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Apple Samsung : Une Guerre Complexe. Intelligence Economique

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Academic year: 2022

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Apple – Samsung : Une Guerre Complexe Intelligence Economique

Professeur : C. HARBULOT ESSEC SMIB 2013-2014

Margot BOSSU-SENECHAL Arnaud FERRAND

Quentin HUREAU

Thomas PAGES

Victorien STUBBE

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Sommaire

Introduction ... 3

I. Présentation des entreprises ... 4

A. Samsung ... 4

B. Apple Inc. ... 5

C. Comparaisons de Samsung et d’Apple... 6

II. Enjeux, Procès et décisions ... 7

A. Les enjeux de la guerre économique : Un marché de l’électronique en forte croissance ... 7

1. Un marché vaste et en constante innovation ... 7

2. Des acteurs essentiellement asiatiques ... 8

3. Les géants japonais déclinent au profit d’autres pays asiatiques ... 9

4. Une forte demande ... 10

5. Une forte compétition sur le marché et des prix tirés vers le bas ... 10

B. Les procès et décisions juridiques ... 12

1. Le cadre des procès ... 12

2. Aux Etats-Unis ... 12

3. En Europe ... 14

4. Et dans les autres pays ... 14

5. Les procès, un moyen de gagner du terrain… pour tous. ... 15

III. Outils de la guerre économique ... 16

A. Normatif ... 16

B. Juridique ... 19

C. Supports gouvernementaux et Influences Etats-Unis / Corée du Sud dans le conflit ... 21

IV. L’affrontement entre Apple et Samsung : une attaque contre Google ... 22

A. Pourquoi Apple attaque... 22

B. Les méthodes utilisées par Apple ... 25

Conclusion ... 27

Bibliographie... 28

Annexes ... 30

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Introduction

Dans un monde de plus en plus globalisé et informé, peu d’entreprises de taille conséquente peuvent aujourd’hui jouir d’une situation de monopole sur leur marché. Cette évolution a provoqué au fil des années des luttes de pouvoir entre géants de certains secteurs. La majorité de ces conflits se résume à une guerre commerciale. Néanmoins, certaines disputes amènent les entreprises à s’affronter au niveau juridique et à s’opposer sur de nombreux points, conduisant dans certains cas à la mort de l’une d’elle. Ce fut le cas en 1998, lorsque la Société Netscape porta plainte contre Microsoft.

Alors que Netscape avait le quasi-monopole sur le marché des navigateurs internet, l’entreprise Microsoft (qui avait un monopole sur le marché du système d’exploitation) décida elle aussi de se lancer sur ce marché. Or, Microsoft profita de son monopole afin d’imposer de façon gratuite (alors que Netscape était au prix de 39,95$) son navigateur, tuant toute concurrence. De nombreux procès furent alors lancés dans divers états mais les dommages subis par Netscape étaient irréparables. En 2001, Netscape possédait moins de 4,5% des parts de marché (contre 80% en 1995) et Microsoft 94,2%1. En Février 2008, et après 15 ans de services, l’entreprise Netscape fermait son navigateur2.

Dans le cadre de l’intelligence économique, nous avons choisi d’étudier une autre guerre économique encore plus complexe. En effet, nous avons décidé de nous pencher sur le combat aussi bien commercial que technique que se livrent deux géants de l’industrie informatique et électronique ; le coréen Samsung et l’américain Apple. Bien que n’étant pas la première dans l’histoire, cette guerre se déroulant au niveau international a pris une envergure exceptionnelle du fait du nombre de pays où se sont déroulés les procès.

Comment la guerre économique est-elle mise en œuvre chez les deux concurrents ? Quelles sont les appuis politiques et financiers sur lesquels les entreprises peuvent compter ? Où en est la guerre entre Samsung et Apple aujourd’hui ? Telles sont les questions que nous nous sommes posées et auxquelles nous allons répondre.

Dans un premier temps, nous étudierons les deux groupes afin de comprendre leur positionnement, leur rayonnement à travers le monde et leur puissance respective. Nous nous intéresserons également aux différents partenariats et accords entre les deux sociétés. Afin de comprendre comment les deux géants en sont arrivés à ce conflit, nous exposerons les enjeux du conflit ainsi que les différents procès et décisions.

1 Descombes, Serge. "Saga Netscape/Microsoft: Histoire D'un Renversement." Journaldunet.com. Journal Du Net, 23 Aug. 2002. Web. 13 Feb. 2014.

2 Colombain, Jérôme. "Netscape, C'est Fini." France Info. France Info, 3 Jan. 2008. Web. 13 Feb. 2014.

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I. Présentation des entreprises A. Samsung

Leader multi-facette du numérique, le Groupe Samsung, fondé le 1er mars 1938 par Lee BYUGCHUL, est un des principaux « chaebol » coréens (conglomérats constitués de différentes sociétés qui sont liées par des relations financières complexes). Au sein du groupe sont rattachées de nombreuses sociétés importantes telles que l’entreprise d’électronique Samsung Electronics (connue pour ses téléviseurs et la téléphonie mobile) et l’assureur Samsung Life.

L’empire Samsung est actuellement à la tête d’une soixantaine de sociétés affiliées divisées selon différents domaines d’activités: l’électronique (SDI, SDS, Display, etc.), machines et produits chimiques (Heavy Industries, Petrochemicals, Techwin, etc.), services financiers (Life Insurance, securities, Ventures Investment, etc.), commerce et service (Engineering, Everland, Medical Centre, Biologics, etc.) et enfin entreprises affiliées (Lions, Public Welfare Foundation, etc.). Il est également présent dans le secteur du BTP (notamment avec la construction du Burj Khalifa, le gratte-ciel le plus haut du monde actuellement) et de la construction navale avec sa filiale Samsung Heavy Industries (SHI, construction de pétroliers, méthaniers, porte-conteneurs, plateformes de forage, etc.). Le Groupe est également connu pour être l’un des principaux exploitants du plus important chantier naval de Corée du Sud (sur l’île de Geoje).

De part sa philosophie et les valeurs qu’il défend, Samsung est présent dans le domaine éducatif et a développé des partenariats avec des établissements supérieurs tels que l’Université de Sungkyunkwan. Le Groupe est également présent dans la préservation de l’environnement avec son programme « Samsung Ethic Forest » qui a pour but de replanter des arbres en forêt tropicale.

En 2012, il détrône Nokia (leader, depuis 14 ans sans interruption, de la téléphonie mobile) en devenant simultanément n°1 mondial de la téléphonie mobile et n°1 mondial des Smartphones devant Apple. Le Groupe est considéré, en 2013, comme la seconde entreprise la plus innovante au monde derrière Volkswagen, grâce à une progression de 15% dans ses dépenses de R&D (environ 11 milliards de dollars).

Aujourd’hui, le groupe Samsung est le n°1 mondial des technologies, et fait plus de bénéfice qu’Apple, Google et Microsoft réunis. Il représente plus de 20% du PIB Coréen et est dirigé par le fils du créateur, Lee KUN-HEE. Ce dernier, arrivé en 1968 a pris la tête de l’entreprise seulement en décembre 1987 et a réussi à transformer une entreprise nationale en poids lourd mondial. Grâce au succès du groupe, il a réussi à devenir l’homme le plus riche du pays et aurait plus d’influence que l’actuelle présidente de la république. Néanmoins, sa carrière n’a pas toujours été constituée de succès. Selon le magazine Forbes, Mr.Kun-Hee a été arrêté en 2008 pour corruption envers des procureurs, magistrats et d’autres personnalités influentes mais aussi pour suspicion d’évasion fiscale. Condamné à 3 ans de prison avec sursis et 98 millions de dollars d’amende, il est cependant gracié et reprend sa place en 2010.

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B. Apple Inc.

Multinationale américaine concevant et commercialisant des produits électroniques destinés au grand public ainsi que des logiciels informatiques et des ordinateurs personnels, Apple Inc. fut fondée le 1er avril 1976 par Steve Jobs et Steve Wozniak. La firme de Cupertino est mondialement connu pour ses produits phares tels que l’IPod, le Macintosh, l’IPhone, l’iPad, iTunes, iWork, iLife ainsi que les logiciels Logic Pro et Final Cut.

