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Lefort, A
Salaires et revenus
co
SALAIRES ET REVENUS
DANS LA
GÉNÉRALITÉ DE ROUEN
AU
XVIIIo SIÈCLE COMPARÉS AVECLES DÉPENSES
DE l'alimentation, DU LOGEMENT, DU CHAUFFAGE ETDE l'ÉCLAIRAGE Lecture faiteà la Sorbonnele30 Avril 1886
Par A.
LEFORT
Plus onconnaît son pays, pluson l'aime, etmieux on le sert.
A. L.
IPri2c
:± Fr. 50
ROUEN
E. CAGNIARD, IMPRIMEUR, LIBRAIRE-ÉDITEUR
88, rue Jeanne-Darc, 88
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SALAIRES ET REVENUS
Dans
la GénéralitédeRouen, au XVIIP
siècle,comparés avec
LES DÉPENSES
de r alimentation,
du
logement,du
chauffage etde
l'éclairage.SALAIRES ET REVENUS
DANS LA
GÉNÉRALITÉ DE ROUEN
AU
XVIIIo SIÈCLE COMPARÉS AVECLES DÉPENSES
DE L^ALIMENTATION;, DU LOGEMENT, DU CHAUFFAGE ETDE l'ÉCLAIRAGE Lecturefaiteà laSorbonne le30 Avril1886
Par A.
LEFORT
Pluson connaîtson pays, pluson l'aime, etmieux onle sert.
A. L.
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ROUEN
E. CAGNIARD, IMPRIMEUR, LIBRAIRE-ÉDITEUR
88, rue Jeanne-Darc, 88
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1043745
INTRODUCTION
En
étudiant l'histoire de la Généralité deRouen au
siècledernier, dansles archivesde laville et
du
départe- ment, l'auteurdu
présent travaila été toutparticulière-ment
frappé, d'un côté, de la modicité des salaires, des traitements, des revenusde toute espècefournis par;/\
lapropriété bâtie ou
non
bâtie; del'autre, de la cherté!relative des choses nécessaires à la vie et surtout des!
aliments.
j
En comparant
les chiffres actuelsdu
salaire sous toutes sesformes,etdesrevenus,c'est-à-diredesmoyens
d'achat avec les chiffres des dépenses indiquées plus6
haut, illui a semblé que lesuns avaient
augmenté
dansune
proportion triple, quadruple et parfois quintuple, pendant que les autres ne s'étaient élevés que de la moitié oumême
d'un tiers, ce qui en réalité constitueune
diminution considérable.La
lecture d'actes notariés de toute espèce et d'ou- vrages de l'époque n'ontfait queconfirmer ces premières données.Pour
en démontrer le bien fondé, il se propose, dansles lignes quisuivent, d'indiquer :
P Le
chiffre des salaires ou traitements, celui des revenus des propriétés;2° D'évaluer, en prenant ce chiffre
comme
base, le prix des dépenses d'alimentation, de logement, de chauf- fage etd'éclairage.Cette étude sera complétée plus tard pourtoutesles autres dépenses, celles
du
vêtementetde l'ameublement, des transports, des plaisirs, enun mot
des dépenses de toute nature, de nécessitéoud'agrément.L'auteur n'a point l'outrecuidance de penser qu'il failleadopter sesconclusions
comme
définitives; sontra- vail,n'ayant été fait qu'incidemment, présente denom-
breuses lacunes.
Son
ambition aété plutôt de fournir desC'est ce qui a également déterminé la Société libre d'Emulation
du Commerce
etdel'IndustriedeRouen
àleprendre sous son patronage,pour que la lecture en fût faite, en son
nom,
à la dernière réunion des Sociétés savantes^1 VoirleJournal Officieldusamedi1ermai1886.
CHAPITRE
ILES SALAIRES ET LES
REVENUS
I
SALAIRES ET TRAITEMENTS
AU
XVIII^ SIECLE^Le
Détailde
laFrance^
de Boisguillebert, quinous reporteaux
originesdu
siècle, nous apprend qu'il n'ya point d'ouvriersdecampagne
qu'à septou
huit solspar jour, et que ce prix double dans le moisde la récolteUn
contemporainde Boisguillebert,Le
Pelletier,jugeau
Tribunaldecommerce
deRouen
^, dansun mémoire
resté1 L'auteur a indiqué les salaires deRouen et des canapagnes envi- ronnantes.
2Bétail de la France, p. 194, édition de 3707.
3 Mémoires pourle rétablissementdu commerce en France, rédigés parlesieur Jean LePelletier, par ordre de Messieurs les juges et consuls de Rouen, pour être présentésà nos seigneursdu commerce, 1701.Voirlemanuscrit d'Adrien Pasquier, àlaBibliothèquedela ville de Rouen.
10
manuscrit, et des plus curieux parce qu'on
y
retrouveles théories
du
célèbreéconomiste rouennais, indiquepar quelsmoyens
on pourrait relever l'industrie etlecom- merce
et seprononce pourun
impôt sur les denrées. Cet impôt,selonlui,ne serait pointonéreuxaux
pauvres, car ceux-ci, grâce à la prospérité des manufactures, ver- raient leursalaire s'élever dans de notables proportions ;il fixe le salaire d'une famille d'artisans, composée
du
père, de la
mère
et de quatre enfants, à43
sols; lesa- lairedu
premier s'élevant à 15 sols, celui de safemme
à8etceluide
chacun
deses enfantsà5, etil estàremar-
quer que c'estlà, pourainsidire,un
salaireidéal.L'inventaire desarchivesciviles etecclésiastiquesdans lesquelles le savant archiviste
du
département de la Seine-Inférieure,M.
de Beaurepaire, a noté tout ce qui peut présenterun
intérêt historique, nous donne les prix suivants : salaired'unmanœuvre
àRouen
en 1710, 14 sols (4 à 5 fr.)^ ; d'un terreur (terrassier), en 1728, 10sols (5 fr.); pour planter despommiers
et des poi- riers, 12sols; en 1737,les ouvriers sontpayésàAliher- mont, lesfemmes
7 sols, leshommes
11 et 15 sols;1 Leschiffres entreparenthèses indiquentles salaires actuels.
eu 1746, les
femmes
12 sols, leshommes
16; lamain-
d'œuvre estde 10 et 12 solsen 1748; ce sontlesmêmes
prix àtrès peu près jusque vers les premièresannées du règne de Louis
XVI.
