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Pyoderma gangrenosum revelant une maladie de TAKAYASU

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Academic year: 2021

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Le pyoderma gangrenosum est une affection rare, décrite initialement par Louis Brocq il y a plus de 70 ans [1].

Il s’agit d’une dermatose neutrophilique s’associant dans la moitié des cas à une maladie systémique, dysimmunitaire ou néoplasique. Celles-ci sont le plus souvent une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI), un rhumatisme inflammatoire ou une hémopathie maligne.

Son expression clinique est variable. Quatre formes sont le plus souvent décrites : la forme ulcéreuse, pustuleuse, bulleuse et végétante.

La maladie de Takayasu est une aorto-artérite inflammatoire chronique décrite pour la première fois par un ophtalmologue japonais en 1908, qui touche préférentiellement les jeunes femmes d’origine asiatique. De pathogénie restée encore imprécise, elle pose également un problème diagnostique car elle n’a aucun marqueur spécifique biologique ou radiologique, et nécessite donc le recours à des critères diagnostiques établis par des sociétés savantes. Elle peut avoir des manifestations extra-artérielles à type d’atteinte oculaire ou cutanée.

L’association du pyoderma gangrenosum à la maladie de Takayasu est une situation classiquement décrite au Japon, mais exceptionnelle dans les autres régions du monde. C’est ce qui fait l’intérêt des deux observations que nous allons rapporter, qui concernent deux patientes hospitalisées au service de Dermatologie du CHU Ibn Sina chez qui un pyoderma gangrenosum a conduit au diagnostic d’une artérite de Takayasu associée.

Nous décrirons dans un premier temps les deux observations colligées, pour aborder ensuite les aspects épidémiologiques, pathogéniques, cliniques, paracliniques et thérapeutiques du pyoderma gangrenosum et de l’artérite de Takayasu. Enfin, nous proposons une revue de la littérature concernant l’association de ces deux affections.

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II.1. Observation 1 :

Il s’agit d’une patiente de 13 ans, ayant comme antédécents :

Une tuberculose pulmonaire contractée à l’âge de 9 ans, traitée durant 6 mois

Une insuffisance cardiaque gauche diagnostiquée à l’âge de 11 ans Un accident vasculaire cérébral ischémique survenu à l’âge de 12 ans Une hypertension artérielle évoluant depuis 4 ans

Elle était hospitalisée pour prise en charge de deux ulcérations situées au niveau du visage et du membre supérieur gauche.

L’examen physique à l’admission retrouvait une patiente en mauvais état général, avec à l’examen dermatologique la présence de deux ulcérations superficielles de diamètres respectifs mesurant 10 et 16 cm, l’une au niveau du front et la seconde au niveau du membre supérieur gauche, de bordure circulaire, limitée par un bourrelet d’aspect inflammatoire et creusée de clapiers purulents (Figure 1 et 2). On notait par ailleurs la présence de cicatrices atrophiques cribriformes au niveau du membre supérieur gauche (Figure 3). A l’examen cardiovasculaire, on retrouvait un souffle d’insuffisance aortique avec abolition des deux pouls radiaux. La patiente présentait par ailleurs un blocage du coude gauche et une amyotrophie de la main homolatérale très probablement en rapport avec l’accident vasculaire cérébral survenu un an auparavant.

L’analyse histopathologique des lésions cutanées objectivait une ulcération épidermique étendue associée à un infiltrat inflammatoire dermique

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polymorphe fait de polynucléaires neutrophiles, de lymphocytes et d’histiocytes, occupant la presque totalité du derme, avec à ce niveau une prolifération vasculaire sans lésions de vasculite visibles. On notait par ailleurs une hyperplasie épidermique de part et d’autre de l’ulcération. Cet aspect était compatible avec un pyoderma gangrenosum.

Le bilan biologique réalisé objectivait un syndrome inflammatoire avec une vitesse de sédimentation accélérée (60 mm à la première heure), une C-reactive protein positive à 26 mg/L, une hyper-alpha-2-globulinémie, et une anémie de type inflammatoire avec un taux d’hémoglobine à 9 g/dL. La patiente ne présentait pas de dyslipidémie ou d’hyperglycémie.

Les prélèvements bactériologiques et mycologiques de la lésion étaient négatifs, ainsi que la recherche d’une infection tuberculeuse évolutive (négativité de l’intra-dermo-réaction à la tuberculine ainsi que de la recherche de Mycobacterium tuberculosis dans le liquide de tubage gastrique).

Le bilan immunologique était sans anomalies : anticorps anti-nucléaires, facteur rhumatoide et complément sérique négatifs.

La recherche d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique) s’est avérée négative, ainsi que la recherche d’une atteinte hépatique tumorale ou inflammatoire associée.

En ce qui concerne le bilan radiologique : la radiographie thoracique de face montrait une opacité apicale droite séquellaire de son ancienne tuberculose.

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L’artériographie réalisée objectivait des irrégularités pariétales de l’aorte thoracique, des ectasies fusiformes de l’aorte abdominale sus et sous-rénale, ainsi que des ectasies fusiformes du tronc artériel brachio-céphalique, une dilatation post-sténotique de l’artère carotide primitive droite, et un anévrysme de l’artère sous-clavière droite. L’échocardiographie faite confirmait l’insuffisance cardiaque, et la scintigraphie pulmonaire montrait une hétérogénéité de perfusion avec présence de zones d’hypoperfusion en faveur d’une atteinte vasculaire pulmonaire.

Le diagnostic de maladie de Takayasu fut retenu devant l’association d’un faisceau d’arguments : la présence des lésions vasculaires objectivées par l’artériographie, l’antécédent de tuberculose, l’âge jeune et le sexe de la patiente, la présence d’un syndrome inflammatoire.

Cette patiente présentait donc un pyoderma gangrenosum associé à une maladie de Takayasu. Après concertation avec les cardiologues et les chirurgiens vasculaires, la décision retenue fut d’instaurer une corticothérapie orale par prednisone à la dose de 1 mg/kg, avec dégression progressive par la suite. L’évolution était favorable avec cicatrisation des lésions cutanées.

Quant à sa maladie de Takayasu, on ne notait pas d’aggravation après un suivi de 3 ans au service. Ensuite, la patiente a malheureusement été perdue de vue.

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Figure 1 : Large ulcération du front [185]

Figure 2 : Ulcérations du membre supérieur droit avec présence d’un bourrelet périphérique [185]

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Figure 3 : Cicatrice cribriforme de l’avant bras [184].

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II.2. Observation 2 :

Il s’agit d’une patiente de 26 ans, sans antécédents pathologiques notables, hospitalisée pour des lésions cutanées ulcérées apparues au sixième mois de sa première grossesse. L’examen clinique retrouvait la présence de plusieurs placards ulcéro-croûteux au niveau du tronc et des membres (Figure 6), sans aucune autre anomalie, notamment pas de souffle cardiaque à l’auscultation ou d’abolition de pouls.

La radiographie thoracique de face et l’électrocardiogramme faits étaient également normaux. L’aspect histologique des biopsies cutanées faites était en faveur d’un pyoderma gangrenosum. Le bilan fait à la recherche d’une pathologie associée s’est avéré négatif. La patiente fut mise sous prednisone à raison de 1.5 mg/kg/j durant 40 jours, avec dégression progressive des doses par la suite, avec une durée totale de corticothérapie de 15 mois, et obtention de la cicatrisation des lésions cutanées au cinquième mois de traitement.

20 mois plus tard, la patiente fut réadmise pour l’apparition de gommes fermes et douloureuses survenue durant une seconde grossesse de 6 mois, avec altération de l’état général. Là encore, la recherche d’une pathologie associée, en particulier une infection à VIH ou une tuberculose, s’était avérée négative. La biopsie cutanée des lésions montrait un aspect en faveur d’une origine pyococcique. La patiente fut donc mise sous antibiotiques anti-staphylococciques, avec évolution clinique favorable.

