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Les apprentissages disciplinaires au centre des leçons d'éducation physique. Réflexions à partir d'une forme de pratique scolaire innovante en basketball

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Les apprentissages disciplinaires au centre des leçons d'éducation physique. Réflexions à partir d'une forme de pratique scolaire

innovante en basketball

CORDOBA, Adrian, LENZEN, Benoît, POUSSIN, Bernard

Abstract

L'école a pour devoir de promouvoir l'instruction et la transmission culturelle (CIIP, 2010) et l'éducation physique (EP) doit assurer sa part dans cette mission. Le plan d'études romand définit les « attentes fondamentales de fin de cycle » (CIIP, 2010) et renforce, par ce fait, la place de l'EP dans le contexte scolaire en tant que discipline d'enseignement. Dans notre contribution, nous proposons une réflexion sur l'enseignement/apprentissage en EP à partir de l'élaboration et de l'expérimentation d'une forme de pratique scolaire innovante en basketball. Nous montrerons la nécessité, pour la construction de compétences chez les élèves, d'une programmation de cycles suffisamment longs, pensés à partir des contenus culturellement identifiables et évaluables. Nous soulignerons l'importance de l'analyse a priori pour construire et conduire la démarche didactique. Enfin, nous illustrerons une manière d'articuler les contenus disciplinaires aux capacités transversales et à la formation générale pour développer un élève autonome, physiquement éduqué et cultivé.

CORDOBA, Adrian, LENZEN, Benoît, POUSSIN, Bernard. Les apprentissages disciplinaires au centre des leçons d'éducation physique. Réflexions à partir d'une forme de pratique scolaire innovante en basketball. In: Lentillon-Kaestner, V. Penser l'éducation physique autrement. Louvaine-La-Neuve : EME, 2020. p. 33-58

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:141306

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

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Les apprentissages disciplinaires au centre des leçons d’éducation physique.

Réflexions à partir d’une forme de pratique scolaire innovante en basketball

Adrián Cordoba1,2, Bernard Poussin2 & Benoît Lenzen1,2

1Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, Université de Genève

2Institut universitaire de formation des enseignants, Université de Genève adrian.cordoba@unige.ch

bernard.poussin@unige.ch benoît.lenzen@unige.ch

Mots clefs : éducation physique ; forme de pratique scolaire ; apprentissage ; culture sportive ; démarche réflexive.

Résumé

L’école a pour devoir de promouvoir l’instruction et la transmission culturelle (CIIP, 2010) et l’éducation physique (EP) doit assurer sa part dans cette mission. Le plan d’études romand définit les « attentes fondamentales de fin de cycle » (CIIP, 2010) et renforce, par ce fait, la place de l’EP dans le contexte scolaire en tant que discipline d’enseignement.

Dans notre contribution, nous proposons une réflexion sur l’enseignement/apprentissage en EP à partir de l’élaboration et de l’expérimentation d’une forme de pratique scolaire innovante en basketball. Nous montrerons la nécessité, pour la construction de compétences chez les élèves, d’une programmation de cycles suffisamment longs, pensés à partir des contenus culturellement identifiables et évaluables. Nous soulignerons l’importance de l’analyse a priori pour construire et conduire la démarche didactique. Enfin, nous illustrerons une manière d’articuler les contenus disciplinaires aux capacités transversales et à la formation générale pour développer un élève autonome, physiquement éduqué et cultivé.

1. Enseigner l’éducation physique, pour que les élèves apprennent !

L’ouvrage que vous avez dans les mains a comme but de présenter des propositions pour enseigner autrement l’éducation physique (EP). Dans notre contribution, nous nous intéressons en particulier aux conditions qui s’avèrent nécessaires pour que l’élève apprenne.

Si les leçons d’EP sont souvent investies par des intentions diverses (faire plaisir, se défouler, s’initier à différents sports, se socialiser…), nous considérons que l’apprentissage disciplinaire est la pierre fondamentale de la formation scolaire du futur adulte physiquement éduqué et cultivé (Forest, Lenzen & Öhman, 2018) : c’est en acquérant de nouveaux pouvoirs sur le monde qui l’entoure que l’élève se forme, peut donner du sens aux propositions scolaires et devenir un1 citoyen actif et autonome.

1 Le masculin utilisé dans le texte est purement grammatical. Il renvoie à des collectifs composés aussi bien d’enseignantes que d’enseignants, de filles que de garçons, de formatrices que de formateurs.

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Selon les documents officiels (CIIP, 2010), l’école a pour devoir de promouvoir l’instruction et la transmission culturelle et, dans ce projet, l’EP doit assurer la part qui lui revient. Pour cela, le plan d’études romand (PER) définit les attentes fondamentales de fin de cycle et, ce faisant, il renforce la place de l’EP dans le contexte scolaire en tant que discipline d’enseignement. A savoir, une discipline structurée par un curriculum regroupant l’ensemble des années scolaires, des contenus et des progressions selon les âges, des tâches et des critères d’évaluation correspondant aux différents cycles, etc. Dans ce projet, et comme c’est le cas des autres disciplines scolaires, l’EP prend en charge, conjointement à ses visées spécifiques, la formation générale et les capacités transversales des élèves (CIIP, 2010).

