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Submitted on 1 Jan 1908
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Contribution à l’étude du rayonnement du polonium
Ch. Lattès
To cite this version:
Ch. Lattès. Contribution à l’étude du rayonnement du polonium. Radium (Paris), 1908, 5 (4),
pp.97-102. �10.1051/radium:019080050409700�. �jpa-00242281�
IViÉM0IRES ORIGINAUX
Contribution à l’étude du rayonnement du polonium
Par Ch. LATTÈS
[Faculté des sciences de Paris. Laboratoire de Mme Curie.]
Objet des Recherches. - Historique.
Ce travail a été entrepris en vue de déterminer si les rayons du polonium, en frappant une surface mé-
tallique, donnent ou non naissance à un rayonnement
secondaire.
L’expérience fondamentale qui avait conduit à sup- poser l’existence d’un tel rayonnement a été faite par Mme Curie 1, qui a constaté une modification de l’io- nisation produite par le rayonnement d’une prépara-
tion de polonium recouverte de deux écrans métalli- ques superposés, lorsqu’on intervertissait ces écrans.
Cette hypothèse fut corroborée par des expériences
de M. Becquere1 qui, en recouvrant du polonium
avec une mince feuille métallique, obtint des im-
pressions photographiques, à une distance de la pré- paration où les rayons « eux-mêmes n’exerçaient
certainement plus aucune action.
M. Meyer3, au contraire, à la suite d’expériences
sur l’absorption des rayons du polonium, par un mème écran placé à des distances variables de la couche active, a proposé une nouvelle explication de
l’effet observé par Mme Curie, fondée sur les varia- tions de cette absorption, et ne faisant nullement
intervenir l’existence hypothétique d’un rayonnement secondaire ionisant.
MM. Kucera et 1BIasek 4 ont éliminë également la
nécessité de cette hypotllèse, et proposé d’expliquer
l’effet de l’intervention des écrans par une diffusion des rayons ci- qui ont traversé une couche métallique,
diffusion qui influerait sur l’épaisseur utile, et par suite sur l’absorption relative à un second écran interposé sur le trajet des rayons.... Une différence
entre les pouvoirs des différents métaux suffirait alors pour expliquer les apparences observées.
En revanche, les expériences de M. W. H. Loge-
man-5 ainsi que celles de M. M. Moulin6 sont favora- l. :Blme S. CURIE, Thèse de Doctorat. R4-S5.
2. BECQUEREL, C. R., 136. 977-981.
5. MEYER, Physikalische Zeitschrift, 917-920-1906.
4. KUCERA et MASEK, Physikalische Zeitschrift, 1906-650- 6ô4.
-KUCERA, Le Radium, 4-75-1907.
5. LOGEMAN, Pl’oceed’ings of the Royal Society of London (A) 78, 212-217-1905.
6. 3J. MOULIN. le Radium, 4-552-1907.
bles à l’existence d’un rayonnement secondaire lent, qui a été mis en évidence en mesurant sa charge.
M. Logeman arrivait à mettre en évidence la part due
aux rayons secondaires dans la charge que prenait un plateau d’aluminium ou de cuivre exposé au rayonne- ment d’une plaque de polonium, en observant la
différence des vitesses de charge suivant que le
rayonnement était ou non soumis à l’action d’un champ magnétique intense.
M. Moulin a disposé ses expériences d’après un principe analogue. Les rayons x d’une lame de pla-
tine recouverte de polonium se propageaient dans le
vide et venaient frapper une plaque métallique. On
laissait dans une première expérience les rayons sc- condaires s’éloigner de la plaque en emportant leur charge, et dans une seconde on les ramenait au con-
traire sur la plaque par l’action d’un champ 111agné-.
tique ou électrique convenable. La différence des variations de charge de la plaque dans ces deux cas
conduit 31. Moulin à conclure en faveur de l’existence d’un rayonnement secondaire lent, chargé négative-
ment, et dénué de pouvoir ionisant.
Dans mes expériences, j’ai tenté de mettre en évi-
dence l’existence d’un rayonnement secondaire par
un effet d’ionisation. J’ai également tenté d’obtenir
à l’aide du rayonnement cherché une impression photographique.
Les deux méthodes m’ont conduit à un résultat
négatif.
A.
-Méthode électrique.
Première série d’expériences.
-Principe.
-
Pour déceler l’existence possible d’un rayonne- ment secondaire ionisant, j’ai mesuré le courant de saturation entre deux toiles métalliques exposées au rayonnement du poloniuln, et j’ai cherché si ce cou- rant était modifié lorsqu’on posait sur la toile supé-
rieure une plaque métallique. 11 aurait dù en ètre ainsi, si la surface de cette plaque frappée par les rayons x avait émis entre les mailles de la toile des rayons secondaires capables d’ioniser l’air de la chambre.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/radium:019080050409700
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L’appareil dont je disposais nie permettait de dé- placer la chambre d’ionisation par rapport à la source
de rayons, c’est-à-dire d’étudier les rayons cc à des distances variables de leur origine, compriscs entre
2 centimètres et la valeur du parcours maximum dans l’air (3cm9 à 4cm).