Apple est reconnue internationalement pour le charisme de son créateur Steve Jobs ainsi que pour sa philosophie industrielle de « l’intégration verticale », de son approche marketing innovante, ainsi que pour l’ergonomie et l’esthétique de ses produits. La firme s’est forgée une réputation singulière dans l’industrie électronique grand public. Elle est prisée et appréciée des consommateurs, du fait, du sentiment de proximité qu’ils ont envers les différents produits de la marque. Cette sensation de proximité est accentuée par les pratiques marketings de la firme ainsi que par l’ergonomie et l’esthétique de ses appareils grands publics.

Société la plus admirée dans le monde en 2008, 2009 et 2010 selon Forbes, Apple devient également en 2011 la première capitalisation boursière de la planète ; puis la plus grande capitalisation boursière de tous les temps le 20 août 2012 avec un montant de 623,52 milliards de dollars Américain.

Numéro deux mondial des technologies derrière le groupe Samsung, Apple reçoit de nombreuses critiques concernant les conditions de travail de ses ouvriers ainsi que pour ses pratiques commerciales et environnementales. Elle est également célèbre pour son culte du secret et pour sa culture d’entreprise offensive et agressive. De plus, Steve Jobs entretien des relations étroites avec Barack Obama et Apple considéré comme une des entreprises les plus importantes des Etats-Unis est soutenu pour le gouvernement (héritage du protectionnisme Américain).

Depuis la disparation de Steve Jobs, le 5 octobre 2011, la firme semble marquée par le manque d’innovation. Actuellement dirigé par Tim Cook, Apple a des difficultés à continuer sans le

« Style Jobs ». Son court d’action au NASDAQ en est la preuve la plus flagrante avec aujourd’hui un court à 450 dollars US alors qu’elle atteignait les 700 dollars sous l’ère Jobs.

Aujourd’hui Apple, fait face à la difficulté de la perte de Steve Jobs et de son remplacement par Tim Cook, deux hommes aux styles bien différents. Alors que Jobs était un innovateur toujours à la recherche d’un nouveau cap technologique à franchir, Cook est un homme d’affaire qui veut s’assurer du futur et de la toute-puissance d’Apple. La firme aurait, semble-t-il, perdu sa capacité à faire rêver et semble être arrivé un stade de maturité où l’objectif principal est la conservation de sa puissance et non l’innovation.

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Samsung

"Inspire the World, Create the Future"

N°1 Mondial des technologies

Fait plus de bénéfices qu'Apple, Google et Microsoft réunis

Apple

"Think different"

N°2 Mondial des technologies

1ière Capitalisation boursière au monde

C. Comparaisons de Samsung et d’Apple

Afin de comprendre la guerre économique que se livre les deux géants de l’électronique, nous avons recueilli des données financières de l’année 2011 afin de saisir la différence de puissance économique entre les deux entreprises. D’autres données financières sont également présentes dans les Annexes 1, 2 et 3.

A la vue de ces simples chiffres, nous nous apercevons que la puissance économique de Samsung est de loin supérieure à celle d’Apple.

Le sud-coréen bénéficie également d’un volume de ventes plus élevé avec 70 millions de Smartphones vendus contre 31,2 millions pour Apple. Il aussi important de noté que dans cette lutte, Apple reste largement désavantagé face à Samsung, puisque ce dernier est en effet le leader mondial du microprocesseur et que tous les appareils Apple en sont équipés.

Samsung

Chiffres d'Affaires : 247,5 milliards d'euros

Bénéfice net : 18,3 milliards d'euros

Prix de l'action : 513,5 euros

Capitalisation boursière : 196,4 milliards d'euros

Trésorerie disponible : 30,1 milliards d'euros

Apple

Chiffres d'Affaires : 78,6 milliards d'euros

Bénéfice net : 7,3 milliards d'euros

Prix de l'action : 313,2 euros

Capitalisation Boursière : 381,5 milliards d'euros

Trésorerie disponible : 111,2 milliards d'euros

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Page 7 sur 40 SMIB 2013 - 2014 Selon les analystes, Apple commence à montrer ses premiers signes de faiblesse face à Samsung alors que le sud-coréen doit continuer à soutenir sa croissance et cherche à s’installer durablement en tant que leader des technologies. Nous pouvons donc nous demander, comment le géant Américain peut-il lutter face à l’empire Coréen ?

II. Enjeux, Procès et décisions

A. Les enjeux de la guerre économique : Un marché de l’électronique en forte croissance

1. Un marché vaste et en constante innovation

Le marché des produits électroniques est un marché vaste qui se découpe en 4 segments : le secteur de l’information avec les hardwares (ordinateurs, tablettes..) et les logiciels; le secteur de l’image (appareils photos, caméras…), le secteur du loisir avec l’audio et la vidéo (télévision, lecteurs DVD, MP3, consoles…) et celui de la communication (téléphones mobiles, Smartphones, PDA…).

Les entreprises de produits électroniques développent constamment de nouveaux biens en phase avec une demande de qualité de plus en plus élevée. Ces produits de nouvelle génération profitent des technologies émergentes et des nouveaux composants High Tech. En effet les nouveautés technologiques sont cruciales pour les achats dits « de remplacement », majoritaires dans les pays développés. Une innovation technologique majeure pourra, elle, créer un nouveau marché, par exemple le Blue Ray ou plus récemment les montres Gear, qui sont encore peu développées mais qui ouvrent la voie à un tout nouveau marché. Du fait de l’importance de la R&D et des innovations dans le domaine, l’industrie de l’électronique connait une obsolescence rapide de ses produits et est, de fait, un marché en constant renouvellement. Cela est particulièrement vrai pour les marchés développés, où les consommateurs ont tendance à dépenser plus dans l’électronique et à changer régulièrement de téléphone ou d’ordinateur.

Une des caractéristiques importantes du marché, et qui nous intéresse plus particulièrement dans le cas de Samsung et d’Apple, est qu’il existe une véritable menace, due à la cannibalisation de certains produits. En effet de nouveaux produits, en particulier les smartphones, font du tout en un et incorporent les fonctionnalités de plusieurs produits électroniques à la fois : appareils photos, lecteurs mp3, enregistreurs vocal, caméra, tablette, liseuse… Les produits à fonction unique deviennent de plus en plus obsolètes, ce qui est une menace pour l’industrie (voir Annexe 6). En revanche les nouveaux produits tels que les smartphones apportent de nouvelles opportunités aux

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Page 8 sur 40 SMIB 2013 - 2014 entreprises du secteur et peuvent leur permettre de prendre le « first move advantage », ou l’avantage du premier entrant.

2. Des acteurs essentiellement asiatiques

L’industrie est composée de nombreux acteurs, aux stratégies très diverses. Outre Samsung et Apple, qui dominent l’industrie avec chacun plus du double des ventes du 3e acteur Sony en produits électroniques de grande consommation, il existe différents acteurs, tous asiatiques :

L’entreprise japonaise Sony a été fondée en 1946 et est à l’origine du premier baladeur cassette et de la première radio nipponne. Aujourd’hui l’entreprise s’est recentrée sur 4 business qui sont l’Electronique, l’Image (téléviseurs et production de films), la Musique (MP3, casques..) et les Produits Financiers. En 2011, l’entreprise a enregistré une perte de 7.38 milliards suite aux catastrophes naturelles successives au Japon et en Asie du Sud Est ainsi qu’au lent recouvrement des pays développés après la crise économique. Cela a entrainé une restructuration massive et un changement de stratégie en faveur d’une meilleure efficacité des opérations.

Panasonic est une entreprise Japonaise fondée en 1918 sous le nom de Mastushita Electric Industrial Co. Initialement implantée sur le marché de la ventilation et des prises électriques, c’est aujourd’hui un fabricant majeur de produits électriques et électroniques. Son chiffre d’affaire était de 70.62 milliards d’euros en 2011, et sa marge opérationnelle de -10.4%. Ces résultats négatifs sont dus en grande partie aux événements climatiques au Japon en 2011. Présent notamment sur les segments des ordinateurs, caméras téléviseurs et tablettes, le groupe s’est en revanche retiré du marché des smartphones en 2013, du moins sur les marchés étrangers, suite à des résultats en constante baisse sur son modèle Eluga.

