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Marie-Thérèse et Fernand Maurette-Dupuy : Une biographie familiale entre la rue d'Ulm et les bords du Léman

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Thesis

Reference

Marie-Thérèse et Fernand Maurette-Dupuy : Une biographie familiale entre la rue d'Ulm et les bords du Léman

CARRUPT, Roland

Abstract

Cette recherche part d'un géographe méconnu, Fernand Maurette, devenu fonctionnaire international au BIT. Elle se poursuit avec la découverte de son épouse Marie-Thérèse, directrice de l'Ecole internationale de Genève de 1929 à 1949, qui constitue le fil rouge de notre travail. Celui-ci ouvre dans quatre directions différentes : le milieu normalien et la géographie ; du socialisme réformateur au communisme ; les internationalismes et les organisations internationales ; la question du genre. L'étude des trajectoires des membres de ce clan familial (les Maurette, les Vigier et Paul Dupuy) s'inscrit dans l'histoire sociale et familiale des milieux internationalistes du début du XXe siècle jusqu'à la fin des années 1960.

À partir de ces trajectoires, il est en effet possible de mettre en lumière les moments charnières d'un certain internationalisme français, à la jonction de plusieurs expériences internationales dans des domaines comme la science, l'éducation, la politique et les organisations internationales.

CARRUPT, Roland. Marie-Thérèse et Fernand Maurette-Dupuy : Une biographie familiale entre la rue d'Ulm et les bords du Léman. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2021, no. L. 1005

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:151290 URN : urn:nbn:ch:unige-1512905

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:151290

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Université de Genève

Thèse pour l'obtention du doctorat ès lettres de l'Université de Genève, présentée et soutenue publiquement en février 2021 à Genève

Roland CARRUPT

Marie-Thérèse et Fernand Maurette-Dupuy. Une biographie familiale entre la rue d'Ulm et les bords du Léman.

Thèse rédigée sous la direction de Madame la Professeure Sandrine KOTT.

Membres du jury :

Madame Joëlle DROUX, Maître d'enseignement et de recherche à l'Université de Genève.

Monsieur Pierre EICHENBERGER, Maître d'enseignement et de recherche à l'Université de Lausanne.

Madame Irène HERRMANN, Professeure à Université de Genève, Présidente du jury.

Madame Sandrine KOTT, Professeure à l'Université de Genève.

Madame Isabelle LESPINET-MORET, Professeure à l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne.

Madame Marie-Claire ROBIC, Directrice de recherche émérite (CNRS), Paris.

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Remerciements

Ce travail de thèse, bien qu’étant une entreprise essentiellement individuelle, n’aurait pas été possible sans le soutien bienveillant et amical de toute une série de personnes que je me dois de citer, en leur adressant mes plus chaleureux remerciements.

À Lausanne tout d’abord :

Monsieur le Professeur Georges Nicolas m'a initié au début des années 1990 à l'histoire de la géographie au sein de l'IRI (Institut de Recherches Interdisciplinaires), en Faculté des Sciences sociales et politiques. Il m'a ensuite dirigé vers Paris, dans le cadre d'une convention entre les universités de Lausanne et Paris I. Nos échanges amicaux se poursuivent toujours au sein de la Société Scientifique Eratosthène qu'il préside depuis de longues années.

À Paris ensuite :

Madame Marie-Claire Robic, Directrice de recherche émérite (CNRS), qui m'a accueilli un jour d'octobre 1993 à la rue Malher, au centre d'histoire de la géographie de l'université de Paris I.

Deux des petites-filles de Marie-Thérèse et Fernand Maurette, Mesdames Thérèse Picquenard-Maurette et Norine Brivot-Maurette (décédée le 9 juillet 2020).

L’archiviste de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, Monsieur Olivier Cottarel, qui veille sur une partie des archives d’HEC Paris.

L’archiviste du PCF à la place du Colonel-Fabien, Madame Isabelle Lassignardies.

Un retour à Genève :

Les membres du séminaire de doctorants de la Professeure Sandrine Kott, avec un merci tout particulier à Mesdames Véronique Stenger-Plata, pour son amitié et ses précieux conseils dans la dernière ligne droite, et Myriam Piguet pour la problématique liée à la question du genre.

Le directeur des archives du BIT, Monsieur Remo Becci.

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L’archiviste de l’Ecolint, Monsieur Alejandro Rodriguez-Giovo.

L’archiviste de la SdN, Monsieur Jacques Oberson.

Le géographe Federico Ferretti, entretemps parti à Dublin.

En Valais pour finir :

Aux deux derniers Recteurs du Kollegium Spiritus Sanctus de Brigue, Messieurs Michael Zurwerra et Gerhard Schmidt, pour le soutien et la compréhension, de même qu’à mes collègues francophones.

À mes deux amis et compagnons de la Fondation suisse à la Cité internationale universitaire de Paris (saison 1993-1994) Vincent Arlettaz et Jérôme Meizoz.

À ma famille et belle-famille, plus particulièrement à mon épouse Gabrielle et à nos deux jeunes hommes, Romain et Julien, qui ont grandi en même temps que ce travail.

Au jury de thèse et à ma directrice de thèse, Madame Sandrine Kott sans qui les intuitions de départ n'auraient jamais abouti de cette façon. Si les erreurs et les imprécisions nous sont totalement imputables, l'orientation générale et la coloration du travail doivent énormément à son amical et exigeant soutien.

Ces remerciements sont à l’image du parcours de thèse, entre les bords du Léman et Paris, avec comme point d’ancrage la vallée valaisanne du Rhône entre Brigue et Martigny.

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Photographies des pages suivantes

Page iv : Marie-Thérèse Maurette, Genève, années 1920.

Page v : Fernand Maurette, Genève, BIT, années 1920.

Page vi : Paul Dupuy, Ecolint, 1946.

Page vii : Marie-Thérèse Maurette, Ecolint, 1946.

Page viii : Marie-Thérèse Maurette, Genève, 2019, dans le cadre du projet 100Elles.

Nous remercions chaleureusement Mesdames Thérèse Picquenard-Maurette et Marjolaine Maurette pour la mise à disposition des quatre premières photographies.

La dernière photographie a été prise par nos soins en 2019.