A aucune distance je n’ai observe de variation sen-
sible du courant de saturation, soit en introduisant
une plaque, soit en remplaçant une plaque par une autre de métal différent.
Dispositif expériemental.
-10 La préparation de poloniun était constituée par un dépôt sur lame de platine obtenu de la manière suivante : la lame était
préalablement recouverte d’une couche mince de
bismuth ; à cet effet, on l’utilisait colnme catode dans l’électrolyse d’un bain d’eau acidulée par le dixième de son poids d’acide sulfurique, l’anode
soluble étant constituée par une plaque de bismuth
fondu en présence de cyanure de potassillm.
Pour que le bismuth déposé formc une couche
adhérente et régulière, il est bon de laver la lame de
platine a l’eau distillée dès que le dépôt commence,
pour éliminer les bulles gazeuses adhérentes n la lame.
La densité de courant employée correspondait à 5 1»il- liampères pour une lame de 6 centimètres carrés.
La lame ainsi préparée était ensuite plongée dans
une dissolution chlorhydrique de polonium, obtenue
en chassant l’acide azotique d’une dissolution de polo-
nium dans J’eau régale.
-Dans ces conditions le bislnuth déplace le polonium qui se dépose sur la lame.
Fig. 1.
Afin de concen- trer le dépôt sur
la partie jugée utile, on vcrnit le
reste de la lame.
2° L’appareil
de mesurc repré-
senté figure 1 était
constitué par : a)
un platcau hori-
zontal P destiné à supporter la préparation et mobile dans le sens vertical au moyen d’une crémaillère C; un vernier au dixième V soli- daire de ce plateau et se déplaçant devant une ré- glette verticale fixe R, permettait d’évaluer les dis-
tances de la préparation à la chambre d’ionisation.
b) Celle-ci était contenue dans une boîte cylindrique
en laiton B soutenue par deux colonnes dont l’une
portait la règle R. La chambre d’ionisation était formée par deux toiles cll fil liii de cuivre tendues
parallèlcmellt sur deux cerceaux métalliques isoles.
l,a distance des deux toiles était d’environ 0mm, 5, la partie Inédiane de la chambre correspondant au zéro
de la réglette. Chacun des cerceaux était fixé au corps de la boîte par une tige métallique isolée à l’ébonite
et se terminant extérieurement par une borne. Ainsi
aux toiles T, T’ correspoldaient les bornes b, b’. La toile inférieure T était reliée par la borne b au pôle positif d’une batterie d’accumulatcurs dont l’autre
pôle était au sol, ce qui portait cette toile à un poten-
tiel constant, suffisant pour assurer la saturation.
-L’autre toile T’ était reliée par b’, à l’électromètre.
-Une troisième toile métallique T" tendue au fond de la boite 11, et par suite au sol comme elle, formait écran
électrique au-dessous de la chambre d’ionisation.
c) Le courant d’ionisation était mesuré à l’aide d’un électromètre à quadrants et par la lnéthade de la fuite
constante.
J’ai employé d’abord un électromètre à fil de quartz dont l’aiguille, chargée par contact avec le
mercure d’un godet mobile relié à une batterie
d’accumulatcurs, pu*s isolée, gardait assez bien
sa charge pendant une série de mesures. Plus tard, j’ai substitué au fil de quartz un fil métallique, ce qui permettait de maintenir un potentiel constant à l’ai- guille : ce dernier dispositif m’a donné des résultats
plus réguliers.
dj La fuite constante était formée par un conden- sateur du inodéle ordinairement employé
en radioactivité, dont le plateau infé-
rieur, relié au sol, supportait une lame d’argent recouverte d’un dépôt de polo- niuln, et dont le plateau supérieur était
relié à la méme borne de l’électromètre que l’appareil d’ionisation. L’autre paire
de quadrants de l’électromètre est reliée au sol. Dans
ces conditions, le courant de saturation entre les toiles T T’ donne à l’électromètre une déviation constante qui
lui sert de mesure.
e) On n’utilisait pour produire l’ionisation que les rayons émis par la préparation dans les directions
voisines de la normale. Pour éliminer les autres, on canalisait le rayonnement par un faisceau de tubes
Inétalliqucs verticaux, constitué en l’espèce par la toi’c d’un bec Mekcr et figuré en F.
fj Les plaques métalliques que l’on posait sur la
toile T’ étaient de sin1ples disques dccoupés dans dcs
feuilles métalliques assez minces pour que leur poids
ne déformàt pas la toile.
Résultats.
-On construisait les courbes de varia- tion du courant de saturation avec la distance, en laissant d’abord la toile T’ découverte, puis en la cou-
vrant avec des plaques de métaux divers.