Mais, de quelle EP parle-t-on ? En regardant à travers les époques les Manuels fédéraux, les finalités et les démarches d’enseignement (Bussard, 2007) ainsi que les pratiques scolaires, force est de constater que les variations sont considérables. L’expérience des écoliers peut cependant être comprise selon deux grandes conceptions qui s’opposent2 (Delignières, 2006).

Présentons tout d’abord la plus ancienne, l’éducation motrice, que l’on pourrait qualifier avec Marsenach (1991) d’« EPS d’hier » (p. 22). Dans celle-ci, c’est le corps de l’élève et sa motricité qui se trouvent au centre de l’intention de l’enseignant. Pour ce dernier, le souci est de diversifier au maximum les activités physiques, sportives et artistiques (APSA) de manière à confronter la motricité de l’élève à des sollicitations très diverses. Ceci se traduit par des cycles d’enseignement très courts et un changement continu des APSA, y compris durant la même leçon. Le zapping (Ubaldi & Olinger, 2006) est ici privilégié. L’enseignant ne recherche donc pas la construction des compétences spécifiques aux APSA mais plutôt le développement global de la motricité, des capacités perceptives, de la souplesse, la force, etc.

Ce projet s’appuie sur l’hypothèse que le développement de ces ressources devrait permettre aux élèves de se sentir à l’aise corporellement et de pouvoir rester ainsi actifs une fois adultes.

Il se perpétue dans plusieurs pays au travers d’une tradition d’enseignement de l’EP comme éducation à la santé, critiquée notamment pour ses dérives hygiénistes et normatives (Forest et al., 2018 ; Kirk, 2010).

La deuxième conception, plus récente, est l’éducation sportive, qui englobe l’ensemble des activités physiques et artistiques ayant une représentation culturelle. Dans les leçons d’EP, ce sont ces activités qui donnent du sens à la discipline plus que le corps qu’elles sont censées développer. La programmation de l’enseignant est donc organisée de manière très différente de la démarche précédente. Il ne s’agit pas de sensibiliser ou d’explorer mais d’approfondir en limitant la diversité des APSA pour favoriser la construction des compétences. Ceci signifie, entre autres, l’allongement de la durée des cycles d’enseignement (au moins six à huit leçons), l’identification des contenus à apprendre, l’implication dans l’apprentissage de la part de l’élève et l’explicitation de repères lui permettant d’organiser son agir et de constater ses progrès. Autrement dit, le développement des ressources est bien présent mais il est réalisé en apprenant à faire de la natation, de la course longue ou du volleyball, ce qui s’oppose à la construction d’une motricité abstraite, non finalisée. Si le but de l’école n’est pas de former des champions, c’est dans la mesure où l’élève apprend qu’il se transforme et s’éduque. Dans

2 Nous ne faisons pas ici référence aux finalités militaires qui guidaient les premiers manuels fédéraux et qui ont coloré une bonne partie de l’histoire de la discipline (voir à ce sujet Cordoba & Lenzen, 2018).

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cette conception, les capacités transversales et la formation générale sont abordées à partir des contenus disciplinaires : on ne programme pas des leçons d’EP pour « socialiser », comme on le ferait dans une tradition d’enseignement de l’EP comme éducation aux valeurs et à la citoyenneté (Forest et al., 2018) ; c’est en apprenant les contenus de la discipline que l’élève conquiert son autonomie et devient citoyen.

2. Alors, quelle démarche d’enseignement ?

Notre position s’inscrit dans la tradition d’enseignement de l’EP comme éducation à la culture physique et sportive (Forest et al., 2018 ; Kirk 2010), valorisant une pédagogie centrée sur l’élève et ses apprentissages telle qu’on la retrouve notamment dans les modèles anglo-saxons Sport Education, Teaching Games for Understanding et Game Sense (Bunker & Thorpe, 1982 ; Jarrett & Harvey, 2016 ; SueSee, Pill & Edwards, 2016). Elle implique, il faut le dire, une démarche d’enseignement réfléchie, structurée et exigeante de la part du maître. On peut la présenter en deux phases.

2.1. Le travail du maître hors de la classe

Tout d’abord, soulignons que si les pratiques scolaires s’appuient sur les APSA existantes, ces dernières ne peuvent pas être transposées telles quelles à l’école. En effet, la logique associative diffère des finalités de l’institution scolaire. Mais, s’il est primordial de les adapter à l’école, il est aussi fondamental de sauvegarder et de respecter la logique propre de chaque activité. Ce travail transpositif donne lieu à la construction de formes de pratique scolaire (FPS) à partir desquelles sont organisés les cycles d’enseignement. Pour Mascret et Dhellemmes (2011), une FPS est « l’adaptation d’une pratique sociale de référence [les APSA] aux contraintes de l’école pour permettre aux élèves d’en vivre une réelle expérience et d’en étudier certaines de ses composantes » (p. 118). Comme il n’est pas possible de tout enseigner, la FPS permet d’identifier et de cibler, comme objet d’enseignement, certains aspects de la pratique choisie. Ces FPS doivent rythmer la progression des élèves, elles sont ainsi adaptées à chaque niveau d’enseignement.