Durant le post-partum immédiat de cette deuxième grossesse, la patiente présenta une lésion papulo-pustuleuse de l’avant-bras droit siégeant au niveau

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d’un site d’injection intra-veineuse, qui a évolué rapidement vers l’ulcération et l’extension centrifuge.

L’examen physique retrouvait une lésion ulcéreuse grossièrement circulaire de 5 cm de diamètre siégeant sur l’avant-bras droit, limitée par un bourrelet violacé creusé de clapiers purulents (Figure 7), sans adénopathies épitrochléennes ou axillaires homolatérales, ni lymphangite. Par ailleurs, la patiente présentait une diminution des pouls radial, tibial postérieur et pédieux droit, avec une asymétrie tensionnelle entre les deux bras supérieure à 10 mmHg, et plusieurs souffles sur le trajet des artères carotides, fémorales et rénales, ce qui a conduit à évoquer le diagnostic de maladie de Takayasu.

L’examen histologique de la lésion cutanée était en faveur d’un pyoderma gangrenosum.

Le bilan biologique montrait un syndrome inflammatoire avec une vitesse de sédimentation accélérée (135 mm à la première heure), une anémie d’allure inflammatoire à 7,3 g/dL d’hémoglobine, une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles à 9.453 éléments/mm3, avec par ailleurs, à l’électrophorèse des protides : une hypoalbuminémie à 30 g/L, une hypergammaglobulinémie à 20 g/L, une hyperalphaglobulinémie à 9,5 g/L.

Le bilan immunologique (anticorps antinucléaires et anti-DNA) était négatif. L’intra-dermo-réaction à la tuberculine était négative, ainsi que la sérologie VIH. Par contre, la sérologie de l’hépatite B était positive, permettant de diagnostiquer une hépatite virale B chronique non active histologiquement avec un bilan biologique hépatique normal.

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La radiographie thoracique de face montrait un élargissement médiastinal, avec à l’électrocardiogramme un aspect d’hypertrophie auriculaire gauche. Le scanner thoracique montrait un anévrysme fusiforme de l’aorte ascendante avec épaississement pariétal diffus des gros vaisseaux (Figure 8). L’échodoppler artériel visualisait une ectasie de l’aorte abdominale avec épaississement de l’intima des artères carotides communes. L’échocardiographie objectivait une dilatation anévrysmale de l’aorte sus-coronaire, de l’aorte ascendante et de la crosse aortique, avec une dysfonction ventriculaire gauche.

L’examen ophtalmologique était normal, ne montrant notamment pas de signes de vascularite.

Le diagnostic de maladie de Takayasu fut retenu sur l’association de plus de trois critères diagnostiques de l’American College of Rheumatology (ACR) : la diminution des pouls périphériques, l’asymétrie tensionnelle dépassant 10 mmHg, l’âge de la patiente inférieur à 40 ans, la présence de souffles sur les trajets des gros vaisseaux, et la dilatation anévrysmale avec épaississement intimal des vaisseaux de gros calibre.

Au total, le diagnostic de pyoderma gangrenosum associé à une maladie de Takayasu et à une hépatite virale B chronique non active fut retenu. La patiente fut mise sous prednisone à la dose de 1 mg/kg/j et acide acétylsalicylique à la dose de 250 mg/j. La cicatrisation des lésions cutanées fut obtenue après un mois de traitement, avec amélioration de l’état général et du syndrome inflammatoie (hémoglobine de contrôle à 11,3 g/dL) et stabilisation des lésions cardio-vasculaires. La dégression de la corticothérapie fut alors

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entamée jusqu’à atteindre 20 mg/j de prednisone, avec un recul évolutif actuel de 2 ans et demi.

Il est à noter que les lésions initiales de PG sont apparues lors de la première gestation, avec une rechute de cette affection lors du post-partum de la seconde grossesse.

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Figure 6 : Lésion ulcéreuse de pyoderma gangrenosum sur l’avant-bras droit [1]

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III.1. PYODERMA GANGRENOSUM III.1.1. Définition

Le pyoderma gangrenosum [2] est une dermatose inflammatoire, réactionnelle, non infectieuse et non tumorale, pouvant être bénigne et localisée à la peau uniquement, ou bien multisystémique avec mise en jeu du pronostic vital. Il peut par ailleurs précéder ou être associé à une maladie inflammatoire potentiellement grave.

Il a été décrit pour la première fois en 1930 [3] dans un article publié par Brunstig et al. [4], à partir d’observations d’éruptions cutanées atypiques chez cinq patients dont quatre avait une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. Il fut initialement appelé pyoderma gangrenosum car on pensait à l’époque qu’il était dû à une infection cutanée à streptocoques qui entraîne des lésions de nécrose cutanée. Il a été démontré par la suite que cette hypothèse physiopathologique n’était pas pertinente, mais la qualité de la description clinique initiale des auteurs de l’article a fait que le nom de pyoderma gangrenosum est resté pour désigner cette entité.

Le pyoderma gangrenosum appartient au groupe des dermatoses neutrophiliques, qui comprend plusieurs affections dont les principales sont le syndrome de Sweet [5], la pustulose sous-cornée de Sneddon-Wilkinson et l’erythema elevatum diutinum. Il s’agit de dermatoses inflammatoires réactionnelles, très proches sur le plan de la clinique, de l’histologie et des pathologies associées, et certains auteurs les considèrent même comme étant un spectre de lésions cutanées associées notamment à des syndromes

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myéloprolifératifs. Du fait de l’atteinte multisystémique très fréquemment présente au cours de ces affections, le terme de dermatoses neutrophiliques est abandonné au profit de la dénomination de maladie neutrophilique, plus adaptée pour désigner ces entités.

III.1.2. Epidémiologie

L’incidence du pyoderma gangrenosum est difficile à déterminer [3] car la plupart des observations rapportées ne concernent qu’un seul cas ou de petites séries de patients et que des variantes ou sous-types ne sont pas rapportés dans certains articles ayant trait au pyoderma gangrenosum. Toutefois, elle est actuellement estimée à 2 cas / million / an [6].

Ainsi, sur une durée de 10 ans [6], 15 cas de pyoderma gangrenosum ont été observés dans un centre desservant une population de 500.000 habitants, et 180 cas ont été diagnostiqués à la Mayo Clinic de Rochester (Etats-Unis) en 53 ans d’exercice [7].

Le pyoderma gangrenosum touche principalement les adultes âgés de 25 à 54 ans, avec un sex ratio sensiblement égal à 1. Il peut survenir durant l’enfance, habituellement en association avec une maladie systémique (essentiellement les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin), une hémopathie maligne, une infection à HIV, ou dans d’autres situations d’immunodéficience.

Chez les adultes, le pyoderma gangrenosum peut apparaître chez des patients en bonne santé apparente ou là encore en association avec une autre pathologie ; la fréquence de cette situation varie en fonction des séries, mais elle est estimée à environ 50 pour cent. Par ailleurs, des études portant sur la

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fréquence de survenue du pyoderma gangrenosum chez des patients immunodéficients (HIV positifs, ou sous immunosuppresseurs) ont montré une augmentation de l’incidence de cette maladie dans cette population [8, 9].

III.1.3. Pathogénie

Les mécanismes physiopathologiques à l’origine du pyoderma gangrenosum sont loin d’être élucidés, mais l’hypothèse d’une dysrégulation du système immunitaire, et plus précisément une altération du chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles est privilégiée [10], ainsi que des altérations de l’immunité à médiation cellulaire et humorale [11].