L’entreprise nipponne Toshiba fut créée en 1875 et comprends 5 business units qui sont : les Produits Digitaux (télévisions, ordinateurs, tablettes..), les Composants Electroniques (semi- conducteurs), les Infrastructures (démarreurs, variateurs de vitesse..), l’Electroménager et la dernière appelée Autres. En 2011 son Chiffre d’Affaires était de 54.90 milliards d’euros et sa marge opérationnelle de 3.4%. Le groupe a souffert quelque peu des événements climatiques en 2011 mais conserve une marge positive contrairement à certains de ses concurrents, notamment grâce à sa business unit Infrastructure et à ses performances dans les pays émergents.

LG Electronics a débuté en 1958 en produisant des téléviseurs, des machines à laver, réfrigérateurs et climatiseurs ainsi que les premières radios coréennes. En 1995, le groupe rachète le fabricant Américain de radios et de télévisions Zenith et 5 ans plus tard, se lance dans une joint- venture avec Philips concernant les téléviseurs LCD. Aujourd’hui cette entité appelée LG Display fabrique le plus grand nombre d’écrans LCD au monde. En 2010 LG a été le premier à lancer la télévision full LED 3D. Le groupe est le deuxième plus gros producteur de téléviseurs au monde et le cinquième plus gros producteur de téléphones portables. En 2011 ses ventes étaient de 35.16 milliards tous produits confondus et sa marge de 0,5%. Le segment communication (regroupant la

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Page 9 sur 40 SMIB 2013 - 2014 téléphonie) représente 23,5% des ventes de LG qui rencontre dans difficultés à s’aligner sur les leaders des smartphones que sont Apple et Samsung.

Canon est une entreprise japonaise qui a débuté en 1935 en tant que fabriquant d’appareils photographiques de haute qualité. Aujourd’hui Canon a diversifié son marché et, outre les caméras et appareils photos, fabrique également des imprimantes lasers et des photocopieuses. Son chiffre d’affaires était de 32,02 milliards d’euros en 2011, et sa marge de 7,0%. 53% de ses ventes proviennent du matériel de bureau 37% des ventes à la personne et 10% des ventes en industrie.

Sharp est une entreprise japonaise créé en 1912 qui commercialise des produits et composants électroniques, particulièrement des téléviseurs LCD et des composants LCD. Aujourd’hui, outre sa gamme audiovisuelle, le groupe propose des produits à la pointe de la technologie concernant l’environnement et l’efficacité énergétique, notamment parmi les climatiseurs ou les panneaux solaires. En 2011, son chiffre d’affaires était de 22,10 milliards d’euros et sa marge opérationnelle de -1,5%.

Fujifilm est une entreprise nipponne créée en 1934 et initiée par le gouvernement dans le but d’établir une industrie photographique au Japon. Au fil des ans, l’entreprise a évolué et est devenue spécialiste en image, information et solutions bureautiques, avec en 1962 une joint-venture avec l’anglais Xerox, spécialiste en imprimerie et services bureautique. Aujourd’hui la business unit Solutions bureautiques occupe la plus large part de marché du groupe avec 45% des ventes. En 2011 le chiffre d’affaire du groupe était de 16.75 milliards d’euros avec une marge opérationnelle de 2.4%.

TCL est une entreprise contrôlée et détenue par l’Etat Chinois qui a été fondée en 1981 afin d’approvisionner le marché chinois en téléphones. L’entreprise comprend aujourd’hui 3 divisions (TCL Corporation, TCL Multimédia Technology Holdings, et TCL Communication Technology Holding) et son principal marché est devenu celui des télévisions (86% des ventes). Elle est classée numéro cinq mondial en téléviseurs LCD. Ses ventes étaient de 70.62 milliards en 2011 et sa marge opérationnelle de -10,4%, due à un effondrement des ventes de téléviseurs à l’étranger depuis 2010.

Nous allons voir que Samsung et Apple ont su tirer leur épingle du jeu et restent parmi les rares entreprises réellement profitables du secteur. Apple, grâce à sa très forte notoriété et la loyauté de ses consommateurs « Apple Addict », a réussi à apporter une expérience complète dominée par l’innovation, tandis que Samsung a bénéficié d’une rapide et proactive capitalisation sur le segment du Smartphone.

3. Les géants japonais déclinent au profit d’autres pays asiatiques

Sur les 10 entreprises les plus importantes du secteur, 9 sont des entreprises asiatiques : les traditionnels géants japonais (Toshiba, Canon, Sony, Sharp, Panasonic, Fujifilm) les nouvellement dominantes firmes sud coréennes (Samsung et LG), et le chinois (TCL), capables de capitaliser sur leur main d’œuvre à bas coût et sur leur marché en pleine expansion. Seul l’américaine Apple.Inc, en première position en termes de marge opérationnelle permet au pays occidentaux de figurer au classement (voir annexe 5).

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Page 10 sur 40 SMIB 2013 - 2014 En 2000, Les Etats Unis et le Japon étaient les plus grands exportateurs de biens électroniques. Dix ans plus tard, en 2010, les 2 nations sont les seules à observer un déclin dans leurs exportations, au profit de marchés émergents en Asie principalement (La Chine en premier, suivi de la Corée du Sud, Taiwan, La Malaisie...)

4. Une forte demande

La croissance du PIB mondial a ralenti depuis 2010, laissant craindre un ralentissement des ventes pour les entreprises de biens électroniques. Néanmoins, en 2013, la croissance est repartie à +0.3%. En dépit de ces ralentissements, le marché devrait continuer à croitre dans les prochaines années, notamment grâce à la croissance des marchés émergents. En 2011, le marché de l’électronique représentait 2 151,3 milliards d’euros.

La demande globale en produits électroniques est en constante augmentation et continuera d’augmenter durant les prochaines années, et ce en dépit des challenges économiques actuels et de la crise, qui touche toujours l’Europe. L’état actuel du marché fait qu’il y a actuellement deux types de tendances qui se dégagent suivant les régions du globe. La première tendance est que les ventes de biens électroniques dans les pays en développement sont en forte progression. Cela est dû, d’une part à l’amélioration des revenus et du niveau de vie dans les pays émergents (la croissance prévisionnelle du PIB des pays d’Asie, Afrique et Amérique Latine est attendue comme la plus forte), et d’autre part à la forte croissance de la population dans ces pays, et donc à l’émergence d’une large classe moyenne désireuse de consommer. Dans ces pays, les achats sont souvent des premiers achats car les foyers ne sont pas encore équipés, ce qui explique la forte demande et la croissance dans ces régions. D’autre part, les prix de plus en plus bas dans l’industrie favorisent les acquisitions.

L’autre tendance observée est un essoufflement des ventes au niveau des pays développés, qui semblent incapables de sortir de la crise économique et du chômage. Les ventes restent positives, mais le marché est devenu mature et les foyers sont presque tous déjà équipés. Les achats concernent des renouvellements de produits et sont fortement liés au statut social et à la volonté de posséder le dernier modèle d’un bien. Même si les pays développés génèrent de nombreux bénéfices, les ventes sur les marchés émergents devraient bientôt surpasser celles des marchés matures, en déclin.

5. Une forte compétition sur le marché et des prix tirés vers le bas

Les groupes de produits électroniques génèrent peu de profits car la compétition est intense et le marché pousse constamment les entreprises à innover, à réduire les prix et à réinventer des stratégies marketing uniques. C’est pourquoi il y a de nombreux coûts pour parvenir à délivrer une offre crédible et durable avec succès. La plupart des groupes ont une faible marge (entre 0 et 5%) et génèrent leurs profits uniquement en maintenant un volume de vente élevé.