En EP, vivre une expérience significative et représentative de la culture sportive ne concerne pas uniquement le joueur, le coureur ou le gymnaste ; les rôles sociaux qui sont inhérents à la pratique sont à inclure dans les cycles d’enseignement, par exemple celui d’arbitre, d’observateur averti, de juge ou de pareur. C’est d’ailleurs à travers ces rôles, comme nous l’exemplifierons plus loin, que l’EP peut répondre en particulier aux attentes du PER concernant les capacités transversales et la formation générale. En d’autres termes, il s’agit de permettre aux élèves de construire des savoir-faire mais également des savoirs sur le faire.

Une fois la FPS construite, et pour qu’elle soit opérante, il est nécessaire de procéder à ce que les didacticiens appellent l’analyse a priori. A savoir mettre en évidence les stratégies efficaces que les élèves devront construire durant le cycle d’enseignement. Pour l’enseignant, ces repères s’avèrent nécessaires afin de pouvoir construire les tâches qui seront proposées en classe ainsi que pour réguler l’activité des élèves. Pour ces derniers, ces stratégies deviennent des leviers pour la mise en place de projets d’action : on ne joue pas « seulement », on joue avec l’intention de résoudre tel ou tel problème précis.

2.2. Les interactions en classe

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Ce que l’on vient de décrire concerne la cuisine propre à l’enseignant, sa planification.

Comment procéder lorsque l’on enseigne avec les élèves ?

Nous le savons bien, au début d’un cycle d’enseignement, les élèves ne sont pas une page blanche ; ils sont porteurs de connaissances, de savoir-faire et d’une représentation personnelle de l’expérience culturelle qu’ils sont sur le point de vivre (techniques, tactiques, risques, rapport à autrui et aux règles, etc.). Il est dès lors essentiel, comme le ferait un enseignant en français ou en mathématiques, de commencer par une situation d’évaluation diagnostique dite de référence (SR) (Seners, 2002) afin de permettre aux élèves et à l’enseignant de faire « l’état de la question ». Cette étape essentielle doit permettre à l’enseignant d’analyser les ressources et les difficultés des élèves mais également à ces derniers de se mettre en perspective et construire un projet d’action. Pour réaliser ceci, il ne suffit pas de demander aux élèves de faire, il est primordial que la situation d’évaluation soit outillée de façon à obtenir des résultats objectifs. Comme nous le montrons plus loin dans l’exemple sur la contre-attaque en basketball, si la compétence à construire est celle d’arriver à tirer seul au panier, il revient aux élèves qui ne jouent pas d’endosser le rôle d’observateurs : à partir des indicateurs précis transmis par l’enseignant, ils gardent une trace objective des actions réalisées. C’est à partir de ces résultats que l’enseignant pourra poser le problème aux élèves puis, dans les situations d’apprentissage, les accompagnera pour leur permettre d’identifier et surtout de réaliser les stratégies efficaces. Dans cette démarche, les phases d’action sont nécessairement articulées avec de courts moments de verbalisation qui permettent de faire le point sur ce qui a été réalisé et de faire des choix pertinents par rapport aux actions à venir (Schéma 1).

A la fin du cycle, qu’elle soit notée ou non, l’évaluation finale permet aux élèves de constater leurs progrès et de se situer par rapport aux apprentissages réalisés. La reproduction de la SR au cours du cycle d’enseignement (par exemple à la moitié ou à la fin) « permet d’effectuer des comparaisons entre des états successifs des comportements des apprenants » (Seners, 2002, p. 147).

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3. Un exemple en basketball : un cycle d’enseignement portant sur la « contre-attaque » 3.1. Quelques considérations introductives concernant les jeux collectifs

Gréhaigne, Poggi et Musard (2015) affirment que cinquante ans d’innovation et de propositions n’ont pas suffi à rénover les contenus d’enseignement dans les leçons de sport collectif en EP. Ils font référence, entre autres, à la prégnance de ce que Brau-Antony (2001) appelle la conception techniciste, une pédagogie du geste ou du modèle, qui repose sur une fragmentation du jeu en éléments isolables travaillés séparément, sous forme de tranches gestuelles en référence à la technique du champion (d’abord le dribble, les passes, le tir…).

Dans celle-ci, l’équipe est assimilée à une somme de compétences techniques individuelles et le match n’est pas considéré comme une source de réflexion en tant que confrontation entre deux équipes : il est placé en fin de leçon avec comme pari impossible d’intégrer les gestes abordés séparément durant la séance, bien sûr, s’il y a du temps !

Tous ceux qui ont pratiqué un jeu collectif comme le football, le basketball ou le ballon au capitaine savent que la maîtrise des gestes techniques ne suffit pas pour bien jouer. En effet, si ces derniers sont essentiels, ils n’ont du sens que par rapport aux situations de jeu spécifiques.