Comme rapporté plus haut, l’hypothèse initiale [12] était celle d’une infection bactérienne chez un hôte immunodéprimé. Par la suite, cette hypothèse a été détrônée par la possibilité d’une réponse immunitaire aberrante à des facteurs non encore identifiés. La présence de dépôts protéiques au niveau des parois des vaisseaux cutanés dans les lésions de pyoderma gangrenosum ont fait évoquer la possibilité d’une réaction à complexes immuns circulants de type Arthus (soit le type 3 de la classification de Gell et Coombs). Comme, par ailleurs, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin constituent le groupe de pathologies le plus fréquemment associé au pyoderma gangrenosum, certains auteurs ont pensé au rôle de réactions croisées à certains antigènes présents au niveau intestinal et cutané dans la pathogénie des lésions cutanées [13].

D’autre part, des travaux ont montrés des aberrations des intégrines et du chimiotactisme des neutrophiles chez les patients atteints de pyoderma

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gangrenosum. Ainsi, des déficiences au niveau des voies qui protègent l’épiderme de l’infiltration par des neutrophiles seraient à l’origine des nécroses tissulaires dans cette affection.

Enfin, il a été démontré [5] que les immunoglobulines de type A, qui jouent un rôle dans la régulation de certaines fonctions des polynucléaires neutrophiles, sont impliquées dans la physiopathologie des dermatoses neutrophiles, auxquelles appartient le pyoderma gangrenosum.

III.1.4. Classification [5]

Le concept clinique de PG a été élargi à plusieurs variantes, dont certaines ont des implications cliniques bien spécifiques. Habituellement, on observe un seul type de PG chez un patient donné, mais il est possible aussi de retrouver plusieurs variantes chez un même individu. Ces différents types de PG varient non seulement par leur présentation clinique, mais également par leur potentiel évolutif, par le type de pathologies associées, et par les modifications histopathologiques observées [3].

De manière générale, les variants cliniques de PG les plus fréquentes sont au nombre de quatre. Bien que certains patients puissent avoir plus d’une forme clinique de PG, concomitamment ou dans l’évolution de leur maladie, l’identification des principales formes de PG permet une meilleure prise en charge du patient.

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III.1.5. Forme ulcéreuse [5]

a. Clinique

Du fait de l’absence de critères histologiques ou de marqueurs biologiques spécifiques du PG, le diagnostic de cette pathologie repose sur l’identification des lésions cutanées caractéristiques. Le début se fait par l’apparition d’un ou plusieurs nodules aseptiques surmontés d’une pustule transitoire, passant volontiers inaperçus [6]. Cette pustule initiale s’ulcère et se creuse et on observe essentiellement une ulcération relativement profonde qui s’étend de façon centrifuge. Les bords de cette ulcération sont caractéristiques, surélevés en un bourrelet parfois bleu violacé, dont la partie interne est creusée, sous-minée de pertuis (« clapiers ») purulents, ce qui reflète la destruction du derme. Le fond de l’ulcère est irrégulier, nécrosé, et mucopurulent (Figure 8). A la phase aigue, l’ulcère peut être entouré d’un halo inflammatoire. Les lésions sont le plus souvent uniques, et siègent au niveau des membres inférieurs chez 70 % des patients.

L’évolution vers la guérison laisse souvent des cicatrices cribriformes atrophiques pouvant présenter un degré variable de fragilité cutanée.

Par ailleurs, environ un quart des patients ayant un PG ulcéreux rapportent une atteinte cutanée précédant l’apparition des lésions, telle qu’un traumatisme mineur, une piqûre d’insecte ou une incision chirurgicale : c’est le phénomène de pathergie, c’est-à-dire la tendance du PG à apparaître au niveau des sites où la barrière cutanée est lésée.

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Figure 8 : PG ulcéreux : ulcération à bordure irrégulière et à fond mucopurulent [5].

b. Histologie

Les aspects histopathologiques observés en cas de PG ulcéreux dépendent du site de la biopsie et du stade évolutif de la lésion biopsiée. A un stade précoce, ou si la biopsie est réalisée au niveau du halo érythémateux périphérique, on observe un infiltrat lymphocytaire périvasculaire modéré avec un œdème intimal. Au niveau des lésions plus évoluées, on observe des formations abcédées au centre, sous des zones d’ulcération, avec un infiltrat lymphocytaire dense entourant et pénétrant les vaisseaux sanguins et des phénomènes de thrombose et d’extravasation érythrocytaire au niveau des bordures.

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Bien que les données histologiques ne soient pas spécifiques du PG, elles permettent de fournir un argument important en faveur de ce diagnostic. Les biopsies avec examen bactériologique et mise en culture restent indispensables pour écarter d’autres diagnostics pouvant simuler cliniquement un PG ulcéreux.

c. Critères diagnostiques [14]

Les critères diagnostiques proposés par Su et al. Comprennent des éléments essentiels au diagnostic de PG. Aucun critère ne peut être utilisé isolément car chacun peut être observé dans différentes autres pathologies, mais ils sont en faveur de PG si au moins un critère majeur et deux critères mineurs sont réunis.

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Tableau I : Critères diagnostiques du PG de Su et al [14] Critères majeurs :

o Evolution rapide [extension de l’ulcération de 1 à 2 cm par jour, ou augmentation de plus de 50 % de la taille de l’ulcère en moins d’un mois] d’un ulcère cutané [classiquement précédé par une papule, une pustule ou une bulle] nécrotique et douloureux [douleur disproportionnée par rapport à la taille de l’ulcération] à bordure irrégulière, violacée et présentant des clapiers.

o Exclusion de toute autre cause d’ulcération cutanée [nécessite généralement des biopsies cutanées et d’autres examens complémentaires]

Critères mineurs :

o Anamnèse évocatrice d’un mécanisme de pathergie [apparition d’un ulcère au niveau de sites de traumatisme cutané mineur] ou présence de cicatrices cribriformes à l’examen clinique

o Présence de pathologies associées au PG [MICI, gammapathie à IgA ou néoplasie sous-jacente]

o Aspect anatomopathologique : infiltrat neutrophilique stérile du derme, plus ou moins associé à une inflammation non spécifique et à une vascularite lymphocytaire.

o Réponse au traitement : amélioration rapide sous corticothérapie [à une dose de 1-2 mg/kg/j, avec une diminution de la taille de l’ulcère de 50 % en 1 mois]

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d. Diagnostic différentiel :

Causes infectieuses

o Infections cutanées à germes banals

o Infections cutanées à mycobactéries (tuberculose et mycobactériens atypiques)

o Syphilis

o Mycose profonde

o Herpès cutané (en particulier chez les patients séropositifs pour le VIH)

o Amibiase cutanée Maladies de systèmes :

o Vascularites systémiques : maladie de Takayasu, maladie de Behçet

o Syndrome des anticorps anti-phospholipides Toxidermie (halogénés, hydroxyurée)

Piqûre d’insecte (araignée) Gangrène

Tumeurs cutanées malignes Pathomimie

e. Maladies associées :

Les patients atteints de PG ulcéreux ont souvent des pathologies systémiques associées, en particulier les arthrites et les MICI. Des gammapathies monoclonales, habituellement à IgA, sont également observées

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chez environ 10 % des patients. Par ailleurs, l’association à des néoplasies sous-jacentes est de plus en plus souvent rapportée.

III.1.6. Forme pustuleuse :

a. Clinique :

Depuis la description clinique initiale du PG faite en 1930, la conception de l’évolution du PG a été modifiée. En effet, il est actuellement accepté que le PG ulcéreux débute souvent par des pustules inflammatoires. Il est également reconnu que certaines de ces pustules n’évolulent pas vers l’élargissement et l’ulcération, mais persistent pour des durées variables avant de se résorber lentement. Une équipe [14] a introduit en 1978 le concept de PG pustuleux en tant que forme avortée du PG ulcéreux, survenant chez des patients atteints de MICI. Ces patients présentaient des lésions cutanées à type de larges pustules inflammatoires aseptiques, douloureuses, survenant en nappes, au niveau de la partie supérieure du tronc et de la surface d’extension des membres, qui survenaient le plus souvent lors des exacerbations de leur MICI.