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Page 11 sur 40 SMIB 2013 - 2014 La plupart des marchés sont saturés, étant donné que les foyers possèdent déjà tous les types de produits électroniques possibles et par conséquent, la majorité des ventes consistent en un remplacement d’anciens produits. Avec la crise, il devient de plus en plus dur d’augmenter le volume de vente grâce à l’innovation plutôt que grâce à des prix plus compétitifs.

a) Une compétition stimulée par des prix de plus en plus bas

Les prix sur le marché de l’électronique sont de plus en plus bas. En effet l’augmentation du nombre de concurrents sur le marché ainsi que les économies d’échelles et les diminutions des coûts pour certains acteurs du marché tirent les prix à la baisse.

D’autre part, les prix des biens électroniques sont, par nature sur une pente descendante à partir du moment où le produit est mis sur le marché. En effet les prix des biens électroniques sont fortement corrélés à la technologie et, dans ce marché, l’obsolescence des produits est rapide tout comme le taux de remplacement est élevé. Cela est particulièrement vrai pour les smartphones et dans les pays développés. Du moment où l’Iphone 5 et le Samsung Galaxy S4 sont sortis, les consommateurs s’attendent à voir la prochaine version, technologiquement supérieure, arriver d’ici un an et le prix ne peut que chuter jusqu’à la sortie du prochain modèle.

Les prix sont donc soumis à une très forte pression sur le marché. C’est pourquoi, même si les entreprises du secteur parviennent à augmenter leurs ventes, le chiffre d’affaires, lui, n’augmente pas de manière proportionnelle. Afin de maintenir des volumes de vente toujours plus importants, les entreprises doivent s’assurer de proposer des produits à la pointe de l’innovation et sont contraintes d’appliquer une politique de prix agressive.

b) Le rôle des gouvernements dans la compétition

Les gouvernements jouent également un rôle important dans la compétition en supportant les entreprises de leur propre pays. Ainsi, le gouvernement japonais a fait bénéficier Toshiba de fonds lui permettant de contrer l’appréciation du yen décidée par la Banque Centrale Japonaise. Ces fonds ont permis à l’entreprise nippone de réaliser des fusions acquisitions avec des fonds gouvernementaux et des banques japonaises privées. Le gouvernement japonais a également soutenu un fond d’investissement afin que Sony et Toshiba puissent fusionner leurs entités LCD. Au regard des échanges entre nations, les droits de douane élevés et les accords commerciaux jouent un rôle considérable dans la concurrence. Fin 2011 par exemple, la Corée du Sud et les Etats Unis, patries de Samsung et Apple, ont signé un accord commercial afin d’éliminer les droits de douane sur plus de 6000 produits électroniques, dont les appareils électroniques grand public. Nous verrons par la suite que les gouvernements américains et coréens jouent eux aussi un grand rôle dans les relations entre Samsung et Apple et la guerre économique que se livrent les deux firmes.

Face aux entreprises dominantes que sont Samsung et Apple, les entreprises restantes se livrent une compétition acharnée. La différentiation produit est limité mais l’on voit de plus en plus

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Page 12 sur 40 SMIB 2013 - 2014 apparaitre une certaine forme de spécialisation au sein de l’industrie et une concentration sur certains produits plus profitables. En effet, l’objectifs majeur des entreprises est d’augmenter leurs marges afin d’assurer une croissance à long terme. Néanmoins, ces dernières pourraient aussi profiter du lourd combat que se livrent les géants coréen et américain

B. Les procès et décisions juridiques

1. Le cadre des procès

La première plainte d’une longue série mondiale à été déposée par les avocats d’Apple, le 15 Avril 2011 auprès de la cour de Californie. Le recourt avait pour motif (traduit de l’original) « Plainte pour violation de brevet, fausse désignation d’origine fédérale, compétition déloyale, violation fédérale des droit de la marque, compétition déloyale au niveau fédérale et enrichissement injuste ».

Il faut noter, avant d’étudier les événements clefs des affrontements qu’aujourd’hui, en 2014, la bataille n’est toujours pas finie et aucune date de fin n’a été envisagée.

La plainte en elle-même se séparait en 13 réclamations, sur des sujets divers et variés :

- Réclamation 1 : Violation des formes générale des emballages, des logiciels, des produits en eux-mêmes

- Réclamation 2 : Violation des formes des appareils avec des bords arrondis, bords argent, un bouton central avec un rectangle gris.

- Réclamation 3 : Violation des formes et images des icones

- Réclamation 4 : Violation des formes en général provenant des outils Itunes - Réclamation 5 : Pratiques non équitables du commerce sous l’état de Californie - Réclamation 6 : Enrichissement injuste.

- Réclamation 7 : Violation des brevets de forme

- Réclamation 8 : Violation du brevet 6,593,002 concernant l’affichage des logiciels.

- Réclamation 9 : Violation du brevet 7,469,381 concernant le mode de défilement de l’affichage

- Réclamation 10 : Violation du brevet 7,669,134 concernant l’affichage des messages arrivant.

- Réclamation 11 : Violation du brevet 7,812,828 concernant la multi touche sur un écran.

- Réclamation 12 : Violation du brevet 7,844,915 concernant le mode de défilement de l’affichage, à plusieurs doigts.

- Réclamation 13 : Violation du brevet 7,853,891 concernant l’apparitions d’information sur l’écran initial puis sa disparition (ex : augmentation/diminution du volume).

2. Aux Etats-Unis

La première décision prise en décembre 2011 par la juge de Californie Lucy Koh, a été, en attente du procès, de donner raison à Apple mais de ne pas retirer de la vente les produits. Celle-ci

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Page 13 sur 40 SMIB 2013 - 2014 estimait que les tablettes et téléphones de Samsung ne portaient pas atteinte aux ventes du géant américain.

En juin 2012, la juge de San Jose a déclaré que les designs de la Galaxy Tab 10.1 de Samsung avaient été copiés sur celui de l’iPad. Par conséquent, elle demande le retrait à la vente de toutes les tablettes. Trois jours plus tard, c’est autour d’un modèle d’une autre ligne de produits Samsung d’être bloquée : le Samsung Galaxy Nexus.

Le 24 août 2012, après plusieurs jours de témoignages et d’affrontements, la juge Lucy Koh rend son verdict en faveur d’Apple. Samsung est reconnu coupable sur la majorité des 600 sujets traités. Parmi ces derniers, David LEGRAND explique dans l’article "Procès Apple / Samsung : Plus D'un Milliard De Dollars à Payer Pour Samsung." Du 25 août 2012 que le groupe est condamné pour copie des logiciels « pinch and zoom (étirer et zoomer) et tap to zoom (taper pour zoomer)... » ainsi que pour copie des designs de téléphone. La décision prononcée à l’encontre du groupe Sud-Coréen place l’amende à 1,049 milliard de dollars.

Après sa victoire, Apple lance le 27 août une demande de retrait définitif de 8 produits Samsung ayant violés les brevets (voir ci-dessous). Cette demande sera acceptée en Septembre par la juge durant une audition, uniquement si Apple arrive à prouver qu’ils ont eu un réel impact sur ses ventes.

Le 19 novembre 2013, un nouveau procès a démarré suite à l’appel effectué par Samsung et du à la mauvaise estimation de l’amende infligée à Samsung. Alors que cette amende a été rabaissée à 640 millions de dollars précédemment, le nouveau procès de novembre rallongea l’amende Samsung de 290 millions3, rapprochant de nouveau le total de l’amende du milliard de dollars.

La situation en 2014 : fatigués de cette bataille sans fin aux Etats-Unis et poussés par la juge Koh, les deux PDG ont décidés de se réunir pour la troisième fois à la même table4 (les premières fois étant le 23 juillet et le 15 août 2012 sur ordre de la cours de justice). En effet, un meeting entre Tim COOK (Apple Inc.) et Oh-Hyun KWON (Samsung Electronics) à été préparé le 6 janvier 2014 par leurs

3 Hermann, Vincent. "Samsung Devra Payer 290 Millions De Dollars Supplémentaires à Apple." PC INpact. N.p., 22 Nov. 2013. Web. 16 Feb. 2014.

4 Chan Edwin. "Apple, Samsung CEOs Agree to Mediation in U.S. Patent Fight." Reuters. Thomson Reuters, 09 Jan. 2014. Web. 16 Feb. 2014.