Dit autrement, la technique est toujours la conséquence d’un choix tactique (Gréhaigne, 2014) : le but n’est alors pas de savoir dribbler, mais de savoir comment et quand dribbler dans telle ou telle configuration de jeu. Un tel constat implique de placer la dimension tactique du jeu au centre de la démarche enseignement. Pour l’élève, apprendre c’est alors arriver peu à peu à savoir ce qu’il faut faire, où il faut regarder pour le faire et comment le faire pour mettre en difficulté les adversaires : en étant confronté à des situations de jeu authentiques (situations complexes mais adaptées), il apprend à identifier des signes objectifs lui permettant de prévoir et d’anticiper le déroulement des actions. Par conséquent, ce qui est recherché n’est pas la maîtrise parfaite des gestes techniques, c’est-à-dire celle du champion, tâche qui revient aux clubs, mais la construction d’une technique fonctionnelle, adaptée aux possibilités des élèves et qui rend possible les choix tactiques : avec mon équipe, je suis capable de me placer en position favorable de tir et de shooter avec une technique en rapport à mon âge-niveau.

Cette conception, généralement nommée dialectique ou systémique (Brau-Antony, 2001) dans la littérature francophone ou game-based approaches (Jarrett & Harvey, 2016 ; SueSee et al., 2016) dans les pays anglo-saxons, considère que dès l’initiation l’apprentissage est réalisé

« dans le jeu » et « pour le jeu » (Deleplace, 1979) par des formes de pratiques particulières à chaque degré.

3.2. Construction et enseignement d’une forme de pratique scolaire

Dans cette partie, nous décrivons les intentions sur lesquelles nous nous sommes appuyés pour construire la FPS en basketball3 ainsi que la démarche d’enseignement que nous préconisons. Dans le cadre d’un projet de recherche de type ingénierie didactique (Artigue, 1989), cette FPS a fait l’objet d’une expérimentation auprès de cinq enseignants genevois dans des classes de 8e et 9e Harmos. Sur le plan méthodologique, après une rencontre avec les

3 La FPS que nous présentons ici a été construite par Bernard Poussin, Adrián Cordoba (Université de Genève) et Gianpaolo Patelli (HEP Vaud).

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volontaires au cours de laquelle nous avons explicité les intentions ainsi que la démarche d’enseignement, nous avons filmé l’ensemble des leçons et procédé à deux entretiens avec chaque enseignant. Les résultats de cette recherche ont été présentés dans plusieurs colloques.

3.2.1. Le travail du maître hors de la classe

3.2.1.1. Description de la forme de pratique scolaire

Notre première volonté était d’inscrire cette FPS dans les intentions du PER, c’est-à-dire d’articuler les trois entrées qu’il propose : la dimension disciplinaire, les capacités transversales et la formation générale. Ces trois dimensions étant nécessaires pour permettre à l’EP de participer à la formation d’un élève physiquement éduqué et cultivé.

A partir de ce que nous venons de développer, la FPS prend en compte les points suivants : A. Cette FPS s’adresse à des élèves de 10-13 ans (8e- 9e) pour lesquels nous avons décidé de

cibler notre objet d’enseignement sur la contre-attaque. Lorsqu’on observe des joueurs débutants, les conduites typiques se traduisent par un jeu en grappe avec des joueurs qui attendent d’avoir le ballon pour se déplacer (Philippon, 2006). Lorsqu’ils entrent en possession du ballon, les joueurs s’engagent en dribble en direction du panier ou se débarrassent du ballon par une passe qui reste souvent aléatoire. Nous avons donc choisi de partir de ces comportements pour tenter de les enrichir afin d’amener les joueurs à prendre de vitesse les défenseurs pour obtenir un tir seul sous le panier4.

B. Les apprentissages décisifs à réaliser dans cette FPS concernent en priorité les aspects tactiques du jeu mais ceci sans délaisser les aspects techniques qui sont nécessaires dans un second temps pour permettre aux joueurs de réussir les actions de jeu.

C. Pour satisfaire aux injonctions du PER, il nous semblait nécessaire d’introduire des rôles sociaux (arbitres, observateurs/coaches). Ces rôles balisent le chemin vers l’autonomie et confrontent les élèves à l’aspect culturel de cette activité en leur permettant de vivre une

« tranche de vie spécifique » (Portes, 2006) du basketteur.

D. Cette FPS doit permettre un engagement physique et cognitif qui favorise l’apprentissage.

C’est pourquoi le dispositif favorise la différentiation et permet la participation de tous les élèves que ce soit comme joueurs, arbitres ou observateurs/coaches.

3.2.1.2. Construction du règlement

Avec Gréhaigne (1999), nous caractérisons le problème fondamental des jeux sportifs collectifs comme la gestion d’un rapport de force finalisée par le gain du match où « il s’agit de réaliser une coordination d’actions collectives et individuelles afin de récupérer, conserver, faire progresser le ballon vers la zone de marque et marquer » (p.17) dans le respect d’un cadre réglementaire.

4 Cette FPS sous un seul panier accompagne les élèves pendant tout le cycle d’enseignement. Cependant, si les infrastructures le permettent, notre objet d’étude (la contre-attaque) pourrait se dérouler sur un demi-terrain avec deux paniers, avec les mêmes enjeux d’apprentissages. Une FPS aurait pu porter sur la deuxième manière d’attaquer, à savoir l’attaque placée (dans une telle configuration, les membres de l’équipe cherchent à conserver le ballon sans prendre de risque pour l’emmener jusqu’à la zone de marque et tirer).

