares lectures étaient davantage de nature
fantastiques que scientifiques ou concernaient des cultures apparemment bien différentes de la nôtre. Très peu de ressources m'étaient accessibles et aucun cours universitaire ne m'avait préparée à une telle situation. Sauf peut-être une discussion bien animée avec un enseignant qui, lors d'un cours magistral, ridiculisait et dénigrait ouvertement, et disons-le avec une bonne dose d'agressivité, le rôle de la religion et de la spiritualité dans le développement personnel. J'étais confrontée à un tabou social. Peu de temps après cette confidence, j'ai rencontré la mère et le père de l'enfant qui confirmaient avoir été témoins des phénomènes. Le défi se posait : comment accompagner les personnes de cette famille dans le respect de leurs croyances, alors que ce qu'ils me soumettaient résonnait en moi, me confrontait à mes propres croyances
et s'inscrivait dans mon histoire personnelle d'une façon toute particulière. À ce stade, je
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement ne voyais qu'une option : écouter, entendre, chercher à comprendre, aménager un espace respectueux permettant le récit de l'expérience vécue par cette femme. La mère
a alors raconté sa relation incestueuse avec son père et décrit comment, après avoir levé le voile sur l'abus, son père s'est suicidé et comment elle a ensuite été rejetée de
ses frères et sœurs. C'est le lendemain du suicide que les objets s'étaient mis à bouger dans la maison. Je n'ai pas su quoi faire, quoi proposer, j'étais impuissante. La mère a pleuré, je lui ai tendu un mouchoir. Elle a évacué un soupir de soulagement et son conjoint l'a, un peu maladroitement mais tendrement, entourée de son bras. Peu de temps après, un adulte de l'école m'a demandé ce que j'avais fait à cette enfant qu'elle voyait sourire pour la première fois. J'ai souri au souvenir de l'impuissance ressentie et au défi personnel et professionnel qu'a présenté cette situation. Je n'ai pas connu la suite de l'histoire, le poste de psychoéducatrice a été coupé pour embaucher des
enseignants ressource.
Deux autres histoires semblables se sont présentées par la suite. Un enfant, récemment arrivé au Québec pour fuir un pays en guerre, voyait des personnes mortes à la maison, dans son lit et à l'école. La mère les voyait aussi. L'autre enfant, d'origine haïtienne, était, selon la mère, sous l'emprise d'un membre de la famille suite à un ensorcellement. Avec tout le professionnalisme possible, nous avons écouté, entendu et respecté au
mieux ce que les parents et les enfants confiaient en entrevue. Sans un attachement particulier à ces enfants et un effort de dépassement pour le respect de parents, il en
aurait été de crainte, de fermeture, de retrait et d'une référence immédiate à des
services psychiatriques. Avec tout que ce type de référence implique. Au fait, est-il indiqué de référer une famille complète en psychiatrie pour des symptômes psychotiques?
Nous croyons maintenant que le simple fait d'avoir, non sans effort, crée l'espace de dialogue, a permis l'émergence de pistes de solution et la consolidation de l'alliance thérapeutique. Notons que des trois situations en questions, une seule impliquait une famille québécoise. Les deux autres familles étaient d'origine haïtienne et croate. Fait
intéressant, les deux familles néoquébécoises ont su trouver beaucoup plus aisément
des pistes de solution à l'intérieur de leur réseau culturel que la famille québécoise. Le départ de notre questionnement et de cette recherche sur l'influence de facteurs socioculturels origine donc entre autres d'observations et d'expériences professionnelles semblables aux exemples présentés.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
2. Protocole de recherche
2.1 Présentation de la problématique
Une constante augmentation des troubles du comportement chez les enfants a été
observée au cours des dernières décennies (Bird et al, 2001 ; Collishaw et al, 2004). Les
jeunes d'aujourd'hui sont davantage affectés par des difficultés de nature émotionnelle
et présentent des comportements perturbateurs plus sévères et plus fréquents que par
le passé (Bird et al, 2001). Les comportements antisociaux représentent les motifs les
plus fréquents de référence à des services de consultation clinique et engendrent des
coûts importants pour la société (Robins 1981). Les causes des troubles du comportement sont inconnues et aucune théorie ne peut à elle seule expliquer précisément la problématique (Zoccolino et Huard, 1999).
Parce qu'elles relèvent d'une interaction de multiples facteurs, les difficultés d'adaptation
présentent un réel défi et ont d'importantes retombées dans les familles, le milieu
scolaire et la société en général. À moins d'une lecture juste des besoins et d'une
intervention précoce, adéquate et concertée, certains jeunes sont à risque de s'engager vers des trajectoires pouvant évoluer vers des pathologies complexes et lourdes de conséquences aux niveaux individuel et social (Bird et al 2001).
Puisqu'elle relève en partie du jugement de l'observateur, l'évaluation du trouble du comportement s'avère partiellement subjective. Les difficultés de comportement ne
sauraient donc être évaluées sans une considération de la culture, de l'institution, du
jeune, des différents évaluateurs et de leurs contextes respectifs.