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Page 14 sur 40 SMIB 2013 - 2014 avocats respectifs. Cette dernière médiation a de nouveau échoué et les deux concurrents sont de retours devant la cour californienne. Le dernier rebondissement est l’accusation, le 5 mars dernier, de Samsung contre Apple pour avoir à son tour laissé fuir des informations confidentielles.

3. En Europe

En Allemagne, c’est encore Apple qui gagne le procès de Düsseldorf en 2011 et en obtenant le retrait des tablettes Samsung sur l’Europe entière. Puis, après un appel évoquant l’outrepassement de la juridiction allemande, l’interdiction à été limité au marché local5. La tablette Galaxy Tab 10.1 ainsi que la Galaxy Tab 7.7 se rapprochant trop du design de l’iPad, Samsung a été accusé en Août, puis de nouveau en Septembre lors de l’appel, de violation de la propriété intellectuelle. Le 16 novembre, grâce à un changement de design et une modification du logiciel, Samsung revient avec sa Galaxy Tab 10.1N. Cette dernière se fait malmenée dès le 29 novembre, suite à une demande de retrait de la part d’Apple. Le 24 juillet 2012, la décision finale est prononcée par la Haute Cour de Düsseldorf : la tablette 7.7 restera bannie en Europe mais pas la 10.1N

Au Pays-Bas, même si deux modèles coréens ont failli être bannis, après une légère modification de logiciel, c’est le géant Apple qui a été condamné à verser une amende à Samsung. En effet, après une plainte déposée en mars 2009 par l’américain, le tribunal n’a détecté aucune violation aux brevets portant sur les logiciels utilisés par Apple. Le tribunal a même contraint Apple à payer les frais de justice de Samsung, s’élevant à la somme symbolique de 324 000 euros6.

Cette situation est plus générale en Europe, en effet, la décision a été la même pour l’Angleterre. Le 18 octobre 2012 : le tribunal de Londres a rejeté pour la seconde fois (la première étant en juillet) la demande d’Apple. Selon le juge Briss, de la Haute Cour d’Appel de Londres, la tablette Samsung tab 10.1 « n'a pas la même simplicité raffinée et extrême qui est intrinsèque au design d'Apple. Elle n'est pas assez cool »7. Par conséquent, il n’y a eu, à ses yeux aucune violation des brevets concernant le design des tablettes. La cour a même contraint Apple à rembourser les frais légaux de Samsung et à publier un double communiqué expliquant que Samsung ne violait aucun brevet de design.

4. Et dans les autres pays

Au Japon tout d’abord, après une plainte de la société américaine, le tribunal a rendu son verdict en août 2012 avec le rejet de la plainte contre Samsung pour violation de brevets concernant les techniques de transferts de fichiers. Le tribunal de Tokyo a y compris condamné Apple à payer les frais de justice de son concurrent8.

En Corée du Sud, c’est une décision plus que surprenante qui a été rendue en août 2012. En effet, le tribunal a reconnu chacune des deux entreprises coupables de violation de brevets envers

5 RFI. "Apple Gagne Son Procès Contre Samsung En Allemagne." RFI. N.p., 10 Sept. 2009. Web. 16 Feb. 2014.

6 AFP. "Pays-Bas: Samsung Gagne Contre Apple." Le Figaro. N.p., 24 Oct. 2012. Web. 16 Feb. 2014.

7 "Guerre Des Brevets: Apple De Nouveau Débouté Contre Samsung." L’expansion.com. AFP, 18 Oct. 2012.

Web. 16 Feb. 2014.

8 "Apple-Samsung: Apple Débouté De Sa Plainte Au Japon." L'expansion.com. AFP, 31 Aug. 2012. Web. 16 Feb.

2014.

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Page 15 sur 40 SMIB 2013 - 2014 l’autre. Apple a été contraint de verser 28 000 euros à Samsung pour violation de normes de télécommunications. Samsung, de son coté a été dans l’obligation de verser 17 500 euros à Apple pour la violation des brevets d’interface utilisateur. Ajouté à cela, selon l’AFP dans un communiqué du 24 août 2012, les deux constructeurs ont du retirer de la vente leurs produits mis en cause dans le procès : iPhone 3GS, iPhone 4, iPad 1 et iPad 2, Galaxy S, Galaxy S2, Nexus et Galaxy 10.19.

En Australie, c’est encore une fois Apple qui lance le premier procès concernant le design de la Galaxy Tab 10.1, ce qui entraine le retrait des tablettes sur le marché dès septembre 2011. Le mois suivant, Samsung obtient le droit de revenir sur le marché mais la cour revient sur sa décision en décembre ; remettant en vigueur l’interdiction de vente afin d’entendre les nouveaux arguments d’Apple.

Finalement, l’Américain perdit son appel et la tablette revint à la vente le 8 décembre 2011 après 2 mois d’absence.

5. Les procès, un moyen de gagner du terrain… pour tous.

Les deux constructeurs ont essayé de tirer profit des procès chacun à leur manière. La plus flagrante à été la demande d’observation des plans et codes de l’adversaire. Pendant le procès entre Samsung et Apple, de nombreuses demandes ont été faites, majoritairement par Samsung, afin de pouvoir observer les plans des futurs appareils.

Le 1er novembre 2011, Samsung a présenté une requête auprès d’Annabelle Bennett (cour fédérale de justice australienne) afin d’avoir accès aux codes utilisés dans certains composants de l’iPhone 4S dans le but de pouvoir prouver la non violation de ces derniers. Dans la semaine suivante, Apple s’est vu contraint de fournir aux avocats de Samsung un échantillon du 4S.

Une demande similaire avait été effectuée pour les iPad 3 et iPhone 5 le 28 mai 2011. Cette dernière, qui avait été refusée, avait encore une fois pour but d’étudier les composants des appareils. Cette demande avait été faite en réponse de la condamnation de Samsung à montrer ses Galaxy Tab 10.1, 8.9, Galaxy S II, Infuse 4G et le Droid Charge afin de voir si ces produits rentraient ou non dans le cadre des poursuites.

Même si la théorie veut que seuls les avocats des deux entreprises soient habilités à voir les produits et non leurs clients, le risque de fuite de certaines informations lors du procès est élevé et chaque entreprise essaye d’en tirer profit. En Novembre 2012, Samsung et ses avocats ont d’ailleurs été poursuivis mais non condamnés pour avoir laissé fuiter des documents secrets fournis par Apple.

La seconde méthode à été l’utilisation du procès contre son adversaire. En effet, Samsung, suite au blocage temporaire de sa Galaxie Tab en Australie, a utilisé l’interdiction comme un

9 AFP. "Guerre Des Brevets: La Corée Du Sud Condamne Apple... Et Samsung." L'expansion.com. AFP, 24 Aug.

2012. Web. 16 Feb. 2014.

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Page 16 sur 40 SMIB 2013 - 2014 avantage concurrentiel grâce à une forte communication avec le slogan : « La tablette qu’Apple à essayé de stopper ». (voir ci-contre la photo du magazine The Verge du 16 décembre 2011 dans l’article « Samsung Galaxy Tab 10.1 is 'the tablet Apple tried to stop' in Australia »).

De même, selon le spécialiste Florian Mueller, Apple a profité du potentiel futur blocage aux Etats- Unis pour envoyer un courrier aux revendeurs, avant même l’annonce du blocage officiel, afin de leurs dire de ne plus vendre aucun de leurs produits Samsung, y compris ceux composant déjà leurs stocks. Cette action avait pour but de permettre à Apple de bloquer totalement les ventes de ses concurrents grâce à une forte pression sur les revendeurs (voir Annexe 8).

Enfin, il faut souligner qu’il n’y a pas qu’Apple et Samsung qui profitent de ce combat. Lors du procès tenu le 31 juillet 2012 en Californie, plus de 40 prototypes Apple ont été rendus publics. Plus tard, le 09 août 2012, ce sont les chiffres de ventes aux Etats-Unis des deux entreprises qui ont été révélés. Pour Samsung, les chiffres s’étendent même sur les années 2010-2011 et sur la première partie de 2012. Un exemple des chiffres divulgués peut-être celui concernant Apple, communiqué par le magazine The Verge et couvrant les 3 lignes de produits iPad, iPhone et iPod (Annexe 9).