Ainsi, lesmanœuvres
en 1771, negagnent encore que 15 solsàRouen
^; les batteurs en grange ne gagnent que 5 solsdans lescampagnes. C'est lemême
prix pourles ouvriers de fabriqued'Aumale
^ en 1737, mais les peigneurs ont 8 sols^.A
Alençon ces ouvriers ne sontpasmieux
rétribués.Les ouvriers qui formaient corporation, touten étant payés plus cher, n'en avaient pas moins
un
salairegran-dement
inférieurà ceux de nosjours.En
1710, unebro- deuse gagnait20sols^;un
maîtremaçon 30
(1711).Le
charpentierdu
pont deRouen
obtient30
sols (6 fr.)au
lieu de
25
qu'il avait antérieurement^;un
couvreur de1 Archives ecclésiastiques, série G, t. I, liasse196; t.II,liasse336;
t. III,liasse12etpassim.
2 Semichon,Hist. d'Aumale.
3 Les prix varientà Rouen pour les fileurs et les tisseurs, depuis 3 francsjusqu'à5. Employerdes ouvriersquine sont pas capables de gagner au moins3 francsestregardécommeune mauvaisespéculation.
4 Inventaire des Arch. civiles, sérieG,t. II, passim.
5 Archives dela villedeRouen,registredes délibérationsdel'Hôtel- de-Ville, 1725.
\
12
tuiles secontentaitde
20
solsen1728
(6fr. 50), etde25
en1742
; les bulliniersn'enavaientque20.Lesplombiers sontlesplusfavorisés;en 1743 une journée deplombier etde sonmanœuvre
monte à4 livres 5sols;un
paveur, en 1746, negagne
que 1 franc 8 sols (6 fr.). Lesprix, toujours à peu près stationnaires, s'élèventvers 1780.Un maçon
etson manoeuvre, à Rouen, reçoivent50
sols.A Aumale,
cependant,un
chapelierne gagneencore que24
solsKL'anglais
Arthur Young,
dontle livre estune
source inépuisable de renseignements, fixepour toute la France lamoyenne
d'une journéed'homme
à 19 sols, sans la nourriture, bienentendu; celledes charpentiers à30sols, etil prétend, en exagérantpeut-êtreun
peu, qu'enNor- mandie
le salaire avaitdoublé depuis douze ans^,Dans
^ les manufactures,suivant le
même
écrivain, lesouvriers1 Les prix ontsuiviau xviiif^ siècle une progression très lente,sauf vers le règne de Louis
XVL
La progression est plus forte pour le revenu desterres. Voirle tableau des fermes deshospices.A
Rouen,leprix moyen des ouvriers du bâtimentest de 6 francs.Voir lasérie des prix adoptés par le syndicat, en tenant compte de laréduction accoutumée. Ces renseignements
m
ont été fournis par M. Locquet, présidentdu syndicat.gagnaient
26
solsS lesfemmes
15 sols et les fileuses9 sols.
Les chiffres de salaires s'abaissent
énormément pour
les travailleurs qui sont nourris; la suite de cette étude en donnera l'explication.
La
nourriture représente àelle seulelesdeux
tiers au moinsdu
salaire ordinaire,quand
elle n'estpas toutlesalaire ou à peuprès.
Aux
hospices deRouen,
le garçon boulangertouchait 12 livres paran^
le boulanger 60 livres, le cordon- nier55, son garçon2, le tailleur 50^. Ces prix s'élevè- rentparlasuite, mais dans une très faible proportion ;en 1764, le menuisierest payé 100 livres.
Disons toutefois que laquestion pouvait se compliquer
icidesavantages accordéspourl'obtention delamaîtrise
1 Voyages enFrance pendant les années 1787, Î788, 1789^
par Arthur Young, traduction de H.-J. Lesage (Guillaumin), t. II, p. 264.
2 IIy a aujourd'huiaux hospicesde Rouentrois boulangers, lepre- mier gagne 160 francs par mois, lesecond 60 francset lanourriture, plus2 sous parsac defarine (àpeu près12fr.), letroisièmea 20fr.
par mois, estnourriet logé.Je dois ces renseignements à Tobligeance deM.Moinet, directeurdeshospices.
'^ Letailleura 100 sous, ainsique lemenuisier et lejardinier.
14
à
ceux
qui exerçaientcertains métiers dans leshôpitaux de Rouen.Les conducteursdesmanufacturesdetricot etdetoiles auxquelles travaillaientles
pauvres
valides sontpayés, le premier 50 livres, le second60
^Dans
les comptes de l'archevêché (1743),lecharretier recevait 100livresde gages^ et leprix de
sanourriture
était évalué
à 218
livres,comme
celledu
trotteur qui ne recevaitque75
livresde gages^.Les gages desdomestiques sont à l'avenant;àMonti-
villiers, trois domestiques coûtent 150livres, ou
50
fr.chacun^. Les garde-malades sont payésà Dieppe 6livres pour huitjours.
De
cette énumérationdessalaires, recueillis indistinc- tementau furet àmesure
qu'ilsse présentaient, dansles divers documents, on pourrait peut-être inférer que lamoyenne
des salaires des simplesmanœuvres
pou- vait être àRouen
de 15sols pour leshommes,
de 101 Archives départementales. Compte des hospices de juin 1730à juin 1731. Les travauxse faisaientau comptedes négociants de Rouen.