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Table des matières

1 Liste des principaux sigles ... 4

2 Introduction générale ... 6

3 L’ENS de la rue d’Ulm, matrice de l’engagement international ... 31

3.1 Quelques caractéristiques générales de l’Ecole ... 34

3.1.1 Début et développement au XIXe siècle ... 34

3.1.2 Les liens entre l’Ecole et la IIIe République ... 37

3.1.3 Un cursus propice à l’international ? ... 41

3.2 Paul Dupuy ... 44

3.2.1 Un bref portrait ... 44

3.2.2 « La providence des normaliens » ... 47

3.3 Un moment clé pour l’Ecole : l’affaire Dreyfus ... 51

3.4 La guerre 1914-1918 vécue à la rue d’Ulm ... 55

3.4.1 La transformation de l’Ecole en hôpital ... 55

3.4.2 Le réseau postal normalien ... 57

3.4.3 L’Ecole, carrefour des hommes : les figures de Gaston Julia et Robert Hertz ... 61

3.4.4 Le gardien de la mémoire normalienne ... 63

3.5 Albert Thomas ... 66

3.5.1 De la rue d’Ulm au socialisme ... 66

3.5.2 Un homme politique d’envergure nationale ... 71

3.5.3 De Paris à Genève, en passant par les terres de Jaurès ... 74

3.6 Conclusion du chapitre ... 76

4 La géographie, une discipline propice à l’engagement international ? ... 78

4.1 De la géographie à la rue d’Ulm aux organisations internationales ... 80

4.1.1 Les géographes à la rue d’Ulm : un réseau ? ... 80

4.1.2 Que retenir de ces portraits de géographes ? ... 86

4.2 Les géographes dans la cité ... 91

4.3 La géographie économique de Maurette ... 103

4.3.1 Sa présence à HEC ... 103

4.3.2 Le contenu des cours de géographie ... 106

4.3.3 Ses livres ... 118

4.3.4 Un contributeur de revues ... 128

4.4 Conclusion du chapitre ... 134

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5 Des innovations pédagogiques au service de l’international ... 138

5.1 Dupuy et Maurette au cœur de la rénovation de l’enseignement de la géographie 141 5.1.1 Dupuy et la dimension internationale ... 144

5.1.2 Les réformes de la géographie en France ... 147

5.1.3 Entre anarchisme et Education Nouvelle ... 152

5.2 Le Collège Sévigné ... 156

5.2.1 Les origines de Sévigné ... 157

5.2.2 Les innovations de Sévigné ... 160

5.2.3 Des figures féminines ... 165

5.3 Conclusion du chapitre ... 170

6 Conclusion de la première partie ... 173

7 Les sociabilités genevoises ... 179

7.1 Le contexte historique ... 183

7.1.1 La situation générale dans les années 1920 ... 183

7.1.2 La montée des tensions dans les années 1930 ... 188

7.1.3 Genève 1939-1945, entre renseignements et Résistance ... 191

7.2 La vie du clan familial à Genève ... 194

7.3 Conclusion du chapitre ... 202

8 Une famille de pédagogues à Genève ... 206

8.1 Le contexte de la réforme pédagogique ... 212

8.1.1 Le mouvement d’Education Nouvelle ... 215

8.1.2 Les principes de l’Education Nouvelle ... 220

8.2 Le rôle de Dupuy et des Maurette à l’Ecolint ... 222

8.2.1 Dupuy et Maurette : fondateurs et pédagogues ... 225

8.2.2 L’Ecolint et la revue Pour l’Ère Nouvelle ... 229

8.3 Marie-Thérèse Maurette à l’Unesco ... 232

8.4 Marie-Thérèse Maurette au Centre international de l’Enfance ... 239

8.5 Conclusion du chapitre ... 245

9 Le géographe au BIT (1924-1937) ... 250

9.1 Les correspondances entre son activité et sa géographie ... 251

9.1.1 Les différentes revues ... 252

9.1.2 Le contenu des articles de Maurette ... 256

9.2 Quel regard géographique dans les différentes missions ? ... 270

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9.2.1 L’organisation générale des missions ... 270

9.2.2 Les différentes missions ... 271

9.2.3 Analyse de ces différentes missions ... 275

9.3 Conclusion du chapitre ... 296

10 Conclusion de la deuxième partie ... 300

11 Les Vigier père et fils, entre Genève, Paris et New York ... 305

11.1 Henri Vigier : trente ans au service des organisations internationales ... 306

11.2 Jean-Pierre Vigier : un personnage de roman entre science et politique ... 315

11.3 Quelques observations en guise de conclusion ... 329

12 Conclusion générale ... 330

13 Bibliographie ... 334

14 Annexes ... 368

15 Index des noms de personnes ... 376

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1 Liste des principaux sigles

AGF : Association de Géographes Français

BGI : Bibliographie Géographique Internationale BIEN : Bureau International des Ecoles Nouvelles BIT : Bureau International du Travail

CCIP : Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris CDS : Centre de Documentation Sociale

CEA : Commissariat à l'Energie Atomique CEPE : Centre d’Etudes de Politique Etrangère

CICI : Commission Internationale de Coopération Intellectuelle CIE : Centre International de l'Enfance

CICR : Comité International de la Croix-Rouge CNAM : Conservatoire National des Arts et Métiers CNE : Conseil National Economique

ECOLINT : Ecole Internationale de Genève EIA : Entente Internationale Anticommuniste EN : Education Nouvelle

ENS : Ecole Normale Supérieure

FAO : Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture FFI : Forces Françaises de l'Intérieur

FISE : Fonds International de Secours pour l’Enfance (qui deviendra l'Unicef) FTP : Francs-Tireurs et Partisans (Français)

HEC : (Ecole des) Hautes Etudes Commerciales

IICI : Institut International pour la Coopération Intellectuelle IJJR : Institut Jean-Jacques Rousseau

IUHEI : Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales LIEN : Ligue Internationale pour l’Education Nouvelle

MUR : Mouvements Unifiés de la Résistance OIT : Organisation Internationale du Travail

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OMS : Organisation Mondiale de la Santé ONU : Organisation des Nations Unies PCF : Parti Communiste Français PCI : Parti Communiste Italien

PCUS : Parti Communiste d'Union Soviétique PEN : (revue) Pour l'Ere Nouvelle

SDN : Société Des Nations

SFIO : Section Française de l'Internationale Ouvrière UEC : Union des Etudiants Communistes (de France) UGI : Union Géographique Internationale

UNEF : Union Nationale des Etudiants de France

UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

UNRRA : Administration des Nations Unies pour le secours et la reconstruction URSS : Union des Républiques Socialistes Soviétiques

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2 Introduction générale

Une exposition sur les débuts de la géographie en France

Au centre d’histoire de la géographie de l’université de Paris-Sorbonne, une exposition relate les débuts de la géographie en France. Un des panneaux met en évidence le réseau des premiers vidaliens qui se construit patiemment entre l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm, la revue des Annales de Géographie et l’entreprise de la Géographie Universelle des géographes Paul Vidal de La Blache (1845-1918) et Lucien Gallois (1857-1941) parue entre 1927 et 1948. Chaque géographe apparaît avec sa photographie et les liens qu’il entretient avec les autres membres du réseau. Un seul homme n’a pas d’image, mais seulement une silhouette plutôt massive à l’instar de celle du président du Conseil Edouard Herriot (1872-1957) : Fernand Maurette (1878-1937). Le panneau le signale pourtant comme l’un des premiers vidaliens par son passage à l’ENS, comme collaborateur régulier des Annales de Géographie et rédacteur de la Géographie Universelle.

Cette silhouette sans visage aux côtés des premiers géographes a d’emblée aiguisé ma curiosité, tout comme les discussions menées avec Marie-Claire Robic, Directrice de recherche émérite au CNRS à Paris et membre de l’unité mixte de recherches 8504 Géographie-Cités. La géographe nous rend attentif au fait que des géographes français ont travaillé dans l’entre-deux-guerres au sein des organisations internationales basées à Genève. Elle ajoute de façon quelque peu énigmatique que je gagnerais à m’intéresser à ce personnage, qui a eu une fort belle carrière « hors les murs » de l’université française, à Genève au sein du Bureau international du Travail.