2.2 Recension des écrits
2.2.1 Historique
Il est relativement récent que les difficultés de comportement soient considérées comme une pathologie. De fait, c'est en 1965 que la Classification Internationale des Maladies
(CIM-8) a présenté la catégorie « trouble du comportement de l'enfance » et trois ans
plus tard que le terme « trouble des conduites » a été introduit au Diagnostic and Statical Manual of Mental Disorder (DSM-II, 1968). Dans la littérature, à la fois les termes utilisés et les définitions relatives aux troubles du comportement chez les jeunes sont multiples. 4
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement Certains auteurs réfèrent à des catégories diagnostiques alors que d'autres utilisent des termes plus généraux. Il est à la fois question de trouble des conduites, trouble oppositionnel avec provocation incluant ou non le déficit d'attention, avec ou sans hyperactivité, trouble du comportement ou troubles extériorisés de l'enfance, antisocialité, problèmes de conduite, problèmes d'agressivité, comportements antisociaux, comportements perturbateurs, comportements sous-contrôlés ou problèmes d'externalisation (Bird et al, 2001 ; Broidy et al, 2003; Burt et al, 2003; Barry et al, 2003; Dumas, 1999; Lyons-Ruth, 1996; Vitaro et Gagnon, 1999; Quay et Hogan, 1999; Weisz
et al, 2003; Zoccolino et Huard, 1999). Faute d'une définition consensuelle et considérant le contexte d'étude, nous référons à la définition proposée par le Ministère
de l'Éducation, dans son Instruction 1990-1991 aux commissions scolaires :
«L'élève ayant des troubles de conduite ou de comportement est celle ou celui dont l'évaluation psycho-sociale [...] révèle un déficit important de la capacité d'adaptation se manifestant par des difficultés significatives d'interaction avec un ou plusieurs éléments
de l'environnement scolaire, social ou familial [...]. Les difficultés d'interaction avec
l'environnement sont considérées significatives [...] dans la mesure où elles nuisent au développement du jeune en cause ou à celui d'autrui en dépit des mesures
d'encadrement habituelles prises à son endroit. L'élève ayant des troubles de conduite
ou de comportement présente fréquemment des difficultés d'apprentissage, en raison d'une faible persistance face à la tâche ou d'une capacité d'attention et de concentration réduite.» (Poliquin-Verville et al, 1992)
Puisqu'elle relève en partie du jugement de l'observateur, l'évaluation du trouble du
comportement s'avère partiellement subjective. Il est risqué de confondre un trouble du comportement et une réaction saine et fonctionnelle face à un environnement malsain
(Wakerfield 1997).
2.2.2
État de la situation
Il est fréquent d'entendre dans le discours populaire qu'il y a de plus en plus de jeunes
en difficulté. De fait, des études épidémiologiques suggèrent que les jeunes d'aujourd'hui sont davantage affectés par des difficultés de nature émotionnelle et présentent des comportements perturbateurs plus sévères et plus fréquents que par le passé (Bird et al, 2001). Selon une étude menée au Royaume-Uni, une augmentation 5
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
significative des problèmes de conduite a été observée autant chez les garçons que
chez les filles, dans toutes les classes sociales et tous les types de famille (Collishaw et
al, 2004).
Selon les données américaines, le trouble des conduites serait à ce jour l'une des
psychopathologies les plus inquiétantes, compte tenu de ses conséquences sur la
société, dont les agressions physiques et l'atteinte à la propriété (Kazdin et al, 1990). La
prévalence du trouble des conduites est évaluée entre 6% et 16% chez les garçons et
de 2% à 9% chez les filles (American Psychiatrie Association, 1994). Pour sa part, le trouble oppositionnel avec provocation se situerait entre 6% et 10% dans la population générale (Costello, 1990).
Au Québec en 1999, la prévalence du trouble oppositionnel avec provocation était estimée entre 0,7% et 5,8% et celle du trouble des conduites entre 0,2% et 2,3% chez les enfants d'âge scolaire (Breton et al, 1999). Le taux de prévalence rapporté par le conseil supérieur de l'éducation est en constante augmentation depuis les dernières années. Il est passé de 0,78% en 1984-1985 à 2,5% en 1999-2000 (Lagacé et al, 2001). Ces écarts de prévalence mettent en évidence l'importance du contexte socioculturel.
Étant donné leur importance, les comportements antisociaux ont fait l'objet de plusieurs
recherches au cours des dernières décennies. Il demeure toutefois pertinents de
poursuivre la réflexion principalement parce qu'ils représentent les motifs les plus
fréquents de référence à des services de consultation clinique (Robins, 1981; Kazdin et al, 1990) tout en engendrant des coûts importants pour la société (Bird et al, 2001). Certaines études soutiennent que le trouble des conduites précoce serait stable à travers le temps. Un trouble des conduites durant l'enfance et l'adolescence serait
précurseur de sérieux problèmes dans la vie adulte dont la criminalité, l'abus de
substances, la présence d'autres conditions psychiatriques, un faible niveau
d'ajustement conjugal ainsi qu'une atteinte au fonctionnement social et professionnel
(Bird et al, 2001). Plus les troubles sont sévères et se manifestent tôt dans le
développement de l'enfant (petite enfance), plus ils sont persistants et prédisent la
fréquence, la durée et l'intensité des comportements agressifs et antisociaux à
l'adolescence et à l'âge adulte (Tremblay et al. 1992; Wood et Zabel, 1978). Notons
cependant que ces trajectoires développementales demeurent multiples et on estime
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement que moins de 6% évoluent en troubles chroniques de comportements antisociaux (Lacourse et al, 2002).
2.2.3
Multiples facteurs de risque
De nombreux facteurs de risque associés au trouble du comportement ont été identifiés à ce jour. Notons ainsi que les caractéristiques personnelles de l'enfant sont en
constante interaction avec son environnement, à savoir son milieu familial, l'environnement scolaire et la société dont il fait partie.
