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Submitted on 16 Nov 2010
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Proposition d’une Taxonomie Fonctionnelle des Environnements de Réalité Augmentée
Philippe Fuchs, Olivier Hugues, Olivier Nannipieri
To cite this version:
Philippe Fuchs, Olivier Hugues, Olivier Nannipieri. Proposition d’une Taxonomie Fonctionnelle des
Environnements de Réalité Augmentée. AFRV2010. Cinquième Journées de l’Association Française
de Réalité Virtuelle et de l’Interaction 3D., Dec 2010, Orsay, France. �hal-00536787�
Proposition d’une Taxonomie Fonctionnelle des Environnements de Réalité Augmentée
Fuchs Philippe Hugues Olivier Nannipieri Olivier
Ecoles des Mines de Paris ParisTech MaxSea - ESTIA Recherche - LaBRI I3M, Université du Sud Toulon-Var et CRVM
Paris, France Bidart, France CNRS, Université de la Méditéranée
philippe.fuchs@ensmp.fr o.hugues@net.estia.fr fk.olivier@mac.com
RÉSUMÉ
L’objectif de cet article est double. Nous proposons premiè- rement une définition des environnements de réalité aug- mentée (RA). Ensuite nous proposons, basée sur notre dé- finition, une nouvelle taxonomie permettant de classer ces environnements. Après une brève revue des classifications existantes, nous définissons la RA par sa finalité qui est de permettre à une personne de réaliser des activités sensori- motrices et cognitives dans un nouvel espace en associant l’environnement réel et un environnement virtuel. Nous pré- sentons ensuite notre taxonomie fonctionnelle des environ- nements de RA. Nous divisons ces environnements en deux groupes distincts. Le premier concerne les différentes fonc- tionnalités permettant de s’informer et de comprendre notre environnement, une perception augmentée de la réalité. Le deuxième correspond aux applications ayant pour finalité de créer un environnement imaginaire. Enfin, plus qu’une dif- férence fonctionnelle, nous démontrons qu’il est possible de considérer que les deux types de RA ont une finalité prag- matique. La différence semble donc tenir à la capacité de ces deux types de RA à s’affranchir ou pas de la localisation spatio-temporelle.
1 Introduction
Il est incontestable que la réalité augmentée (RA) est le produit d’un ensemble d’innovations technologiques. Cepen- dant, réduire la RA à l’ensemble des caractéristiques tech- niques de l’interfaçage comportemental ne conduit-il pas à sous-estimer la richesse de la RA en regard de ses fonction- nalités ? Nous sommes donc en droit de poser naïvement la question suivante : qu’est-ce qui est augmenté dans la réa- lité augmentée ? Si la réalité est, par définition, tout ce qui existe, alors, à strictement parler, la réalité ne peut pas être augmentée puisqu’elle est déjà tout. Alors qu’est-ce qui est augmenté ? En première analyse, la réponse paraît évidente : ce n’est pas la réalité, mais la perception de la réalité qui est augmentée. Dans cette perspective, la question du réel, de son existence, de ses propriétés, ne se pose pas ici. Le pro- blème se situe au niveau de la perception, c’est-à-dire du phénomène – la réalité telle qu’elle est perçue, pas du nou- mène – la réalité telle qu’elle est en soi, pour reprendre le vocabulaire kantien [1].
2 Perception augmentée ?
On trouve dans la littérature deux courants principaux qui définissent la perception. D’un côté (une conception pas- sive), le système sensoriel reçoit passivement des stimula- tions, traite ces informations afin de se référer aux représen- tations internes. De l’autre, (une conception active), c’est
l’extraction de régularité entre les actions et les stimulations qui permet de percevoir. Il apparait que le courant actuel est plutôt de considérer la perception sous l’approche sensorimo- trice (le deuxième cas), en opposition à une approche linéaire et séquentielle du processus perceptif, le premier cas [2].
D’ailleurs, ceci est confirmé par Gibson [3] qui considère les sens comme des systèmes perceptifs complets (« percevoir, c’est extraire grâce aux mouvements cette information en en détectant les invariants. »). Il est important de souligner, comme l’ont fait Auvray et Fuchs [2] en se fondant sur le cadre théorique proposé par Bergson dans « Matière et mé- moire » [4], que toute perception et toute connaissance n’ont qu’une seule finalité – qu’elle soit consciente ou non : l’ac- tion. On ne perçoit pas et on ne cherche pas à connaître pour savoir mais toujours pour agir. Héritée de la conception prag- matique de William James [5], la thèse bergsonnienne insiste sur la nature même de notre perception et de toute recherche d’information dans le réel : la perception n’est jamais désin- téressée, la connaissance n’est jamais qu’un moyen de mieux agir dans le réel [4] – d’y survivre pour les animaux sauvages ou d’y être plus heureux pour les humains. Même si toute augmentation de la quantité d’informations – et par voie de conséquence, toute augmentation de notre compréhension de la réalité – permise par la RA a pour objectif final une plus grande maîtrise du réel, il est clair que, d’un point de vue technologique, la RA peut offrir des interfaces qui proposent soit, plus explicitement, les informations, soit, plus explicite- ment, une meilleure maîtrise de notre action sur le réel. Mais alors comment les dispositifs techniques modifient-ils notre perception ? D’après [2], « l’utilisation d’un nouveau disposi- tif technique modifie notre couplage sensorimoteur avec l’en- vironnement ; et par là même il modifie notre perception ».
Les outils techniques modifient notre « espace perceptif ».
