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La Vidéo-Communication locale dans la région Nord/Pas-de-Calais : un état des lieux

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Academic year: 2021

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Submitted on 11 Nov 2020

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La Vidéo-Communication locale dans la région Nord/Pas-de-Calais : un état des lieux

Yannick Lebtahi

To cite this version:

Yannick Lebtahi. La Vidéo-Communication locale dans la région Nord/Pas-de-Calais : un état des lieux. Revue CIRCAV (Centre interdisciplinaire de recherche sur la communication audio-visuelle), L’Harmattan, 1996. �hal-03000262�

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La Vidéo-Communication locale dans la région Nord/Pas-de-Calais :

un état des lieux

AUDIBLE, VISIBLE, SCRIPTIBLE

CIRCAV n°8 1e trim. 1996 Décadrage

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La Vidéo-Communication locale dans la région Nord/Pas-de-Calais :

un état des lieux

Yannick Lebtahi

Un panorama des plus divers

Le Nord/Pas-de-Calais est l'une des régions de France offrant le plus d'expériences de Vidéo-communication locale1. La communication locale par le câble y prend les acceptions les plus diverses, allant de la télévision d'immeuble au sein d'un quartier (TV Vilvorde Épinette à Maubeuge, Télé Maillebois à Longuenesse) à la télévision multi-sites à vocation régionale (C9 Télévision), en passant par l'expression vidéographique (Télé Gohelle), par la télévision au sein d'une ville (Le Cateau, Grande-Synthe) ou par une télévision d'accès ouvert (Valenciennes).

Trois types de canaux locaux se dessinent sur le plan des contenus : le canal infographique, le canal audiovisuel et le canal qui a recours à la fois à l'infographie et à l'audiovisuel. Les pratiques évoluent vers une mission de services et d'informations (infographie, journal d'informations télévisées, magazines...) mettant le plus souvent en œuvre un partenariat avec un autre média (télévision, presse écrite, radio...).

Un contexte dual

Le contexte de la Vidéo-communication locale ne s'inscrit pas dans une cohérence régionale et son étude révèle une dichotomie Nord/Pas-de-Calais. Les deux départements du Nord et du Pas-de-Calais relèvent chacun d'une identité socio- culturelle et d'un parcours économique et politique spécifiques. S'ils partagent l'héritage d'une tradition industrielle, le textile pour le Nord et la mine pour le Pas-de- Calais, ainsi que militante, à dominante socialiste pour le Nord et communiste pour le Pas-de-Calais, leurs évolutions disjointes ont engendré un certain dualisme dans la région.

La mutation économique s'est accompagnée d'une concentration de l'activité dans le Nord et plus particulièrement autour la mégapole Lille-Roubaix-Tourcoing. Le Pas- de-Calais, en marge d'une urbanisation croissante des nouvelles activités, est resté davantage ancré dans une culture industrielle, marqué par une solidarité militante et des réflexes communautaires. Le Nord, quant à lui, s'est ouvert à une culture plus diffuse et plus urbaine. Son identité s'est fortement associée au pôle Lille-Roubaix- Tourcoing.

La télédistribution régionale n'échappe pas au phénomène observé au plan national par Jean-Marie Charon et Jean-Paul Simon2 : la prédominance des grandes villes et des zones fortement urbanisées dans le développement des réseaux câblés qui se perpétue ici au profit du Nord et au détriment du Pas-de-Calais. Dans ce contexte dual, la Vidéo-communication locale se développe de façon contrastée.

1 Voir les revues : Vidéo des pays et des quartiers, Guy Pineau, INA, 1993, et Association des villes cablées (AVICA), État des lieux et canaux locaux, Paris, 1993.

2 Jean-Marie Charon & Jean-Paul Simon, Histoire d'enfance, les réseaux câblés audiovisuels en France, La Documentation Française & CNET-ENST, 1989, p.134.

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La Vidéo-communication locale dans le Pas-de-Calais

Délaissé par les médias et les acteurs de l'audiovisuel régional, souffrant d'une image négative construite autour du stéréotype des friches industrielles et des corons vidés de leurs habitants par la crise minière, le Pas-de-Calais nourrit de fortes attentes en matière de Vidéo-communication locale.