2Archives départementales. Compte des hospices de juin 1830 à juin 1831.
^ Arch.ecclésiastiques, série G, t. II, p. 192.
pourles femmes, en les diminuant
au commencement du
siècle pour les élever àla fin.
Que
danslescampagnes
ces prix se maintenaient beaucoup plus bas ; qu'on en trouvait de 5, 6 et 8 sols, ainsi que dans certaines fabriques.
Les salaires des ouvriers formant corporation pour- raient, sous les
mêmes
réserves, être approximativementfixés à25,
30
etrarement40
sols.Ces prix ont plusque triplé de nos jours pour tous, et pour beaucoup ils sont devenus quatre et cinqfois plus forts.
Dessalaires proprement ditspassons
aux
traitements.Dans
les hospices, lasupérieure dessœursa100livres, les autres religieuses reçoivent 40 livres, 24 livres etmême
10livres par an ^Les chapelains ont
250
et300
livresau commence- ment du
xviii^ siècle; leur traitementatteint500
livres en 1764^; l'économe n'en aque 100,le dépensier 80.1 Comptedes hospices, années 1730-1731, 1764-1765.
2Comptedes hospices, id. id. id.
16
Le
médecin 150 livres, l'apothicaire 100 livreset le chirurgien120
livres; il est stipulé quece dernier devra s'entretenir « d'habits etde rasoirs »^Lesarchers chargés de la police des vagabonds ont :
le sergent
400
livres, ses troiscompagnons 300
livres, leur traitement,mis en regardde ceux denos sergents de ville, est quatre fois moins élevé.(Compte
des Hospices.)Voici quelques chiârespour les fonctionnairesdel'en- seignement.
En
1778, le baillid*Aumale condamna
le syndic et les habitantsdu
village de Barques àprendreun
maîtred'école capable d'instruireles enfants etàlui régler les salaires convenables jusqu'à lasomme
de 150livres. (HistoirecfAumale,
par Semichon.)Au
mois de septembre 1783, on lit dans leJournal
desAnnonces
deNormandie^
:«
On
désirerait trouverun
sujet, garçon, ou, s'il est marié, ayant peu d'enfants, de bonnesmœurs,
possédant«arithmétique, sachantbienécrire, le plain-chantet qui aitde lavoixpourêtre clerc et maître d'école dans
un
1 Comptedeshospices, exercice 1704-1705, 1740-1741.
2 Plus tard leJournal de Normandie, aujourd'hui le Journal de Rouen.
bourg,
aux
environs deRouen
; ily
a72
livres de fixe,sans le casuel, qui peutvaloir autant; il aura plus de 80écoliers, tant chezlui qu'enbourgeoisie. »
Le
curé de Cliponville écrit àl'arclievêque de Rouen,La
Rochefoucauld, que lasœur
préposéeaux
écoles n'a que 100 livrespar an (sérieG, t. II).En
1764, le premier maître àRouen
avait300
livres.Si nous remontonsà la première moitié du siècle, nous trouvons
25
livrespourun
quartier àSalmon
^;75
livres également pourun
quartierau
prêtre qui dirige les écoles. Peut-êtrey
avait-il pour ces derniers desavan-
tagesaccessoires.En
1774,une
rente de 162 livres 10 sols estcréée en faveur d'un maître d'école pourlehameau du
Puis, les villages deBraquemont
et de Neuville; le maître n'ac- ceptera aucunsprésents.Le
traitementdu
maîtred'école a doncau
moins quintuplé; ajoutonsque souventalors ils n'étaientpointlogés.Les traitements des professeurs au Collège de
Rouen
étaient moins dérisoires.
En
1762, l'annéemême
de l'expulsion des jésuites, ils reçoivent 1,000, 1,100 et 1,200livres2.1 Compte-rendudeshospices.
2JournaldesAnnonces,juillet1762. 3
18
A
Evreux, ils sont moins favorisés, n'ayantque 150à300
livres; toutefois il fauty
ajouter la rétribution des élèves, dont le total pour les trois professeurs pouvait s'élever à800
livres, ce qui porte la totalité de leursémoluments
au chiffre bien modeste encore de400
à550
livres. (Bonnin.Documents pour
servirà
VHist.d'Evreuœ.)
Les pensions d'émérite, données après vingt ans de service, sont fixées à
600
livres pourRouen, à400
livres pour Alençon.Il
y
a augmentation pour les professeursdeRouen.
En
1781, lesdeux
professeurs de théologie reçoivent 1,700 livres; ceux delogique, de physique etde rhéto- riques 1,400livres; lesautres 1,300 et1,200livres^
En
1784, lorsque le collègede médecinedemande
àla municipalité la création de trois cours, la dépense dechacun
de ces cours estévaluée à500
livres.Le
professeur de botanique, qui cumulaitl'enseigne-ment
et lacultureduJardin botanique, touchait500
livrescomme
professeuret300 comme
jardinier.Il est vrai que Lecat recevait le traitement
énorme
1 Arch.civiles, série D, liasse367.
pourl'époquede 5,200livres. Mais Lecat étaitlagrande illustration de la ville, célébrépar Voltaire^ et regardé
comme
le rivalde gloire de Buffon. Ajoutons aussi qu'il faisait à lui seul, au grand désespoir des autresméde-
cins, cinqousixcours, que ceux-ciaprèssamort,
deman-
dèrent àse partager^.Les appointements d'un desprincipaux fonctionnaires de la ville, Saint-Maure, receveur des deniers, s'éle- vaient à 1,600livres ; il
demanda
et obtint en plusun
logement dansla suite.Nous
nenous écarterons pas dela question des salaires ettraitements en relevantles prix suivants :10 souspour abattre
un
arbre (aujourd'hui50), 1 sou pourles décrotteurs, 4 souspour les perruquiers.10sous
aux
curés pour une messe basse; à partir de 1753, le prixen fut porté à 15 sous, mais on fut obligé alors, danslediocèse de Rouen, de réduirelenombre
des1 Lettrede Voltaire à Cideville, 7 mars 1739(Garnierfrères).