L'enfant
Dans l'ensemble des groupes étudiés, le trouble des conduites est systématiquement plus fréquent chez les garçons (Weisz et al, 1993). Entre autres facteurs, le tempérament, un déficit verbal, des déficits neuropsychologiques ou cognitifs (Bird et al, 2001), des difficultés d'apprentissage, un faible poids à la naissance et des complications périnatales (Moffit, 1993) sont reliés à l'émergence des comportements perturbateurs. La présence simultanée de plusieurs conditions psychiatriques est par ailleurs fréquente chez les jeunes en trouble des conduites (Nadder, 2002; Loeber et al 2000). De façon générale, les facteurs propres à l'enfant expliquent 19% de la variabilité des comportements extériorisés et l'influence des relations avec les pairs 13% (Van
Leeuwen et al, 2004).
La famille
L'environnement familial a aussi fait l'objet de plusieurs études. Les pratiques parentales expliquent jusqu'à 6% de la variance des comportements extériorisés (Van Leeuwen et al, 2004). Bien sûr, un cumul des indices d'adversité familiale est fortement relié au
trouble des conduites et les conflits entre l'enfant et ses parents représentent une
vulnérabilité importante augmentant le risque de troubles multiples chez ce dernier (Burt
et al, 2003).
Le climat général, le niveau d'entente des parents et la structure familiale ont un impact sur le développement de l'enfant. Certaines pratiques parentales sont reliées au développement des troubles du comportement; le manque de stimulation, de soins adéquats, de soutien émotif, de guidance parentale, de limites ou d'encadrement, une 7
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement autorité dure ou trop sévère, une discipline punitive ou coercitive, inconsistante,
irrégulière ou inappropriée en sont des exemples (Bird et.al, 2001).
D'autre part, l'idéologie des parents, leur vision du pouvoir et du rôle parental, le soutien
émotif et le niveau de sécurité qu'ils offrent à l'enfant ainsi que l'acceptation de l'enfant
tel qu'il est sont d'autres facteurs reconnus (Culbertson et al, 2003; Corbotz-Warnery et
al, 2000; Atkinson et al, 2000). L'auto centration, les attentes des parents envers
l'enfant, le manque d'empathie des parents ainsi que l'interprétation et la compréhension
qu'ils ont des comportements de l'enfant peuvent nuire à son développement affectif
(Wiehe, 2003).
De façon plus spécifique, certaines caractéristiques de la mère (âge, scolarité, degré de
sensibilité et capacité à reconnaître et à répondre aux besoins de l'enfant) ont aussi une
influence importante sur le développement de l'enfant (Bird et al, 2001). Finalement,
l'abus de drogues ou d'alcool et la psychopathologie des parents sont associés au
développement des troubles du comportement de l'enfant (Papadakos, 1999; Stahl et al,
1999).
Par ailleurs, les difficultés vécues durant l'enfance des parents, les histoires familiales
non résolues pouvant remonter à des générations antérieures de même qu'une faible
capacité d'autocritique des parents sont des éléments fréquemment reconnus dans le
travail auprès d'enfants en difficulté d'adaptation (Gauthier, 1999). De la même façon, de
solides bases affectives supposent que les parents ne souffrent pas de pathologie
transgénérationnelle pouvant occasionner des troubles d'attachement chez l'enfant
(Ledere, 1999).
En somme, le contexte familial et les premières expériences de socialisation de l'enfant
jouent un rôle prédominant dans sa préparation à la socialisation lors de son entrée
scolaire. Ils influencent les attentes de l'enfant ainsi que les relations avec ses pairs
incluant la stabilité des amitiés et le maintien de ses contacts à l'extérieur de l'école
(Hoglund, 2004). L'école
Les études relatives au rôle joué par le milieu scolaire dans la genèse du développement
du trouble du comportement demeurent relativement peu nombreuses. La qualité des
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement relations famille-école influence les comportements de l'enfant dans son parcours scolaire (Bérubé et al, 2007). On sait par ailleurs que l'enseignant, les pairs ainsi que les caractéristiques de l'enfant lui-même jouent un rôle critique dans le renforcement des comportements adaptés ou inadéquats des enfants de première année (Kellam 1998). L'organisation de l'école, le climat général (Kason et al, 1990) ou l'ambiance au sein de l'établissement (Maughan et al, 1990) auraient également un impact sur le développement des comportements. Dans l'ensemble, certaines conditions de classe et réactions de l'enseignant peuvent favoriser le développement de difficultés de
comportement.
Les attitudes de l'enseignant peuvent également influencer le comportement des élèves.
Sa sensibilité à l'individualité des élèves, ses attentes, sa constance dans les
interventions et le modèle qu'il fournit à ses élèves en sont des exemples. De plus, l'enseignement d'habiletés perçues comme non-utiles par l'élève, la contingence de renforcements (les élèves qui ont des problèmes reçoivent beaucoup d'attention et les comportements appropriés sont peu renforcés) ainsi que les modèles indésirables de conduite par les élèves perturbateurs ont aussi un impact sur le développement des troubles du comportement (Poliquin-Verville et Royer, 1992).
Il a été démontré que les classes de première année avec une grande concentration de comportements pro-sociaux et des interventions ajustées visant la correction d'un comportement prédisent une amélioration des compétences sociales et une diminution des impacts négatifs possibles en lien avec les caractéristiques du milieu scolaire (Hoglund, 2004). Par ailleurs, le regroupement d'élèves en difficulté dans un seul groupe
homogène est connu pour avoir un impact négatif sur la réussite académique tout en
encourageant le développement de comportements agressifs et dérangeants (Hoglund et al, 2004). Dès lors, la réintégration à un groupe régulier s'avère difficile par la suite (Kellam, 1998). Finalement, l'identification à un groupe de pairs déviants serait associée à la précocité, la persistance et l'aggravation des symptômes des problèmes de conduite et à l'utilisation de drogues à l'adolescence (Thornberry, 1993; Lacourse, 2006; Dishiton
étal, 1995).