En plus dans nos différentes lectures concernant l’histoire de la géographie française, nous avons rarement vu le nom de Maurette et encore moins des traces de son activité scientifique. Quelle est donc sa spécialité comme géographe et pourquoi est-il parti à Genève ? Telles sont les toutes premières questions à l’origine de notre travail de thèse.

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Nous disposons comme point de départ d’un nom et d’une notice nécrologique écrite par son beau-père dans les Annales de Géographie1. Ce texte comporte une interrogation sur le décès subit du géographe en 1937, alors qu’il semble en pleine forme ou en tout cas en pleine activité.

Deux lieux et un homme apparaissent très rapidement dans le texte écrit par Dupuy et Gallois. Tout d’abord, l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm où Fernand Maurette est successivement étudiant, puis rattaché à l’administration jusqu’à son détachement à Genève en 1924. Pourquoi d’ailleurs un tel changement de vie et de pays, alors que le couple Maurette semble solidement installé à Paris ? En effet, Fernand épouse en 1911 la fille de Paul Dupuy (1856-1948), figure marquante de l’Ecole qui travaille durant une quarantaine d’années à la rue d’Ulm. Ensuite Genève et le BIT où Fernand Maurette travaille de 1924 à 1937, d’abord comme chef de la Division des recherches, puis sous-directeur de cette institution dès 1933.

Enfin, un homme joue un rôle important dans le changement de trajectoire du géographe : le normalien et homme politique Albert Thomas (1878-1932). Thomas intègre l’ENS un an avant son camarade de lycée Fernand Maurette. Premier directeur du BIT, Albert Thomas a un riche passé d’historien et d’homme politique (maire de Champigny, député, ministre de l’Armement en 1917) doté d’un véritable réseau politique et d’anciens condisciples de l’ENS.

Notre recherche débute donc avec très peu d’empreintes ou d’indices, à la manière de l’enquête menée par l’historien italien Carlo Ginzburg2 au sujet du meunier frioulan Menocchio. Dans cette Italie du XVIe siècle Ginzburg met à jour, sur la base d’archives du procès mené par le Saint-Office, l’univers mental du meunier qui propose et défend des clés de lecture particulières à propos de la formation de l’univers. Ce dernier est né d’une sorte d’écume provenant de l’eau de mer qui se coagule ensuite comme un fromage et les vers contenus dans ce fromage deviennent des hommes. Dieu n’est donc pas le créateur de l’univers, au grand dam

1 Dupuy (Paul) et Gallois (Lucien), Fernand Maurette (1879-1937), Annales de Géographie, 1938, t. 47, no 266, p. 199-202. Les auteurs se trompent sur l’année de naissance. Maurette est né le 1er novembre 1878.

2 Ginzburg (Carlo), le Fromage et les vers. L’univers d’un meunier du XVIe siècle, Paris, Aubier, Flammarion, nouvelle édition 2014.

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de l’Eglise catholique3. En essayant de mieux comprendre cet univers mental, l'historien relève la circulation des idées et des hommes dans une région plutôt ouverte sur le monde. Il met également en lumière les pratiques de la toute puissante Eglise, les discours contradictoires du meunier, ainsi que la situation économique et politique de la région.

Le « paradigme de l’indice » et la méthode de détective qui recherche ces indices : tels sont les deux aspects méthodologiques du travail de l’historien italien qui nous inspirent dans notre propre recherche. Tout d’abord en nous intéressant non pas aux grandes batailles, structures politiques et administratives d’un Etat ou d’une grande organisation internationale, mais en partant d’un personnage très peu connu de la géographie française de la première moitié du XXe siècle en la personne de Fernand Maurette. La démarche micro-historique nous guide également dans l'attention portée au détail, avec le nom comme fil d'Ariane qui nous permet de reconstruire des familles et des réseaux, au sein desquels les femmes tiennent un rôle privilégié. Au départ, si Ginzburg reconstitue la bibliothèque du meunier pour comprendre ses pensées et ses conduites, nous reconstituons tout d'abord la production intellectuelle du géographe pour mieux comprendre le personnage et sa famille. Enfin, l'exigence d'une claire restitution de la construction de la recherche comprend aussi les doutes, les incertitudes et les absences d'informations qui ne conduisent pas nécessairement à pouvoir donner une hypothèse, d'où "une biographie (...) inévitablement vouée à rester fragmentaire, et avec elle, le réseau de relations qui l'enserrent"4.

Ces remarques font écho à une inquiétude de fond, à savoir où allons-nous avec tout cela, d'autant plus que le début de la quête d’indices destinés à tracer le portrait du géographe et le situer dans l'histoire de la géographie française est laborieux. Même en cherchant dans les principales études d'histoire de la géographie, et accessoirement sur la Toile, nous ne trouvons guère d’indices

3 Ibid., p. 117.

4 Ginzburg (Carlo) et Poni (Carlo), La micro-histoire, dans Le Débat 1981, no 17, p. 135.

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probants, ce qui renforce quelque peu notre étonnement et notre désir de poursuivre l'enquête.

Aux sources du couple Maurette

La première source qui déclenche notre recherche est la fréquentation assidue des archives du BIT. Là, et au contact des historiens du département d’histoire contemporaine de l’université de Genève, nous donnons un visage au géographe et nous nous faisons une idée plus précise de son travail de fonctionnaire international, sur la base des dossiers concernant les conférences et les missions menées par Fernand Maurette qui témoignent d’une vision des grandes questions du moment à une échelle mondiale. D’autre part, le dossier personnel de Maurette recèle quelques informations très utiles et troublantes. Le géographe a déjà de la famille sur place, en la personne de son beau-frère Henri Vigier (1886-1968). Pour la première fois, nous disposons d’une documentation abondante et régulièrement consultée par d’autres chercheurs. Le dossier personnel du géographe- fonctionnaire contient une photographie laissant apparaître un personnage à l’allure austère et sévère, illusion photographique ou véritable personnalité du scientifique ? Nous découvrons également pour la première fois une écriture très soignée et très lisible, qui penche largement sur la droite. Dans une de ses dernières lettres, probablement la dernière, la stupeur s’ajoute à l’énigme de son décès prématuré. En effet, en juillet 1937 alors qu’il revient à Genève pour une séance de travail, sa dernière lettre donne des informations destinées au déménagement définitif de la famille à Paris, en précisant au détour d’une phrase qu’il est actuellement alité. Une quinzaine de jours plus tard, soit le 1er août 1937, Fernand Maurette décède subitement dans un hôpital genevois.

Le dossier personnel mentionne des cours de géographie économique dispensé par Maurette à l’Ecole des HEC de Paris. Nous mettons du temps pour comprendre que l’Ecole des HEC dépend de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris.

Une visite aux archives de ladite Chambre dans un magnifique bâtiment situé à l’avenue de Wagram et plusieurs discussions fructueuses avec l’archiviste,

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Monsieur Olivier Cottarel, nous offrent l'accès à une modeste quantité d’archives : une cinquantaine de pages pour dix-huit ans d’activité, mais dont la qualité est au rendez-vous.