Les élus y prennent plus conscience de la nécessité de recourir à de nouveaux outils de communication pour recréer les liens sociaux mis à mal par la crise économique et morale que traverse leur département. Les collectivités locales souhaitent surmonter ce handicap en s'appuyant justement sur l'identité spécifique de leur population. Cependant, individuellement, de par leur faible taille, elles ne disposent pas des capacités financières nécessaires pour mettre en œuvre des moyens de communication à la hauteur de leurs besoins. Elles privilégient donc une approche collective, favorisée par la culture minière et structurée notamment autour de Culture Commune. Cette association loi 1901, mise en place en 1990, regroupe trente et une communes. Elle a pour mission de transformer l'image du bassin minier et de favoriser son développement économique et culturel. Son souhait aujourd'hui est d'investir le canal local pour développer l'information afin de pallier le manque de couverture médiatique du bassin minier. Concrètement, elle met en place des coproductions avec les câblo-opérateurs et en amont elle souhaite impliquer la population afin de former des relais. La démarche de Culture Commune se structure autour de la sensibilisation et de l'appropriation de ce nouveau support et outil de communication par un public acteur.

Paradoxalement, le Pas-de-Calais offre un paysage plus favorable au développement d'un réel concept de Vidéo-communication locale parce que plus homogène en matière d'attentes du public et de volontés des acteurs. Son isolement favorise l'émergence d'activités télévisuelles dites de « proximité », s'inscrivant dans une dimension plus strictement « locale »3, axée sur l'implication du public dans leur dispositif.

La Vidéo-communication locale dans le Nord

Dans le Nord, le secteur de l'audiovisuel, plus riche et davantage professionnalisé, s'est surtout articulé autour d'initiatives privées. La télédistribution n'a pas échappé à ce phénomène. Tandis que dans le Pas-de-Calais, seuls deux opérateurs commerciaux, Région Câble et Citévision, sont présents sur le marché du câble, dans le Nord on en recense cinq : Région Câble, Citévision, France-Télécom, Vidéopole et les Réseaux- Câblés-de-France. La prédominance des opérateurs commerciaux dans le développement de la Vidéo-communication locale du Nord a réduit considérablement l'intégration de l'environnement socio-culturel. Le secteur associatif est resté à l'écart de la plupart des initiatives et la relation du public au canal local s'est construite selon un schéma comparable aux médias nationaux, sans prise en compte de la vocation spécifique de la Vidéo-communication locale. Celle-ci est souvent appréhendée dans le cadre d'une couverture médiatique et non pour des objectifs liés à la notion d'appropriation de l'outil ou du support.

Le Nord est caractérisé par une structure plus complexe, où les attentes et les logiques d'acteurs s'avèrent plus hétérogènes en matière de Vidéo-communication locale. La professionnalisation des expériences et la multiplicité des acteurs y ont favorisé des conduites individualistes et spécifiques selon un schéma excentrique

3 Pour reprendre le constat de flou artistique autour de la notion de local mise en évidence par François Rabaté. François Rabaté, La télévision au local, Milan-Midia 1988, p. 55.

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engendrant un panorama plus dispersé que dans le Pas-de-Calais.

Le rôle des opérateurs commerciaux

La prépondérance du Nord a renforcé l'emprise des opérateurs commerciaux dans la région. La Vidéo-communication locale devient, dans la plupart des cas, un service proposé et géré par les nouveaux câblo-opérateurs commerciaux. L'initiative privée de promouvoir la Vidéo-communication locale s'explique par le caractère attractif et fédérateur de ce service,

La création (ou l'exploitation) d'un canal local permet aux opérateurs, notamment à Région Câble (le principal opérateur en région), d'obtenir auprès des collectivités locales, les concessions de construction et d'exploitation des réseaux. Cette stratégie consiste à signer des conventions avec les collectivités locales en leur proposant dans un premier temps de prendre en charge et d'exploiter le canal local sans solliciter la moindre participation financière. Cette offre permet aux câblo-opérateurs de créer une dynamique autour de la Vidéo-communication locale afin de susciter l'intérêt des collectivités voisines dans le but de développer l'implantation du câble. En ce sens, le canal local peut être considéré comme un produit d'appel destiné aux collectivités locales concédantes.

Cette politique de promotion de la Vidéo-communication locale s'est notamment illustrée par l'action de Région Câble qui est le seul câblo-opérateur en France à avoir impulsé et financé entièrement un canal local : C9 Télévision. Si elle a effectivement instauré une dynamique pour l'implantation des réseaux câblés, cette politique de promotion a engendré aussi des effets pervers.