L'environnement psychosocial et économique
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement L'influence du niveau socio-économique sur le développement des troubles du comportement varie selon les études. Selon Van Leeuwen et ses collaborateurs (2004), les facteurs socioculturels expliquent jusqu'à 4% des comportements extériorisés. Bien que les résultats puissent varier selon la culture d'origine (Guerra et al, 1995), les enfants de milieux défavorisés ou de quartiers où les taux de criminalité et de désorganisation sociale sont élevés présenteraient davantage de facteurs de risque (Tremblay et al, 2004; Stouthamer-Loeber et al, 2002). De plus, les enfants de milieu urbain présenteraient davantage de troubles mentaux en général que ceux du milieu rural (Breton et al, 1999). Il serait facile d'associer un milieu désavantagé au plan socio-économique à une diminution des compétences sociales et à une augmentation des problèmes de comportement en première année. Toutefois, si les parents et la
communauté fournissent un environnement et un soutien émotif stables et stimulants,
les effets négatifs des limitations financières et du stress chronique qu'ils engendrent seraient minimisés (Davis-Kean, 2005).
La culture
Les attentes et les valeurs dominantes d'une culture peuvent favoriser le développement
de certaines problématiques et en décourager d'autres (Lambert, Weisz et Knight, 1989; Weisz, 1987). De fait, l'organisation sociale ainsi que les différentes idéologies,
croyances et valeurs d'une société ont un impact sur le développement des difficultés
d'adaptation. Les différentes études transculturelles consultées révèlent que les pratiques éducatives, les valeurs d'une culture et le mode de socialisation, peuvent décourager le développement de certaines problématiques et en favoriser d'autres (Lambert et al, 1989). De façon générale, les groupes culturels qui répriment les comportements sous-contrôlés et encouragent la dépendance, la politesse, le respect, l'inhibition, le conformisme, la soumission, la docilité et l'obéissance chez l'enfant ont une plus grande proportion de comportements sur-contrôlés et moins de comportements sous-contrôlés (Lambert et al, 1989; Weisz et al, 1993). Chez les communautés culturelles qui se caractérisent par un niveau élevé de solidarité, de valeurs collectivistes et où l'harmonie du groupe a préséance sur l'individu, on observe moins de comportements perturbateurs (Bird et al, 2001). En contrepartie, on remarque une plus
grande incidence des comportements sous-contrôlés dans les cultures où la centration
première des valeurs est l'estime de soi, le bien-être de l'individu, où l'expression des émotions et l'indépendance sont encouragées et dans lesquelles on tolère davantage ce 10
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
genre comportements (Lambert et al, 1989; Weisz et al, 1993). Notons que les jeunes
issus de communautés culturelles où les valeurs religieuses et familiales prédominent auraient également un risque moins élevé de développer un trouble du comportement
(Bird et al, 2001).
Dans le cas des troubles du comportement comme dans d'autres pathologies on peut
penser que le sens donné à la pathologie ainsi que les implications socio-morales
attribuées à la personne par la culture influencent le cours de la maladie et la construction de l'expérience de la personne (Kirmayer, 1994).
Vitaro et Gagnon (2000) vont dans le même sens en soutenant que les comportements
agressifs peuvent avoir une signification et un impact différents selon le contexte social
et culturel particulier dans lequel ils se manifestent.
Cependant, aucune des études recensées n'a abordé la question des troubles du comportement chez les jeunes sous un angle qui tienne compte à la fois de l'expérience intersubjective des enfants, de leurs parents et des intervenants responsables de leurs soins.
2.3 Besoin pour la recherche
Les difficultés d'adaptation chez les jeunes ont été étudiées sous plusieurs angles au cours des dernières décennies. L'apport de la recherche à l'intervention est précieux
mais demeure limité. De nombreux facteurs de risque du trouble du comportement ont
été identifiés. Les caractéristiques personnelles de l'enfant sont en constante interaction
avec son environnement à savoir son milieu familial, l'environnement scolaire et de la
société dont il fait partie. L'individu influence et est influencé par plusieurs systèmes directs et moins directs ainsi que par les valeurs et croyances de la culture dans laquelle il vit. Les troubles du comportement seraient donc une réalité en partie socialement construite influencée par de multiples facteurs et processus psychologiques. Le développement des comportements et la lecture qui en est faite sont donc tributaires du contexte socioculturel. De ce fait, la problématique s'avère en partie subjective et ne saurait être évaluée sans une considération rigoureuse de la culture, de l'institution, du jeune, des différents évaluateurs et de leurs contextes respectifs. Rappelons la mise en 11
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
garde de Wakerfield contre le danger de confondre un trouble avec une réaction qui
n'est pas dysfonctionnelle par rapport à un environnement malsain (Wakerfield, 1997).
Les relations causales entre les différents facteurs de risque et de protection sont
complexes et demeurent imprécises. Nos observations de clinicienne révèlent un écart
considérable entre les connaissances épidémiologiques et les observations et
connaissances cliniques. Le Comité sur la santé mentale du Québec (2007) fait le même
constat : « La dichotomie (ou dissonance) entre le discours et la réalité du terrain est une source de détresse individuelle, de détresse sociale et de désorganisation. Curieusement, les chercheurs en font peu état.»
À ce jour, peu de travaux ont porté sur les composantes socioculturelles impliquées
dans le développement de cette problématique. Les recherches s'inscrivent pour la
plupart dans une vision atomiste et omettent de considérer l'individu dans la complexité
de ses relations avec son contexte. Elles nous apparaissent donc lacunaires quant à la
compréhension des processus psychologiques et affectifs impliqués et à la prise en
compte du contexte socioculturel. 2.4 Question de recherche
Comment le contexte socioculturel francophone-québécois d'origine est-il impliqué dans les troubles du comportement chez les élèves québécois du primaire au secteur public de l'Est de Montréal ?