Avec désormais un visage, une activité professionnelle au BIT et un enseignement à HEC Paris, notre recherche débute donc véritablement. Elle se poursuit d'une fort belle et inattendue manière avec la rencontre à Paris de deux des petites-filles de Marie-Thérèse et Fernand Maurette. Avec Thérèse Picquenard-Maurette et Norine Brivot-Maurette, deux des sept filles de Paul (1912-1983) le premier des quatre enfants de Marie-Thérèse et Fernand, les échanges et correspondances se déroulent toujours dans la cordialité et la découverte réciproques. Notre appréhension de mettre notre nez dans leur histoire familiale se dissipe rapidement dans la chaleur des éclats de rire, notamment le jour où nous suggérons avec une infinie précaution que la "conversion" au communisme de leur grand-mère explique en grande partie son retour à Paris. Souvent, nous avons l’impression de leur apprendre beaucoup de choses, surtout sur Fernand mort trop jeune pour Thérèse et Norine. En revanche, les souvenirs concernant leur grand-mère morte presque centenaire restent encore vivaces et joyeux. Thérèse, la première des sept filles du couple, a d’ailleurs étudié quelques années à l'Ecole internationale de Genève (Ecolint) et vécu quelque temps chez sa grand-mère. À défaut d’avoir eu accès à des archives privées, probablement en grande partie détruites en 1937 lors du décès de Fernand, nous recevons le journal de famille écrit par leur grand-mère en 1982, à l’occasion d’un tragique événement familial : l’accident dont a été victime le père de Thérèse et Norine, qui décède quelque temps plus tard.

Marie-Thérèse Maurette-Dupuy (1890-1989) écrit ce journal, notamment à la demande de sa fille Florence (1920-2001) et de son neveu Jean-Pierre Vigier (1920- 2004) « pour passer ce temps d’une attente angoissée »5. Sur huitante-cinq pages inédites, car jamais sorties du cadre familial, Marie-Thérèse relate son enfance à la rue d’Ulm au tournant du XXe siècle, sa rencontre avec Fernand et leur mariage à la mairie du Ve arrondissement de Paris, avec le directeur de l'ENS Ernest Lavisse

5 Maurette (Marie-Thérèse), Journal de famille, 1982, 85 pages en version CD transmises par sa petite-fille Thérèse Picquenard-Maurette en septembre 2015. La citation se trouve en première page.

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(1842-1922) et le bibliothécaire de l’ENS Lucien Herr (1864-1926) comme témoins. La présentation des familles des grands-parents et la vie quotidienne durant les années de guerre complètent ce témoignage éclairant de la bourgeoisie française de la deuxième moitié du XIXe siècle. Ce texte bien écrit est décousu car livré par bribes.

Il se lit cependant de manière agréable et est instructif, mais dommage pour nous que les raisons du déménagement sur les bords du Léman et la vie de la famille à Genève ne soient brièvement relatées que sur les cinq dernières pages.

C'est plus particulièrement grâce aux archives de l'Ecolint que nous découvrons véritablement Marie-Thérèse Maurette6. De maman d’élève, Marie-Thérèse devient la directrice de la toute nouvelle Ecole internationale, poste qu’elle occupe jusqu’en 1949. Elle participe très activement à la mise en place d’une éducation internationale à Genève, notamment en vertu de sa maîtrise de l’Anglais à la suite de ses études à Londres. Paul Dupuy rejoint sa fille à Genève au lendemain de sa retraite à l’ENS. Ensemble, fille et père jouent un rôle pionnier dans la mise en place de ce projet éducatif novateur dans le sillage des organisations internationales nouvellement créées. Fernand soutient également Marie-Thérèse dans son activité, le couple Maurette figurant parmi les membres fondateurs de cette institution. Ce lien entre le BIT et l’école privée dure encore et il m’a été confirmé par l’archiviste de l’Ecolint, lui-même fils d’un ancien fonctionnaire du BIT.

Dès lors, le sujet prend une tournure inattendue puisqu’il ne s’agit plus d’analyser un géographe mais un couple très engagé dans les débuts de la Genève internationale. Fernand travaille au BIT qu’il représente dans la plupart des instances économiques internationales et pour lequel il effectue des missions et des expertises en Amérique, en Europe et en Asie. Il enseigne à HEC Paris et publie des manuels scolaires de géographie avec Louis Gallouédec (1864-1937), tandis que Marie-Thérèse développe une éducation internationale dans le cadre de l'Ecolint.

Madame accompagne parfois monsieur en mission. Les deux travaillent donc de

6 Voir par exemple https://www.ecolint.ch/fr/vue-densemble/notre-histoire (consulté le 26 novembre 2019).

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concert à la promotion de la paix, au développement d’une éducation et des organisations internationales. Cependant, la question d’une éventuelle biographie du couple Maurette-Dupuy ne se pose pas immédiatement malgré le surgissement d'une série d'interrogations. Marie-Thérèse est-elle plus intéressante que son mari géographe ? Faut-il mettre l’accent sur cette femme d’exception et laisser quelque peu de côté un mari supposé terne au premier abord ? Ou alors traiter le couple au travers de certaines de ses activités ?

Plusieurs constats de base apparaissent rapidement à la suite de la première collecte d’informations. Tout d’abord, il n’existe pas d’étude spécifique portant sur Maurette7, même si de récentes recherches lui accordent une place beaucoup plus importante que la simple mention de son nom. La première concerne la thèse de Jean-Baptiste Arrault sur les géographes et la mondialisation8, tandis que la biographie intellectuelle que Denis Wolff consacre au géographe Albert Demangeon (1870-1940) contient d’utiles informations sur les liens entre Demangeon et Maurette9. Rapidement, nous cherchons à en savoir plus sur Fernand Maurette au sein de la communauté des géographes, dont un certain nombre cultivent un intérêt marqué pour l’histoire de leur discipline. Certaines réponses surprennent parfois et témoignent d’un manque de connaissances.

« Maurette, c’est qui ? » nous a-t-on une fois répondu. Les informations au début sont faibles, voire fausses. Par exemple, Paul Claval ne mentionne qu’une fois Maurette dans un article consacré à la géographie économique, genre qu’il considère au passage comme étant mineur au sein de la discipline10. Pour lui, les

7 Clout (Hugh), The Vidalian Géographie Universelle : Five Authors on the Fringes of the French University World – Yves Chataigneau (1891-1969), Pierre Denis (1883-1951), Fernand Grenard (1866-1942), Fernand Maurette (1878-1937) and Paul Privat-Deschanel (1867-1942), dans Geographers Biobibliographical Studies, 2016, vol. 35, Edited by Hayden Lorimer and Charles W. J. Withers, Bloomsbury, p. 63-93. Dans ce texte, l'auteur traite Maurette sur quatre pages et son texte contient plusieurs erreurs.

8 Arrault (Jean-Baptiste), Penser à l’échelle du monde. Histoire conceptuelle de la mondialisation en géographie (fin du XIXe siècle/entre-deux-guerres), thèse de doctorat sous la direction de Robic (Marie-Claire), université Paris 1 Panthéon Sorbonne, décembre 2007.

9 Wolff (Denis), Albert Demangeon (1872-1940). De l'école communale à la chaire en Sorbonne, l'itinéraire d'un géographe moderne, thèse de doctorat sous la direction de Robic (Marie-Claire), université Paris 1 Panthéon Sorbonne, avril 2005.

10 Claval (Paul), La géographie économique, dans La géographie française à l’époque classique (1918-1968), Claval (Paul) et Sanguin (André-Louis) sous la direction de, Paris, l’Harmattan, 1996, p. 303-317.