Du point de vue des câblo-opérateurs, le canal local est un outil de communication, de conquête et de fidélisation s'inscrivant dans des objectifs principalement commerciaux. Cette approche technico-commerciale n'a pas favorisé l'appropriation du canal local par son environnement. Une audience confidentielle a permis de conclure à « l'absence du téléspectateur »4. Celui-ci n'a pas, à notre sens, été suffisamment intégré dans la démarche des câblo-opérateurs qui prennent maintenant conscience de la nécessité de favoriser l'appropriation du canal local par le tissu social en s'appuyant sur les structures existantes (notamment dans le cadre Télé Gohelle). Les contenus et les formes de la programmation semblent devenir un objet de réflexion à l'ordre du jour, du fait de l'évolution des canaux locaux en région et d'un constat d'échec de C9 Télévision dans le Nord dans ce domaine.

Cependant, cet axe de réflexion n'apparaît pas pour l'heure comme prioritaire dans la phase actuelle de développement du canal local. L'impact réduit du canal local sur le public potentiel et la faiblesse de sa programmation ne sont pas les seuls avatars de la promotion du canal local par les câblo-opérateurs commerciaux,

La prise en charge du canal local a conduit nombre de câblo-opérateurs dans une impasse économique compte tenu des coûts d'exploitation qu'il implique. L'entreprise s'avère être un véritable gouffre financier. L'expérience menée par Région Câble avec C9 Télévision illustre un cas de figure extrême où l'opérateur n'a plus les capacités financières d'assumer seul la production des programmes. Pour remédier à cette situation, l'opérateur suggère la participation des collectivités locales sous forme de co-productions ou d'achats d'espaces de diffusion.

4 Robert Bourelly & Hélène Goyet, « Nuages sur le canal », in Sonovision, n° 332, décembre 89, p. 28-32.

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Vers une logique coopérative

La coopération des câblo-opérateurs implantés dans la région Nord/Pas-de-Calais devient inéluctable tant elle apparaît nécessaire pour maintenir en activité les canaux locaux et leur donner un sens plus large au sein de la région.

Des liens se créent entre les différents canaux locaux. À terme ces initiatives présagent d'éventuelles interconnexions des réseaux qui pourraient se réaliser selon plusieurs niveaux : la région, le département et le transfrontalier.

Il se dessine autour de Région Câble et plus précisément de C9 Télévision, un canal à dimension régionale. Dans la pratique, il consiste en l'insertion sur l'ensemble des réseaux câblés en exploitation, d'une programmation de C9 Télévision, déclinée selon les sites avec un contenu spécifique. C9 Télévision devient un canal à part entière, proposé parmi l'offre de programmes de l'abonnement au câble, sur une majorité des sites câblés de la région. Région Câble s'oriente donc vers un canal local à dimension régionale par câble avec des décrochages micro-locaux ou avec des échanges de programmes sur les réseaux non connectés.

L'émergence de structures de regroupement en matière de production, d'échanges ou d'achats de programmes, que l'on peut observer à l'échelle nationale ou internationale, se dessine aussi dans la région. De manière informelle, les opérateurs s'engagent vers une logique fédérative qui leur permettrait d'avoir une démarche plus cohérente auprès des collectivités locales et de l'État, et d'envisager une économie plus saine en regroupant leur potentiel autour d'une banque régionale de programmes, notamment pour les captations sportives.

La stratégie de coopération des différents canaux locaux qui pourrait rendre leur exploitation plus viable se heurte à deux obstacles majeurs.

Le premier obstacle est d'ordre organisationnel. Il a trait à la constitution d'une banque de programmes en région et à l'interconnexion des réseaux. À ce stade, les positions des différents opérateurs demeurent divergentes sur le sens et le rôle à donner au canal local. Toutefois, cet obstacle est surmontable étant donné qu'il dépend de la volonté des opérateurs de sortir de l'impasse actuelle.