2.5 Objectifs
Nous cherchons à explorer et mieux cerner le rôle des facteurs socioculturels dans les troubles du comportement à l'école. Une compréhension accrue des interactions entre les divers facteurs impliqués permettra de développer des connaissances relatives aux contextes socioculturels des divers troubles du comportement. Nous serons ainsi en mesure de contribuer à orienter le développement de pistes d'intervention adéquates d'un point de vue socioculturel.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
2.6 Méthodologie
À ce jour, plusieurs études quantitatives ont été menées sur les troubles du
comportement. Afin de compléter les informations disponibles, nous proposons une recherche de type qualitatif permettant l'accès à l'expérience subjective afin d'en arriver à une compréhension accrue d'un phénomène social complexe.
Une approche ethnographique donne accès au sens collectif donné à la problématique vécue par l'individu et les acteurs de son milieu culturel. Les années d'expérience professionnelle d'intervention de l'auteure ainsi que son appartenance à la culture observée constituent une base d'observation participante considérable qui, jumelée aux travaux effectués correspondent à l'approche ethnographique. Considérant les objectifs de la recherche, la méthode ici proposée consiste en une étude de cas constituée de dix unités avec trois niveaux d'analyse imbriqués soit l'enfant, le parent et l'enseignant. Tel que suggéré par Yin (1994), l'étude de cas est indiquée en réponse à un questionnement sur le « comment » d'un événement. Elle permet une prise en compte du contexte ainsi qu'un niveau considérable d'exactitude et de profondeur pour un phénomène qui se produit naturellement (Green et Throrogood, 2004 ; Stake, 2000). Recrutement
Le projet a d'abord été approuvé par le comité de sélection des projets de recherche de
la Commission scolaire de la Pointe-de-l'île (CSPI). La lettre de demande au comité
éthique ainsi que l'approbation éthique peuvent être consultées en annexe I. Une demande de collaboration a ensuite été transmise par ce comité aux directions d'école concernées. Le recrutement s'est fait en collaboration avec les directions d'école et
certains psychoéducateurs impliqués auprès des classes spécialisées. À partir de la liste
des élèves du primaire identifiés en trouble du comportement, les sujets ont été sélectionnés en fonction des critères spécifiques suivants : la problématique identifiée, le lieu de naissance de l'enfant et de ses parents et l'âge de l'élève. De fait, les sujets sélectionnés ont fait l'objet d'une évaluation psychosociale par le passé et sont reconnus en troubles du comportement par la commission scolaire. Afin d'assurer une relative uniformité culturelle pour les besoins de l'étude, les sujets ainsi que leurs parents sont nés au Québec. Tous les parents interrogés sont nés de parents Québécois à l'exception d'une mère dont le père était magrébin. En raison du nombre considérable de 13
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
questions et afin d'assurer un discours suffisamment étayé, les élèves sélectionnés sont
âgés entre onze et treize ans. De plus, par considération éthique et professionnelle,
nous (psychoéducatrice-chercheure) n'avions en aucun cas été impliquée à titre
professionnel dans l'accompagnement ou l'intervention auprès des élèves choisis.
Finalement, le libre accord de chacune des personnes interrogées était une condition de
sélection pour l'étude. Cueillette des données
Les données ont été recueillies dans le cadre d'entrevues ethnographiques
semi-dirigées. Le questionnaire MINI (Groleau et al, 2006) a été utilisé pour recueillir les récits
des participants. Trois versions du questionnaire ont été utilisées, chacune traduite et
adaptée en fonction de la personne à laquelle il s'adresse (enfant, parent, enseignant).
Chacune des versions est présentée à l'annexe Ii. Notons qu'un élément a été ajouté au questionnaire initial. Inspirée des quelques expériences d'accompagnement
professionnel présentées en introduction, nous avons cru pertinent d'ouvrir le
questionnement quant à la place des croyances spirituelles des participants en lien avec
leur vécu. Les questionnaires du parent et de l'enfant ont été testés au préalable auprès d'une dyade mère-enfant que nous avions accompagné il y a quelques années dans une école primaire de cette même commission scolaire.
Chaque entrevue était d'une durée moyenne de 90 minutes. Elles ont eu lieu à la résidence des participants pour les parents et certains enfants et à l'école pour les
enseignants et la majorité des enfants. Chaque entrevue avec les parents débutait avec
la signature du formulaire de consentement parental tel que présenté à l'annexe III.
Chaque participant était assuré de la confidentialité de l'entrevue et invité à se sentir libre de prendre une pause, de ne pas répondre à certaines questions ou d'interrompre l'entrevue au besoin. Les entrevues étaient enregistrées sur support audio.
Traitement des données
Les données recueillies ont été regroupées par thèmes. Les douze thèmes de codage, inspirés par les travaux des créateurs du questionnaire MINI, sont les suivants :
1 . Modèles explicatifs : les éléments du discours qui fournissent une explication ou
les causes des difficultés de comportement.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
2. Événements : les divers événements auxquels réfèrent les participants.
3. Représentation du trouble du comportement : les éléments du discours qui traduisent la perception que les participants ont du trouble du comportement. 4. Représentation de l'enfant : les éléments du discours qui traduisent la perception
que les participants ont de l'enfant concerné.
5. Représentation de soi : les éléments du discours qui traduisent la perception que les participants ont d'eux-mêmes.
6. Représentation des autres : les éléments du discours qui traduisent la perception
que les participants ont des autres personnes.
7. Représentation des médias : les éléments du discours qui réfèrent à la représentation des troubles du comportement dans les divers médias.