L’entité désignée sous le nom de pyostomatite végétante, caractérisée par l’apparition de plusieurs pustules enchâssées au niveau des muqueuses buccales et évoluant vers des excoriations superficielles et des érosions « en traînée d’escargot » [15], est considéré par certains auteurs comme la forme orale [16] du PG pustuleux. Certains patients porteurs de pyostomatite végétante ont développé des lésions cutanées identiques à celles observées en cas de PG ulcéreux, et cette entité, comme le PG pustuleux, a été fréquemment observée chez des patients ayant une MICI en poussée.

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b. Histologie :

Plusieurs aspects histologiques ont été décrits chez les patients ayant un PG pustuleux, ce qui reflète très probablement les différents stages d’évolution et de cicatrisation de ces lésions cutanées. Des observations individuelles rapportent des aspects de dépôts neutrophiles sous-cornés, d’infiltrat neutrophilique péri-folliculaire, et d’œdème sous-épidermique associé à un infiltrat neutrophilique dense du derme. Là encore, comme pour le PG ulcéreux, des biopsies avec culture tissulaire sont nécessaires chez les patients porteurs de PG pustuleux afin d’asseoir le diagnostic et d’éliminer des diagnostics différentiels.

Figure 9 : PG pustuleux : pustule intacte sur peau saine entourée d’un halo érythémateux [5]

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c. Critères diagnostiques [17]

Critères majeurs :

Pustules douloureuses, mesurant 0,5 à 2 mm de diamètre avec halo érythémateux périphérique. Il faut exclure d’autres causes de pustules (infection, réaction médicamenteuse, psoriasis)

Critères mineurs :

- aspect anatomopathologique compatible : infiltrat neutrophilique, présence de neutrophile au niveau sous-épidermique ou sous-corné.

- MICI associée

- Amélioration lorsque la MICI sous-jacente est contrôlée

d. Diagnostic différentiel

Infections (bactérienne, virale, mycosique) Septicémie à gonocoque

Vascularite pustuleuse Toxidermies

Syndrome de dérivation intestinale

e. Maladies associées

Les pathologies associées les plus fréquemment rapportées sont les MICI, en particulier la rectocolite hémorragique. Toutefois, il a été décrit des cas de PG pustuleux chez des patients atteints de polyglobulie [18], de pathologies hépato-biliaires [19].

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Par ailleurs, un patient qui présentait une éruption pustuleuse aseptique diffuse avec un PG pustuleux a par la suite développé une septicémie à staphyloccoques [20]. Cette observation montre l’importance d’une surveillance régulière de ces patients même en cas de prélèvements bactériologiques initiaux stériles, vu le risque évolutif de sunrinfection staphylococciqe du fait des multiples portes d’entrée présentes.

III.1.7. Forme bulleuse

La forme bulleuse du PG a été reconnue pour la première fois comme entité clinique distincte en 1972 [21], lorsque Perry et Winkelmann ont rapporté trois observations de patients leucémiques qui avaient présenté des lésions bulleuses et érosives, douloureuses, et que les auteurs ont considéré comme une variante du PG. Chez ces malades, les lésions initiales étaient des bulles tendues, uniques ou groupées, à contenu de couleur clair lactescent ou purulent (Figure 10). Ces bulles évoluèrent vers la coalescence et l’extension centrifuge avec comme conséquence une nécrose du centre du toit de la bulle, révélant une zone d’ulcération superficielle. Elles étaient extrêmement douloureuses et évoluaient souvent rapidement par poussées alternant avec des phases de rémission, et apparition de lésions érosives circulaires concentriques. Depuis, l’association entre le PG et les leucémies a été confirmée, plus de 41 observations ayant été rapportées entre la date de la description initiale et 1992 [23]. La majorité des patients ayant cette association présentaient en majorité des lésions de PG de type bulleuses [24, 25, 33].

L’apparition de lésions de PG chez un patient atteint de leucémie, en particulier les leucémies aigues myéloides, ou de polyglobulie est considérée

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comme un facteur pronostique, car ces patients évoluent souvent vers l’échappement thérapeutique et la non-réponse à la chimiothérapie, et décèdent peu de temps après l’installation du PG [34].

Il y a également des observations rapportant l’association du PG bulleux à une myélofibrose [35, 36], cette situation étant de moins mauvais pronostic que dans le cas de l’association à une leucémie, car une évolution favorable a été observée dans plusieurs cas. Enfin, le PG bulleux a également été décrit chez des patients ayant une MICI, et également chez des individus en bonne santé apparente.

L’aspect histopathologique des lésions de PG bulleux est variable. Les biopsies du fond de l’érosion révèlent en général un infiltrat inflammatoire dermique dense à prédominance neutrophile, et la présence de micro-abcès. Les biopsies des bulles intactes montrent un oedème important du derme supérieur évoluant vers la formation de bulles sous-épidermiques, dont le toit présente, selon le stade de développement de la lésion, un degré variable de dégénérescence. Il a été également décrit la présence de bulles en intra-épidermique, avec présence de cellules épidermiques nécrosées et acantholytiques à l’intérieur de la bulle, cet aspect étant plus souvent retrouvé dans les lésions anciennes, et survient comme conséquence de la dégénérescence épidermique. Il peut être observé des dépôts fibrineux au niveau des parois des vaisseaux cutanés, ainsi qu’une extravasation de globules rouges.

Le PG bulleux est la variante clinique qui se rapproche le plus des lésions observées chez les patients présentant un syndrome de Sweet atypique. Un tableau identique de lésions bulleuses et érosives peut être observé dans les deux

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pathologies, la différenciation étant basée sur l’histologie qui montrera en cas de syndrome de Sweet une leucocytoclasie importante sans vascularite [37]. Par ailleurs, la distinction diagnostique entre les deux entités peut parfois être difficile, et étant donné que les pathologies associées et la prise en charge thérapeutique sont quasiment identiques dans les deux cas, on peut considérer que cette distinction comporte un intérêt plus académique que de prise en charge.

Les principaux diagnostics différentiels à éliminer en cas de suspicion de PG bulleux sont :

un syndrome de Sweet atypique une piqûre d’insecte ou d’arthropode

un herpès (chez des patients immunodéprimés) une cellulite

un mycosis fongoide bulleux un érythème polymorphe

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Figure 10 : PG bulleux : multiples bulles groupées ayant évolué vers la coalescence en un ulcère superficiel érosif [5]

III.1.8. Forme végétative

Dans les années qui suivirent l’identification du PG comme entité pathologique distincte, plusieurs discordances furent relevées concernant la fréquence et le type de pathologies systémiques associées, le degré de destruction cutanée et l’évolution des lésions, et enfin le type et la durée de traitement nécessaire. Une explication à ces discordances fut avancée dans les années quatre-vingt [38] lorsque des auteurs mirent en évidence un sous-groupe de patients atteints de PG qui avait une forme locale chronique, évoluant lentement, sans pathologie systémique associée identifiable, et dont les lésions cutanées répondaient bien à des thérapies de première ligne, peu agressives. Ce type de PG, dit végétant, survient le plus souvent au niveau du tronc, mais aussi parfois au niveau des membres et du visage (Figure 11), en général sous forme d’une lésion unique.

(31)

Les modifications histologiques du PG végétant sont typiques, à type de prédominance des histiocytes au sein de l’infiltrat neutrophilique et de la présence de granulomes et de cellules géantes.