Le deuxième obstacle est d'ordre environnemental. Si les opérateurs parviennent à monnayer leur action auprès des collectivités locales, la viabilité de leur projet passe néanmoins par le développement de ressources propres au canal local. Le marché publicitaire, déjà lui-même en crise, reste insuffisant du fait de l'interdiction de la publicité télévisuelle pour la grande distribution, annonceur local de poids. Depuis une dizaine d'années, l'ouverture de ce marché à la télévision se heurte à l'opposition farouche de la presse régionale qui y voit, à juste titre, un facteur de réduction de ses propres ressources. Compte tenu du pouvoir de pression politique de la presse régionale, la résolution du problème passe par son implication dans la Vidéo- communication locale.

L'ouverture à l'environnement local et à ses acteurs

De nombreuses expériences se sont concrétisées en région à partir d'options très spécifiques. Cependant, à un moment paradoxal de l'évolution du câble, ces réalisations semblent vouloir se retrouver sur deux points principaux : la recherche d'un couplage accru avec l'environnement et le souhait partagé d'échanges de savoir- faire et/ou de programmes.

Cette dernière préoccupation nous semble moins présente sur les réseaux non investis par les câblo-opérateurs commerciaux. Des sites comme Le Cateau et Grande- Synthe restent en repli, à l'écart d'une nouvelle logique partenariale. Le même phénomène semble se produire avec les structures à l'origine des télévisions

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d'immeuble au sein d'un quartier.

Au niveau micro-local, la Vidéocommunication locale s'inscrit dans une logique permettant d'envisager d'autres relations au canal local. Une inconnue demeure quant à la coexistence et la confluence de logiques divergentes, le local élargi et le micro local.

La situation de la Vidéo-communication locale demeure précaire tant que des modes d'organisation et de financement durables ne sont pas déterminés. À l'intérieur même de l'espace régional, la coopération des différents acteurs locaux est devenue nécessaire pour trouver un équilibre économique et donner un véritable sens à la Vidéo-communication locale. Le succès d'une telle logique coopérative est conditionné par l'attitude de deux types d'acteurs locaux : les élus et la presse régionale.

Enfin, la remarque peut paraître triviale, mais elle s'impose, la Vidéo- communication locale ne peut pas faire l'économie de son public.

Les élus locaux de la région et la Vidéo-communication locale

En dehors du regroupement autour de Culture Commune dans le Pas-de-Calais et des initiateurs de réseaux fiscalisés comportant un canal local intégré, les élus n'ont pas témoigné d'un engouement particulier à l'égard de la Vidéo-communication locale.

Ce désintérêt s'est confirmé lors de la phase de collecte des données, menée dans le cadre de la présente recherche. Peu d'élus ont consenti à faire part de leur préoccupation à l'égard de la Vidéo-communication locale5.

Ce désintérêt semble participer d'un phénomène de lassitude ou de rejet des questions complexes que suscite la Vidéo-communication locale. Il s'explique aussi par le contexte historique du développement de la télédistribution par câble.

Après les avatars du plan Câble, le nouveau dispositif, instauré en 1986, qui donne aux élus des prérogatives quant au choix des opérateurs tout en permettant leur désengagement financier, contient les ferments d'une dissension entre les nouveaux partenaires élus et les opérateurs.

En effet, selon Thierry Vedel, cette alliance réunit sur deux logiques contradictoires : une volonté de « surlocalisation » pour les élus et une volonté de

« délocalisation » pour les opérateurs6. La volonté de « surlocalisation » des élus s'explique par le rôle essentiel de la « communication municipale » : « la réactivation incessante d'un territoire (...) social et politique », source de « valorisation » et de

« légitimité » politique7. Alors que la volonté de « délocalisation » des opérateurs est motivée par des facteurs économiques (économie d'échelle et/ou économie de champ) et se manifeste dans le projet d'un canal local régional avec des décrochages micro- locaux.

5 À ce propos, nous tenons à remercier les rares élus ou représentants municipaux qui ont accepté de nous accorder un entretien. Il s'agit de Marc Wolf (Mons-en-Barlul), Durand (Lomme), Jacques Mellick (Béthune), M. Degrève (Lille), M.Peusin (Lomme), M.Grimaldi et M. Marchandise (Le Cateau), M.Diligent (Roubaix), M.Darchicourt (Hénin-Beaumont), M.Bocquet (Méricourt), M.Delcourt (Pas-de-Calais) M.Demarthe et M.Carême (Grande-Synthe), M.Lenoir (Longuenesse), M.Baralle (Saint-André), Mme. Dobbels (Roubaix-Tourcoing), et de l'équipe municipale de Villeneuve-d'Ascq.