8. Problématiques associées : les diverses problématiques connexes auxquelles
font référence les participants.
9. Services reçus : les divers services mentionnés par les participants.
1 0. Barrières aux soins et facteurs nuisibles : les éléments du discours exprimant les
freins ou facteurs limitant l'adhésion aux divers soins.
1 1 . Facteurs aidants, besoins et pistes de solution : les éléments du discours
exprimant les facteurs favorisant l'adhésion aux divers soins ainsi que les besoins et pistes de solutions exprimés par les participants.
12. Spiritualité, croyances et désirs : les éléments du discours qui font référence à la spiritualité et aux diverses croyances des participants ainsi que les éléments qu'ils auraient souhaité différents dans leur expérience.
Pour chacun de ces thèmes, les données ont été organisées dans un diagramme de
Venn afin de permettre l'analyse des convergences et divergences. Un exemple de
d'organisation des données pour chaque regroupement est présentés à l'annexe IV. Parce qu'elle permet la compréhension des comportements humains à partir du point de vue des personnes impliquées, l'approche privilégiée pour l'analyse des données est de nature interprétative (Green et Thorogood, 2004). Par une triangulation des discours, nous avons procédé à une mise en relation des trois niveaux d'analyse soit le parent, l'enfant et l'enseignant. Tel que présenté par Schwandt (2001), une telle triangulation est un moyen de considérer différents points de vue et permet de vérifier l'intégrité des conclusions avancées. La considération des convergences et divergences des discours 15
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement nous donne donc accès au sens donné à l'expérience et permet un niveau accru de compréhension de la problématique.
Dans notre étude, une première analyse verticale individuelle relève donc les
convergences et divergences entre les points de vue à l'intérieur d'une même triade. Par
la suite, une analyse horizontale collective permet l'accès au contexte socioculturel par
la prise en compte des perceptions de tous les représentants d'un même groupe
(enfants, parents et enseignants).
Dans un autre temps, avec l'intention d'approfondir l'analyse, de bonifier la
compréhension des résultats et de valider la démarche, un groupe de discussion a été
organisé avec des collègues professionnels de la consultation. Ce groupe était constitué
de la conseillère pédagogique à l'adaptation scolaire, de la personne ressource aux
services régionaux de soutien en psychopathologie et de quatre collègues
psychoéducateurs actifs au sein de la CSPI. Les réflexions qui ont émergé de ce groupe
sont intégrés à l'analyse des résultats
Stratégie de transfert des connaissances
Dans une optique de partage et transfert des connaissances, la recherche et les
résultats partiels ont été présentés et discutés à différents moments de l'étude. Trois
communications orales ont été présentées dans le cadre de conférences internationales dont deux communications orales au Congrès mondial de réadaptation psychosociale à Athènes, Grèce au mois d'octobre 2006 et une communication orale à la Conférence
mondiale sur la Violence à l'École à Lisbonne, Portugal en juin 2008. De plus une
présentation a été faite dans le cadre des Culture and Mental Health Research Meeting
au département de psychiatrie sociale et transculturelle de l'Université McGiII.
Une présentation de l'étude et des pistes d'interventions à l'intention de l'ensemble des
professionnels de la consultation (psychoéducateurs, psychologues, orthophonistes) est
également prévue dans le cadre des commissions professionnelles de la CSPI.
Finalement, à la demande de certains parents qui ont participé à l'étude, une présentation leur sera proposée.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
3. Profil de l'échantillon
Le projet initial était de baser l'étude sur dix études de cas. De fait, des entrevues ont été complétées avec dix enfants, onze parents et six enseignants. En raison du contenu spécifique émergeant des entrevues, un prêtre catholique qui pratique des exorcismes a également été interrogé de façon moins structurée, sans référence au questionnaire.
Par ailleurs, deux triades ont été mises de côté car certaines entrevues ne permettant
pas de recueillir les données nécessaires. L'échantillon final est donc composé de huit
enfants, neuf parents et de cinq enseignants. 3.1 Institution
La Commission Scolaire de la Pointe-de-l'île est l'une des trois commissions scolaires
francophones de l'île de Montréal. Le secteur primaire est composé de quarante-deux
écoles réparties dans l'est de l'île. La CSPI couvre les arrondissements de Montréal-Nord, Rivière-des-Prairies, Anjou, St-Léonard, Montréal-Est et Pointe-aux-Trembles. La démographie ainsi que le niveau socioéconomique sont variables selon les secteurs. Bien que l'ensemble des élèves identifiés en trouble du comportement ait été considéré pour le recrutement des sujets, aucun élève du secteur régulier n'est inclus dans
l'échantillon final. Les élèves retenus pour l'étude fréquentent tous une classe
spécialisée dont une classe pour élèves en difficulté grave d'apprentissage (DGA) et trois classes de troisième cycle pour élèves en troubles du comportement (TC). Chacune de ces classes compte un nombre réduit d'élèves présentant des problématiques
similaires. Une classe DGA compte entre 15 et 18 élèves dont la problématique
principale se situe au niveau des apprentissages alors qu'une classe TC est constituée
de 10 à 12 élèves identifiés en trouble du comportement. Ces classes occupent les
locaux dans des écoles régulières. Pour la plupart des élèves en classe spécialisée, l'école fréquentée n'est pas leur école de quartier. Ils proviennent donc de différentes régions du territoire de la CSPI. L'aménagement et l'organisation de chacune des classes ainsi que l'intégration des élèves en difficulté aux activités du secteur régulier varient selon les endroits.