2 Arch, municipales. Requête des médecins à Messieurs de l'Hôtel de ville, féyrier 1785, après la mort de David, qui avait succédé a Lecat,dont il était legendre.
20
messes de fondation perpétuelle, d'où de nombreuses plaintes.
A Aumale, un
long procès divisa letrésorier, qui tenait à ce que toutes les messes fussent dites, et les prêtres qui le traitèrent d'Erostrate.Ce
ne fut qu'aprèsavoir épuisé tousles degrés dejuridiction ecclé- siastique et civile,que lespartiesarrivèrentàsefaire des concessions réciproques^
Les visitesdemédecin étaitpayées, à Dieppe, chez les Ursulines, 5 sousà
un
sieur Forestier, mais le chirur- gien Cousin recevait9 sous parsaignée^, le plus souvent 10sous chez les particuliers.Lecat exigeait jusqu'à
30
livres.A
l'occasion d'uneépidémie dansla généralité, Lepecq delaClôture, autre médecinfortcélèbre,recevaitdelaville,pourvingt jours de
voyage
et de séjour,240
livres, ou20
livres par jour.Nous
pouvons encoresignaler, entre autres particula- rités, les honoraires de l'avocat Perchel,un
des futursmembres
duConseilSupérieur deMaupeou;
l'archevêché lui comptait24 livresparjour, pourvoyage
ettravailà1 Semichon. Hist. d'Aumale.
2 Arch. civ., sérieD, liasse294.
Gaillon;pendantune semaineà
Rouen
ilrecevait18livres parjour.Nos
médecins ou nos avocats enrenom
se contente- raient à peine aujourd'hui, pour leurs déplacements, d'indemnités dixfois plusfortes.L'un des
mieux
partagés en fait de traitement était l'exécuteur des hautes œuvres, ou plutôt les six exé- cuteurs de la Généralité deRouent
Celui delà haute justice touchait6,000 livres.Nous
voyons dansl'un de sesmémoires, que pour pendreetétrangler lecondamné,
le dépendre, le porter
aux
fourches patibulaires et le rependre, ilrecevait 120 livres.II
LES
REVENUS
DES PROPRIETESLespropriétésne donnent pas
un
revenu plus avanta-geux
que letravail.La
propriétébâtieou non
bâtie etsurtout la première, estlouée cinqfois mois cherque de nosjours.J'excepte ici le capital argent, d'autant plus productif
1 Inveut, des arch. civiles, série C,liasse946.
22
qu'il est plusrare, etje
me
contenterai de rappeler qu'à presque toutes les pagesdu Journal
desAnnonces
dede
Normandie
\ on faitappel à ceprécieux capital; quele gouvernement, toujours besoigneux, offre des place- ments, en rentes viagères, à 10 0/0 sur
une
tête, à 8 1/2 surdeux
têtes, sansdistinctiond'âge etau choixdes ac- quéreurs.A
Paris, le Mont-de-Piété, établi par Necker, prêtelui-même au
tauxde 100/0.PROPRIÉTÉS BATIES
Pour
les propriétés bâties, prenons lesbaux
des hos- picesdontles nombreuses maisons et lesfermes formaient le revenu presque exclusif^.En
1701, des chambres, proche le VielPalais, sont louées à des écoliers pour 10livres paran;La veuve
de Jean Capelle, pourune
année delouage d'unecuisine, d'une couretd'une petitechambre
dépen- dante d'unemaison siserue du Gril, paie 8 livres.Une
maison etun
jardin rue Saint-Maclou,55
livres.A
GuillaumeLeforestier, plâtrier, pourune
année deïII estdevenuleJournal deRouen, ^
2 Comptedes Hospices, les bauxétaient emphythéotiques.
23
louage d'une maisonetjardin au faubourgSaint-Hilaire, 65livres.Les exercices de 1743-44, nous donnent les
mêmes
prix^En
avril 1763, dans leJournal
desAnnonces,
nous voyons qu'unepartie de maison, sise ruedu
Cordier, est à louer; « elle consiste enune
cave, cuisine, écuriepour quatre chevaux,deux
remises,un
bûcher au rez-de- chaussée;au
premier, une grande antichambre servant desalleà manger,un
cabinet d'assemblée ayantdeux
grandes croiséesenespagnolettes,unechambre
àcoucheret
un
cabinet de toilette avec cheminée; au second,une
grandechambre
à cheminée,un
garde-meuble où on pourrait pratiquer des chambres, une petitechambre
à cheminée et des greniers dessus, avec
un
belesca- lierenrampe
defersanscommunauté.
Le
prix decetappartement estde350
livres. »En
1767, danslamême
feuille, annonced'unemaison
prèsSaint-Maclou, louée300
livresavecun
jardin garni d'arbres etd'espaliers.Enfin,
au
mois dedécembre
1778, toujours dans la1 Voir parexemple les Annonces de NorTnandie, décembre1778.
24
même
feuille, ondemande une
maison à louer, rue desCarmes
ourueGrand-Pont,alorslesrueslespluscommer-
çanteset les plusbelle de laville; onvoudrait une belle boutique élevée, avec cour, cuisine etcinqou six
cham-
bres; sielleconvient on mettrajusqu'àneufcentslivres.Pour
qui connaîtla cherté excessive des loyersdansla villede Rouen, cherté qui à peine touche à son point d'arrêt,ilestévidentqueleloyer desmaisonsn'égalaitpas la cinquièmepartiedu
loyeractuel, etque, dans certains casmême,
il ne s'élevaitguère qu'à la dixième partiede ce revenu.Nous
en trouvons encoreune
preuve bien concluante dansla comparaisondu
loyer de certains immeublesdes hospices, pourlesquels nous avonsen regard et lesbaux
dusiècledernier etlesbaux
d'aujourd'hui :Siècledernier 1884
Maison
rueaux
Ours,nM5
3801. » 1.400 fr.—
rueEdouard-Adam,
n«23
160 »1.600
—
rue delaPoterne, n°12. .98
»450
— — n«14..