6 Thierry Vedel : « Villes et câblo-opérateurs : divorce à l'américaine », in Médiapouvoirs, n° 11, 1988.

7 Isabelle Pailliart, « Les villes communiquent », in Médiapouvoirs, n° 15, 1989, p. 135-145.

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Pour reprendre, de manière imagée, l'antagonisme relevé par Dominique Lorrain8, si pour les collectivités locales, c'est le territoire qui constitue le « marché »9, pour les câblo-opérateurs, c'est le marché qui constitue le territoire. Les demandes de subventions formulées par les câblo-opérateurs, dans le cadre du futur contrat de plan État-Région, démontrent que « les collectivités locales pourraient en effet ne pas être la bonne frontière du câble »10.

Actuellement les élus sont confrontés à une double demande de la part des câblo- opérateurs :

une participation à la programmation du canal local,

une prise en charge de la fin des travaux de construction des réseaux.

Face à ces options de financement mixte proposées par les câblo-opérateurs, les élus locaux demeurent sur la défensive, dans une phase d'observation et d'attente.

La Vidéo-communication semble être un service qui répond à leur besoin, notamment dans les petites villes qui n'ont pas de service audiovisuel intégré ni une capacité financière suffisante pour faire appel à des prestataires de services extérieurs.

Mais la question du canal local reste difficile à appréhender parce qu'elle renvoie à l'insuffisante audience des réseaux câblés. Le débat actuel se situe donc autour de la prise en charge ou non de la fin de la construction des réseaux câblés qui permettrait de fiscaliser un service de base et de générer une audience justifiant un effort sur des contenus locaux.

Sur cette question, l'ampleur des investissements nécessaires et l'incertitude quant au futur mode de diffusion prédominant, compte tenu du projet de canal hertzien Canal-Europe-Nord, agissent comme autant de freins11. Pour les collectivités locales, l'aménagement du territoire pour le câble doit être réalisé par les collectivités territoriales et le gouvernement, sans que les communes en fassent les frais et s'appauvrissent.

En définitive, seul le canal local peut susciter un intérêt chez les élus si toutefois la question des réseaux est résolue. La multiplication des structures de réflexion autour de la Vidéo-communication présage d'un déblocage à venir.

Pour le moment, mis à part quelques grands fervents du câble et du canal local les élus ont besoin d'une phase d'apprentissage dans un domaine confus et évolutif. Ils ne se sont pas encore véritablement positionnés face aux notions de télévisions locales.

L'image et/ou l'identité du canal local et notamment de C9 Télévision, le plus développé des canaux locaux en région, ne correspond pas toujours à leurs attentes ou à leurs projections. Au regard de l'histoire du canal local de Grande-Synthe, les élus rejettent l'image d'un canal local « Monsieur le Maire » et ne voient toujours pas comment articuler une approche alternative.

Pour convaincre les élus, les opérateurs devront recentrer leurs propositions autour de projets plus précis moins globalisants et assurer la montée en charge de leurs réseaux.

8 Dominique Lorrain : « Le grand fossé ? Le débat public/privé et les services urbains », in Réseaux, n° 26, novembre 1987.

9 Le recours au terme « marché » pour les collectivités locales s'appuie sur le développement des techniques de marketing politique lors des échéances électorales locales, avec lequel on passe « de la communication à la commercialisation ». Voir Isabelle Pailliart, op.cit.

10 Tristian Mattelart, Les opérateurs face au câble, dossier réalisé pour l'Association des Villes Câblées, avril 1991, p. 27.

11 D'autant que les décisions concernant les réseaux câblés relèvent en général, d'un syndicat intercommunal et non d'un maire seul. Elles exigent donc un certain consensus.

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La presse régionale et la Vidéo-communication locale

Il y a 20 ans, la région comptait cinq quotidiens : Liberté, Nord Éclair, Le Matin, La Voix du Nord, La Croix, et vingt hebdomadaires. Aujourd'hui, Liberté a disparu, malgré une reconversion sans succès en hebdomadaire, Le Matin s'est transformé en Nord Matin et a été contraint de fusionner avec Nord Éclair sous l'égide du groupe Hersant pour ensuite cesser de paraître12, La Croix a cessé de paraître et sa rédaction s'est repliée sur le magazine hebdomadaire du même nom. Un constat s'impose : hormis La Voix du Nord, la presse régionale est en crise.