Considérant le fait que certains élèves retenus pour l'étude fréquentent la même classe, le nombre d'enseignants interrogés est inférieur au nombre d'enfants et de parents. Au 17
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
total quatre femmes et un homme constituent le groupe d'enseignants. L'origine
culturelle des enseignants n'était pas un élément contrôlé lors de la sélection des
participants. Toutefois, les cinq enseignants consultés sont d'origine québécoise nés au
Québec. L'expérience professionnelle auprès d'une clientèle présentant des besoins particuliers est variable d'un enseignant à l'autre.
3.2 Familles
Au total, neuf parents ont été interrogés. Huit mères et un père. Le tableau suivant
présente un portrait des configurations familiales étudiées. Rappelons que les
informations contenues dans ce tableau proviennent du discours des participants, plus
spécifiquement des parents et n'ont pas fait l'objet d'une validation par ailleurs.
Tableau 1 : Portrait des familles
Mère w +¦> ? +¦> c O Ü O O. e LU Père (0 +¦« ? ? *j e o ? _? Q. e V) C F «? "C "° 15 (? JS
Garde Transport Aucun NA
Garde Sans emploi Décédé NA
Garde Entrepreneure OccasionnelsRéguliers ND
Garde Restauration OccasionnelsIrréguliers ND
Garde Sans emploi Garde Journalier
Garde Fonctionnaire OccasionnelsIrréguliers ND
Garde Esthétique 1 fois ND
Garde Sans emploi 2-3 fois ND
Légende : NA : Non applicable
ND : Donnée non disponibleFacteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
3.3 Enfants
Les enfants interrogés sont tous des garçons âgés entre 11 et 13 ans. Les critères de sélection de l'échantillonnage ne se limitaient pas aux garçons. Toutefois, cette surreprésentation des garçons est en concordance avec celle observée dans les travaux antérieurs. Parmi ces garçons, sept fréquentent une classe spécialisée pour élèves en trouble du comportement et un fréquente une classe pour élèves en difficulté grave d'apprentissage. Le contenu des entrevues révèle qu'au moins cinq de ces huit enfants présenteraient aussi des difficultés ou un retard d'apprentissages. Pour un des élèves interrogés, une évaluation psychologique a révélé un trouble instrumental au niveau de la mémoire de travail. Trois ont reçu le diagnostique de trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité (TDAH) et trois autres en présentent des indices selon leur enseignant. Dans le cas de six enfants on fait référence à des indices ou hypothèses de psychopathologies diverses (Syndrome Gilles de la Tourette, trouble de la personnalité limite, automutilation, anxiété, dépression, bipolarité). Finalement, pour cinq enfants il est aussi question d'autres problèmes de santé (migraines, vomissements, surplus de poids, atteinte de la glande tyroïde, oxyures, problèmes de sommeil).
4. Présentation des résultats
Une quantité importante de données a été recueillie au cours des diverses entrevues constituant cette étude. La triangulation des discours à travers les deux types d'analyse (verticale individuelle et horizontale collective) a permis l'accès au sens donné par les principaux acteurs impliqués. L'analyse verticale individuelle, c'est-à-dire entre les trois personnes de la même triade, met clairement en évidence les dynamiques entre le milieu familial et scolaire et permet une compréhension accrue du vécu et des difficultés spécifiques à chacun des enfants. Bien qu'il soit pertinent, voir même nécessaire, à un accompagnement professionnel, ce niveau d'analyse a été traité de façon plus globale considérant les objectifs de la présente étude.
Il est intéressant de constater qu'au premier regard, peu d'éléments des discours
convergent. Toutefois, l'analyse horizontale collective, qui consiste en une mise en relation des discours de toutes les personnes d'un même groupe et entre les groupes, a permis de dégager les zones de convergence communes à la plupart des triades. Afin 19
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement
de faciliter la compréhension des données à venir, la figure 2 illustre les zones de
regroupement des éléments du discours.
Figure 1 : Zones de regroupement des éléments du discours
ENFANT
yS^*^ ^^"V.
V F W G /
PARFNT
^V
N^/
y^ FNSFIRNANT
Les faits marquants de l'étude sont répartis selon cinq axes thématiques autour
desquels s'articulent les résultats soit; un parcours de ruptures et de conflits, un dialogue
de sourds, le besoin de relation et de reconnaissance, la place des croyances et un besoin de repères.
4.1 Un parcours marqué de ruptures et de conflits
Un des premiers éléments notables dans l'étude des discours est l'importance des
situations de conflit, de violence, de séparations et de deuils vécus par les enfants. Le
tableau 3 relève les paroles des enfants, des parents et des enseignants validant cette
observation. Sans nécessairement établir un lien avec les difficultés de l'enfant, six
parents font allusion à des situations conflictuelles ou de violence entre les adultes à la
maison. Pour leur part, les cinq enseignants interrogés réfèrent à un passé mouvementé
dans la vie de l'enfant. Les déménagements, changements d'école et d'intervenants sont aussi relevés de façon significative par les enfants et les parents.
