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Informé en temps réel de l état du monde, le citoyen français est écartelé entre

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Academic year: 2022

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TRIBUNE n° 385

Éduquer à la défense :

une tâche nécessaire mais difficile

Lieutenant-colonel de l’Armée de l’air. A servi en France et à l’étranger dans le Transport opérationnel, ancien cadre de l’École militaire de l’air et de l’Espace. Actuellement stagiaire de la 20epromotion de l’École de Guerre (« général de La Fayette »).

Cédric Colardelle

I

nformé en temps réel de l’état du monde, le citoyen français est écartelé entre deux aspirations contradictoires. Enfant de la « Patrie des droits de l’homme », il s’indigne face à l’injustice et la violence et exige des dirigeants des réactions fortes et dignes d’une grande puissance militaire. Pourtant, dans le même temps, il peut remettre en cause la nécessité d’une force armée à la hauteur des ambitions d’un État puissant, pourvoyeur de sécurité à l’extérieur, avec les dépenses qui en découlent. De même, alors que les sondages montrent que les Français apprécient tout particulièrement leurs armées, il apparaît dans le même mouvement qu’ils s’éloignent progressivement des questions de défense.

Ce sentiment ambivalent du citoyen français prouve tout l’intérêt d’éduquer à la Défense toutes les classes de la société française par des actions diversifiées, adap- tées et ciblées. Il importe ainsi de bien comprendre les raisons de la fragilité du lien Armée-Nation pour pouvoir mettre en place des opérations d’ampleur et promouvoir ensuite, dans une période économique difficile, des actions individuelles concrètes au cœur de la société.

Un lien fragilisé qui nécessite un soin permanent

Le citoyen français est désormais persuadé qu’il n’y aura plus de guerre à ses frontières, tout au plus des conflits en territoire lointain dont il est parfois diffici le de mesurer les conséquences sur les intérêts français. Les changements géopoli- tiques récents ont en effet rendu les engagements beaucoup moins lisibles : com ment expliquer par exemple que la traque des Talibanen Afghanistan permet de lutter efficacement contre le terrorisme ? Alors que le besoin de pédagogie s’est accru, plusieurs facteurs ont, dans le même temps, et en sens inverse, contribué à distendre le lien Armée-Nation.

Tout d’abord la professionnalisation et la réorganisation territoriale des armées ont progressivement éloigné physiquement le citoyen de l’institution mili- taire. Les casernes et les bases ne « maillent » plus la carte de France. Les forces armées ont par ailleurs dû se recentrer sur leurs missions majeures, y compris sur

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Pour finir, la crise économique et les inéluctables difficultés de la société moderne (précarité de l’emploi, prise de conscience de la détérioration de l’envi- ronnement, individualisme, méfiance à l’égard des institutions…) ont achevé de détourner l’esprit du citoyen des questions de Défense. La sauvegarde des intérêts communs d’un groupe devenu difficilement identifiable laisse alors naturellement la place à un égocentrisme marqué de l’individu.

L’évolution géostratégique des vingt dernières années et les difficultés d’une société occidentale en pleine évolution ont ainsi eu raison de la vigilance du citoyen en matière de Défense. Or « l’adhésion de la nation est la condition de l’efficacité de l’appareil de défense et de sécurité, et de la légitimité des efforts qui lui sont consacrés » (Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale, 2008). Le Livre blanc a mis en exergue la nécessité de développer la résilience de la Nation. En effet, chaque Français doit être sensibilisé sur le rôle qu’il doit tenir pour réduire les risques et faire face aux événements capables de bouleverser la vie quotidienne (actes terroristes, inondations, tremblements de terre…). Pour y parvenir, il convient de faire appel à la valeur républicaine de solidarité et de fraternité qui anime chaque citoyen, à son implication et à son rôle dans le devenir du pays, tout en aiguisant sa capacité à absorber les crises et à réagir *.

* Le Citoyen face aux crises

Dans le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 de la IVeRépublique, il est écrit : « La Nation proclame la solidarité et l’égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales ».

En un mot, il est nécessaire de rééduquer le citoyen à l’esprit de défense.

Grâce à des actions hiérarchisées et volontaristes

Cette prise de conscience ne peut pas être spontanée, car elle repose essen- tiellement sur des actions de formation, de communication et de sensibilisation, et nécessite une réflexion personnelle du citoyen sur l’outil de défense : apprendre et connaître, pour mieux percevoir le sens de l’intérêt commun que représente la défen se de la nation. Pour s’épanouir, l’esprit de défense a ainsi besoin d’une éducation à la citoyenneté et à des valeurs partagées. Il doit mettre en évidence l’appartenance à une

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communauté de solidarité et de destin, aider à la prise de conscience des menaces et faire surgir une culture de défense et de sécurité.