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seuls géographes spécialistes de géographie économique sont Henri Hauser (1866- 1946) et Albert Demangeon. Parfois, il arrive aussi que l’on écrive des erreurs : Maurette dirige le BIT selon une publication consacrée à la géographie française de l’entre-deux-guerres11.

L’accueil au sein du réseau d’histoire des organisations internationales de l’université de Genève (le « HION ») compense largement ce dépit relatif lié au manque d’informations au sein de la géographie. Une première participation à l’un des séminaires de ce réseau nous permet d’y découvrir un groupe accueillant et intéressé au travail entrepris sur Fernand Maurette. A cette occasion, nous observons que le nom de Maurette est beaucoup plus familier aux historiens genevois qu’aux géographes parisiens.

Les informations biographiques sur Maurette nous amènent à l’histoire de l’ENS, d'autant plus que le réseau du géographe passe en priorité par la rue d’Ulm. Ainsi, la monumentale étude de Jean-François Sirinelli sur les khâgneux et les normaliens dans l’entre-deux-guerres12 constitue une porte d’entrée captivante pour mieux saisir le contexte intellectuel et le milieu normalien. En effet, Maurette et Dupuy en font pleinement partie, même s’ils ont quitté l’Ecole au début des années 1920.

L’intérêt de cette somme, qui s’impose pour comprendre la bifurcation de sa trajectoire, réside également dans les outils proposés par l’historien, à savoir les itinéraires individuels, le réseau et la notion de génération. Rapidement, nous posons un regard particulier sur cette institution en nous demandant si l’ENS ne constitue pas dans l’entre-deux-guerres un creuset d’internationalisme autour du réseau socialiste du bibliothécaire Lucien Herr et du Centre de documentation sociale fondé et soutenu par le financier Albert Kahn (1860-1940). Ces éléments confirment les lectures du début de cette recherche : la place et le rôle de l’ENS et la découverte assez rapide de l’appartenance, certes discrète mais avérée, de Maurette

11 Chevalier (Michel), Les géographes français dans l’entre-deux-guerres, dans La géographie française à l’époque classique (1918-1968), Claval (Paul) et Sanguin (André-Louis) sous la direction de, Paris, l’Harmattan, 1996, p. 15-26.

12 Sirinelli (Jean-François), Génération intellectuelle : khâgneux et normaliens dans l’entre-deux-guerres, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1988.

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au réseau d’Albert Thomas, l’un des personnages centraux du socialisme réformateur français au tournant du XXe siècle.

Comment écrire l'histoire d'un couple ?

Devant le manque d'informations concernant le géographe, et dans la foulée de la lecture de Sirinelli, nous reprenons la question d'une biographie de couple et nous entamons la lecture d'une quinzaine de biographies. Une d'entre elle attire particulièrement notre attention, celle de Saint Louis écrite par Jacques Le Goff, qui consacre des pages instructives à la question du genre biographique13. Ces propos complétés par l’article de Guillaume Piketty14 et les conseils prodigués par l’historien François Dosse15 renforcent notre perplexité, car nous mesurons davantage les difficultés d'une telle entreprise. Certes, nous nous sentons mieux armés pour l'écriture d'une biographie, même si nous n'avons guère lu de conseils pour en écrire une de qualité. D'autre part, aucune biographie lue n'est suffisamment proche de notre projet et ne nous inspire véritablement. Ecrire une biographie de couple constitue-t-il vraiment une entreprise inédite ? Oui, à en juger par la réaction du professeur Ludovic Tournès, qui nous signale Maurice et Jeannette16 en qui nous pensons immédiatement découvrir une source d'inspiration et un modèle à suivre.

C'est donc avec plaisir que nous nous lançons dans la lecture de cette étude extrêmement fouillée avec d'autant plus d'intérêt qu'elle concerne un couple emblématique du paysage politique français des années 1930 aux années 1960 et que nous sommes curieux de son traitement par une historienne confirmée.

D'autre part, elle nous fournit des explications sur le communisme français susceptibles d'éclairer un épisode énigmatique en ce début de travail, à savoir la

13 Le Goff (Jacques), Saint Louis, Paris, Gallimard, 2013. Les réflexions sur le genre biographique se trouvent en pages 18-33.

14 Piketty (Guillaume), La biographie comme genre historique ? Etude de cas, dans Vingtième Siècle, revue d’histoire, juillet-septembre 1999, no 63, p. 119-126.

15 Dosse (François), Le pari biographique. Ecrire une vie, Paris, Editions La Découverte, 2011.

16 Wieviorka (Annette), Maurice et Jeannette. Biographie du couple Thorez, Paris, Librairie Arthème Fayard, 2010. La page de couverture représente une photographie du couple Thorez.

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"conversion" de Marie-Thérèse au communisme dans les années 1940 qui entraîne son départ de Genève et son retour à Paris en 1950.

Comment Annette Wieviorka a-t-elle donc traité les deux personnages ? Jusqu’au chapitre VIII, il s’agit de parties qui évoquent alternativement Maurice Thorez (1900-1974) ou Jeannette Vermeersch (1910-2001), mais jamais ensemble. Ainsi jusqu’à la page deux cent trente, l’historienne montre clairement l’ascension parallèle du « mineur et de la tisserande », le tout étant d’ailleurs fort bien documenté. À partir du chapitre IX, et cela jusqu’à la fin du livre, la vie de famille des Thorez est abondamment commentée, en raison d'un important corpus d'archives. L’auteure souligne l’importance grandissante de Jeannette auprès de son mari diminué physiquement depuis son attaque cérébrale survenue en 1950.

Désormais, on peut dire que c’est le couple qui dirige le PCF. Par conséquent, il n’y a plus véritablement de traitement séparé des deux personnages étant donné qu’ils ne font qu’un. Annette Wieviorka relève d’ailleurs que Thorez va progressivement être déconnecté du monde extérieur et que c’est son épouse qui lui sert d’interface au monde communiste, de la direction à la base, et au monde tout court17. Elle nous apprend que Jeannette et Maurice voient désormais leurs activités se fondre, alors qu’avant chacun avait les siennes18.

Cette fusion progressive entre vie professionnelle et vie privée nous fait entrer dans l'intimité de la famille Thorez de manière rigoureuse et délicate, mais ne nous aide pas tant que cela, étant donné que le couple Maurette travaille aux mêmes objectifs mais dans des domaines distincts. De même en ce qui concerne l'engagement communiste de Marie-Thérèse Maurette, la lecture de la biographie du couple Thorez montre qu'elle ne croise pas leur route. Pourtant, les femmes de cette envergure ne semblent pas légion au sein du PCF et il est donc curieux que le parti ne mette pas davantage en valeur Marie-Thérèse Maurette.