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La formalisation d’un cadre réglementaire occupe une place décisive dans la construction d’une FPS dans la mesure où il doit préserver les règles fondamentales du basketball mais également subir des adaptations par rapport au règlement officiel pour permettre à tous les élèves de pratiquer. Ainsi, le cadre réglementaire prend en compte les aspects suivants : A. Conservation des règles fondamentales du basketball avec certaines adaptations,

B. Sur le plan défensif, des règles qui préservent l’intégrité physique des élèves et qui permettent aux joueurs novices d’avoir plus de temps pour faire des choix tactiques pertinents,

C. Sur le plan offensif, des règles qui ciblent la contre-attaque pour favoriser l’apparition des stratégies efficaces.

Le règlement que nous proposons ci-dessous permet en outre l’arbitrage des élèves.

• Le jeu se déroule sur un demi-terrain sur lequel sont disposés trois cônes noirs derrière lesquels les attaquants doivent tourner et deux cônes gris derrière lesquels les défenseurs doivent tourner. Possibilité d’avancer les cônes attaquants pour faciliter la contre-attaque (Schéma 2).

• Un temps de jeu de 3’ ou 4’ pour correspondre au potentiel physique des élèves.

• Le début du match est fait par l’engagement au centre du terrain par un check : les attaquants sont derrière les cônes noirs et les défenseurs devant les cônes gris.

• La marque : le panier vaut deux points et le tir qui touche le cerceau avec une trajectoire parabolique un point. Remise en jeu par un check après un panier.

• Les droits/devoirs des attaquants : Application des règles de la reprise de dribble et du marcher avec la possibilité de faire trois appuis ballon en main, mais avec l’intention de s’arrêter. Après chaque interception, tir cadré ou raté, les attaquants et le ballon doivent passer derrière les triangles noirs avant d’attaquer le panier. Aucune limite de dribbles. Pour chaque transgression, le ballon est remis en jeu depuis les côtés du terrain5.

• Les droits/devoirs des défenseurs : Après une perte de balle, un tir cadré ou un tir raté, chaque défenseur doit passer derrière les cônes gris avant de défendre.

Règle de non-contact avec introduction du ballon imprenable pour le joueur à l’arrêt en possession du ballon : le défenseur ne peut pas lui prendre le ballon. Pour éviter certains abus, la règle des cinq secondes peut être introduite (le porteur de balle doit faire une passe ou dribbler). Un lancer franc pour chaque faute personnelle commise. Afin de faciliter la fluidité du jeu, les lancers francs sont exécutés à la fin du match.

5 Pour les sorties latérales, certains enseignants observés ont proposé la possibilité de rentrer en dribblant ce qui facilite les remises en jeu.

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3.2.1.3. Analyse a priori

Pour rappel, une étape importante de la réflexion de l’enseignant consiste à réaliser l’analyse a priori de la FPS pour identifier avec précision les enjeux d’apprentissage. En d’autres termes, il s’agit de déterminer les stratégies efficaces qui doivent permettre aux élèves d’atteindre l’objectif de cette FPS : prendre de vitesse les défenseurs pour tirer seul dans la raquette. Lors de la recherche réalisée, nous avons transmis avant l’expérimentation cette analyse aux enseignants volontaires. Celle-ci les a aidés à se faire une représentation précise des comportements attendus de la part des élèves.

Plus concrètement, l’analyse a priori a permis d’identifier trois stratégies efficaces :

• Démarquage sous le panier (Tir seul après passe)

Dès l’interception ou le rebond offensif ou défensif, le porteur de balle s’engage en dribble vers le cône noir et, si le couloir de jeu direct6 est occupé par un défenseur, alors le porteur de balle fait une passe offensive à son partenaire non porteur de balle qui a anticipé la récupération du porteur du ballon en tournant rapidement autour d’un cône noir et s’est démarqué sous le panier. Les élèves observateurs qualifient cette stratégie comme un Tir seul après passe (Schéma 3).

6 Le couloir de jeu direct est le couloir virtuel qui va du porteur de balle ou des non porteurs de balle au panier.

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• Démarquage au cône (Tir seul après démarquage au cône)

Si le non porteur de balle a anticipé le rebond ou l’interception pour se diriger rapidement vers un cône noir, alors dès le rebond le porteur du ballon prend de l’information en s’orientant vers les cônes et fait une passe offensive au non porteur de balle. Si le couloir de jeu direct est libre, alors le non porteur de balle s’engage en dribble dans le couloir de jeu direct pour tirer seul dans la zone de TS. Cette action est qualifiée de Tir seul après démarcage au cône sur la fiche d’observation (Schéma 4). On pourrait également valoriser le joueur qui réalise la passe offensive.

• Direct au panier (Tir seul après dribble)

Dès l’interception ou le rebond, le porteur de balle s’engage en dribble vers le cône et si le couloir de jeu direct est libre, alors il dribble vers la zone de tir seul pour tirer seul dans la raquette. Cette action est qualifiée de Tir seul après dribble sur la fiche d’observation (Schéma 5).

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Concernant les indicateurs d’observation, la recherche réalisée a montré que noter les passes offensives à l’école primaire peut s’avérer complexe, les enseignants ont plutôt choisi de se concentrer sur les TS.