En établissant un parcours de citoyenneté et en mettant en place des pro to coles interministériels (Défense-Éducation nationale du 31 janvier 2007, du 23 septembre 1982, du 25 janvier 1989 et du 11 avril 1995), le gouvernement a certes déjà posé les bases de l’enseignement de la défense et de la promotion de l’es prit de défense. Mais la tâche n’est pas si aisée car les préjugés demeurent. Si le principe même d’une éducation aux valeurs démocratiques est accepté par les enseignants, l’éducation à la défense rencontre parfois quelques difficultés, voire quelques réticences du corps professoral *. Elle reste ainsi souvent trop peu déve- loppée, apparaissant comme diffuse dans un enseignement dont la finalité n’est autre que la construction du citoyen *. Les enseignants, très attachés aux enjeux civiques de l’éducation et aux valeurs de la République, sont pourtant les mieux placés pour semer les graines qui permettraient à l’esprit de défense de croître.

La diminution du temps scolaire et le volume grandissant de connaissances à acquérir, conjugués parfois avec un manque d’implication de la famille, compro- mettent cependant largement cette mission.

TRIBUNE

* Un enseignement dilué et parfois donné avec réticence

Des enseignants s’expriment dans de nombreux forums, dans lesquels ils montrent leur réticence à l’enseignement de la Défense pour des raisons variées (manque de temps, manque de formation, antimilitarisme…).

L’article L. 111-1 du code de l’Éducations indique que, « Outre la transmission des connaissances, la Nation fixe comme mission première à l’école de faire partager aux élèves les valeurs de la République ».

Pour que cette éducation à l’esprit de défense soit le fruit d’un enseigne- ment républicain, il pourrait être pertinent de l’insuffler à tous les niveaux de la société, en commençant en particulier par convaincre nos élites (politiques, scien- tifiques, artistes, sportifs…). Il s’agirait ainsi en premier lieu de renforcer les rela- tions et les partenariats, à l’image du réseau Ader * de l’Armée de l’air, tout en mul- tipliant les actions du trinôme académique ** formé par l’IHEDN, le ministère de l’Éducation nationale et celui de la Défense. L’objectif final serait alors de replacer le militaire au sein du débat public et médiatique.

* Réseau Ader

Placé sous l’autorité du Chef d’état major de l’Armée de l’air, le réseau Ader regroupe des membres de la réserve citoyenne. Ce sont des personnalités de haut niveau dont les parcours professionnels et les qualités humaines leur ont valu d’être admises au sein de la famille des aviateurs.

** Trinômes académiques

Placés sous l’autorité des recteurs, ils ont pour charge de dispenser à l’ensemble des responsables du système éduca- tif un enseignement de défense sous forme de conférences, séminaires, débats et visites d’installations.

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développées.

Mais en développant aussi des actions à la base

Des opérations et manifestations simples et peu coûteuses visant à renfor- cer le lien Armée-Nation et la visibilité des militaires dans la société existent déjà.

Elles sont du reste largement encouragées et suscitées par la haute hiérarchie. Ainsi, chaque année, le Chef d’état-major des armées enjoint chaque militaire à partici- per, dans sa ville ou son village, aux cérémonies du 11 novembre et du 8 mai.

Pour aller plus loin, les forces armées pourraient profiter de chaque occa- sion pour connaître et se faire connaître de la jeunesse en développant des activités ludiques, en favorisant les initiatives locales et en investissant le territoire national dans tous les lieux de rassemblement public : fête foraine, centres commerciaux, plages l’été et villages montagnards l’hiver… La participation des militaires à des défis et compétitions sportives ou relevant de leur domaine de compétence peut également être encouragée et facilitée. En outre, la présentation des métiers de la Défense dans les collèges et lycées ainsi que l’accueil d’étudiants dans les bases et régiments participeraient à ce rapprochement.

Dans cette entreprise, les réservistes constituent sans aucun doute un atout indispensable pour épauler les enseignants et approfondir la relation avec les jeunes, en assurant une information régulière sur les questions de défense.

Inversement, l’influence des stagiaires militaires en scolarité dans les universités et les grandes écoles, puis en stage dans les entreprises, ne doit pas être négligée.

Enfin, il pourrait être envisagé de donner à chaque militaire, dans ses objec- tifs de l’année, le choix d’une action concrète pour développer le lien Armée- Nation. Par exemple, de nombreux militaires sont déjà largement impliqués dans la vie associative et sportive de leur commune; ils pourraient profiter de cette occa- sion pour mettre en avant les valeurs de l’institution.

L’appropriation de l’esprit de défense, la consolidation de la cohésion natio- nale et de la citoyenneté doivent ainsi nécessairement passer par une coopération plus importante encore entre l’Éducation nationale et la Défense. Convaincre les élites, former le corps professoral et conquérir la jeunesse, sont devenus les conditions

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indispensables à l’épanouissement de l’esprit de défense. De son coté, l’institution doit favoriser et encourager les initiatives individuelles en sortant des sentiers battus.

Chaque militaire doit ainsi prendre conscience qu’il représente à son niveau l’insti- tution et contribue à son image et à son rayonnement.

L’objectif paraît certes ambitieux mais il peut être atteint dès lors qu’il réunit tous les acteurs de la Nation.

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