Le pas est décisif. Cependant, on ne peut pas « seulement » s’employer à mieux percevoir puisque la perception n’est pas une finalité en soit, mais un moyen d’atteindre un objectif d’action [4]. En effet, à l’instar de la réalité virtuelle (RV), l’augmentation de la réalité peut répondre à deux objectifs pour l’utilisateur : favoriser la compréhension et la maîtrise du réel et donc, une perception augmentée de la réalité d’une part et, d’autre part, proposer un environnement nouveau dont la finalité ne semble obéir ni à une exigence de l’ordre de la connaissance, ni à une exigence d’ordre pratique.
3 Finalité et naissance d’une taxonomie
Globalement, la finalité de la RA est de permettre à une
personne de réaliser des activités sensori-motrices et cogni-
tives dans un nouvel espace en associant l’environnement
réel et un environnement virtuel. Or, comme la RV [6], la
RA peut proposer soit une modélisation du monde réel sur la base d’un environnement qui imite ou symbolise le monde réel, soit la création d’un environnement imaginaire ne cor- respondant à rien d’actuel. C’est sur la base de cette distinc- tion qu’il est possible de proposer une taxonomie fonction- nelle de la RA et de tirer un certain nombre d’implications relatives, notamment, aux variations du référentiel spatio- temporel permises par la RA.
4 Taxonomie des systèmes mixtes
Les tentatives de classification des environnements de réa- lité augmentée sont nombreuses car cette technologie est un sous-ensemble des environnements ou systèmes mixtes.
Qu’elles soient techniques, fonctionnelles ou conceptuelles, ces taxonomies ont souvent un objectif descriptif, comparatif et génératif [7]. Nous présentons un rapide tour d’horizon de quelques taxonomies présentes dans la littérature. Le lecteur trouvera une revue plus complète des classifications dans [8].
4.1 Taxonomies conceptuelles
Jacob et al. [9] ont proposé en 2008 un cadre d’analyse avec lequel ils explorent les différents environnements mixtes afin de dégager une utilisation commune des capacités humaines liées avec le monde physique, le corps et l’environnement so- cial. Cependant, l’intérêt des environnements mixtes étant leur capacité à ne pas reproduire fidèlement la réalité [10], les auteurs ont proposé six facteurs comme le pouvoir d’expres- sion, l’efficacité, l’ergonomie ou l’accessibilité permettant de pondérer l’exploitation du monde physique. Cette classifi- cation permet de souligner le grand nombre de possibilités d’interaction engendrées par les systèmes mixtes. Dans [11], Mackay propose une classification des interfaces mixtes dont le dénominateur commun est la cible des augmentations. Les différentes cibles sont les utilisateurs, les objets d’interac- tion et l’environnement. Dubois [12] étend cette classification en introduisant une notation de conception nommée ASUR, élargie en 2003 [13] dont la discrétisation comprend l’utilisa- teur, l’adapteur
1, le système et les entités réelles. Plus tard, Renevier [14] définit les modes d’interaction comme passif (déterminé par le système) ou actif (déterminé par l’utili- sateur). La création, l’accès, la modification et la destruc- tion des liens sont dépendants du mode d’interaction. Un lien est définit comme étant éphémère ou persistant et peut
être localisé par rapport aux utilisateurs. Différents types de localisation sont possibles. Les auteurs définissent aussi trois types d’interaction : les utilisateurs interagissent avec les objets via les liens et inversement et les liens servent à la communication entre les utilisateurs.
4.2 Taxonomies techniques
Dans [15, 16], les auteurs proposent une classification techno- logique maintenant bien connue sous le nom de « continuum de réalité-virtualité ». Ils s’attachent à discrétiser et classifier l’environnement selon quatre catégories. Ce continuum sou- ligne le fait qu’il existe un passage progressif de la réalité à la réalité virtuelle et inversement. Benford et al. [17] ont choisi d’analyser les mouvements de l’utilisateur afin d’en extraire un cadre basé sur les mouvements attendus, les mouvements capturés et les mouvements souhaités. En s’appuyant sur la théorie de l’action de Norman [18], les auteurs proposent de dissocier les systèmes qui augmentent l’exécution et les systèmes qui augmentent l’évaluation.
4.3 Taxonomies fonctionnelles
Ayant pour objectif d’éclaircir les concepts qui sous-tendent la combinaison du monde réel et du monde virtuel, Dubois et al.[19] proposent une classification décomposée en deux par- ties distinctes : la première caractéristique est l’objet de la tâche et la seconde est le type d’augmentation. Si l’objet de la tâche permet aux auteurs d’élargir et de préciser le conti- nuum de Milgram [15] en y ajoutant deux continua afin de distinguer la réalité augmentée de la virtualité augmentée, la seconde caractéristique permet, quant à elle, de souligner l’existence de deux types fonctionnels différents d’augmen- tations. Le premier consiste en une « exécution augmentée » tandis que le second est une « perception augmentée ». Selon les auteurs, le premier type d’augmentation permet à l’utili- sateur d’effectuer des tâches dans le monde réel d’une façon nouvelle comme le permet par exemple « l’Active Badge » [20] alors que le second, bien plus courant concernant les systèmes de RA, permet d’apporter des informations perti- nentes pour la tâche à accomplir.
5 Proposition d’une taxonomie fonctionnelle de la RA Nous proposons de distinguer plusieurs fonctionnalités de RA dont l’organisation est présentée en Figure 1.
Classification fonctionnelle des environnements de RA
Environnement imaginaire
Perception augmentée
Imaginer (futur)
Imaginer (passé)
Imaginer l'impossible
incrustation EV sur IR
incrustation IR sur EV
incrustation EV sur IR
incrustation IR sur EV
Réalité documentée
Virtualité documentée
Compréhension augmentée
Visibilité augmentée
Association perceptuelle
Incrustation Intégration
Substitution du réel par le virtuel
Association comportementale