III. Outils de la guerre économique A. Normatif

Le cadre normatif de cet affrontement est basé sur deux types de brevets, d’un côté les

« design patents », de l’autre les « utility patents » et les offres FRAND. Les « design patents » font référence à l’apparence des produits alors que les « utility patents » font eux référence à leur fonctionnement.

La licence FRAND (Fair, Reasonable and Non-discriminatory) fait référence à un brevet jugé essentiel pour l’industrie en question et exige au détenteur de celui-ci d’accorder des licences d’utilisation pour un prix raisonnable.

Les « design and utility patents » sont essentiels dans cet affrontement surtout pour Apple comme le souligne maitre Bourguet, avocat spécialisé en propriété intellectuelle et nouvelles technologies. Selon lui « les litiges viennent pour la majeure partie des Etats-Unis. Les litiges en contrefaçons de brevet portent en priorité sur les designs et utility models ».

Apple base son développement sur le design et les brevets protégeant celui-ci même si cette stratégie de la firme de Cupertino ne peut s’appliquer sur tous les continents. En effet, en Europe,

« on ne peut pas réellement protéger le design par brevet », Apple est donc forcé de partir sur d’autres brevets ou sur d’autres axes de défense pour mettre à mal Samsung. Apple doit trouver des vraies industries et technologies pour envisager des attaques en justice sur le continent européen alors qu’aux Etats-Unis, il est très facile d’obtenir des brevets de design & utility models et ainsi d’entreprendre des actions en justice.

L’Europe ne reconnaît pas aujourd’hui la protection par brevet de tout ce qui concerne l’esthétique, le design ou encore l’interface. Par conséquent, Apple ne peut pas assigner en justice

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Page 17 sur 40 SMIB 2013 - 2014 sur les « dessins et modèles » mais plutôt sur les brevets protégeant les éléments technologiques et techniques, à savoir, sur un composant, un processus technologique ou un composant innovant. Il y a donc vraiment un choix stratégique différent entre déposer un brevet et mener des poursuites aux Etats-Unis ou en Europe. De ce fait, on ne retrouvera pas les mêmes litiges et il est normal qu’aux Etats-Unis il y ait beaucoup de dossiers liés aux design patents.

Les cultures américaine et asiatique sont bien plus expansionnistes et protectrices concernant les brevets et les utilisent donc abondamment. En Europe, les états appliquent une politique bien plus stricte en matière de brevets.

Mais cet affrontement a pour origine une culture d’entreprise bien différente, Samsung n’a pas du tout une culture judiciaire alors qu’Apple en a une très développée. Apple a une culture offensive, Samsung en a une protectionniste et défensive. Comme nous l’avons vu précédemment, ce ne sont pas les Coréens qui sont à l’origine des procédures mais bien l’entreprise américaine. C’est donc deux cultures différentes qui s’opposent et cela se retrouve en termes d’actions en justice. Les brevets de design et les utilities model représentent effectivement la majeure partie des actifs d’Apple, que l’entreprise fait valoir dans les pays anglo-saxons car c’est cela qui caractérise finalement l’univers Apple. Steve Jobs s’est d’ailleurs basé sur des brevets de design avant de se baser sur des brevets technologiques, cela représente la valeur d’Apple. Néanmoins, en raison de la non protection du design en Europe, les brevets qui y sont déposés sont beaucoup plus technologiques et industriels, basés sur des composants et sur des processus technologiques propres à certains Smartphones ou tablettes. Apple est dans ce cas obligé de changer de stratégie car le droit européen ne leur laisse pas le choix.

Du côté de Samsung, le blocage n’est pas uniquement sur les normes FRAND car celles-ci traitent de brevets essentiels et la guerre entre les deux groupes ne porte pas que sur ces derniers.

Comme l’explique maitre Bourguet lors de notre interview le 17 décembre 2013 : « les brevets essentiels désignent les brevets inclus dans une norme technologique validée, par exemple la norme ISO, la norme MPEG ou autre et tous les brevets ne sont pas forcément inclus dans une norme censée faciliter la vie du consommateur. ».

Il y a des brevets non essentiels, qui sont également à la base de litiges entre Apple et Samsung et d’autres fabricants comme HTC, utilisant le système d’exploitation Android. Le blocage sur les brevets essentiels, contrairement aux autres, se passe généralement au niveau des conditions FRAND. Samsung comme Apple ont fait l’expérience vis-à-vis de leur négociation de licences qu’ils ont pu passer ou que leurs concurrents ont pu essayer de leur imposer (car cela marche dans les deux sens), qu’il n’y a pas de définition précise des offres FRAND.

Même si les organismes régulateurs et normatifs posent des jalons et des critères pour que les conditions de licence soient le plus « FRAND » possible, personne ne sait vraiment qu’elle est sa signification, à moins de faire une analyse de marché très précise pour savoir dans quel cadre nous nous situons. Le blocage se trouve généralement à ce niveau-là.

Ainsi les « design & utility patents » sont bien plus préjudiciables pour Samsung que ne le sont les offres FRAND pour Apple même si Apple n’est rentré sur le marché des mobiles qu’en janvier 2007 avec son iPhone alors que Samsung a mis au point le Smartphone (Wireless Internet Phone) en 1999. Les entreprises, comme les tribunaux, ont beaucoup plus d’expérience dans la gestion de

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Page 18 sur 40 SMIB 2013 - 2014 contentieux de brevets que dans la gestion de contentieux FRAND. Pour les contentieux FRAND, les tribunaux n’ont pas de repère, de réglementation suffisamment précise pour avoir une visibilité.

La propriété intellectuelle dans cet affrontement est moins claire pour les brevets de Samsung (sur la 3G+ et celui relatif à la façon dont les téléphones se connectent à internet) que ceux d’Apple liés aux design. En effet, la technologie 3G+ présente un certain nombre de brevets et Samsung n’est pas la seule entreprise à en posséder sur cette technologie, il y a donc une concurrence.

Historiquement, tout le monde essaye de copier le design d’Apple, leurs produits étant fluides, ils sont facilement commercialisables. Cela fait le succès des Smartphones, des tablettes et des ordinateurs portables d’Apple. Tout le monde s’en inspire comme en 1990, période où tout le monde copiait le design Nokia qui était alors le plus fluide et le plus simple. Comme tout le monde le prenait pour modèle, la valeur du design d’Apple est nettement supérieure à la valeur des brevets concurrencés et concurrentiels sur la 3G.

Une des problématiques liée à ces normes est la diffusion de l’innovation qui peut théoriquement, être réduite à néant avec le nombre de brevets exorbitant pour un seul et même produit à savoir, parfois plusieurs centaines pour un Smartphone. Un brevet impose une licence et s’il y a trois cent brevets pour un Smartphone, il faut trois cent licences. Mais c’est pour cela qu’existent les normes technologiques.

Il y a des organismes indépendants ou normatifs en charge d’élaborer les normes (par exemple ISO). Ils sont censés faire un choix entre plusieurs technologies concurrentes et sélectionner celle qui sera favorisée pour être mise sur le marché au bénéfice du consommateur. Celui-ci n’aura, par conséquent, qu’à choisir entre une ou deux technologies. Aujourd’hui pour le son, la norme MPEG fait figure de référence et donc désormais, pour chaque produit Apple ou Android, les entreprises doivent s’adapter à cette norme. Le bénéfice du consommateur est la priorité. La fluidité, la simplicité, la chaine de droit la plus rapide et simple possible pour aboutir à la mise en production du produit et à la vente de celui-ci sur le marché sont les éléments pris en compte pour établir la technologie qui définira la norme. Malgré l’engagement des principaux groupes électroniques (Apple, Samsung, HTC), les négociations bloquent toujours au niveau des licences FRAND.