3.2.2. Les interactions en classe

La démarche d’enseignement que nous proposons reprend les principes de la modélisation présentée dans le manuel fédéral numéro 1 (Ernst & Bucher, 1998, p. 102) : situation de référence, situations d’apprentissage et situation d’évaluation. De fait, cette modélisation s’inspire des différentes fonctions de l’évaluation : diagnostique, formative et sommative.

3.2.2.1. La forme de pratique scolaire comme situation de référence (évaluation diagnostique)

Lors de cette leçon, il s’agit de présenter aux élèves les règles constitutives du jeu pour leur permettre d’entrer dans la FPS.

Si l’on se rapporte à la recherche que nous avons menée, les enseignants ont fait preuve d’originalité pour les expliciter devant leurs élèves. Par exemple, après avoir transmis verbalement le fonctionnement de la FPS, certains ont pris la place d’un joueur pour mieux démontrer ce qu’il fallait faire et d’autres introduisaient progressivement les règles en interrompant le jeu.

Dans tous les cas, deux règles essentielles doivent d’ores Photo 1 : Tableau rempli par les élèves

et déjà être fixées : (i) après chaque tir, les attaquants comme les défenseurs doivent tourner derrière les cônes, et (ii) les défenseurs ne peuvent pas défendre avant d’avoir tourné derrière leur cône. C’est seulement à partir du respect de ces deux règles que la contre-attaque peut être travaillée.

Dans cette première leçon, il est également important d’introduire les observateurs qui doivent comptabiliser, comme le précise la fiche d’observation de la SR (Schéma 6) : (i) les

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TS, c’est-à-dire les tirs effectués sans opposition dans la zone des TS et (ii) les autres tirs, c’est-à-dire les tirs avec un défenseur entre le panier et le tireur ainsi que les tirs réalisés en dehors de la zone de TS7. Cette étape s’avère décisive pour permettre, d’une part, à l’enseignant comme aux élèves de constater leurs difficultés et, d’autre part, à l’enseignant de communiquer ses intentions aux élèves : prendre de vitesse les défenseurs pour tirer seul au panier. C’est à partir de la mise en évidence de ces données que les élèves comprendront la nécessité de « faire autrement », à savoir identifier et mettre en place des stratégies gagnantes (voir plus haut les trois stratégies dégagées à partir de l’analyse a priori).

3.2.2.2. Les situations d’apprentissage (évaluation formative)

Dans cette section, nous détaillons les trois types de situations d’apprentissage que les enseignants devront animer pour permettre aux élèves de construire les stratégies efficaces.

• Les situations d’échauffement

Les enseignants d’EP le savent bien, les leçons doivent commencer par un échauffement fonctionnel pour permettre aux élèves de s’engager dans l’activité en toute sécurité. En ce qui nous concerne, il est important de cibler cet échauffement sur les techniques que cette FPS sollicite en priorité, à savoir ; (i) le dribble rapide pour s’engager au panier, c’est-à-dire un dribble haut et devant soi qui permet au joueur d’aller vite, et (ii) le tir en foulée (lay-up) ou à l’arrêt sous le panier.

Dès le début du cycle d’enseignement, il est important que les situations permettent de travailler à la fois les deux techniques évoquées ci-dessus et les règles constitutives du jeu. A titre d’exemple, nous présentons ci-dessous deux situations que les enseignants volontaires ont proposées à leurs élèves.

Dans la première, l’enseignant répartit les cônes attaquants dans la salle (Schéma 7). Selon les possibilités matérielles, l’exercice peut se faire avec un ballon par joueur ou un ou deux ballons par équipe de trois-quatre joueurs. Le porteur de balle dribble et tourne autour des cônes, les non porteurs de balle également. Le porteur de balle passe après avoir tourné autour du cône. L’intention de cette situation est de permettre aux élèves (i) de s’approprier la règle de tourner autour des cônes attaquants lorsque leur équipe est en possession du ballon, et (ii) de s’entraîner au dribble « haut et rapide » devant eux entre les cônes et dribble « bas » pour

7 Certains enseignants ont utilisé le tableau (Photo 1) à disposition dans les salles de sport pour permettre aux observateurs de noter les résultats et d’autres du matériel comme des assiettes.

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tourner autour des cônes. Dans ce type de situation, l’enseignant peut démontrer ce qu’il y a à faire et corriger les erreurs des élèves.

Dans la deuxième situation d’échauffement, qui se déroule dans chaque demi-salle, l’intention de l’enseignant est toujours d’entraîner l’efficacité du dribble mais sous forme de défi. Pour cela, il place les élèves derrière la ligne de fond avec un ballon en main (Schéma 8). Au signal, les élèves dribblent pour contourner le cône et revenir au plus vite sur la ligne d’arrivée qui est avancée pour des raisons de sécurité. L’enseignant a la possibilité d’ajuster la distance des cônes pour préserver l’égalité de chances.

• La forme de pratique scolaire comme situation d’apprentissage

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Comme nous l’avons vu plus haut, c’est à partir des résultats chiffrés de la situation de référence que l’enseignant pose un problème aux élèves pour qu’ils s’engagent dans une démarche de recherche. Pour illustrer ceci, nous reprenons ici la communication d’un des enseignants de la recherche.