98 »410
—
-_nM8
. . 128 »720
—
raeSaint-Nicaise,n«2...
100 »500
25
etilen estde
même
pour presque toutes lesmaisonsqui appartiennentencoreaux
hospices, sauf bienentendules cas d'emphythéose.Lespropriétésbâties étaient, à ce qu'ilparaît, d'assez
mauvais
rapport.Dans
les registres des délibérations de l'Hôtel-de-YiHe deRouen,
surtoutdanslapremière par-tie
du
xviii^ siècle, maintes etmaintes fois la municipa-lité accorde à ses locataires, et ils sont également fort,
nombreux,
la jouissance gratuite pendant 29 ans des maisonsqu'ils occupent, lorsqu'ils consentent à fairedes réparations d'une certaine importance.Dans
ce cas, les locataires indiquent exactement quelles doiventêtre ces réparations, la qualitédesmatériauxàemployer
;un
planesttoujours annexé à la
demande
etaucun
détail n'est omis.Nous
trouvonsencore dans ces registresune
requête adressée à l'intendant par le curéde la paroisse Saint-André
(faubourgCauchoise);il se plaint d'êtrele seuldes curés deRouen
qui n'ait point de presbytère, et il ne reçoitqu'unesomme
de 150fr. pourlui tenir lieude ce que nous appellerions son indemnité delogements
1 L'intendantlui-même,pour son logement etpour sesbureaux ne recevaitqu'une indemnité de3,000fr. (jusqu'en1781).
26
Ce
bon marché
n'empêche point, du reste, le prési- dent Yernouillet de s'emparer, en 1706, d'unlogement de la porte Cauchoise, qui était la propriétédela ville,parce
qu'il estbon pour
sa santé. Les représentants delacitérésistentd'abord, puis ils cèdentlamaison ainsi usurpée«consistant endeux
petits appartements dontl'un étaitloué42
liv.18 sols, etl'autre 40livres,plusun
troi-sièmeplus considérable occupé par Bucaille pour 150 livres; entout
202
liv. 18 sols.»La
municipalité, dansune
premièredélibération, stipu- laitune
redevance de 8 livres « qui n'était quele prix d'une simple reconnaissance.Maisbientôt^poitrmargi^erencore une plus grande
considérationpour M.
le président Vernouillet^ ilfutdécidéque leditboulevardlui seraitdonné pourlui en jouir sa vie durant, sans en rien payer; il sera tenu seulementde l'entreteniret le
rendre en l'étatqu'il est. »
Cette délibération, textuellement reproduite ici, nous donne, il
me
semble,une
indication précieuse sur ceque pouvaitêtrel'omnipotence deshommes
dejustice, et sur lesrapports d'une municipalitéavecun
président dePar-
lement, aucommencement du
xviii^ siècle.PROPRIETES
NON
BATIESSi nous
examinons
le tableau ci-joint des fermes ap- partenantaux
hospices de Rouen, et disséminées dans ledépartementde la Seine-Inférieure, nous constaterons
un
lentmais continuel accroissement de leurs revenus.Sinous
comparons
lesbaux
dans lapremière moitiédusiècle dernier, avec les
baux
actuels, nous trouvons quel'écart estpresqueexactementdeun
à quatreetdemi.Amfreville-les-Champs. 1746 1.
600 — 1880
10.800
Auzouville-l'Esneval .. 1746470 — 1882 3.500
Fontaine-le-Bourg .... 1750300 —
18781.400
Grand-Quevilly 17194.500 —
18819.025
Héricourt-en-Gaux.... 17182.800 —
188414.000
Monville 1723 1.000
—
18746.820
Prétot-Vicquemare.... 1737
500 — 1885 2.400
Saint-Paër
1745 300 — 1883
1.720Vieux-Rue
1746840 —
18765.000
Yquebeuf-Colmare . . . . 17331.000 — 1880 5.000
13.310 59.665
Nous
avons pour lesbaux
actuels lasomme
de 59,665fr.qui, diviséepar13,310, totaldesbaux
primitifs.28
nous donne presque exactement le rapport de 4,50 à ^
Aux
environsd'Aumale, dans l'étudedeM®
Leullier, notaire à Lignières-Cliatelain,j'ai eu l'occasion de rele- verlesbaux
suivants,ily
a quelques mois.Un
journalsemé
enmars
paye 8livres (1778). 4jour-naux
et demi de terres labourables au terroir deCau-
lières, situésau
Vieux-Chemin, 45
livres.Un
demi-jour-nalchargéde mars, 6 liv. 15 sols.