Compte tenu de cette situation préoccupante, la presse régionale se doit d'adopter une attitude prospective. Elle n'échappera pas à terme au phénomène de multimédiatisation qui voit l'information télévisée acquérir un rôle dominant dans le système de l'information. « Nous nous trouvons à un tournant de l'histoire de l'information. Au sein des médias (...) la télévision a pris le pouvoir. C'est elle qui détermine l'importance des nouvelles, qui fixe les thèmes de l'actualité (...). La télévision dicte la norme, impose son ordre et contraint les autres médias, en particulier la presse écrite, à suivre »13. Si la télévision « au local » n'a pas encore acquis ce rôle dominant parce qu'elle demeure à un stade embryonnaire, la presse régionale ne peut faire l'impasse sur son développement à venir.

Deux groupes, La Voix du Nord et Nord Éclair/Nord Matin, ont amorcé une diversification multimédia.

La Voix du Nord s'est diversifiée dans la télématique, la radio locale FM, avec RVN, et l'audiovisuel par la création de sa filiale Nep TV pour s'implanter sur le marché de la télévision en région. Elle s'est associée avec France 3 Nord/Pas-de- Calais/Picardie dans la création d'Europole TV pour développer l'information télévisée, ce qui a permis à France 3 d'instaurer une nouvelle dynamique et de s'inscrire dans une stratégie de concurrence face à l'arrivée de M6 en métropole lilloise.

En s'associant à France 3, La Voix du Nord a mis à disposition son savoir-faire pour décliner la télévision au local. À cet égard, La Voix du Nord dispose de huit cents correspondants dans la région. Cependant, aucune collaboration n'a été engagée avec les canaux locaux et plus particulièrement C9 Télévision. La Voix du Nord ne perçoit pas, pour le moment, d'opportunité dans le canal local. Elle refuse de publier gratuitement le programme du canal local parce qu'il ne constitue pas un produit attractif contrairement aux programmes des chaînes nationales.

La Voix du Nord n'envisage ses relations avec les câblo-opérateurs et plus particulièrement Région Câble, que dans le cadre de prestations permises par l'activité de production audiovisuelle de sa filiale Nep TV. À ce sujet, le fait que Région Câble ait choisi de s'engager avec son principal concurrent Nord Éclair/Nord Matin ne constitue pas un obstacle majeur. La Voix du Nord exclut donc tout investissement à long terme et conserve une position d'observation et d'attente. L'évolution des canaux locaux est considérée comme « encore bien frileuse » (Jean-Claude Bernard, Directeur du Développement de La Voix du Nord). « Le câble est un média nouveau et peu attractif » qui ne sera complémentaire que lorsqu'il sera suffisamment implanté. Cette complémentarité est envisagée dans le cadre du projet de télévision locale hertzienne, Canal Nord Europe ; dont La Voix du Nord est un des promoteurs. Le câble est perçu comme un support complémentaire, mais en aucun cas autonome.

Nord Éclair/Nord Matin, filiale du groupe Hersant, est le deuxième groupe de presse de la région. Si ce groupe n'a pas envisagé de diversification dans le domaine

12 La dernière édition de Nord Matin date du 26 octobre 1993.

13 Ignacio Ramonet, « L'ère du soupçon », in Le Monde Diplomatique, mai 1991, p. 11.

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de la radio locale, il a, par contre, saisi l'opportunité de s'inscrire dans le paysage audiovisuel local. Pour faire face à la crise de la presse écrite qui le frappe directement, Nord Éclair/Nord Matin a entrepris une diversification en direction de la Vidéo- communication locale, nettement plus volontariste que son concurrent La Voix du Nord. Cette diversification s'est amorcée par la formation d'une quinzaine de journalistes aux techniques audiovisuelles afin de créer un potentiel important en matière de presse professionnalisée en métropole pour répondre aux éventuelles ouvertures en matière de télévision locale. Compte tenu de sa position concurrentielle prédominante sur la zone de Roubaix-Tourcoing, Nord Éclair/Nord Matin s'est positionné comme partie prenante pour l'exploitation du canal local aux côtés de Région Câble lors de l'implantation d'un réseau câblé du SIVU de Roubaix-Tourcoing.