Enseignant : « Le problème qui vous est donné, c’est d’arriver à faire des tirs seuls avec votre équipe et trouver des stratégies pour arriver à le faire. »

C’est donc la FPS qui constitue le point de départ et de retour de la réflexion tactique des joueurs (Deleplace, 1979). Avant de jouer, les élèves ont la possibilité de se concerter pour décider d’une ou des stratégies qui doivent leur permettre de tirer seul. Lors de l’expérimentation, nous avons observé que les enseignants organisent un débat d’idées (Deriaz, Poussin & Gréhaigne, 1998) entre les matches pour recueillir les propositions des élèves (Schéma 1). Pendant cette étape, l’enseignant s’empêchera volontairement de donner des solutions, il se contentera de reformuler les hypothèses des élèves. Cette technique d’intervention est illustrée dans l’extrait suivant tiré de notre recherche :

Enseignant : « Quelle était la stratégie des bleus ? Au moment où vous récupérez le ballon, qu’est-ce qui se passe pour que ça fonctionne chez vous ? »

Elève : « Pendant qu’il y en a qui sont en train de défendre, il y en a un qui reste vers les cônes, quand on récupère la balle on lui donne et comme il sera seul, il aura le temps de tourner autour des cônes… »

Cette démarche, centrée sur la capacité réflexive et l’autonomisation de l’élève, qui peut prendre deux ou trois leçons, doit conduire progressivement l’enseignant et les élèves à formuler et reconnaître l’ensemble des stratégies efficaces (Photos 2 et 3). C’est également pendant ces situations d’apprentissage que les élèves travaillent les capacités transversales relatives à l’observation et à l’arbitrage.

Photo 2 : enseignant reprend les stratégies évoquées Photo 3 : élève qui propose une stratégie

La fiche d’observation (Schéma 13) peut alors évoluer et prendre en compte les différentes stratégies lorsque celles-ci ont été réellement mises en œuvre dans la FPS. L’enseignant gagne à proposer parallèlement des situations d’apprentissage permettant aux élèves de concrétiser les stratégies émergeant de ce processus réflexif.

Dans la première situation (Schéma 9), les enseignants ont avancé les cônes attaquants pour permettre à l’équipe en possession du ballon de faire plus facilement l’expérience de la

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contre-attaque et de trouver/exercer les stratégies efficaces. Dans ce dispositif, le chemin à parcourir par les défenseurs est donc plus long, ce qui donne davantage de temps à l’attaque pour arriver au panier sans opposition.

La deuxième situation (Schéma 10) aménage différemment le dispositif et répond à la proposition de l’élève citée ci-dessus. Toujours avec l’idée de favoriser l’attaque, l’enseignant place un joueur-joker qui rentre dans le terrain dès que son équipe est en possession du ballon et ressort lorsque son équipe le perd.

La position « de départ » du joker est à penser selon les besoins du groupe classe. La situation facilite ainsi la mise en œuvre de la stratégie Démarquage au cône ou Démarquage sous le panier selon la configuration du jeu.

• Les situations d’entraînement

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Les situations d’entraînement s’appuient sur les stratégies prometteuses identifiées par les élèves. Elles doivent leur permettre de construire les repères perceptifs pour opérer des choix tactiques pertinents en fonction de la configuration de jeu.

Ces situations se déroulent donc toujours en présence de défenseur(s). Dans la première situation, trois joueurs sont disposés derrière la ligne de fond et l’action est déclenchée par le départ en dribble du porteur de balle, ils doivent contourner leur cône respectif (Schéma 11).

En fonction du placement du défenseur, le porteur de balle devra choisir entre deux alternatives : (i) si le défenseur occupe le couloir de jeu direct, alors porteur de balle devra faire une passe au non porteur de balle lorsque ce dernier sera dans la zone des TS, (ii) si le défenseur choisit plutôt de libérer le couloir de jeu direct pour empêcher la passe, alors le porteur de balle doit s’engager en dribble pour tirer seul dans la zone des TS.

La proposition suivante essaie de s’approcher des conditions « réelles » du jeu et de la contre- attaque pour ce qui concerne notre FPS. L’action débute par un tir au panier du futur défenseur (Schéma 12). Après la récupération du ballon, les attaquants peuvent s’engager dans l’action (aller vers les cônes noirs). Dans ce type de situation, il est possible également d’envisager la réversibilité des actions : permettre aux défenseurs qui interceptent le ballon de contre-attaquer à leur tour ou permettre aux attaquants après un tir raté de refaire à nouveau une contre-attaque, l’action s’arrêtant après un panier marqué. En fonction du niveau des joueurs, nous pouvons adapter la position des cônes, mais également retarder le défenseur en l’obligeant à aller toucher la ligne de fond avant de contourner le cône défenseur.

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3.2.2.3. La situation d’évaluation (évaluation finale)

La dernière leçon du cycle d’enseignement sert à valider la construction par les élèves des compétences ciblées par la FPS. Il s’agit donc de comptabiliser le nombre de tirs seuls des différents élèves. Dans une logique d’évaluation par les pairs (López-Pastor, Kirk, Lorente- Catalán, MacPhail & MacDonald, 2013), l’observation est réalisée par les élèves grâce à l’apprentissage qu’ils ont réalisé pendant le cycle, sous le contrôle de l’enseignant qui en est responsable. Toutefois, en fonction des classes l’enseignant peut aider à l’observation.