La même remarque concerne également la personnalité du neveu des Maurette, Jean-Pierre Vigier (1920-2004). Membre du PCF à vingt ans et résistant communiste

17 Wieviorka (Annette), Op. cit., p. 528.

18 Ibid., p. 265.

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pendant la Seconde Guerre mondiale, cet éminent physicien côtoie les plus grands scientifiques français de l’époque, comme Louis de Broglie (1892-1987) et Frédéric Joliot-Curie (1900-1958). Dans la biographie du couple Thorez, Vigier n’apparaît cependant qu’à deux reprises. Une première fois lorsque le Comité central des 9 et 10 mai 1956 débat de la question du culte de la personnalité. Le couple Thorez en minimise son impact, car « (...) il ne faut pas exagérer le parallèle avec Staline. Non, le parti n’a pas été stérilisé. Et de citer pour preuve ses intellectuels : Jean- Toussaint Desanti ; Georges Cogniot et Roger Garaudy, et ses scientifiques : Jean- Pierre Vigier et Louis Frühling »19. Dans ce paragraphe, Annette Wieworka fait parler Thorez et reconstitue donc les échanges de vue au sein de ce Comité central.

Deuxièmement, l’historienne fait état des divergences profondes entre le couple Thorez et Laurent Casanova et Marcel Servin au sujet de l'appréciation de l’évolution économique de la France et des pays occidentaux. A cette occasion, Thorez maintient son emprise sur le PCF et écarte des instances dirigeantes en 1961 un certain nombre de personnalités, parmi lesquelles figurent notamment Casanova, Servin et Jean-Pierre Vigier20.

Finalement, qu'apprenons-nous de cette lecture pour notre travail ? Plus qu'un véritable mode d'emploi plus ou moins directement utilisable, l'historienne témoigne d'une façon d'être par rapport au sujet traité qui comprend notamment un traitement méticuleux du corpus d'archives, des intuitions amenées avec précaution et beaucoup d'informations intéressantes sur le fonctionnement du PCF autour du couple Thorez. Cette biographie de couple offre néanmoins une réflexion propice à la construction d'une biographie familiale des Dupuy-Maurette- Vigier. À l'instar de Maurice et Jeannette, il peut y avoir Marie-Thérèse et Fernand. Au fur et à mesure de l'avancement des recherches, nous constatons en effet que Marie-Thérèse est présente dans tous les chapitres, que ce soit par ses liens familiaux ou par ses engagements, à l'exception des chapitres spécifiquement consacrés à la géographie et par conséquent à son mari-géographe.

19 Ibid., p. 549.

20 Ibid., p. 627.

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Bibliographie générale

Ainsi sur la base de nos différentes lectures, l'objectif principal de ce travail consiste à reconstituer une biographie de couple en interrogeant la place des femmes et les différentes formes d'internationalisme. Cette étude s’inscrit donc dans l’histoire sociale et familiale des milieux internationalistes du début du XXe siècle jusqu'à la fin des années 1960. Elle met en lumière, dans une logique chronologico-thématique, les moments charnières d'un certain internationalisme français, les événements qui ont contribué à lui donner une identité, une orientation, les forces à l’œuvre, et les transformations mentales liées aux changements politiques et institutionnels. En effet, Paul Dupuy et les familles Maurette et Vigier se trouvent à la jonction de plusieurs expériences internationales dans des domaines aussi variés que la science, l’éducation, la politique et les organisations internationales. Au fil de nos recherches, nous découvrons que Marie-Thérèse Maurette constitue le fil rouge de notre travail ouvrant sur quatre directions différentes, à savoir a. le milieu normalien et de la géographie ; b. du socialisme réformateur au communisme ; c. les internationalismes et les organisations internationales ; d. l'histoire du genre et des femmes.

a. Le milieu normalien et de la géographie

Les archives nationales à Paris permettent un large accès à l'histoire de la rue d’Ulm, un détour rendu nécessaire par la personnalité de son inamovible secrétaire général durant plus de quarante ans Paul Dupuy, le beau-père de Fernand Maurette. Dupuy vit dans cette école avec sa fille et son gendre qui est aussi son adjoint, avant de prendre une retraite quelque peu forcée à près de septante ans.

Maurette lui propose en 1925 de venir à Genève dispenser un enseignement de culture internationale à l’Ecolint.

Tant à Paris qu'à Genève, Dupuy a beaucoup écrit et reçu du courrier. Notre travail bénéficie donc également de quelques apports liés à l’analyse des correspondances de guerre21. Le surveillant général se plaint d’ailleurs en certaines circonstances de

21 Citons par exemple: Vidal-Naquet (Clémentine) édition établie et présentée par, Correspondances conjugales 1914-1918, Paris, Editions Robert Laffont, 2014.

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l’harassant labeur de cette correspondance normalienne : une cinquantaine de courriers reçus et envoyés chaque jour qui transitent par l’ENS. Parmi les multiples lettres reçues notamment de normaliens officiers dans les tranchées, celles de Maurice Genevoix (1890-1980) l'émeuvent particulièrement : « Dupuy s’aperçut avant l’hiver que les lettres de Maurice Genevoix, cet élève brillant et facétieux qu’il aimait, charmant avec tous, camarades, professeurs, concierge et jardinier, surpassaient celles de ses camarades par leur force d’évocation »22. Dupuy noue une relation particulière avec Genevoix. Lorsque le lieutenant Genevoix est grièvement blessé en avril 1915, Dupuy lui rend visite à l’hôpital de Dijon. Une fois de retour du front, le surveillant général l'héberge à la rue d’Ulm jusqu’au début de l’année 1919 où le futur écrivain rentre dans la Loire, après avoir guéri de la grippe espagnole qui manque de l’emporter.

Les lettres échangées entre le surveillant général et Maurice Genevoix relatent, pendant la période qui va du 28 août 1914 au 30 avril 1915, aussi bien la vie du 106e régiment d’infanterie auquel le lieutenant Genevoix appartient que celle de l’arrière à la rue d’Ulm transformée pour l’occasion en hôpital et en bureau postal23. Ces lettres s’inscrivent dans un cadre plus large, celui de la correspondance entre le surveillant général de l’ENS et le normalien qui démarre en 1911 et se termine quasiment à la mort de Dupuy en 1948. Le caractère particulier de cette correspondance, relativement peu connue pour le moment, interpelle : s’agit-il d’une correspondance familiale détachée du monde, d’une correspondance entre un père et son fils, entre deux amis proches ou finalement d’un mentor qui découvre un talent littéraire rare ? Nous avons lu une partie de cette correspondance avec une impatiente curiosité, car nous en attendions des informations sur la vie à Genève des familles de fonctionnaires internationaux.

La personnalité multiple du surveillant général ouvre un large horizon concernant la rénovation éducative et en géographie. Par sa proximité avec le père de la géographie française, Paul Vidal de La Blache, Dupuy figure parmi les principaux

22 Bernard (Michel), Pour Genevoix, Paris, Editions de la Table Ronde, 2011, p. 74.

23 Genevoix (Maurice) et Dupuy (Paul), Correspondance 28 août 1914-30 avril 1915, Paris, Editions de La Table Ronde, 2013.

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réformateurs de l’enseignement de la géographie, notamment dans les pas de Franz Schrader (1844-1924) et d’Elisée Reclus (1830-1905). Passeur central entre les différents degrés et l’enseignement supérieur, le surveillant général possède également la particularité d’avoir publié des manuels de géographie sous la direction de Vidal et une histoire de France avec l’historien et directeur de l’ENS Ernest Lavisse. Se faisant également l’historien de l’ENS, Dupuy peut compter sur le soutien de James Guillaume (1844-1916), rédacteur du Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson (1841-1932). Les contacts avec ces deux personnages rattachent le surveillant général Dupuy au mouvement anarchiste par James Guillaume et à l'école de la IIIe République par "son" pédagogue Ferdinand Buisson. Dupuy et son gendre Maurette appartiennent à l’un des puissants réseaux, le socialisme normalien, qui soutiennent activement cette IIIe République, notamment par le biais de l’école, une école qui est aussi la priorité des mouvements anarchistes qui souhaitent bannir une éducation jugée trop militaire et permettre ainsi un changement radical de la société.