Dans l'ensemble du discours des enfants, quelques idées ressortent comme
consensuelles. La première est que les huit enfants interrogés associent le début des
difficultés de comportement avec un événement précis. Pour la plupart, il s'agit d'une
situation de colère ou de conflit survenue à l'école. Comme s'il y avait pour ces enfants 20
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement un point de rupture, un point tournant qui explique le fait qu'ils soient maintenant en classe spécialisée. D'ailleurs, lorsque questionnés sur ce qu'ils souhaiteraient qui se soit passé autrement, la plupart reviennent à cet événement en des termes tels que « Je
voudrais avoir arrêté dès le début, quand c'était le temps », « J'aimerais revenir en
maternelle pour arrêter ce que j'avais fait pour avoir une feuille de route », « J'aurais aimé que le gars se mêle de ses affaires » ou encore « Avoir su, je n'aurais pas déclenché le système d'alarme ». Une faible et désolante stabilité est mise en lumière par le discours des parents. L'étude des convergences révèle que, contrairement aux enfants, huit parents sur neuf situent le début des difficultés avant l'entrée à l'école. Une autre forme de rupture ici représentée est celle du deuil de l'enfant parfait que les parents ont à faire. De façon significative, six parents expliquent avoir refusé de reconnaître ou d'accepter les difficultés de leur enfant à un moment ou un autre. Ils s'expriment en ces termes : « Je n'acceptais pas qu'il ait des difficultés, ça ne l'a sûrement pas aidé », « Je ne croyais pas ce que les profs disaient, je me suis rendu à l'école pis là je l'ai vu frapper un autre enfant sans raison. J'ai commencé à les croire ».
Dans le même ordre d'idées, certaines mères s'expriment quant à leur maternité : « Je
ne savais pas ce que ça demandait d'éduquer un enfant » ou encore « J'ai pas aimé ça autant que je pensais être mère ». Lorsque questionnés sur ce qu'elles auraient souhaité de différent, certaines expriment un profond regret «Avoir su que ça allait être tant de trouble, j'aurais pas eu d'enfant » ou encore « avoir su, j'aurais juste eu ma fille ». Ces phrases expriment l'importance du niveau de détresse de ces femmes.
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4.2 Un dialogue de sourds
Le second thème émergeant de l'analyse des discours est la difficile communication. Au
premier regard des résultats, on constate que très peu d'éléments du discours se
retrouvent dans les zones d'intersection (figure 2, zones A, B, C et D). Qu'il s'agisse des modèles explicatifs, des événements, des représentations du trouble du comportement
(TC) ou de tout autre regroupement, à un premier niveau de discours, l'entente est très
faible entre les parents, les enfants et les enseignants. Dans l'ensemble, l'information
circule difficilement et le contenu semble souvent distordu entre le milieu familial, le
milieu scolaire, les autres services (sociaux, de santé, etc.) et même entre les parents d'une même famille, tel qu'illustré par les paroles rapportées au tableau 4.
L'étude des intersections communes aux trois niveaux de discours (figure 2, zone A)
révèle que la convergence est quasi inexistante. De l'ensemble des éléments exprimés,
deux seulement sont relevés à la fois par l'enfant, son parent et son enseignant. Il s'agit de deux explications causales des difficultés de comportement soit la petite taille de l'enfant et la séparation des parents.
À travers l'ensemble des récits recueillis, nous observons une forte tendance à reporter
la responsabilité sur les autres. Nous nous attendions, considérant la nature de leurs
difficultés et leur niveau de maturité, à ce que les enfants aient recours à des
justifications ou réfèrent à des causes extérieures à eux. Effectivement, certains citent
des éléments extérieurs mais la plupart affirment, à un moment ou un autre de l'entrevue, que les comportements relèvent d'eux, qu'ils doivent apprendre à se contrôler. C'est davantage du côté des adultes qu'on observe la tendance à se lancer la
balle. Le discours intégré, c'est-à-dire se reconnaissant comme un élément pouvant
aussi contribuer aux difficultés de l'enfant est plutôt absent du discours des adultes. Sauf
quelques rares exceptions, les parents vont par exemple attribuer la responsabilité à
l'organisation ou aux décisions de l'école, à l'autre parent, aux enseignants, au quartier,
aux esprits ou à l'enfant lui-même. Les enseignants font pour leur part référence à un
vécu familial perturbé, à des pratiques parentales inadéquates, à des caractéristiques de l'enfant, etc. Pour terminer, notons que les cinq enseignants réfèrent entre autres à
l'inaptitude des parents ou à des pratiques parentales inadéquates pour expliquer les
difficultés de l'enfant.
Facteurs socioculturels relatifs aux troubles du comportement Aussi, qu'elle soit directement exprimée ou sous-entendue, la culpabilité est observée chez la plupart des mères interrogées. Leurs réactions face aux intervenants de l'école sont plus souvent négatives, agressives et sur le ton du reproche.
En dépit de l'importante divergence des discours, le lieu révélant le plus d'éléments communs est entre l'enfant et le parent (figure 2, zone B). De façon plus spécifique, les éléments communs concernent les événements ou le récit de situations vécues dans la famille (séparation, conflits, décès, etc.), les références aux services reçus et les critiques formulées envers les pratiques et interventions de l'école. Cette affiliation nous apparaît naturelle et saine, considérant le rôle de la famille et des parents dans la vie de
l'enfant et la durée de la relation. Elle est toutefois un élément à prendre en compte dans
l'intervention.
Le deuxième lieu d'entente, bien que très faible également, est entre les parents et les enseignants (figure 2 zone C). Les éléments communs concernent davantage les événements marquants de la vie de l'enfant (placement, séparation des parents, décès d'un proche, hospitalisation, etc.) et la perception qu'ils ont de l'enfant (immature, menteur, manipulateur, renfermé, faible estime de soi, etc.). Rappelons ici la présence significative des problématiques associées. Pour six enfants sur huit, les adultes réfèrent à un diagnostic psychopathologique (Syndrome Gilles de la Tourette, trouble de la personnalité limite, anxiété, dépression, bipolarité) ou à des comportements associés dont l'automutilation.
Le plus faible niveau d'entente est finalement entre les enfants et leur enseignant (figure 2, zone D). Dans l'ensemble des données, un seul élément commun est à la fois présent dans le discours de l'enfant et de son enseignante. Il s'agit d'une situation récente vécue en classe où l'enfant a été mis à l'écart du groupe par l'enseignante.