Un
demijournal,der- rièrelesPucheux,
6 liv. 15 sols. Or, lejournal (43ares) se loueraitencore dans la contrée trois et quatre fois plus cher quelesprixmarqués
ci-dessus.Il est vrai qu'outre ces prix, les adjudicataires au xviii° siècle, d'après les termesdubail, sontastreints à payer les cens et rentes, à en apporter annuellement quittance sans que les bailleurs soient
même
tenus àla livraisonpar corde
nimesure,
c'est-à-dire àprouver quela superficieduterrain louéestbienexactementcelle qu'indiquelesbaux.La
terrelouéedansces conditionsétaitloin,onlepense bien, d'avoir la valeur vénale qu'elle a atteinte depuis, oumême
celle de ces dernières années,malgrél'abaisse-1 Voirie tableaudesfermes de la ville de Rouen, p. 'd'6.
ment
généraldu
prix despropriétés.Dans
l'étudedu
tabel- lionde Lignières sontvendus en 1774trois quartierschar- gés deblé,tenus en roture, pour50livres; en 1778, trois quartierségalementchargés deblé, mais oùiln*est pasfaitmentionde roture, pour la
somme
de316
livres ende-niersprincipaux, 3deniers à Dieu pour les pauvres, 24 livresde vinet
deux
pairesdebas évaluées k 4 livres pour épingles.Un
demi-journal chargé de blé, sur lechemin
d'Offignies à Bettembos,
75
livres, plus 15 livres pourlelabouretla semence.
Enfin,
un
autre quartierde terrepour50
livres.La
valeur actuelle, d'après les clercs de l'étude de Lignières, pouvait être pour le premier lot à 1,000livres, pourlesecond à 1,200 livres, pourle troisième à
800
livres etpourlequatrième à600
livres.C'est-à-direquece qui avait été
vendu
en tout, ily
a un peuplus de centans, pour534
livres3deniers, attein- drait aujourd'hui le chiffre plus que sextuple de 3,600 francs.Par un
hasardassez singulier,comme
je relevaisune
venteen date du 15 juillet 1779, de huitjournauxetdemi à la Couture, pour 2,424 livres plus 2 sols de deniers à Dieu pour les pauvres, età la chargede2sols
30
pour chaquejournalet
chacun
an, à l'abbayed'Auchy,ilse trouva qu'unepartie de ces terres avaientété vendues en
1685
surlepiedde1.500lejournal,cequi eutfaitpourles huit
journaux
et demi 12,750 fr. ; enfin, lelundi dePâques
1886, dansune
nouvelle venteau même
en- droit,un
lot atteignait,àlasurprise générale,ilest vrai, le chiffrede 2,400 fr. lejournal.Les chiffres suivantsprisdansl'inventairedes archives ecclésiastiques de
M.
de Beaurepaire, nous conduiraient, jecrois, à peuprèsaux mêmes
conclusions.En
1789.— A
Beaubec, acre de terrelabourable 6 et15livres;valeur intrinsèque 120 et
375
livres; àMau- quency
6livresdeloyer, valeur intrinsèque 120livres; à Neufchâtel,même
prix; àRoncheroles, acre de prairie, loyer25
livres, valeur intrinsèque,750
livres; pour la terrelabourable,20
livres, valeur600
livres; àSom- mery,
loyer 14livres en terre labourable, valeur375
li- vres; au Grandes-Ventes, acredeprairie,loyer25
livres, valeur750
livrespourlaterrelabourable, loyer10livres,valeur
200
livres KToutefoisje n'hésite pas à déclarer que
mes
conclu-1 Inventaire des archiverciviles,sérieD,liasse 2,184, l'acre en Nor- mandie étaitde 54 ares67 centiares.
sions sont légèrement infirmées par les évaluations de A.
Young,
qui, de 1787 à 1789, traversadeux
foisnotre paysety
étudia particulièrement tout ce qui a rapportà l'agriculture; voici les prix qu'ildonneet qui ne concor- dent pas complètementdu
moins ni avec les fermages deshospices, ni avecceux
desterresdu
chapitre.« Entrée par
Aumale,
les solsarables sevendentici800
livres l'acre(=
1,297 fr.35
l'hectare) et selouentde
24
à30
livres(=46
fr. l'hectare).De
Neufchâtel à Rouen, prixde la premièrequalité :1,214fr.
70
l'hectare; leschamps
ouverts,648
fr.70
l'hectare; prèsde
Rouen
ily
en a beaucoup à 1,946 fr.l'hectare ; à Yvetot, 1,621 fr. l'hectare, et il parle en fort mauvais termesdela culture
du
pays deCaux^
Ces chiffressont plus élevésassurément queles précé- dents; ils atteindraient souvent la moitié et parfoisplus de lamoitiéde nos prix actuels. Je laisse à de plus ha-
bileslasolution de cette difficulté : il
me
suffitde donnerles prix authentiquesquej'ai relevés,etqui sontdes plus bas.Chez Arthur
Young
ce nesont, après tout, quedes évaluations.1 A.Young, t. II, p. 54 et 55.
32
Que
sil'on se demandaitpourquoi, à une époque où le capital argent rapportaitun
si fort intérêt, le capital terreen fournissaitun
si faible, on en trouveraitl'expli- cation dans les charges sansnombre
qui grevaient ce capital.Dans
leJournal
deNormandie,
nous trouvons (jan- vier1792), le calcul de ce quedevait payerle proprié- taire d'une ferme d'unrevenu de 1,200 livres avantles modifications apportéesàl'impôtparlaConstituante :P Deux
vingtièmeset 4 sous par livre. ... 1321. »2^
Le
taille, 1 s. 6d. parlivre90
»3°Accessoires et capitation,
24
sous parlivre de lataille 108 »
4°Prestation des chemins, 5 sousparlivre
delataille
22
10En
plusladîme
estiméeà240
»Ce
quidonneun
total de592
1. 10 C'est-à-dire presque la moitiédurevenu, et le double de l'impôt actuelou àpeu près.Dans
l'Eure onétait plusmalheureux
encore ; s'ilfaut en croirelecahier de doléances de la paroisse d'Epre-ville, ilfallaitpayer pour 100 livres de rente en terre;
25
pourla taille, 16 pourles accessoires, 15 pourla ca- pitation, 11 pour dixième et sou pour livre ; en tout67 francsoulesdeux
tiers^ Ajoutons cependant que cesim- pôtsne devaient peser si lourdement que sur quelques- uns, surlesplusmalheureux
;lesprivilègesde tout espèce rejetaient la plus forte part des charges surceux
qui n'avaientaucune
défense,aucun
protecteur.«
Un
fonds de 4 ou 6arpents, écritBoisguillebert,sera baillé à50livres et paiera20
livres de taille, etlorsque parle sortcommun,
il vientaux
mainsdu
seigneurou de quelquepuissant, on nelecompte
que sur le pied dela moitié. »
La
seconde raisondu
bas prixde laterre,c'est queson ^y^^rendement,
même
dansles sols fertiles, était des moins élevés. «Le rendement
de ces magnifiques terrains (du pays deGaux)
nedépasse guère30
à40
boisseaux de50
litresparacre.