Les deux partenaires ont créé, à parts égales, une filiale commune Prodis pour gérer et exploiter le canal local du SIVU de Roubaix-Tourcoing. Nord Éclair/Nord Matin a, par ailleurs, mis à disposition de Prodis, son potentiel humain. Cette initiative a d'abord eu un impact promotionnel sur le quotidien, la rentabilité financière de l'opération n'étant envisagée qu'à moyen terme.

Nord Éclair/Nord Matin a donc coproduit avec Région Câble un journal local pour le canal local du SIVU de Roubaix-Tourcoing puis il s'est associé à la production du journal local du réseau lillois. Ses journalistes ont été portés à la direction des différentes antennes qui se sont progressivement créées lors de l'extension du réseau de Région Câble en région.

Prodis a ensuite pris en charge la correspondance de La 5 en région Nord/Pas-de- Calais. Puis Prodis s'est engagée dans la production déléguée de l'antenne de M6 dans la région.

Ces initiatives de diversification ne se sont pas révélées à la hauteur des ambitions du groupe déjà économiquement affaibli. Même si la correspondance pour La 5 représentait une opération équilibrée, sa faillite a fragilisé les actions audiovisuelles du groupe. Sur le câble, le groupe n'a pas pu faire face aux lourds investissements financiers qu'impliquait la co-production du journal local d'autant qu'aucune perspective de retour sur investissement n'était en vue du fait de la faible pénétration et de l'insuffisante extension des réseaux. Après deux ans d'exercice, Prodis s'est donc retirée de ses engagements face aux canaux locaux du câble. La dernière activité restante de Prodis, la production déléguée pour l'antenne de M6, ne pouvait suffire au maintien de son activité. Prodis a cessé toute activité en décembre 1993.

Les tentatives de diversification de Nord Éclair/Nord Matin dans le secteur de l'audiovisuel local se sont soldées par des échecs qui l'ont fragilisé face à son concurrent, La Voix du Nord.

Le Nord/Pas-de-Calais est l'une des rares régions de France bénéficiant d'un pluralisme en matière de presse écrite. Les deux groupes en présence structurent le marché, à parts à peu près équilibrées. Cette situation de concurrence produit une émulation profitable notamment au développement de la Vidéo-communication locale. À ce propos, Nord Éclair/Nord Matin conteste toujours le partenariat exclusif de La Voix du Nord et de France 3 Nord/Pas-de-Calais/Picardie parce qu'il nie ce pluralisme et le menace. Son rédacteur en chef, Monsieur Farine, estime que :

France 3 en tant que service public ne respecte pas son obligation de considérer la réalité du terrain ou du secteur en région puisqu'elle n'a jamais envisagé un partenariat avec notre groupe. (...) Si la coopération entre l'audiovisuel et la presse écrite est nécessaire pour définir un juste partage des recettes publicitaires afin de préserver la survie économique des uns et des autres, elle nécessite aussi une réelle concurrence en matière de Vidéo- communication locale. À cet égard, on peut s'interroger sur le potentiel du câble. (...) Comment avoir une audience intéressante pour les annonceurs alors que la logique du

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câble est d'offrir un bouquet de chaînes thématiques au public qui de fait se segmente, ce qui réduit l'audience potentielle du canal local ? (...) Son taux d'audience est donc infime en comparaison du taux d'abonnement si faible soit-il. (...) Le problème majeur pour que le canal local trouve sa raison d'être réside dans sa capacité à assurer une réelle programmation quasiment 24 heures sur 24.

Monsieur Farine souligne l'intérêt de la coopération voulue par Région Câble avec la presse régionale :

L'idée de Région Câble au départ, a été d'associer la presse locale à son projet, ce qui a pu se concrétiser sur le SIVU de Roubaix-Tourcoing, mais pas sur Lille avec la présence de La Voix du Nord qui d'emblée n'entrevoyait pas une bonne opportunité dans la télévision locale par câble. Ce partenariat, mis en œuvre au travers de Prodis, démontrait aux élus locaux qu'il était possible de créer et de faire de la télévision au local sans que ce soit de la Télé Monsieur le Maire. Ce qui n'avait jamais été réalisé auparavant.

Déçu par l'échec de la politique volontariste de son groupe, Monsieur Farine émet le souhait d'une aide de l'État sur les médias locaux et exprime la crainte de voir La Voix du Nord devenir « le pôle central du multimédia dans la région ».