Plusieurs observations successives ont confirmé la validité de la notion de PG végétant et de son apparition chez des patients en bonne santé apparente. Les diagnostics différentiels à écarter en cas de suspicion de PG végétant sont essentiellement les pyodermites végétantes, les mycoses profondes en particulier la blastomycose, la tuberculose et les mycobactérioses atypiques, et enfin les tumeurs malignes cutanées.

Figure 11 : PG végétant au stade cicatriciel apparaissant sous forme d’une plaque atrophique [5]

Les différents types de PG avec leurs manifestations cliniques, histopathologiques et les pathologies les plus fréquemment associées sont résumés dans le tableau suivant [3]

(32)

Tableau II : Caractéristiques des principales formes cliniques du PG [3]

Type de PG

Manifestations cliniques Aspects

anatomopathologiques Pathologies associées

U

lcé

reux

Ulcération avec une bordure à clapiers, entourée d’un halo

érythémateux, à base purulente, très douloureuse, augmentant rapidement de taille. Nécessite habituellement un traitement immunosuppresseur par voie systémique. Présence au centre de la lésion d’abcès neutrophiliques, avec en périphérie un infiltrat vasculaire lymphocytaire. Fréquentes (70 %) : Arthrites, MICI, gammapathies monoclonales, tumeurs malignes. Pu st ul eux Pustules douloureuses de 0.5 à 2 cm de diamètre sur une peau saine, avec un halo érythémateux, qui

disparaissent avec la prise en charge adaptée de la MICI qui y est souvent associée.

Pustules sous-cornées, infiltrat neutrophilique péri-folliculaire, infiltrate neutrophilique dense du derme, oedème sous-épidermique. Très fréquentes (≥ 70 % des cas) MICI en poussée (RCH surtout +++). Polyglobulie, pathologie hépato-biliaire, pyostomatite végétante + B ull eux

Vésicules douloureuses augmentant rapidement de taille jusqu’à la coalescence et la formation de bulles qui évoluent par vagues, avec nécrose centrale et érosion. Halo périphérique érythémateux. Nécessite un traitement immunosuppresseur par voie systémique, et est souvent de mauvais pronostic si associée à une leucémie.

Formation de bulles sous-épidermiques et de vésicules intra-épidermiques inflammatoires, avec un infiltrat neutrophilique du derme. Fréquentes (70 %) Syndromes myéloprolifératifs +++, MICI + V égé ta ti v e

Plaques érythémateuses suintantes d’évolution chronique.

Ulcération ou érosion superficielle peu douloureuse, sans bordure minée, évoluant lentement, en général unique, pouvant être à développement exophytique végétatif.

Bonne réponse aux thérapies locales le plus souvent, ou à une thérapie systémique peu agressive.

Hyperplasie

pseudo-épithéliomateuse, formation d’abcès neutrophiliques au niveau du derme, travées sinusales, formations granulomateuses en palissade

Rarement (≤20 % des cas)

(33)

III.1.9. Autres formes

a. PG systémique

Des manifestations extra-cutanées peuvent être présentes dans toutes les dermatoses neutrophiles, en particulier le PG et le syndrome de Sweet, et représentent un dénominateur commun à ce groupe de pathologies [39].Ceci a amené Vignon-Pennamen et Wallach [40] à proposer le concept uniciste de « maladie neutrophilique », qui regroupe à la fois les manifestations cutanées et extra-cutanées des dermatoses neutrophiles.

Bien que les manifestations extra-cutanées ne sont pas habituelles en cas de PG, elles sont de plus en plus souvent rapportées du fait de la sophistication des techniques d’imagerie, et touchent le plus souvent les poumons [41, 42].

Certaines d’entre elles sont non spécifiques du PG et des dermatoses neutrophiliques, alors que d’autres leur sont plus spécifiquement associées : - Manifestations extra-cutanées non spécifiques :

Les signes les plus fréquemment rencontrés sont la fièvre et l’altération de l’état général. Ils peuvent être rencontrés dans toutes les dermatoses neutrophiliques et font partie du tableau clinique de syndrome de Sweet typique.

Des arthralgies non spécifiques, touchant aussi bien les articulations axiales que périphériques sont souvent présentes, et évoluent parallèlement à l’activité de l’atteinte cutanée. On peut aussi parfois retrouver une arthrite neutrophilique stérile. Ces manifestations articulaires doivent être distinguées des arthrites associées à une éventuelle MICI concomitante.

(34)

- Manifestations extra-cutanées spécifiques [43] :

Elles reflètent l’invasion des viscères par les polynucléaires neutrophiles, et peuvent se révéler par une toux, de la dyspnée, une douleur thoracique, amenant au diagnostic d’une pneumopathie neutrophilique pulmonaire associée d’évolution parallèle à celle de la dermatose neutrophilique.

Le poumon est d’ailleurs l’organe le plus fréquemment touché par ces infiltrats neutrophiles. En 1985, Gibson et al [44]. ont rapporté le cas d’un patient atteint d’un syndrome myéloprolifératif avec un PG bulleux et des abcès pulmonaires concomitants. Il a été également observé une pneumopathie sévère d’étiologie indéterminée et cortico-sensible [45] chez un patient atteint de rectocolite hémorragique qui a par la suite développé un PG. D’autres auteurs ont rapporté un cas de PG ulcéreux vulvaire avec atteinte pulmonaire associée [46], un cas de kystes pulmonaires chez un patient atteint de PG ulcéreux localisé à la face et aux jambes [47], un cas d’abcès pulmonaires bilatéraux associés à un PG ulcéreux chez un patient atteint de polyarthrite rhumatoide [48]. Il a également été décrit deux cas d’infiltrats pulmonaires neutrophiliques ayant évolué vers le décès chez des patients atteints de PG [49].

De la même façon, d’autres sites peuvent être touchés au niveau de l’organisme et se manifester de façon très variée : des cas d’ostéomyélite [50], d’adénite [51, 52], d’abcès splénique [52], d’abcès hépato-pancréatique [53] et de kératite ulcéreuse périphérique ont été rapportés. En 2001, Marie et al. ont décrit le cas d’un patient atteint de PG chez qui une myosite neutrophilique sévère est apparue comme manifestation inaugurale d’une leucémie myéloïde aigue.

(35)

Les cas cités précédemment, ajoutés aux observations rapportées d’infiltration neutrophilique du cœur, du système nerveux central et du tractus digestif [40] sont en faveur de l’hypothèse selon laquelle le PG serait une pathologie systémique en rapport avec ladite infiltration neutrophilique de différents tissus. Les signes extra-cutanés seraient un signe d’une pathologie associée, en particulier hématologique. Ceci montre bien l’importance de la réalisation d’un bilan exhaustif chez tout patient atteint de PG, à la recherche d’une atteinte viscérale.

Tableau III: Principaux organes touchés par le PG [43] Peau

Muqueuses orales et génitales Œil Articulation Muscles Os Cœur Foie Rate Pancréas Ganglions lymphatiques Système nerveux central

(36)

b. PG péristomal [55]

Il survient à proximité des stomies digestives, et regroupe environ 15 % de tous les cas de PG. La plupart des patients atteints ont une MICI, mais le PG péristomal peut aussi survenir en cas de stomie pour tumeur digestive maligne ou diverticulose. Une étude a montré une incidence de 0.6 % de PG péristomal chez les patients porteurs de stomies. Les ulcérations présentent un aspect clinique très similaire au PG ulcéreux “classique”, à la différence que des zones de peau saine peuvent être présentes au sein de l’ulcération (figure 12). Ces lésions sont douloureuses et interfèrent avec l’adhésion de la poche de stomie à la paroi abdominale, ce qui risque d’entraîner une mauvaise étanchéité de la poche et augmenter ainsi le risque d’irritation cutanée par le contenu de la stomie.