On
le déclareextraordinairequand
il at-'^
teint
45
et 50 boisseaux ; celui de l'avoine est de 50.Quellehonte^ ! »
1 Boivin-Champeaux. Notice historique sur la Révolutiondans le département del'Eure. (Hérissey), page 37.
2 A. YouNG,p. 54, t. II, Noël dela Mormiéredans sa géographie 5
34
Les meilleures terres de Normandie, ditPoucton
(Mé-
trologie, in-4°, 1780, p. 610), ne rendent guère que le sextuple, les moins bonnes ou médiocres le quintuple,la plus grandepartie le quadruple.D'après les archives ecclésiastiques (Série
C,
liasse 2,160),un
acre deterre de médiocre qualité rendait en- viron 150gerbes, etlagerbedonnaitun
septième ouhui- tième de boisseau dansles bonnes années ou àpeuprès21 boisseaux;comme
l'acre représentait 54 ares 67 cen- tiares et le boisseau25
litres, nous arrivons àun
rende-ment
total, à l'hectare, de 8 hectolitres au plus.Young donne comme moyenne
des magnifiquesterrains du pays deCaux 35
à40
boisseaux,c'est-à-direàl'hectareun
peu moinsde 16hectolitres; c'estune moyenne
de 12 hecto- litras tout au plus. Aujourd'hui lamoyenne
est supé- rieure de plus d'un tiers, et la quantité des semences restantlamême,
le produit netest presquele doubledu
produit net d'alors.dudépartement dela Seine-Inférieure, 1795, conteste l'appréciationdu voyageuranglais,qu'il regarde commetrop sévère.
CHAPITRE
IIDans
lespages qui précèdent, nous avons essayé de prendreune
idée des revenusfournis par le travail, puis desrevenusfournisparlespropriétés, cesderniers restant inférieursaux
revenusactuels, dans unetrès forte pro- portion, à peuprèscelle deun
à trois etmême
à quatre.Dans
les pages suivantes, il nous resteàfixer de lamême
façon le chiffre des dépenses.Pour y
arriver nous passerons en revue le prix des aliments, pain, viande, poissons, beurre, œufs et celui desboissons, cidre etvins ; enfinles dépensespourlelo- gement, le chauffage et l'éclairage.PAIN ET BLE
La
chertérelativeetla variabilité du prix des aliments etsurtoutdu
pain, telleaété la grande plaiedu
paysau xviii^ siècle.— Le
blé.En
1701, le muid^ accordéaux
jésuites par1 Le muid de blé, mesure d'Arqués, égalait 1,826litres ; lamine 91 litres.
36
la ville est estimée à
600
livres (33 fr. l'hectolitre)^En
1707, lamine
vaut4liv. 10 s.En
1727, 9livres; en 1729, 8liv. 10 s.Mais en 1730, les hospices achètent 143
muids
10 mines, pour 30.289liv. 12 s.En
1737, lamine
varie de 15 à22
livres (Hôtel-de- Ville), eten 1767, de15 à 16livres^
En
1771 et1772
la livre de blémonte
à 4 sols, la fa-mine
estgénérale.En
1775, de 15 à 16 livres^
De
1780à 1789, 12livres lamine
et 15livresen1789.C'estpresquetoujours plus dela moitié des prix actuels.
Mais
au
prixdu
blé ilfaut ajouter lamonte
oumou-
ture.
A Rouen,
les boulangerscomme
les bourgeoisde- vaient fairemoudre
leurs blésaux
moulins à bâon(moulinsbanaux)^. -
—
•
"^
Nous
pouvons nous rendrecompte
de ce que préle- vaient d'après leslignessuivantesdu Journal
desAn-
1
A
partirde 1702, la ville accorde aux jésuites 96, 97,98et quel- quefois99 muids, à titred'aumône, pourle collège.2 Biblioth.de Rouen.Lettres à Laverdy.
3 Lettre deMontholon au ducd'Harcourt.
4 (Saufles privilégiés de touteespèce.)
—
V. la supplique deJean Roostj fermierdesmoulinsabaod.Deliberat.de l'Hôtel-de-Viile,1755.nonces
(mars 1776) les adjudicataires de ces moulins :«
Un
particulier de cette ville s'étant aperçu que sonmeunier
ne lui rendait pasun
fidèle compte, s*est avisé, cesjoursderniers, de peser son blé.Sur
146livres dumeilleur iln'en areçu que 86 livresde farine et 24 livres deson. Ilnousengage d'insérer cet avis afinquele publicne soit plusdupe, et le rédacteur ajoute :« L'intentionestbonne, mais cetabusexiste depuis des siècles; la cause en est simple: le public est obligé de
moudre
àtelmoulin,lemeunier
en donneun
loyer exor- bitant et les potsde vin; ilfaut payer, ilaune
famille ;cet abus,
comme
tant d'autres, naîtdel'exclusif. »On
ne peutêtreplusaccommodant
avecl'exclusif!Le
droit demonte
était d'unpeu plusdu
onzième; lemeunier, sur 146livres, auraitdonc
dû
prélever à peu près 15livres, ilen prélevaitplusdu doublet
Outre la
monte
ilfallaitpayerle drpitdecoutume
àla halle. Ce droitavait étégrandement
abaissé àRouen,
parsuitede la résistance desblâtiers. Ceux-ci, sous pré- texte que l'adjudicatairedu
droit ne percevait qu'une obolepar mine, ayantrefusé de payer en disantqu'il n'y avaitplus demonnaie
de cette espèce.l V. Supplique de Jean Roost.