En France, nous sommes en droit de nous demander : l’obligation de conclure des licences FRAND dans l’esprit des normes que s’imposent les membres des organismes normatifs (les titulaires de brevets qui ont accepté de mettre leurs brevets dans la norme et de donner des licences simples pour que leurs produits accèdent au marché rapidement) est-elle une obligation de résultats (au détriment d’Apple)? C’est-à dire, qu’ « à charge » à celui qui propose la licence, qu’elle soit FRAND ou pas, les autres opérateurs peuvent se dispenser de cette licence pour créer le produit avec la norme en question ou est-ce juste une obligation de moyens (au détriment de Samsung)? Cela voudrait dire que c’est au bénéfice du titulaire de droit et que le licencié doit trouver un accord avec le titulaire de brevet. S’ils ne signent pas de contrat avec une licence FRAND, ils ne pourront rien commercialiser.

Dans ce cas, tout produit serait contrefaisant.

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B. Juridique

Du point de vue juridique, l’affrontement est très différent en fonction des pays où ont lieu les procès. « Les pratiques judiciaires au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou en Asie sont différentes. En Europe où existe le droit civil, on retrouve également des différences entre le droit allemand et le droit français » nous explique maitre Bourguet.

Même si nous pouvons avoir l’impression que le droit est assez harmonisé ou a les mêmes bases, chaque pays conserve sa totale liberté pour engager les procédures adéquates. Au final, dans le cadre précis de la guerre de brevets entre Apple et Samsung, on retrouve une myriade de décisions différentes. Il est très difficile pour Apple ou Samsung (qui ne possède pas forcément une culture judiciaire), de faire un point stratégique éclairé.

Les deux concurrents savent parfaitement qu’en fonction des pays, il y aura des répercussions différentes. Ils font ce qu’on appelle du forum shopping, c’est-à-dire qu’ils vont là où ils ont la meilleure visibilité mais encore une fois avec des aléas énormes. Ils ne savent pas vraiment si les Etats-Unis vont juger de la même manière que le Royaume Uni ou l’Inde.

En Europe, Apple ne peut pas avoir la même espérance de gains et de retour judiciaire, en termes de dommages et intérêt qu’elle n’en aurait aux Etats-Unis. Maitre Bourguet nous explique ainsi que :

« le système commercial a beau être mondial, on n’a pas encore un droit mondial uniforme.

Chaque pays est libre d’appliquer le droit comme il l’entend et c’est d’abord la divergence légitime et normale d’une décision entre un pays anglo-saxon et un non anglo-saxon. Un magistrat en Angleterre peut très bien être convaincu d’un élément alors que le magistrat aux Pays-Bas ne le sera pas. Il n’y a aucune obligation légale, pas de convention bilatérale ou quoi que ce soit, qui oblige un magistrat néerlandais à tenir compte de manière obligatoire de ce qu’a pu juger un magistrat anglais. Il y a des échanges au niveau européen pour avoir une certaine logique mais encore une fois il n’y a aucune obligation. Les cultures juridiques sont différentes. La culture britannique est différente de celle continentale (France, Allemagne, Pays-Bas) en matière d’application de protection des brevets, et n’a pas les mêmes finalités ni les mêmes directives. On est encore dans un monde où en termes de droit, les frontières existent et la liberté des juridictions est totale. Au niveau des titulaires de brevets, il est évident qu’ils ne peuvent pas avoir de visibilité. »

Un point important à prendre en compte du point de vue judiciaire est la manière de juger les dommages et intérêts car entre les Etats-Unis et l’Europe, de nombreux éléments diffèrent. Aux Etats-Unis, il existe les dommages et intérêts punitifs. Cela veut dire qu’ils ne sont pas uniquement compensatoires, à savoir, remettre les deux parties dans la situation dans laquelle ils auraient dû se trouver s’il n’y avait pas eu préjudice ; le fautif est puni de manière complètement disproportionnée, sans jalons particuliers. La différence de culture à ce niveau-là est vraiment marquée.

En Europe, le principe punitif n’existe pas, le principe qui s’applique est celui de compensation exacte du préjudice qui a été prouvé, pour remettre les entreprises dans des conditions d’équilibre normal.

La nationalité des jurés peut également jouer un rôle comme nous le confirme maitre Bourguet :

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« Concernant la nationalité des jurés, on peut effectivement se poser la question mais il faut vraiment avoir l’avis d’un avocat américain pour savoir ça. On sait que quand on va aux Etats-Unis ou comme quand on va en Chine, on sera opposé à des magistrats ou des tribunaux et jurés qui ont une vision patriotique des choses qui peut fausser le jugement et surtout en Chine en ce moment. En Europe, nous avons une vision plus liée aux droits de l’Homme, aux protections des libertés en général. Il y a moins de parti pris et il n’y a d’ailleurs pas de jurés donc la question ne se pose pas en Europe. Bien sûr, plus l’enjeu sera important et plus les considérations politiques ou autres feront que le magistrat ne jugera pas forcément en toute indépendance d’esprit total. On imagine bien que si on défend Airbus ou EADS en Europe, inconsciemment le magistrat peut ne pas être totalement indépendant. Mais ce n’est pas aussi déclaré ou réel qu’aux Etats-Unis et encore plus en Chine. On est un peu désavantagé par rapport à ça en tant qu’européen, on n’a pas les mêmes réflexes de défense patriotique et économique en Europe, même si quand on fait du droit c’est l’esprit du droit qui doit être défendu et pas celui économique ».

Comme nous l’avons vu précédemment, dans l’affrontement Apple contre Samsung, les plaintes déposées par Apple ont été bien plus rémunératrices que celles de Samsung avec notamment le procès californien qui aura coûté 900 millions de dollars à Samsung. Mais cela paraît assez logique quand on étudie cette guerre économique car Apple a construit son identité et sa valeur sur le design et l’esthétique. Maitre Bourguet nous explique ainsi que « Jobs avait des prises de participation personnelles essentiellement dans des brevets de design aux Etats-Unis plus que dans des brevets technologiques ou industriels. Il est facile de comprendre que la valeur d’Apple repose essentiellement sur les brevets de design. Aujourd’hui, toutes les entreprises peuvent se disputer la 3G et ce n’est pas ça qui fait la valeur unique d’un groupe comme Apple, c’est plus le design ; La valeur des brevets de design sont beaucoup plus importantes que ceux de projets en terme de valorisation, de défense ou de choix stratégiques. Je pense néanmoins, qu’il peut y avoir des brevets technologiques parfaitement innovants et que cela peut valoir le coup notamment en Europe où les entreprises n’ont pas le choix. ».

Concernant l’affrontement Apple contre Samsung, maitre Bourguet nous a confirmé que la course effrénée aux procès à travers le monde lancée par ces deux entreprises ne pouvait durer éternellement : « ils n’attendront pas d’avoir gagné dans tous les pays où les problèmes se posent pour trouver un accord. A un moment ou à un autre, en terme financier, en termes de risques, en terme stratégique, il y aura une balance qui se fera des intérêts et des risques. D’ailleurs Apple et Samsung se rencontrent régulièrement pour discuter de ces problématiques. Peut-être que le rapport de force n’est pas encore suffisamment clair mais, à mon sens, cela ne pourra que finir par un accord. Je ne vois pas comment ils pourraient supporter des procédures aussi coûteuses et aléatoires pendant des décennies. Si on avait un jugement suivi partout dans le monde, ce serait simple, mais ce n’est pas le cas. Et en plus comme ce n’est jamais la même technologie, le même brevet et jamais le même droit, on ne peut pas faire autant de procédures qu’il n’y a de pays, de technologies et autant de brevets, c’est impossible. ».

Donc, même s’il était impossible de trouver un accord avant d’engager plusieurs procédures à travers le monde, cette situation n’est pas viable indéfiniment pour les deux entreprises d’autant plus qu’Apple est le premier client de Samsung.

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C. Supports gouvernementaux et Influences Etats-Unis / Corée du Sud dans le conflit

Les Etats-Unis et la Corée du Sud sont liés par des accords politiques, militaires et financiers.