(37)

c. Phénomène de pathergie [39]

Chez plus d’un quart des patients présentant un PG ulcéreux, l’anamnèse retrouve une notion de traumatisme antérieur sur le site d’apparition des lésions, ce qui est décrit comme étant le phénomène de pathergie. Des cas de PG en post-chirurgie ont été décrit : au niveau d’une incision abdominale de splénectomie [56], en post-césarienne [57], sur le site d’insertion d’un pacemaker [58], et après un pontage coronaire ( Figure 13A et B) [59].

Figure 13A, B : PG pathergique sur sites d’incision pour pontage coronaire (avec greffon saphène) chez un patient âgé atteint de maladie de Vaquez [41].

(38)

La survenue de PG en post-opératoire au niveau des zones de suture a également été décrite chez un patient ayant des antécédents de PG [60]. Chez ces patients, le recours à des sutures sous-cutanées et à une corticothérapie systématique en per- et post-chirurgie permet d’éviter la récidive de PG. Par ailleurs, la survenue de PG en post-opératoire est souvent diagnostiquée tardivement car le premier diagnostic évoqué est l’infection du site opératoire. L’évolution rapide et térébrante de l’ulcère, l’absence de germes et de champignons à l’examen bactériologique et mycologique, et un aspect histologique compatible avec un PG doit faire évoquer ce diagnostic. Le traitement sera basé sur les traitements immunosuppresseurs, et les gestes chirurgicaux non indispensables devront être évités à l’avenir.

d. Localisations gynécologiques

Vulvaire [10] :

Le PG de la vulve ne diffère du PG ulcéreux que de par la localisation de l’ulcération. (Figures. 14, 15). Des lésions similaires ont été décrites chez les sujets masculins, au niveau du pénis ou du scrotum. (Figure 16). Face à ces lésions ulcéreuses génitales, le principal diagnostic différentiel à évoquer est celui de maladie de Behçet.

Une variante clinique survenant au niveau des muqueuses est la pyostomatite végétante, caractérisé par des érosions chroniques pustuleuses et parfois végétantes, survenant le plus souvent au niveau buccal. La plupart de ces patients ont une MICI associée.

(39)

Le PG vulvaire est rarement rapporté dans la littérature [62]. Work et al ont décrit le cas d’une patiente de 36 ans ayant développé un PG, 13 ans après l’installation d’une rectocolite hémorragique, ne répondant pas au traitement médical (corticothérapie et antibiotiques) et aux tentatives de suture de la plaie périnéale, ayant nécessité une vulvectomie radicale et de multiples greffes cutanées [63]. Deux autres cas ont été rapports par Grant et al la première patiente était atteinte de leucémie myélomonocytaire chronique, et est décédée 7 semaines après l’apparition de sa lésion vulvaire, la seconde était une patiente de 76 ans suivie pour polyarthrite rhumatoide séronégative ayant présenté une ulcération vulvaire, et chez qui le bilan réalisé a permis le diagnostic d’une myélodysplasie en cours d’acutisation vers une leucémie myéloide aigue [64]. Elle est également décédée d’une septicémie candidosique à point de départ génital.

Le principal diagnostic différentiel de cette variante clinique est le carcinome épidermoide vulvaire, et montre là encore l’importance d’un examen histopathologique avant tout geste chirurgical. En effet, une excision de la lésion prise à tort pour une tumeur risquerait d’entraîner une extension des lésions de PG du fait du phénomène de pathergie.

(40)

Figure 14: PG vulvaire [10]

Figure 15 : Ulcération de la grande lèvre droite à bords surélevés, avec une ulcération similaire au niveau du périnée [63].

(41)

Mammaire [65] :

La localisation mammaire du PG est très rare, et est le plus souvent secondaire à un traumatisme ou à un geste chirurgical (biopsies, chirurgie de réduction mammaire) à ce niveau. Ces lésions sont souvent prises au début pour des infections de site opératoire ou des cellulites cutanées. Un autre diagnostic différentiel plus rare est la nécrose cutanée induite par la warfarine, situation extrêmement rare mais très similaire cliniquement au PG, qui survient le plus souvent chez des femmes adultes, se manifestant initialement par un érythème cutané douloureux évoluant rapidement vers la formation de bulles hémorragiques, localisées le plus souvent au niveau des seins et des cuisses.

Du col utérin [66] :

c’est un diagnostic à évoquer face à des ulcères non spécifiques du col utérin, en particulier s’ils s’aggravent après une biopsie ou une ablation chirurgicale, ou s’améliorent sous corticothérapie.

e. Localisation pénienne [67]

Nous citerons particulièrement le cas d’un adolescent de 17 ans ayant présenté une ulcération pénienne avec une fistule urétrale n’ayant pas cicatrisé après greffe cutanée. La lésion initiale était une ulcération ayant évolué vers l’apparition d’une fistule après plusieurs tentatives de suture chirurgicale, ce qui est en faveur de l’intervention d’un phénomène de pathergie.

(42)

Figure 16 : Lésions de PG au niveau scrotal et pénien chez un adolescent [10]

Figure 17 : Ulcération purulente circonférentielle touchant le gland, le frein,le prépuce et la verge adjacente, avec des bordures

(43)

f. PG du dos de la main [39] (dermatose neutrophilique des mains)

Weenig et al [68]. ont introduit le terme de dermatose neutrophilique des mains pour désigner la forme clinique où l’atteinte des mains prédomine, que ce soit dans le PG, le syndrome de Sweet ou la vascularite pustuleuse. Cette entité est caractérisée par des plaques érythémateuses ou violacées, des pustules et des bulles hémorragiques présentes le plus souvent, de façon bilatérale, au niveau du bord radial de la face dorsale des mains. La plupart des cas sont similaires au PG bulleux, avec un phénomène pathergique associé. Ils apparaissent le plus souvent chez des patients atteints de syndromes myéloprolifératifs, de néoplasie occulte ou de maladies inflammatoires telles que les MICI ou la polyarthrite rhumatoïde.

Figure 18 : PG du dos des mains chez un patient de 70 ans atteint de polyarthrite rhumatoide [39]

(44)

g. PG malin (de la face et du cou) [39]

Le PG se localise rarement au niveau céphalique et cervical [69, 70], mais cette forme clinique est bien identifiée et doit être distinguée du granulome centro-facial de Lever ou « pyoderma malin » qui se caractérise par des ulcérations stériles et destructrises siégeant au niveau péri-auriculaire, chez des hommes jeunes [71, 72] le plus souvent. Jusqu’à maintenant, il n’a pas encore été déterminé si le dit « pyoderma malin » est une forme atypique du PG ou une manifestation cutanée inhabituelle de la granulomatose de Wegener [73], la nosologie exacte de ce type d’ulcération cutanée rapidement extensive restant encore imprécise.

h. PG paranéoplasique [39]

Cette entité fut décrite pour la première fois en 1993 par Duguid et al [74]. chez 4 patients atteints de syndromes myéloprolifératifs et de PG, en sachant que la première association entre PG et pathologie néoplasique fut rapportée par Cowan en 1961 à propos d’un patient atteint de myélome multiple [75].

Chez environ 7 pour cent des patients atteints de PG, on retrouve une néoplasie associée, le plus souvent une hémopathie maligne, à type de leucémie myéloide aigue ou chronique [76], avec une prévalence plus marquée de la forme bulleuse de PG [77]. Par ailleurs, l’apparition de lésions de PG chez les patients atteint de polyglobulie ou de leucémie est de mauvais pronostic [44], car il précède l’évolution de l’hémopathie vers la non-réponse thérapeutique.