Quoi qu'il en soit, qu'elle adopte une attitude sceptique ou volontariste, la presse régionale s'avère être un partenaire pour le développement de la Vidéo-communication locale. Toutefois, comme la plupart des autres acteurs, elle ne peut, comme l'a démontré l'échec de Nord Éclair/Nord Matin, prendre le risque économique d'anticiper de manière excessive un processus encore en gestation.

La Vidéo-communication locale et son public

Compte tenu de « l'infime audience »14 de C9 Télévision, canal le plus important du schéma de télédistribution régional, il est permis de s'interroger sur le public potentiel de la Vidéo-communication locale dans le Nord/Pas-de-Calais.

Une étude commanditée par le Conseil Régional15 permet d'appréhender les attentes du public en matière de télévision régionale ou locale. Quelques extraits des conclusions de cette étude sont, à cet égard, significatifs.

« Le Nord/Pas-de-Calais ne sait pas communiquer (...) et souffre d'un grand manque d'informations » « Le public ressent un grand vide au niveau des informations régionales » qui ne reflètent pas actuellement « une tradition de fêtes, de solidarité et d'ouverture ». Cette frustration est d'autant plus grande que le public est à la fois pessimiste et désorienté, compte tenu de la disparition de points d'ancrage économiques et culturels, comme « la mine ».

À ce propos, le paysage audiovisuel actuel fait l'objet de nombreuses critiques :

« France 3 distille une information trop limitée » tant sur le plan des « plages horaires » que sur le plan des contenus.

C9 Télévision est perçue comme une « petite chaîne, jeune, sous-développée et peu regardée ». Elle souffre d'un « manque de familiarité du public avec le câble ».

Le public attend un « double dynamisme de l'information régionale » : une information plus complète et émettant une image spécifique, dynamique et porteuse de Nord/Pas-de-Calais.

Le public manifeste son attente pour une grande chaîne régionale qui « doit s'aligner en termes de qualité et de programmation sur les grandes chaînes nationales et belges ». Cette exigence implique « l'obligation de professionnalisme et de moyens

14 Nous reprenons ici le terme employé par Monsieur Farine, mais nous ne sommes pas en mesure de nous appuyer sur des données quantitatives qui ne nous ont jamais été confiées. Cependant, la plupart des acteurs périphériques confirment le caractère confidentiel du public de C9 Télévision.

15 T.V Marketing International, Nord/Pas-de-Calais : Étude Grand Public, juin 1990.

(12)

techniques et financiers, des présentateurs-vedettes régionaux, une large couverture horaire : 24h/24, avec des bulletins d'information toutes les heures ». Elle se doit de refléter autant le micro-régionalisme que la dimension « transfrontalière de la région ».

Cette étude révèle bien l'attente du public régional pour une télévision combinant micro-régionalisme et macro-régionalisme, et relevant d'un réel dispositif télévisuel.

Ce dispositif a été défini par Bernard Leconte16 et comprend notamment :

l'électronicité,

la possibilité du « direct »,

la continuité temporelle de la diffusion assortie d'une hétérogénéité des différentes émissions (le flux et la grille),

des médiateurs ostensibles et, le plus souvent, starisés,

une réception domestique presque généralisée.

La Vidéo-communication locale, tel qu'elle est conduite actuellement, ne peut satisfaire l'ensemble de ces critères et ne correspond donc pas à ces attentes.

France 3 Nord/Pas-de-Calais/Picardie n'offre pas une diffusion continue (il s'agit d'un décrochage des programmes nationaux). Quant à C9 Télévision, elle ne répond pas à ces critères (hormis peut-être la « starisation » des présentateurs).

Quant au caractère identitaire qui renvoie au modèle belge, cité par l'étude, il ne semble pas suffisamment mis en avant dans les différentes expériences à l'œuvre dans la région Nord/Pas-de-Calais.

16 Bernard Leconte, « La télévision regarde la télévision : À la gloire du clin d'œil électronique de Marilyn dans Le Divan sur FR3 », in Revue du Cinéma, n° 463, juillet 1990, p. 63-69. Voir aussi Bernard Leconte, Entre les lignes. Écrits sur la télévision. : usages et usagers, coll. AVEC, Université Lille 3, 1993.

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