Je constatai bientôt que le dispositif’ adopté pour
charger l’aiguille tant que j’ai conservé le fil de
quartz, ne lui conservait pas une charge assez con-
tante, malgré le soin apporté à iiettoycr Id Iil dc quartz, pour que les courbes tracées successivement
avec deux plaques métalliqucs différentes, sans recharger l’aiguille, pussent indiquer avec certitude,
par leurs différences, une différence dans les rayon- nements secondaires cherchés; on ne gagnait pas
bcaucoup à ce point de vue en chargeant l’aiguille
avant chaque série de mesures, car la charge initiale
était loin d’être parfaitement definie. J’ai obvié dans la mesure du possible à cet inconvénient en croisant les lectures, c’est-à-dire en mesurant successivement,
pour unc même distance de la préparation aux toiles,
les courants correspondant aux différentes plaques métalliqucs. On intervertissait d’ailleurs pour les distances successives, l’ordre des lectures pour les différents métaux, en sorte que les petites variations possibles de la charge de l’aiguille ne pouvaient se tra-
duire que par un changement de l’allure générale de
toutes les courbes et non par une divergence entre les
courbes correspondant aux différents métaux.
Les lectures étaient d’ailleurs corrigées de la valeur
de 1 fuite propre de l’appareil, qui était lue ii difl’é-
rentes reprises pendant une série de mesurcs et s’est
montrée assez constante pour que cette correction n’introduise aucune erreur sensible.
J’ai utilisé des plaques de zinc, de plomla, d’alu- minium, et j’ai observé une coïncidence assez parfaite
des courbes obtenues avec les diverses plaques, et sans plaque, pour permettre déjà de conclure à l’absence de tout rayonnement secondaire capable de produire
une ionisation rnesurable dans les conditions dcs
expériences.
Dans le tableau suivant qui indique les nombres
fournis par une série de mesures, les chiffres de la
première colonne représentent les distances en milli-
mètres de la préparation à la chambre d’ionisation et ceux des colonnes 2, 5, 4, 5 les valeurs des courants de saturation correspondants, la toile T’ ne supportant
aucune plaque (2), ou des plaques d’aluminium (5),
de zinc (4), de plomb (5). Ces valeurs sont exprimées
en millimètres de déviation constante et corrigées de
la valeur de la fuite propre, indiquée en premier lieu.
Ces résultats, qui résument assez bien ma première
série d’expériences, sont traduits graphiquement par la figure 2. On voit que les courbes correspondant aux
Fig. 2.
Appariel sans aucune plaque X
-
avec plaque d’aluminium O
- -
dc zinc +
- -
de plomb
.quatre cas étudiés étant sensiblement confondues, on
s’est borné à tracer une courbe unique, tout en figu-
rant les points représentatifs des divcrs cas.
Toutefois, les diverses expériences faites avec cette
méthode n’ayant pas toutes donné des résultats aussi
concordants, on attribua ces irrégularités observées à la modification des effets de diffusion des ions que peu- vent produire ces plaques métalliques, et aux varia-
tions possibles du volume d’air ionisé par les défor- mations de la toile T’. On a élininé ces causes d’erreur
en modifiant légèrement l’appareil de mesure.
Deuxième série d’expériences.
-On n’a changé dans le premier dispositif que la chambre d’ionisation : la toile supérieure T’ était remplacée
par un plateau métallique x, relié à l’électrométre.
Ce plateau métallique, vissé sur une tige fixée au cou-
vercle de l’appareil, et isolé a l’ambre, comme l’indi-
que la figure 2 (II), pouvait être enlevé à volonté et remplacé par un autre de métal différent. Les diffé- rents plateaux avaient été très soigneusement travail- lés, de manière â présenter tous la même épaisseur,
et venaient buter, une fois vissé, contre un renfle-
ment de la tige, plan à sa partie inférieure, cc qui
assurait à la chambre d’ionisation, dans la comparai-
son des différents métaux, une forme et un volume très bien délinis. En outre, ce nouvel arrangement présentait sur le premier l’avantage de pouvoir mettre
en évidence tout rayonnement secondaire ionisant,
mëme très absorbable qui aurait pu ne pas se mani- fester dans les premières mesures si l’épaisseur d’air comprise entre la face inférieure des plaques métalli-
ques et la face inférieure de la toile T’, avait été suf- fisante pour le supprimer.
L’électromètre employé dans ces nom elles mesures
était a fil métallique, ce qui permettait de maintenir
l’aiguille à un potentiel constant de 88 volts. Les causes
100
d’irrégularités dues aux variations do charge de l’ai- guille étaient donc aussi supprimées.
Diverses séries d’expériences, faites avec des pla-
teaux de cuivre, de zinc, d’aluminitiin, de laiton ont fourni une coïncidence parfaite, eu égard au degré de précision des expériences, pour les courbes correspon- dant aux différents métaux.
Dans le tableau suivant, qui résume une série d’ex-
périences, les différentes grandeurs sont exprimées
avec les mêmes unités que dans le tableau donné plus
haut. Les déviations données par les divers courants sont corrigées de la f’uitc propre de l’appareil.
Ces résultats sont représentés graphiquement par la courbe de la figure 5, obtenue en portant en abscis-
ses les courants duc saturation, et en ordonnées les dis-
Flg. 5.
1 plateau d’aluminium X
Points correspondant au
-du cuivre -+
-