38
L'adjudicataire réclama;
un
arrêt du Conseildu
roi luidonna
gainde cause, mais nel'autorisaqu'à percevoirun
liard parsomme
de cheval, ce qui revenait àdeux
deniersparmine
composéedequatre boisseaux.—
Hôtel-de-YilIe 1722.
A Aumale,
c'était le droit de galette; il sepayait en natureetconsistait à prendre, surle palletier, au labou- reur qui avaitvendu du
grain,un
boisseau, aprèslui en avoirmesuré
48. Ailleurs, c'était lemême
droit sous d'autres noms.Lesentraves mises au
commerce
desblés, soitparlegouvernement, soit par les passions populaires, doivent être mises en compte.
La
foules'en prenait à tout,aux
marchands, qu'elle traitait d'accapareurs,comme aux
meuniers, auxquels cependant toutcommerce
de grains ou defarines était interdit. Ces derniers, àAumale,
ne pouvaientmême
pas emporter le blé que leurs clients avaient achetés aumarché
sans s'exposer à de mauvais traitements, « de façon qu'unefemme
qui aurait une famille asseznombreuse
pour avoir besoin d'acheter cinq boisseaux de blé, est obligée de les porter sur son dos, tout d'une traite, plusieurs centaines de toises, sans qu'un meunier ose lui aider à se recharger,quand
bien39 même
elle succomberait sous le fardeau, ce qui fait périr quelquesfemmes de temps à
autre ^ »A Rouen comme
à Evreux,ilest faitdéfenseaux meu-
niers de nourriretengraisser des porcs... il leur est en- jointde boucherles trous qui sont en bas des blutteries, vulgairementappeléslestrousà son^.
A
chaque instantdans les marchés, éclatent desémeu-
tesauxquelles les pouvoirs publics sont le plus souvent obligés decéder.
Ou
bienencore Messieursdu
bureau se trouvent dans la nécessitéde faire porter à la halleun
certain
nombre
de sacsdes blésde la villepour satisfaire à l'empressementdu
peuple qui se mutinait pour en avoir^.Ou
bien encore, ondonne
desgratificationsaux mar-
chands,même
étrangers,80
francs pour chaquemuid
de bléqu'ils apportentàRouen,
en 1725.En
1706, lavillevend
des bléspourfournirlemarché.Nouvelles émeutes en 1725, en 1739, en 1725, en 1771, etc., etc.
1 HippLAU, Archives du Château d'Harcourt, t. V.
2 BoNNiN. Documents pourservir àVHist. d'Evreux.
3 Rouen, hôtel-de-ville, 1701. La municipalité avait toujours en réserveune quantitéde blé.
40
Il n'y avait pas plus detranquilitédanslescampagnes,
le duc d'Harcourtécrit, en 1768, qu'ilnefaut pas seflat- ter que les seigneurs osentrester dans leurs châteaux,
chacun
se sauvera danslaville prochaine.Et on délibèresurla suppression des
marchands
privi- légiésde grains (1775) vraies sangsuesdu
peuple etusu- riers des boulangers, écritM.
deMontholonau
maréchal d'Harcourt^Le
prixdu
pain subit naturellementles variations du prix des grains.En
1713et1714, la livre de489 grammes
coûte 2sous 9deniers, etla ville deRouen
proposeau
roiune
avance de300,000
livrespour acheter desblés.En
1725, le pain debouche^de 14onces coûte4 s. 6 d.Le
painbis3s. 6d. Il seraitpluscherencoresile parle-ment
n'avaitrenduun
arrêtpourlefixer àce chiffre.En
1740, on faitdu
pain moitié orge, moitié froment, à2
s. 6d.Le
pain bis de pur froment, à 3 s. 6 d., et lesboulangers perdaient
deux
liards à la livre; ils étaient indemnisésparla ville.En
1758, lepain, àCherbourg, est à2
s.1 HiPPEAU, vol. II.
2 Pain de luxe.
41
En
1762,2
s. 6 d^En
1768, émeute àFécamp,
le pain bisà 3 s.En
1780, 2s. 8 d. r« qualité; seconde,2
s.2
d.;troisième, 1 s. 8 d.
En
1784, à2
s. 8 d.. arrêtdu
parlementquienjointde faire trois sortes depain, la première qualitéà8 sous, la secondeà2s. 2d.; latroisième à1 s. 8 d.^Pour
le pain,comme
pour le blé, c'est plus de la moitiédesprix actuels; que si on multiplie les chiffres ci-dessus par trois ou par quatre, pour arriverau
prix relatif, on voit combien grande devait être la misère.C'est
du
pain à 10, 12et 16 sols lalivre.Aussi^enJJg^
onbroute l'herbedes
champs;
en 1752, le peuplemanque
t(5'falement de pain, « ilest réduitàse former des nour-
» rituresquifont horreur à l'humanité ».
A
Forges, lesmalheureux mangent du
pain d'avoine, d'autresdu
son mouillé«cequi acausé lamort
debeaucoupd'enfants^. »S'il enestainsi en
Normandie,
province fertile enblé, ilest facile d'imaginer quelle doit être la cherté de cette denréepour le restedu royaume
1 Inventaire des Arch. civiles, passim.
2 Antérieurement, pour éviterlesémotions populaires causées parle renchérissement dupain, leParlement autorisaitles boulangers à en diminuer lepoids. C'étaittoujsurs le pain de quatre livres, mais la livre n'étaitplusde seizeonces.
3 Taine, ancienRégime. §