Les deux pays entretiennent des relations étroites depuis la fin de la guerre de Corée (L'armistice de Panmunjeom signé en 1953). En effet, avec la menace permanente de la Corée du Nord, la Corée du Sud a plus que jamais besoin du soutien des Etats-Unis pour défendre l’intégrité de son territoire. De plus, les Etats-Unis grâce à leurs bases en Corée du Sud, conserve une position et une influence stratégique dans cette région du globe, notamment pour faire face au développement rapide de la puissance Chinoise. Les deux pays ont donc besoins respectivement l’un de l’autre afin de conserver leurs influences.

Cependant, devant la complexité et les enjeux financiers considérables du conflit entre les deux géants industriels que sont Samsung et Apple, il est logique de se demander si cela pourrait avoir un impact sur les relations entre les deux pays. Il est naturellement difficile de trouver des preuves de l’implication des gouvernements respectifs des deux pays. Toutefois, certaines décisions de justice peuvent nous permettre de comprendre l’implication des deux pays et de leurs gouvernements respectifs dans cette guerre économique.

Il faut d’abord rappeler que Samsung est l’un des plus important chaebol Coréen et que par conséquent son influence dans les cercles économiques et politiques est énorme. Par exemple, une diminution de 5 à 10% des revenus de Samsung pourrait entrainer une chute de la bourse Coréenne allant jusqu’à 50%. L’influence des chaebol est étroitement liée à la vie quotidienne de la Corée du Sud, en effet, des écoles en passant par les appartements, les crédits, les loisirs et même la politique ; tout ou presque est sous influence des chaebol en Corée du Sud. La « famille » Samsung possède de nombreuse connexion dans la classe politique. En effet, l’actuel président du groupe M.

Lee Kun-Hee écopa de 3 ans de prisons avec sursis (pour accusation de fraude fiscale et abus de confiance) mais sera amnistié par le Président de la République (M. Lee Myung-bak, ancien président d’une filiale de Hyundai et ancien Président de Corée du sud). L’actuelle Présidente de la Corée du sud, Mme Park Geun-Hye fera de M. Lee Kun-Hee l’un de ses invités de marque pour son voyage aux Etats-Unis. De plus, le chiffre d’affaire de Samsung est équivalent à un cinquième du produit intérieur brut (PIB) de la Corée.

A la lumière de ces chiffres, il est donc facile de comprendre que la Corée du Sud et Samsung sont interdépendants et donc liés face à la guerre contre Apple.

De son côté, les Etats-Unis ne peuvent rester neutre face à l’attaque de leur champion Apple par Samsung. Même si les tribunaux américains ont dans un premier temps accordés des victoires à Samsung dans certains procès, les politiques (et notamment le président Obama) commencent à intervenir dans le conflit.

En effet, le 3 août 2013, le président Obama a utilisé son droit de véto pour annuler une décision de la Commission américaine du commerce international (ce droit de véto n’avait plus été utilisé depuis 1987 avec le président Ronald Reagan). Par l’utilisation de son véto, le président Obama annule une décision de justice de juin 2013 où la justice américaine avait donnée raison à Samsung sur le fait que certains produits Apple seront interdits d’importation aux Etats-Unis.

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Page 22 sur 40 SMIB 2013 - 2014 La raison officielle invoquée est la préservation de la libre-concurrence, et que l’interdiction de l’importation des produits Apple serait une menace contre la sauvegarde de la concurrence, de l’offre aux consommateurs et plus largement à l’économie du pays.

Paradoxalement à l’annulation de la décision de justice, la Maison-Blanche encourage Samsung à continuer ses démarches contre Apple. De son côté, Séoul, regrette la prise de position du président Obama et dénonce une démarche protectionniste (une manœuvre typique des Etats-Unis).

A la lumière de ces quelques faits, on voit l’influence et l’intervention des deux pays dans la guerre économique que se livre Samsung et Apple. La difficulté des Etats-Unis et de la Corée du Sud est de soutenir leur champion respectif dans la lutte sans pour autant nuire aux relations entre les deux pays.

Le prochain « match » se jouera en Australie où un nouveau procès entre Apple et Samsung vient de s’ouvrir. Samsung accuse en effet l’américain d’influencer les experts australiens chargés de témoigner durant le procès.

IV. L’affrontement entre Apple et Samsung : une attaque contre Google

A. Pourquoi Apple attaque

Au delà de l’affrontement entre Apple et Samsung, l’analyse de la guerre économique entre ces deux géants met en évidence un autre conflit qui s’avère être bien plus délicat et sournois, puisqu’il oppose Apple contre l’américain Google. En effet, il apparaît très clairement que la marque à la pomme se sert de son concurrent Sud Coréen pour attaquer indirectement Google et plus précisément son système d’exploitation destiné aux Smartphones, tablettes et autres terminaux mobiles Android.

Dans un premier temps, il est nécessaire d’étudier les nombreuses raisons pour lesquelles Apple est tenté de combattre son compatriote américain. Tout d’abord, nous pouvons citer la domination de Google au niveau mondial concernant le marché des systèmes d’exploitation sur appareils mobiles. Il est vrai que si l’on observe les ventes mondiales de Smartphones pour le troisième trimestre 2013, Android possède 81,9 % de parts de marché contre 12,1 % pour iOS (système d’exploitation mobile d’Apple). Plus inquiétant pour la marque à la pomme, on peut voir que l’évolution de ses parts de marché est à la baisse, contrairement à celles de Google. En effet, toujours en se basant sur les ventes de Smartphones, si l’on compare les chiffres du troisième trimestre 2013 à ceux de 2012, on remarque qu’Apple a perdu 2,2 % de parts de marché alors que Google en a gagné 9,3 %. Cette tendance a encore été observée très récemment et de manière plus accentuée à propos des ventes de tablettes. Sur l’année 2013, la part de marché d’Apple dans les tablettes s’est effondrée de 16,8 %, passant de 52,8 % à 36%. Du point de vue des systèmes d’exploitation, Apple perd donc sa place de leader pour la concéder à Google car dans leur ensemble, les tablettes équipées d’Android ont gagné 16,1 points pour atteindre 61,9 % des ventes. Finalement, ces chiffres démontrent à Apple que les consommateurs sont de plus en plus séduits par les produits concurrents comme ceux de Samsung ou Lenovo. Ces derniers sont plus abordables financièrement et équipés du système d’exploitation de Google. De plus, sur certains marchés développés, les

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Page 23 sur 40 SMIB 2013 - 2014 tablettes arrivent à maturité et sont remplacées par des machines mi-tablette, mi-ordinateur. Les analystes s’avèrent être très confiants sur le potentiel de croissance de ce segment et Google s’est déjà positionné grâce à ses Chromebook, des mini-PC équipés d’Android. Ainsi, Google constitue une réelle menace pour la future rentabilité d’Apple.

Ensuite, Android dispose d’une position dominante face à iOS concernant le développement d’applications et cette dernière ne cesse de croître. En effet, on compte à l’heure actuelle plus de développeurs utilisant la plateforme de Google (voir graphique ci-dessous) et cette préférence s’accentue au fil du temps. La contribution de ces développeurs constitue une variable importante puisqu’elle va jouer un rôle majeur sur la pérennité d’un système d’exploitation. Il est évident que plus une plateforme disposera de développeurs, plus il y aura d’applications disponibles. Par conséquent plus de consommateurs seront tentés de choisir ce système d’exploitation.

Néanmoins, à ce jour, cet avantage du nombre de développeurs Android ne se traduit pas encore visiblement pour le consommateur. Si nous observons le nombre total d’applications disponibles sur les boutiques en ligne des deux entreprises (AppStore pour Apple et GooglePlay pour Google), nous pouvons voir que les deux concurrents sont au coude à coude et proposent tout deux environ 900 000 applications. De plus, Apple possède l’avantage de la nouveauté puisqu’il s’avère que les nouvelles applications sont presque toujours développées en premier pour les Smartphones à la pomme. La raison principale de ce fait est simple : il apparaît très clairement que les utilisateurs iOS sont moins sensibles au prix des applications et par conséquent plus enclins à procéder à l’achat.

De ce fait, si un développeur veut monétiser rapidement son application, il a intérêt à la mettre en ligne d’abord sur l’AppStore. Une deuxième raison réside dans le fait qu’Android comporte beaucoup

Références

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