Les principales autres tumeurs malignes décrites en association au PG sont les myélodysplasies [78], les lymphomes [79], et les tumeurs solides à type

(45)

de carcinomes coliques, vésicaux, prostatiques, mammaires, bronchiques, ovariens, surrénaliens [80] ou de tumeurs carcinoides [81].

i. PG infantile

Le PG touche rarement les nourrissons et les enfants [10], seulement 3 à 4 % des cas de PG concernant cette tranche d’âge. Cette forme n’est pas une variante clinique au sens strict du terme puisque l’aspect clinique est similaire à celui des adultes, à la différence que la localisation est plus souvent péri-anale ou génitale [82, 83], et que la forme ulcéreuse prédomine [84]. Les pathologies associées sont sensiblement les mêmes que chez les patients adultes, et le pronostic chez la majorité des jeunes patients atteints reste favorable.

Affirmer le diagnostic de PG reste difficile dans cette population car plusieurs autres dermatoses peuvent simuler un PG dans cette tranche d’âge. Le diagnostic différentiel se fera avec les infections bactériennes, mycosiques et à mycobactéries atypiques, les formes sévères de dermite de siège, le granulome fessier infantile, les maltraitances, les lymphomes cutanés, les maladies de Crohn anales, l’histiocytose langerhansienne, la mastocytose et la syphilis.

Une recherche de pathologie associée devra être systématique vu la grande incidence de cette situation en cas de PG survenant chez l’enfant.

j. PG familial [85]

Il a été décrit seulement 8 cas dans la littérature de familles où deux membres ou plus étaient atteints de PG. L’étiopathogénie du PG demeure

(46)

obscure mais cette forme clinique suggère l’intervention d’un terrain génétique prédisposant.

k. PG mimant une fasciite nécrosante[86]

La fasciite nécrosante est une infection aigue nécrosante s’étendant rapidement aux tissus graisseux sous-cutanés et aux fascias, pouvant survenir en post-chirurgie, en post-traumatisme ou de novo [87]. Les principaux germes incriminés sont des formes virulentes de streptocoque β-hémolytique du groupe B, de staphyloccoque hémolytique, d’entérocoques, de Pseudomonas ou de Bacteroides [88]. L’évolution se fait rapidement en 24 à 48 heures vers des lésions oedémateuses inflammatoires, douloureuses avec une zone centrale décolorée et une anesthésie progressive de la zone cutanée touchée, puis l’installation d’une gangrène à partir du quatrième jour, et des manifestations générales pouvant aller jusqu’au choc septique.

Le taux de mortalité est de 20 % [89].

Le PG a souvent été confondu avec une fasciite nécrosante et traité comme telle [9, 90, 91], avec des conséquences désastreuses du fait du phénomène de pathergie aggravé par les gestes de débridement, pouvant aller jusqu’à des pertes tissulaires importantes et des amputations digitales. Cette confusion est expliquée par certains points communs aux deux affections : la possibilité de survenue en post-opératoire, l’extension rapide aux tissus adjacents, l’état de choc et la possible présence de bactéries à l’examen microbiologique. Ceci montre l’importance de prendre en considération tous les éléments cliniques et histologiques en compte car bien que similaires

(47)

cliniquement, la prise en charge du PG est très différente de celle de la fasciite nécrosante, certains traitements de cette dernière étant même contre-indiqués en cas de PG.

l. PG granulomateux superficiel [92]

Il est décrit le plus souvent comme une lésion unique, rarement multiple [93, 94, 95], localisée préférentiellement au tronc et à type de pustule, abcès ou furoncle qui évolue vers une ulcération superficielle à fond propre, ou une plaque érythémato-violacée ayant une bordure végétante. Du fait de son aspect clinique peu caractéristique, le retard au diagnostic de cette affection est fréquent, pouvant aller jusqu’à 18 mois. L’hypothèse pathogénique principale de cette affection est qu’elle constituerait une réaction cutanée locale à la présence d’un corps étranger, voire à du tissu cutané normal dans le cadre d’une dysimmunité.

L’aspect histologique typique est celui de granulome tuberculoïde organisé en 3 zones : un abcès central, une couronne histiocytaire et des cellules géantes en périphérie, et enfin des lymphocytes et plasmocytes. A la différence du PG classique qui, bien que similaire cliniquement, ne comporte pas de granulomes histologiquement.

L’évolution de cette affection est en général favorable, pouvant guérir spontanément ou par des thérapeutiques simples non agressives.

(48)

m. Autres formes rares :

de la femme enceinte : récidivant à chaque grossesse [96], rapporté dans une observation.

D’autres associations rares ont été décrites notamment à une drépanocytose [97], à une tuberculose cutanée [98], au syndrome de Marshall [99], à une hépatite virale C [100, 101] : qui peut aussi s’accompagner, de façon anecdotique, d’autres manifestations cutanées à type d’urticaire, d’érythème noueux, d’érythème polymorphe, de dermatomyosite, ou de psoriasis, et enfin à un diabète avec une infection à Chlamydia (lésions PG-like) [102]

III.1.10. Bilan à pratiquer devant un pyoderma gangrenosum. Le bilan à réaliser face à une suspicion de PG (Tableau V) [10] doit répondre à deux questions : d’une part, confirmer le diagnostic, en sachant que le PG est un diagnostic d’élimination, et d’autre part rechercher une maladie systémique associée curable, en sachant qu’il n’y a pas d’examen de laboratoire ou d’aspect histopathologique spécifique ou pathognomonique de PG, et que certaines pathologies associées peuvent ne pas se manifester cliniquement.

Les principaux diagnostics à évoquer face à des ulcérations cutanées sont les infections cutanées, les tumeurs malignes, les vascularites, les piqûres d’insectes, les ulcères d’origine veineuse ou artérielle (y compris ceux dus au syndrome des anticorps anti-phospholipides), et les lésions cutanées factices auto-infligées dans le cadre d’un syndrome de Munchausen par exemple.

Dans tous les cas, il faut réaliser des prélèvement bactériologiques de l’ulcération, et si possible des cultures tissulaires. Les biospies cutanées, bien

(49)

que non spécifiques, permettront d’éliminer une tumeur cutanée maligne, une vascularite ou des infections mycosiques, mycobactériennes ou parasitaires, et restent essentielles à la démarche diagnostique bien que comportant un risque d’extension des lésions par pathergie

La première étape dans la recherche d’une pathologie systémique associée est une anamnèse minutieuse à la recherche de signes pouvant orienter les examens complémentaires. Par ailleurs, il a été démontré que le type de maladies systémiques éventuellement associées diffère en fonction de la forme clinique de PG présente chez le patient [2]. Ainsi, 70 % des patients ayant une forme ulcéreuse de PG ont une pathologie associée, les arthrites, MICI, gammapathies monoclonales et néoplasies profondes étant les plus fréquemment rencontrées dans ce cas [76]. Le PG pustuleux, par contre, est presque exclusivement associé aux MICI, et le PG ulcéreux aux hémopathies malignes et aux myélodysplasies. Le PG végétatif, enfin, accompagne rarement d’autres pathologies.

De ce fait, la détermination du type clinique de PG permettra de cibler les examens complémentaires à réaliser (Tableau I) à la recherche d’une pathologie associée et ce, bien qu’il ait été décrit l’association de plusieurs formes cliniques de PG chez un même patient, car cette situation reste relativement rare.

Il convient par ailleurs d’être vigilant durant le suivi d’un malade atteint de PG d’une part à cause des complications et effets indésirables fréquents des médicaments, et d’autre part du fait du risque de surinfection des lésions cutanées. Il ne faudra donc pas hésiter à répéter des biopsies et des cultures

(50)

tissulaires face à une aggravation inexpliquée des lésions sous un traitement bien conduit.

L’exploration du tube digestif chez les patients sélectionnés comprendra des opacifications digestives hautes et basses, voire une sigmoidoscopie ou une colonoscopie avec biopsies.