Les enseignants sont évidemment libres de décider à partir de quels résultats chiffrés ils estiment que le seuil de compétence est atteint, selon le contexte d’enseignement et le cadre prescriptif dans lesquels ils évoluent.

Dans les classes du primaire de notre étude, les enseignants ont utilisé uniquement les TS sans opérer de distinction entre les différentes stratégies pour leur évaluation (Schéma 6)8. A l’inverse, dans les classes du secondaire I, les enseignants ont distingué les trois stratégies (Schéma 13).

Cette dernière manière de faire nous paraît prometteuse et réalisable au secondaire I car pour être véritablement compétent dans cette FPS, il s’agit d’être capable de produire les différentes stratégies dans le jeu. En d’autres termes, le joueur doit être capable de dribbler seul au panier mais également de faire une passe offensive à un partenaire qui s’est démarqué sous le panier ou de lui-même se démarquer sous le panier. C’est seulement à partir de la régularité de ces comportements en jeu que l’on qualifiera ce joueur de compétent.

8 Un des enseignants a évalué les TS en utilisant les élèves observateurs qui notaient le nom des joueurs sur le tableau, mais aussi en prenant en compte les joueurs qui, après avoir tourné rapidement autour du cône, se proposaient dans la zone de TS même s’ils ne recevaient pas la balle. Ce comportement montrait une réelle transformation par rapport aux comportements initiaux, qu’il a souhaité valoriser.

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4. Conclusion

Dans cette contribution, nous avons cherché à montrer comment, à travers une démarche d’ingénierie didactique désormais classique dans le champ de la didactique de l’EP, nous avons invité des enseignants genevois du primaire et du secondaire I à penser l’éducation physique autrement. Plus précisément, comment nous avons invité cinq enseignants volontaires à penser autrement l’enseignement du basketball en EP. Cette précision est de taille.

D’une part, elle souligne la modestie de notre entreprise. Cette modestie est néanmoins toute relative, dans la mesure où cette recherche exploratoire avait précisément comme but de préparer le terrain à une diffusion plus large de cette FPS en basketball. Ainsi, l’expérimentation avec ces cinq enseignants volontaires a été source d’informations essentielles et de propositions fécondes dans la perspective de cette diffusion à grande échelle, à laquelle nous espérons d’ailleurs que cet ouvrage contribuera. Ajoutons encore, pour relativiser cette impression de modestie, que cette entreprise de rénovation ne se limite pas à l’enseignement du basketball. En effet, nous menons actuellement une recherche comparable en référence à deux autres activités – la course de demi-fond et la danse contemporaine – au sein d’un groupe de recherche intercantonal (projet PEREPS), animé par un même projet de diffusion de FPS permettant de concrétiser de façon innovante les instructions officielles cantonales et suisses romandes, voire de contribuer à leur évolution.

D’autre part, cette précision souligne et renforce la conception de l’EP que nous avons développée en appui sur la littérature dans les pages qui précèdent et que nous diffusons dans nos projets d’ingénierie didactique en cours. La formulation « penser autrement l’enseignement du basketball en EP » véhicule en effet implicitement les idées fortes suivantes, déjà exposées et que nous synthétisons ici : (i) l’EP est une discipline scolaire dans laquelle le maître enseigne et les élèves réalisent des apprentissages tant disciplinaires que transversaux/généraux, ainsi que cela est prescrit dans de nombreux systèmes scolaires dont le nôtre (CIIP, 2010 ; Forest et al., 2018) ; (ii) ce sont les APSA ayant une représentation culturelle qui constituent la référence et donnent du sens à cette discipline scolaire, sans toutefois se confondre avec elle ; (iii) il s’agit de rompre avec la tradition d’enseignement de l’EP comme enseignement de techniques sportives (conception techniciste), encore largement répandue dans les textes officiels comme dans les pratiques enseignantes, pour entrer de plein pied dans une tradition d’enseignement de l’EP comme éducation à la culture physique et sportive (Forest et al., 2018). Cette dernière nous parait en effet la plus à même de contribuer

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à la formation scolaire du futur adulte physiquement éduqué et cultivé, c’est-à-dire à la fois compétent, soucieux de sa santé et de celle des autres, et porteur des valeurs humanistes et universelles du sport.

Comme le montrent les différentes contributions à cet ouvrage, il existe de nombreuses manières de penser l’éducation physique autrement. Reposant sur des arrière-plans épistémologiques différents, celles-ci ne sont pas nécessairement compatibles entre elles. Il appartiendra ainsi au lecteur de faire ses propres choix. Les apports de notre contribution concernent à la fois le travail du maître hors de la classe (à travers la construction et l’analyse a priori de FPS, de situations d’apprentissage et d’évaluation) et en classe (via l’outillage et la caractérisation des interactions du maître avec les élèves et des élèves entre eux). Soucieux d’illustrer abondamment la démarche que nous proposons afin de rénover l’enseignement de l’EP, nous avons retenu les sports collectifs, et plus spécifiquement le basketball, comme pratique sociale de référence. Les apports de notre contribution ne se limitent évidemment pas à ce domaine d’activités, toutes les pratiques physiques, sportive et artistiques étant de potentielles candidates au traitement didactique exposé ici.

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