Depuis de nombreuses années, le laboratoire de recherches Géographie-Cités regroupe principalement des géographes qui interrogent l’histoire de leur discipline24. Deux de leurs publications facilitent l’insertion de Maurette dans son

« milieu naturel ». Le livre Couvrir le monde nous brosse un panorama complet de la géographie française de la première partie du XXe siècle, dans lequel pourtant ni Dupuy, ni Maurette n’ont leur place25. Il évoque les figures périphériques du champ universitaire et laisse peu entrevoir les influences extérieures. Ce n’est cependant pas l’optique de ce « livre vert » qui a néanmoins le mérite de déclencher une série de questions concernant Maurette. En effet, celui-ci aurait pu apparaître lorsque les auteurs évoquent la sensibilité de Vidal à la question urbaine, le travail des géographes dans les ministères durant la Grande Guerre, Maurette a travaillé au

24 http://www.parisgeo.cnrs.fr/?lang=fr (consulté le 26 novembre 2019).

25 Robic (Marie-Claire) coordinatrice, Couvrir le monde. Un grand XXe siècle de géographie française, Paris, adpf-ministère des Affaires étrangères, 2006.

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ministère des Colonies, ou la mention du projet collectif de la Géographie Universelle de Vidal et Gallois, dont Maurette a écrit le volume douze.

Neuf ans plus tard, un second livre brosse cette fois-ci des portraits de géographes

« hors les murs », c’est-à-dire des scientifiques ayant fait carrière en dehors de l’université française26. Parti du constat justifié selon lequel les principales figures de la géographie française de la fin du XIXe au milieu du XXe siècle sont désormais connues, le projet conduit par Marie-Claire Robic et Pascal Clerc élargit la famille des géographes en se concentrant sur les marges. L’optique retenue étend le champ d’intervention des géographes à la diplomatie, au renseignement, à l’expertise politique et économique, à l’aménagement du territoire et dépasse ainsi la dépendance de la discipline à l’égard de l’enseignement scolaire27.

Cette orientation permet la mise en évidence de nébuleuses et de réseaux et rend visible des engagements de géographes moins connus que les pères fondateurs de la discipline. Certains concernent plus particulièrement notre domaine de recherche, à savoir l’information économique générale et le domaine international par le biais des carrières diplomatiques. Ainsi pour la première fois, un début de recherches sur Maurette émerge, tout comme son intégration dans l’école française de géographie mise à jour et complétée28. Et dans le même temps, les étroites connexions entre la discipline scientifique et l'activité du fonctionnaire international aiguise notre curiosité. Que peut apporter la géographie aux toutes jeunes organisations internationales, compte tenu de l’expertise développée par les géographes français dans des domaines aussi différents que l’urbanisation, le tracé des frontières, l’économie ou la géographie scolaire ?

26 Robic (Marie-Claire) et Clerc (Pascal) sous la direction de, Des géographes hors-les-murs ? Itinéraires de géographes dans un Monde en mouvement (1900-1940), Paris, L’Harmattan, 2015.

27 Ibid., p. 9.

28 Carrupt (Roland), Fernand Maurette (1878-1937) : de la géographie économique à l’expertise internationale, dans Des géographes hors-les-murs ? Itinéraires de géographes dans un Monde en mouvement (1900-1940), Robic (Marie-Claire) et Clerc (Pascal) sous la direction de), Paris, L’Harmattan, 2015, p. 69-107. Les autres géographes traités sont Maurice Zimmermann (1869-1950), Pierre Denis (1883-1951), Théodore Lefebvre (1889-1943), Maurice Legendre (1878-1955), Marcel Clerget (1900-1984), Edgar Aubert de la Rüe (1901-1991) et son épouse Andrée (1903-1990), Gaston Gravier (1886-1915) et Yves Chataigneau (1891-1969).

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b. Du socialisme réformateur au communisme

La lecture de ces différents itinéraires de géographes nous ramène à un réseau influent sous la IIIe République, celui des socialistes normaliens, que des historiens comme Christophe Charle29 et Christophe Prochasson30 ont minutieusement analysé pour en faire ressortir les caractéristiques principales. Ce réseau se constitue à la rue d’Ulm et des personnages comme Dupuy ou Maurette en sont proches, car ils y sont domiciliés et qu’ils ont d’étroites relations avec Albert Thomas, le pilier du socialisme réformateur. Parmi les différents membres du socialisme normalien, la figure de Robert Hertz (1881-1915) se détache par sa singularité et mérite que l'on s'y attarde quelque peu, en raison de ses liens avec Dupuy et Maurette.

L’historien Nicolas Mariot interroge le parcours du sergent sociologue pour comprendre ce que signifie en quelque sorte mourir pour ses idées31. Lorsque le sergent Hertz meurt en 1915 à la tête de son unité, c’est sa femme Alice qui prévient Dupuy et Herr à la rue d’Ulm. L'historien nous livre un questionnement subtil et se demande si le sociologue ne constitue pas la mauvaise conscience des normaliens.

Hertz est mort sur le champ de bataille, impatient d’en découdre avec l’ennemi, alors que les normaliens socialistes proches d’Albert Thomas ont quasiment tous été « exfiltrés » des tranchées pour poursuivre la guerre aux côtés du sous-secrétaire d’Etat aux Munitions et futur ministre de l’Armement. À cet égard, le cas de Maurette s'inscrit en partie dans cette logique. Officier d’intendance à la santé fragile, le capitaine fait la guerre en uniforme, mais loin des tranchées. Son livret militaire indique une affectation principale dans le domaine de l'intendance auprès de la région militaire de Paris, sans que l'on en sache davantage sur son activité. Il n'est, semble-t-il, pas détaché auprès du cabinet du ministre de l’Armement, même

29 Voir par exemple Charle (Christophe), Les Normaliens et le socialisme (1867-1914), dans Rebérioux (Madeleine) et Candar (Gilles) sous la direction de, Jaurès et les intellectuels, Paris, les Editions de l’Atelier/Editions ouvrières, 1994, p. 133-168.

30 Prochasson (Christophe), Entre science et action sociale : le « réseau Albert Thomas » et le socialisme normalien, 1900-1914, dans Topalov (Christian) sous la direction de, Laboratoires du nouveau siècle. La nébuleuse réformatrice et ses réseaux en France, 1880-1914, Paris, Editions de l’EHESS, 1999, p. 141-158.

31 Mariot (Nicolas), Histoire d’un sacrifice. Robert, Alice et la guerre, Paris, Editions du Seuil, 2017.

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si ce dernier le consulte de temps en temps. Là encore, les archives sont très lacunaires.