L’hémogramme avec frottis sera fait chez tous les patients, et complété éventuellement, en fonction des signes orientateurs, par un myélogramme voire une biopsie médullaire.à la recherche d’une hémopathie maligne. L’électrophorèse des protéines sériques et éventuellement l’immunoélectrophorèse des protéines sériques et urinaires pourront permettre d’éliminer une gammapathie monoclonale ou un myélome.

Des ulcères de jambe ressemblant des lésions de PG peuvent survenir chez des patients atteints de syndrome des anticorps anti-phospholipides ou de vascularite. De ce fait, le VDRL, la recherche d’anticorps anti-cardiolipidine, la mesure du temps de céphaline activée, et la recherche d’anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) sont maintenant faits de manière systématique chez tout patient atteint de PG. En cas de PG, les p-ANCA (périnucléaires) sont d’ailleurs souvent positifs, en particulier en cas de MICI associée, ou de vascularite. La présence de c-ANCA (cytoplasmique), par contre, est hautement spécifique de la granulomatose de Wegener.

(51)

Tableau IV : Pathologies associées au PG [2]

Associations fréquentes :

MICI : rectocolite hémorragique, maladie de Crohn, iléite régionale

Arthrites : polyarthrite séronégavite symétrique avec ou sans MICI associée, polyarthrite rhumatoide

Pathologies hématologiques : leucémies myéloides, leucémies à lymphocytes T chevelus, myélofibrose, métaplasie myéloide, gammapathies monoclonales (surtout à IgA)

Associations rarement décrites :

Arthrites : spondylarthropathies, ostéoarthropathies, rhumatisme psoriasique Hépatopathies : hépatite chronique active, hépatite virale C, cirrhose biliaire

Hématologiques : myélome, polyglobulie, hémoglobinurie paroxystique nocturne; lymphome

Immunologiques : lupus érythémateux disséminé, déficit en fraction C7 du complément, hypogammaglobulinémie, syndrome d’hyperimmunoglobulinémie de type E; SIDA, sarcoïdose.

Autres : maladie de Takayasu, hydrosadénite suppurative, acné conglobata, tumeurs solides, bronchopneumopathie chronique obstructive.

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Tableau V : Conduite à tenir devant un patient présentant un PG [2, 10]: - Anamnèse minutieuse : prise médicamenteuse, traumatisme, piqûre d’insecte, injections;

revue détaillée des différents systèmes à la recherche de signes orientateurs

- Examen physique complet, avec description des lésions de PG : type, localisation, taille, aspect des bordures, profondeur, prise de photographies, calquage des lésions sur transparents

- Bilan biologique :

 Hémogramme complet avec frottis sanguin voire myélogramme  Electrophorèse des protéines sériques

 Vitesse de sédimentation, CRP

 Fonction rénale, bilan hépatique, bilan phospho-calcique  Fer sérique, vitamine B12, folates

 Thyroxine sérique

 Cryoglobulines, agglutinines froides

 Recherche d’auto-anticorps : anti-DNA, anti-nucléaires, anti-phospholipides, anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles (p-ANCA, c-ANCA)

 Taux d’α1-anti-trypsine sérique

 Dosages sériques de l’iode et du brome  Hémocultures

- Biopsies cutanées avec prélèvements pour cultures et colorations spéciales (recherche de bactéries, mycoses et/ou virus)

- Radiographies standard : thorax de face, autres clichés en fonction des indications - Autres : en fonction des signes d’appel :

 Tomodensitométrie  Endoscopie digestive

 Ponction ou biopsie médullaire

(53)

III.1.11. Traitement

A ce jour, il n’y pas de traitement spécifique et uniformément efficace pour le PG, et aucune thérapeutique utilisée dans sa prise en charge n’a fait l’objet d’un essai clinique contrôlé [10]. De ce fait, le choix du traitement devra être discuté avec le patient, en particulier les risques inhérents à chaque thérapie, le bénéfice espéré et la durée prévisible du traitement avant d’obtenir une amélioration clinique. Il faut aussi garder à l’esprit que la prise en charge adaptée d’une MICI ou d’une hémopathie maligne associée peut accélérer la guérison des lésions de PG.

En général, un PG nécessite une hospitalisation pour assurer de bons soins locaux des lésions, permettre le repos du patient, et effectuer les bilans complémentaires nécessaires.

a. Traitements locaux

Les objectifs des traitements locaux sont de diminuer les douleurs causées par les ulcérations, de prévenir ou traiter une surinfection bactérienne, et d’assurer un environnement adéquat à une bonne cicatrisation des lésions.

Soins des ulcérations [2]

Les principes de base pour le soin des lésions de PG sont la prévention de tout traumatisme ou irritation de la surface de la lésion et de toute surinfection. L’usage d’agents nettoyants neutres ou de stéroïdes locaux permet la création d’un milieu favorable à la cicatrisation cutanée. Lors de l’évaluation initiale d’un PG ulcéreux, il est important de noter le site, la taille, la forme et la

(54)

profondeur de la ou des différentes lésions. Des photographies permettront d’évaluer par la suite l’efficacité du traitement entrepris, mais il est également important de tracer de façon hebdomadaire les contours des ulcères sur transparents afin d’avoir une idée objective sur l’évolution des lésions.

Les ulcères devront être nettoyés délicatement par une solution de sérum physiologique. L’usage de solution de permanganate de potassium dilué au 1/10000ème peut être utile si la lésion est très exsudative avec un aspect de colonisation bactérienne de surface. Dans tous les cas, il est préférable de faire tiédir ces solutions avant de les utiliser afin de réduire l’irritation lors de l’application cutanée.

En cas d’ulcération modérée à profonde, une crème de sulphadiazine argentique appliquée quotidiennement au niveau du fond de l’ulcère a un effet apaisant et favorise la ré-épidermisation. Il faudra éviter d’en appliquer sur les bords de l’ulcère à cause du risque de macération et de détérioration cutanée.

Le type de pansement utilisé pour couvrir l’ulcération varie, mais il faudra éviter la gaze imprégnée de vaseline ou d’agents anti-bactériens car, en séchant rapidement, ils adhèrent au fond de l’ulcère et rendent ainsi le changement de pansement traumatique et douloureux. Les pansements hydrocolloides sont beaucoup plus adaptés car ils sont non adhérents ce qui rend leur changement beaucoup moins traumatique.

Les érosions superficielles telles que celles dues à la rupture de lésions de PG bulleux sont souvent très douloureuses. Les pansements hydrocolloides, découpés de manière à avoir au moins un centimètre de marge sur la peau saine,

(55)

permettent d’assurer un environnement humide au niveau de la lésion, ce qui apporte un soulagement au patient et diminue les sensations douloureuses. Ces pansements nécessitent d’être changés quotidiennement durant la phase aigue, car l’exsudat est souvent important à ce stade, mais ils peuvent par la suite être changés toutes les 48 à 96 h une fois l’inflammation initiale diminuée.

Figure 19 : Pansement hydrocolloide retiré d’une lésion de PG [2].

Les agents de détersion chimique doivent être évités dans les soins de lésions de PG, de même que les agents caustiques, tels que le nitrate d’argent, au niveau de tissus en phase de granulation. En effet, ils risquent de causer une aggravation de l’inflammation par destruction tissulaire et pathergie. L’application d’un dermocorticoide tel que le dipropionate de clobetesol peut avoir un effet lissant sur les tissus en granulation, ainsi que réduire leur vascularisation et diminuer la douleur.

La protection des lésions de PG par un pansement épais à plusieurs couches est importante. En cas de lésion sur un membre, par exemple, un arceau peut être utile et permet de diminuer les risques de traumatisme des lésions de PG. L’usage d’un agent lubrifiant au niveau de la peau saine adjacente, et le non

Figure

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