Enfin, l’itinéraire du sociologue Hertz nous intéresse vivement car c'est aussi (surtout ?) celui d’un couple. Pour l’historien, Alice est l’alter ego naturel de Robert : les deux sont d’un haut niveau social, culturel et économique. Le couple vit confortablement de ses rentes et s’implique dans le domaine de l’éducation perçu comme essentiel dans la transformation de la société. Alice et Robert s’inscrivent ainsi complètement dans la IIIe République qu’ils soutiennent activement. Cet itinéraire rappelle par certains aspects celui de Marie-Thérèse et Fernand Maurette. D’ailleurs, Fernand et Robert sont tous les deux issus de l’ENS, tandis que Marie-Thérèse et Alice travaillent ensemble au Collège Sévigné durant quelques années. Là encore, la figure de Dupuy n’est pas loin, puisque Robert est venu lui présenter sa future femme à la rue d’Ulm, si l’on en croit le journal écrit par Marie-Thérèse32.

Le socialisme réformateur d'une partie de la famille connaît de belles années dans l'entre-deux-guerres, avant de s'effacer au profit de la tentation du communisme durant la Seconde Guerre mondiale. Cela ne semble pas le cas de Dupuy, même s'il signe un article consacré à l'affaire Dreyfus dans une revue communiste33 qui publie, sous la plume de l'ancien normalien et secrétaire-archiviste du Centre de documentation sociale à l’ENS René Maublanc (1891-1960), une nécrologie à l'occasion de son décès en 194834. D'autres franchissent le pas, à l'instar de sa fille Marie-Thérèse Maurette et de ses petit-fils Marc Maurette, Jean-Pierre et Philippe Vigier. Un détour par le communisme français devient donc un passage obligé pour comprendre ce passage du socialisme réformateur au communisme qui reste pour nous quelque peu énigmatique, en dépit des explications livrées par Leonora

32 Maurette (Marie-Thérèse), Journal de famille, 1982, p. 48.

33 Dupuy (Paul), Février 1898. L’affaire Dreyfus et le procès Zola, dans La Pensée, janvier-février 1948, no 16, p. 11-25.

34 Maublanc (René), Paul Dupuy (1856-1948), dans la Pensée, 1949, no 19, p. 4-8.

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Dugonjic dans son travail consacré à l'Ecolint35. L'engagement de deux frères Vigier dans la résistance communiste en Haute-Savoie et l'installation du "rideau de fer" en Europe suffisent-il à expliquer la « conversion » de Marie-Thérèse Maurette au communisme ? De là découle également une autre question énigmatique, celle de la réelle appartenance de Marie-Thérèse au PCF. A-t-elle pris sa carte de membre, comme on entre en religion, elle qui est une grande mystique selon ses deux petites-filles ? Les archives sont muettes et les avis clairement tranchés. Les archives du PCF situées dans l'immeuble de la place du Colonel Fabien ne fournissent aucune trace de sa présence, ce qui n'est pas le cas de son neveu36. La sociologue Leonora Dugonjic n’a trouvé aucune trace de cette prétendue carte de membre dans les archives37. Les petites-filles de Marie-Thérèse qui ont partagé un moment son existence se souviennent en revanche très bien d’avoir vu la carte de membre du PCF de leur grand-mère dont l’engagement communiste ne fait aucun doute. Selon elles, leur grand-mère appelée « Grande Thérèse » dans le cercle familial, est membre de la cellule de Ville d’Avray et les combles de la maison abritent une ronéo qui sert à la préparation et à la diffusion de tracts. « Grande Thérèse » recrute parfois ses petites-filles pour plier ces différents documents et fréquente régulièrement la cellule communiste de Neuilly.

Lectrice assidue du journal L’Humanité, elle participe à des manifestations contre la guerre de Corée, en tête de cortège pour dissuader les CRS de s’en prendre à une vieille femme !38 L’absence d’une carte de membre, introuvable dans les archives mais attestée par les souvenirs familiaux, n’empêche donc pas un militantisme de base convaincu chez la fille de Paul Dupuy.

35 Dugonjic-Rodwin (Leonora Sonia), Les IB Schools, une internationale élitiste : émergence d’un espace mondial d’enseignement secondaire au XXe siècle, thèse de doctorat sous la direction de Hofstetter (Rita) et Sapiro (Gisèle), université de Genève, 2014

36 Deux questionnaires biographiques rédigés par Jean-Pierre Vigier ont été trouvés et lus. Le premier date du 22 mars 1951 et le second du 10 novembre 1951.

37 Dugonjic-Rodwin (Leonora Sonia), Op. cit., p. 128-129.

38 Différents entretiens menés à Paris avec Mesdames Norine Maurette et Thérèse Picquenard, notamment en dates des samedi 1er mars 2014 et mardi 1er juillet 2014.

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c. Les internationalismes et les organisations internationales

Traiter du communisme s'avère d'autant plus important que deux internationalismes concurrents émergent au lendemain de 1945. Les organisations internationales accueillent en leur sein la plupart des Etats. Elles penchent cependant du côté du libéralisme occidental, même si l'URSS adhère à la SdN en 1934 et à l'ONU en 1945. Pour notre travail, nous observons comment cette division du monde en deux blocs antagonistes est vécue au sein des familles, en dépit du manque d'archives. Par exemple chez les Maurette et Vigier, où les uns choisissent l'internationale communiste tandis que les autres poursuivent leurs activités au sein des organisations internationales. C’est le cas d’un de nos personnages abordé plus particulièrement dans la dernière partie de ce travail. Le beau-frère de Fernand Maurette, Henri Vigier, s’engage à la SdN en 1921 et termine sa carrière à l’ONU quelque trente ans plus tard. Ami du chef de la Section d’Hygiène de la SdN, le médecin polonais Ludwik Rajchman (1881-1965)39, Vigier termine en effet sa carrière internationale dans le cadre d’une mission onusienne au Proche-Orient à la fin des années 1940. Dans tous les cas, les trajectoires individuelles témoignent de la poursuite des engagements internationalistes bien après la Deuxième Guerre mondiale.

Une meilleure compréhension des parcours de Fernand Maurette et d'Henri Vigier nécessite également de les replacer dans leur cadre professionnel et donc de s'intéresser à l’histoire des organisations internationales. Dans cette perspective et parmi un grand nombre d’études40, trois publications retiennent notre attention, même si l'objet de notre travail n'est pas d'écrire une histoire des organisations internationales. Les travaux de Michel Marbeau41 et Ludovic Tournès42 traitent plus

39 Balinska (Marta Aleksandra), Une vie pour l’humanitaire. Ludwik Rajchman (1881-1965), Paris, Editions La Découverte, 1995, p. 193.

40 Lespinet-Moret (Isabelle) et Viet (Vincent) sous la direction de, L’Organisation internationale du travail.

Origine, développement, avenir, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011; Cayet (Thomas), Le Bureau international du travail et la modernisation économique dans les années 1920 : esquisse d’une dynamique institutionnelle, dans Travail et Emploi, avril-juin 2007 n° 110, p. 15-25 ; Kott (Sandrine), Une « communauté épistémique » du social ? Experts de l’OIT et internationalisation des politiques sociales dans l’entre-deux- guerres, dans Genèses 2008/2, no 71, p. 26-46.

41 Marbeau (Michel), La Société des Nations. Vers un monde multilatéral. 1919-1946, Tours, Presses Universitaires François Rabelais, 2017.

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